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LA DETERMINATION DU
PRIX
Module : Techniques contractuelles
Soufiane ESSAGHIR
Encadré par : Mme GUENBOUR SAIDA
2021-2022
1
Introduction :
Selon le lexique des termes juridiques le prix peut être défini comme étant : « Une
somme d’argent sur laquelle porte l’obligation de payer née d’un contrat à titre onéreux. Au
sens strict, désigne la somme due au vendeur par l’acquéreur d’un bien dans un contrat de
vente, ou à l’entrepreneur par le maître de l’ouvrage dans un contrat d’entreprise
(lorsque le service n’est pas fourni par le membre d’une profession libérale). Par extension, lato
sensu, désigne également le loyer dans le bail, le salaire dans le contrat de travail, les primes
dans le contrat d’assurance, le cachet pour l’engagement d’un artiste, les intérêts dans le
prêt.
Naguère, le prix devait être déterminé par les parties au moment de la conclusion du
contrat, à peine de nullité, mais la jurisprudence avait considéré que l’indétermination du
prix n’est qu’une simple modalité d’exécution du contrat, l’abus dans la fixation
unilatérale du prix ne donnant lieu qu’à résiliation ou à indemnisation. Ce point
de vue a été confirmé par l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme des
contrats : dans les contrats-cadres et les contrats de prestation de service, le prix peut
être fixé unilatéralement par l’une des parties à charge pour elle d’en motiver le montant
en cas de contestation, l’abus donnant lieu à des dommages et intérêts »1.
Il en résulte de cette définition que le terme « prix », est employé dans la plupart des
temps dans la vente, mais son emploi s’est étendu à tous les contrats à titre onéreux.
Cette définition a démontré les deux principaux enjeux qui s’attachent à la
détermination du prix. D’une part, le prix en tant qu’un élément structurel de tous les
contrats à titre onéreux. Cela dit que le prix constitue une obligation essentielle de ladite
convention. Et d’autre part, en tant que contrepartie, l’institution du prix se trouve au cœur
de l’équilibre des prestations : sa détermination est un enjeu de justice contractuelle.
Dans le même ordre d’idées on trouve les articles 1591 et 1592 qui prévoient que – le
prix de la vente doit être détermine et désigne par les parties – il peut cependant être laisse à
l’arbitrage d’un tiers ; si le tiers ne veut ou ne peut faire l’estimation, il n’y a point de vente.
Il se dégrade de ces deux articles que l’existence d’un prix est un élément
indispensable à la vente : à défaut, le contrat ne peut recevoir cette qualification 2, ce qui ne
veut pas dire qu’il soit toujours nul car il peut correspondre à d’autres modèles (échange s’il
y a une contrepartie dans un bien, donation si l’on peut relever une intention libérale). En
présence même d’un prix, et donc dans le cadre d’une qualification de vente, le montant de
ce prix, en principe libre, donne lieu à certaines règles 3.
La détermination du prix dans les contrats à titre onéreux consiste dans le fait que
l’une des parties s’engage à payer un prix qui apparait alors comme l’objet de l’une des
obligations découlant du contrat. A ce titre, le prix devra être déterminé conformément aux
exigences des articles 2 et 58 D.O.C et le contrat pourra être annulé pour indétermination du
1
- Guinchard, « Lexique des termes juridiques 2018-2019 », 26éme édition Dalloz, 2018, p.534.
2
- Selon le Dictionnaire du vocabulaire juridique, la qualification est une opération qui consiste à classer, selon
sa nature, un élément dans catégorie préexistante afin de lui appliquer le régime de cette catégorie. Cette
opération suppose que les caractéristiques de l’élément à qualifier correspondant à la catégorie dans laquelle il
va être classé. Il faut donc identifier avec soin les caractères de l’élément analysé et ceux de la catégorie à
laquelle on va le rattacher.
3
- ALAIN BENABENT, « Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux », 10éme édition LGDJ, p.27.
2
prix. La règle est clairement énoncée par l’article 487 du D.O.C à propos de la vente 4 et vaut
pour les autres contrats.
Elle est même plus vigoureusement affirmée au Maroc qu`en France 5.
Le prix est une somme d’argent que l’acquéreur doit payer au vendeur en contrepartie
de l’aliénation de la chose transmise. Il constitue un élément essentiel à la vente ; pas de prix,
pas de vente. Principe fondamental qui a deux significations. Celle qui longtemps a attiré
l’attention avait pour objet la détermination, le sérieux et la réalité du prix. Plus
profondément, le prix permet de qualifier le contrat : une convention dans laquelle la
contrepartie à l’aliénation de la chose serait autre qu’une somme d’argent ne pourrait être une
vente, mais serait un autre contrat tel qu’un échange, un apport en société, un louage
d’ouvrage ou un contrat innommé8.
La réflexion sur la détermination du prix est nourrie d’agissant des contrats de
distributions, et plus généralement des relations d’affaires9.
Quant aux enjeux autour la détermination du prix, on trouve que la notion de prix est
bien connue des profanes car elle renvoie à une réalité tangible. Le prix est la somme d’argent
que l’on s’engage à payer, en vertu d’un contrat, pour obtenir un bien ou un service.
Juridiquement, le prix est la contrepartie d’une prestation contractuelle comme il a été déjà
signalé.
Il en résulte de cette définition que la détermination du prix s’attache à deux
principaux enjeux ; d’une part, le prix en qu’un élément structurel de tous les contrats à titre
onéreux : il en constitue une obligation essentielle. Et d’autre part, en tant que contrepartie,
l’institution du prix se trouve au cœur de l’équilibre des prestations : sa détermination est un
enjeu de justice contractuelle.
Au Maroc, au sens de la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence,
les prix des biens, des produits et des services sont déterminés par le jeu de la libre
concurrence10.
Cependant, malgré le principe de la liberté des prix proclamée par la loi 104-12, les
pouvoirs publics peuvent intervenir pour réglementer les prix dans les secteurs ou les zones
géographiques où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de
monopole de droit, soit du soutien accordé par l’administration à certains secteurs ou produits
4
- Le prix de la vente doit être déterminé.
5
- Car le droit marocain, contrairement au droit français (article 1592 C. Civ.), n’admet pas que le prix de la
vente soit fixé par l’arbitrage d’un tiers.
6-
Omar Azziman, « Le Contrat. Volume I », édition Le Fennec, 1995, p.196.
7-
Article 2 de la loi n° 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence.
8-
P. MALAURIE, « DROIT DES CONTRATS SPECIAUX »,8éme édition LGDJ,2016, p. 153.
89-
www.jurisproud.com.
9
- A. LE PAPE-GARDEUX, « LA DETERMINATION DU PRIX DANS LES CONTRATS DE CONSOMMATION »,
Université Paris II, mémoire pur l’obtention du Master 2 Droit Privé Général, Promotion 2019-2020, p.2.
1010-
Idem.
3
à la production ou à la commercialisation, soit de difficultés durables d’approvisionnement,
soit de dispositions législatives ou réglementaires, les prix peuvent être réglementés par
l’administration après consultation du conseil de la concurrence11.
Économiquement, la somme d’argent due par l’acheteur est généralement constituée
de deux éléments : le prix et les frais de la vente.
Après la lecture des lois, des études effectuées en la matière, des ouvrages, nous
avons pu dégager une problématique relative au sujet de la détermination du prix objet
de notre étude à savoir :
1112-
Comme son nom l'indique, le contrat-cadre est un contrat qui fixe les caractéristiques de la future relation
contractuelle entre différentes parties. Cette appellation juridique généraliste englobe différents types de
contrats et s'utilise le plus souvent dans des relations commerciales. Les contrats-cadres sont, la plupart du
temps, signés entre un fournisseur et un prestataire, ou d'autres acteurs d'une entreprise. Ils permettent
d'offrir un cadre à la relation contractuelle grâce à l'intégration de différentes clauses. Ces clauses doivent
toutefois respecter un certain équilibre entre les parties et ne pas porter atteinte à la sécurité ou à la dignité
humaine.
12
4
La première partie : Le prix, élément essentiel de la vente
5
Le prix peut être défini comme une somme d’argent que l’acheteur s’engage à payer au
vendeur en contrepartie de la chose qu’il reçoit. Le prix est comme la chose, il s’agit d’un élément
substantiel du contrat de vente sans lequel le contrat de vente ne peut jamais se former. Il est
considéré également comme un moyen de qualification des contrats, permettant ainsi de distinguer
la vente par rapport aux autres contrats voisins. Tels que l’échange ou l’apport en société.
S’agissant d’une convention dans laquelle la contrepartie à l’aliénation de la chose serait autre
qu’une somme d’argent ne pourrait être une vente, mais serait un autre contrat tel qu’un échange,
un apport en société ou un contrat innommé. Le prix joue un rôle fondamental parce qu’il ne
constitue pas seulement une contrepartie monétaire mais aussi indispensable à la validité de ladite
vente.
Dans la présente partie, je vais me focaliser sur la fixation du prix dans la vente qui fera l’objet
du premier chapitre, alors que le second chapitre sera consacré aux caractères du prix dans le contrat
de vente.
Le prix au sein du contrat de vente est un élément important car il constitue non
seulement une contrepartie monétaire mais est aussi indispensable à la validité de la vente.
Au sens de l’article 488 du D.O.C13, la vente est parfaite entre les parties, dès qu’il y a
consentement des contractants, l’un pour vendre, l’autre pour acheter, et qu’ils sont d’accord
sur la chose, le prix et sur les autres clauses du contrat.
Cette exigence sur le prix est à l’origine d’une des questions les plus controversées du
droit contemporain des contrats. C’est par cette exigence d’un prix en argent que la vente se
distingue d’autres contrats translatifs de propriété, à caractère onéreux. Dans ces derniers, la
contrepartie consiste en la remise d’une chose en nature ou en l’accomplissement d’un
service.
La détermination du prix doit résulter d’un accord de volontés des parties. L’article
1592 du Code civil français reconnait toutefois la validité de la vente dont le prix est fixé par
un tiers. Il apparait donc, à la lecture combinée de plusieurs textes, que le prix doit être
déterminé par les parties (section1) ou exceptionnellement par un tiers (section2).
13
- Dahir (9 ramadan 1331) formant Code des obligations et des contrats (B.O. 12 septembre 1913).
6
Section 1 : la détermination du prix par les parties14.
Exigeant que le prix de la vente, soit « déterminé et désigné par les parties », l’article
1591 du code civil français traduit l’idée, spécifique au droit français et souvent critiquée qu’il
appartient aux parties elles-mêmes d’évaluer la chose et qu’elles ne peuvent pas s’en remettre
à une évaluation judiciaire, la mission du juge n’étant pas de parfaite les contrats incomplets.
Cette condition a fait l’objet, pendant un certain temps, d’un contentieux abordant dont
l’essentiel ne concerne pas le contrat de vente proprement dit, mais des contrat-cadres de
distributions, mis en place pour plusieurs années, et auxquels les conditions de la vente ont été
étendues par une assimilation peut être discutable.
Pour ce qui concerne le contre de vente en lui-même, qui seul nous intéresse ici,
l’exigence de l’article 1591 peut être satisfaite de deux façons15.
a) Ou bien le prix est immédiatement chiffré : c’est la solution la plus simple, même si,
en cas de paiement différé, on peut prévoir d’indexer ce chiffre au moyen d’une
clause d’indexation soumise au droit commun de l’ordonnance du 30 décembre 1958,
à condition que la clause soit claire. Une simple fourchette est jugée insuffisante.
b) Ou bien le prix, sans être chiffré, est fixé par référence à des éléments qui le rendent
déterminables au jour où il devra être payé. Cette référence est licite à condition que
les éléments de références soient suffisamment précis pour permettre de chiffre le prix
le jour venu « sans nouvel accord des parties » : on peut se référer au cours de bourse
de telle marchandise, à la « cote » publiée par une revue spécialisée, a la rentabilité de
la chose vendue, au tarif moyen de fournisseurs désignes et même désormais, depuis
un revirement en assemblée plénière du 1er décembre 1995, aux tarifs généraux du
fournisseur lui-même ; au contraire le prix est indéterminé s’il est renvoyé à des
éléments trop vagues comme le cours du marché ou le bilan d’une société16.
14
- Catherine Constance, « la détermination du prix dans les contrats », thèse de doctorat en Droit, Soutenue
en 2001 à lyon3.
15
- Gorlier, Vincent, « le droit des contrat spéciaux », édition Ellipes, 2017, p.154.
16
- Pendant longtemps, la jurisprudence a posé une condition supplémentaire : que les éléments de références
soient extérieurs aux parties et ne dépendent pas, même partiellement, de l’une d’elles : par exemple on
pouvait se référer au tarif du fabricant pourvu qu’il soit extérieur au vendeur, source de difficulté à l’égard des
concessionnaires automobiles, mais non ou tarif du vendeur lui-même ; de même était indéterminé le prix égal
à ce qui restera impayé sur un prêt, car il dépend de l’emprunteur de réduire le prix en remboursant le prêt, ou
encore le prix de parts sociales lié aux appointements que recevrait l’acquéreur de la société dès lors qu’étant
gérant, il peut fixer lui-même cet élément de référence.
7
que la ventilation du prix entre eux soit fixée, non plus qu’à l’inverse s’il y a plusieurs
acheteurs.
S’agissant de fixation du prix par un tiers, L’article 1592 du Code civil français permet
aux parties de confier le soin de fixer le prix à un tiers, indifféremment appelé arbitre ou
expert. Ce tiers est en réalité un mandataire commun des deux parties, qui l’ont chargé
ensemble d’une mission à effet juridique – ce dont il résulte que les deux parties sont tenues
solidairement de sa rémunération en vertu de la solidarité des co-mandants et que ce
mandataire doit être loyal et indépendant.
La jurisprudence s’avéré timide en cette matière : si le tiers désigné par les parties se
récuse ou est empêché, elle refuse de le remplacer et le vente est alors nulle ; si les parties ont
simplement renvoyé « à dire expert » sans préciser les modalités du choix de ce tiers, les
tribunaux refusent encore (à tort) de le désigner, et il en est de même si les parties ont prévu
qu’elles choisiraient chacune un expert et que l’une se dérobe : la vente ne peut donc se
former, mais la partie récalcitrante peut être condamnée à une indemnité pour s’être dérobée à
l’obligation de désignation.
Cette jurisprudence, qui n’est pas très récente, pourrait évoluer sous l’influence
notamment de l’idée que la bonne foi doit préciser à l’exécution des conventions, c’est ce qui
résulte de l’article 1134 du code civil français et qu’une partie ne serait, sans mauvaise foi,
paralyser un mécanisme de fixation du prix qu’elle a elle-même accepté, en vue de renier la
vente. Peut-être peut-on déceler un signe d’assouplissement dans une décision récente
autorisant la désignation d’un expert pour évaluer les titres vendus selon la « valeur de
l’entreprise ».
Le ou les tiers ainsi désignés travaillent librement et doivent fixer un prix précis : la
simple indication d’une « fourchette » est insuffisante. Une fois ce prix fixé, il s’impose aux
parties – mais la jurisprudence réserve le cas où le tiers aurait subi un dol ou une violence ou
encore aurait commis une « erreur grossière », cas dans lequel le juge pourrait commettre un
nouvel expert, mais non fixer lui-même le prix.
On admet aujourd’hui que le vice peut être réparé : en payant une certaine somme
acceptée par le vendeur, l’acheteur confirme et complète la vente qu’il ne peut plus ensuite
17
- Huchet, Marc-Olivier, « les indispensables du droits des contrats spéciaux », édition Ellipses,2018,p.103.
8
remettre en cause. Mais cette réparation doit émaner des parties : le juge ne peut y procéder en
fixant le prix qui manque.
En principe, le prix, dans la vente, a un contenu plus strict que dans le langage courant
ou même dans d’autres contrats : ce n’est pas n’importe quelle contrepartie, mais
seulement celle qui consiste dans le versement d’une somme d’argent.
C’est en cela que la vente, indissociablement liée à la monnaie, se distingue d’autres
contrats, comme l’échange ou l’apport en société. Et l’on jugeait classiquement que n’est
pas une vente l’aliénation consentie moyennant une obligation de faire contractée par le
bénéficiaire, et que si le prix stipulé est aussitôt converti en une obligation différente, il n’y a
pas vente dès lors que l’acte est invisible. La jurisprudence récente est toutefois beaucoup
moins rigoureuse et est en passe d’admettre que le prix peut consister en une obligation de
faire.
A plus forte raison, il y a encore vente si, en sus du prix monétaire, l’acquéreur contracte
d’autres obligations (de faire ou de donner un autre bien), dès lors que ces obligations ne
sont qu’un accessoire.
Quant à la monnaie utilisée, il faut appliquer le droit commun monétaire : le Dirham
s’impose dans les ventes internes tandis que le choix de la monnaie est libre dans les ventes
internationales.
Pour exister, ce prix doit d’abord être déterminé (Section 1), et ensuite être réel et
sérieux (Section 2).
Comme pour la chose, il doit y avoir accord sur le prix. Celui-ci consiste en une somme
d’argent, sinon le contrat serait un échange ou un contrat innommé. Un désaccord – par
exemple, sur un rabais, ou sur les frais de la vente, ou sur les modalités de paiement si les
parties en ont fait un élément essentiel – empêche la conclusion de la vente, au contraire
d’une volonté obscure ou ambiguë, qui appelle seulement ’interprétation4. Tout ceci n’est
que l’application du droit commun des contrats. Le particularisme du droit français de la
vente tient à une autre règle : le montant du prix doit être déterminé par accord des parties
au moment de la formation du contrat, et «indiqué» dans l’acte, sinon la vente est nulle,
voire inexistante (art. 1591). Une lecture littérale de l’article 1591 conduirait à exiger que les
parties se mettent d’accord sur un chiffre et l’indiquent sur l’instrumentum 18 ; à défaut, la
vente serait inefficace car personne ne pourrait déterminer ce prix à la place des parties ; en
particulier, le juge ne pourrait se substituer aux parties, ce qui conduirait, à défaut d’accord
entre elles, à une impossibilité de fixer un prix.
18
- Puig, Pascal, « Contrats spéciaux », édition Dalloz,2019, p.56.
9
Cette interprétation de l’article 1591 a été longtemps justifiée par une considération
pratique : comment fixer le prix et sauver la vente, si les parties ne l’ont pas fait elles-mêmes
dès la conclusion du contrat ? Et une donnée politique : le droit français a longtemps
manifesté une certaine rigidité à l’égard du prix en voulant éviter que sa fixation mette l’une
des parties à la merci de l’autre. Les choses ont beaucoup changé à l’époque contemporaine.
La suspicion à l’égard des procédés de fixation du prix postérieurement à la vente a disparu.
Demeurent deux principes :
1) le juge ne peut intervenir sur le prix, pour le fixer, le majorer ou le diminuer5, car le prix
est l’affaire des parties ;
2) si le prix n’a pas été précisé dans l’acte de vente, les parties doivent avoir convenu d’un
procédé de détermination du prix qui permette de parvenir à un montant sans qu’un nouvel
accord de leur part soit nécessaire, et sans que l’une des parties soit à la merci de l’autre.
Ainsi, une nouvelle lecture de l’article 1591 s’est progressivement imposée : le prix doit être
déterminable par application des clauses du contrat.
Le sens de la règle doit être précisé dans trois hypothèses où la vente comporte un
élément qui, en raison de l’accord des parties, interdit d’en préciser le prix lors de la vente, ce
qui ne l’empêche pas d’être déterminable : le prix est alors calculé par un tiers, ce qui ne
soulève guère de difficultés; il est fixé par un cours ou par un tarif, ce qui a naguère suscité un
énorme contentieux et un important revirement jurisprudentiel ; il est lié à la rentabilité de la
chose .
19
- Puig, Pascal, « Contrats spéciaux », OP.CIT, p.65.
10
S’agissant d’un prix non fictif ; l’existence d’un prix exige d’abord que le prix fixé ne
soit pas une simple apparence : lorsque les parties simulent un prix mais conviennent qu’il ne
sera pas versé, de sorte que ce prix est purement fictif, il n’y a pas vente véritable.
Ce n’est pas dire que l’acte sera nécessairement nul : le plus souvent, cette simulation a
pour but de déguiser une donation que les parties veulent cacher à des proches ou au fisc. Le
contrat qui n’a pas de vente peut alors valoir en tant que donation, si l’intention libérale
existe : il s’agit d’une donation déguisée, catégorie soumise à un régime propre combinant les
règles de forme de l’acte apparent (ces donations échappent donc à la forme notariée en
principe obligatoire, c’est-à-dire ici les règles de forme applicable au type de vente choisi
comme déguisement, et les règles de fond de l’acte réel ( on appliquera le régime des
donations tant du point de vue fiscal que du point de vue successoral).
Comme pour toute simulation, les tiers peuvent choisir, selon leur intérêt, de retenir
l’acte apparent ou l’acte véritable. Par exemple, un créancier du « vendeur », voulant exercer
l’action paulienne se prévaudra de la donation, car il n’a pas alors à établir la fraude de
l’« acquéreur » comme il le doit pour une vente.
Prix non dérisoire ou « vil ». En principe, la liberté contractuelle permet aux parties de
stipuler le prix qui leur convient, et le juge n’a pas le pouvoir d’exercer un contrôle sur
l’équilibre économique du contrat. Pourtant, sans le support d’aucun texte, la jurisprudence
décide encore qu’il ne peut y avoir vente si le prix convenu, quoique réellement versé, est
tellement minime qu’il ne constitue pas une véritable contrepartie.
On dit alors que la vente est consentie « à vil prix »20. Il y a « vil prix » lorsque le
montant est si dérisoire qu’il équivaut en réalité à une absence de prix : ce n’est donc pas une
simple insuffisance de prix qui est en cause (justiciable d’une éventuelle lésion), mais une
inexistence réelle. L’exemple classique est celui du prix « symbolique » fixé à un franc (ou un
dirham) : il n’y a alors pas de vente sauf si la chose est réellement dépourvue de valeur,
comme ce peut être le cas d’une entreprise dont le passif excède de l’actif. Mais il ne faut pas
s’en tenir à ce chiffre : un prix de quelques centaines ou milliers de francs peut être dérisoire
s’il est hors de toute proportion avec le bien cédé. En particulier, la jurisprudence admet que
le prix est dérisoire à chaque fois qu’il est inférieur au revenu de la chose, de sorte que celle-ci
« se paye » elle-même sans débours de l’acheteur : par exemple des parts sociales cédées pour
une somme inférieure aux dividendes de l’année. Ce moyen est souvent retenu pour annuler
des ventes consenties moyennant une rente viagère inférieur au revenu du bien : c’est en
réalité alors le défaut d’aléa qui vicie l’acte.
Comme le prix fictif, le prix dérisoire n’emporte pas toujours nullité de la vente : si
l’on peut relever une intention libérale chez le « vendeur », l’acte peut constituer une donation
– qui n’est plus alors « déguisée », l’acte peut constituer une donation- qui n’est plus alors
« déguisée » puisqu’il n’y a même pas l’apparence d’une vente, mais qui est admise comme
« indirect » et qui sera soumise en conséquence aux règles des donations.
20
- Mainguy,Daniel, « Contrats spéciaux », édition Dalloz, 2020,p.89.
11
Le montant du prix : Liberté ou « juste prix »21 ? Le problème du « juste prix » est de
l’ordre de la philosophie juridique : doit-on donner le pas à la liberté contractuelle, dont le
plus fort peut abuser, ou à une justice contractuelle imposant un équilibre minimum entre le
prix convenu et la valeur réelle de chose ? On sait que le débat n’est pas spécifique à la vente
et reçoit en droit français une réponse de principe nuancée par certains correctifs.
-La réponse de principe est tirée de la liberté contractuelle : dès lors que les parties
sont capables et que leur consentement n’a pas été vicié par le dol ou violence (puisque la
seule erreur sur la valeur ne comporte), le prix qu’elles ont fixé s’impose à elles sans que le
juge puisse le rectifier aux motifs qu’il le trouverait injuste : un tribunal ne peut pas par
exemple réduire le prix de matériaux qu’il juge excessif.
-Des correctifs ont cependant été aménages de deux manières : d’abord par des
exceptions directes au principe, dans des domaines très particuliers où la lésion est prise en
compte ; plus récemment par l’intervention générale du droit de la concurrence qui vise à
assurer indirectement une certaine justice des prix, par l’intermédiaire du jeu de la
concurrence.
21
- ALAIN BENABENT, « Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux », OP.CIT, p.33.
12
La seconde partie : la détermination du prix dans les
contrats-cadres.
13
Le contrat-cadre22 est un contrat visant à définir les principales règles auxquelles
seront soumis des accords à traiter rapidement dans le futur, « contrats d’application » ou
« contrats d’exécution » auxquels de simples bons de commande ou ordres de service, lettres
d’embauche…fourniront éventuellement, leur support. Un contrat-cadre organise par voie
d’obligations de faire ou de ne pas faire les modalités de conclusion et, surtout, le contenu de
multiples contrats d’application à venir.
Dans ce sens, on trouve que l’élément commun des contrats-cadre c’est qu’ils ont été
conçus pour régir le long terme. Il y a donc un problème quant à l’exigence d’un prix
déterminé ou déterminable.
De facto, la question qui s’impose à cet égard est celle de savoir : Comment fixer de
façon exacte et dès la conclusion du contrat le prix payable en contrepartie de la fourniture
d’un bien ou d’un service lorsque cette fourniture peut n’intervenir que plusieurs mois, ou
plusieurs années, après la conclusion du contrat originaire ? Comment déterminer plusieurs
mois à l’avance la valeur qu’aura un bien dans le futur ? La question de l’indétermination du
prix a soulevé de très importante difficulté dans les contrats-cadres de fourniture ou de
distribution.
Pour cela on va mettre l’accent dans un premier chapitre sur la complexité qui
découle de la détermination dudit prix dans les contrats-cadres, puis on examinera les
sanctions d’abus de détermination du prix dans un second chapitre.
22
- www.jounaldunet.fr.
23
14
contrat indique seulement la méthode qui sera suivie pour cette fixation au fur et à mesure des
approvisionnements.
Le contrat de distribution est un contrat de partenariat. Il s'agit d'un accord passé entre
un fournisseur et un intermédiaire chargé de vendre les produits ou les services du
fournisseur, soit le distributeur. Juridiquement très encadré et en constante évolution, il doit
respecter certaines conditions et intégrer des mentions et clauses précises.
Dans quatre arrêts rendus le 1er décembre 1995, l’Assemblée plénière de la Cour de
cassation a résolu ce qui est resté comme l’une des grandes questions du droit des contrats.
Selon cette jurisprudence, la validité́ d’un contrat-cadre n’est en rien affectée par
l’indétermination initiale des prix des contrats d’application, ou par le choix d’un mode de
détermination unilatéral.
15
Par ailleurs, cette jurisprudence a validé́ la clause de tarif fournisseur, C’est-à-dire la
fixation unilatérale des prix des contrats d’application par le fournisseur. Et elle précise que la
seule limite à ces principes de libre choix des modes de déterminabilité́ des prix réside dans «
l’abus dans la fixation du prix ».
24
-www.aideauxtd.com.
16
Conclusion :
En guise de conclusion, nous pouvons dire que le contrat conclu à titre onéreux exige
une contrepartie financière, c’est-à-dire un prix.
En tant qu'élément essentiel, le prix doit être déterminé par accord des parties lors de
la conclusion du contrat. Il peut être simplement déterminable, c'est-à-dire ultérieurement
déterminé selon les critères jurisprudentiels d'objectivité, de sérieux et de précision.
17
Liste bibliographique :
- Guinchard, « Lexique des termes juridiques 2018-2019 », 26éme édition Dalloz, 2018 ;
- ALAIN BENABENT, « Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux », 10éme édition
LGDJ, 2018 ;
- Omar Azziman, « Le Contrat. Volume I », édition Le Fennec, 1995 ;
- P. MALAURIE, « DROIT DES CONTRATS SPECIAUX »,8éme édition LGDJ,2016 ;
- Gorlier, Vincent, « le droit des contrat spéciaux », édition Ellipes, 2018 ;
- Huchet, Marc-Olivier, « les indispensables du droit des contrats spéciaux », édition
Ellipses,2018.
THESES ET MEMOIRES :
- Dahir (9 ramadan 1331) formant Code des obligations et des contrats (B.O. 12
septembre 1913) ;
- Le code civil français.
Webographie :
- www.aideauxtd.com.
- www.jounaldunet.fr.
18
Table des matières :
Introduction………………………………………………………………………………1
Chapitre 1 : la complexité de détermination du prix dans les contrats cadres se fournitures...12
Conclusion……………………………………………………………………………………17
19