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OUVERTURE COMMERCIALE ET DISTRIBUTION DES

REVENUS EN COTE D’IVOIRE : SIMULATION A L’AIDE


D’UN MODELE D’EQUILIBRE GENERAL CALCULABLE
DYNAMIQUE

Souleymane S. DIALLO1

Centre Ivoirien de Recherches Economiques et Sociales CIRES, Côte d’Ivoire

Seydou KONE et Monan KAMAGATE

UFR des Sciences Economiques et de Gestion – Université de Cocody

RAPPORT INTERIMAIRE

(Réseau PEP, Canada)

Mai 2004

RESUME : L’objectif de ce papier des d’évaluer les effets potentiels d’une ouverture commerciale
résultants des accords de l’OMC sur la répartition des revenus et le bien être en Côte d’Ivoire. Après
avoir présenté le rôle de l’agriculture et l’ouverture commerciale dans les stratégies de développement
en Côte d’Ivoire ainsi que les enjeux et les implications du cycle de DOHA pour l’économie
ivoirienne, il présente la revue de la littérature et la méthodologie de l’étude. Puis, il présente les
scénarios de politique commerciale prévue et une description de la structure de l’économie à partir de
la MCS.

Mots Clés: Libéralisation – Cycle de DOHA – Modèle EGC – Distribution – Côte d’Ivoire.

JEL Classification : C68; F13; O15 ; I0

1 08 BP 1295 Abidjan, Côte d’Ivoire ; Tél : 225-22 44 43 63, Fax : 225-22 44 08 29, E-mail : ssadio_tr@yahoo.fr /

sadio.diallo@csrs.ci
OUVERTURE COMMERCIALE ET DISTRIBUTION DES REVENUS EN COTE
D’IVOIRE : SIMULATION A L’AIDE D’UN MODELE D’EQUILIBRE GENERAL
CALCULABLE DYNAMIQUE

1. Introduction

Durant ces deux dernières décennies, les questions relatives à la libéralisation économique avec pour
corollaires le désengagement de l’Etat du secteur productif et le démantèlement des barrières
commerciales ont dominé le débat sur le développement. Se basant sur l’idée selon laquelle une plus
grande ouverture au commerce international et le recentrage de l’Etat sur son rôle régalien était
nécessaire pour garantir l’efficacité économique et, partant, le développement économique et social,
les bailleurs de fonds multilatéraux et bilatéraux ont encouragé les pays en développement en général
et africains en particulier à plus de libéralisme. Ce qui devrait se traduire dans les faits par une baisse
significative voire la suppression des restrictions aux échanges internationaux, la privatisation des
entreprises publiques et le démantèlement des structures d’encadrement des producteurs agricoles et
de commercialisation des produits d’exportation.

Pour les Etats africains qui tirent l’essentiel de leurs ressources des taxes sur le commerce extérieur et
de la taxation du secteur agricole, de telles mesures ont d’importantes implications aussi bien en
termes de recettes fiscales que de distribution des revenus et de bien – être économique pour les
ménages. Ceci est d’autant plus important que les accords sur la libéralisation des échanges initiés
dans le cadre de l’OMC viennent renforcer la tendance au désarmement douanier et à la libéralisation
intérieure entamée dans le cadre des politiques d’ajustement structurel. Les questions sur les
politiques agricoles qui étaient restées en marge des négociations multilatérales sur la libéralisation du
commerce international jusqu’en 1986, sont aujourd’hui au cœur des négociations commerciales et
cristallisent les oppositions entre pays développés et pays en développement.

En principe, le volet agricole de l’accord de l’OMC sur la libéralisation des échanges vise
principalement l’introduction d’une certaine discipline dans les échanges de produits agricoles et les
politiques de soutien. Plus concrètement, il a comme objectifs l’élimination des politiques de
protection tarifaires, de subventions à l’exportation et de soutiens à la production qui sont
considérées comme les instruments de politiques agricoles les plus distrosives du commerce
international de produits agricoles.

2
Au-delà du problème de partage des gains liés au commerce international, les préoccupations que
suscite la question de la libéralisation des échanges commerciaux, notamment ceux liés aux produits
agricoles tiennent au rôle de l’agriculture dans les économies en développement d’une part, et
l’implication des politiques commerciales sur la répartition des revenus et le bien être d’autre part.
Plusieurs études ont été menées pour évaluer l’impact des reformes commerciales sur la performance
économique et la répartition des revenus et la pauvreté dans les pays en développement ces dernières
années. Il ressort de ces travaux que, si du point de vue de la théorie économique, la libéralisation
commerciale favorise le développement économique et la réduction des inégalités de revenus, la
façon dont ces mesures affectent le bien être et la distribution des revenus est fortement liée aux
conditions spécifiques des pays qui les mettent en œuvre. En outre, même si la libéralisation
commerciale se traduit globalement par un gain de bien être, il est tout à fait possible que les
ménages les plus pauvres enregistrent une perte. Il est de ce fait important de comprendre comment
les modifications des politiques commerciales vont affecter la performance économique, la
distribution des revenus et le bien être.

L'objectif de ce travail est de tenter de quantifier, à l’aide d’un modèle d’équilibre général calculable
les effets potentiels des diverses mesures de libéralisation commerciale découlant du cycle de DOHA
sur la répartition des revenus en Côte d’Ivoire. Le reste du document est structuré de la manière
suivante. La section 2 présente la place du secteur agricole et le rôle de l’ouverture extérieure dans la
stratégie de développement de la Côte d’Ivoire. La section 3 donne un aperçu des enjeux du cycle de
DOHA et les implications potentielles pour l’économie ivoirienne. Les sections 4 et 5 sont
consacrées respectivement à la revue de la littérature et à la présentation de la méthodologie. Après
avoir indiqué les hypothèse de simulation (section 6), nous procédons, à la section 7 à une
description de la structure de l’économie.

2. Stratégies de développement de la Côte d’Ivoire : développement agricole et ouverture sur


l’extérieur

L’évolution de l’économie ivoirienne est marquée par trois grandes phases. La première qui s’étend
de 1960 jusqu’en 1979, est une phase de forte croissance qui a vu le PIB par tête croître au taux
moyen annuel de 5,7%. La deuxième phase qui s’étend de 1980 à 1993 est la phase de dépression
avec un taux de croissance annuel moyen négatif. Et la troisième phase est celle de la relance qui a

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suivi la dévaluation du franc CFA en 1994. Elle se caractérise par une reprise de la croissance qui a
atteint plus de 6% en 1996 avant de replonger suite à la crise politique qui secoue le pays depuis
1999. L’agriculture qui est considérée comme l’épine dorsale de l’économie ivoirienne a joué un rôle
central dans cette évolution. Ainsi, sur la période 1960 – 1990, elle a contribué au PIB dans une
proportion moyenne annuelle de 35% et continue, à ce jour, à employer plus de 65% de la
population active (Kouassy, Diop-Boaré et Koné, 2003).

Outre le rôle clé donné à l’agriculture, la stratégie de développement de la Côte d’Ivoire se caractérise
essentiellement par l’ouverture sur l’extérieur et la forte présence de l’Etat dans l’économie. En effet,
le modèle de base adopté par la Côte d’Ivoire est fondé sur l’ouverture sur l’extérieur qui joue un rôle
central aussi bien pour l’achat des exportations agricoles que pour l’apport de capitaux et de main
d’œuvre. Le graphique 1 présente l’évolution du taux d’extraversion et le taux de croissance de la part
commerciale dans le PIB de la Côte d’Ivoire entre 1970 et 2000.

Graphique 1 : Evolution de l’ouverture commerciale entre 1970 et 2000.

O u v e r tu r e c o mme r c ia le Ev o lution de la p a r t c o mme r c ia le


0 .4 4 0 .4

0 .4 0 0 .3

0 .2
0 .3 6

0 .1
0 .3 2
0 .0

0 .2 8
- 0 .1

0 .2 4 - 0 .2
70 75 80 85 90 95 00 70 75 80 85 90 95 00
OPEN N ESS
TC IN SER T

Il montre que la période allant de 1970 à 1980 et celle qui a suivi la dévaluation du franc CFA en
1993, qui sont des périodes de forte croissance économique, sont également marquées par une
grande ouverture vers l’extérieure. Par contre, durant la période de crise qui va de 1980 à 1993, on a
assisté à un retournement de tendance avec une baisse significative du taux d’ouverture commerciale
en Côte d’Ivoire. Cependant, malgré les perturbations que connaît le pays depuis 1999, l’économie
ivoirienne reste marquée par une forte pénétration des importations qui varient de 34% du PIB en
2000 à 35% en 2001 alors que la somme des exportations et des importations représentait 64% et
80% du PIB en 1969 et 2001 respectivement. Le graphique 2 représente l’évolution des importations
et des exportations d’une part, et celle de la balance commerciale d’autre part.

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Graphique 2 : Evolution des échanges extérieurs et de la balance commerciale de la Côte d’Ivoire
entre 1970 et 2000.

Ev o lution des Ex por ta tion s e t d es Impor ta tio ns Ev o lution de la b a la n c e c omme r c ia le

1 .2 0 .6

1 .0
0 .4
0 .8

0 .6 0 .2

0 .4
0 .0
0 .2

0 .0 - 0 .2

- 0.2
- 0 .4
- 0.4 70 75 80 85 90 95 00
70 75 80 85 90 95 00
C U R AC C
TC EX TC IM

Les exportations et les importations sont essentiellement orientées vers l’Europe qui constitue le
principal client et le principal fournisseur. Bien que la part des exportations ivoiriennes en direction
de l’Europe a connu une baisse sur la décennie 1990, passant de 66,5% en 1995 à 50,6% en 1999, ce
continent absorbe plus de la moitié de ces exportations. Dans le même temps, les importations
ivoiriennes en provenance de l’Europe ont évolué de 59,31% en 1995 à un peu plus de 54% en 1999.
La Côte d’Ivoire importe essentiellement de produits pétroliers, de médicaments, des biens
d’équipement et de produits alimentaires. Sur la période 1990 – 1999, les produits pétroliers
représentaient annuellement environ 19% des importations annuelles totales contre 4% pour les
médicaments et 5% pour les produits alimentaires composés de riz et de poissons congelés pour
l’essentiel. L’évolution des principales importations ivoiriennes entre 1992 et 1999 est présentée au
tableau1.
Tableau 1 : Evolution des principaux produits d’importation*
1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999
Huiles brutes de pétrole 115,8 113,3 184 185,5 242,5 254,1 195 240,36
Médicaments 32,5 31 42,329 58,21 56,63 60,63 63,35 63,69
Pétrole partiellement raffiné 18,04 16,00 33,07 44,57 88,28 37,02 64,78 85,59
Riz blanc 21,86 27,90 42,01 52,61 44,66 64,59 81,94 66,19
Poisson congelé 26,06 29,86 55,31 68,65 72,15 87,55 110,84 103,92
Source : INS, * les montants sont milliards de FCFA

Au niveau des exportations, elles sont composées pour l’essentiel de produits agricoles. Malgré le
choix d’un système économique libéral opéré dès les premières années de l’indépendance politique en
1960, l’Etat a joué un rôle central dans l’économie ivoirienne grâce notamment à la gestion du

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système de stabilisation des prix des produits agricoles à travers la Caisse de Stabilisation et de
Soutien des Prix des Produits agricoles (CSSPPA). Le système de stabilisation mis en place a permis à
l’Etat d’organiser un système de prélèvements gérés par la CAISTAB en plus de la fiscalité directe à
laquelle sont soumises les filières agricoles d’exportation faisant de cette structure l’un des maillons
essentiels de la politique de développement et de redistribution des fruits de la croissance. En effet,
loin d’être un simple instrument de gestion de l’instabilité des cours mondiaux des produits
d’exportation, et sa répercussion sur l’appareil productif, le système de stabilisation ivoirien était
également un véritable instrument de politique budgétaire pour le gouvernement.

Cependant, avec la crise économique et financière qui est apparue à partir de 1980 et l’instabilité des
cours internationaux des produits d’exportation, la stabilisation des prix et le soutien à la production
s’est avérée fiscalement insoutenable. Face au déficit persistant et à l’endettement croissant de la
caisse, l’Etat s’est retrouvé dans l’obligation d’entreprendre un processus de libéralisation progressif
qui a abouti au démantèlement complet de la CAISTAB en 2000.

Au-delà de cette réforme, la Côte d’Ivoire est actuellement engagée sur plusieurs fronts dont le
dénominateur commun reste la libéralisation et l’ouverture commerciale. Il s’agit des différentes
réformes de politique économique qui ont cours depuis les premiers programmes d’ajustement
structurel, l’intégration sous – régionale au sein de l’UEMOA et de la CEDEAO, les négociations
avec l’UE dans le cadre des Accords de Partenariat Economique (APE) et les négociations
commerciales multilatérales au sein de l’OMC.

Parmi ces différents processus qui visent tous, l’amélioration de l’efficacité économique et une plus
grande intégration dans l’économie mondiale, le dernier semble être le plus important du fait de son
caractère multilatéral et sa primauté sur les autres engagements2. Même s’il existe dans un large
consensus sur les avantages liés à la participation au commerce international, et malgré la tradition
d’ouverture économique de la Côte d’Ivoire, la mise en œuvre de ces accords, et notamment le volet
agricole peut avoir d’importantes implications sur la performance et le bien être économiques. La
section suivante traite des enjeux du cycle de DOHA et leurs implications potentielles pour
l’économie ivoirienne.

2
L’OMC donne la possibilité aux autres Etats membres de porter plainte auprès de ses instances lorsque les
pratiques commerciales d’un pays ou un bloc de pays va à l’encontre des accords multilatéraux.

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3. Les enjeux du cycle de DOHA et implications pour l’économie ivoirienne.

Certains analystes pensent que, face à la réticence et / ou à l’incapacité des organisations


internationales et des pays développés à fournir au pays en développement les ressources nécessaires
au financement de leur développement, l’élimination des distorsions dans le commerce international
est le meilleur facteur pour briser le processus qui génèrent la pauvreté et le sous développement. En
2001, les pays membre de l’OMC ont entamé un cycle de négociation dit « cycle de développement »
à DOHA. L’objectif général de ce nouveau cycle de négociations multilatérales est de mettre en place
un système commercial multilatéral exempt de distorsions et favorable au développement
économique des pays membres. Il s’agit plus spécifiquement de démanteler tous les systèmes de
protection tarifaire et non tarifaire ainsi que les soutiens qui introduisent des distorsions dans les
échanges internationaux. Ceci est sensé favoriser l’instauration d’un système d’échange permettant à
chaque pays d’exploiter de manière compétitive les opportunités qu’offre la participation au
commerce international. Etant donné le rôle central de l’agriculture dans les économies des pays en
développement, l’accord sur l’agriculture (AsA) constitue un enjeu majeur des négociations du cycle
de DOHA (Hermelin et de Tavernier, 2003).

Dans ses principes, l'AsA a pour objectif principal l’introduction d’une certaine discipline dans les
échanges de produits agricoles et dans les politiques de soutien. Concrètement, il vise à limiter
l’utilisation d’outils de politique agricole ayant des effets négatifs, sur le commerce mondial. Il
englobe trois types d’instruments de politique agricole : les mécanismes de protection aux frontières,
les soutiens à l’exportation et les soutiens à la production qui influent sur l’offre de produits ou sur
les prix et qui ont, de ce fait, des conséquences indirectes sur les échanges.

Pour les pays en développement, l’accès au marché des pays développés, l’élimination des différents
dispositifs de soutien (soutien interne et subventions à l’exportation), la question du Traitement
Spécial et Différencié (TSD) et la progressivité des droits de douane sont des questions clés dans la
mise en œuvre des accords de l’OMC en général et celles relatives à l’AsA en particulier. En effet, la
structure tarifaire des pays développés est telle que les crêtes tarifaires et la progressivité des droits3
affectent sensiblement les exportations des pays en développement. Une réduction ou une

3
Les crêtes tarifaires sont des droits au-dessus de 15% et la progressivité des droits protège les industries en amont
par rapport aux matières premières et aux produits de base (Liontas, 2003).

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élimination des crêtes et de la progressivité dans le cadre de l’OMC pourrait donc permettre aux pays
en développement de mieux saisir les opportunités qu’offre le commerce international.

Le désarmement douanier et l’élimination des politiques de soutien préconisés dans le cadre du cycle
de DOHA pourrait être bénéfique à l’économie ivoirienne. En effet, plusieurs facteurs peuvent
inciter à l’optimisme dans la perspective de la mise en œuvre des accords de l’OMC. La première
raison tient au fait que la Côte d’Ivoire est un exportateur net de produits agricoles. L’agriculture
contribue à hauteur de 42% des exportations totales du pays. Ce faisant, l’amélioration de l’accès au
marché et l’élimination des politiques de soutien interne et de subvention à l’exportation pratiquées
par les pays développés devrait être, à priori favorables aux producteurs agricoles ivoiriens et à
l’ensemble de l’économie nationale.

La deuxième raison tient au fait que la Côte d’Ivoire avait déjà entrepris une série de mesures de
libéralisation unilatérale dans le cadre des programmes d’ajustement structurel qui ont permis de
réduire, voire d’éliminer la plupart des distorsions commerciales de sorte que les efforts à mettre en
œuvre pour se conformer aux accords de l’OMC sont relativement supportables.

Cependant, malgré ces aspects positifs qui pourraient résulter de l’application du cycle de DOHA, la
Côte d’Ivoire devrait s’attendre, au moins dans le court terme, à certaines difficultés dans
l’application de ces accords. D’abord, bien qu’étant un pays essentiellement agricole, la Côte d’Ivoire
reste néanmoins un importateur net de produits alimentaires. A ce titre, même si l’élimination des
soutiens internes et des subventions à l’exportation peut être favorable aux agriculteurs du secteur
vivrier, cette mesure peut avoir des effets négatifs pour les consommateurs qui verront les prix des
denrées alimentaires augmenter. En outre, cela se traduira par une hausse de la facture des
importations alimentaires se qui représentent 8% des importations totales et absorbent 6% des
recettes d’exportation du pays (Mamaty, 2002).

Ensuite, l’élimination ou la réduction des taxes à l’importation se traduira par une perte de revenu
pour l’Etat du fait de la baisse des recettes fiscales. En effet, étant donnée la part des taxes sur le
commerce extérieur dans les recettes fiscales, la mise en œuvre des accords de l’OMC pourrait se
traduire par d’importantes difficultés budgétaires pour l’Etat. Le tableau 2 présente la structure et
l’évolution des recettes fiscales de l’Etat ivoirien de 1995 à 2002.

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Tableau 2 : Structure et évolution des recettes fiscales de 1995 à 2002*
1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
Impôts indirects 167,1 200,3 227,3 240 241,2 258,3 289,1 269,6
Taxes sur les produits pétroliers 98,9 100,3 99,4 96,1 96,9 95,5 93,6 94,4
Taxes sur les importations 251,8 282,2 309,4 320,3 312 225,9 262 281,5
Taxes sur les exportations: 177,4 205,7 173,2 158 176,8 163,4 196,5 256,9
Dont taxe sur les exportations de cacao et café 162,7 193,3 165,9 150,2 169,8 156,1 188 246,9
Total des recettes fiscales 695,2 788,5 809,3 814,4 826,9 743,1 841,2 901,9
Source : Ministère de l’Economie et des Finances ; *les montants sont exprimés en milliards de FCFA

La mise en œuvre de ces accords impose pour l’Etat, la réduction des taxes à l’importation qui
représentent, sur la période 1995 – 2002 plus de 280 milliards de francs CFA par an soit environ 35%
des revenus fiscaux en moyenne. Par ailleurs, même si les accords de l’OMC n’imposent pas aux pays
membres la réduction des taxes à l’exportation, la libéralisation complète des échanges impose la
baisse voir la suppression de ces dernières. En effet, un problème lié à la mise en application des
accords du cycle de DOHA est l’érosion des marges préférentielles dont bénéficient la Côte d’Ivoire,
à l’instar des autres pays ACP, dans le cadre de l’accord de Cotonou à mesure que les tarifs agricoles
sont libéralisés sur une base multilatérale. Il est en effet prévu que le commerce entre les pays ACP et
l’Union Européenne, celui des produits agricoles notamment, sera régi par les règles de l’OMC
(ICTSD, 2003). Dans cette perspective, pour conserver sa compétitivité vis-à-vis de ses concurrents,
la Côte d’Ivoire devra réduire les taxes sur les exportations, à défaut de les supprimer totalement. Si
cette mesure est de nature à améliorer le niveau des prix aux producteurs du secteur de l’agriculture
d’exportation4, elle risque néanmoins d’accentuer les difficultés budgétaires de l’Etat car ces taxes ont
généré, en moyenne, plus de 180 milliards de francs CFA par an soit environ 18% de l’ensemble des
recettes fiscales annuelles de l’Etat entre 1995 et 2002 (Tableau 2).

Les tergiversations de l’Etat sur la fiscalité des filière café et cacao donnent la mesure des difficultés
budgétaires que comporte l’élimination des taxes sur les exportations. A titre d’exemple, le DUS5 qui
était de 125 FCFA/kg en 2001 est passé en 2002 à 220 FCFA/kg. Alors que l’ensemble des
prélèvements de l’Etat sur ces filières devait être au maximum de 20% de fiscalité (DUS et taxes
d’enregistrement) et 10% de redevance, conformément aux accords avec la Banque Mondiale et le

4
Sylla (1997) a montré que la suppression des taxes à l’exportation du café et du cacao en 1993 avait permis un
accroissement sensible des prix aux producteurs.
5
Le Droit Unique de sortie (DUS) représente une taxe à l’exportation des produits agricoles.

9
FMI, ils ont atteint 37% cette année là. Dans l’ensemble, les taxes sur les échanges extérieurs
représentent plus de la moitié des recettes fiscales de l’Etat. Sur la période 1995 – 2002, les taxes sur
le commerce extérieur représentaient en moyenne plus de 58% de revenus fiscaux annuels de l’Etat.
Dans ces conditions, la capacité de l’Etat à faire face aux modifications tarifaires qu’impose
l’application des mesures de l’OMC est largement dépendante de l’impact de celles-ci sur le budget
du gouvernement.

En fin, pour la Côte d’Ivoire, la question de la progressivité des droits de douanes est d’une
importance capitale du fait de son impact sur la diversification des exportations. En effet, même si le
Cycle de l’Uruguay a permis d’aboutir à une réduction de la progressivité des droits, celle-ci demeure
encore élevée pour plusieurs produits clés de l’économie ivoirienne tels que le café, le cacao, les
oléagineux et les fruits et légumes (Mamaty, 2002). Le maintien de la progressivité des droits de
douanes du fait de certaines clauses du cycle de DOHA risque de limiter fortement la capacité de la
Côte d’Ivoire à exporter des produits autres que les matières premières brutes.

4. Revue de la littérature

Les modèles d’équilibre général calculable sont de plus en plus utilisés pour analyser les effets des
politiques économiques dans les pays en développement. Cela est du à la difficulté d’utiliser des
modèles économétriques dans ces pays à cause de l’indisponibilité de données temporelles sur de
longues périodes. Schubert (1993) fournit une bonne revue sur les fondements et les applications de
l’approche en équilibre général calculable dans les pays en développement. Il ressort de sa revue
qu’au-delà de l’insuffisance de séries chronologiques suffisamment longue pour étudier certains
problèmes économiques dans les pays en développement, l’utilisation des modèles EGC trouve son
intérêt dans la possibilité qu’ils offrent dans le traitement de certaines caractéristiques spécifiques aux
économies en développement.

Zantman (1993) offre quelques éléments d’évaluation des MEGC dans l’étude de la répartition des
revenues dans les PED. Il apparaît dans ses conclusions que l’éclectisme théorique qui préside à la
construction de MEGC appliqués aux pays en développement, la prise en compte des facteurs
monétaires et financiers, l’inclusion de contraintes politiques et socioéconomiques ont permis de

10
dépasser le cadre théorique souvent caricatural des premiers modèles et explique l’usage de plus en
plus fréquent de cette approche.

Dans la littérature, on distingue deux types de modèle d’équilibre général calculable : les modèles
statiques et les modèles dynamiques. Plusieurs auteurs ont utilisé des modèles statiques pour analyser
les effets des réformes ou des chocs sur les économies aussi bien de pays en développement que des
pays développés ; Chia et al. (1991) ; Easley et al. (1993) ; Harrison et al.(1997) ; Decaluwé et al.
(2001) ; Lloyd et Mc Laren (2003) ; et Redmond (2003). Ces études ont porté sur des sujets tel que la
libéralisation commerciale, l’intégration économique, la libéralisation dans l’agriculture et l’effet des
politiques sociales. Voyons un peu plus dans les détails certaines applications de ces modèles.

Le modèle construit par Harrison et al. (1997) avait pour objectif d’examiner quantitativement une
large gamme de politique commerciale et des options de politiques tarifaires pour le Chili. Plus
précisément, ils ont examiné les principales options de politique commerciale préférentielles
suivantes : (1) une zone de libre échange avec le MERCOSUR ; (2) une union douanière avec le
MRCOSUR ; et (3) une participation à l’accord nord américain de libre échange. Ils évaluent aussi
d’autres options de politiques commerciales pour le Chili, incluant une évaluation de la réduction
complémentaire du tarif avec les pays non-partenaires en combinaison avec la mise en œuvre des
options de zones de libre échange ; La libéralisation unilatérale ou globale et le tarif optimum
unilatéral. Dans tous les cas, ils examinent le rôle des taxes domestiques pour compenser la perte de
revenu, et ils montrent comment le choix de ces taxes est important pour la mise en œuvre effective
des politiques commerciales. Ils arrivent à la conclusion selon laquelle sans une réduction
complémentaire du tarif externe, les accords du MERCOSUR seront contre-productives. Ils
montrent que les accords de libre échange dans le cadre nord américain offrent plus de gains que
toutes les options unilatérales ; cela grâce à l’accès préférentiel au marché américain.

Quant aux modèles dynamiques, ils permettent d’examiner diverses questions où des problèmes inter
temporels sont importants, incluant les termes de l’échange, les chocs et les réformes de tarifs.
Plusieurs études utilisant ces modèles ont été réalisés pour analyser les effets des politiques
économiques aussi bien dans les pays développés que dans les pays en développement ; Devarajan et
al. (1998) ; El Saïd, Löfgren et Robinson (2001) ; Dissou (1998), Annabi et Rajhi ( 2001).

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Devarajan et Delfin (1998), présentent un modèle d’équilibre général calculable simplifié d’une
économie ouverte dans laquelle les décisions des consommateurs et des producteurs sont toutes
cohérentes intra et inter temporellement. Dans leur modèle, les consommateurs maximisent la valeur
présente de l’utilité de consommation et les producteurs maximisent la valeur présente du profit. Le
modèle donne des solutions pour une série cohérente de prix inter temporel. En définitive, on peut
retenir que l’objectif de leur travail était de décrire comment spécifier, calibrer et faire des simulations
avec un modèle dynamique le plus simple possible pour une économie ouverte.

Dissou (1998), évalue les effets dynamiques de l’intégration dans l’UEMOA sur l’économie
sénégalaise à travers un modèle d’équilibre général calculable inter temporel. Il analyse les effets
dynamiques de la réforme tarifaire du Sénégal et de son accès croissant aux marchés régionaux. Son
modèle permet en particulier d’étudier l’impact de l’accord d’intégration régionale sur le bien-être et
sur la dynamique transitoire de plusieurs variables sectorielles et agrégées, incluant l’investissement,
l’emploie, l’out put, le commerce, le compte courant de la balance et le déficit du gouvernement.

Une autre étude qui mérite de l’attention est celle de El-saïd, Löfgren et Robinson (2001) qui aborde
les problèmes de développement économique de long terme en Egypte dans un cadre d’équilibre
général calculable dynamique récursif. La première est ciblée sur le développement d’un secteur et la
seconde est une approche de développement plus large. Dans la première approche de
développement, le progrès technique est séparément ciblé sur trois secteurs : l’agriculture, l’industrie
agroalimentaire et le secteur textile. Dans la seconde approche, une stratégie de développement plus
large est adoptée et le même progrès technique est distribué de façon égalitaire entre les trois
secteurs.

Les modèles d’équilibre général calculable sont de plus en plus utilisés pour analyser les effets des
politiques de libéralisation commerciale, Dissou (2001) ; Annabi et Rajhi (2001) ; Lloyd et Mac Laren
(2002) ; Ayele (2002) et Redmond (2003). Lloyd et Mac Laren (2002) montrent comment on peut
mesurer l’ouverture commerciale en utilisant des modèles d’équilibre général calculable tandis que
Redmond (2003) lui, utilise un modèle d’équilibre général calculable pour quantifier les effets de la
réformation de la politique commerciale dans les négociations de l’Uruguay Round sur l’agriculture.
Il aboutit à la conclusion selon laquelle plus la réduction dans la protection est grande, plus grande
est l’accroissement du bien être pour toutes les régions du monde. Ayele (2002), utilise un modèle

12
d’équilibre général calculable rural-urbain pour examiner les impacts de la libéralisation commerciale
sur la transformation structurelle et la croissance de l’économie éthiopienne dans son ensemble. Ses
simulations suggèrent que les impacts de la libéralisation commerciale dépendent des conditions de
fixation des salaires dans la région urbaine. Il arrive à la conclusion selon laquelle si les salaires réels
urbains sont fixes, la réforme influence négativement toute la croissance économique. Par contre si le
salaire urbain est flexible, on enregistre une hausse de la production aussi bien dans les régions
urbaines que rurales et une expansion du PNB. Quant à Annabi et rajhi (2001), ils comparent dans
leur étude l’effet d’une libéralisation commerciale graduelle avec un démantèlement instantané du
tarif et analysent l’introduction d’une taxe sur la valeur ajoutée pour compenser la baisse de revenu
du gouvernement.

Au niveau de la Côte d’Ivoire, plusieurs auteurs ont utilisé des modèles d’équilibre général calculable
pour aborder divers problèmes économiques. Entre autres on peut citer Chia, Wahba, et Whalley,
(1992), Schneider (1992), Callipel, et Guillaumont-Jeanneney (1996), McIntire (1999), Cogneau et
Collange (1997) et Aka (2003). Mc Intire et Varangis (2001) et McIntire (1999) analysent les aspects
clés du système de vente et de prix du cacao ivoirien en combinant une approche en équilibre partiel
et une en équilibre général calculable. Leurs résultats indiquent, entre autre qu’une suppression de la
taxe à l’exportation du cacao a un effet très limité sur le revenu national. Cependant, elle améliore
sensiblement la répartition des revenus. Cette conclusion confirme les résultats de Sylla (1997) qui a
indiqué que la suppression du DUS en 1993 avait permis une nette amélioration du revenu des
producteurs de ces deux spéculations, qui comme les autres populations rurales sont parmi les plus
pauvres. et évaluent de nouvelles propositions de réforme à travers un modèle économétrique. En
dehors de ces deux études, seuls Chia, Wahba et Walley et Aka abordent la question de la répartition
des revenus en rapport avec les chocs de politiques économiques. En outre, si Cogneau et Collange
utilisent un modèle dynamique pour étudier l’effet de la dévaluation du franc CFA, par contre, tous
les autres restent dans un cadre de statique comparative et ignorent les effets dynamiques des chocs
de politiques étudiés.

A notre connaissance, seules les études de Dissou (2001) et Dissou et Decaluwé (1995) ont appliqué
un modèle dynamique d’équilibre général calculable à l’économie ivoirienne. En outre, il n’existe pas
encore une évaluation des effets des accords de l’OMC sur l’économie ivoirien. Notre étude s’inscrit

13
dans un cadre dynamique en équilibre général calculable en vue d’évaluer les effets potentiels des
mesures découlant des accords de l’OMC. La section suivante présente la méthodologie retenue.

5. Méthodologie

5.1 Le modèle de base

Partant du modèle EXTER PLUS 2 de Fofana, Cockburn et Décaluwé (2003) comme structure de
base, nous construisons un modèle dynamique séquentiel pour analyser les effets probables des
mesures de libéralisation des échanges sur la répartition des revenus et le bien être en Côte d’Ivoire.
Les anticipation des agents économiques sont donc « myope ». De ce fait, la dynamique du modèle
ne prend en compte que le stock du capital et le taux de croissance de la force de travail qui est
approximé par le taux de croissance de la population. Nous présentons dans les sections suivantes les
principales caractéristiques du modèle.

Le modèle comporte quatre facteurs de production : le travail qualifié, le travail non qualifié, la terre
et le capital. Il intègre neuf catégories de ménages identifiés suivant la catégorie socioprofessionnelle
du chef de ménage. En plus de ces ménages, on compte trois autres secteurs institutionnels que sont
les entreprises, le gouvernement et le reste du monde et les biens et services sont produits par trente
huit branches. Etant donné la place de l’agriculture dans l’économie ivoirienne et les différences
observables au niveau des systèmes de production agricole, nous désagrégeons le secteur agricole en
six branches qui sont l’agriculture vivrière, l’agriculture industrielle et d’exportation, l’élevage et
chasse, sylviculture et exploitation forestière, pêche et pisciculture et les activités annexes à
l’agriculture.

5.2 Les principaux éléments de dynamisation du modèle.

Dans les modèles dynamiques séquentiels, les principaux éléments utilisés pour rendre compte de la
dynamique des systèmes sont généralement l’accumulation du capital, la croissance de la force de
travail et la productivité totale des facteurs (El – Saïd, Löfgren et Robinson, 2002). Cependant, la
plupart des modèles dynamiques de ce genre se limitent aux deux premiers éléments. Notre approche
se situe dans cette approche, suivant en cela les travaux de Decreux (1999), Bchir, Decreux, Guérin

14
et Jean (2002). Nous supposons que le stock de capital de chaque période est défini par le stock de la
période précédente déduction faite de la dépression (à un taux constant) et augmenté de
l’investissement de la période précédente. La force de travail croît à un taux constant. A chaque
période, les facteurs mobile s’ajustent instantanément.

5.3 Analyse de la distribution et du bien être

Dans ce travail pour mesurer le bien-être social, qui est une fonction des niveaux de vie des individus
de la population, on utilisera comme indicateur la variation équivalente (VE) de revenu, (voir Varian
1992, Decaluwé et al. (2001). La distribution du revenu s’effectuera à l’aide de l’indice d’inégalité de
Gini.

6. Scénarios de politique et hypothèses de simulation

Dans les approches proposées pour la réduction des droits de douanes, généralement trois modes de
calcul sont expérimenté (Mamaty, 2002). Il s’agit d’une réduction linaire selon le cycle de l’Uruguay,
d’une réduction linéaire uniforme et l’approche selon la formule suisse ou formule d’harmonisation.
La première option impose une réduction différenciée des droits de douane : 36% pour les pays
développés et 24% pour les pays en développement. La deuxième implique une réduction 50% dans
tous les pays. Quant à la dernière, elle dépend du niveau initial des droits de douane et d’un
coefficient d’ajustement à négocier entre pays membres6. Pour un taux maximal de 38,95% appliqué
aux importations et un coefficient a égal à 100, la réduction devrait être d’environ 28% pour la Côte
d’Ivoire et pour tous les produits importés. Par ailleurs, il ressort de certaines études que les
politiques de soutien des pays développés à la production et aux exportations ont conduit à une
baisse d’environ 50% du prix de la viande de bœuf dans les pays d’Afrique de l’ouest.
Partant de ces constats, on se propose de simuler :
(i) une élimination unilatérale de taxes à l’importation de tous les biens ;
(ii) une réduction unilatérale des taxes à l’importation de tous les biens de 24% puis de 50% ;

6
La formule d’harmonisation se présente comme suit (Mamaty, 2002) : T1 = aT0 , avec T1 le nouveau taux ; T0 le
a +T0
tarif initial et a le coefficient à négocier. Plus a est grand, plus sera élevée la réduction des droits de douanes.

15
(iii) une élimination des droits de douanes sur les importations alimentaires de 50% et une
hausse du prix international des biens alimentaires de 50% suite à l’élimination des
politiques de soutien à l’exportation des pays développés ;
(iv) une suppression des taxes à l’exportation des produits agricoles et l’instauration d’une
taxe compensatoire de 20% sur tous les produits vendus sur le marché domestique.

7. Description de la structure de l’économie

L’économie est décrite à partir d’une Matrice de compatibilité sociale comportant 38 branches de
production, neuf catégories de ménages et quatre facteurs de production qui sont le travail qualifié, le
travail non qualifié, le capital et la terre.

7.1 Les activités et les facteurs de production

Le tableau 3 indique la contribution moyenne des facteurs production dans la formation de la valeur
ajoutée des branches agricoles, industrielles et des services. Dans les branches de production agricole,
le travail participe pour près de la moitié (45,84%) à la formation de la valeur ajoutée contre 32,15%
et 22,01% pour le capital et la terre respectivement. La part relativement faible de la terre dans la VA
agricole pourrait s’expliquer par le fait que seules branches de la production végétale utilisent ce
facteur. Dans les branches industrielles, le capital joue un rôle prépondérant dans la formation de la
valeur ajoutée. Il compte, en moyenne, pour 58,49% dans la formation de celle-ci contre 20,45% et
21,07% pour le travail non qualifié et le travail qualifié respective. Au niveau des branches des
services, on observe une contribution quasi identique du capital (52,86%) et du travail (49,12%, soit
18,36% pour le travail non qualifié et 28,76% pour le travail qualifié).

Tableau 3 : Contribution moyenne des différents facteurs à la formation de la Valeur Ajoutés des
branches

Travail non qualifié Travail qualifié Capital Terre Total


Branches agricoles 35,16 10,68 32,15 22,01 100
Branches industrielles 20,45 21,07 58,49 100
Branches des services 18,38 28,76 52,86 100
Source : MCS

16
Lorsqu’on pousse l’analyse à un niveau plus désagrégé, la situation change suivant les branches. Par
exemple, dans la branche du commerce de gros et de détail, c’est le travail qui participe le plus à la
formation de la valeur ajoutée avec une légère prédominance du travail non qualifié. Par contre, dans
le secteur des autres services marchands, le capital contribue à plus de 50% à la formation de la
valeur ajoutée (Tableau 5).

17
Tableau 4 : Contribution des branches à la formation de la valeur ajoutée totale et leur part dans les
consommations intermédiaires et les salaires

Valeur ajoutée Consommations Salaires


intermédiaires
Branches agricoles 28,12 10,72 19,14
Branches industrielles 31,14 56,75 31,41
Branches des services 40,74 32,53 49,45
Source : MCS

Les branches des services comptent pour 40,74% dans la valeur ajoutée totale contre 31,14% et
28,12% pour les branches industrielles et agricoles respectivement. Concernant les consommations
intermédiaires, les branches industrielles sont les plus grandes utilisatrices de biens intermédiaires
(56,75%) suivi des services (32,53%) et des branches agricoles (10,72%).

18
Tableau 5 : Contribution des différents facteurs de production dans la formation de la valeur
ajoutée des branches.

Travail non Travail Capital Terre Total


qual. qual.
Agriculture vivrière 15,90 8,87 6,85 68,38 100
Agriculture industrielle ou d'exportation 14,06 4,53 17,71 63,70 100
Elevage et chasse 78,39 20,56 1,05 - 100
Activités annexes à la culture et à l'élevage 26,86 18,94 54,20 - 100
Sylviculture, exploitation forestière 37,23 8,11 54,66 - 100
Pêche et pisciculture 38,49 3,06 58,45 - 100
Industries extractives 15,23 19,22 65,55 - 100
Production de viande et poisson 54,28 14,12 31,60 - 100
Travail des grains et fabrication de produits 24,70 17,59 57,71 - 100
Transformation du cacao et du café 23,20 22,51 54,29 - 100
Industrie des oléagineux 29,53 30,96 39,50 - 100
Boulangerie, pâtisserie et pâtes alimentaires 19,34 8,15 72,51 - 100
Industrie laitière, industrie des fruits et l 19,62 18,48 61,90 - 100
Industrie des boissons 15,48 27,89 56,63 - 100
Industrie du tabac 7,44 35,56 57,00 - 100
Industrie textile et de l'habillement 26,65 13,93 59,41 - 100
Industrie du cuir et de la chaussure 25,67 14,14 60,18 - 100
Travail du bois et fabrication d'articles en 27,65 17,56 54,79 - 100
Industrie du papier et du carton, imprimer 12,84 14,06 73,10 - 100
Raffinage et cokéfaction - 44,99 55,01 - 100
Industrie chimique - 43,53 56,47 - 100
Industrie du caoutchouc et des plastiques 15,95 25,84 58,20 - 100
Fabrication d'autres produits minéraux non métaux 9,76 16,38 73,86 - 100
Produits métalliques de base 21,65 9,20 69,15 - 100
Fabrication de machines, d'équipements et d'a 30,86 13,17 55,97 - 100
Fabrication d'équipements et appareils audio- 31,06 13,17 55,78 - 100
Fabrication de matériel de transport 31,52 10,25 58,23 - 100
Fabrication de meuble, industries diverses 10,35 17,02 72,63 - 100
Production et distribution d'électricité et de gaz 3,18 41,98 54,83 - 100
Construction 34,73 15,94 49,33 - 100
Commerce de gros et de détail 33,02 29,19 37,78 - 100
Réparations 40,49 10,88 48,63 - 100
Hôtels et restaurants 11,80 30,82 57,38 - 100
Transports et communications 35,32 10,60 54,08 - 100
Postes et télécommunications - 27,45 72,55 - 100
Activités immobilières 3,52 39,78 56,70 - 100
Autres services marchands 22,94 31,88 45,18 - 100
Services non marchands - 49,44 50,56 - 100
Ensemble de l’économie 18,96 23,02 41,61 16,42 100
Source : MCS

19
7.2 Sources et utilisation des revenus des ménages

Les employés du public et ceux du privé (formel et informel) tirent l’essentiel de leurs revenus de la
rémunération du travail qualifié et du capital. La rémunération du travail non qualifié ne constitue
que 2,18% du revenu des employés du secteur public et 15,73% dans celui des employés du secteur
privé. Ces deux catégories de ménage ne perçoivent aucun revenu du facteur terre et les parts de
leurs revenus provenant des entreprises et du gouvernement restent faibles. Enfin, les transferts
reçus du reste du monde sont marginaux dans la composition de leurs revenus.

Tableau 5 : Source des revenus des ménages selon la catégorie socioprofessionnelle


Sources de revenu
Travail
non Travail Reste du
Ménages qualifié qualifié Capital Terre Entreprise Gouvernement monde Total
Agriculteurs café/cacao 14,35 1,12 30,77 51,50 1,04 0,84 0,40 100
Agriculteurs autres produits de rente 26,19 0,88 29,62 41,51 0,82 0,67 0,32 100
Agriculteurs producteurs de féculent 4,79 1,02 31,17 61,92 0,50 0,40 0,19 100
Agriculteurs autres produits vivriers 4,97 1,06 63,86 28,98 0,52 0,42 0,20 100
Employés du public 2,18 61,47 28,77 - 3,21 4,26 0,11 100
Employés du privé (formel & informel) 15,73 49,02 28,39 - 2,92 3,85 0,10 100
Indépendants (formel & informel) 35,50 30,60 28,86 - - 4,90 0,13 100
Travailleurs agricoles 92,28 7,19 - - - 0,36 0,17 100
Inactifs & chômeurs - - - - - 99,91 0,09 100
Ensemble des ménages 18,81 22,83 25,93 16,29 1,25 14,71 0,18 100
Source : MCS

Les ménages travaillant à leur propre compte – que ce soit dans le secteur formel ou dans l’informel
– tirent l’essentiel de leur revenu de la rémunération du facteur travail et du capital. On note
cependant que c’est le travail non qualifié qui contribue le plus à la composition des revenus de ces
ménages. Les ménages indépendants ne perçoivent pas de dividendes versés par les entreprises de
même qu’ils ne perçoivent pas de rémunération de la terre. Les transferts du gouvernement à ces
ménages restent faibles et les revenus reçus du reste du monde sont marginaux.

La catégorie de ménage des travailleurs agricoles gagne quasiment la totalité de leur revenu de la
rémunération du facteur travail (plus de 99%) et plus précisément du travail non qualifié (92,28%).
Une autre source de revenu pour ces ménages est constituée des transferts du gouvernement et du
reste du monde ; mais ceci reste relativement faible.

20
Tableau 6 : Utilisation des revenus des ménages
Transfert au
Consommation RDM Impôt Epargne Total
Agriculteurs café/cacao 74,02 8,01 5,57 12,39 100
Agriculteurs autres produits de rente 71,80 8,45 4,58 15,18 100
Agriculteurs producteurs de féculent 72,88 8,40 4,33 14,39 100
Agriculteurs autres produits vivriers 67,52 9,14 4,04 19,31 100
Employés du public 76,34 6,08 4,06 13,52 100
Employés du privé (formel & informel) 82,75 7,06 4,21 5,97 100
Indépendants (formel & informel) 61,74 11,04 4,37 22,84 100
Travailleurs agricoles 72,87 8,48 3,76 14,90 100
Inactifs & chômeurs 86,31 6,98 2,79 3,93 100
Ensemble des ménages 75,15 8,12 4,31 12,41 100
Source : MCS

Tous les ménages consacrent plus de la moitié de leurs revenus aux dépenses de consommation
(entre 61,74% et 86,31%). La part des revenus transférés au reste du monde par les agriculteurs
café/cacao, les agriculteurs des autres produits de rente et les agriculteurs producteurs de féculents
est presque identique et se situe autour de 8% du total du revenu de ces ménages. Les producteurs de
vivriers ont le plus grand taux de transfert au reste du monde parmi les ménages agricoles (9,14%).
De même les indépendants ont le plus fort taux de transfert parmi les ménages agricoles. Le taux
d’épargne varie entre 3,93% pour les ménages inactifs et les chômeurs et 22,84% pour les
indépendants. Dans l’ensemble, excepté les employés du privé, les inactifs et les chômeurs, le taux
d’épargne est supérieur à 10% pour tous les ménages.

En moyenne, les ménages ivoiriens consacrent plus des trois quarts de leur revenu aux dépenses de
consommation (75,15%) et épargne 12,41% de celui-ci. Une part relativement faible est affecté aux
transferts au reste du monde (8,12%) et au paiement d’impôt sur le revenu (4,31%).

7.3 Le commerce extérieur

Dans l’ensemble, les biens industriels constituent 55,33% des importations contre 35,21% pour les
services et 9,46% pour les biens agricoles. Individuellement, les biens des industries chimiques, de
l’industrie extractive, de l’industrie de la fabrication de machine et d’équipement et des autres services
marchands contribuent le plus aux importations. Ils comptent pour 9,70%, 8,47%, 8,12%, 22,12%
respectivement.

21
Les exportations sont composées en grande partie de produits agricoles. La branche de l’agriculture
industrielle ou d’exportation contribue, à elle seule, à hauteur de 37,19% aux exportations totales
contre 10,03% pour l’industrie du papier.

22
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