Vous êtes sur la page 1sur 31

Manuel Castells

Vers une théorie sociologique

de la planification urbaine *

sociologie
différents
déterminations
conceptuelles
prétation
trop
Cependant
censés,
des
exigeante
grande
il Fort
Changeant
s'est
illustrations
souvent
non
ambition
inspiré?
d'une
des
d'abstraction.
groupes
,deon
pas
processus
de
de
laexcellente
objectives.
se
convaincantes,
Louis
souci
planification
registre
certes
de
d'acteurs
demandera
rigueur,
Althusser
théorique
d'
apporter
Faut-il
, aménagement
il
connaissance
,s'essaie
oubliant
Vauteur
doivent
urbaine
si
en
pour
une
les
faire
ensuite
démonstration
essais
construire
par
beaucoup
que
et
nous
qui
de
grief
d'trop
cette
équipement.
la
àne
d'
offre
àappliquer
application
littérature
l'auteur
retient
les
de
tentative
unleur
d'abord
contenus
schéma
entière,
que
intérêt
La
ou
certaines
ne
existante
sociologie
au
concrète
la
les
théorique
sociaux
soit
mais
àthéoricien
critique
stratégies
cette
pas
indications
duetmanque
qui
réflexion
et
d'inter¬
saluée.
moins
dune
d'une
leurs
dont
sont
des

Les « problèmes urbains », c'est-à-dire les processus sociaux de consom¬


mation collective, deviennent centraux dans la société industrielle avancée.
Parce qu'ils mettent en jeu la capacité du système social d'absorber le
rythme de changement, ils doivent être traités par les institutions poli¬
tico-administratives et gérés en termes prévisionnels. L' « urbain » se
confond de plus en plus avec la planification urbaine.
L'espace devient plutôt déterminé que déterminant dans le complexe
technico-social des activités de production et d'échange. Il est donc sou¬
mis à des mécanismes de régulation sociale générale. Élément d'inertie
Manuel Castells

dans un ensemble en mutation, il doit être « approprié » par les organisa¬


tions et les activités et, donc, disparaître dans un réseau d'interdépen¬
dances dont le centre régulateur est le système de planification.
fication
L'objeturbaine
réel de1. la sociologie urbaine devient donc, surtout, la plani¬

D'autre part, cette pratique accrue d'intervention prévisionnelle sur


l'urbain provoque une sollicitation constante de la sociologie pour répon¬
dre à tout un catalogue de problèmes. Or la première question, rarement
posée, à laquelle elle doit répondre, est celle de la signification sociale
de la planification urbaine. En effet, pour que l'apport de la sociologie
ne soit pas pure manipulation politique, il faut analyser le processus
social ainsi nommé, montrer quel est son sens, au lieu de l'accepter comme
une donnée et de prendre pour argent comptant la représentation idéolo¬
gique que les planificateurs se font d'eux-mêmes. La planification urbaine,
dont les représentants réclament avec tant de vigueur une sociologie
scientifique, acceptera-t-elle ce traitement « psychanalytique ? »
Nous nous proposons ici de présenter les premiers jalons dans cette
direction. Pour cela, il faut d'abord établir les contours de notre objet,
la planification urbaine, en tant que thème théorique et réalité historique.
En effet, si la plupart des urbanistes en sont encore au stade des « évi¬
dences » physiques, un puissant courant d'analyse, issu de la science
politique américaine, aborde actuellement la question dans une perspec¬
tive aussi brillante que dangereuse. Faire le point de cette tentative,
repartir ensuite sur des nouvelles bases théoriques et esquisser des ana¬
lyses sociologiques concrètes tel est notre propos.

I. HISTOIRE ET IDÉOLOGIE DE LA PLANIFICATION URBAINE

Sous l'étiquette de planification urbaine (« city planning » dans la litté¬


rature anglo-saxonne) on range toute une série d'interventions dont le
seul trait commun semble être, à première vue, d'avoir lieu dans le cadre
d'une ville... On y ajoute le caractère délibéré, concerté , de l'action 2.
Or, quand on définit la planification comme l'effort pour agir de façon
consistante et délibérée 3, ou comme un ensemble de cartes, de programmes
et de déclarations politiques servant de guide à l'action publique ou pri¬
vée 4 ou, encore, comme l'application de la prévision pour réaliser cer¬
tains objectifs pré-établis relatifs à la croissance et au développement des
zones urbaines 5, on accorde un privilège au mécanisme de l'activité sur
son contenu, en inscrivant déjà la réponse théorique dans la manière de
poser le problème 6.
Si nous partons plutôt de l'évolution sociale pour, après, reformuler
théoriquement
deux ensembles ladequestion,
problèmesle : terme de planification urbaine renvoie à

414
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

1) les remèdes portés aux « insuffisances » du processus d'industriali¬


sation au niveau de la consommation, en particulier de la consommation
de biens collectifs.

2) La gestion technico-économique d'unités spatiales de plus en plus


larges et complexes.

Cette distinction ne recouvre pas celle, classiquement faite, entre pla¬


nification
était de transformer
« sociale » et le
« physique
mode de » vie
7, car
à l'objectif
travers l'amélioration
des premiers urbanistes
du cadre

spatial et que, d'autre part, le processus de gestion technique des grandes


agglomérations est un véritable enjeu politique 8.
Il est vrai que pendant très longtemps la planification urbaine a été
et reste encore centrée sur les problèmes d'équipement collectif. Ce n'est
pas par hasard que les plus forts mouvements urbanistiques sont nés en
Angleterre et que c'est là qu'aient eu lieu les premières grandes réalisa¬
tions
ouvertement
à partir l'industrialisation
du Plan Abercrombie.
sans contrôle
Or, c'est social
en Angleterre
avait subordonné
que le plus
la

ville à l'industrie et créé une forte disparité entre le pouvoir d'achat indi¬
viduel et l'organisation sociale de la consommation collective (logement,
équipements socio-culturels, parcs, écoles, etc.) 9. Mais le même problème
s'est posé partout, et les mêmes réactions dangereuses pour l'ordre éta¬
bli se sont produites, en particulier dans les périodes de crise : plans d'urba¬
nisme de l'administration Roosevelt aux États-Unis 10, villes nouvelles
construites par le gouvernement social-démocrate en Suède u, expé¬
riences tentées au moment de la reconstruction de l'Europe dans l'après-
guerre 12.
Dans les dernières années, la rénovation urbaine, qui occupe les devants
de la scène en Europe et surtout aux États-Unis, reprend cet effort pour
gérer techniquement au niveau du cadre urbain la disparité des groupes
sociaux à l'égard de la consommation.
D'autre part, au fur et à mesure que la complexité du réseau d'interdé¬
pendances à la base des grandes agglomérations augmentait, il fallait
mettre en place des mécanismes de gestion capables d'assurer le fonc¬
tionnement sans à-coups pour l'ensemble. Des plans d'urbanisme proposant
la cité idéale, on est passé à des schémas qui appliquent au niveau dè la
cohérence d'une unité spatiale les « ordres » émis par l'extrapolation des
tendances « spontanées » du système. Là où des goulots d'étranglement
se produisent ou des incompatibilités se révèlent, les planificateurs devront
intervenir, plutôt en médiateurs qu'en dirigeants. La création de bureaux
d'urbanisme dans toutes les villes importantes, les plans d'aménagement
et les modèles d'urbanisation expriment cette deuxième réalité de la pla¬
nification urbaine étroitement liée à la première 18. Dans les pays comme
les États-Unis, où la planification économique gouvernementale n'a pas
d'expression institutionnelle, les plans d'urbanisme jouent très souvent
ce rôle de régulateurs de la croissance par l'introduction, au niveau de
Manuel Castells

l'aménagement spatial, des critères de rentabilité de l'ensemble. Dans le


cas de la France, le contenu des schémas d'aménagement est entièrement
conditionné par les Plans nationaux à tel point qu'il faudrait voir dans
les premiers une spécification des seconds. Par le biais de « l'urbain »,
on est ainsi introduit à l'étude de la planification tout court.
Ces constatations historiques éclairent le panorama. En effet, la plani¬
fication urbaine, comme le dit Ledrut, n'est pas « une science normative
des bonnes formes urbaines » (ce qu'est l'urbanisme) mais « un moyen de
contrôle social de l'ordre urbain » 14. Mais ce moyen de contrôle n'est pas
quelconque. Il s'agit d'interventions dépendantes des institutions adminis¬
tratives et politiques , c'est-à-dire investies d'autorité. Sans cette restriction,
tout acte social serait planification, puisque tout acte a une influence
plus ou moins grande dans la régulation de l'ensemble. S'agit-il d'une
action concertée, même privée, sur le cadre urbain ? Notre réponse est
négative : historiquement, la création directe d'un cadre urbain par l'ini¬
tiative privée est exceptionnelle et n'est que le résultat second d'une
autre activité. En ce sens, toutes les villes modernes ont été « créées »
par l'industrie privée puisqu'elles en sont entièrement dépendantes, même
dans leur tracé. Mais plus encore, du point de vue théorique, le critère
fondé
entre actions
sur le degré
« libres
de »volontarisme
et « subies » d'une
dont action
nous allons
consacre
montrer
cette les
distinction
dessous

idéologiques.
Si notre objet d'étude est l'ensemble des processus sociaux ainsi dési¬
gnés, cela implique que l'on rompe avec la vision naïve de l'urbanisme
comme réponse publique aux « besoins » individuels et collectifs. Non pas
que ces problèmes soient inexistants ; mais les « besoins » ne sont pas un
fait naturel et ils ne sont traités socialement que dans la mesure où ils
sont exprimés socialement à travers un jeu politique 15. Ce passage de
« l'évidence des besoins » à une sociologie du processus politique inscrit
dans la gestion de la consommation collective est le point de départ de
toute recherche sur la planification urbaine.
Ce passage a été accompli par le nouveau courant libéral de la science
politique américaine qui, à partir des travaux de Dahl 16 et de Banfield 17
s'est consacrée à l'étude du « pouvoir local », ou, plus précisément, des
processus dans les collectivités urbaines. Réagissant contre la réduction
du processus politique à une application mécanique du système de stra¬
tification 18, ils ont montré comment il n'y avait pas d'unité dans le sys¬
tème
et surtout
de décision
suivantet l'interaction
que tout un concrète
jeu était entre
possible
les suivant
différents
les acteurs
problèmes
en

présence (entrepreneurs, syndicats, presse, associations de résidents, etc...),


c'est-à-dire d'après leur capacité à gagner la partie.
Dans la perspective de ce pluralisme politique, la planification urbaine
met en jeu toute une série d'intérêts autour desquels des alliances se nouent,
des conflits se déclenchent 19. Les planificateurs auront pour rôle de déce¬
ler les fondements réels du débat et d'essayer de l'orienter vers un com-
416
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

promis autour de certains buts communs, par exemple la croissance ;


leur pouvoir de négociation est celui d'experts détenant une connaissance
du possible. La rationalité ainsi gérée n'est donc pas la cohérence entre
les fins et les moyens mais le dénominateur commun minimum entre les
intérêts de l'ensemble du système et la situation concrète de pouvoir
résultant du jeu entre les acteurs 20.
L'analyse de la planification urbaine devient ainsi l'analyse du pro¬
cessus engagé à l'occasion d'une initiative de l'administration pour résou¬
dre un problème posé, par exemple celui de la pénurie de logement 21. Elle
se double souvent d'une analyse des planificateurs, comme profession,
insistantsur
ticulier surleur
le rôle
action
que médiatrice
ceux-ci jouent
22. dans une telle séquence et en par¬

Le schéma proposé par Michel Crozier pour étudier la planification


française qui cumule les deux thèmes, s'inscrit tout naturellement dans
cette perspective 23. S'il part en guerre, à juste titre, contre le débat pure¬
ment idéologique sur les fins de la planification et ne veut pas se limiter
à l'analyse du « manifeste », il n'en réduit pas moins la planification aux
moyens, aux mécanismes. C'est une étude du processus de décision. Cette
optique est d'autant plus séduisante qu'elle correspond à un certain réa¬
lisme intelligent, à une sorte de relativisme historique : il s'agit d'analyser
ce qui est donné, de prendre les conflits politiques ou les décisions admi¬
nistratives en question pour démonter le réseau enchevêtré des intérêts
en jeu. Mais, à partir de là, on s'oriente vers une systématisation des
découvertes, avec la décomposition des processus en mécanismes et de
ceux-ci en stratégies. La sociologie devient une vaste sociométrie.
Il n'est pas question de faire ici la critique de l'analyse stratégique
Mais il faut nous interroger sur sa validité par rapport à notre objet d'étude,
la planification urbaine, dans la mesure où elle s'y prête entièrement
puisque c'est sur ce terrain qu'elle a remporté ses plus grands succès. Elle
refuse certes l'assimilation des fins explicites au contenu social. Mais cette
différence établie, suffit-elle pour qu'on puisse étudier le processus entre
les acteurs indépendamment du contenu de leur débat ? Quel est le degré
d'autonomie du jeu d'interactions par rapport aux actions elles-mêmes ?
Qui sont ces « acteurs » ? Peuvent-ils être définis en soi, sans référence
au contenu social qu'ils expriment ? La faiblesse fondamentale de l'ana¬
lyse stratégique semble venir de ce qu'elle a recours à un postulat phi¬
losophique sans lequel elle devient une pure description empirique. Ce
postulat est qu'il faut « mettre l'accent, finalement, sur la liberté de
l'homme qui reste, quelle que soit sa situation, un agent autonome capable
de négocier sa coopération » 25. Ce n'est, effectivement, qu'à partir du
moment où l'on affirme cette individualité irréductible (des individus ou
des groupes) que l'on peut concevoir l'action sociale comme un réseau
de stratégies émises à partir d'une multiplicité de centres autonomes.
Toute la construction théorique repose alors sur cette première affirmation,
qui est affaire de croyance. Il faut montrer comment à partir des diffé-
Manuel Castells

rents « contenus sociaux », c'est-à-dire des articulations des éléments de


la structure sociale (notion théorique ), on arrive à rendre cohérentes les
actions sociales concrètement observées, quitte à retrouver, en fin d'ana¬
lyse, une certaine autonomie du jeu des acteurs, ou plutôt une action
déterminée au second degré. La pertinence ou la non-pertinence des notions
employées repose sur la richesse et la profondeur du processus de démons¬
tration qu'elles permettront de développer.
Au contraire si on continue de tenir les acteurs pour des objets empiriques,
l'analyse stratégique devient pure description de situations particulières ;
s'ils sont des réalités premières, donc des essences, elle doit se fonder sur une
métaphysique de la liberté ; s'ils sont « quelque chose d'autre », donc des
combinaisons de situations sociales particulières, il est impensable de les
définir indépendamment du contenu des positions sociales qu'ils occu¬
pent et par conséquent d'analyser les processus entre eux comme pur
échange, puisque les modalités de cet « échange » vont dépendre de l'ancrage
des acteurs dans la structure sociale et leur message de l'information
transmise plutôt que du code employé.
Si cette perspective a eu le mérite de sociologiser l'étude de la plani¬
fication en la déliant du débat sur les valeurs, elle risque d'entraîner dans
une autre philosophie de l'histoire en partant des acteurs et de rester
ainsi en retrait du fonctionnalisme qui, au moins, part de la notion de
rôle
culturellement
et considèredéfini
les 26.
acteurs suivant leur place dans un système social

Pour illustrer le problème, prenons comme exemple la fameuse contra¬


diction relevée aux États-Unis entre le caractère métropolitain (au moins)
des problèmes à résoudre et l'éparpillement des unités de gestion admi¬
nistrative 27 . Cette difficulté pour aboutir à des gouvernements métropo¬
litains a été expliquée par l'absence de coordination et de contact entre
les différentes autorités. D'où l'insistance des planificateurs sur ce thème
et leurs tentatives pour organiser des négociations dans un cadre d'ensem¬
ble indispensable à la gestion technique des ensembles urbains 88 . Mais
ce décalage n'est que l'expression du caractère collectif des appareils pro¬
ductifs (réunis dans le sein de grandes organisations interdépendantes)
qui ne s'est pas accompagné d'un mouvement parallèle au niveau de
l'appropriation sociale du produit. En effet, si les activités productives
doivent garder une interdépendance sur une vaste échelle spatiale, et si
l'équipement collectif est beaucoup plus rentable lorsqu'il est planifié à
cette échelle, la diffusion des centres résidentiels dans l'espace correspond
à un processus de différenciation et de ségrégation sociale lié aux caracté¬
ristiques
ture sociale
des29.résidents,
Les autorités
c'est-à-dire
administratives
à la place qu'ils
localesoccupent
étant une
dans
émanation
la struc¬

de ces unités, il ne peut pas y avoir de coordination qui aboutirait à une


redistribution de revenus entre les « slums » du noyau central et les ban¬
lieues résidentielles de la classe moyenne, comme l'a montré remarqua¬
blement Norton E. Long s0. La solution est donc de créer des institutions
418
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

métropolitaines pour résoudre des problèmes particuliers, notamment le


transport, et de traiter les problèmes sociaux du centre-ville à titre d'assis¬
tance sociale, en rapport direct avec le gouvernement fédéral. Ainsi, le
jeu entre les acteurs est pré-établi. Il ne s'agit pas d'une pluralité d'inté¬
rêts mais d'une exigence structurelle du système avec, à côté, des méca¬
nismes d'ajustement 31 .
En France, Ledrut a montré qu'il s'agit du problème inverse : les opé¬
rations d'urbanisme sont surtout le fait d'initiatives de l'État qui dépas¬
sent les collectivités locales. Peur du face à face de la part des Français ?
Mais la planification urbaine en France, notamment dans la région pari¬
sienne, est en fait beaucoup plus portée vers l'aménagement de la crois¬
sance que vers l'équipement des consommateurs.
Comme les acteurs supportent les structures sociales, leurs comporte¬
ments en sont l'expression ; il y aura par conséquent des homologies
entre systèmes d'acteurs et rapports structurels, ce qui donne la possibi¬
lité de trouver une cohérence dans un processus d'action. Mais les lois de
cette cohérence échappant à une analyse stratégique, celle-ci ne pourra
qu'accumuler des constatations aussi intelligentes que pittoresques.
Il y a des degrés divers dans la détermination et, selon les situations,
l'autonomie du jeu des acteurs est d'autant plus grande qu'elles sont plus
institutionnalisées, plus réglementées et que l'action y est plus éloignée
de sa détermination par le contenu. Ce n'est pas par hasard que Crozier
a fondé sa théorie de la liberté des acteurs à partir de recherches dans
des organisations bureaucratiques, sur lesquelles le marché n'avait pas
d'influence directe et où le monde des moyens primait sur les fins 32. On
comprend aussi alors pourquoi le libéralisme dans l'exercice du commande¬
ment est l'apanage des dirigeants, comme l'a montré Lipset, alors que la
classe ouvrière est « autoritaire », puisque, effectivement, peuvent être
tolérants ceux dont la domination institutionnalisée n'a pas besoin d'être
rappelée par des gestes.
Cependant si les thèmes de la société programmée et du rôle de l'inno¬
vation comportent le danger de l'idéologie technocratique qu'ils véhiculent,
ils indiquent bien des transformations essentielles de la société indus¬
trielle avancée. En effet, la complexité technique et sociale accrue demande
non seulement une gestion plus prévisionnelle, mais aussi centralisée
dans des centres de pouvoir régulateurs de l'ensemble du système ou de
sous-ensembles suffisamment vastes et reliés entre eux. Il faut prendre
comme objet d'analyse cette nouvelle forme de gestion de nos sociétés,
cette capacité de distanciation des centres régulateurs par rapport à des
parties du système, sans pour autant s'abandonner à la science-fiction
d'une société cybernétique axée sur la rationalité universelle. La ratio¬
nalité n'est que l'intelligence d'une situation donnée. Elle prend son sens
dans la structure de production et de domination du système considéré
et devient ainsi susceptible de traitement scientifique.
L'analyse de la planification urbaine est celle des transformations du
Manuel Castells

système de gestion de la consommation collective et de l'organisation


spatiale des activités. Plus précisément, elle devra identifier le contenu
social de la « rationalité » urbanistique sans pour cela réduire l'urbanisme
à des anecdotes de « pots de vin ». En cela, elle est, comme toute sociologie
sérieuse depuis Durkheim, déterministe par postulat de méthode : elle
analyse les limites dans lesquelles s'exerce la transformation des struc¬
turestransformations.
ces sociales par la société elle-même et des processus de réalisation de

II. ÉLÉMENTS POUR UN SCHÉMA D'ANALYSE SOCIOLOGIQUE

Une pratique théorique n'existe comme telle que dans la mesure où elle
produit des connaissances sur le concret-vécu, tout en comprenant dans le
long terme une possibilité d'application à des réalités particulières 33. Puisque
nous refusons de partir de l'analyse des acteurs en tant que sujets autonomes,
il faut établir les éléments et combinaisons définissant la structure sociale,
la spécifier par rapport à notre problématique concrète, en déduire les
acteurs qui se constituent autour d'elle et montrer les rapports nécessaires
entretenus à l'occasion de l'action, objet de notre étude.

a) Le cadre théorique de référence

l'ensemble
l'École
Nous Normale
prendrons
conceptuel
Supérieure
comme
élaboré
point
à par
partir
deLouis
départ,
de la
Althusser
lecture
à un et
niveau
du lesCapital
chercheurs
très 34.
général,
Nous
de

prenons là un risque considérable. En effet, ces textes sont d'abord phi¬


losophiques, tout en renfermant des analyses « sociologiques » (matéria¬
listes historiques) qui portent essentiellement, à la suite de Marx, sur la
seule région économique d'un mode de production particulier, le capita¬
lisme. Ils constituent donc une problématique plutôt qu'une théorie. Ils
signalent les contours d'un champ théorique possible sans le délimiter
entièrement. On comprend alors les difficultés à surmonter quand il s'agit
non seulement d'explorer d'autres niveaux, en particulier le système
politique, mais de rendre compte en plus d'un processus social particulier,
ce qui oblige à conceptualiser le passage au système des acteurs (supports)
et la détermination précise de la conjoncture sociale étudiée.
Cependant, la lecture de la trame sociale suggérée par ces catégories
met sur la voie d'une réelle compréhension de la production des formes
sociales, même si le cheminement est long et le travail d'innovation théo¬
rique (il faut lire : nécessité de l'erreur) considérable. Nous verrons au
passage comment des notions forgées dans d'autres perspectives théo¬
riques, comme celles de système urbain et de système d'acteurs, devien¬
nent plus éclairantes à partir d'une délimitation de leur contenu cohérente
avec la problématique énoncée.
420
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

Rappelons très rapidement ce cadre d'analyse35. Le concept central


est celui de mode de production. Par mode de production, on n'entend pas
l'économique mais une forme spécifique d'articulation des éléments (ins¬
tances) fondamentaux d'une structure sociale, à savoir, « système » éco¬
nomique, politico-juridique, idéologique, sans que la liste des « systèmes »
possibles soit limitative. Dans tout mode de production il y a un système
dominant , variable, dont la place dans la structure caractérise le mode de
production en question. Dans tout mode de production, il y a un système
déterminant en dernière instance qui, lui, est invariant : il s'agit toujours
de l'économique. C'est le type de système économique (la structuration
particulière de ses éléments) qui explique le système dominant dans chaque
mode de production, donc la structuration particulière des divers sys¬
tèmes (matrice du mode de production). Une société historiquement
donnée (formation sociale) est l'enchevêtrement particulier de plusieurs
modes de production dont l'un est dominant.
tions
Chaque
entre système
eux. L'articulation
est composéded'éléments
ces éléments
qui structurels
entretiennent
dans des
certains
rela¬

types de relations définit l'état du système, lui même dépendant de la


matrice générale du mode de production. Dans le cas essentiel du système
économique, ces éléments sont au nombre de trois : la force de travail,
les moyens de production (objet et moyens de travail) et le « non-travail¬
leur ». Le processus de travail est l'intervention de la force de travail sur
les moyens de production pour réaliser le produit (lui même décomposé
en (re) production de la force de travail et (re) production des moyens de
production). Dans ce processus se manifestent deux relations entre les
trois éléments : 1) une relation de propriété (à ne pas confondre avec la
propriété juridique qui appartient au système politico-juridique) ; 2) une
relation « d'appropriation réelle », concernant le contrôle du processus
technique de travail. Si les éléments du système politique et du système
idéologique ne sont pas clairement définis, ils peuvent être déduits à partir
du rôle joué par ces deux systèmes dans l'ensemble de la structure : rôle
de régulation-domination pour le système politique et rôle de « recon¬
naissance-communication-légitimation » pour le système idéologique.
Les caractéristiques du mode de production capitaliste (MPC), le seul
qui ait été étudié scientifiquement du moins dans sa région économique,
sont les suivants : 1) la relation de propriété et la « relation d'appropria¬
tion » sont homologues : le non-travailleur est propriétaire de la force de
travail et des moyens de production et, à la fois, « contrôleur » du processus
technique de mais
déterminant production.
dominant.
2) le système économique n'est pas seulement

Une distinction clef sépare structure et pratiques. Les pratiques sont les
rapports entre les différents éléments et les différentes structures 86. Les
agents, dont l'expression la plus distincte sont les classes sociales, ne sont
que le support de ces rapports structurels. Les rapports entre les classes
sociales d'une société concrète sont l'effet sur les rapports sociaux, de
421
Manuel Castells

l'ensemble complexe de modes de production qui y sont articulés. Enfin,


les rapports de pouvoir, d'un intérêt particulier pour notre analyse, sont
des rapports entre les classes sociales, c'est-à-dire des rapports entre
rapports, dépendant de l'articulation spécifique d'une société.
La planification urbaine est, en général , V intervention du système poli¬
tique sur le système économique, au niveau d'un ensemble socio-spatial
spécifique, afin de régler le processus de reproduction de la force de travail
(consommation ) et de reproduction des moyens de production (production)
en dépassant
tion sociale dont
les contradictions
il assure la subsistance.
suscitées dans l'intérêt général de la forma¬

Cette intervention ne peut se faire que dans les limites structurelles


de la société concrète, c'est-à-dire en respectant l'articulation essentielle
du mode de production dominant, mais en apportant en même temps
les retouches nécessaires aux articulations non essentielles pour préser¬
ver la « bonne marche ». Il y a donc autonomie de la planification par
rapport aux groupes sociaux spécifiques et asservissement nécessaire de
son intervention à la matrice sociale dans laquelle elle s'insère.
Cette intervention représente une configuration particulière des rap¬
ports sociaux, déterminée par l'enjeu en question, c'est-à-dire par la
place de la contradiction traitée dans la conjoncture d'une société con¬
crète. La distribution des « individus » et des « groupes » en fonction de
ces rapports organise le « système des acteurs ».
D'autre part, si la planification urbaine est toujours une intervention
du politique sur l'économique au niveau d'un ensemble spatial, il se peut
que l'effet recherché corresponde à un autre système, par exemple au
système politique.
Enfin, si le rapport premier à dégager va du politique à l'économique,
il faut tenir compte : 1) des répercussions spécifiques venant des autres
systèmes et allant aux autres systèmes ; 2) du fait qu'une recherche porte
sur une combinaison concrète de plusieurs modes de production et sur des
rapports entre les rapports dérivés de chacun d'entre eux.

b) Les notions de système urbain et de système cT acteurs urbains 87

prendre
culier.
nouveau
une
tiques
structure
système
teur
dans
Ayant
Lamise
de
unstructure
Car
sociales
la
formes
politique.
ensemble
langage,
précisé
en
d'une
ilspécification
ne engagées
rapport
suffit
sociale,
unité
sociales,
ce
ilurbain
L'analyse
faut
point
des
pas
socio-spatiale
ensemble
àde
différentes
de
c'est-à-dire
encore
de
l'égard
de
cette
dire
même
d'un
départ,
ce
construire
conceptuel,
perspective
des
ensemble
qu'esi
situations
donnée.
que
en
problèmes
nous
tant
dans
la les
planification
n'est
Elle
urbain
pouvons
pour
qu'expression
une
structurelles
concepts
urbains.
s'exprime
pas
entreprise
notre
en«maintenant
tant
extérieure
nécessaires
urbaine
domaine
avec
concrètement
non
que
ou dans
des
produc¬
pas
dans
»entre¬
parti¬
pour
pra¬
àdes
un
ce
la

422
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

institutions mais des structures sous-jacentes, peut être faite à partir de


la notion de système urbain.
Nous appelons système urbain l'articulation spatialement spécifique des
éléments fondamentaux du système économique. Le système urbain est
la structure des rapports entre processus de production et processus de
consommation dans un ensemble spatial donné, à travers un processus
d'échange et un processus de gestion de ces rapports.
Les éléments du système urbain sont donc :

P ( Production) : Ensemble d'activités productrices de biens, services


et informations. Exemple : l'industrie, les bureaux 38.
C (Consommation ) : Ensemble d'activités relatives à l'appropriation
sociale, individuelle et collective, du produit.
Exemple : la résidence, les équipements collectifs.
E {Échange) : Échanges produits entre P et C, à l'intérieur de P
commerce.
et à l'intérieur de C. Exemple : la circulation, le

G ( Gestion ) : Processus de régulation des rapports entre P, C, E.


Exemple : gestion municipale, plans d'urbanisme.

Ces éléments sont des processus sociaux, c'est-à-dire des interventions


d'agents sociaux sur des éléments matériels, expression de l'état des rap¬
ports sociaux dans la conjoncture traitée. La planification urbaine est
l'intervention de l'élément G sur l'un ou l'autre des éléments (y compris
lui-même) ou sur leurs rapports.
Cette intervention : — dépend du type de régulation requis par la situa¬
tion (en termes simples, du « problème » à résoudre) ; — exprime l'état
des rapports entre les éléments du système urbain. (Ces rapports, comme
nous le verrons, ne sont pas arbitraires mais spécifient les rapports sociaux
généraux, en font partie) ; — détermine une configuration particulière des
acteurs sociaux en jeu.
En effet, il faut bien rendre compte des pratiques et donc du processus
engagé entre des acteurs sociaux concrets. Mais ces acteurs sociaux n'exis¬
tent pas pour eux-mêmes, ils sont l'effet de l'état des rapports sociaux
au niveau du système urbain. Le système d'acteurs urbains résulte de la
répartition des agents sociaux (individus ou groupes) dans les différents
éléments et sous-éléments du système urbain.
Plus concrètement, les acteurs vont être définis par leur insertion dans
une série de dichotomies fondamentales que l'on retrouve dans le système
urbain : — opposition entre production et consommation : P/C ; — oppo¬
sition, à l'intérieur de G (processus de politique dans le système urbain)
entre domination et subordination , ce qui correspond à la gestion investie
à' autorité (A) ou exercée par des organisations (0) : A/0 ; — différencia¬
tion de niveaux entre la spécificité du système urbain (niveau local) et
l'ensemble de la structure (niveau global) : G/L.
Manuel Castells

Chacune des combinaisons entre les éléments structurels ainsi définis


doit donner lieu à un type d'acteur urbain. Cet acteur, défini théorique¬
ment par une combinaison de « centres d'intérêt », n'est rien d'autre que
le support de ces « intérêts », et sa pratique va dépendre du type de rap¬
ports entretenus par les éléments de base dans le système urbain parti¬
culier.

On peut même trouver, à titre d'exemple, des expressions concrètes de


ces combinaisons définissant des « acteurs réels » susceptibles d'être enga¬
gés dans une opération urbanistique :

Combinaison
structurelle
théorique E r. , ,,

O1 — G — P Grandes entreprises internationales.


O — G — C Syndicats de salariés.
O — L — P Chambres de commerce et de l'industrie.
O — L — C Associations de voisins.
_ Q _ p \ Organismes de planification urbaine, par exemple le Dis-
A G C j> trict
organismes
ou la et
D.A.T.A.R.
des services.
Le caractère P ou G dépend des
A — L — P Comités d'action concertée ou d'expansion régionale.
A — L — C Institutions municipales.

la 1.consommation.
O : organisation.
— L—: local.
G : global.
— A— : autorité.
P : centré sur la production. — C : centré sur

Dans chaque décision précise étudiée, il faut identifier l'acteur concret


qui exprime une combinaison particulière.
Il est vrai que les acteurs ainsi énoncés sont constamment pris en con¬
sidération dans toute étude décisionnelle. Mais l'essentiel, c'est de les
retrouver comme résultat d'une articulation particulière d'éléments struc¬
turels. Car maintenant leurs pratiques ne sont plus question de jeu d'in¬
fluence mais effet nécessaire des rapports que les éléments structurels
entretiennent entre eux. C'est dire que ces acteurs agissent suivant les
« intérêts » inscrits dans la définition dont ils sont l'objet et que l'articu¬
lation de ces intérêts manifeste les lois de la conjoncture de la formation
sociale en question. Le problème alors est de déterminer ces lois et d'envi¬
sager la manière dont l'ensemble de la structure détermine le système
urbain et le système des acteurs.

c) La détermination structurelle des politiques urbaines

les Une
sur
analyse
processus
lui-même
politique
sociologique
spécifiques
à travers
urbaine
de la
une
à
, c'est-à-dire
une
planification
action
unitéréalisée
urbaine
unurbaine
ensemble
par
, est son
consiste
undesystème
effet
décisions
àduétablir
système
d'acteurs.
portant
concrète-
urbain
Une
sur

424
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

ment de quel effet il s'agit, au-delà des intentions des acteurs et des formes
spatiales.
Cet effet exprime un état donné de la structure sociale, c'est-à-dire
une conjoncture. Une telle détermination n'est pas abstraite mais spéci¬
fique à un moment donné d'une formation sociale. Donc, il est impossible
d'établir systématiquement tout un ensemble de lois générales. On peut,
en
duction.
revanche, déterminer des lois limites à l'intérieur d'un mode de pro¬

Soit un mode de production particulier, le mode de production capita¬


liste (MPC) 40. Nous savons qu'il y a décalage entre le contrôle particula-
riste de la force de travail et des moyens de production et le caractère
collectif de la (re) production de ces deux éléments. Pour nous référer
concrètement à notre question, au niveau de la reproduction des moyens
de production il y a contradiction entre le profit plus élevé obtenu par
une entreprise en s'implantant dans le milieu industriel déjà constitué
d'une grande agglomération et le dysfonctionnement suscité par la géné¬
ralisation d'un tel comportement ; de même, il y a contradiction entre
cette même stratégie du profit et le sous-développement de certaines
régions, comportant la non mise en valeur des ressources existantes.
Du côté de la reproduction de la force de travail, il y a contradiction
entre le besoin de concentrer cette force dans les métropoles industrielles
(à la fois comme main-d'œuvre et comme marché) et l'incapacité des
capitaux pour offrir des logements et équipements en nombre suffisant
du fait de l'absence de rentabilité, elle-même effet de la stratification des
revenus résultante du système.
Si l'on accepte l'idée du système politique comme régulateur de l'ensem¬
ble du système (formation sociale concrète), en fonction des lois structu¬
relles qui en sont le fondement 41, la planification urbaine est son interven¬
tion sur une réalité donnée pour contrebalancer les décalages exprimés.
En effet, dans les termes du système urbain : (décalage (re)production
P) ---- > (G ---- > P), (décalage (re) production C) ---- > (G ---- >
C) 4a.
Cependant, ces éléments n'existent pas isolément, mais sont toujours
en relation. Une intervention ne peut donc pas porter sur l'élément en
lui-même mais sur la relation qui le définit. Nous savons que, au niveau
du système économique d'un mode de production, il y a deux relations :
propriété (contrôle) et appropriation réelle (direction technique).
D'autre part, toute intervention de G n'est pas possible, car elle doit
se
maisfaire
ébranlé.
dans les limites du MPC, sans quoi le système ne sera pas réglé

Quelles sont ces limites ? 1) Il ne peut pas y avoir, en général, d'alté¬


ration du rapport de propriété. 2) Il n'y a pas d'intervention directe de
G sur P. Ceci appelle quelques précisions : — a) Il peut y avoir intervention
de G sur quelques aspects du processus technique de travail au niveau
de P, dans l'intérêt de l'ensemble (par exemple, le zoning). — b) Il peut
425
Manuel Castells

y avoir intervention indirecte de G sur P (par exemple incitations fiscales


ou financières) sous la forme d'une prime à ce que l'on pourrait appeler
le « patriotisme du système ». — c) Il peut y avoir intervention directe
de G sur C. Cependant, — elle est toujours postérieure à l'expression
sociale du décalage ; — elle s'effectue comme appoint de l'intervention
directe de P sur G ; — elle exprime, dans sa forme, l'effet de l'idéologique
sur l'économique ; — surtout , elle dépend directement de l'état de la poli¬
tique, c'est-à-dire de la pression sociale exercée par la force de travail.
— d)de
tion Quand
G sur leP décalage
tend à seà faire
traiter
à travers
est fondé
dessur
interventions
un état de sur
P, l'interven¬
les autres

éléments du système, en particulier sur E.


Il faudrait ainsi pouvoir montrer le rapport entre conjoncture, combi¬
naisons entre éléments et politique urbaine. Nous pouvons, par exemple,
classer les politiques urbaines en trois grands groupes : — Politique d'Équi¬

pement
collective
publics.
tion
un
une
maintien
mettant
le
mis
naissance
Enrapprochement
cipale
minant
les
minement
général
Si
Ilplan
termes
deçà
sur
restructuration
faut
fonctionnelle
l'on
»).
: pour

le
on
de
celle
en
des
du
pense
donc
créatrice
non
contrôle
par
du
Politique
transports.
rapport
peut
fonctionnement
politiques
la
qui
système,
satisfaits,
partir
lequel
que
production
dire
est
est
des
de
la
social,
la
des
<T
axée
immédiat
de
on
que
production
la
Aménagement
politique

conditions
montrer
urbaines,
la
rapports
tension
par
aboutit
sur
Politique
:la
codification
et
—(ce
exemple
politique
la
laentre
(décalage
subvention
qu'on
d'une
les
entre
politique
àet
ilentre
générales
l'une
de
rapports
y:lasociété
le celle
Développement
acontrôle
pourrait
:les
d'aménagement
du
politique
les
aussi
ou
G)
deux
«de
qui
aux
parcs
éléments
problème
de
l'autre
----
entre
est
développement
lasocial
appeler
est
pôles.
besoins
l'activité,
non-politique,
l'ensemble
d'équipement
de
les
centrée
>deloisir,
:du
de
urbain
(G
éléments
celle
une
et
ces
de
cette
système
----
l'intérêt
par
consommation
sur
politiques.
«les
qui
des
»police
et
production,
traité
l'organisa¬
et
logements
exemple
ou
et
porte
processus
G);
lal'accent
urbain.
le
prédo¬
le
recon¬
muni¬
dans
che¬
pur
sur
En
—:

(décalage C) ---- > (G ---- > C) ; — (décalage E) ---- > (G ---- ►


E) ; — (décalage P) ----- >-(G --- > E, C ou E et C).
Quand il n'y a pas correspondance entre l'élément à l'origine du déca¬
lage et l'élément traité (sauf pour P), il ne s'agit pas d'une véritable inter¬
vention
cas : sur l'économique, mais sur le politique ou l'idéologique. Dans ce

- Une opération de planification urbaine peut être un effet du poli¬


tique sur le politique. Dans ces conditions, l'apparence économique de
l'intervention joue un rôle idéologique, masquant le sens de l'interven¬
tion pour la légitimer.
- Une opération de planification urbaine est souvent une intervention
du politique sur l'idéologique. Par exemple, l'usage des plans d'urbanisme
426
Vers un « théorie sociologique de la planification urbaine

comme modèles non conflictuels de société, comme solution des problèmes


sociaux par les transformations urbanistiques. Dans ce cas, son appa¬
rence économique joue un rôle politique pour permettre d'imposer ces
représentations en éliminant, par des promesses d'assistance sociale, les
rience.
oppositions suscitées à partir de la non-adéquation du modèle et de l'expé¬

On est ainsi introduit à l'interaction possible entre système économique,


politique et idéologique dans une conjoncture concrète, car si nous sommes,
en principe, dans le cadre d'une action sur l'économique, les formes sociales
peuvent envelopper des contours différents suivant la conjoncture.
Plus concrètement, suivant la localisation du décalage ou de l'ensemble
de décalage dans la structure sociale, il y aura un dérèglement nécessaire
du système urbain dans l'un ou plusieurs de ses éléments. L'intervention
régulatrice de la planification, effectuée dans les limites signalées, suppose
la production d'un effet nouveau sur le système urbain, à travers un pro¬
cessus supporté par les acteurs, correspondant au type d'intervention et
qui va agir suivant les rapports entretenus dans cette conjoncture pré¬
cise par les éléments structurels qui le définissent. Chacun de ces processus
différentiels, structurellement déterminé, aboutit à un résultat, à une
politique urbaine.
Cet effet, c'est-à-dire cette politique, peut être caractérisé, en principe,
suivant plusieurs éventualités : — intervention fonctionnelle ou gestion des
affaires courantes ; — intervention sur C : Politique d'Équipement ; — inter¬
vention sur E : Politique d'Aménagement ; — intervention sur G : Réforme
administrative ; — intervention sur les rapports entre les éléments :
Politique de développement ; — intervention sur le politique : Maintien
de l'ordre (Intégration-Répression) ; — intervention sur l'idéologique :
Utopie urbanistique.
D'autre part, à l'intérieur de chacun des types d'intervention, il peut
y avoir des niveaux. Par exemple, dans la politique d'Équipement, il
peut s'agir d'une politique de construction de logements (intervention
sur C1), de réalisation d'équipements simples, jardins d'enfants, écoles
(intervention sur C2) ou d'équipements complexes, parcs, unités socio¬
culturels, etc. (intervention sur C3). En plus, chaque type de politique,
à chaque niveau, peut être mené avec une plus ou moins grande inten¬
sité.

On apprécie aisément le jeu possible de cheminements entre chaque


« problème urbain », chaque combinaison structurellement suscitée du
système urbain et chaque politique urbaine.
De cette façon, le rapport entre structure sociale et politique urbaine
devient plus clair. Il ne s'agit pas d'expliquer un acte particulier dans le
contexte de « la société globale ». Le système urbain et le système des
acteurs urbains ne sont autre chose que la structure sociale exprimée à
propos d'un ensemble de pratiques sur un domaine particulier dans une
conjoncture donnée. Si les rapports système urbain — système des acteurs
Manuel Castells

— politique urbaine épuisent la compréhension du problème, ils n'ont


de signification théorique qu'à travers la reconstruction théorique de
l'ensemble de la structure qui les contient. C'est bien là l'expression d'une
causalité structurale, à l'opposé d'une causalité linéaire de variable à
variable. En effet, toutes les combinaisons ne sont pas possibles et cer¬
tains rapports en entraînent nécessairement d'autres. Les rapports entre
système urbain et système des acteurs sont l'expression spécifique des rapports
entre les divers systèmes et pratiques de la société concrète étudiée. L'état de
la structure sociale (la conjoncture) est la cause structurale , efficace dans
sa non-présence, des rapports entre les deux systèmes , aboutissant à donner
un contenu précis à V opération urbanistique.
Si nous avons présenté des éléments théoriques susceptibles de fonder
une nouvelle perspective d'analyse, nous n'avons pas pour autant établi
de façon rigoureuse le champ théorique qui, à partir de la combinaison
des différents modes de production, pourrait spécifier les règles de pas¬
sage à tout l'éventail de conjonctures sociales et, à l'intérieur de chacune
d'entre elles, permettrait de prévoir les rapports qui vont du système
urbain à la politique urbaine. Dans des termes classiques, il n'y a pas
d'hypothèses , mais des limites et des règles opératoires.

III. ÉTUDE DE CAS

Nous tenons à illustrer la démarche proposée par une première analyse


de quelques expériences urbanistiques particulièrement significatives.
Disons tout de suite qu'une telle recherche aurait besoin d'une documen¬
tation beaucoup plus considérable que celle utilisée par nous 43 et, sur¬
tout, aurait pu être menée plus efficacement en observant directement
le processus d'une intervention planificatrice. Mais, si, dans la phase
actuelle de l'investigation, on ne peut pas aboutir à une démonstration
rigoureuse, il est essentiel de montrer l'enchaînement concret des concepts
élaborés et d'apprécier à leur lumière la possibilité de lecture d'une situa¬
tion historique.
Les trois cas étudiés correspondent à des formations sociales dans les¬
quelles le mode de production capitaliste est dominant. Dire cela est
trop général, car il est aussi important d'établir des limites et des con¬
jonctures qui servent à expliquer des différences essentielles à l'intérieur
d'un autre mode de production ainsi qu'à déceler des éléments des nou¬
vellesdeformes
blir telles qui
distinctions
naissent. en
Desmontrant
recherchescesconcrètes
nouvellespeuvent
articulations.
aider à Mais
éta¬

s'il est vrai qu'en parlant de capitalisme on n'a pas tout dit, il est impor¬
tant de souligner les limites structurelles que cela impose. En utilisant
le capitalisme en tant que concept scientifique (forme spécifique d'arti-
428
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

culation d'une structure sociale) et non pas comme catégorie idéologique


(opposée à « socialisme »), une telle caractérisation exclut toute une série
d'effets possibles dans les limites signalées auparavant. Pour des raisons
évidentes, nous supposerons connues les données factuelles. Nous n'en ferons
référence que pour donner forme à l'analyse.

a) Le cas des nouvelles villes britanniques 44

crombie
A la base
et le
duNew
mouvement
Towns Act
urbanistique
de 1946, deux
qui déboucha
« problèmes
sur le» Plan
essentiels
Aber- :

1) la sur-concentration industrielle de la région de Londres, entraînant


la concentration démographique et toute une série de difficultés dans le
fonctionnement de l'agglomération ; 2) le manque de logements, et d'équi¬
pements collectifs, en général, surtout pour la population ouvrière. Cette
situation s'était nazis.
bombardements encore aggravée avec les destructions causées par les

Ce qui veut dire que le plus grand profit obtenu par chaque entreprise
du fait de son implantation dans le milieu industriel londonien, sur un
marché considérable et avec d'abondantes possibilités de force et moyens
de travail, aboutit à : 1) un engorgement des activités sur un même espace,
au détriment de tout ce qui n'était pas relié au processus productif et avec
d'autant plus de difficultés de fonctionnement que l'industrie s'était
greffée sur une forme spatiale (la ville) appartenant à un mode de produc¬
tion antérieur 45 ; 2) l'attraction vers Londres de la force de travail sans
emploi des régions non industrialisées, entraînant une crise du logement.
Des nouveaux profits sont effectués au niveau de la reproduction de la
force de travail, et le système politique doit intervenir pour parer à la
trop grande insuffisance du secteur privé en ce qui concerne la construc¬
tion de logements à des prix accessibles à la classe ouvrière.
Ce processus classique avait suscité très tôt dans le xixe siècle des
réactions sociales exprimées dans l'utopie campagnarde, reflet de l'idéolo¬
gie dominante, aristocratique et passéiste. De là, l'ambiguïté du mouve¬
mentd'une
sion des garden
revendication
cities («
a essentielle
peaceful path
et sublimation
to real reform
individualiste
») 46, à la foisde
expres¬
celle-

ci, donc en conformité avec l'éparpillement nécessaire au système au niveau


de la consommation 47.
Quel était le traitement requis pour la solution de ce « problème » ?
Cela dépendait de son expression spécifique au niveau du système urbain.
Il y avait prédominance démesurée de l'élément P qui, en raison de la
passivité (valeur zéro) de G, provoquait des dysfonctions en E et surtout
en C (les problèmes en C étant dus à un double effet de P : en tant qu'élé¬
ment urbain il détruisait le cadre de vie et empêchait les équipements ;
en tant que producteur de C lui-même, c'est-à-dire des profits sur les
logements et de la stratification salariale dans la force de travail, il pro-
Manutl Castells

voquait la crise du logement). Enfin, le dérèglement général du système


urbain se répercutait sur le fonctionnement de P lui-même.
Pour réorganiser le système en profondeur, c'est-à-dire pour établir
une véritable politique de développement régional, avec redistribution
des activités et des populations, il fallait une intervention de G sur P ,
non seulement en ce qui concerne le processus technique mais le rapport
de propriété. D'autre part, en attendant, l'intervention élémentaire de G
sur C1 (logement) était indispensable à la reproduction de la force de travail.
La première intervention rencontrait les limites structurelles qu'on
connaît. La deuxième a eu lieu pendant toute la première moitié du siècle
sous forme de construction de logements par les pouvoirs publics 48.
Pourquoi alors a-t-il fallu attendre 1945 ? Pourquoi tout un ensemble
de mesures a-t-il été déclenché à ce moment-là au lieu de poursuivre des
solutions pragmatiques ? S'il est vrai que la guerre avait rendu les urgen¬
ces plus pressantes que jamais, l'élément déterminant semble bien avoir
été la poussée populaire qui, s'appuyant sur les syndicats, a porté au
gouvernement le parti travailliste. Il semble donc qu'une politique urbaine
(ensemble d'interventions cohérentes de G) n'est pas un effet automa¬
tique d'un dérèglement du système mais qu'il faut, en plus, l'action d'une
force sociale intervenant directement sur le système politique 49.
Ceci ne veut pas dire que la politique urbaine ainsi suscitée soit l'expres¬
sion d'une telle force sociale. Son contenu dépend du processus politique
entre les différents acteurs, lui-même fonction du type d'intervention sur
le système urbain. Par contre, V idéologie urbanistique sera fonction de la
force sociale revendicative, car le plan d'urbanisme est présenté comme
une réponse positive à cette revendication.
Dans notre cas, l'action des syndicats (0 — G — C), expression des
rapports sociaux dans la conjoncture, a permis l'instauration d'un gou¬
vernement travailliste (A — G — P et A — G — C) mandaté pour procéder
à une régulation du système et même aller au-delà. En ce qui concerne le
système urbain, particulièrement à Londres, l'intervention décisive sur
P ne pouvait pas se faire directement. Elle dépendait d'une série d'inter¬
ventions préalables sur l'ensemble du système productif. Elles ont été
amorcées timidement par le gouvernement (lois de nationalisation) : il
fallait en effet que l'industrie soit étatique pour que le gouvernement
puisse la redistribuer spatialement. Avant que, même dans le secteur
touché, les effets de ces nationalisations eussent été exprimés au niveau
spatial, la victoire des conservateurs en 1951 montra les limites à ne pas
dépasser. Les éléments concernant la relation de propriété furent annulés
et ceux relatifs au processus technique du travail réorientés. Au niveau
spatial, seule la demande d'agrément d'implantation industrielle sub¬
sista quoique sans grande efficacité du fait de son application très libérale
et
surtout
du fait,
les aussi,
bureaux.
que les nouvelles implantations productives concernaient

Par contre, au niveau de la consommation (C), une action était possible


430
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

puisqu'il s'agissait de modifier, en l'amplifiant, l'apport déjà existant de


l'État sur ce terrain. Ce qui a entraîné la politique des villes nouvelles,
comme forme d'assistance, et V affirmation de vouloir empêcher la crois¬
sance de Londres, avec son expression symbolique, le « green-belt ». A
côté, deux mesures complémentaires vinrent renforcer la même poli¬
tique : la construction de grands ensembles d'habitation (housing estates)
et le développement des villes périphériques (expanding towns).
Donc, au niveau des acteurs, la poussée de 0 — G — C (syndicats)
devait conduire à une intervention de A — G — P (ministère de l'Indus¬
trie) et de A — G — C (ministère du Logement) sur le système urbain.
L'action de 0 — G —■ P (grandes entreprises) a freiné et finit par éliminer
l'action de A — G — P. En définitive, il n'est resté que l'initiative de
A — G — C (ministère du Logement), dans une intervention G ---- > C
(il n'y a pas eu de politique à l'égard de E). Il est donc normal que le plan
Abercrombie se fonde sur l'hypothèse de la non-croissance économique
et démographique de l'agglomération londonienne. On a beaucoup insisté
sur cette erreur de prévision. Or, cet effet de l'idéologique sur le théorique
était absolument nécessaire à la cohérence d'un plan qui se voulait de
développement, alors qu'il ne se donnait les moyens (il ne pouvait pas se
les donner) que pour faire une politique d'équipement.
Dès lors, le problème est de déterminer par quel processus cette poli¬
tique d' équipement a eu la forme originale des villes nouvelles surtout si
l'on tient compte de quelques mesures énergiques prises au début de l'opé¬
ration (en particulier la nationalisation de la plus-value foncière, vite
abandonnée) et de l'importance des moyens administratifs mis en œuvre.
Il s'agit là d'un effet de l'idéologique , dû à la revendication populaire à la
base de l' opération. Les « villes nouvelles » de la première génération (1946-
50) sont la réorganisation élargie de la politique publique de subvention
à l'équipement urbain, mais sous une forme cohérente, modèle de commu¬
nauté urbaine-industrielle-dans-la-Nature, en accord avec l'idéologie de
l'Establishment et en prolongation des idées passéistes de la Town and
Country Planning Association 50, fondées sur le principe de l'amélioration
des relations sociales par l'agrément du cadre de vie 51 ; de là, la tentative
et
d'une
un autonomie
certain isolement
de ces unités,
volontaire
par dans
l'attraction
le réseau
de nouvelles
de communications.
industries,

De là aussi la composition sociale de ces communautés, villes d'aristo¬


cratie ouvrière, de cadres moyens et d'industries de pointe. De là, enfin,
leur organisation spatiale : unités de voisinage et maison unifamiliale ;
la
et prolifération
de salles de d'églises
cinéma. et d'animateurs sociaux et l'absence de dancings

L'on sait que cette tentative d'isolement s'est vite soldée par un échec,
car rien ne la justifiait. A peu près 20 % de la population active travaille
en dehors de la ville et, surtout, les week-ends voient l'afïluence sur Lon¬
dres de ces « campagnards » devenus consommateurs furieux du centre-
ville, le « vrai », le a Soho ».
431
Manuel Castells

Donc, on peut parler de la réussite de la politique d'équipement avec


une forme particulière répondant à la fonction idéologique nécessaire au
processus social qui l'avait suscitée. Par contre, puisque G n'intervint pas
sur les autres éléments du système urbain ni sur leurs rapports, les pro¬
blèmes demeurèrent, les villes nouvelles n'absorbant que 19 % de la crois¬
sance de l'agglomération de Londres et le green-belt étant vite dépassé
par une industrie privée de la construction qui a produit, de 1945 à 1960,
50 % des nouveaux logements.
Le succès technique des villes nouvelles, c'est-à-dire l'efficacité de cette
politique d'équipement et la fidélité à ses principes idéologiques s'expli¬
que aussi par le processus décrit. L'intervention directe des A — L — ■ C
(dévelopment corporations) se fit avec des pouvoirs très étendus, mais
coordonnés et délégués par un seul acteur (A — G — C, ministère du
Logement) qui prit soin de travailler « dans le vide », ne touchant pas les
municipalités
montré la conformité
existantes
à la
et fois
dansavec
unelesoptique
valeursurbanistique
de l'Establishment
dont Foley
et lesa

sentiments des classes populaires.


Cette analyse trop rapide permet de comprendre pourquoi c'est le plan
Abercrombie et non celui, beaucoup plus technocratique et prospectif,
de la Modem Architectural Research Society, qui a été appliqué ; pour¬
quoi un plan de développement urbain (comme tous les documents urba-
nistiques) est devenu politique à! équipement ; pourquoi celle-ci a pris
cette
taire. forme idéologique précise d'un modèle de civilisation communau¬

A partir d'une telle analyse, il aurait été possible de prévoir que, le


déséquilibre du système urbain londonien subsistant, une nouvelle inter¬
vention devrait se faire jour. Étant donné qu'elle ne pourrait pas interve¬
nir décisivement sur P, elle devrait agir sur E et sur les rapports des
autres éléments avec P. Donc, les nouvelles « villes nouvelles », plus que
« foyers de vie sociale », devraient être conçues comme échangeurs, points
forts d'un réseau régional structuré de façon fonctionnelle, définies non
pas par elles-mêmes mais par leur insertion dans la région 52. C'est ce
passage d'une politique d? équipement à une politique d* aménagement qu'expri¬
ment les nouveaux plans régionaux, dont les propositions du South East
Study (1961) sont la meilleure expression 53. C'est aussi le sens de la réforme
de l'administration locale de 1964, avec le regain d'importance des tech¬
niciens. C'est enfin le déplacement idéologique vers les valeurs de la ratio¬
nalité, nouvelle légitimation sociale, qui oriente récemment l'urbanisme
truit
anglais.
desCumbernauld,
blocs d'habitation
une ville
collectifs
nouvelle
et détruit
plus moderne,
la hiérarchie
en Écosse,
des unités
cons¬

de voisinage. Il est vrai que 50 % de la population active travaille à l'exté¬


rieur 54... La légende de l'urbanisme anglais se dilue dans la quotidienneté
municipale des banlieues résidentielles de la société industrielle.

432
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

b) Le cas de la rénovation urbaine aux Etats-Unis 55

Le foisonnement d'opérations de rénovation urbaine aux États-Unis


dans les vingt dernières années représente l'une des plus grandes entre¬
prises urbanistiques jamais tentées. Ayant son origine dans le New Deal,
mais prenant forme surtout à partir de la Housing Act de 1949, elle est
le terrain
sant une double
privilégié
tradition
d'intervention
américaine
du : Gouvernement
l'autonomie locale
fédéral,
et l'initiative
boulever¬

privée.
L' Urban Renewal Agency a dépensé plus de 3 milliards de dollars dans
ce programme. Son rôle est sans cesse mis en valeur dans les discours
électoraux, et c'est en partie sur ce thème que Johnson avait construit sa
fameuse
contours mystification
? de la « Great Society ». Quels en sont les véritables

L'objectif explicite était V élimination des « slums » 56 . Or, le terme de


slums désigne la coïncidence de trois éléments : logements insalubres,
zones urbaines détériorées, population appartenant aux strates sociales
inférieures, cette « infériorité » se manifestant au niveau du revenu, du
« prestige social » et surtout des caractéristiques ethniques (« non-white »).
Par conséquent, l'ensemble de la politique de rénovation urbaine com¬
prend : 1) Une opération d' équipement, la construction des nouveaux
logements ou la réhabilitation des anciens (housing policy). — 2) Une
opération d' aménagement, visant à rénover le centre ville et lui faire jouer
un rôle d'échange et d'animation dans l'agglomération ( blight removal
and CBD renewal ). — 3) Une tentative d'intégration des sous-cultures
urbaines, à travers le relogement des habitants dans d'autres secteurs
de la ville, en brisant les barrières ségrégationnistes.
Les trois aspects sont en fait liés dans la conduite des opérations : une
fois les taudis détruits, leur place est occupée par des bureaux, des com¬
merces et des appartements de luxe pour les consommateurs privilégiés
du centre-ville. Ainsi se fait la revalorisation du cœur de la métropole.
Ensuite, théoriquement, les anciens résidents reçoivent des logements
meilleurs ailleurs et s'intègrent à l'ensemble de la vie urbaine.
La détérioration du centre-ville est le résultat de la prédominance de
la loi du marché dans l'occupation du sol. En effet, la valeur locative des
vieux immeubles y est fixée sans commune mesure avec le prix très élevé
du terrain susceptible de servir d'assise aux implantations administra¬
tives et commerciales. La classe moyenne résidente peut trouver, à des
prix inférieurs, un confort beaucoup plus grand dans les banlieues rési¬
dentielles. Le développement du transport individuel facilite ce mouve¬
ment centrifuge à la base de la diffusion urbaine. Dans le noyau central,
les immeubles d'habitation ne sont pas entretenus par les propriétaires
car c'est sur la montée du prix du terrain et donc sur la démolition, que
misent les spéculateurs. En attendant, ces immeubles sont source de

433
Manuel Castells

nouveaux profits à travers leur division en appartements et leur location


à ceux qui ont le moins de choix sur le marché immobilier. Une fois ce
mouvement déclenché, il se renforce progressivement et ne peut être
combattu que par une action publique. La population qui s'y concentre
est celle qui a le moins de choix : catégories à revenu faible, immigrants
récents et tout particulièrement ceux qui sont l'objet de ségrégation raciale,
porto-ricains et noirs. Cette coïncidence d'une situation sociale et d'un
cadre résidentiel tend à renforcer la coupure avec l'extérieur du slum et
à favoriser sa cohésion interne, donnant naissance, dans des cas limites,
à de véritables sous-cultures.
Dans ces conditions, quel est l'impact de la rénovation urbaine ? Elle
agit sur le cadre mais non pas sur les mécanismes sociaux qui aboutissent
à la formation des slums. Donc, elle conduit soit à leur maintien, dans
des meilleures conditions matérielles, soit à leur déplacement géographique.
En fait, au début, on a paru s'orienter vers une politique d'équipement.
Mais cela supposait la construction sur place de meilleurs logements à
des prix accessibles à ces catégories dévaforisées. Or, la communauté de
ce milieu restait intacte et le centre de l'agglomération continuait à être
occupé par les « damnés » de la société freinant sa capacité d'échangeur.
Comme conséquence, on s'est de plus en plus refusé à reproduire, en plus
confortable, la même situation sociale. On a donc construit des logements
plus chers et des équipements commerciaux et de loisir destinés à une tout
autre clientèle. Cette évolution est parfaitement exprimée par les modi¬
fications apportées à la loi en 1954 et surtout en 1961, avec l'accent mis
sur les aspects non résidentiels de la rénovation.
Pour les populations « rénovées », relogement « ailleurs ». Ils seront
devant l'alternative : 1) Des logements publics, construits dans le cadre
du programme ; d'où fractionnement du ghetto en plusieurs petits ghet¬
tos, disséminés dans l'ensemble de l'agglomération sans pour autant bri¬
ser les barrières. 2) Suivre le jeu du marché, c'est-à-dire s'intégrer à des
slums encore non touchés ou en former de nouveaux. Significativement,
la plupart des déplacés optent pour la deuxième solution : au ghetto
« isolé », ils préfèrent la sous-culture constituée. Ainsi jusqu'à 50 % d'entre
eux, dans l'ensemble des États-Unis, avaient occupé à nouveau des loge¬
ments détériorés. Ils payaient en moyenne des loyers plus chers : la pro¬
portion du revenu dépensée dans le logement était passée de 17 % à 25 %.
A Philadelphie, dans un vaste programme réalisé en 1955-57, 15 % seu¬
lement des familles avaient accepté d'emménager dans des logements
publics alors que 80 % remplissaient les conditions nécessaires pour le faire.
Dans les termes du système urbain, si le problème semble se poser au
niveau de C surtout, l'action effective sur C est donc quasi inexistante ;
s'il y en a eu une sur E, elle est relativement faible et porte beaucoup
le
plus
sens
surdele cette
prestige
immense
du centre
machine
que sur
? son rôle d'échange. Quel est alors

Ses proportions, par rapport au système américain, sont plutôt modestes.


434
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

Si en 12 ans, entre 1949 et 1961, deux milliards et demi de dollars ont été
dépensés, pendant la même période, les investissements du secteur privé
dans la construction ont été de 10 milliards par année , la proportion étant
donc de 120 contre 1 en faveur du marché privé. Mais cette intervention
a été extrêmement concentrée sur un objectif particulier : la dissolution
des « ghettos noirs » dans les grandes villes. En effet, bien que les noirs
rH occupent que 25 % des logements détériorés dans les villes américaines,
70 % des logements à rénover étaient occupés par des noirs. Les logements
publics sont presque entièrement « non-white ». La proportion de non-
blancs parmi les familles relogées oscille de 62 % à New York jusqu'à
presque 100 % à Baltimore, Washington et Chicago. Dans l'ensemble
80 % des familles relogées étaient des « non-blancs ».
Par conséquent, dans la mesure où ces déplacements ne modifient pas
les mécanismes à la base de la ségrégation et n'aboutissent qu'à la recons¬
titution des slums, nous pouvons conclure que la rénovation urbaine aux
États-Unis n'est pas, pour V essentiel, une intervention du politique sur
V économique, mais du politique sur le politique, visant au maintien de V ordre
et à V intégration des minorités ségrégées. Si l'intégration est tentée par l'amé¬
lioration du cadre de vie, dans la mesure où le logement public est rejeté
par la plupart, elle est bien moins importante que le maintien de l'ordre
c'est-à-dire
nauté noire.la tentative de dissolution de la base écologique de la commu¬

Nous ne faisons pas l'affirmation stupide d'un « complot » des urbanistes


américains contre les noirs. Mais le seul effet réel de la rénovation, à part
quelques améliorations mineures des centres-villes, est celui-là, et c'est
seulement dans cette mesure qu'elle continue à être réalisée. Ce résultat
est la conséquence nécessaire de l'inadéquation structurellement déter¬
minée entre les mécanismes de production de cet effet social et l'interven¬
tion des planificateurs urbains.
S'agissant d'une opération politique, l'essentiel au niveau des acteurs
est la correspondance et l'intégration des participants à cette intervention.
Ainsi, une première condition de « succès » d'un projet particulier, c'est-
à-dire de l'obtention des résultats recherchés implicitement (tension-
management), est l'accord entre les autorités locales, A — L — C, qui
ont l'initiative de l'opération, et l'agence fédérale, A— G — C, qui approuve
et finance. Mais l'élément décisif est l'intégration des associations locales
(O — L — C) capables de jouer le rôle de « courroie de transmission »,
véhiculant des idées clefs du projet parmi les résidents sans pourtant
développer une attitude revendicative qui mettrait en danger les objec¬
tifs. Peter H. Rossi 57 a montré l'importance décisive d'une telle organisa¬
tion de la participation intégratrice en opposant le succès de la rénovation
de Hyde Park-Kenwood (quartier de l'Université de Chicago), où une
telle association a pu se constituer, à l'échec du projet de Morningside
Heights (quartier de l'Université de Columbia, à New York) où, notamment,
des organisations noires s'y sont opposées.
Manuel Castells

Cette analyse permet de prédire l'échec ou la déviation d'opérations de


rénovation qui ne traitent pas le problème en tant que politique et ne se
donnent pas les moyens en conséquence au niveau des acteurs. L'étude de
Meyerson et Banfield 58 sur la rénovation urbaine à Chicago en 1949 en est
un bon exemple. Le projet de construction de logements à prix modiques,
25.000 dans le même quartier rénové et 15.000 ailleurs, proposé par la
Chicago Housing Authority, avec l'appui du gouvernement fédéral, a été
combattu par les hommes d'affaires qui voulaient rénover le centre-ville,
les propriétaires des immeubles, les syndicats (dont la plupart des membres
n'étaient pas concernés, étant donné leur revenu...) et surtout les rési¬
dents des autres zones urbaines où les logements publics allaient être
implantés. En faveur du projet, il n'y avait qu'une partie des résidents
du slum et les résidents « libéraux » des quartiers environnants.
Posée comme pure opération d'équipement en faveur d'une minorité,
elle a été fortement réduite en ce qui concerne les logements sur place
(10.500 ont été construits) et presque éliminée dans sa volonté intégra-
trice (seulement 2.000 logements ont été réalisés à l'extérieur du quar¬
tier). Nous pouvons faire l'hypothèse que si sa seule fonction avait été
celle d'équipement, la rénovation urbaine aux États-Unis aurait eu des
proportions bien plus modestes. Intervention politique donc, elle doit être
étudiée en tant que telle à travers l'analyse de la dialectique intégration-
répression dans le conflit social et racial qui est au centre de la problé¬
matique américaine.

c) Le cas du Schéma directeur de la Région parisienne 59

programme
La planification
qu'une depolitique
la région
urbaine.
parisienne
Maisestl'on
encore
peutbeaucoup
tenter deplus
situer
un

socialement les intentions du Schéma directeur pour en prévoir les suites


et tenter de déceler quelques signes de réponse dans les premiers travaux
entrepris.
A la base du « problème urbain » de Paris, on rencontre le double pro¬
cessus de concentration démographique et industrielle. Cette double con¬
centration revêt une particulière intensité, par suite de la centralisation
étatique française, du rôle décisif de l'État, même au niveau économique.
Nous pourrions dire que la concentration de Paris est un effet spatial de
la « sur détermination
fonctionnement et les »défaillances
du système dans
productif
la consommation
français. Les collective
difficultés en
de

sont aggravées d'autant. Le a livre blanc », publié en 1963, présentait un


tableau sans équivoque.
A ces trois « problèmes essentiels », la concentration urbaine, le mono¬
centrisme et le manque d' équipement, le Schéma directeur essayait d'appor¬
ter une réponse, ou, plutôt, des directives susceptibles d'orienter une
réponse publique. Ce qui caractérise le Schéma par rapport à d'autres
436
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

plans d'urbanisme, et même par opposition au P.A.D.O.G. 60, c'est qu'il


n'essaie pas d'arrêter la croissance de l'agglomération parisienne mais
de l'organiser. Conçu dans le cadre du District parisien, même s'il fait
des hypothèses sur l'évolution de la province, il n'envisage que les mesures
nécessaires à sa structuration. Donc, il n'agit que sur le deuxième pro¬
cessus de concentration, intérieur à la région, sans remettre en cause la
prédominance parisienne.
Puisque le problème de base est d'assurer le fonctionnement d'une
région dominée en excès par son noyau central, le nœud du plan est une
politique d'aménagement , tandis que l'équipement est simplement ordonné
dans ce cadre. La politique d'aménagement portera donc plutôt sur
l'échange et les communications que sur une modification de P ou de G.
L'échange et la restructuration interne de la région demandent deux
choses : des axes qui relient l'ensemble et des points forts de l'urbanisa¬
tion servant de plaques tournantes. Un plan de transports et le projet
de huit
du document.
villes nouvelles de grande taille sont les propositions essentielles

Quelles en sont les perspectives ? Pour y répondre, il faut déterminer


l'ancrage du Schéma directeur dans la structure sociale. S'il s'agit bien
d'une intervention du politique sur l'économique, le contenu de cette
intervention (politique d* aménagement de la seule région parisienne ) exprime
une décision préalable qui, elle, relève de la conjoncture du système poli¬
tique. En effet, on a vite relevé l'arbitraire qu'il y a à vouloir résoudre
les problèmes de la concentration parisienne sans les replacer dans l'ensem¬
ble du pays 81, d'autant plus que les politiques nationales à cet égard
(Commissariat du Plan, Aménagement du Territoire, ministère de l'Équi¬
pement) étaient loin de concorder. On a même vu le ministre de l'Équipe¬
ment qualifier le Schéma directeur d' « aventure intellectuelle ». Cette
nécessité de structurer fortement la région parisienne provient de l'affir¬
mation de sa prédominance ; il s'agit là du versant technocratique du
nationalisme français. En revanche, les vrais technocrates, plus portés
vers la croissance elle-même que vers l'exaltation du pouvoir, voyaient
la nécessité soit d'une politique d'aménagement sur l'ensemble du terri¬
toire, soit d'une politique d'équipement, et, dans les deux cas, sans rupture
économico-spatiale avec les prévisions européennes.
Ces caractéristiques expliquent aussi quels acteurs furent mis en place
et le processus de leurs relations. Une décision autoritaire et très person¬
nelle demandait un appareil d'exécution extrêmement centralisé et sans
concurrence. La Délégation générale au District dépend directement du
Premier Ministre et est confiée à un homme ayant la confiance du Chef
de l'État, M. Paul Delouvrier, qui a déployé intelligence et libéralisme

leur
dans existence
l'exécution
même,
d'une
cartâche
la décision
dont les
importante,
failles étaient
« le Grand
déjà inscrites
Paris », était
dans

prise à l'avance. Il s'agit donc d'un acteur A — G, au-dessus des parti¬


cularismes P et C. L'opération a eu comme conséquence une levée géné-
Manuel Castells

rale de boucliers contre le Schéma directeur, malgré les appels sincères


à la « participation » de la part des responsables. Les seuls à ne pas être
hostiles ont été les entreprises (0 — G — P et 0 — L — P), car le Schéma
favorisait la création d'un puissant milieu technique capable de faire de
Paris un pôle de développement. Mais les autorités locales (A — L — C)
ont réagi vivement à une organisation qui allait inévitablement dans le
sens de la centralisation ; les syndicats (0 — G — C) ont refusé de se
plier au privilège accordé à la productivité ; les associations locales (0 —
L — C) ont réclamé la solution des problèmes d'équipement qui se
posaient de façon urgente. Plus grave encore, à l'intérieur même du gou¬
vernement, l'Aménagement du Territoire (A — G — P) et le ministère
de l'Équipement (A — G — C) n'ont pas cautionné cette politique, pour
les raisons évoquées plus haut, appuyés en cela par les notables de la pro¬
vince.

Dans la bataille ainsi engagée, l'intérêt des acteurs dont les éléments
étaient contraires aux intérêts du Schéma, était non pas de l'éliminer,
mais de le récupérer par morceaux en annulant ce qui en faisait la spéci¬
ficité, l'articulation d'une puissante région parisienne définie en tant que
telle. En effet, les différences entre le District et les autres organismes ne
tenaient pas aux éléments du système urbain sur lesquels l'intervention
portait, mais sur la définition concrète du système urbain lui-même , pour
l'un la région parisienne, pour les autres l'ensemble de la France. Ainsi,
le réseau de transports était utile dans n'importe quelle perspective à
condition d'être intégré dans un plan du Bassin parisien. Les réalisations
ponctuelles, telle que l'équipement en loisirs, n'étaient pas importantes
vu la faiblesse des moyens financiers mis en œuvre. Les villes nouvelles,
surtout si elles prenaient les dimensions annoncées, risquaient fort de
changer effectivement la physionomie urbaine française dans le sens
prôné concentré.
s'est par le Schéma. C'est sur elles que le feu des éléments contraires

L'issue du débat pouvait être déduite de la configuration du système


d'acteurs, elle-même produit de la définition faite du système urbain. Or,
nous avons vu que A — G était le seul appui efficace du Schéma avec la
collaboration facile de 0 — P (G et C), alors que A — G — P, A — G — C,
0 — G — C, 0 — L — CetA — L — C s'opposaient. L'avenir du Schéma
reposait donc sur l'extrême concentration de la décision à l'intérieur du
système politique.
L'évolution récente confirme cette analyse. Les réalisations matérielles
du Schéma, sauf quelques initiatives dans les transports et le début des
travaux d'étude pour trois villes nouvelles, restent faibles. Depuis 1965,
seulement 2.617 hectares sur les 70.000 des zones d'aménagement différé
(Z.A.D.) ont été achetées par l'administration. Sur les 9.500 hectares de
forêt que le District voulait acquérir en 1964, seulement 524 l'ont été et
de lourdes menaces pèsent sur la conservation des espaces verts.
En mars 1969, le ministre chargé du Plan et de l'Aménagement du
438
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

territoire, présentait un Livre blanc sur l'organisation du Bassin Parisien,


largement incompatible avec le Schéma. Peu de temps après, trois des
huit villes nouvelles de la région parisienne étaient officiellement aban¬
données, les projets des autres étaient appelés à mieux s'intégrer aux
urbanisations spontanées.
Cette évolution a reçu une expression claire avec le remplacement de
M. Delouvrier par un préfet plus traditionnel M. Doublet. Aussitôt, des
retouches ont été apportées au plan initial et l'on annonce une révision
générale du Schéma vers la fin de 1969.
Ceci n'est pas la conséquence logique d'un revirement politique. Rappe¬
lons que le remplacement des travaillistes par les conservateurs en Angle¬
terre en 1951 n'a pas conduit à l'abandon des villes nouvelles, mais au
freinage d'autres initiatives qui allaient au-delà. Si le Schéma directeur
est mis-en cause, c'est parce que son contenu exprime une conjoncture
particulière du politique manifestée dans cette intervention sur l'écono¬
mique, et que cette conjoncture a profondément changé depuis 1965 à
cause de facteurs fort peu dépendants de la croissance urbaine. Cette
situation
nance desnouvelle
intérêts de
donne
certains
la clef
acteurs
du rapport
sur d'autres
de forces
et conduit
qui a permis
à unelamodifi¬
domi¬

cation de la politique urbaine.

Dans la société industrielle avancée, les problèmes urbains sont avant


tout politiques, c'est-à-dire directement liés au processus de gestion-
domination de l'ensemble social. L'analyse de la planification urbaine
est donc, à la fois, l'héritage privilégié d'une sociologie urbaine longtemps
cantonnée dans les problèmes d'intégration et l'exigence pressante de
l'urbanisme à l'égard de la recherche.
Il est naturel qu'une investigation centrée sur l'action politique place
au premier plan l'enchaînement concret du conflit entre les acteurs réels,
leurs tactiques et leurs compromis, en un mot, du processus de décision.
Mais si cette analyse rappelle l'exigence d'une étude concrète de situations
concrètes, elle n'épuise pas la signification sociale du phénomène et, à
vouloir le faire, introduit nécessairement une philosophie libérale de
l'histoire. Le sens d'une opération d'urbanisme ne peut être saisi qu'en
la replaçant dans la structure sociale qui la suscite et en considérant les
transformations particulières de structure qu'elle représente. A partir d'une
compréhension théorique de l'ensemble d'une société, il faut spécifier ce
cadre à travers les notions de système urbain et de système des acteurs
urbains dont le contenu historique dépend de la conjoncture étudiée. La
mise en rapport du système urbain, du système des acteurs et de la poli¬
tique urbaine, définie comme effet de la structure sur elle-même, fournit
la signification sociale du phénomène et éclaire le processus de la prise
prévisions.
de décision, en permettant de la coder théoriquement et d'établir des
Manuel Castells

C'est seulement par rapport à une définition préalable de la structure


sociale qu'une véritable innovation peut être saisie. L'étude de l'innova¬
tion en soi risque de se laisser entraîner par les oripeaux volontaristes
de quelques banalités administratives, ou de suivre l'architecte dans son
illusion de l'œuvre d'art. Il y a innovation là où il y a production d'un
effet nouveau dans la structure urbaine ; cet effet est le résultat d'une
conjoncture spécifique du système et du processus qui lui est attaché.
Au-delà de l'explication d'un domaine particulier, la sociologie de la pla¬
nification urbaine peut mettre sur la voie d'une étude scientifique, donc
structurelle, de l'innovation sociale. MANUEL CASTELLS

Département de Sociologie
Université de Montréal

BIBLIOGRAPHIE

1. Pour un développement de ces thèses, je renvoie à mon article « La fin de la socio¬


logie urbaine », Sociologie et Sociétés, n° 2, 1969.
2. Cf. le plus récent « reading » paru sur ce thème : Bernard J. Frieden and Robert

3. Alan
4.
5. 1968,
Basic
Morris
J.
p.
F. Bollens
409.
247-307.
Stuart
Books,
459
Altshuler,
(eds)
p.,Chapin,
and
New
Urban
ainsi
H.York,
The
que
Planning
Schmandt,
« Foundations
l'excellent
City
1968,Planning
and
395
« The
p.
Social
livre
of Planning
Urban
Process,
d'HERBERT
Policy,
Planning
Challenge
Cornell
Banc
J. Books,
Gans,
»,University
in
», inWerner
People
New
Metropolis,
Press,
York,
and
Z. Hirsch
Plans,
Basic
1965,

245.
(ed.), Urban Life and Form, Holt, Rinehart and Winston, New York, 1963, p. 217-

6. tive.
On peut
Plusdire
concrètement,
que l'ensemble
les textes
de la littérature
réunis dansspécialisée
les « readings
s'inscrit
» classiques
dans cette
: Theodore
perspec¬
Caplow (ed.) City Planning, Minneapolis, Burgess Publishing Co, 1950 ; Cole¬

man
to
Planning
que
Planning,
tifique
about
of
courses
theUrban
Chicago
the
alternative
dans
Woodbury
future
»repercussions
of
est
Planning,
and
laactions
Chicago.
Press,
la
goals
publication
the
suivante
matching
(ed.)
Urban
1953
and
and,
La
Princeton
and
Urban
future
définition
; in
:Community,
G.
goal-action
«annuelle
ofturn,
Planning
Breeze
courses
the
Redevelopment
University
qui
requires
value
desets
and
résume
is
University
ofl'American
that
action
implications
»Press,
D.
explicit
(Melvin
:process
le
E.Problems
which
mieux
1953
Whiteman
of Society
evaluation
Pittsburgh
W.
of
;associated
relies
cette
Harvey
making
Webber,
andupon
of«Practices,
(eds),
communauté
and
Planning
Press,
rational
S.with
explicit
«Perloff,
An1961
choice
TheUniversity
alternative
Approach
prospects
decisions
Officials,
teaching
among
;scien¬
ainsi
(ed.)

forEn
policies
France,planning
il n'y a»,pratiquement
in Leonard J.
pasDuhl,
de travaux
The Urban
sur ceCondition,
problème.p.Le320).
numéro

la
leures
spécial
de
plus
ensuite.
planification
l'Aménagement
ladejuxtaposition
de
De
ceslamême,
analyses
Revue
comme
dufrançaise
lesde
se
processus
territoire
travaux
rattachent
cas etdede
de(vol.
d'opinions
Science
décision,
Raymond
à VI,
la perspective

politique
que
Grenoble,
2,
Ledrut
les
avril-juin
bases
sur
libérale
sont
1963,
les
d'une
1956)
plutôt
constituent
problèmes
que théorie.
et
nous
des
le Colloque
analyses
considérons
politiques
beaucoup
Les meil¬
sur
de

sociologie
de
historique
quoique
çoise
la ville,
Fauton
insuffisamment
appliquée
duAnthropos,
processus
« Aix-en-
à l'aménagement
de
Paris,
développés,
Provence,
planification
1968).
sociologie
dans
urbain
Des
urbaine
le éléments
(cf.
travail
et Raymond
en
plans
lui-même
depour
Georges
d'urbanisme
Ledrut,
une
peuvent
étude
Granai
L'espace
»,être
sociologico-
Urbanisme,
ettrouvés,
Fran¬
social

440
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine


au Centre
trielle.
93, 1966.
de Des
Sociologie
recherches
des Organisations
sur ce thème etsont
au Laboratoire
en cours, à de
notre
Sociologie
connaissance,
Indus¬

7. Harvey S. Perloff, « Common goals and the linking of physical and social plan¬
ning », Planning 1965, p. 170-84.
8. and
9. Cf. Herbert
William
Kegan
Ashworth,
Paul,
J. London,
Gans,The
op.1954.
Genesis
cit., chap.
of Modern
5. British Town Planning, Routledge

10. Cf.
N. Y.,
Henry
1945.S. Churchill, The City is the People, Harcourt, Brace and World,
11. Cf. Cahiers de l'IAURP, vol. 7, 1967.
12. 1963-
Cf. Les Grebler, Urban Renewal in European Countries, University of California,

13. Cf. Edwards C. Banfield and James Q. Wilson, City Politics, Harvard Uni¬
versity Press, Cambridge, Massachusetts, 1963, chap. 14.
14. Raymond Ledrut, Sociologie Urbaine, Paris, P.U.F., 1968, p. 43.
15. son
Voirarticle
l'excellente
« The argumentation
Contribution ofdéveloppée
Political Science
en ce sens
to Urban
par Robert
Form C.
», in
Wood
Werner
dans
Z.
129.
Hirsch, Urban Life and Form, Holt, Rinehart and Winston, N. Y., 1963, p. 99-

16. Robert A. Dahl, Who Governs ? New Haven, Yale Univ. Press, 1961 ; la meil¬
leure synthèse de cette perspective est le brillant petit livre de Nelson W. Polsby,
Community Power and Political Theory, New Haven, Yale Univ. Press, 1963.
17. New
E. Banfield
York, Free
and Press
J. Wilson,
of Glencoe,
op. cit.1961.
; Edward C. Banfield, Political Influencet
18. C'est surtout C. W. Mills et Floyd Hunter qui sont visés. En effet, la tentative

19. Glencoe,
d'identifier
rique
Cf. M.est
Meyerson
III.
vouée
l'ensemble
Free
à and
l'échec.
Press,
du
E.pouvoir
1955.
Banfikld,
social
Politics
à certains
, Planning
groupesand
définis
the Public
de façon
Interest
empi¬,

20. Cf. Robert C. Wood, article cité, et aussi, Robert R. Alford, « The Compara¬
tive Study of Urban Politics » in Les F. Schnore (ed.) Social Science and the City,
Frederick Praeger, New York, 1968, p. 263-302.
21. 1965.
Cf. Charles Abrams, The City is the Frontier, Harper and Row, K, New York,

22. Par exemple, Robert T. Daland and John A. Parker, « Roles of the Planner
in Urban Development », in F. Stuart Chapin and Sh. F. Weiss, Urban Growth
Dynamics, John Wiley, New York, 1962, p. 188-223 ; pour une théorisation de
cette perspective, cf. Paul Davidoff and Thomas A. Reiner, « A choice theory
of planning », Journal of the American Institute of Planners, May 1962, p. 103-
115.

23. Michel Crozier, « Pour une analyse sociologique de la planification française »,


Revue française de Sociologie, VI, 1965, p. 147-163.
24. Elle a, d'ailleurs, été entreprise par Alain Touraine ; cf. « Le rationalisme libéral

25. La
26. de Michel
Michel
critique
Crozier,
Crozier
essentielle
art.
», Sociologie
cité,
à faire
p. 150.
au
dufonctionnalisme
Travail, 2, 1964.
ne porte pas sur sa démarche,
mais sur son contenu théorique. Il ne s'agit pas de critiquer l'approche systéma¬
tique au nom de l'irréductibilité de l'homme, mais de refuser comme seule perspec¬
tive l'analyse d'un système social dont les normes sont établies par des valeurs
culturellement
tème. définies, suivant un processus inexplicable dans le cadre du sys¬

27. Cf. Robert C. Wood, 1400 Governments : the Political Economy of the New York
Metropolitan Region, New York, Anchor Books, Doubleday, 1964.
28. C'est un thème constant dans les travaux recueillis par Banfield dans Urban Govern¬
ment, the Free Press of Glencoe, 1961, 593 p.
29. Cf. les travaux classiques de Duncan et Duncan.
30. Norton E. Long, « Political Science and the City », in Leo F. Schnore (éd.), op.
31. cit.,
Une dep. mes
243-262.
étudiantes à l'Université de Montréal, MUe La Roche, a fait une étude
retraçant la formation du gouvernement métropolitain de Toronto (l'un des deux
Manuel Castells

efforts en, ce sens à Montréal. Les rapports avec les gouvernements des provinces
32. respectives
Michel Crozier,
semblent
Le yPhénomène
avoir été déterminants.
bureaucratique, Seuil, Paris, 1963.
33. p.
Cf. 263-304
« Appendice
de l'édition
» de la Costes,
Contribution
Paris,à la
1954.
critique de l'économie politique de Marx,
34. Cf. Louis Althusser, Pour Marx, Maspéro, Paris, 1965 ; Louis Althusser et
Etienne Balibar, Lire le Capital, 2 volumes, nouvelle édition, Maspéro, Paris,
Maspéro,
1968 ; Nicos
Paris,
Poulantzas,
1968 ; AlainPouvoir
Badiou,politique
« Le (Re)
et classes
commencement
sociales de du
l'état
matérialisme
capitaliste,
dialectique », in Critique, mai 1967, p. 438-467.
35. Il faudrait supposer connues des analyses aussi fondamentales pour toute pratique
sociologique,
clairs mais trop
quelle
abstraits
que soit
pourlalaperspective
moyenne des adoptée.
sociologues
La difficulté
et surtoutde leur
ces textes,
double
étiquette de « philosophiques » et « marxistes » me font penser à la nécessité de
les rappeler, car sans certaines conventions de langage les passages suivants de
notre article deviendraient incompréhensibles. En essayant de résumer nous fai¬
sons des simplifications peut-être excessives. Notamment nous changeons quelques
termes ( instance par système, par exemple). Disons que cet exposé succinct est
purement instrumental pour les fins de notre article et que nous n'avons pas pris
le soin de reproduire fidèlement l'ensemble de la perspective. En effet, dans l'état
actuel
en soi dépassant
des choses,ceune
cadre.
« vulgarisation » cohérente et systématique serait une fin
36. Nous suivons ici, plus particulièrement, la perspective de Poulantzas.
37. La notion de système urbain a été formulée, provisoirement, dans un rapport
introductif d'enquête,
Melendres, La création
non
despublié,
villes nouvelles,
par AlainLaboratoire
Touraine, de
Jean
Sociologie
LojkineIndustrielle,
et Marina
avril 1968, ronéo. Cependant, si nous nous accordons à propos de la perspective
(définir les actions urbanistiques à partir d'un système de rapports entre des élé¬
ments), la formulation présentée dans notre article diffère considérablement dans
son contenu théorique, c'est-à-dire dans la définition de ses éléments et de leurs
rapports.
38. Aucun élément du système urbain, construction théorique, ne peut coïncider
pleinement avec des éléments concrets. Cependant, pour mieux nous faire com¬
prendre, nous désignons les domaines du réel où il y a le plus de chances de trouver
une forte charge de chaque élément.
39. Il ne s'agit ici que des illustrations. La détermination concrète de l'acteur corres¬
pondant à chaque combinaison dépend de la situation historique.
40. L'emploi du concept de capitalisme n'est pas idéologique, mais dérivé de l'ana¬
lyse scientifique faite par Marx dans Le Capital. Il ne faut surtout pas l'opposer
idéologiquement au concept de socialisme. Car, à mon avis, le concept de socia¬
lisme est, pour le moment, une notion idéologique. L'efficacité théorique du concept
de capitalisme ne doit pas être jugée en le faisant contraster avec des réalités
historiques, mais en considérant son apport dans un processus de démonstration.
Rappelons qu'il désigne une articulation théorique particulière du politique, de
41. Cf.
l'idéologique
N. Poulantzas,
et de l'économique.
op. cit., p. 36-56, 201-203, 322-334.
42. Le
danssymbole
l'élément
(—>)C signifie
à partirintervention,
d'une modification
c'est-à-dire
adéquate
production
de l'élément
d'effets G.spécifiques
43. En fait toute recherche explicative suppose une connaissance concrète de l'ensem¬
ble de la situation historique étudiée. Non pas pour « situer dans le contexte »,
mais pour être capable de définir les variables théoriquement pertinentes au pro¬
nomies
cessus qu'il
universelles.
s'agit d'analyser.
Un champIl théorique
faut en cela
ne s'opposer
peut être au
qu'indication
formalisme structurée
des taxo¬

44. d'une
Pour les
problématique
données de dont
base, lenous
contenu
renvoyons
concret
auxvarie
principaux
dans chaque
ouvrages
conjoncture.
consultés :
William Ashworth, The Genesis of Modern British Town Planning, Routledge
and Kegan of
University Paul,
California
London,Press,
1954 ; 1963
Donald
; LIoyd
L. Foley,
Rodwin,
Controlling
The British
London's
NewGrowth,
Towns
Policy, Harvard University Press, 1956 ; Harold Orlans, Stevenage, A Socio¬
logical; Frederic
Abercrombie,
1959 Study of Town
a J.New
Osborn
and
Town,
Country
and
London,
Arnold
Planning,
Routledge
Whittick,
London,
andThe
Kegan
Oxford
New Paul,
Towns
University
1952
: The
; Patrick
Answer
Press ,

442
Vers une théorie sociologique de la planification urbaine

45.
46.
47.
48.
49.
51.
52.
50. rapports
53.
54.
55.
56. to
et
«Pierre
L'on
expriment
port
métropolitaine
Les
la
logie
Journal
Program
Intitulé
Sur
par
L'action
pour
Cf.
p.
Martin
1949-1962,
American
op.
Books,
Renewal
M.
La
cité
Pierre
Pour
Report
l'IAURP,
Urbanisme
consommation
Megalopolis,
surtout,
193-208.
Fisher,
Donald
John
traduction
Merlin
cit.,
Foley,
contours
l'importance
Ashworth,
culturelle
et
peut
les
relever
Urbaine
New
des
Merlin
Guertin,
on
p.
of
de
Anderson,
données
in,
de
sociaux.
in
R.
Cities,
dire,
le
113-133
Sociology,
vd.
Britain
M.I.
Urban
l'excellent
formes
l'édition
Twenty
et
cette
op.
York,
the
Foley,
décalage
James,
d'une
en
de
du
dirigé
française
Guertin,
8,
New
(la
T.
par
cit.
Urban
et
l'idéologie
op.
région
ont
The
de
énorme
juin
Mais
terme
«force
Renewal
1965
;Press,
»,spatiales
rue).
Pierre
Years
analyse
La
exemple,
base,
«York,
Charles
commencé
cit.
The
de
Journal
par
Vol.
Bobbs-Merrill
entre
British
Regional
1967.
rapport
ville
sa
Core,
de
;sociale
1908
la
de
Cf.
Federal
de
op.
Chester
of
Henri
détermination
je
11,
Cambridge,
McGraw
plus
pavillonnaire
Guertin,
Londres
le
slum.
Public
historique
nouvelle
in
renvoie
anachroniques
le
cette
cit.,
of
Town
que
Abrams,
du
1960,
University
développement
the
àde
n'est
rapport
the
Planning
proche,
Lefebvre.
être
Bulldozer.
fameux
p.
les
construction
Housing,
Rapkin
synthèse
American
United
Planning
Hill,
p.
Co.,
aux
16
etde
pas
établis
problèmes
« 1964
211-231.
des
The
Villes
aménagement
et
taudis,
Pouchanan.
précise
Cumbernauld
plus
Indianapolis,
et
in
arbitraire,
1963
of
manifeste
suivantes.
and
classes
;A
States
au
City
Harper
leur
Britain
par
de
Pennsylvania
Institute
synthétiques
:technologique
Scott
nouvelles
critical
;One
niveau
William
publique,
ne
dépasse
la
John
les
de
is
rapport
8,
sociales.
garde
mission
the
Brothers,
travaux
Ideology
circulation
»,
elle
de
Greer,
in
of
analysis
in
»,
Madge,
du
de
Frontier,
1965
l'étude
Howard,
Leonard
Planners,
en
Urbanisme,
C.
exprime
S.
pas
avec
voir
l'ensemble
territoire
des
Press,
d'étude
Bass
Grigsley,
Grande-Bretagne
des
;de
New
or
Urban
les
Peter
travaux
la
les
l'Institut
of
«du
des
moyens
These
Harper
The
Warner,
échos
privatisation
Urban
York,
28,
aussi
chiffres
système
1960
Tomorrow.
J.
grandes
de
»,n°
Renewal
de
Marris,
New
Dhul
Nov.
?Residential
Cahiers
consultés
de
;106,
l'IAURP,
l'état
Colophon
1959,
la
de
»,
Renewal.
Robert
op.
fournis
spécifi¬
British
Towns
urbain
région
1962
Socio¬
trans¬
villes
1968.
(ed.),
»etc.
cit.,
and
«des
de
et
de
A;:

57. Peter H. Rossi and Robert A. Dentler, The Politics of Urban Renewal. The
Chicago Findings, The Free Press of Glencoe, 1961.
58. Martin Meyerson and Edward C. Banfield, Politics, Planning and the Public
Interest. The Case of Public Housing in Chicago, The Free Press of Glencoe, 1955.
59. Pour les informations de base, cf. : Premier ministre, Délégation générale au
District de la Région de Paris, Schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme
de la Région de Paris (avec les avis et rapports du C.A.R.P., du C. C.E.S. et du
Conseil d'Administration du District), La Documentation française, Paris, 1966,
4 volumes ; District
Jacqueline Beaujeu-Garnier
de la RégionetdeJean
Paris,Bastié,
Paris enAtlas
question,
de Paris
P.U.F.,
et de
Paris,
la Région
1965 ;
Parisienne, Berger-Levrault, Paris, 1967 ; Jean Bastié, Paris en l'an 2000,
SEDIMO, Paris, 1964 ; C. Delprat, « L'occupation du sol dans l'agglomération
parisienne », Cahiers de l'IAURP, vol. 3, décembre 1965 ; Premier Ministre, Délé¬
gation
duodécennal
sien », générale
Urbanisme,
pour au
la Région
District
n° 96-97,
dedeParis,
1966
la Région
; Hôtel
Bernard
de
de Ville,
Paris,
Hirsch,
Paris,
Avant-Projet
«1963
Pontoise-Cergy,
; « Le
de Bassin
Programme
Ville
pari¬

nouvelle
la collection
», Urbanisme,
du Monde.n° 105, 1968 ; divers rapports internes de l'IAURP ; et...
60. Plan d'aménagement et d'organisation générale de la région parisienne, approuvé
61. teur
par
Cf. Avis
1966.
décret
en juin
dedu1965.
la6 Société
août 1960,
française
plan intérimaire
des Urbanistes,
qui futpublié
remplacé
danspar
Urbanisme,
le schéma n°
direc¬
93,

443

Vous aimerez peut-être aussi