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Fiche Cours

Nº : 91006 FRANÇAIS Toutes séries LE TALENT C’EST D’AVOIR ENVIE

Biographie de Maupassant

Plan de la fiche
1. Une enfance normande
2. Un début d’éducation
3. Les débuts littéraires
4. Une vie littéraire féconde
5. Maladie, déchéance et mort

Une enfance normande

En 1821 naissent Bernay de Gustave de Maupassant et Laure de Poittevin, de vieille souche normande, parents de Guy, dont l’union
sera célébrée en 1846.
Quatre ans plus tard, le 5 août 1850, à six heures du soir, naît Henry René Albert Guy de Maupassant au château de Miromesnil…
ou à Fécamp ? Une question dont la réponse reste dans le flou. Pour certains biographes, Guy de Maupassant serait né à Fécamp,
chez sa grand-mère maternelle, au 98 rue Sous-le-Bois, aujourd’hui rebaptisée quai Guy de Maupassant. Pour d’autres, l’enfant serait
venu au monde en respirant l’air marin qui se dégageait à Miromesnil. Laure de Poittevin aurait voulu donner à son fils un lieu de
naissance digne de la particule qu’il allait devoir porter toute sa vie. Un lieu autre que Fécamp, ville puante et écœurante selon la
toute jeune mère déjà débordante d’amour et d’ambition pour sa progéniture. Une première ambiguïté qui semble, en quelque
sorte, justifier celle omniprésente dans sa vie désordonnée, dans sa personnalité caractérisée par un tiraillement permanent, et
dans son œuvre où les personnages apparaissent très souvent déchirés, entre deux mondes.
Ses premières années, Maupassant les passe à Fécamp un sein d’une famille désunie. Entouré de pêcheurs, au bord de la mer, il aime
à contempler les voiliers pour lesquels il vouera une grande passion toute sa vie.
Son père, Gustave de Maupassant, est un mari infidèle préoccupé davantage par la gente féminine (il collectionne les maîtresses)
que par toute forme culturelle ou artistique. C’est un père absent, presque indifférent à la présence de son fils, nullement gêné
d’étreindre sa maîtresse sous le regard étonné du petit Guy. Il prendra une place dans la vie de l’auteur à l’image de l’affection que
ce dernier a reçue de sa part. Sa mère, Laure de Poittevin, lui tient lieu de préceptrice, elle l’initie aux lettres et lui fait découvrir
les textes de Flaubert, ami de la famille, et de Shakespeare. C’est une femme à l’allure sévère, extrêmement cultivée, qui fait preuve
d’une grande sensibilité pour les lettres, ce qui lui vaut l’admiration de ses proches. Mais elle est aussi une femme excessive, en tout.
Son comportement frôle très souvent l’hystérie, elle est fréquemment victime de crises de nerf qu’elle laisse éclater sans se soucier
de savoir si son fils y assiste. Le jeune Maupassant est le témoin de nombreuses disputes conjugales qu’il regarde dans l’angoisse et
l’anxiété. Sa mère, furieuse, hurle tout son mépris à son époux infidèle qui répond aux insultes par l’indifférence et le silence. Elle
couve cependant son fils d’un amour envahissant et, même à l’arrivée du second, Hervé le « bon à rien », sa tendresse pour Guy ne
fait qu’augmenter. De ces deux comportements diamétralement opposés, il gardera une passion immense pour la littérature et un
amour des femmes assez particulier. Ces scènes de ménage l’auront marqué jusqu’à voir dans le mariage l’acte le plus absurde qu’il
soit, réduit à son stade le plus primaire, « partager les humeurs le jour et les odeurs la nuit », se plaît-il à dire d’un ton provocateur, et
dans l’enfantement, l’acte le plus dégoûtant.
En 1854, la famille s’installe au château de Grainville-Ymauville, près du Havre, des lieux qui reviennent dans les contes paysans. Le
château servira d’ailleurs de décor à son premier roman.
En 1856 naît Hervé, son frère, le « laissé pour compte » vite oublié de Laure, qui comme lui souffrira de troubles mentaux et finira
sa vie dans un asile. Dès 1858 ses parents décident de se séparer à l’amiable et Laure a la garde de ses deux fils. Elle les emmène
dans sa propriété d’Etretat, Les Verguies.

Un début d’éducation

C’est en 1863, après avoir vécu ses douze premières années sous la protection de sa mère, que Guy entre au séminaire d’Yvetot
en classe de sixième. En effet, consciente des lacunes de son fils, Laure de Poittevin veut lui donner la meilleure éducation malgré
l’appréhension de le voir quitter le foyer et de s’éloigner d’elle. Mais le rigorisme qu’exige le séminaire est opposé au caractère de
l’adolescent. Il tente de s’enfuir à maintes reprises de ce lieu étouffant où la religion prend des allures de discipline militaire. La mer,
les grands espaces et la liberté lui manquent, laissant place à l’enfermement des murs austères et des dortoirs sordides. Le jeune
Maupassant est soumis à un emploi du temps strict et rythmé par l’étude et des heures de prières obligatoires. Maupassant dira à
propos du séminaire d’Yvetot : « C’est un couvent triste où règnent les curés, l’hypocrisie, l’ennui… et d’où s’exhale une odeur de soutane

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qui se répand dans toute la ville. » De plus, il écrira à son ami Hugues le Roux : « Si loin que je me souvienne, je ne me rappelle pas avoir
jamais été docile sur ce chapitre.Tout petit, les rites de la religion, la forme des cérémonies me blessaient. Je n’en voyais que le ridicule. »
Maupassant fait figure d’élève indiscipliné qui refuse toute soumission et, pour le plus grand plaisir de sa mère qui désirait ardemment
le reprendre sous sa protection, il sera renvoyé en 1867. C’est très certainement de cette expérience que lui vient ce refus de la
discipline militaire et de toute forme de soumission à une hiérarchie qu’il connaîtra plus tard.
En 1864, pendant ses vacances passées sur les plages d’Etretat, Maupassant va faire une rencontre qui marquera son œuvre et
notamment ses contes fantastiques. Le jeune Maupassant, habile nageur, porte secours à un homme au bord de la noyade. De retour
sur la plage, il apprend qu’il vient de sauver un éminent poète anglais, Swinburne, qui, pour le remercier, invite le jeune homme
à déjeuner dans la villa qu’il partage avec un ami. Ces deux anglais étranges fascinent Maupassant et le décor de la villa le séduit
aussitôt. Des ossements, des têtes de mort, des tableaux et des gravures représentant des scènes infernales et une main d’écorché
pendue au mur lui inspireront quelques pages, notamment La Main d’écorché (1875), et plus tard La Main puis L’Anglais d’Etretat
(1882).
En 1867 il est renvoyé définitivement du séminaire d’Yvetot pour écrits irrespectueux sur ses professeurs. Il termine sa classe de
seconde auprès de sa mère et, en octobre, il intègre le lycée de Rouen. Pendant cette période il correspond avec Louis Bouilhet,
ami de la famille, poète et conservateur de la bibliothèque de Rouen, qui le conduira chez Flaubert à Croisset.
Le jeune homme passe alors tous ses dimanches à Croisset en compagnie de Flaubert qui le guide dans la rédaction de ses premiers
écrits poétiques et qui lui rappelle sans cesse que le talent « n’est qu’une longue patience » et qu’il faut travailler. Alors commence
son initiation littéraire, Flaubert lui dicte les principes de l’écriture réaliste. Il lui apprend à regarder, à observer et à disséquer du
regard avant d’écrire.
Le retour à la liberté est aussi accompagné de la découverte des charmes féminins. Maupassant emprunte une voie nouvelle qui
s’ouvre à lui, la découverte des plaisirs. L’attitude de l’adolescent avec les jeunes filles préfigure celle que connaîtra le futur écrivain
avec les femmes. L’amour ne peut quitter les sphères du plaisir charnel et éphémère, et la fidélité n’est qu’une illusion tout comme
le mariage est un échec.
Le 18 juillet 1869 Louis Bouilhet meurt et, quelques jours plus tard, Maupassant est reçu bachelier à la faculté de Caen. Son année
de philosophie lui aura surtout fait découvrir Schopenhauer dont le pessimisme le marquera profondément. Novembre sonne
l’heure du départ pour la faculté de droit de Paris.

Les débuts littéraires

Maupassant arrive à Paris et s’installe rue Moncey, dans l’immeuble où son père vit très modestement.
1870 est une date charnière dans sa vie. La guerre contre la Prusse éclate, Maupassant est mobilisé en juillet. La vie parisienne et
ses plaisirs doivent attendre. Pris entre un élan patriotique pour affronter l’ennemi et un mépris prononcé pour la guerre et ses
chefs (qui ne cessent de lui rappeler Yvetot), Maupassant tente, tel que le décrit Henri Troyat, de « survivre en attendant de vivre »,
et Paul Morand le montre pareil à un soldat s’effondrant d’épuisement. Cette expérience « de seconde classe » finit de grandir le
jeune auteur témoin de la désolation, de la débâcle et de ces scènes de guerre qui lui inspirent dégoût et horreur. Treize mois de
cauchemar qui alimenteront pas loin d’une vingtaine de récits dont ses premières nouvelles, (Boule de suif, La Maison Tellier, La Mère
sauvage…). Maupassant n’a d’autre hâte que de se trouver un remplaçant.
Ses lettres adressées à sa mère, déjà angoissée de savoir son fils en danger, sont de véritables appels de détresse. Mais Maupassant
espère toujours une victoire prochaine.
En septembre 1871 il paie un remplaçant volontaire et quitte l’armée. Et le 7 janvier 1872 il adresse une demande à l’amiral
Pothuau pour entrer au ministère de la Marine et des Colonies. Sa demande est refusée par manque de poste. Le 20 février, il la
réitère. Le 20 mars, le contre-amiral Krantz, chef d’état-major, informe l’amiral Saisset passant pour le protecteur de Maupassant,
que ce dernier pourra entrer provisoirement et sans percevoir de salaire, au sein de l’administration. Le 17 octobre il est nommé
surnuméraire à la Direction des colonies et ne perçoit toujours pas de salaire. Cette situation précaire lui vaut de régulières crises
de mélancolie.
La situation financière de ses parents lui interdit de reprendre ses études de droit. C’est ainsi que le 1er février 1873 Maupassant
débute sa carrière de fonctionnaire au ministère de la Marine avec un salaire mensuel de 125 francs et une prime annuelle de 150
francs. Il est nommé commis de quatrième classe à la direction du matériel.
Très rapidement, il prend en aversion son activité et ne supporte ni ses collègues ni les contraintes que cet univers médiocre lui
impose. Il en profite alors pour mettre à profit les conseils de Flaubert, il observe son entourage et de ces observations naîtront
quelques récits dont Les Dimanches d’un bourgeois de Paris (1880).
Même s’il commence à se faire une place à Paris, sa Normandie natale, mais surtout Etretat et la mer, lui manquent plus que tout.
A défaut d’océan, c’est la Seine qui occupe une bonne partie de son temps libre, où il s’adonne régulièrement à de longues parties
de canotage, très présentes aussi dans certains des écrits à venir.
Il fréquente assidûment la Grenouillère, endroit de prédilection des peintres impressionnistes où il connaît une vie de plaisirs
intenses. Digne fils de son père, il collectionne les conquêtes féminines, et c’est à cette époque qu’il doit contracter la syphilis
(qui ne sera réellement diagnostiquée que fin 1876), une maladie dont il ignore presque la présence et qui ne l’empêche pas de
poursuivre une vie de débauche sexuelle.

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Mais ce qui l’intéresse avant tout, c’est l’écriture. Grâce à Flaubert qui passe ses hivers à Paris, Maupassant rencontre les grands
auteurs du moment. C’est ainsi qu’il fait la connaissance de Tourgueniev, qui participera plus tard à son succès en Russie, d’Alphonse
Daudet, d’Edmond de Goncourt, de Hérédia, Huysmans et d’Emile Zola. C’est dans la célèbre demeure de ce dernier, à Médan, qu’il
est aussi mis en relation avec Cézanne, Duranty, Taine…
Au départ il est davantage tenté par le théâtre et, en 1875, il écrit un drame historique en vers, La Trahison de la comtesse de Rhune,
qui ne sera publié qu’en 1927. Le 19 avril, il organise une représentation très privée de sa farce A la feuille de rose, maison turque, dans
l’atelier du peintre Maurice Leloir. Maupassant y met en scène un couple de notables venu à Paris en voyage de noces. L’hôtel dans
lequel ils séjournent n’est autre qu’un bordel, où le maître des lieux prétend être le gardien d’un harem. Les situations que l’auteur
imagine frôlent parfois la pornographie et enchaînent les quiproquos au ton douteux. Dans le public, composé essentiellement d’un
cercle fermé d’amis, se trouve Gustave de Maupassant, admiratif devant les histoires de sexe de son fils, Goncourt, Tourgueniev et
Flaubert venu assister à un spectacle qui le réjouit.
Sous le pseudonyme de J. Prunier, il fait publier un conte fantastique, La Main d’écorché, qu’il donne à l’Almanach de Pont-à-Mousson.
Le souvenir obsédant, longtemps ressassé, de sa rencontre avec le poète anglais, a finalement porté ses fruits. En mars 1876, après
un séjour à Antibes où la côte le séduit considérablement, il utilisera un autre pseudonyme pour faire publier dans La République
des lettres de Catulle Mendès le poème Au bord de l’eau.
A Paris, dans un restaurant du quartier de Saint-Lazare, le 16 avril 1877, se réunissent Maupassant, Flaubert, Zola, Céard, Hennique
et Huysmanns autour d’un repas qui marque le début du naturalisme.
A la fin de l’année Maupassant songe sérieusement à se mettre à la rédaction d’un roman qui verra le jour environ six années plus
tard, sous le titre de Une vie.

D’autre part, au ministère de la Marine, on commence à se plaindre de cet employé « qui bâille sur ses dossiers ». Cependant,
malgré une apparente robustesse, sa santé fragile suscite une attention particulière de la part de ses supérieurs hiérarchiques. Sur
leur demande il est envoyé en cure à Loèche, un endroit connu pour le traitement des maladies vénériennes. Le diagnostique est
réellement annoncé ; Maupassant est syphilitique et il s’amuse de son sort. Dans une lettre à son ami Robert Pinchon, Maupassant
écrit : « J’ai la grande vérole, enfin, la vraie, pas la misérable chaude-pisse, pas l’ecclésiastique christalline, […] non, la grande vérole, celle
dont est mort François Ier. Et j’en suis fier […] j’ai la vérole, par conséquent je n’ai plus peur de l’attraper. » Un cynisme pareil à celui de
ses contes, tel que Le Lit 29 (1884) où Irma la prostituée tue les officiers prussiens en leur donnant délibérément la syphilis.
Il a droit à deux mois de congés durant lesquels mûrissent des dizaines de pages. De retour à la vie normale, grâce à l’appui de
Flaubert, ami du ministre Agénor Bardoux, Maupassant réussit à intégrer le ministère de l’Instruction publique. D’abord ravi de ce
changement, il se plaint rapidement de la lourdeur du travail qui lui est confié « Je marche et j’écris du matin au soir ; je suis une chose
obéissant à une sonnette électrique. »
Insatisfait de la rue Moncey, Maupassant s’installe au 19 rue Clauzel, dans une maison où de charmantes colocataires viennent
régulièrement l’aider à passer le temps.
Ses ennuis de santé se manifestent, des troubles oculaires et une hypersensibilité au froid se font de plus en plus présents et de
moins en moins supportables. Ils nécessiteront bientôt des séjours fréquents au soleil.
Il publie un article le 28 octobre, intitulé Gustave Flaubert, dans La République des lettres. Mais, en décembre, il connaît quelques soucis
avec la justice. En effet, le poème publié dans La République des Lettres en 1876 sous le titre Au bord de l’eau, est repris sous le titre
de Une fille dans La Revue moderne et naturaliste, et vaut à son auteur une comparution devant le parquet d’Etampes pour immoralité.
Flaubert, qui revit dans cet ordre de comparaître le procès qu’il essuya à la parution de Madame Bovary, intervient aussitôt pour
conseiller au mieux son protégé. Le 14 février 1880, Maupassant se rend à Etampes et le procureur général finit par prononcer un
non-lieu le 26 octobre.

Une vie littéraire féconde

1880 apparaît comme l’année de la consécration de Maupassant. Jusqu’alors, Flaubert, qui a toujours encouragé la vocation littéraire
de son jeune disciple, lui conseillait vivement d’écrire sans discontinuer et lui interdisait toute publication. Le jeune poulain n’était
pas encore prêt et ses maladresses nuiraient à sa future carrière. Cependant les rencontres hebdomadaires avec Zola et son
cénacle d’amis écrivains, Huysmanns, Céard, Hennique et Alexis, se font de plus en plus prolifiques.
Les écrivains se réunissent chaque jeudi dans la propriété de Médan que Zola a pu s’offrir grâce au succès de L’Assommoir et, de
ces réunions, naît un ouvrage collectif baptisé Les Soirées de Médan. Six nouvelles ayant pour thème commun la guerre de 1870
répondent aux critères naturalistes. Flaubert donne son accord pour l’édition. Un volume de vers est publié, qui reçoit aussi un
accueil d’estime, tandis que Boule de suif, deuxième nouvelle du recueil après L’Attaque du moulin de Zola, est un succès fulgurant. La
nouvelle connaît plusieurs éditions parallèles. Maupassant devient célèbre. La grande presse s’arrache ce nouveau talent pour des
chroniques ou des feuilletons. Cependant, la joie de l’auteur ne durera qu’un temps.
L’élève devenu écrivain, le maître peut s’éclipser. Le 8 juin 1880 Flaubert meurt subitement d’une attaque d’apoplexie. Maupassant
assume l’essentiel des préparatifs de la cérémonie mortuaire. Il regagne ensuite Paris dans une tristesse profonde qui vient ombrager
sa toute récente gloire littéraire. La disparition de Flaubert l’affecte profondément au point de se sentir abandonné de son père.
Plus personne ne sera en mesure de l’aider, de le guider. Maupassant doit à présent assumer seul sa carrière. Maupassant tarde à

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faire le deuil de son ami et ses écrits s’en ressentent. Mais après un douloureux isolement de quelques mois, sa plume reprend son
rythme qui, très vite, devient frénétique.
Entre ses nombreux articles, ses contes et nouvelles publiés à une fréquence quasi quotidienne dans les plus grands journaux,
Maupassant gagne suffisamment sa vie et se fait mettre en disponibilité. Mais sa santé qui semble s’aggraver l’inquiète de plus en
plus. Il repense à Flaubert qui, avant de disparaître, lui sommait de consulter un médecin au plus vite afin d’anéantir tous les signes
dérangeants qui l’affectaient.

Maupassant quitte la rue Clauzel et emménage au 83 rue Dulong, dans le quartier des Batignolles. C’est là, en 1881, qu’il écrit La
Maison Tellier (premier recueil de nouvelles dont la très célèbre Une partie de campagne) qui sera publiée la même année et qui
connaît aussitôt un vif succès. La Maison Tellier se situe à Fécamp « derrière l’église Saint-Etienne », elle n’est autre que le reflet des
« maisons » que Maupassant fréquente assidûment. Dès lors le débit s’accélère encore. Un an plus tard est publiée Mademoiselle
Fifi, l’histoire d’une prostituée qui, comme son aînée Boule de Suif, est confrontée à l’ennemi prussien. Il se rend en Bretagne et y
suit l’itinéraire de Flaubert et de Maxime du Camp dans Par les champs et par les grèves.
Maupassant engage un valet de chambre, Francois Tassart, qui deviendra son futur biographe, un homme qui lui est entièrement
dévoué et qui se tiendra à ses côtés jusqu’à la fin. Nombreux sont les biographes de Maupassant, et plus particulièrement Paul
Morand, qui se sont intéressés à ses précieux témoignages. Envoyé spécial pour Le Gaulois, Maupassant devra se rendre à plusieurs
reprises en Afrique du Nord pour de longs séjours, accompagné de son indispensable valet. Mais ces voyages d’études qui, à l’origine,
étaient destinés à alimenter les colonnes du journal dont le but était de dénoncer l’administration des colonies, permettaient aussi
de suivre les traces de Flaubert qui, pour Salammbô, avait exploré les lieux de l’antique Carthage. En métropole, ses nouvelles étaient
publiées au jour le jour dans les principaux quotidiens. En avril, paraît son premier roman, Une vie, perçu comme l’aboutissement
de longues années d’efforts, de périodes d’écriture interrompues, reprises, stimulées par Flaubert. Déjà, en 1877, il avait fait part de
son idée de roman à Flaubert qui, enthousiaste, l’avait encouragé de cette remarque : « Voilà une vraie idée ! » Le succès immédiat
de Une vie corrobore la première impression du maître de Croisset (25 000 exemplaires vendus en quelques semaines). Maupassant
est admis alors dans le cercle des romanciers et le rythme de parution de ses écrits ne fait que s’accélérer. Il publie en juin de la
même année un troisième recueil de nouvelles, Les Contes de la Bécasse, un chef-d’œuvre de plus. Maupassant est le premier surpris
et flatté de ce constant succès, de l’enthousiasme que suscitent ses écrits auprès des lecteurs français et étrangers (Tourgueniev a
largement participé à la diffusion de ses œuvres en Russie et, plus tard, en Italie, Italo Svevo s’inspirera de Une vie pour un roman
qui portera le même titre). Sa carrière est à son apogée.
Maupassant quitte la rue Dulong pour la rue Montchanin où il occupe un rez-de-chaussée d’un hôtel particulier que Louis le
Poittevin, son cousin, a fait construire. L’auteur continue de s’élever dans la hiérarchie sociale et ce nouveau logis en est un indice.
Les publications ne cessent de contribuer à cette promotion et sa notoriété de prendre de l’ampleur. Ainsi, en 1884, il est sollicité
pour préfacer les Lettres de Flaubert à George Sand. En janvier sont publiés le conte Au soleil, fortement teinté de ses souvenirs
d’Afrique du Nord, et Clair de lune et, en juillet, Miss Harriet et Les Sœurs Rondoli. Ce ne sont plus vraiment les chroniques que lui
demande Le Gaulois qui le poussent à quitter la métropole, mais un besoin pressant, presque vital, de soleil et de chaleur préconisés
pour sa santé.

Au printemps 1885, Maupassant fait un grand voyage en Italie en compagnie du peintre Gerveix et de Henri Amic, à qui l’on doit un
précieux témoignage sur l’auteur. Ensemble, ils sillonnent la Riviera Ligure, Savone, Gênes, puis Venise et enfin Naples et son célèbre
golfe, Sorrente, Capri, Amalfi, Salerne, Paestum et Ischia, qu’un tremblement de terre venait de dévaster. A Venise, Maupassant et
ses amis refusent de sombrer dans toute forme d’enthousiasme primaire. Maupassant évoquera plus tard le souvenir d’une « ville
usée » que portent les eaux des canaux comparés à des « égouts à ciel ouvert », « un bibelot » de mauvais goût. De même, il notera
concernant Saint-Pierre de Rome que Le Jugement dernier de Michel-Ange a été réalisé par un artiste de foire.
Naples et ses habitants indisciplinés le séduisent davantage. Le désordre et la saleté de la ville l’amusent. Il félicite le laxisme avec
lequel ce peuple du soleil appréhende la vie. Seule la populace des ruelles sombres lui inspire dégoût et répugnance. En mai, il va
jusqu’en Sicile. Les volcans l’impressionnent. Les paysages marins que lui offre la Sicile lui rappellent la Corse, l’Algérie et parfois
même la Normandie. Il se prête aussi au jeu d’y retrouver les traces de Wagner, ce « musicien génial », pour tenter d’y découvrir
quelque chose que le temps aurait laissé. Les Sœurs Rondoli (1884) est très certainement la nouvelle la plus représentative des
sensations ressenties par l’auteur durant son pèlerinage sicilien.
Palerme l’attire, le surprend et l’envoûte. Son cimetière des Capucins lui renvoie l’image d’un jardin macabre au parfum de désolation.
D’abord impressionné par ce lieu propice à des contes fantastiques, il est aussitôt terrifié et troublé au point de repartir, marqué
à jamais par cette sinistre vision.
C’est finalement Taormine qui sera l’heureuse élue. Cette ville adossée à une montagne avec son théâtre grec charme l’auteur. Son
tour d’Italie et de Sicile s’achève et Maupassant rentre à Paris.

En août, sa santé de plus en plus inquiétante le mène à Châtelguyon pour une autre cure. Dans une lettre à son ami Henri Amic,
Maupassant annonce la naissance d’un nouveau roman qui verra le jour deux ans plus tard sous le titre de Mont-Oriol, « Je viens de
faire d’admirables excursions en Auvergne, c’est vraiment un pays superbe et d’une impression bien particulière, que je vais essayer dans le
roman que je commence. »
Son second roman, Bel Ami, est publié chez Havard ; Bel Ami, considéré comme une œuvre clé, rejaillit aussitôt sur son créateur.
L’intrigue se déroule dans les milieux de la presse parisienne et le héros, Georges Duroy, est un arriviste qui réussit grâce aux
femmes qu’il sait manipuler pour arriver à ses fins. Maupassant a, avant tout, voulu « analyser une crapule » dans un monde digne

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d’elle. Cette justification provoque une vive réaction du monde journalistique à qui il répondra ne pas avoir voulu dresser la satire
de tous les journalistes, mais simplement voulu raconter la vie d’un aventurier quelconque qu’il est possible de rencontrer dans
n’importe quel milieu à Paris. La parution de Bel Ami alimente toutes les conversations et l’opinion se demande si Duroy n’est pas,
en réalité, le reflet de son propre créateur, certains pensent même que le roman doit être lu comme une autobiographie. Or, les
quelques similitudes qui existent entre le héros et l’auteur n’ont lieu d’être que pour donner plus de consistance aux propos de
l’arriviste.
Bel Ami plaît quand même au point de permettre à son auteur de faire l’acquisition d’un yacht d’environ trente mètres, baptisé
Bel Ami, symbole de sa surprenante réussite.
Cette même année il ne publie pas moins de trente contes dont Toine, La Petite Roque, Les Contes du jour et de la nuit et aussi une
préface pour la réédition de Manon Lescaut de l’Abbé Prévost.
Sa vie suit son cours, rythmée par les écrits, les femmes et les voyages. En 1886, le baron de Rothschild l’invite dans sa propriété
en Angleterre. Puis il part pour Londres qu’il n’a aucune envie de découvrir, ensuite pour Oxford, que le beau monde se devait de
visiter à l’époque. Aucun souvenir particulier ne marquera sa mémoire. L’Angleterre lui laisse un arrière-goût d’ennui.
En 1887 Maupassant séjourne à Etretat, dans sa villa « La Guillette », qu’il aurait aimé baptiser « La Maison Tellier » si Laure de
Maupassant ne s’y était pas fermement opposée, refusant que la demeure de son fils s’apparente à un « bordel ». « La Guillette »
donne lieu à de nombreux dîners où un cercle de privilégiés s’enorgueillit de se compter parmi les invités de l’écrivain que peu
connaissent, « l’autre », le chasseur de femmes, la quarantaine, l’œil vigilant, à l’affût d’une nouvelle proie. Le Maupassant qui parle
rarement de littérature et jamais de son œuvre ou des écrivains qu’il côtoie, un Maupassant de plus en plus mystérieux et intrigant.
En janvier il publie Mont-Oriol, son troisième roman qui dresse la satire des curistes. Cette œuvre reçoit une fois de plus un accueil
des plus favorables, et est aussitôt qualifiée de « grand roman ».
L’été est consacré à l’écriture de presque la totalité de Pierre et Jean, (quatrième roman dont le thème central est la bâtardise)
et, en septembre, à la demande de son éditeur qui juge le manuscrit trop court, il compose sa célèbre préface, son « Etude sur le
roman ». Cette préface ne remplit pas ses fonctions, elle sert davantage à exposer la théorie de l’auteur sur le roman. Elle est dans
un premier temps publiée dans Le Figaro le 7 janvier 1888 pour être reprise ensuite, à la parution de Pierre et Jean chez Ollendorff,
en guise de préface, quelques semaines plus tard.
Et enfin Le Horla paraît aussi chez Ollendorf. Cette œuvre ouvre la voie à de nombreuses interprétations ; on pense y voir dans
la folie du narrateur des signes prémonitoires de la fin tragique de son auteur. Le conte apparaît comme l’aboutissement de tous
ces doubles fantomatiques qui ont peuplé les premières nouvelles fantastiques (Un fou ?, Le Figaro 1884, Lettre d’un fou, Gil Blas
1885, ou encore Un fou, Le Gaulois 1885). Le Horla est aussi l’occasion pour l’auteur de s’envoler à deux reprises à bord du ballon
libre à hydrogène baptisé du même nom, qui lui fait découvrir le Nord, la Belgique et l’embouchure de l’Escaut vus de là-haut. Les
publications s’enchaînent toujours au même rythme, Sur l’eau sort chez Marpon et Flammarion, Le Rosier de Mme Husson chez
Quantin.

Son frère Hervé, atteint de graves crises de folie, doit être interné. Maupassant prend en charge son hospitalisation et le conduit
en personne à l’asile. Il met au point un stratagème de sorte que son frère, au cours d’un moment de lucidité, accepte de le suivre
sans protester. Et Maupassant, tiraillé par une angoissante culpabilité, abandonne son frère dans cet endroit infernal où résonnent
ses cris de détresse. « C’est toi qui es fou ! », lui crie son frère tandis que Maupassant s’éloigne sans oser le regarder se perdre dans
ce lieu sordide. L’auteur met un certain temps à se remettre de cet événement qui le marquera jusqu’à la fin de ses jours, jusqu’à ce
qu’il perde à son tour la raison. Hervé meurt trois mois après son internement et son frère, rongé par le remords, veut oublier.
A bord du Bel Ami, son yacht, Maupassant semble fuir le visage de la folie qui lui est clairement apparu sous les traits de son frère.
Il repart pour Gênes, Naples et se dirige ensuite vers la Tunisie, en quête de chaleur et de dépaysement.
Cette période correspond aussi aux premiers troubles hallucinatoires que connaît l’auteur. Il aurait, selon le témoignage du docteur
Sollers, vu sa propre personne entrer, prendre place à ses côtés et lui aurait dicté ce qu’il écrivait. Une fois la feuille noircie, il se
serait levé comme si rien ne s’était passé, ne conservant aucun souvenir de ce qui était survenu.

Maladie, déchéance et mort

En mai 1890 est publié son roman Fort comme la mort chez Ollendorf. Un nouveau coup de maître s’ajoute au palmarès de l’auteur
à succès. Trois cent cinquante mille exemplaires sont vendus en à peine six mois. Le héros, le peintre Olivier Bertin, partage les
mêmes appréhensions et le même caractère que son créateur : il redoute une fin de gloire prochaine par l’arrivée d’un nouveau
talent. Maupassant est toujours très attentif aux chiffres de vente de ses publications bien que la peur de la vieillesse et de la mort
l’obsède. D’autant que son âme souffre à l’image du corps délabré qu’elle habite.
Maupassant va de plus en plus mal. Son entourage le remarque, on note son irritabilité, son regard très souvent fixe et privé
d’expression, ses propos de plus en plus décousus, insensés.
Ses douleurs physiques et morales s’accentuent et le rendent intolérant à toute forme de manifestation extérieure. Il fait ainsi un
procès au propriétaire du nouvel appartement qu’il loue avenue Victor Hugo car le bruit de la rue lui est insupportable. La syphilis
évolue vers une paralysie générale et alimente la noirceur de ses pensées. Il continue cependant d’écrire, avec beaucoup de mal ;
son corps l’empêche de se concentrer. Il publie La Vie errante, un journal de voyage, chez Ollendorf, L’Inutile Beauté chez Havard et
Notre Cœur, en juin, chez Ollendorf. Notre Cœur se situe essentiellement dans les salons parisiens que connaît bien l’auteur et met

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en scène le musicien Massival, épris d’une mondaine « allumeuse sans cœur » et « sans tendresse » inspirée d’une certaine Geneviève
Strauss, une femme qui a osé l’éconduire.
« Il y a des jours où j’ai rudement envie de me foutre une balle dans la tête. Je ne peux pas lire, toute lettre que j’écris me donne un mal…
Dieu que j’en ai assez de la vie », confesse-t-il à son médecin en 1891. On lui prescrit encore des cures sans résultat, on doute, on
peine à trouver un remède efficace à ses maux. En juin, il va prendre les eaux à Divonne où son séjour n’est pas à la hauteur de
ses attentes. Ses insomnies finissent par achever de l’affaiblir. Sous les conseils de Taine, il part pour Champel, animé par un nouvel
espoir de voir ses souffrances soulagées. Dans une lettre à Laure de Maupassant datant de 1891, il fait part à sa mère de sa hâte à se
rendre à Champel où il affirme que Taine a été guéri d’une maladie semblable à la sienne en quarante jours. Or ses propos sonnent
faux, même s’il espère une amélioration, il doute et se rattache à des espoirs vains, évoquant la possibilité de recouvrer le sommeil,
ce qui apparaît comme une lueur d’espoir. De plus, il prétend, pour éviter d’inquiéter sa mère, être en pleine forme et minimise ses
soucis de santé. Les doses excessives de morphine qui apaisaient en apparence ses souffrances ne suffisent plus et l’abus d’éther
vient pallier cette accoutumance.
Sa nervosité inquiétante l’encourage à engager des procès pour des pacotilles à ses éditeurs.
Son entourage songe à la folie qui semble emporter l’auteur comme elle a emporté son frère. Goncourt, dans son journal,
rapporte la dégradation rapide de l’état de Maupassant et souligne le « grossissement invraisemblable de ses rétines ». Cependant que
Maupassant, dans une lettre à son avocat Me Jacob, confesse être « tellement malade qu’il a « bien peur d’être à la mort dans quelques
jours ».
Entre-temps, Musotte, un drame en trois actes, est représenté au Gymnase le 4 mars et publié ensuite chez Ollendorf.
Maupassant est de façon quasi permanente en proie à des délires et des hallucinations, il quitte de moins en moins la chambre et
l’idée de suicide semble se préciser sans plus le quitter. Il confie d’ailleurs à son médecin que dorénavant « entre la folie et la mort,
mon choix est fait ».
Depuis plus d’un an son roman L’Angelus est commencé. D’après les souvenirs de François Tassart, son fidèle serviteur, Maupassant
s’est rendu à Aix en 1870 dans l’espoir de prendre quelques notes en vue d’un nouveau roman qu’il comptait rédiger sous le
titre de L’Ame étrangère. Ce projet, il l’abandonne très vite au profit de L’Angelus qui lui tient davantage à cœur. On sait peu de
choses sur L’Ame étrangère. L’héroïne devait être roumaine, c’est pourquoi Maupassant avait accepté de passer quelques jours à
la cour de la reine Elisabeth de Roumanie (davantage connu sous son pseudonyme littéraire, Carmen Sylva) pour s’imprégner de
la même ambiance que son futur personnage. Maupassant met de côté ces quelques lignes qu’il ne reprendra jamais et tente de
se concentrer sur L’Angelus. Les quelques pages qui restent de ce roman inachevé sont les dernières traces écrites laissées par
l’auteur avant de sombrer définitivement dans la folie. Maupassant veut écrire un nouveau roman puisqu’il refuse dorénavant tout
autre genre. Il est au départ très enthousiaste. Ainsi, dans une lettre à sa mère, l’auteur écrit : « Mère, je marche dans mon livre
comme dans ma chambre ; c’est un chef-d’œuvre. » Un enthousiasme éphémère : il ne parvient pas à dépasser les cinquante premières
pages qui auraient dû correspondre au premier chapitre. Cependant, Maupassant laisse croire qu’une prochaine publication chez
Ollendorff doit avoir lieu. Son éditeur finit par recevoir cet aveu : « Je ne puis fixer aucune date pour L’Angélus puisque je suis incapable
de travailler. » Il écrit même à sa mère que son médecin lui interdit d’écrire. Maupassant prend conscience que la tâche qu’il s’est
confiée est probablement vouée à l’échec. S’il ne va pas au terme de son roman, Maupassant jure de se tuer. L’Angelus est l’histoire
d’une femme au terme de sa grossesse, que son mari soldat a laissée seule au château pendant la guerre. Le soir de Noël, les
Prussiens envahissent la demeure et emmènent la femme dans une étable où, maltraitée et blessée, elle finit par mettre au monde
un fils estropié à vie, dont l’âme, avec le temps, sera à l’image de la tendresse maternelle. Le titre prend tout son sens dans cette
scène de nativité qui conduit à voir, dans la venue de ce fils, celle d’un nouveau messie.
Il ne réussit ni à lire ni à écrire. Le moindre mot provoque des migraines atroces qui lui décrochent des hurlements.

1892 représente une étape sinistre dans l’évolution de la maladie de l’auteur. Maupassant passe le nouvel an chez sa mère à Nice et,
au cours du repas, il fait preuve d’une grande incohérence dans ses propos. Les convives sont sous le choc et n’osent réagir. Seule
sa mère, comprenant la gravité du mal dont souffre son fils, le supplie de rester auprès d’elle. Maupassant s’y refuse et repart pour
Cannes où, dans la nuit, il tente de mettre fin à ses jours. Cette scène épouvantable est entre autre relatée par François Tassart, son
valet. Dans son journal il décrit Maupassant hors de lui, furieux, le regard terrifié et terrifiant, avec dans la main un coupe-papier
ensanglanté avec lequel il vient de se trancher la gorge. François Tassart raconte que son maître trouvait encore la force de lui dire
ces quelques mots : « Voyez François, ce que j’ai fait. Je me suis coupé la gorge et c’est un cas absolu de folie. » François Tassart tente
de le calmer, et lui administre les premiers soins en attendant le médecin. Le lendemain les propos de Maupassant sont délirants.
Le 4 janvier 1892, Laure de Maupassant décide de l’envoyer se faire soigner à la clinique du docteur Blanche à Passy. Il y arrive le 8
et dès lors les jours se succèdent où il sombre dans une folie de plus en plus profonde laissant place à une immobilité de plus en
plus prononcée. Il peut faire preuve parfois de lucidité et reconnaît les amis qui lui rendent visite à la clinique. Mais le verdict des
médecins est sans appel, Maupassant est condamné, plus rien n’est à faire.
S’ensuivent de longs mois de délires et d’isolement que seule la mort peut anéantir. La syphilis a frappé jusqu’au bout, à coup de
douleurs, de migraines, d’épuisement et de folie. Le jour, le temps est rythmé par les douches violentes d’eau froide qui calment ses
crises, la nuit, c’est le diable qui se présente à son chevet. Il revoit aussi Flaubert et Hervé avec qui il entretient des conversations
mouvementées.
L’internement de Maupassant fait beaucoup de bruit et prend l’apparence d’un fait divers. La presse s’acharne sur son cas. On dit
que sa cervelle s’est dissoute et que le grand écrivain, le « Bel Ami » est devenu gâteux.
Le 6 juillet 1893 à neuf heures du matin Henri René Albert Guy de Maupassant, âgé de quarante-trois ans, « homme de lettres,
célibataire », est libéré de ses souffrances. Il est inhumé à la vingt-sixième section du cimetière de Montparnasse, le service religieux

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a lieu le 8 juillet à midi à l’église de Saint-Pierre de Chaillot. Sa mère restée seule à Nice dans sa douleur, aucun parent n’est présent,
et le corps de l’auteur est enseveli en pleine terre, selon ses dernières volontés, sans cercueil selon les dires de certains biographes.
Henri Troyat, dans sa biographie, raconte la cérémonie en détail. En tête de cortège se trouvent entre autres Zola, Ollendorf,
son éditeur, et Me Jacob. Derrière eux avance maladroitement, submergé par la tristesse de perdre son maître mais aussi de voir
s’évanouir une partie de sa vie, son fidèle valet Francois Tassart.
Parmi la foule qui se tient autour de la fosse, on reconnaît Alexandre Dumas fils, Jean Lorrain, Henry Roujon, Catulle Mendès, Henri
Céard, Paul Alexis, José Maria de Heredia… Et Zola prend la parole pour un dernier hommage au jeune disciple de Flaubert qui
avait participé aux Soirées de Médan.

L’auteur des Rougon-Macquart ne tarit pas d’éloges en retraçant la carrière singulière du jeune disparu. « Il n’avait eu qu’à paraître
et qu’à conter ses histoires, les tendresses du grand public étaient aussitôt allées vers lui. […] On acceptait tout de lui ; ce qui aurait choqué
sous la plume d’un autre, passait dans un sourire. […] Nous avions ce spectacle extraordinaire d’un talent robuste et franc. […] On l’aimait,
parce qu’il avait la bonté rieuse, la satire profonde qui, par un miracle, n’est point méchante, la gaieté brave qui persiste quand même sous
les larmes. Il avait pour aïeux Rabelais, Montaigne, Molière, La fontaine. […] Lui, grand Dieu ! lui frappé de démence ! » Bouleversé, la
voix étranglée, Zola achève son hommage funèbre, s’adressant à la foule, « Et, Messieurs, ce serait là la gloire de Maupassant, que ce
serait encore la plus certaine et la plus solide des gloires. Qu’il dorme donc son bon sommeil, si chèrement acheté, confiant dans la santé
triomphante de l’œuvre qu’il laisse ! Elle vivra et le fera vivre. »
Céard et Alexis, au nom des collaborateurs de Médan, prononceront aussi quelques mots.
« Quelle destinée ! Quelle perte pour les lettres ! Ah ! c’était un lapin ! », Alexandre Dumas fils mettra un terme à la cérémonie par cette
oraison funèbre dont l’évocation souriante de sa virilité, aurait été au goût de l’ancien canotier érotomane.
A la Comédie française, le 6 mars, est représentée une autre comédie, en deux actes, peu connue du grand public, La Paix du ménage,
publiée ensuite chez Ollendorf.
M. Gustave de Maupassant meurt à Sainte-Maxime dans le Var le 24 février 1899 et Mme de Maupassant, née Laure le Poittevin,
meurt à Nice le 8 décembre 1904.

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