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Les mycétomes

Dr C.B. FALL
Service Parasito-Mycologie
(UCAD)
I. Introduction

Définition:
• Les mycétomes sont des pseudo-tumeurs inflammatoires sous
cutanées polyfistulisées à évolution très longue (chronique) renfermant
des grains parasitaires formés de filaments agglomérés.

• La lésion siège le plus souvent au niveau des membres inférieurs et en


particulier les pieds d’où le nom de pied de Madura.

• Il peut atteindre les membres supérieurs, le thorax, les fesses.


I. Introduction

Les agents des mycétomes sont très divers, les grains qu’ils constituent

peuvent être formés de :

• Filaments de champignons donnant des mycétomes fongiques

• Filaments d’actinomycètes aérobies donnant des mycétomes

actinomycosiques.
I. Introduction
Intérêts:
• Ce sont des affections fréquentes en zone tropicale .

• En Afrique de l’Ouest, plusieurs pays en zone de savane sont


touchés par cette maladie avec une population à risque estimée à
environ 200 millions de personnes.

• Si le diagnostic clinique est facile, le diagnostic biologique est


primordial car il conditionne la prise en charge thérapeutique.

• En effet, les mycétomes actinomycosiques sont plus sensibles au


traitement médical.
II. Classification

II.1. Les agents des mycétomes


II.1.1. Taxonomie
La classification des agents pathogènes des mycétomes se fait:

– Selon le caractère fongique ou actinomycosique

– Selon la couleur des grains


II. Classification

A. Les actinomycètes

Ces agents sont regroupés en 2 types :

A.1. Ceux dont les grains sont invisibles à l’œil nu

A.2. Ceux dont les grains sont visibles


II. Classification

A. Les actinomycètes
Ces agents sont regroupés en 2 types :
A.1. Ceux dont les grains sont invisibles à l’œil nu (3 espèces )

• Nocardia brasiliensis répandu en Amérique tropicale

• Nocardia asteroides cosmopolite mais surtout présente en Amérique

tropicale

• Nocardia caviae cosmopolite mais surtout en zone tropicale.

Il faudra examiner le pus au microscope pour voir les grains qui sont de
coloration jaune.
II. Classification

A.2. Ceux dont les grains sont visibles


A.2.1. Le genre Actinomadura

• Actinomadura pelletieri qui est une espèce africaine donnant des

grains rouges de 0, 5mm de diamètre.

• Actinomadura madurae cosmopolite donnant des grains de 0,5mm

de diamètre et de coloration blanche ou rosée.


II. Classification

A.2.2.Le genre Streptomyces

Streptomyces somaliensis C’est une espèce africaine donnant des


grains jaunâtres de 1 à 2 mm de diamètre.
II. Classification
Nocardia Actinomadura
brasiliensis pelletieri (grains
(grain jaune) rouges )

Nocardia Ceux dont les Les mycétomes Ceux dont les Streptomyces
asteroides grains sont actinomycosiques grains sont somaliensis
(grain jaune) invisibles à l’oeil visibles (grain jaune)
nu

Nocardia Actinomadura
caviae (grain madurae (grain
jaune) blanc ou rosé.)
II. Classification
Ils appartiennent à 2 phylums

Phylum des Ascomycotina

Classe des Ascomycetes

Genre : Plectomycetidae ou Leptosphaeria

Phylum des Deuteromycotina

Classe des Coelomycetes

Genre : Pyrenocheata ou Madurella


II. Classification

B. Les mycétomes fongiques

• B.1. Les mycétomes fongiques à grains noirs

• B.2. Les mycétomes fongiques à grains blancs


II. Classification

B.1. Les mycétomes fongiques à grains noirs


- Madurella mycetomatis : fréquente. Donne des grains noirs de
diamètre supérieur à 1mm

- Madurella grisea : moins répandu. On le retrouve en Amérique du Sud


et en Afrique. Son diamètre est 2mm environ

- Leptosphaeria senegalensis : On le retrouve sur la côte Ouest de


l’Afrique. Les grains ont un diamètre de 0,5 à 1mm.

- Pyrenochaeta romeroï : Il est rare mais cosmopolite. Ses grains ont


une taille de 0,5 à plusieurs mm de diamètre.
II. Classification
B.2. Les mycétomes fongiques à grains blancs

- Monosporium apiospermum

- Neotestudina rosatii : les grains ont un diamètre de 0,5mm.

- Cephalosporium et Fusarium dont quelques espèces donnent des


mycétomes à grains blancs.
II. Classification
Madurella Monosporium
mycetomati apiospermum
s

Madurella Neotestudina
grisea rosatii

Les Les Les


mycétomes mycétomes mycétomes
fongiques à fongiques fongiques à
grains noirs grains blancs

Leptosphae Cephalospori
ria um
senegalensi
s

Pyrenochae Fusarium
ta romeroï
II. Epidémiologie
II.1.1. Morphologie
Les agents des mycétomes se présentent sous forme de grains. Ces
grains sont des amas de filaments mycéliens
II.1.2. Biologie
Les agents des mycétomes vont être responsables après pénétration
dans l’organisme humain des manifestations inflammatoires
responsables de la symptomatologie clinique.

Ils se développent au niveau du tissu cellulaire sous cutané et vont


s’étendre en profondeur en touchant les os.
III. Epidémiologie
II.2. Habitat
• Champignons ou actinomycètes, les agents des
mycétomes sont des saprophytes très
répandues sur le sol des régions endémiques.

• On les retrouve sur les épineux des zones sub


désertiques et méditerranéennes (exemple :
Acacia pour L. senegalensis).

• On peut les retrouver également sur les outils


agricoles.

• Certaines espèces se retrouvent dans des


biotopes particuliers : termitières pour Madurella
mycetomatis.

• D’autres n’ont jamais été retrouvés dans la nature.


III. Epidémiologie

II.3. Modes de contamination

La contamination humaine est liée souvent à une excoriation de la


peau, à une piqûre ou un traumatisme par épines ou fragments de
végétaux ou à une blessure par des outils.
III. Epidémiologie

II.4. Facteurs favorisants


II.4.1. D’ordre général

Le climat : la survenue des mycétomes est favorisée par des climats

avec alternance de saisons sèches et humides avec une

pluviométrie de 50 à 1000 mm par an et à température élevée.


III. Epidémiologie

II.4.2. D’ordre individuel

- La marche pieds nus

- La profession : les cultivateurs

- L’âge : la tranche d’âge 20 – 30 ans semble plus touchée

- Le sexe: le sexe masculin est plus atteint.


III. Epidémiologie
II.5. Répartition géographique
Ce sont des maladies endémiques des régions tropicales (de part et d’autre du
15ème degré de latitude Nord) mais pouvant toucher les pays tempérés :
Italie, Europe centrale.

Les agents des mycétomes peuvent avoir des zones de prédominances. Ainsi,
on rencontre :

• Madurella mycetomatis partout mais plus en Afrique.

• Madurella grisea est plus répandue en Amérique du sud

• Leptosphaeria senegalensis est retrouvée au niveau de la côte occidentale


d’Afrique.
III. Epidémiologie
II.5. Répartition géographique
Les agents des mycétomes à grains blancs se rencontrent en zone
tropicale en Amérique et en Afrique.
Les actinomycetes :
• Actinomadura madurae est cosmopolite

• Actinomadura pelletieri est retrouvée en Afrique occidentale.

• Streptomyces somaliensis est plus fréquente en Afrique orientale

• Nocardia brasiliensis se rencontre en Amérique et en Afrique

• Nocardia asteroides est disséminée dans le monde.


IV. Diagnostic clinique

A. Type de description : Mycétome fungique


du pied

Dans la forme typique (mycétome du pied)

• La lésion commence par une papule ou un


nodule indolore.

• Elle s’étend en surface et en profondeur très


lentement.
IV. Diagnostic clinique

• Elle met plusieurs années avant de


prendre l’aspect typique de pied madura.

• Une tuméfaction bosselée atteignant les


faces dorsale et ventrale du pied et
présentant de nombreuses fistules d’où
s’échappe un pus bien lié contenant des
grains représentant l’agent pathogène.
IV. Diagnostic clinique

Evolution et pronostic

• La principale complication est l’atteinte osseuse à l’origine de douleurs,

elle s’observe surtout au niveau du pied et de la main.

• Dans les cas évolués, l’atteinte du pied peut entrainer une impotence

fonctionnelle.

• On observe des géodes creusées dans l’os.

• Parmi les autres complications, il faut citer les métastases


ganglionnaires, les envahissements et compressions (localisations la
tête et au cou), les surinfections bactériennes.
IV. Diagnostic clinique
b. Formes cliniques
Il existe d’autres localisations au niveau des membres, des fesses, du
thorax, de la nuque, du dos, du cuir chevelu.
IV. Diagnostic clinique

b. Formes cliniques
Il existe des mycétomes actinomycosiques qui sont fréquents en
Amérique latine.

- Elles se distinguent par une tuméfaction sous cutanée plus

inflammatoire plus extensive et douloureuse.

- Les fistules sont plus nombreuses donnant un aspect en « pomme

d’arrosoir ».

- Une surinfection bactérienne est fréquente.

- Elle évolue sans aucune tendance à la guérison.

- Mais l’état général n’est pas atteint.


V. Diagnostic biologique

Peut se faire:

• Sur coupe histologique colorée

• Isolement des grains et études de leurs caractères morphologiques et


culturaux.
V. Diagnostic biologique

A. La mycologie
1. le prélèvement
- Le premier temps de la démarche est le recueil des grains, en cas de
forme fistulisée, qui représente environ 80% des cas.

- Le pus doit être également prélevé car il peut contenir de petit fragment
de grains où des grains non visible à l’œil nu. Les grains visibles sont
lavés. (cette étape est indispensable en raison de la surinfection)

- On notera ainsi les caractères des grains : taille, couleur, consistance.


V. Diagnostic biologique

Ensuite, un grain est écrasé entre lame et lamelle et examiné au

microscope , cela permet de distinguer :

- les grains fongiques de 5µm de diamètre environ formé d’un

enchevêtrement de filaments mycéliens avec des vésicules

- Des grains actinomycosiques se présentant sous forme de filaments

de 1µ de diamètre avec des franges et des massues autour du grain.

Dés ce stade le diagnostic de certaines espèces est possible.


V. Diagnostic biologique

2. Isolement et culture
a. les grains fongiques
• Laver les grains dans une eau physiologique contenant un

antibiotique et laisser une nuit.

• Ensuite déposer les grains séparées : 6 à 8 grains par tube à la surface

d’un milieu de culture contenant un antibiotique (milieu : gélose

glucosé de Sabouraud plus Chloramphénicol ; mou de bière)

• Température d’incubation : 30° à 37°C pendant 5 à 8 jours


V. Diagnostic biologique

b. Les grains actinomycosiques

• Les grains actinomycosiques seront lavés avec de l’eau


physiologique stérile sans antibiotique.

• Milieux de culture : gélose glucosé de Sabouraud, milieu de


Loweinstein - Jensen ou gélose au bouillon de viande.

• Température d’incubation entre 30° et 37°C. Durée d’incubation de


10 à 30 jours.
V. Diagnostic biologique

c. Mycétomes à grains invisibles


On fera un examen microscopique du pus puis un ensemencement
dans un milieu de culture : Sabouraud plus Chloramphénicol
V. Diagnostic biologique
3. Identification
Elle s’effectue sur l’aspect de la colonie, les caractères
morphologiques:

• Les champignons présentent des filaments cloisonnés de 5µm


de diamètre avec des vésicules quelque fois colorées.

• Les Actinomycètes se présentent sous forme de filaments fins de


1µm de diamètre, Gram +, ramifiés à angle droit. Ils se fragmentent
en éléments cocoïdes ou rectangulaires.
V. Diagnostic biologique

B. L’histopathologie
Sur biopsie, la coloration par hématine-éosine est généralement suffisante

pour étudier les grains mais, selon leur aspect, on peut être amené à

pratiquer des colorations spécifiques : PAS, Gomori-Grocott

(champignons), Gram (actinomycètes).

On différencie facilement les grains fongiques (filaments de 2 à 5 microns de

diamètre et parfois présence de vésicules)des grains actinomycosiques

(filaments de plus petit diamètre).

Les aspects histologiques des principaux grains sont résumés dans les

tableaux II et III.
V. Diagnostic biologique
3. Identification
V. Diagnostic biologique
3. Identification
V. Diagnostic biologique

• L’étude de l’activité métabiloque est utilisée pour le diagnostic des

éspèces isolées : assimilation à l’amidon, la gélatine, assimilation à

divers sucres (le glucose, le galactose, le lactose, le maltose)

• Le diagnostic moléculaire est utilisé pour caractériser les espèces et

permet un diagnostic rapide de l’affection.

• L’inoculation de grains ou de matériel de culture à l’animal par voie

sous cutanée est possible.


V. Diagnostic biologique

D. Diagnostic sérologique

• L’immunodiffusion en gélose est une des techniques de choix.

• Elle a un intérêt dans la surveillance.


Imagerie

La radiographie
L’atteinte osseuse surtout dans les formes fongiques entraîne une

lyse avec des larges géodes irrégulières donnant l’aspect de

fromage gruyère.
Isolement et
culture

L’histopathologie
L’étude de l’activité
métablique
Le diagnostic moléculaire
La radiographie

La sérologie

Diagnostic
VI. Traitement de mycétomes

A. Mycétomes fongiques
L’action des antifongiques est limitée.

- Le Kétoconazole entraînerait dans certains cas la guérison des


mycétomes fongiques. Il est administré à la posologie de 200 à 400
mg/jour pendant plusieurs mois.

- L’Itraconazole (Sporanox®). Il est administré à la posologie de 100


à 200 mg/ jour
VI. Traitement de mycétomes

- L’Amphotericine B (Fungizone®). II s’agit d’un médicament qui à la


fois à une activité antibiotique et antifongique.

- Le Dapsone. Appartient à la classe des sulfones. Il est administré à


la posologie de 100 mg/ jour pendant 12 mois.

Cependant, la chirurgie est le traitement de choix l’exérèse doit être


complète entraînant des mutilations importantes et difficilement
appareillables.
VI. Traitement de mycétomes

B. Mycétomes actinomycosiques
- Le Dapsone. Appartient à la classe des sulfones. Il est administré à la
posologie de 100 mg/ jour pendant 12 mois.

- La sulfadoxine – Pyriméthamine (Fansidar®) à raison de 2


comprimés
par semaine pendant 12 mois.

- La Sulfamethoxazole – Trimethoprime (Bactrim®) : 4 comprimés /


jour pendant 12 mois

La chirurgie est le dernier recours.


VI. Traitement de mycétomes
VII. Prophylaxie

• Hygiène après un traumatisme ouvert : désinfection des plaies à


l’alcool iodé lors de blessures par épineux ou outils.

• Dans les zones d’endémie, recommander le port de chaussures.


Surveillance

• On ne dispose pas de critères formels pour affirmer la guérison d’un

mycétome

• la constatation d’une guérison clinique après traitement ne suffit pas.

• Le suivi régulier des taux d’anticorps après arrêt du traitement serait l’idéal:

- La disparition des anticorps serait en faveur de la guérison.

- Leur réapparition ou la remontée de leur taux un argument en faveur

d’une reprise du processus

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