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Master spécialisé juriste d’affaires

(M1)

Module : Techniques contractuelles

Le contrat d’entreprise

Réalisé par : Encadré par :

CHELLAOUI Mohamed Amine Prof. SAIDA GUENBOUR

Année universitaire : 2021/2022

1
Sommaire

Chapitre 1 : Le cadre juridique du contrat d’entreprise

Section 1 : Distinction du contrat d’entreprise des autres contrats voisins

Section 2 : La conclusion du contrat d’entreprise

Chapitre 2 : L’exécution du contrat d’entreprise

Section 1 : Les obligations à la charge des parties

Section 2 : L’extinction du contrat d’entreprise

2
Introduction

Parmi les contrats spéciaux, on trouve le contrat d’entreprise qui malgré son
utilisation quotidienne et sa conclusion chaque jour que ça soit avec le médecin,
l’ingénieur, l’architecte, l’avocat, le plombier et d’autres professions libérales, le contrat
d’entreprise demeure mal connu même s’il est aussi réputé que la vente.

Le contrat d’entreprise joue un rôle essentiel dans nos économies de services,


il est aujourd’hui un contrat spécial autonome grâce à une série de développement qui
a poursuivi ce contrat, car il a été toujours confondu avec d’autres contrats tel la vente
et le bail. Le contrat d'entreprise est une variété de louage d'ouvrage. Il s'agit de
la convention par laquelle une personne s'oblige contre rémunération à exécuter un
travail de façon indépendante et sans représenter son cocontractant.1 Il peut porter sur
la fourniture d’un service immatériel (courtage, formation etc.) ou sur un bien
(fabrication, réparation etc.)2

En droit marocain le contrat d’entreprise est régi par le DOC sous l’appellation
le louage d’ouvrage dans l’article 723 : « Le louage d'ouvrage est celui par lequel une
personne s'engage à exécuter un ouvrage déterminé, moyennant un prix que l'autre
partie s'engage à lui payer ». Cette définition est donnée également par le législateur
français article 1710 du code civil, lorsqu’il l’a défini comme étant un contrat par lequel
l'une des parties s'engage à faire quelque chose pour l'autre moyennant un prix
convenu entre elles3.

Ce dernier est passé du louage d’ouvrage au contrat d’entreprise, suite au


problème posé par la trilogie : louage des gens de travail, louage des voituriers et
louage des entrepreneurs des ouvrages4. Ces notions ont évolué de manière large
dans le temps, celles de contrat de travail et de bail se sont définitivement substituées
à celles de louage de services et de choses.

Cette répartition s’avère selon le législateur du code civil comme inadéquate,


car le louage des gens de travail atteint à la dignité et le respect dû aux humains, et

1
https://www.dalloz.fr/documentation/Document?id=DZ%2FOASIS%2F000274
2
Marc Olivier HUCHET, Les indispensables du droit des contrats spéciaux, Ed Ellipses, 2016, p187.
3
Daniel MAINGUY, Contrats spéciaux, Ed Dalloz, 2020, p539.
4
Francois Collart Dutilleul et Philippe Delebecque, Contrats civils et commerciaux, 11édition, Dalloz, p 650.

3
actuellement il est régi par des dispositions spéciales du contrat de travail, c’est égal
pour les deux qui restent, à ce que maintenant le louage des voituriers est régi par le
contrat de transport, et le dernier fera l’objet de notre étude.

Le législateur marocain quant a lui a bien fait, quand il a changé la dénomination


du louage de service par le contrat de travail5 pour éviter toute nuance entre les deux.
Cependant, il est à noter que le louage d’ouvrage tel était régit par le DOC est la règle
commune, car on a quelques dispositions particulières prévues par le DOC (Art 759 à
780 concernant l’entreprise de construction), et certaines particulières n’existant pas
dans le DOC comme avec les marchés publics6.

D’après les définitions citées, on peut dire que le contrat d’entreprise est un
contrat synallagmatique, car il produit des obligations réciproques entre le maitre
d’ouvrage et l’entrepreneur, dans la mesure ou le maitre d’ouvrage est tenu de payer
la contrepartie de l’ouvrage achevé, et l’entrepreneur est obligé d’exécuter l’ouvrage
promis dans le contrat.

De surcroit, le contrat d’entreprise est un contrat à titre onéreux fondé sur le


paiement de la contrepartie. Il est un contrat consensuel formé dès la réunion de l’offre
et l’acception, et également un contrat nommé parce qu’il est encadré par la loi et en
raison de sa propagation entre les gens.

De cela on se pose la question suivante : Comment est régi le contrat


d’entreprise par le législateur marocain ?

Afin de répondre à cette problématique, on va étudier en premier lieu le cadre légal de


ce contrat pour ensuite s’intéresser à son exécution.

5
Voir la référence donnée par le législateur dans l’article 723 alinéa 1 : 140- Le législateur du code de travail a
remplacé le terme « louage de services » par le terme « contrat de travail » voir article 15 du code de travail.
6
Décret n° 2-12-349 du 8 joumada I 1434 relatif aux marchés publics. (B.O. n° 6140 du 4 avril 2013).

4
Chapitre 1 : Le cadre juridique du contrat d’entreprise
Pour comprendre le contrat d’entreprise, on va l’identifier dans un premier lieu
en le distinguant d’autres contrats voisions et dans un second lieu se pencher sur sa
conclusion.

Section 1 : Distinction du contrat d’entreprise des autres contrats voisins

Les caractères du contrat d’entreprise apparaissent dans sa définition : c’est un


contrat consensuel, synallagmatique, civil ou commercial, voire public, à titre onéreux
qui met à la charge de l’entrepreneur la réalisation d’une prestation en toute
indépendance et sans représentation7.

Le contrat d’entreprise partage certains points de convergence avec d’autres


contrats spéciaux mais se caractérise par des spécificités qui sont dédiées qu’au
contrat d’entreprise. Le contrat d’entreprise est parfois difficile à distinguer des autres
contrats spéciaux. Il se distingue ainsi du contrat de travail du fait que l’entrepreneur
n’est pas un salarié du maître de l’ouvrage, il travaille ainsi en toute indépendance.
Par ailleurs, le contrat d’entreprise se distingue également du contrat de vente, car il
porte sur service et non sur un objet. En outre, à l’inverse de la vente le prix n’a pas à
être déterminé ou déterminable au moment de la conclusion du contrat d’entreprise. Il
se distingue également du contrat de mandat par l’absence de représentation. Enfin,
il se démarque contrat de dépôt dont l’obligation principale est la restitution d’une
chose alors que le contrat d’entreprise porte sur la réalisation d’un ouvrage.8

Paragraphe 1 : Le contrat d’entreprise et le contrat de travail

À première vue, ces deux contrats n’ont rien en commun. Le salarié met à la
disposition de son employeur sa force de travail. L’entrepreneur réalise une chose pour
le maître d’ouvrage. Mais si un artisan réalise à maintes reprises une activité pour une

7
Daniel MAINGUY, op, cit, p 544.
8
Vincent GORLIER, Le droit des contrats spéciaux, Ed Ellipses, 2021, p336.

5
même personne, les deux notions se mêlent9. Certes on constate qu’ils portent sur
l’exécution d’un travail, un service, ou un ouvrage, mais en versant une contrepartie.

La première distinction se démarque dans la nature de l’obligation, le salarié


dans le contrat de travail est tenu d’une obligation de moyen, c’est à dire il est tenu de
de mettre tout son effort pour atteindre l’objectif désiré par son employeur, quant au
contrat d‘entreprise, l’entrepreneur est tenu d’une obligation de résultat qui se
manifeste dans l’exécution de l’ouvrage tel qu’il est voulu par le maitre d’ouvrage.

Cependant, la doctrine admet un critère essentiel qui ne se trouve pas dans le


contrat d’entreprise à savoir, l’élément de subordination. Le principe de distinction tient
donc à l’indépendance de l’entrepreneur celui-ci n’a pas du patron ou un chef mais
plutôt des clients, alors que le salarié est soumis à un lien juridique de subordination
qui l’unit avec son employeur. Les tribunaux distinguent les deux contrats en utilisant
le critère du lien de subordination.

Paragraphe 2 : Le contrat d’entreprise et le contrat de vente

Le contrat de vente est translatif de propriété alors que l’autre consiste à réaliser
un ouvrage10, or les éléments peuvent s’imbriquer. Pourtant, le contrat d’entreprise se
distingue difficilement de la vente. En matière mobilière la jurisprudence admet un
critère objectif fondé sur l’existence d’un travail particulier effectué selon les
instructions particulières, est une vente la production en série de choses à fabriquer,
est un contrat d’entreprise la production sur mesure d’une chose à fabriquer 11.

Dans les deux cas, il y a transfert de propriété d’une chose. Pour un contrat
d’entreprise, la chose livrée est conforme aux spécifications du client, elle a demandé
une longue mise au point et une confection non standardisée. Ex : distinction entre le
prêt-à-porter (contrat de vente) et les vêtements sur mesure (contrat d’entreprise).
Donc, si le produit est fabriqué en série et qu’il est disponible pour n’importe quelle
personne intéressée, le contrat conclu est un contrat de vente. En revanche, si le

9
https://www.lagbd.org/index.php/Contrat_d%27entreprise_(fr)#I._Le_contrat_d.E2.80.99entreprise_et_les_c
ontrats_voisins
10
Vincent GORLIER, op.cit., p25.
11
https://wikimemoires.net/2011/03/distinction-contrat-entreprise-avec-autre-contrats/

6
produit a été fabriqué pour un client déterminé selon les spécifications que celui-ci a
demandées, on sera face à un contrat d’entreprise12.

Paragraphe 3 : Le contrat d’entreprise et le contrat de mandat

La distinction entre le contrat d’entreprise et le contrat de mandat est parfois


délicate. La différence essentielle tient au fait que l’entrepreneur garantit un résultat :
l’ouvrage, alors que le mandataire s’engage uniquement à mettre en œuvre les
moyens à sa disposition pour fournir les services demandés13. Ainsi, les prestations
dont le résultat ne dépend pas que du co-contractant, mais également d’autres
facteurs, ne font pas l’objet d’un contrat d’entreprise. Par exemple, les contrats entre
médecin et patient ne sont pas des contrats d’entreprise, le médecin ne pouvant
garantir la guérison malgré un traitement médical absolument correct. Un avocat ne
peut pas non plus être sûr de gagner son procès. Les contrats portant sur la direction
des travaux, soit ceux par lesquels l’architecte s’engage à diriger et surveiller
l’exécution de l’ouvrage, ne constituent pas des contrats d’entreprise, puisque
l’architecte ne garantit pas le travail qu’effectuent les tiers.

Les deux contrats obligent à des services, mais l’exécution de service qui
s’avère différente, et la difficulté s’illustre lorsqu’une personne agit pour autrui. Le
contrat de mandat est défini14 dans le DOC, c’est un contrat qui consiste à accomplir
un acte licite pour le compte d’un mandant, le mandat est un acte juridique par lequel
le mandataire représente son mandant lors de la conclusion d’un contrat. Tandis que
l’entrepreneur ne représente pas son maitre d’ouvrage, car il effectue des actes
matériels ou intellectuels15, et par conséquent les actes passés par l’entrepreneur
n’engagent pas le maitre d’ouvrage, car il exécute un travail personnel dont il prend la
responsabilité. De plus, le contrat de mandat fini par la mort du mandant ou du
mandataire16, tandis que le contrat d’entreprise s’éteint avec le décès de
l’entrepreneur.

12
https://www.lagbd.org/index.php/Contrat_d%27entreprise_(fr)#I._Le_contrat_d.E2.80.99entreprise_et_les_
contrats_voisins
13
Beatrice BOURDELOIS, Droit des contrats spéciaux, Ed Dalloz, 2017, p117.
14
Article 879 du DOC : Le mandat est un contrat par lequel une personne charge une autre d'accomplir un acte
licite pour le compte du commettant.
15
Francois Collart Dutilleul et Philippe Delebecque, op,cit, p 657.
16
Article 929 du DOC.

7
Paragraphe 4 : Le contrat d’entreprise et le contrat de bail

Le louage d’ouvrage consiste à une obligation de faire, tandis que l’objet louage
d’une chose ou le bail est de procurer la jouissance d’un bien. Mais, il y a risque de
confusion entre les deux, dans la mesure où les objets des deux contrats se trouvent
liés. C’est le cas dans des contrats assez simples où la fourniture d’une chose
s’accompagne de la prestation d’un unique service indissociable de l’usage de la
chose17.

Paragraphe 4 : Le contrat d’entreprise et le contrat de dépôt

Le contrat de dépôt a pour objet la remise d’une chose mobilière à une autre
personne, qui se charge de garder la chose déposée et de la restituer dans son
individualité18, quant au contrat d’entreprise, il consiste à faire quelque chose et non
pas la garder.

On note que le contrat de dépôt est à titre gratuit, sauf stipulation contraire,
contrairement au louage d’ouvrage qui est un contrat à titre onéreux visant toujours un
gain pécunier, de ce fait il est toujours fondé sur la spéculation. De plus, on remarque
souvent que la contrepartie reçue après l’exécution de l’ouvrage est plus significative
que celle donné pour la garde de la chose, car l’entrepreneur apporte plus d’effort, et
garantit plus de risques, de ce fait sa responsabilité est plus contraignante que celle
du dépositaire.

Section 2 : La conclusion du contrat d’entreprise

Le contrat d’entreprise est un contrat consensuel qui se forme dès le simple


échange des consentements19. Il est un contrat parfait par le consentement des
parties20. Toutefois, le législateur n’exige aucune forme spécifique, l’écrit est requis
pour donner preuve aux engagements des parties au contrat21.

17
Francois Collart Dutilleul et Philippe Delebecquen op,cit, p 662.
18
Article 781 du DOC.
19
Daniel MAINGUY, op,cit, p556.
20
Article 723 du DOC.
21
Beatrice BOURDELOIS, op,cit, p108.

8
Néanmoins, le consentement ne doit pas être vicié par l’un des vices de
consentement à savoir l’erreur, le dol et la violence. Le consentement doit porter sur
des éléments du contrat, à savoir le prix qui doit être déterminé ou être susceptible
d’être déterminé, de plus le législateur a donné comme possibilité une part déterminée
des grains ou des produits, ou bien une remise proportionnelle sur les opérations faites
par le d'ouvrage22.

Quant à la capacité, les deux parties doivent avoir l’âge de majorité légal qui est
de 18 ans, ce qui implique que les parties doivent avoir la capacité de s’obliger23,
toutefois le mineur ou l’interdit doit être assisté par son représentant légal ou la
personne soumis à son autorité.

Pour l’objet du contrat, il doit être licite, conforme à l’ordre public et les bonnes
mœurs et qu’il soit possible à s’exécuter24.

De plus, pour conclure le contrat d’entreprise les parties doivent être désignés,
une détermination suffisante de l’ouvrage et un accord sur le principe de la
rémunération. Les parties sont l’entrepreneur et le maitre d’ouvrage. Concernant le
prix, il s'agit du cœur du contrat d'entreprise. Cependant, cela n'implique pas que le
prix soit déterminé conventionnellement dès la conclusion du contrat. Généralement,
un taux est prévu pour la fixation du prix permettant un encadrement défini et qui va
permettre d'éviter la fixation de prix abusifs25.

Quant à l’ouvrage, il se définit comme le résultat d’un travail ou d’une activité.


L’objet du contrat peut porter sur différents ouvrages tels que des plans d’ingénieur, la
réalisation d’un escalier, la réparation d’une toiture, la démolition d’une annexe, le
curage des canalisations, des travaux de peinture intérieure. Les contrats d’entreprise
ne s’appliquent pas exclusivement au domaine de la construction, on les trouve
également dans le cas d’ouvrages mobiliers ou de leur réparation. Un ouvrage
immatériel peut également être l’objet d’un contrat d’entreprise lorsqu’il constitue, de

22
Article 730 du DOC.
23
Article 725 du DOC : Le louage d'ouvrage et celui de services ne sont valables que si les parties contractantes
ont la capacité de s'obliger.
24
Article 729 du DOC.
25
https://fr.condolegal.com/condolegal/glossaire/rubrique/contrat-d_entreprise/782

9
par sa nature, le résultat d’un travail. Par exemple, les contrats portant sur des
services26.

Il faut ajouter encore qu’une phase précontractuelle peut précéder le contrat


d’entreprise, ce qu’on appelle le devis. Il s’agit d’une condition généralement liée à ce
type de contrat en raison de son rôle important dans la conclusion du contrat définitif.
Le devis est une invitation à entrer aux pourparlers, et de ce fait comme une invitation
à la conclusion du contrat. Il s’agit d’un document qui détaille les prestations à fournir
et donne un prix indicatif ou définitif. C’est un document précontractuel qui a vocation
à devenir contractuel si les parties consentent au contrat sur sa base.

Les négociations contractuelles n’obligent pas les protagonistes à conclure un


contrat. En principe, une partie n’agit pas de façon déloyale lorsqu’elle abandonne les
négociations. En revanche, lorsqu’une partie n’informe pas son partenaire en
négociations de son absence de volonté de conclure le contrat, elle va à l’encontre du
principe de bonne foi, elle lui fait croire à tort que le contrat sera conclu. Cette violation
du devoir d’information peut entraîner des revendications de dommages et intérêts.
Ces prétentions restent néanmoins très limitées.27

De surcroit, parmi les règles spécifiques qui caractérisent le contrat d’entreprise,


celles relatives aux marchés publics. En effet ce type de contrat d’entreprise est régit
par des dispositions particulières28.

Le contrat de passation d’un marché public n’est pas conclu de manière facile
et directe comme dans les autres types de contrats, car il doit obéir à quelques
formalités, d’ailleurs on trouve que le décret relatif aux marchés publics a déterminé
trois modes de passations de ce contrat, il s’agit de29 :

26
https://www.weka.ch/themes/droit/mandat-et-contrat-dentreprise/contrat-dentreprise/article/contrat-
dentreprise-ses-bases/
27
https://www.weka.ch/themes/droit/mandat-et-contrat-dentreprise/contrat-dentreprise/article/contrat-
dentreprise-ses-bases/
28
Décret n° 2-12-349 du 8 joumada I 1434 relatif aux marchés publics. (B.O. n° 6140 du 4 avril
2013).
29
Article 16 : Modes de passation des marchés du Décret n° 2-12-349.

10
1- Marché par appel d’offre.
2- Marchés passés par concours.
3- Marchés négociés.

Pour la preuve du contrat d’entreprise, il appartiendra à celui qui se prévaut de


l’existence du contrat d’en rapporter la preuve. Aussi celui qui exige le paiement par
son cocontractant d’une prestation dont ce dernier conteste la présence dans le
contrat doit prouver qu’elle été bien contractuellement prévue30. Sa preuve obéit au
droit commun de la preuve des actes juridiques mais leur mise en œuvre présente
quelques spécificités en raison des règles spéciales gouvernant la détermination du
prix31.

Chapitre 2 : L’exécution du contrat d’entreprise

Maintenant on va aborder de manière plus avancée le contrat d’entreprise en


étudiant dans ce chapitre les obligations qui incombent aux parties lors de la
conclusion du contrat, ensuite on va s’intéresser à son extinction à travers les causes
de son extinction.

Section 1 : Les obligations à la charge des parties

Le contrat d’entreprise est un contrat synallagmatique qui produit des effets


réciproques incombant aux parties dans le contrat. Etant donné que les parties dans
le contrat d’entreprise sont à la fois l’entrepreneur et le maitre d’ouvrage, on va
déterminer les obligations de l’entrepreneur et les obligations du maitre d’ouvrage.

30
Vincent GORLIER, op.cit., p347.
31
Pascal PUIG, Contrats spéciaux, Ed Dalloz, 2019, p709.

11
Paragraphe 1 : Les obligations de l’entrepreneur

D’après l’article 723 du DOC on tire que l’obligation principale de l’entrepreneur


est l’exécution de l’ouvrage, certes de cette obligation découle certaines autres
obligations telle la livraison de l’ouvrage et l’obligation de garantie.

- L’exécution de l’ouvrage :

Généralement l’entrepreneur est tenu d’accomplir son travail, conformément


aux modalités du contrat. Parfois l’entrepreneur est lié par un délai qu’il faut le
respecter pour délivrer l’ouvrage promis, surtout dans les marchés publics, où il est
soumis au calendrier d’exécution des travaux et les mesures générales qu’il entend
prendre à cet effet32, idem pour le législateur français33. De ce fait l’entrepreneur sera
responsable de son fait, sa négligence, son imprudence en cas de manquement à
cette obligation34.

Un arrêt de la cour d’appel de Rabat daté de 2005, a considéré que l’entreprise


de construction qui a négligé ses travaux avant l’achèvement de l’ouvrage, est
responsable individuellement de tout dommage causé ultérieurement.

Parlant de la nature de l’obligation de l’entrepreneur, on se demande si


l’obligation est de moyen ou de résultat. Toutefois, afin de répondre à cela il faut étudier
chaque cas de façon indépendante35, un architecte ou un ingénieur ont l’obligation de
résultat car ils sont tenus de réaliser un ouvrage déterminé qui doit satisfaire les
attentes du maitre d’ouvrage, quant au médecin, son obligation est de moyen car il est
tenu d’utiliser tous les moyens possibles et la technologie disponible afin guérir son
patient.

En principe l’entrepreneur doit effectuer personnellement la prestation


requise36, objet du contrat, surtout quand sa nature ou une stipulation contractuelle

32
Abdelhamid ZOUBAA, op,cit,p 257.
33
Article 1166 du Code civil.
34
Article 737 du DOC : Le locateur d'ouvrage ou de services répond, non seulement de son fait, mais de sa
négligence, de son imprudence et de son impéritie.
35
Francois Collart Dutilleul et Philippe Delebecquen op,cit, p 721.
36
Daniel MAINGUY, op,cit, p556.

12
l’exige37. Certes l’entrepreneur peut recourir à une sous-traitance, notamment en
matière de marchés publics, et ce pour but d’incorporer les petites et les moyens
entreprises dans l’exécution de l’ouvrage. Il peut décider de confier à plusieurs
entrepreneurs (Co-entrepreneurs) la réalisation des travaux, chacun intervenant dans
son domaine de compétence. Ou peut également choisir de confier à un seul
entrepreneur toute la construction (Entrepreneur général)38.

- La livraison de l’ouvrage :

Lorsque le travail ou l’ouvrage est terminé39, l’entrepreneur doit le délivrer au


maitre d’ouvrage comme convenu dans le contrat tout en respectant la date et le lieu
de la délivrance40. Toutefois, concernant la modalité de délivrance, rien n’est prévu par
la loi et on peut recourir à l’application des règles générales de la délivrance, par
exemple elle se fait main en main si l’ouvrage est un bien meuble, et si l’ouvrage était
un bien immeuble l’entrepreneur doit le mettre à la disposition du maitre d’ouvrage41.

- Obligation de garantie :

L’entrepreneur est tenu de garantir les vices cachés de l’ouvrage42, cela est
prévu par le législateur lorsqu’il a fait renvoi aux règles de garantie du contrat de vente,
à savoir les articles 549, 553, 556 du DOC43.

Ainsi l’entrepreneur sera responsable de la malfaçon grevée l’ouvrage, ce qui


va permettre au maitre d’ouvrage détectant ce vice de suivre la procédure prévue par
lesdits articles, commençant par une déclaration dans les 7 jours dès la date de la
découverte du vice ou dès la date de la livraison.

37
Article 736 du DOC.
38
https://www.weka.ch/themes/droit/mandat-et-contrat-dentreprise/contrat-dentreprise/article/contrat-
dentreprise-ses-bases/
39
Pascal PUIG, op,cit, p710.
40
Article 778 du DOC.
41
Article 500 du DOC.
42
Pascal PUIG, op,cit, p710.
43
Article 767 du DOC.

13
Le maitre d’ouvrage peut choisir la voie judiciaire si l’entrepreneur ne répond
pas à ses demandes, en intentant une action en justice dans le délai de 30 jours
lorsqu’il s’agit d’un bien meuble et 365 jours lorsque le bien est un immeuble.

Il faut savoir que les architectes sont tenus d’une garantie décennale de
l’ouvrage, ils sont responsables dans les 10 années qui suivent la date de
l’achèvement de l’ouvrage dont ils ont dirigé ou exécuté de l’écroulement partiel ou
totale, ou même s’il présente un danger d’écroulement ou de vice de construction44.

Abordant un peu de jurisprudence, la cour de cassation marocaine, a cassé un


arrêt qui a fondé la responsabilité d’écroulement d’un mur de la société A sur la tête
d’une victime sur les dispositions de l’article 89 relative à la responsabilité du gardien
de la chose puisque l’édifice est approprié à la société A, toutefois après l’expertise
effectuée, il s’avère en réalité qu’il s’agit d’un vice de construction grevé l’édifice bâtit
depuis 1995, alors que normalement l’écroulement partiel doit être imputé à
l’entreprise de construction et l’architecte, en vertu des dispositions de l’article 769 du
DOC, et qui prévoit une garantie décennale. En l’espèce le décès de la victime est
survenu en 2000 alors qu’il reste encore 5 ans de garantie45.

La garantie concerne les vices cachés, ces vices peuvent être un défaut de
construction, la mauvaise qualité des matières premières exploitées ou bien un défaut
dans l’ouvrage lui-même,

On ajoute également que l’architecte en tant que professionnel doit assumer


une autre obligation de conseil et d’orientation46 car la nature de son activité exige
cette obligation. L’entrepreneur doit s’informer sur les besoins de son client, se
renseigner sur la finalité des travaux qu’il accepte de réaliser et adapter le matériel ou
le service proposé à l’utilisation qui en est prévue47.

44
Article 769 du DOC.
45
Arrêt de la cour de cassation marocaine N° 5461 daté de 13 déc 2011, dossier civil N° 4059- 1-3-2010, publié
dans le centre Idriss EL FAKHOURI des études et de recherches en sciences juridiques Oujda.
46
Pascal PUIG, op, cit, p718.
47
Francois Collart Dutilleul et Philippe Delebecque, op,cit, p691.

14
Paragraphe 2 : Les obligations du maitre d’ouvrage

Le maitre d’ouvrage et tenu de payer le prix et de prendre la livraison de l’ouvrage.

- Le paiement du prix

L’exécution de l’ouvrage est liée par une contrepartie que le maitre d’ouvrage
doit honorer, donc le contrat d’entreprise est un contrat à titre onéreux. Dans le contrat
d’entreprise la détermination du prix peut être faite après l’achèvement de l’ouvrage.

Selon le DOC le paiement du prix n'est dû qu'après l'accomplissement de


l'ouvrage ou du fait qui est l'objet du contrat. Lorsque le paiement du prix est calculé
par fraction de temps ou d'ouvrage, le paiement est dû après l'accomplissement de
chaque unité de temps ou d'ouvrage48 . Dans le cas où le prix n’est pas déterminé, il
peut l’être une fois la prestation réalisée, d’un commun accord ou par une intervention
judiciaire49.

Pourtant, l’entrepreneur généralement fixe le prix après l’exécution de l’ouvrage


dans les petits travaux comme les activités artisanales, ce qu’on voit également avec
des professions libérales, comme pour le médecin, l’avocat, l’architecte.

Dans le domaine des marchés publics, le maitre d’ouvrage dispose du pouvoir


de déterminer le prix adéquat avec l’ouvrage effectué, cela passe par une longue
procédure de vérification par le biais de l’ordonnateur qui vérifie la comptabilité de
l’ouvrage avec les conditions requises et la dette publique, et puis il arrête le montant
de la dépense50.

D’autre coté, si le maitre d’ouvrage ne paye pas le prix convenu, cela peut
permettre à l’entrepreneur de retenir la chose jusqu’à ce que le maitre d’ouvrage
honore son engagement.

48
Article 775 alinéa 2 du DOC.
49
Marc Olivier HUCHET, op.cit, p188.
50
Abdelhamid ZOUBAA, op,cit, p263.

15
- Obligation de prendre la livraison de l’ouvrage

La réception est l’acte juridique unilatéral par lequel le maître de l’ouvrage


approuve les travaux accomplis par l’entrepreneur, reconnaît la conformité de
l’ouvrage réalisé à celui commandé et déclare l’accepter51, ainsi il doit prendre livraison
de la chose objet du contrat d’entreprise après l’accomplissement des travaux.

Quant est-il du transport, le maitre d’ouvrage est tenu de transporter le bien à


ses frais, s’il est susceptible d’être transporté, mais rien n’empêche les parties de
convenir que la livraison sera à la charge de l’entrepreneur après l’achèvement de
l’ouvrage. Cela dit qu’il résultera de cette faculté une augmentation du prix52, car
l’entrepreneur va expédier l’ouvrage avec une contrepartie qui s’ajoute sur le prix
principal.
Cette réception, va engendrer comme effets le transfert de la garde et les
risques au maitre d’ouvrage, et va libérer l’entrepreneur de la charge de la garantie,
exception faite, pour les garanties des vices cachés et la garantie décennale comme
on a vu en haut.

Section 2 : L’extinction du contrat d’entreprise


Le contrat d’entreprise prend fin de la même maniéré édicté par les règles
générales, toutefois, garde quand même des causes particulières.

Paragraphe 1 : Les causes légales

Selon l’article 745 du DOC les causes légales d’extinction sont de trois.

Le contrat d’entreprise prend fin par l’expiration du terme établi,


l’accomplissement de l’ouvrage, le service ou du fait qui faisait l’objet du contrat. Le

51
Pascal PUIG, op, cit, p724.
52
Francois Collart Dutilleul et Philippe Delebecque, op,cit, p691.

16
moment parfait pour que ce contrat s'éteigne serait l'exécution réciproque des
obligations des deux parties53.

Le contrat d’entreprise prend fin aussi lorsque l’exécution de la tâche est


impossible, conformément aux dispositions de l’article 293 du DOC, qui prévoit que
l'obligation s'éteint lorsque, depuis qu'elle est née, la prestation qui en fait l'objet est
devenu impossible, naturellement ou juridiquement, sans le fait ou la faute du débiteur
et avant qu'il soit en demeure. L’impossibilité d’exécution doit résulter d’une force
majeure ou cas fortuit, ou bien toute cause étrangère à la volonté, prenant l’exemple
d’un médecin qui a été chargé d’une opération chirurgicale, alors qu’il se rétracte en
raison de sa maladie grave, d’où il ne peut pas se concentrer pendant l’opération.

Finalement, le contrat d’entreprise peut être résolu pour inexécution du contrat,


dans le cas où l’entrepreneur n’a pas honoré son obligation de faire, d’où l’imputation
de sa responsabilité contractuelle. Ce qui permet au maitre d’ouvrage de demander la
résiliation, et les dommages-intérêts bien entendu s’il arrive à prouver les dommages.
Mieux encore, le maitre d’ouvrage peut insérer dans le contrat une clause résolutoire,
qui lui permet de résilier le contrat.

Le contrat d’entreprise peut être résolu par l’autorité judiciaire sur une
prononciation du juge dans des cas déterminés par la loi.

Paragraphe 2 : Les causes particulières

Le contrat d’entreprise prend fin par le décès de l’entrepreneur54, toutefois le


décès du maitre d’ouvrage ne met pas un terme au contrat car celui-ci a des ayants
droit qui vont le substituer après sa mort55.

On trouve que c’est pareil pour le droit français, dans l’article L1795 du code
civil, qui prévoit que le contrat de louage d'ouvrage est dissous par la mort de l'ouvrier,
de l'architecte ou de l’entrepreneur.

53
https://fr.wikipedia.org/wiki/Contrat_d%E2%80%99entreprise.
54
Pascal PUIG, op, cit, p729.
55
Article 745 du DOC.

17
De surcroit, le maitre d’ouvrage peut ne pas vouloir continuer l’exécution de
l’obligation pour raison ou autre parmi, ce qui constituera une cause d’extinction du
contrat d’entreprise à travers la résiliation unilatérale provenant du maitre d’ouvrage,
et cela se comprend d’après les dispositions de l’article 762 du DOC, on peut le
qualifier ainsi comme un droit de rétractation.

La résiliation unilatérale se trouve souvent dans le cadre des marchés publics,


la personne publique peut toujours résilier un contrat sans qu’il ait une faute du
cocontractant, d’ailleurs c’est le principe dont se fonde les contrats administratifs, et
par lequel la personne publique peut mette fin au contrat à tout moment en le résiliant
unilatéralement.

Cependant, le maitre d’ouvrage qui souhaite de résilier le contrat d’entreprise


doit notifier le titulaire de l’ouvrage, et l’indemniser s’il y a lieu à des dommages-
intérêts56, et généralement cette décision est motivée par l’intérêt général, or parfois
peut être une solution à des situations instables le cas d’une force majeure, fait de
prince, et des aléas imprévisibles57.

56
Pascal PUIG, op, cit, p729.
57
Abdelhamid ZOUBAA, op,cit, p 337.

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Conclusion

Le contrat d’entreprise recouvre une extrême diversité de relations


contractuelles, il est régi depuis longtemps par le DOC au Maroc et par le code civil en
France.

Les prestations de services ont connu depuis une centaine d’années une
évolution remarquable et significative à travers l’extension du champ d’activités et
services. Certes, le législateur n’a pas suivi cette percée en réformant le contrat
d’entreprise car on voit qu’il est toujours régi par les dispositions de 1913 ce qui montre
un retard au niveau législatif du contrat d’entreprise.

Toutefois, la jurisprudence a jouer un grand rôle pour la qualification du contrat


d’entreprise surtout avec les imprécisions des définitions législatifs.

De plus, on trouve que ce contrat est peu attaqué dans les ouvrages marocains,
ce qui est malheureux surtout qu’on n’a pas trouvé un ouvrage marocain comme pierre
angulaire traitant de manière profonde ce type de contrat, contrairement au droit
français ou les auteurs ont brillé dans le sujet.

Ce qui nous pusse d’après notre étude de se demander sur une possible
réflexion concernant les dispositions régissant ce contrat, vu qu’il est de plus en plus
utilisé dans nos économies surtout avec l’essor économique et la profonde montée
que connait le domaine des prestations de services au Maroc et dans le monde.

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Bibliographie

-Ouvrages

• François Collart DUTILLEUL et Philippe DELEBECQUE, Contrats civils et


commerciaux, 11e Ed Dalloz, 2019.

• Daniel MAINGUY, Contrats spéciaux, Ed Dalloz, 2020.

• Vincent GORLIER, Le droit des contrats spéciaux, Ed Ellipses, 2021.

• Pascal PUIG, Contrats spéciaux, Ed Dalloz, 2019.

• Marc Olivier HUCHET, Les indispensables du droit des contrats spéciaux, Ed


Ellipses, 2016.

• Beatrice BOURDELOIS, Droit des contrats spéciaux, Ed Dalloz, 2017.

• Abdelhamid ZOUBAA, Les systèmes de gestion des marches publics, Ed Dar


Assalam, 2019.

-Lois

• Dahir (9 ramadan 1331) formant code des obligations et des contrats (B.O. 12
septembre 1913).
• Code civil français édition du 2 mars 2022.
• Décret n° 2-12-349 du 8 joumada I 1434 relatif aux marchés publics. (B.O. n°
6140 du 4 avril 2013).

-Webographie (Consultés le 03-04-2022)

- https://www.dalloz.fr/documentation/Document?id=DZ%2FOASIS%2F000274
- https://www.lagbd.org/index.php/Contrat_d%27entreprise_(fr)#I._Le_contrat_d.E2.80.99en
treprise_et_les_contrats_voisins
- https://wikimemoires.net/2011/03/distinction-contrat-entreprise-avec-autre-contrats/
- https://www.lagbd.org/index.php/Contrat_d%27entreprise_(fr)#I._Le_contrat_d.E2.80.99en
treprise_et_les_contrats_voisins

20
- https://fr.condolegal.com/condolegal/glossaire/rubrique/contrat-d_entreprise/782

- https://www.weka.ch/themes/droit/mandat-et-contrat-dentreprise/contrat-
dentreprise/article/contrat-dentreprise-ses-bases/
- https://fr.wikipedia.org/wiki/Contrat_d%E2%80%99entreprise.

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