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Accroche : -Jean Gicquel avait qualifié le conseil constitutionnel de “chien de garde de

l’exécutif” lors de sa création en 1958. En effet selon cet auteur, le but initial était de
surveiller le parlement de manière à ce que celui-ci n’empiète pas sur les compétences de
l’exécutif et ainsi garantir un État de droit.
Def des notions : cette notion, selon Hans Kelsen désigne un État dans lequel les normes
juridiques sont hiérarchisées de telles sorte que sa puissance s’en trouve limitée. Afin qu'il
soit effectif, cet État doit être soumis à des règles supérieures qui garantissent les libertés et
les droits des citoyens ainsi qu’à un droit constitutionnel. Ce terme peut être défini comme
le contrôle destiné à préserver la suprématie de la constitution, par un examen de la
conformité des actes juridiques de rang inférieurs, notamment la loi
Cette idée est relativement récente puisqu’elle est apparue en Angleterre au début du XVII s
(lorsque le juge Edward Coke évoque le contrôle de conformités des lois à la Common Law.)
Cependant, c’est aux États-Unis qu’il sera exercé pour la première fois un contrôle de
conformité de la loi à la constitution par la cour suprême, lors du procès Marbury vs
Madison. Aujourd'hui le contrôle de constitutionnalité apparaît comme une procédure
indispensable au bon fonctionnement des institutions et surtout nécessaire pour contrôler
la conformité avec la Constitution.
Par conséquent, le contrôle de constitutionnalité permet-il nécessairement de garantir l’état
de droit ?

Nous verrons dans un premier temps que le contrôle de constitutionnalité peut constituer
un outil particulièrement efficace permettant de garantir, voire d’améliorer l’État de droit.
Dans un second temps, nous verrons cependant que le contrôle de constitutionnalité
présente certaines limites

I. Le contrôle de constitutionnalité : un outil en principe


particulièrement efficace pour garantir l’État de droit
Chapeau : Nous verrons tout d’abord que le contrôle de constitutionnalité est nécessaire
dans la garantie de l’État de droit par le biais du respect de la constitution (A) et de ce fait
permet de garantir l’équilibre des pouvoirs (B)

A. Garantie du respect de la constitution


La hiérarchie des normes identifiée par Kelsen est une des caractéristiques principales d’un
État de droit. Cette caractéristique est garantie, en France, par le contrôle de
constitutionnalité qui a pour objet de faire respecter cette dernière. En effet la hiérarchie
pyramidale est nécessaire car elle est le fruit du respect des principes supérieurs, c’est à dire
que les institutions ont l’obligation d’édicter des lois, des normes qui sont en conformité
avec les normes de valeur supérieure.
Cette hiérarchie des normes est garantie par le contrôle de constitutionnalité exercé par le
conseil constitutionnel qui vérifie la conformité d’une loi ou norme par rapport à l'ensemble
des normes constitutionnelles (constitution, bloc de constitutionnalité...). Ce contrôle peut
se faire a priori, c’est à dire qu’il est engagé soit par le président de la république, le
président du sénat, le président de l’assemblée et une réforme de 1974 autorise 60 députes
ou 60 sénateurs. Ce contrôle permet entre autres la sécurité juridique en s’assurant que la
loi est bien conforme à toute norme constitutionnelle.
Une réforme constitutionnelle de 2008 a instauré un contrôle a posteriori, c’est à dire après
la promulgation des lois. Ce contrôle est rendu possible par la question prioritaire de
constitutionnalité qui permet à tout justiciable partie dans un procès de soulever
l’inconstitutionnalité d’une loi.
Ainsi le contrôle de constitutionnalité permet la viabilité, la garantie de l’État de droit. Mais
ce dernier joue également un rôle dans l’équilibre des pouvoirs, renforçant ainsi l’idée
d’État de droit.

B. Un contrôle garantissant un équilibre des pouvoirs


Comme rappelé précédemment, le contrôle de constitutionnalité est garanti, en France, par
le conseil constitutionnel dont les modifications successives ont permis d’élargir son champ
d’action (instauration du contrôle a posteriori introduit par la création de la QPC)

De cet élargissement découle une multitude de décisions comme par exemple la non-
contrariété à la constitution, la conformité sous réserve d'interprétation ou alors une
inconformité de la loi, abrogeant ainsi cette dernière ou la suspendant temporairement. Et
cette multitude de décisions va en fait permettre d’assurer une certaine effectivité de la
séparation des pouvoirs,

Le contrôle de constitutionnalité permet par ailleurs de garantir la séparation des pouvoirs,


autre caractéristique importante d’un État de droit. Le principe de séparation des pouvoirs,
qui figure dans l’article 16 de la constitution, est assuré par le contrôle de constitutionnalité,
dont l’autre objectif est de garantir l’indépendance des 3 pouvoirs et notamment de la
séparation entre le pouvoir exécutif et législatif qui est épaulé par l’article 5 du code civil
interdisant les arrêts de règlement.
Ainsi nous avons pu rendre compte du rôle indispensable du contrôle de constitutionnalité
dans la garantie de l’État de droit. Toutefois, ce contrôle est-il nécessaire pour garantir l’État
de droit ?
II. Les limites à ce principe
Chapeau : nous avons vu précédemment l’utilité du contrôle de constitutionnalité des lois
dans l’accomplissement d’un État de droit, aussi bien d’un point de vue formel que matériel.
Cependant il existe en effet certains États pouvant affirmer que les contrôles de
constitutionnalité ne sont pas nécessaires à garantir un État de droit (A). Nous verrons
ensuite que les contrôles de constitutionnalité présentent, dans certains cas, certaines
failles organiques (B).

A) contrôle de constitutionnalité facultatif à l’État de droit

Bien que la plupart des pays répondant à la définition d’État de droit sont dotés d’un
contrôle de constitutionnalité, certains en revanche en sont dépourvus. C’est le cas tout
d'abord du royaume uni qui ne possède pas de constitution écrite mais d’une constitution
coutumière, qui ne se prête pas aisément à un contrôle de constitutionnalité. Dans le
royaume uni en effet, le parlement détient à lui seul le pouvoir de modifier les droits
fondamentaux.
Par ailleurs, certains États de droit ne possèdent pas d’institution permettant le contrôle de
constitutionnalité. On peut citer notamment la Finlande qui est dénuée de tout contrôle car
ce dernier est intégré au processus d’élaboration des lois. Autre cas cette fois plus rare que
constitue les pays bas qui n’ont ni organe constitutionnel ni contrôle de constitutionnalité.
L'article 120 de constitution des pays bas dispose d’ailleurs que “le juge ne porte pas de
jugement sur la constitutionalité des lois et des traités”. Cet article doit toutefois être
nuancé car il interdit uniquement le contrôle de la constitution mais laisse cependant la
possibilité aux juges de contrôler la loi, par exemple au droit international.
Nous voyons donc à l’aide de ces différents exemples qu’un État de droit peut très bien
s’abstenir de contrôle de constitutionnalité tout en gardant son effectivité ainsi que sa
légitimité. Néanmoins nous allons voir qu’il existe certains États de droit pour lesquels le
contrôle de constitutionnalité présente certaines failles

B) un contrôle de constitutionnalité parfois défaillant

Si certains pays semblent à première vue présenter un aspect parfaitement démocratique


de par leur organisation et leur fonctionnement, la réalité peut différer. C’est le cas par
exemple des États-Unis qui tient au sommet du pouvoir juridique la cour suprême. Il
découlera de ce statut un grand pouvoir qui permettra notamment d’interpréter à sa guise
la constitution (Charles Evans Hughes, ancien gouvernement de l’État de New York disait
que “la constitution est ce que la cour suprême dit qu’elle est”). C'est le cas notamment
avec la récente révocation de l’arrêt Roe v. Wade qui garantissait le droit à l’avortement
depuis près de cinquante ans et cette décision n’est que le fruit d’une cour suprême trop
politisée. Or, l’État de droit suppose que les juges n’usent pas de leur pouvoir
d'interprétation à des fins politiques (mettant ainsi à mal l’indépendance et l’impartialité
des juges). Jean Carbonnier disait d’ailleurs que “l’interprétation est la forme intellectuelle
de la désobéissance”. Ajoutons à ce cas particulier le fait que les juges de la cour suprême
sont nommés à vie par le président, renforçant ainsi cet arbitrage, contrairement à la France
où ce qu’on pourrait appeler le “gouvernement des juges” n’est pas possible car les juges du
conseil constitutionnel sont renouvelés tous les 3 ans. Cette particularité organique
présente pour certains un danger, jugeant parfois cet état de “gouvernement des juges”
(c’est à dire un état dans lequel la puissance du juge est telle que son interprétation de la loi
prévaut, et souvent cette interprétation a une certaine connotation politique.
Par ailleurs on pourrait citer l’exemple de la Hongrie qui semble s’éloigner progressivement
des caractéristiques d’un État de droit. En effet la Hongrie dispose d’un organe permettant
de juger la conformité des lois par rapport à la loi fondamentale hongroise : la cour
constitutionnelle. Néanmoins, une révision de cet organe datant de 2010 et notamment
engagée par le premier ministre Viktor Orban, a considérablement réduit le champ d’action
de cette dernière, permettant ainsi à de nombreuses lois d’échapper au contrôle de
constitutionnalité.

Ainsi par ces exemples, nous avons pu rendre compte de l’ineffectivité certaine de certains
contrôles de constitution, notamment par une politisation trop présente dans un organe a
priori démocratique

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