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INTÉGRATION RÉGIONALE

Master 2 Economie du Développement


Année académique 2023-2024
Université Félix Houphouët-Boigny (UFHB)/
UFR Sciences Economiques et Gestion (UFR-SEG)
Pr. Koné Salif

1
CEDEAO : UN BILAN DU PROCESSUS
D’INTEGRATION REGIONALE EN AFRIQUE DE
L’OUEST

2
Introduction
C’est quoi l’intégration régionale ?

De nombreuses définitions de l’intégration économique existent. Mais, je retiens la suivante :

L’intégration économique apparaît comme un processus aux dimensions et formes


multiples et, son produit en vue de la transformation d’économies nationales en une zone
économique régionale plus ou moins unifiée.

L’intégration régionale suit-elle des étapes ? Si oui lesquelles ?

Au-delà des nombreuses ambiguïtés sur la notion d’intégration régionale et des oppositions
d’écoles, elle est déclinée en cinq principales formes ou étapes depuis Balassa (1961) : la zone
de libre-échange, l’union douanière, le marché commun, l’union économique et, l’union
économique et monétaire.

La zone de libre-échange renvoie à une situation dans laquelle des pays s’entendent pour
supprimer les entraves douanières et non douanières sur leurs échanges mutuels mais chacun
d’eux garde la liberté de sa politique commerciale vis-à-vis du reste du monde.

L’union douanière désigne la situation dans laquelle non seulement des pays s’entendent pour
supprimer les entraves douanières et non douanières sur leurs échanges mutuels mais aussi
s’entendent pour adopter des tarifs extérieurs communs et des politiques commerciales
communes vis-à-vis du reste du monde.

Le marché commun désigne la situation dans laquelle, les biens et services circulent librement
entre des pays partenaires ayant des politiques communes, des tarifs extérieurs communs vis-
à-vis du reste du monde et qui libéralisent la circulation de leurs facteurs de production (capital
et travail).

L’union économique ou union économique et sociale renvoie à la situation dans laquelle des
pays décident : a) de la libre circulation des biens et des services ; b) de la libre circulation des
facteurs de production ; c) de la mise en place de politiques commerciales communes et de tarifs
extérieurs communs vis-à-vis du reste du monde ; d) de la mise en place de politiques
harmonisées ou communes ; et e) de la coordination de leurs politiques macro-économique
notamment de leurs politiques budgétaires.

Enfin, l’union économique et monétaire aboutit à la mise en place de politiques communes


monétaires et financières et également à la création d’une monnaie unique. À ce stade, les
différents marchés des pays partenaires sont intégrés, qu’il s’agisse de leurs marchés des biens
et services, de leurs marchés du travail ou de leurs marchés des capitaux.

3
Mais dans l’optique fonctionnaliste1, l’étape finale naturelle de toute intégration économique
régionale est l’intégration totale par la mise en place d’une fédération d’Etats ou une
confédération d’Etats.

Quel est le point de départ et les références des réflexions modernes des économistes sur
les processus d’intégration régionale ?

Lorsque l’on parle d’intégration économique régionale, le premier nom à venir en tête d’un
économiste est celui de Jacob Viner (1950), d’autres noms suivent Meade (1956), Corden
(1972), Krugman (1991), Venables (1987), Venables (1999 et 2000) etc. Mises ensemble, les
conditions imposées par ces auteurs à la réussite de toute construction économique régionale
par processus d’intégration relèvent des principes du libre-échange et de la libre-entreprise. En
particulier, les conditions pour que les pays membres tirent profit des IER peuvent être
regroupées en trois principes généraux.

➢ Premièrement, il s’agit des mesures nécessaires à la prévisibilité et l’automaticité des


activités économiques. Cela passe par la mise en place d’un cadre institutionnel et
juridique crédibles et cohérents pouvant défendre le libre-échange et qui est favorable à
la libre-entreprise.

➢ Deuxièmement, il s’agit de rendre fluide la circulation des biens et services dans entre
les pays concernés. Cela passe par la mise en place de mesures de libéralisation du
commerce (libre circulation des biens, des services et des facteurs de production).

➢ Troisièmement, il s’agit de garantir la liberté d’entreprendre au sens économique.


Cela passe par la mise en place de mesures nécessaires à la création d’un environnement
concurrentiel (mise en place de politiques communes et/ou harmonisée et
éventuellement d’une monnaie unique).
Dit autrement, lorsque l’on fait la somme des analyses économiques concernant les processus
d’intégration économique régionale, les conditions de succès (réussite) de ceux-ci se résume en
la mise en place d’un cadre institutionnel régional qui permette la prévisibilité et l’automaticité
de tout changement qui le concerne, d’assurer la fluidité dans la circulation des biens et services
et de garantir la liberté d’entreprendre pour quiconque et n’importe où sur les espaces
économiques considérés.
Nous proposons en conséquence un bilan du processus d’intégration régionale au sein de la
CEDEAO qui tient compte de ces trois principes essentiels.
Toutefois lorsqu’on parle de bilan, il y a certes les efforts que nous allons évaluer selon les trois
axes définis ci-dessus, mais le bilan se rapporte également à la question des résultats. Les gains
attendus d’un processus d’intégration économique régionale sont nombreux et divers. En effet,

1
En relations internationale le fonctionnalisme est un courant de pensée qui considère que ce sont les nécessités
techniques et non politiques qui favorisent la coopération au sein d'une société complexe. Il en découle la
nécessité de création d'institutions internationales ou supranationales appropriées pour résoudre les problèmes
qui dépassent les frontières ou les capacités d'un Etat.

4
ceux-ci peuvent être économiques, sociaux, culturels, politiques voire diplomatiques.
Toutefois, dans cette présentation, nous allons nous intéresser surtout aux gains économiques
attendus des efforts de construction régionale dans le cadre de la CEDEAO.
Notre bilan du processus d’intégration régional au sein de la CEDEAO se fera en deux temps
présentés en deux grandes parties.
Dans un premier temps (la première partie), nous présenterons le bilan de l’intégration régionale
en termes de mise en place d’un cadre institutionnel et juridique cohérent et pertinent ainsi que
quelques réalisations faites dans ce cadre.
Dans un second temps (la seconde partie), nous présenterons le bilan de l’intégration régional
en termes de résultats sur les caractéristiques structurelles des économies des pays d’Afrique
de l’Ouest.

5
Ière Partie : la CEDEAO, des efforts importants de
construction d’un cadre institutionnel cohérent et
pertinent

La CEDEAO est devenue officiellement une union douanière en 2013 avec l’adoption d’un
TEC. Toutefois, dans la pratique, elle est encore une zone de libre-échange incomplète et non
consolidée. Cependant, elle fait des avancées pertinentes dans certains secteurs tout en ayant
des résultats globaux décevants.

6
Chapitre 1 : Les infrastructures institutionnelles régionales relatives à
l’aspect commercial de l’intégration régionale
Avant tout propos commençons par faire un petit rappel sur l’histoire et les objectifs de la
CEDEAO.

I. Rappel historique : les initiatives d’intégration régionale au sein


de la CEDEAO
L’Afrique de l’Ouest comprend seize (16) États : le Burkina Faso, le Bénin, le Cap-Vert, la
Côte d’Ivoire, la Gambie, le Ghana, la Guinée-Bissau, la Guinée, le Liberia, le Mali, la
Mauritanie, le Niger, le Nigeria, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo.
En Afrique de l’Ouest, les initiatives d’intégration régionale ont commencé très tôt après les
indépendances avec la création de l’UDAO2en 1962 dont l’objectif était la mise en place d’une
zone de libre-échange entre les pays Francophones d’Afrique de l’Ouest. Celle-ci a été
remplacée en 1966 par l’UDEAO3 dont l’objectif était l’établissement d’une union douanière.
Certaines des initiatives d’intégration régionale dans cette région date d’avant les
indépendances comme le Conseil de l’Entente créé en 19594. Ainsi, les expériences d’IR dans
cette région ont été foisonnantes mais pour les besoins de ce travail nous n’en retiendrons que
la CEDEAO. Deux principales périodes se distinguent dans l’évolution historique de la
CEDEAO.

A-La Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest


(CEDEAO)5 avant 1990
Le traité créant la CEDEAO a été signé à Lagos (Nigeria) le 28 mai 1975 entre quinze (15)
États de l’Afrique de l’Ouest : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée,
Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone et Togo. Ces
pays seront rejoints quelques temps après par le Cap vert (1976). La Mauritanie s’est retirée de
la CEDEAO en 2000.
Afin d’améliorer le niveau de vie de ses populations, d’accroître et de maintenir la stabilité
économique, de renforcer les relations entre ses États membres et de contribuer au progrès et
au développement du continent africain, le but de la CEDEAO était de promouvoir la
coopération et le développement dans tous les domaines de l’activité économique, en particulier
dans les domaines de l’industrie, des transports et télécommunications, de l’énergie, de
l’agriculture, des ressources naturelles, du commerce, des affaires monétaires et financières et,
des affaires sociales et culturelles. Pour atteindre ce but, l’objectif des pays de l’Afrique de
l’Ouest était de faire de la CEDEAO un marché commun dans un délai maximum de quinze
(15) ans à partir de 1975.

2
Union douanière de l’Afrique de l’Ouest
3
Union Douanière des États de l’Afrique de l’Ouest créée en 1966 remplace l’UDAO.
4
Les pays fondateurs sont le Dahomey (actuel Bénin), la Haute-Volta (actuel Burkina Faso), la Côte d'Ivoire et le
Niger. Ils ont été rejoints par le Togo en 1966.
5
Le traité sur lequel nous nous appuyons dans ce travail est celui reproduit par Belaouane-Gherari et Habib (1988).
7
Face aux lenteurs dans l’application de ses dispositions et aux énormes difficultés dans son
fonctionnement, les États membres ont engagés des négociations dans les années 80 afin de
relancer la CEDEAO et surtout d’accélérer le processus d’intégration régionale. Par ailleurs, la
CEDEAO ne pouvait pas être qualifiée de succès au début des années 1990 malgré son
implication positive dans la résolution de différents conflits dans la région. Par exemple, le
programme de libéralisation a été remanié et son entrée en vigueur différée à plusieurs reprises.
Le principe de la libre circulation et installation des personnes a été violé à plusieurs reprises
par divers pays membres. En outre, les parts des échanges intra-CEDEAO dans le total des
échanges de ses États membres sont restées très faibles. En effet, les parts des exportations
intra-CEDEAO dans les exportations totales de ses membres sont passées de 2,9% en 1970 à
seulement 5,7% en 1990. Par ailleurs, aucun TEC n’est adopté. Bref, en 1990, la CEDEAO est
loin de l’objectif d’union douanière et de marché commun visé.

B-La CEDEAO à partir de 1990


Version révisée du traité de 1975, le nouveau traité de la CEDEAO a été signé à Cotonou
(Bénin) le 24 juillet 1993. Celui-ci modifie considérablement les orientations et l’approche des
pays d’Afrique de l’Ouest. Notamment, il modifie l’ancien traité en ce qui concerne les objectifs
de l’intégration, les structures organiques et institutionnelles (nombre et compétences) de la
communauté économique, les moyens à mettre en œuvre pour réaliser les objectifs et atteindre
les buts, et les champs couverts.
Les buts de la nouvelle CEDEAO est de promouvoir la coopération et l’intégration, conduisant
à l’établissement d’une union économique en Afrique de l’Ouest afin de : améliorer le niveau
de vie de ses populations, Maintenir et améliorer la stabilité économique, renforcer les relations
entre ses États membres et, contribuer au progrès ainsi qu’au développement du continent
africain.
La progression de la CEDEAO, pour l’intégration de ses membres, est fulgurante depuis la
révision de son traité en 1993. Elle est passée d’une vision presque purement bureaucratique à
une vision pragmatique. Elle a adoptée récemment un TEC parachevant ainsi la mise place
d’une union douanière entre ses membres. Par ailleurs, elle a mis en place des politiques
communes dans divers secteurs.

II. Objectifs et buts de la CEDEAO selon le traité révisé de 1993


Aux termes du premier paragraphe de l’article 3, du traité révisé, le but de la CEDEAO est : la
promotion de la coopération et de l’intégration dans la perspective d’améliorer le niveau de vie
de ses populations ; de maintenir et d’accroître la stabilité économique, de renforcer les
relations entre ses États membres et, de contribuer au progrès et au développement du continent
africain.
Pour la réalisation de ce but, la CEDEAO s’est donné pas moins de quatorze objectifs :
• l’harmonisation et la coordination des politiques nationales ainsi que la promotion de
l’intégration des programmes, des projets et des activités dans les domaines de :
l’alimentation, de l’agriculture, des ressources naturelles, de l’industrie, des transports
et des communications, de l’énergie, du commerce, de la monnaie, des finances, de la
fiscalité, des réformes économiques, des ressources humaines, de l’éducation, de
8
l’information, de la culture, des sciences, de la technologie, des services, de la santé, du
tourisme, et des affaires juridiques,

• l’harmonisation et la coordination des politiques pour la protection de l’environnement,

• la promotion de la création d’entreprises de production conjointe,

• l’établissement d’un marché commun,

• l’établissement d’une union économique par l’adoption de politiques communes dans


les secteurs économiques, financiers, sociaux et culturels, par la création d’une union
monétaire,

• la promotion des joint-ventures par les entreprises et autres opérateurs du secteur privé,
particulièrement à travers l’adoption d’un accord régional sur les investissements
transfrontaliers,

• l’adoption de mesures pour l’intégration du secteur privé, principalement par la création


d’un environnement favorable pour promouvoir les petites et moyennes entreprises

• la création d’un environnement légal favorable à l’environnement

• l’harmonisation des codes nationaux de l’investissement devant aboutir à l’adoption


d’un unique code de l’investissement au niveau de la communauté

• l’harmonisation des normes et des mesures nationales

• la promotion d’un développement équilibré de la région, tenant compte des problèmes


spécifiques de chaque État membre, en particulier des pays membres enclavés,

• l’encouragement et le renforcement des relations, et la promotion de la diffusion de


l’information particulièrement entre : les populations rurales, les femmes, les
organisations de jeunes et les organisations socio-professionnelles comme les médias,
les hommes et les femmes d’affaires, les travailleurs et les unions commerciales,

• l’adoption d’une politique démographique commune prenant en compte le nécessaire


équilibre entre les facteurs démographiques et les facteurs socio-économiques de
développement, et

• la création d’un Fonds de Coopération, de Compensation et de Développement.

Ces objectifs peuvent être regroupés en cinq éléments principaux : 1) la libéralisation du


commerce (libre circulation des biens, des services et des facteurs de production), 2) la mise en
place de politiques communes, 3) la création d’un environnement favorable (des institutions et
des lois efficaces, justes et équitables) au développement des activités économiques, 4)
l’unification des politiques sociales et, 5) l’instauration d’une monnaie unique entre ses Etats
membres. En somme, ces objectifs consistent en la mise en place : d’une zone de libre-échange,
d’une union douanière, d’un marché commun, d’une union économique et social et, d’une union
9
économique et monétaire. Ils sont assortis d’un mode opératoire définissant les délais maximum
nécessaires à l’atteinte de chaque objectif, à compter de 1990 : 4 ans pour la ZLE, 10 ans pour
l’UD, 15 ans pour le marché commun, 20 ans pour une union économique et social et, une union
économique et monétaire.
L’évaluation des efforts de la CEDEAO se fera donc à partir de l’analyse des efforts accomplis
dans ce double engagement objectif et délai.

III. Les efforts de la CEDEAO en matière de cadre organisationnel


et juridique
Le cadre juridique et institutionnel, sous les coups des évènements et des difficultés de
l’intégration régionale, a beaucoup évolué. La présentation de cette évolution instruit certes de
la volonté politique des Etats membres à s’intégrer, mais nous nous limiterons à la dernière
mouture des textes.

A. Cadre organisationnel de la CEDEAO


Le cadre organisationnel de la CEDEAO a été modifié en 2006 avec prise d’effet au 1er janvier
2007. Initialement, le Traité révisé de la CEDEAO, pour assurer la mise en œuvre de ses
dispositions et conduire le processus d’intégration, la CEDEAO devrait être dotée d’une
structure organisationnelle comprenant : l’Autorité des chefs d’État et de Gouvernement, le
Conseil des ministres, le Parlement de la Communauté, le Conseil Économique et Social, la
Cour de justice de la Communauté, le Tribunal d’arbitrage, le Secrétariat exécutif, le Fonds de
Coopération, de Compensation et de Développement, et les Commissions techniques.
Aujourd’hui, le cadre institutionnel de la CEDEAO se présente comme suit : la Conférence des
Chefs d’Etat et de Gouvernement, le Conseil des Ministres (Ministre en charge de l’Intégration
et Ministre en charge des Finances), la Commission (Exécutif de 9 membres dont un Président,
un Vice-Président et 7 Commissaires Techniques), la Cour de Justice, le Parlement et le Conseil
Economique et Social.
La Conférence des chefs d’État et de Gouvernement, composée des chefs d’État et de
Gouvernement des pays membres est l’organe suprême de la CEDEAO. À ce titre, elle est
responsable de l’orientation, de la politique générale de la communauté et de son contrôle. De
même, elle prend toutes mesures pour assurer le développement progressif et la réalisation des
objectifs de la communauté.
Le Conseil des Ministres, composé des ministres en charge des affaires communautaires de
chaque État membre et de tout autre ministre invité, a la responsabilité du fonctionnement et du
développement de la Communauté. Il se réunit, ordinairement, deux fois par an, prend ses
décisions à l’unanimité ou à la majorité des deux tiers selon les sujets.
La Commission, est composé de 9 membres dont un Président, d’un Vice-Président et de sept
commissaires. Elle est chargée de l’exécution des décisions de la Conférence des chefs d’État
et de Gouvernement, de l’exécution des règlements et des directives du Conseil des ministres.
Celle-ci vient d’évoluer à quinze membres avec des postes de commissaires permanents. Le
poste de commissaire permanent que la Côte d’ivoire a obtenu est celui en charge « de
l’Industrie et de la Promotion du secteur Privé ».

10
Le Conseil économique et social, composé des représentants des diverses catégories des
activités socio-économiques, a un rôle de conseiller.
La Cour de Justice de la CEDEAO, composé de 7 membres dont deux ne peuvent être
originaires d’un même pays, elle a un avis consultatif en matière d’interprétation des règles
communautaire et sa décision en matière de différend est sans recours.
A ce jour, toutes ces institutions ont été mises en place à l’exception du Conseil économique et
social qui n’est pas encore installé. Par ailleurs, de nombreuses institutions ont été mises en
place au niveau sectoriel en tant qu’institutions spécialisées : la Banque d’Investissement et de
développement de la CEDEAO (BIDC), , l’Agence Monétaire de l’Afrique de l’Ouest
(AMAO), le Groupe Intergouvernemental d’Action contre le Blanchissement de l’Argent
(GIABA), le Centre de la CEDEAO pour le Développement du Genre (CCDG), le Centre de
développement de la Jeunesse et des Sports (CDJS), le Système d’Echange d’Energie
Electrique de l’Afrique de l’Ouest (WAPP), l’Unité de Coordination des Ressources en Eau
(UCRE), le Centre Régional pour les Energies Renouvelables et l’Efficacité Energétique
(ECREEE).

B. Cadre juridique de la CEDEAO


Le cadre juridique de la CEDEAO a évolué depuis l’entrée en vigueur du Traité révisé en
1994. En effet initialement, les textes juridiques de la CEDEAO se composaient : du Traité
révisé (droit primaire) et des textes dérivés que sont les Protocoles, les décisions, les
Résolutions, les Recommandations et/ou les avis. Avec la transformation du secrétariat Général
en Commission ainsi que les restructurations qui en ont découlées, les protocoles ont été
remplacés par les Actes additionnels. Le cadre juridique de la CEDEAO est constitué
aujourd’hui : du Traité révisé, des conventions, des Actes Additionnels, des Règlements, des
Décisions, des Directives, des Recommandations et des avis.
La Conférence adopte des Actes additionnels en complément au Traité. Ces Actes
communautaires ont force obligatoire dans les Etats membres et dans les institutions de la
Communauté. En particulier, annexé au Traité, ils le complètent sans le modifier, leur respect
s’impose aux organes de l’union et aux autorités des Etats membres.
Le Conseil des Ministres édicte les Règlements et Directives et formule les Décisions et
Recommandations. Les Règlements sont d’application générale et leurs dispositions sont
directement exécutoires et applicables dans les Etats membres. Elles sont exécutoires dans les
institutions de la Communauté après approbation de la conférence.
Les Décisions sont exécutoires dans les Etats membres et s’imposent à toutes les parties
concernées. En particulier, elles sont exécutoires de plein droit 60 jours après la date de leur
publication dans le JO communautaire.
Les Directives et leurs objectifs ont force obligatoire dans tous les Etats membres. Les
modalités de réalisation de ces objectifs sont laissées à la discrétion des Etats membres.
La Commission adopte les Règles relatives à la mise en œuvre des Actes promulgués par le
Conseil. Ces Règles ont la même valeur juridique que les actes promulgués par le Conseil. La
Commission formule les recommandations et prodigue des conseils. Ces conseils et
recommandations ne sont pas exécutoires.
11
Sous ce nouveau régime juridique, le principe de supranationalité devient prépondérant et
l’accent sera mis de moins en moins sur l’adoption des Conventions et Protocoles.
En résumé, avec la transformation de son Secrétariat Général en Commission, la CEDEAO
s’est donné les moyens pour une application directe de ses textes dans ses Etats membres ; la
suprématie de ses textes. En effet, cette transformation s’est accompagnée de la requalification
de la Cours de Justice et de la nature des textes des actes de la Conférence des Chefs d’Etat :
les protocoles additionnels remplacent les actes additionnels. La principale différence est que
la mise en œuvre des protocoles nécessite leur ratification par les pays (3/4 des Etats membres
au moins) ce que n’exigent pas les actes additionnels. Cette transformation montre la volonté
de la CEDEAO de se doter de textes dont l’application soit automatique.

IV. Politique de libéralisation commerciale


Les efforts de libéralisation commerciale au sein de la CEDEAO vont être appréciés à travers
trois outils principaux : la règle d’origine, le TEC et la libre circulation des facteurs de
production (travail et capital). En fait, ces trois dimensions sont regroupées dans ce qui est
communément appelé le Schéma de Libéralisation des Echanges de la CEDEAO ou (ETLS de
son sigle anglais).

A. Les règles d’origine de la CEDEAO


La mise en place d’une Zone de Libre-échange au sein de la CEDEAO n’a jamais été effective
jusqu’à l’adoption du TEC en 2013. En effet, de 1976 à 2004, les règles d’origine adoptée par
la CEDEAO ont non seulement concerné un nombre limité de produits mais également un
nombre limité de ses membres. Elle a commencé depuis 1979 où un dispositif de désarmement
tarifaire pour les produits du cru, de l’artisanat traditionnel et les produits entièrement
transformés sur place a été adopté. Une période de dix ans avait été alors fixée pour procéder à
la suppression des droits et taxes sur les échanges intra-communautaires. Après une période de
léthargie, les instances de la CEDEAO ont décidé d’accélérer la mise en place de la ZLE qui,
dans les textes, devrait être effective depuis le 1er janvier 2000. En janvier 2003, le Sommet de
la CEDEAO a adopté un nouveau schéma de libéralisation des échanges. Les Etats ont été
invités à appliquer pleinement les dispositions du nouveau schéma, afin que la zone de libre-
échange soit consolidée en 2004. En outre, la ZLE n’a été opérationnelle entre 2004 et 2012
que pour huit des quinze pays membres de la CEDEAO : le Bénin, le Burkina Faso, la Guinée,
le Togo, le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Nigeria. Mais dans la pratique, Seuls le
Bénin, la Côte d’ivoire, le Ghana et le Togo appliquaient effectivement le schéma de
libéralisation. Le Mali et le Niger ne l’avaient pas encore fait et la Guinée l’avait interrompu.
Ces règles sont consignées dans les principaux textes suivants : Protocole Additionnel
A/SP1/5/79 portant amendement du texte français du Protocole relatif à la définition de produits
originaires des Etats membres (Article 1) signé à Dakar, le 29 mai 1979, Protocole Additionnel
A/SP2/5/79 portant amendement du Protocole relatif à la définition de la notion de produits
originaires des Etats membres (Art. 2) signé à Dakar le 29 mai 1979, Protocole Additionnel
A/SP3/5/80 portant modification de l’Article 8 du Texte Français du Protocole relatif à la
définition de la notion de produits originaires des Etats membres (régime applicable aux
mélanges) signé à Lomé le 28 mai 1980, Protocole Additionnel A/SP1/5/81 portant
modification de l’Article 2 du Protocole relatif à la définition de la notion de produits originaires
des Etats membres (produits de l’artisanat traditionnel), signé à Freetown le 19 mai 1981,
12
Convention A/P1/7/85 relative à l’importation temporaire dans les Etats membres des véhicules
de transport de personnes signée à Lomé le 6 juillet 1985, Protocole A/P1/7/96 relatif aux
Conditions d’Application du Prélèvement Communautaire. Enfin, en matière de règle d’origine
et de facilitation du commerce, une convention d’Assistance mutuelle en matière de douane a
été signée dès 1982 (la Convention A/P5/5/82 d’Assistance mutuelle Administrative en matière
de douane). Toutefois, la zone de libre-échange n’est pas encore effective au sein de la
CEDEAO comme le prouve le communiqué final de la quarante troisième session ordinaire de
la conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO tenue à Abuja (Nigeria) les
17 et 18 juillet 2013.
Les nouvelles règles d’origine de la CEDEAO, qui sont les mêmes que celles de l’UEMOA,
sont définies dans le Protocole A/P1/1/03 de la CEDEAO en date du 31 janvier 2003 et le
Protocole A/P.2/01/03 relatif à l’Application des Procédures de Compensation des Pertes de
Recettes Subies par les Etats Membre de la CEDEAO du fait de la Libéralisation des Echanges.
Aux termes de ses dispositions, les règles d’origine ont défini les produits originaires de la
CEDEAO comme suit : (i) les produits du cru ; (ii) les produits entièrement obtenus dans les
Etats membres ; (iii) les marchandises fabriquées à partir de substances autres que les animaux
vivants nés et élevés dans le pays, utilisées seules ou mélangées à d’autres matières, sous
réserve que leur proportion en quantité soit supérieure ou égale à 60% de l’ensemble des
matières premières mises en œuvre. Une procédure d’agrément des produits originaires permet
au Secrétariat exécutif de la CEDEAO de diffuser la liste des produits agréés auprès des Etats
membres. Un certificat d’origine des produits originaires de la Communauté atteste l’origine
communautaire des produits. Toutefois les produits de l’agriculture et de l’élevage, ainsi que
les articles faits main en sont dispensés. Une procédure de règlement des litiges nés de
l’application du schéma de libéralisation est en place. En cas de désaccord entre les parties, la
Cour de Justice de la CEDEAO est habilitée à rendre un jugement final ; c’est-à-dire sans
recours. Toutefois, les marchandises transformées dans les zones franches ou sous des régimes
économiques particuliers entraînant la suspension ou l’exonération partielle ou totale des droits
d’entrée ne peuvent pas bénéficier de la qualité de produit originaire.
Le Règlement REG./3/4/02 en date du 23 avril 2002, présente la nouvelle procédure en vue de
faciliter le processus d’agrément des produits industriels.
Il convient cependant de noter que ces nouvelles règles d’origine ne sont entrées en vigueur que
provisoirement comme le prouve l’état de ratification des principaux textes de la CEDEAO au
3 octobre 2012. En effet, les deux principaux protocoles traduisant les règles d’origine n’avaient
toujours pas été ratifiés à cette date. Sur ce plan également, l’application effective des règles
rencontre de nombreux problèmes. Un séminaire de formation pour l’appropriation des règles
d’origine à d’ailleurs été organisé au Bénin du 21 au 22 septembre 2016 afin d’en faciliter la
mise en œuvre par les pays membres.

B. Le TEC de la CEDEAO
La CEDEAO est devenu officiellement une union douanière depuis janvier 2006 par l’adoption
de Tarifs Extérieurs Communs (TEC) (Décision A/DEC.17/01/06 du 12 janvier 2006 portant
adoption du Tarif Extérieur Commun de la CEDEAO). A cette occasion, un comité a été mis
en place par Décision A/DEC.14/01/06 du 12 janvier 2006 portant création, organisation et

13
fonctionnement du Comité Conjoint CEDEAO-UEMOA de Gestion du Tarif Extérieur
Commun (CCGTEC) de la CEDEAO.
Le TEC CEDEAO est entrée en vigueur depuis 2015. En effet, établi sur les mêmes bases que
le TEC-UEMOA, sa structure et sa composition ont faits l’objet de modification en 2009 (Acte
additionnel N° A/SA.1/06/09 Portant amendement de la Décision A/DEC.17/01/06 du 12
janvier 2006 portant adoption du Tarif Extérieur Commun de la CEDEAO). Sur la période
2009-2015, les Etats membres ont négociés et finalisés la structure et composition du TEC-
CEDEAO. Un accord en a découlé le 25 octobre 20136. Ainsi, la Conférence des Chefs d’Etat
et de Gouvernement a adopté la structure finale du TEC-CEDEAO pour une application
effective dès le 1er janvier 2015.
Le TEC CEDEAO est, à la date d'aujourd'hui, appliqué par treize (13) États membres de la
CEDEAO. Sauf la Sierra Leone et le Cap-Vert ne l'appliquent pas encore. Pour le cas de la
Sierra Leone ça devait se faire cette année, mais avec les élections ça risque d’être retardé. En
ce qui concerne le Cap-Vert, ses autorités ont demandé à la Commission de la CEDEAO
d'entreprendre une étude d'impact du TEC sur l’économie de cette île qui est paraît être un cas
spécial.
Le TEC de la CEDEAO comprend : une catégorisation, des droits et taxes permanents et, des
droits et taxes temporaires.
La catégorisation qui repose sur une nomenclature tarifaire et statistique distinguera cinq
catégories de produits partant de 0 à 4. La catégorie 0 sera composée des biens sociaux
essentiels. La catégorie 1 comprend les biens de première nécessité, les matières premières de
base, les biens d'équipement et les intrants spécifiques. La catégorie 2 comprend les intrants et
produits intermédiaires. La catégorie 3 comprend les biens de consommation finale et tous
autres produits non repris ailleurs. Enfin, la catégorie 4 sera composée de biens dits biens
spécifiques pour le développement économique.
Les droits et taxes permanents. A cette catégorisation, est associés des droits et taxes
permanents de base (Tableau 1).
Tableau 1 : Droit de douane de base de la CEDEAO

Catégorie Droit de douane


0 0%
1 5%
2 10%
3 20%
4 35%

A ces droits et taxes permanents de base, s’ajoutent des droits et taxes permanents mais
spécifiques que sont :
• le Prélèvement Communautaire d’Intégration (PCI) au taux 1,5%.

6
Voir par exemple le communiqué final de la Conférence des Chefs d’Etat sur le lien
http://www.dakaractu.com/Communique-de-presse-relatif-a-la-cloture-du-sommet-de-Dakar_a54249.html
14
• la Redevance Statistique (RS) au taux de 1%.

Ainsi, le taux cumulé des droits de douane de la CEDEAO sont résumés dans le tableau 2.
Tableau 2 : Droit de douane aux taux cumulés de la CEDEAO

Catégorie Droit de douane

0 2,5%

1 7,5%

2 12,5%

3 22,5%

4 37,5%

Les droits et Taxes temporaires. Aux droits et taxes permanents, pourraient s’ajouter aux
précédents. Selon les situations deux types de droits et taxes temporaires : la Taxe de Protection
Complémentaire (TPC) et la Taxe d’Ajustement à l’Importation (TAI). Par ailleurs, selon le
protocole d’autres mesures jugées nécessaires pourraient s’ajouter à ces droits et taxes.

La Taxe Protection complémentaire CEDEAO (TPC) sera appliquée pour faire face à un
accroissement subit des importations ou lorsque la valeur d’un produit importé tombe à– 80%
de la valeur CAF moyenne de 3 ans, du fait du TEC.

La Taxe d’Ajustement à l’Importation (TAI) est une surtaxe temporaire appliquée aux
produits en provenance de pays hors CEDEAO. Elle sera appliquée temporairement pendant
les 5 premières années de l’entrée en vigueur du TEC lorsque le droit TEC est inférieur
au doit NPF dans le tarif national. Le niveau de cette taxe ne peut dépasser 20 à 35%
selon le cas.

Enfin, la possibilité pour un Etat de mettre hors TEC pendant les 5 premières années 2,5%
des lignes tarifaires a été adoptée.

Le TEC de la CEDEAO remplacera celui de l’UEMOA en janvier 2015. Il est différent de


celui de l’UEMOA dans sa catégorisation et ses taux. Par ailleurs, la mise en place du TEC-
CEDEAO sera progressive jusqu’en 2015.

Le Tableau 3 suivant résume, les changements opérés. Globalement, 612 lignes tarifaires ont
changé de catégories, soit 10,37% des lignes.

15
Tableau 3 : Comparaison du TEC UEMOA et TEC CEDEAO

CEDEAO
TEC 0 5 10 20 35 Total
0 66 7 1 74
5 16 2013 28 26 2083
UEMOA

10 2 58 1128 59 6 1253
20 1 68 216 2080 124 2489
Total 85 2146 1373 2165 130 5899

Source : Ministère du Commerce de la Côte d’Ivoire


Concernant la mise en œuvre du TEC CEDEAO à l’instar de tous les TEC, pour être efficace
et effective sur le terrain, il nécessite l’adoption d’un code douane commun. Cela est chose faite
même si aujourd’hui, le code des douanes de la CEDEAO n’est pas encore effectif sur le terrain.
En effet, le Code des Douanes de la CEDEAO, il a été adopté en décembre 2017 par l’Acte
Additionnel A/SA.2/12/17 par le 52ème Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement. La
prochaine étape nécessaire pour l’application conforme du Code consiste en une session de
formation des formateurs des douaniers des Etats membres, les 26 et 27 juin 2018.
En outre, les textes de la politique commerciale de la CEDEAO peuvent être qualifiés de libre-
échangiste (libéral) malgré la création d’une cinquième bande fixant le taux de droit de douane
des biens dits de développement à 35%. En effet, même avec cette bande, la moyenne pondérée
des moyennes des taux de droits de douanes baisse légère (-0,21%) pour l’ensemble des pays
CEDEAO pour s’établir à 11,146% contre 11,166% avant ce TEC-CEDEAO.

C. Autres dispositions de libéralisation du commerce et de


consolidation du marché intérieur de la CEDEAO
Outre les règles d’origine et le TEC, les efforts de la CEDEAO pour la libéralisation
commerciale en son sein a également concerné divers secteurs notamment ceux de la
concurrence, des transports et des infrastructures.
En matière de Transports, la CEDEAO a pris de nombreux textes réglementaires
d’application à ses engagements : le Protocole additionnel A/SP.3/12/01 portant amendement
du Protocole portant création d’une Carte Brune CEDEAO relative à l’Assurance responsabilité
civile Automobile aux Tiers, la Décision N° C/DEC.7/12/88 Relative au transfert du Comité
supérieur d transports terrestres (CSTI) au sein du secrétariat de la CEDEAO, la Décision N°
C/DEC 7/7/91 Relative à la Réglementation de la circulation routière sur la base de la charge à
l’essieu de 11,5 tonnes pour la protection des infrastructures routières et des véhicules de
transports routiers, la Décision N°C/DEC.4/7/92 complément de la Décision N°C/DEC.3/6/88
du 21/6/88, la Convention A/P2/5/82 portant réglementation des transports Routiers Inter Etats
entre les Etats Membres de la CEDEAO, la Convention A/P1/7/85 relative à l’importation
temporaire dans les Etats Membres, des véhicules de transport de personnes, la Convention
Additionnelle A/SP1/5/90 portant institution au sein de la Communauté d’un mécanisme de
garantie des opérations de transit routier Inter-Etats de marchandises et l’instauration d’un
chèque de voyage. Par ailleurs, la CEDEAO a créé une compagnie aérienne (ASKY).
Cependant, force est de constater que ces dispositions réglementaires sont appliqués que
très faiblement dans la pratique.
16
En matière de concurrence, la CEDEAO a adopté un cadre régional de la Politique de la
Concurrence en 2007 et deux actes additionnels en 2008 : l’Acte additionnel N°A/SA.1/06/08
portant adoption des règles communautaires de la concurrence et de leurs modalités
d’application au sein de la CEDEAO et l’Acte additionnel N°A/SA.2/06/08 portant création,
attributions et fonctionnement de l’Autorité Régionale de la Concurrence de la CEDEAO.

V. La libre circulation des facteurs de production au sein de la


CEDEAO
A. Libre circulation du facteur travail
La construction d’un marché commun au sein de la CEDEAO a commencé dès l’entrée en
vigueur du Traité de 1975 précisément en 1976 en matière de libre circulation du facteur travail.
Comme pour l’UEMOA, la libre circulation du facteur travail est comprise comme la liberté
des personnes de circuler, de résider, de séjourner et d’exercer des prestations de services. En
effet, aux termes des dispositions des articles Article 2, Paragraphe 2 et Article 27, de la
Décision A/DEC .8/5/85 modifiant le paragraphe 1 de l’Article 27 du Traité de 1975, de l’article
3 paragraphe 2 et l’article 59 paragraphes 1, 2 et 3 les Etats membres de la CEDEAO se sont
engagés à :
• supprimer entre eux les obstacles à la libre circulation des personnes, des biens, des
services et des capitaux ainsi qu’aux droits de résidence et d’établissement,

• conférer le statut de citoyens de la Communauté aux ressortissants des Etats membres


(droit d’entrée de résidence et d’établissement).

La mise en œuvre de ses engagement a été pensée progressive par la CEDEAO. En particulier,
elle doit se faire en trois étapes principales :
• première étape, assurer, à tout citoyen ressortissant de la CEDEAO désirant séjourner
pour une durée maximum de 90 jours, le droit d’entrer sur le territoire de tout État
membre par un point d’entrée officiel sans avoir à présenter un visa, sous la condition
de posséder un document de voyage et des certificats internationaux de vaccination en
cours de validité sauf en cas prolongation de son séjour. Il devra, à cette fin, obtenir une
autorisation des autorités compétentes,

• deuxième étape, assurer, à tout citoyen ressortissant de la CEDEAO, entré sur le


territoire d’un pays membre sans visa, le droit d’obtenir une carte de résident ou un
permis de résident s’il désirent résider dans ce pays,

• troisième étape, assurer, à tout citoyen ressortissant de la CEDEAO, le droit de


s’installer ou de s’établir dans un État membre autre que son État d’origine, d’y accéder
à des activités économiques, de les exercer ainsi que de constituer et de gérer des
entreprises notamment des sociétés dans les conditions définies par la législation de
l’État membre d’accueil pour ses propres ressortissants.

En la matière, la réglementation pour la mise en œuvre de ces engagements a été prise dont
les principaux textes sont :
17
• le Protocole A/P1/5/79 relatif à la libre circulation des personnes, le droit de résidence
et d’établissement,

• le Protocole A/P3/5/82 portant code de la Citoyenneté de la Communauté,

• le Protocole Additionnel A/SP2/7/85 portant code de conduite pour l’application du


protocole sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et d’établissement,

• le Protocole Additionnel A/SP1/7/86 relatif à l’exécution de la deuxième étape (droit de


résidence) du protocole sur la libre circulation des personnes le droit de résidence et
d’établissement

• le Protocole Additionnel A/SP1/6/89 portant modification et complément des


dispositions de l’article 7 du Protocole sur la libre circulation des personnes, le droit de
résidence et d’établissement

• le Protocole Additionnel A/SP2/5/90 relatif à l’exécution de la troisième étape (Droit


d’établissement) du Protocole sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence
et d’établissement,

• la décision N°C/DEC.3/12/92 relative à l’institution d’un formulaire harmonisé


d’immigration et d’émigration des Etats membres de la CEDEAO,

• la décision N°A/DEC/10/5/82 relative à l’application du protocole sur la libre


circulation et au programme d’information du public,

• la décision N°A/DEC.2/5/90 portant institution d’une carte de résidence des Etats


membres de la CEDEAO,

• la Résolution N°A/RE2/11/84 de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement


relative à l’application de la première étape du protocole sur la libre circulation des
personnes, le droit de résidence et d’établissement.

On peut dire aujourd’hui, qu’en matière de libre circulation du facteur travail, la CEDEAO a
réalisée d’énormes progrès contrairement à la libre circulation des biens. En effet, en matière
de circulation aujourd’hui :
1. aucun visa n’est exigé nulle part aux ressortissants des Etats membres pour leurs
déplacements dans l’espace CEDEAO,

2. le droit de résidence et d’établissement sont reconnus aux citoyens ressortissants de la


CEDEAO malgré quelques violations répétées par certains États membres,

3. un carnet de voyage CEDEAO a été mis en circulation par les États membres et,

4. le Passeport CEDEAO a été adopté et mis en circulation par les Etats membres.

18
B. Libre circulation du facteur capital
En matière de libre-circulation des capitaux, la CEDEAO a réalisé d’importants efforts pour la
mise en place d’un cadre institutionnel et juridique prévisible et automatique. En effet, La
CEDEAO a adopté une règle commune en matière d’investissements : Acte additionnel
N°A/SA.3/12/03 portant adoption des règles communautaires en matière d’investissements et
de leur modalité d’application au sein de la CEDEAO.
En matière de libre circulation des capitaux, la CEDEAO a également créé une banque
régionale (Ecobank) qui était considérée comme la 23ème banque africaine par la valeur selon
(African Business, 2008). Selon CNUCED (2011), « La croissance d’Ecobank s’est faite
essentiellement en trois phases. Elle a commencé ses opérations au Togo en 1988, puis a
rapidement établi une présence en Côte d’Ivoire et au Nigéria en 1989 ainsi qu’au Bénin et au
Ghana en 1990. La phase d’expansion suivante a démarré en 1997 avec l’ouverture de
succursales au Burkina Faso et au Mali. En 1999, Ecobank a étendu sa présence dans la sous-
région à la Guinée, au Libéria, au Niger et au Sénégal. Entre 2000 et 2005, elle s’est installée
au Cameroun et au Cap-Vert, mais c’est spécifiquement en 2006 que la troisième vague
d’expansion a démarré, avec l’ouverture d’établissements en Sierra Leone et au Tchad. En
2007, Ecobank a renforcé sa présence en Afrique de l’Ouest avec de nouvelles activités en
Guinée-Bissau, à Sao Tomé-et-Principe et en Gambie. Elle a continué à se développer vers
l’Afrique centrale en ouvrant des filiales au Cameroun, en République centrafricaine et au
Rwanda. En 2008, le mouvement s’est poursuivi au Malawi, au Congo, au Kenya, au Burundi
et en République démocratique du Congo. Ecobank envisage d’étendre cette année sa présence
à 33 pays, à commencer par le Gabon, la République-Unie de Tanzanie et la Zambie d’ici au
milieu de l’année 2009 (Ecobank, 2009).
Cette banque véritablement panafricaine a été créée par la CEDEAO à Lomé (Togo) en 1985
mais elle n’était pas autorisée à fonctionner en tant que banque avant 1988. Par des
investissements de création de capacités et des fusions-acquisitions, Ecobank a mené une
politique active d’expansion et c’est aujourd’hui le premier groupe bancaire panafricain, présent
dans plus de pays du continent que toute autre banque: elle possède plus de 500 succursales
dans 25 pays.
Des exemples d’entreprises (ou groupes d’entreprises) individuelles de réussites basées sur les
opportunités offertes par l’intégration au sein de la CEDEAO peuvent être donnés. En
particulier, le cas de NSIA Participation et du Groupe NSIA de Monsieur Jean-Kacou
DIAGOU. Ce groupe a créé une filiale de sa banque BIAO au Nigéria. Par ailleurs cette Banque
est présente dans la plupart des pays de l’Afrique de l’Ouest.
En conclusion, en matière de libre circulation des facteurs de production (travail et capital), des
efforts ont été faits tant en matière réglementaire que dans la mise en œuvre effective de la
réglementation. Mais, des zones d’ombres existent comme nous le verrons plus bas dans les
défis.

19
Chapitre 2 : Politiques sectorielles, de gouvernance et sociales
communes de la CEDEAO
Le Traité révisé de la CEDEAO défini explicitement neuf (9) principaux domaines de
coopération sur la bases desquels il élabore ses politiques communes dans divers secteurs :
Alimentation et Agriculture (Chapitre 4), Industrie, Sciences et Technologie et, Energie
(Chapitre 5), Environnement et Ressources Naturelles (Chapitre 6), Transports,
Communications et Tourismes (Chapitre 7), Monnaie (Chapitres 8 et 9), Affaires Politiques,
Juridiques, Judiciaires et de la Sécurité régionale et, de l’Immigration (Chapitre 10), des
Ressources Humaines, de l’Information et, des Affaires Sociales et Culturelles (Chapitre 11) et
les autres domaines (Chapitre 12). La CEDEAO, fonctionnant sur la base de programmes
prioritaires, a mis en place un certain nombre de politiques communes dans divers domaines :
économiques, sociaux, politique, et de sécurité.

I. Les politiques sectorielles dans le domaine économique


En matière économique, la CEDEAO a mis en place des politiques sectorielles dans des secteurs
autres que ceux du commerce, de la douane et des statistiques dont les suivants : Agriculture,
Mines, Energie, et Industrie.
A. La Politique Agricole et alimentaire commune de la CEDEAO
Aux termes de l’article 25 du Traité révisé de la CEDEAO, les Etats membres se sont engagés
à coopérer dans les domaines de l’agriculture, de la sylviculture, de l’élevage et de la pêche au
fin d’assurer :
• la sécurité alimentaire,

• l’accroissement de la production et de la productivité de l’agriculture, de l’élevage, de


la pêche et des ressources forestières ainsi que l’amélioration des conditions de travail
et la création d’emplois dans les zones rurales,

• la protection du cours des produits d’exportation sur le marché international.

En particulier, aux termes de l’article 25, paragraphe 2, alinéa h du traité révisé de la CEDEAO,
les Etats membres s’engagent à tout mettre en œuvre pour l’adoption et la mise en œuvre d’une
politique agricole commune. En application de ces engagements, les Chefs d’Etat et de
Gouvernement ont adopté à Accra le 19 janvier 2005, par décision, La Politique Agricole
Commune de la CEDEAO (Décision N° A/Dec.11/01/05 portant adoption de la Politique
Agricole Commune de la CEDEAO). Son objectif général est de contribuer de manière durable
à la satisfaction des besoins alimentaires de la population, au développement économique et
social et à la réduction de la pauvreté dans les Etats membres, ainsi que des inégalités entre les
territoires, zones et pays. Celui-ci est décliné en sept (7) objectifs spécifiques et repose sur sept
principes directeurs :
• la subsidiarité, selon laquelle on ne traite au niveau régional que ce qui ne peut pas être
mieux traité au niveau national ou local. Elle implique entre autres que « la compétence
nationale est la règle, la compétence communautaire, l’exception. »,

20
• la proportionnalité qui implique que l’action de la communauté ne doit pas excéder ce
qui est nécessaire pour atteindre les objectifs du Traité. Son application doit permettre,
entre autres, d’éviter d’imposer à un pays membres des règles trop contraignantes ou
des efforts trop élevés par rapport à ce qui serait raisonnable ou efficace,

• la complémentarité permet de prendre en compte les avantages comparatifs des


différents pays et bassins de production et de conférer une dimension géographique à la
politique agricole en même temps qu’il permet de donner une orientation volontariste
aux investissements publics et à l’aide extérieure,

• la régionalité, selon lequel la Communauté ne traite que des questions qui concerne au
moins deux Etats membres,

• la solidarité selon lequel la Communauté garantit un minimum de cohésion entre ses


membres et met en commun un ensemble de ressources financières, humaines et
institutionnelles afin de réduire les disparités qui existent entre eux,

• le partenariat et la concertation qui vise à assurer une implication permanente des


acteurs du secteur agricole dans la mise en œuvre, le suivi-évaluation et les éventuelles
réformes de la politique agricole de la Communauté. La recherche de synergie, la quête
d’efficacité dans la mise en œuvre des différentes stratégies suggèrent un partage des
responsabilités en s’appuyant sur les expériences et les acquis des différents acteurs et
institutions qui travaillent dans le secteur,

• la progressivité implique une approche graduelle permettant de tenir compte des


situations nationales et des intérêts particuliers.

Elle est articulé autour de trois axes principaux : 1) l’accroissement de la productivité et de la


compétitivité de l’agriculture, 2) la mise en œuvre d’un régime commercial intracommunautaire
et 3) l’adaptation du régime commercial extérieur. Le premier axe d’intervention met l’accent
sur l’amélioration de la sécurité alimentaire, l’accroissement des revenus des producteurs, la
reconnaissance du statut des producteurs et la réduction de la pauvreté. Le deuxième et
troisième axes visent à faciliter l’accès aux marchés régional et international, afin d’écouler les
productions résultant de l’accroissement de l’offre, favorisée par la modernisation des systèmes
de production.
La mise en œuvre concrète de ces engagements a avancé avec la mise en place du cadre
institutionnel, l’élaboration, l’adoption et l’exécution de différents programmes nationaux et
régionaux : l’Offensive régionale pour la production alimentaire et contre la faim (adoptée en
2008), les Programmes Régionaux et Nationaux d’Investissement Agricoles (PRIA et PNIA)
en 2009, et renouvelés en 2015. Les programmes PRIA et PNIA sur la période (2016-2020) de
la CEDEAO comme les précédents tiennent d’ailleurs compte des objectifs du NEPAD et de
l’UA en matière de sécurité alimentaire et de développement axé sur le secteur agricole à savoir
les objectifs Programme Détaillé de Développement de l’Agriculture Africaine ou PDDAA.

21
B. Politique minière commune de la CEDEAO
Aux termes de l’article 31, paragraphe 1 du traité révisé de la CEDEAO, ses Etats membres se
sont convenus d’harmoniser et de coordonner leurs politiques et programmes en matière de
ressources naturelles. Pour ce faire, ils se sont engagés sur sept objectifs principaux dont la
coordination de leurs programmes de développement et d’utilisation des ressources minérales
alinéa d).
En matière d’application la CEDEAO a adopté en juillet 2009 une directive sur l’harmonisation
des principes directeurs et politiques du secteur minier (Directive N°C-DIR.3/5/09 sur
l’harmonisation des principes directeurs et des politiques dans le Secteur minier) et le
Règlement C-REG.3/5/09 portant Développement des Ressources Minérales et Organisation
du secteur Minier de la CEDEAO. La Directive présente les objectifs de la CEDEAO pour le
secteur minier :
• assurer l’harmonisation des principes directeurs et des politiques dans le secteur minier
des Etats membres basés sur des normes standard de haut niveau de responsabilité pour
les compagnies minières et les gouvernements afin de promouvoir les droits de
l’homme, la transparence et l’équité sociale et de garantir la protection des
communautés locales et de l’environnement dans les zones minières de la CEDEAO,

• créer un environnement minier favorable au développement macroéconomique durable


et qui assure un équilibre entre la nécessité de mettre en place des mesures incitatives
pour attirer les investissements et celle de protéger la base du revenu et les ressources
des Etats-membres,

• améliorer la transparence dans le processus de formulation et de mise en œuvre de la


politique minière en Afrique de l’Ouest, promouvoir la participation et renforcer les
capacités des communautés minières,

• doter les Etats membres d’une politique minière et d’un cadre juridique harmonisés, et,

• s’assurer que l’harmonisation prend en compte les différents niveaux auxquels chaque
Etat membre se trouve dans le secteur minier et la manière dont les politiques et les
différentes stratégies pourraient être conduites pour satisfaire les besoins spécifiques de
chaque Etat membre.

Un projet de politique sur le développement minier de la CEDEAO a été examiné et redéfini


par les parties prenantes en avril 2011, tandis qu’un plan d’action pour sa mise en œuvre était
parallèlement élaboré, un Acte additionnel été adopté (l’Acte additionnel A/SA.16/02/12
portant adoption de la Politique de Développement du Secteur Minier de la CEDEAO). Par
ailleurs, les Etats membres se sont engagés à prendre toutes les dispositions nécessaires pour se
conformer à la directive depuis le 1er juillet 2014 (article 22 de la directive).
C. La Politique Energétique Commune de la CEDEAO
Aux termes de l’article 26, chapitre 4 du traité révisé de la CEDEAO, ses Etats membres sont
convenus de coordonner et d’harmoniser leurs politiques et programmes dans les domaines de
l’énergie. A cet effet, ils se sont engagés à :
22
• mettre effectivement en valeur les ressources énergétiques de la région,

• mettre en place des mécanismes de coopération appropriés en vue de garantir leur


approvisionnement régulier en hydrocarbures,

• promouvoir le développement des énergies nouvelles et renouvelables notamment


l’énergie solaire dans le cadre de la diversification des sources d’énergie,

• harmoniser leurs plans nationaux de développement énergétique en recherchant


notamment l’interconnexion des réseaux de distribution d’électricité,

• concevoir une politique énergétique commune, particulièrement en matière de


recherches, d’exploitation, de production et de distribution,

• créer un mécanisme de concertation et de coordination permettant de résoudre en


commun les problèmes que pose le développement énergétique au sein de la
Communauté, notamment ceux relatifs au transport de l’énergie, à l’insuffisance de
cadres et techniciens qualifiés ainsi qu’à la pénurie de moyens financiers pour la
réalisation de leurs projets énergétiques.

En application de ces engagements, la CEDEAO a adopté un protocole sur l’énergie par


Décision N°A/Dec.17/01/03 relative à l’adoption d’un Protocole sur l’énergie de la CEDEAO.
Elle a en outre créé une Autorité de Régulation Régionale du secteur de l’Electricité de la
CEDEAO (ARREC) par l’Acte additionnel N°A/SA.2/01/08 du 18 janvier 2008 et régie par le
Règlement N°C/REG.27/12/07 du 15 décembre 2007 portant sur sa composition, son
organisation, ses attributions et son fonctionnement. L’ARREC a pour mission d’introduire une
régulation des échanges d’électricité transfrontaliers, et d’apporter un soutien aux mécanismes
de régulation nationale. Elle prend des règlements et des décisions qui ont force exécutoire,
directement applicables dans tout l’espace CEDEAO et dont l’application est garantie par les
Etats membres sur leur territoire.
Toutefois, les efforts des pays membres de la CEDEAO en matière de politique énergétique
n’ont pas commencé avec l’adoption de son Protocole sur l’énergie. En effet, c’est en 1982 que
fut adoptée, la politique énergétique de la CEDEAO par la Conférence des Chefs d’Etat et de
Gouvernement par la Décision N°A/DEC.3/5/82 relative à sa politique énergétique. Par ailleurs,
la CEDEAO a mis en place le Système d’Echanges d’Energie Electrique Ouest Africains
(EEEOA) en 1999 (Décision N°A/DEC.S/12/99 relative à la mise en place d’un Système
d’Echanges d’Energie Electrique Ouest Africains), ses attributions en 2006 (Décision
N°A/Dec.20/01/06 Portant octroi du statut d’institution spécialisée au secrétariat général du
système d’échanges d’énergie électrique en Afrique de l’Ouest) et des mécanismes de
financement de ses projets prioritaires (Décision N°A/Dec.8/12/01 Relative à la mise en place
d’un mécanisme de financement des projets prioritaires du système d’échanges d’énergie Ouest
Africain ou EEEOA).
D. Politique Industrielle Commune d’Afrique de l’Ouest (PICAO)
Aux termes de l’article 26, paragraphe 1, du traité révisé de la CEDEAO, ses Etats membres
ont convenus d’harmoniser leurs politiques d’industrialisation en vue de la promotion du
23
développement industriel régional et de l’intégration de leurs économies. Pour ce faire, ils se
sont engagés à :
• renforcer la base industrielle de la Communauté, moderniser les secteurs prioritaires,
favoriser la réalisation d’un développement auto-entretenu et auto-suffisant,

• promouvoir des projets industriels conjoints ainsi que la création d’entreprises


multinationales dans les sous-secteurs industriels prioritaires susceptibles de contribuer
au développement de l’agriculture, des transports et communications, des ressources
naturelles et de l’énergie.

En application de ces engagements, la CEDEAO a adopté par acte additionnel, une politique
industrielle commune à l’Afrique de l’Ouest (Actes Additionnel N°ASA.2/7/10 portant
adoption de la Politique industrielle Commune de l’Afrique de l’Ouest : PICAO et son plan
d’action) et la décision N°02/07/10 des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO du 2
juillet 2010 à Sal (Cap vert).
La PICAO a pour vision générale la promotion d’un tissu industriel régional densifié, intégré
et compétitif sur la scène internationale, respectueux de l’environnement et capable d’améliorer
significativement à l’horizon 2030 le niveau de vie des populations de l’Afrique de l’Ouest
(article 2 acte additionnel).
Aux termes de l’article 3 de l’acte additionnel, l’objectif général de la PICAO est d’accélérer
l'industrialisation de la région, en soutenant la transformation industrielle endogène des
matières premières locales, le développement et la diversification des capacités productives
industrielles ainsi que le renforcement de l'intégration régionale et des exportations de biens
manufacturés.
Elle se décline en dix (10) programmes : 1) le développement de micro-entreprises, des
PME/PMI et de grandes industries, 2) élaboration et la mise en œuvre un programme de
recherche et développement, 3) le développement des droits régionaux de propriété
intellectuelle, 4) le développement du financement régional, 5) la création et mise en œuvre un
système d’échange d’informations sur les opportunités d’affaires, 6) la création d’un réseau
régional de partenariat industriel, 7) le développement des infrastructures, 8) l’élaboration et la
mise en œuvre d’un programme de Normalisation, d’Assurance de la qualité, d’Accréditation
et de Métrologie, 9) le développement des capacités managériales et des compétences, et 10) la
restructuration et la mise à niveau des industries.
Ces programmes et leur mise en œuvre reposent sur quatre principes directeurs :
• la concurrence en tant que le renforcement de l'Etat de droit par le respect et
l'application des règles qui régissent la concurrence et permettent d'améliorer
substantiellement l'environnement des affaires dans la région pour encourager
l'investissement endogène, l'investissement direct étrangers et la création d'emplois,

• la solidarité en tant que le développement d'un esprit communautaire autour d'un idéal
commun,

24
• la coopération en tant que voie d'intégration des politiques industrielles des États
membres dans le cadre du PICAO et de mobilisation de tous les moyens pour une
exploitation maximale des avantages comparatifs,

• la consécration de l'industrie comme le moteur du développement économique et


social de la région.

La mise en œuvre de ces programmes progresse en particulier, la CEDEAO a mis en place une
politique qualité. En outre, conformément aux recommandations du rapport final du symposium
régional de la CEDEAO des 28, 29 et 30 mars 2012 à Lomé (Togo) sur la PICAO, celle-ci a
été accélérée par la mise en place d’une infrastructure de la qualité. De plus, conformément aux
dispositions de la PICAO, non seulement sa mise en œuvre est prévue s’étendre jusqu’en 2030,
mais également elle nécessitait une évaluation après 20 ans et l’adoption d’un mécanisme de
révision chaque cinq (5) ans pour tenir compte des changements nouveaux. Ainsi, le conseil
des ministres de la CEDEAO en charge de l’industrie a adopté une version renouvelé de la
PICAO le 25 avril 2015 à Accra au Ghana. En autres, la PICAO fixe des objectifs chiffrés pour
ses programmes :
• diversifier et élargir la base de production industrielle régionale en augmentant
progressivement le taux de transformation des matières premières locales de 15-20% à
une moyenne de 30% d’ici 2030 ;

• augmenter progressivement la contribution du secteur Industriel au PIB régional d'une


moyenne actuelle de 6-7% à plus de 20% d’ici 2030 ;

• augmenter progressivement le commerce intra-communautaire en Afrique de l'Ouest de


moins de 12% à 40% d'ici 2030, avec une part de 50% du commerce régional en produits
industriels ;

• augmenter progressivement le volume des exportations de produits industriels en


Afrique de l'Ouest vers le marché mondial de 0,1% à 1% d’ici 2030.

Dans le cadre du développement de son secteur privé en général, de son secteur industriel en
particulier et surtout dans le cadre de la mise en œuvre de la PICAO, la CEDEAO a mise en
place en février 2013 une politique de qualité dite ECOQUAL. En effet, par l’Acte additionnel
A/SA.1/02/13 et le Règlement Communautaire N° C/REG.19/12/13, pris en décembre 2013, a
mis en place l’Infrastructure Régionale de la Qualité de la CEDEAO (IRQ) la CEDEAO a mis
en place un Programme Qualité. Dans ce cadre et au titre du Règlement Communautaire
N°C/REG.19/12/13, notamment son article 7, la Commission de la CEDEAO à créer ou
désigner :

• une direction technique au sein de la Commission de la CEDEAO en charge de la


qualité ;

• un Conseil Communautaire de la Qualité (CCQ) ;

• un Comité Communautaire de Métrologie (CCM) ;

25
• un Comité Communautaire d’Evaluation de la Conformité (CCEV) ;

• un Système Régional d'Accréditation (SRA) ;

• un Comité Communautaire de Règlementation Technique (CCRT) ;

• des structures nationales à vocation régionale dans les différents domaines de la qualité.

Également, en vue contribuer à mettre en œuvre ECOQUAL, notamment, la mise en place de


l’Infrastructure Régionale de la Qualité de la CEDEAO, un Programme d’Appui au Système
Qualité de l’Afrique de l’Ouest (PSQAO) est en cours d’exécution depuis septembre 2014. En
outre, le Modèle d’harmonisation des normes de la CEDEAO (ECOSHAM) faisant partie
intégrante de la stratégie du Programme Qualité a été adopté en décembre 2012 (Règlement
C/REG.14/12/12 Portant adoption des procédures d’harmonisation des Normes de la CEDEAO
(ECOSHAM)). De plus, en avril 2015, vingt-six (26) normes et codes de bonnes pratiques
(ECOSTAN) sur les produits agricoles et alimentaires avaient été adoptés par les Organismes
Nationaux de Normalisation.

E. Autres politiques de renforcement et de consolidation du marché intérieur de la


CEDEAO
Pour la consolidation de son marché intérieur de la CEDEAO a mis en place de nombreuses
politiques dans différents secteurs, notamment : la fiscalité et les finances publiques, les
marchés publics et le marché financier.
En matière de fiscalité intérieure indirecte, la CEDEAO a adopté en 1996 un protocole sur la
TVA (le Protocole N°A/P.2/7/96 portant institution de la Taxe sur la Valeur Ajoutée dans les
Etats membres), depuis 2012 la CEDEAO et l’UEMOA s’efforcent de trouver des voies et
moyens pour faire converger les politiques fiscales des pays d’Afrique de l’Ouest.
En matière de finances publiques, on note le démarrage effectif du programme d'harmonisation
des cadres des finances publiques, de la gestion de la dette publique et des statistiques ainsi que
la réalisation d’une étude sur l'harmonisation des critères de convergence au niveau de la
CEDEAO.
En matière de marché financier, notons également que des efforts ont été faits. En effet, il y a
eu la mise en place du Conseil de l’Intégration des Marchés de Capitaux Ouest-Africains (West
African Capital Markets Integration Council) à Abuja, le 18 janvier 2013. Ce conseil s’est doté
d’un Président et d’un vice-Président. Le CIMCOA est une instance de pilotage chargé
d’accélérer les actions de convergences des marchés financiers. Actuellement, il existe quatre
(4) bourses au sein de la CEDEAO à savoir : la BRVM, marché boursier unique pour les huit
(8) pays de l’UEMOA, la Bourse du Nigéria, la Bourse du Ghana et la Bourse de la Sierra‐
Léone. La BRVM est la deuxième place boursière de la CEDEAO après la bourse du Nigéria.
En outre, la CEDEAO a adopté des Politiques communes structurantes : la Politique des
Infrastructures et la Politique Communautaire de Développement (PCD). Le PCD qui est la
matérialisation de la vision 2020 de la CEDEAO traduisant en fait le désir des autorités de la
CEDEAO de passer d’une intégration des Etats à une intégration des peuples. Il est une
plateforme commune de développement économique et social qui implique tous les acteurs

26
majeurs de la région, notamment les autres organisations régionales, les États membres, la
société civile, le secteur privé et la recherche.
En matière d’infrastructure, les efforts faits sont importants. Ainsi, par exemple, il y a eu
adoption de diverses réglementations dans le domaine des Technologies de l’Information et de
la Communication.
F. Politique de convergence macroéconomique et monnaie unique au sein de la
CEDEAO
En matière monétaire, la CEDEAO a lancé un programme de convergence monétaire pour
l’établissement d’une union économique et monétaire. Elle a adopté en 1987 le Programme de
Coopération Monétaire (PCM) dont la date butoir était initialement fixée pour 1994, qui a été
portée ensuite à l’an 2000. A cet effet, en 1999, la Conférence des Chefs d’Etat a révisé les
critères de convergence et mis en place un cadre institutionnel de surveillance multilatérale pour
l’harmonisation des politiques macro-économiques. Dans ce cadre, elle a mis en place l’Agence
Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (AMAO) dont le rôle est, entre autre, la création d’une
monnaie unique au sein de la CEDEAO en 2020 avec la création, à l’horizon 2015, d’une
seconde zone monétaire commune à six Etats membres de l’organisation en plus de l’UEMOA.
Par ailleurs, la CEDEAO a mis en place trois autres institutions structurantes : l’Institut
monétaire de l’Afrique de l’ouest (IMAO), l’Association des banquiers de l’Afrique de l’Ouest
(ABAO), et la Banque d’investissement et de développement de la CEDEAO (BIDC). La BIDC
est une institution financière internationale instituée par l’article 21 nouveau du Traité révisé
tel qu’amendé par l’Acte additionnel A/SA.9/01/07 du 19 janvier 2007. Elle comprend deux
guichets dont l’un est destiné à la promotion du secteur privé et l’autre au développement du
secteur public.

II. Les politiques sectorielles dans les domaines politique et sociale


A l’instar du domaine économique, la CEDEAO a réalisé des efforts importants pour la mise
en place d’un cadre institutionnel adéquat dans les domaines de la Paix, de la sécurité, de la
gouvernance, de la santé, de la culture, des sciences et du genre. Nous verrons dans un premier
temps, les politiques sectorielles dans les domaines de la Politique. Ensuite, nous verrons les
politiques sectorielles dans les domaines sociaux.
A. Cadre institutionnel de la CEDEAO en matière de Paix, Sécurité et
Gouvernance
En matière Politique, la CEDEAO a pris conscience de l’importance de la paix et de la sécurité
pour l’atteinte de son objectif de développement avec les instabilités créées par les coups d’État
militaires dans certains pays affectant l’environnement politique de la sous-région. En effet, la
région étant affectée par les instabilités politiques et la mauvaise gouvernance, dues à la
fréquence des coups d’État à répétition, la CEDEAO a réalisé que la paix et la sécurité étaient
des conditions préalables au développement économique et au progrès social. Ainsi, le Traité
révisé de la CEDEAO a introduit parmi ses innovations majeures la coopération politique, la
paix et la sécurité régionales comme moyens pour atteindre le développement économique.
Autrement dit, la CEDEAO considère que la réalisation d’un système sous-régional éfficace de
paix et de sécurité est nécessaire à une coopération économique significative. Le maintien de la
paix est ainsi affiché dans le Traité révisé, non pas au titre de l’objectif global de la communauté
mais comme un principe fondamental qui doit permettre à la CEDEAO d’atteindre ses objectifs
27
en vue d’une prospérité économique durable. Le Traité révisé de la CEDEAO consacre son
chapitre X à la question de la coopération dans les domaines des Affaires Politiques, Judiciaires
et Juridiques, de la Sécurité Régionale et de l’Immigration.

Ainsi, au terme des articles 56, 57 et 58 du traité révisé de la CEDEAO, ses Etats membres
s’engagent à :

1. coopérer dans les domaines des affaires politiques,

2. coopérer en vue d’assurer la réalisation des objectifs du Protocole de Non-Agression,


du Protocole d’Assistance mutuelle en matière de Défense, de la Déclaration de
Principes politiques de la Communauté et de la Charte Africaine des Droits de l’homme,

3. promouvoir la coopération judiciaire en vue d’harmoniser les systèmes judiciaires et


juridiques,

4. œuvrer à la préservation et au renforcement des relations propices au maintien de la


paix, de la stabilité et de la sécurité dans la région,

5. Coopérer avec la Communauté en vue de créer et de renforcer les mécanismes


appropriés pour assurer la présentation et la résolution à temps des conflits inter et intra-
Etats.

Pour concrétiser ces engagements, la CEDEAO a entrepris d’importants efforts pour la mise en
place d’un cadre institutionnel opérationnel pertinent et efficace. Ainsi, elle a adopté :

➢ Le Protocole relatif au Mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits,


de maintien de la paix et de la sécurité, signé à Lomé le 10 décembre 1999, qui a permis
à la CEDEAO d’envoyer des Forces dans plusieurs pays de la sous-région sous les
couleurs de l’ECOMOG ;

➢ Le Protocole A/SP1/12/01 sur la Démocratie et la bonne gouvernance, additionnel au


Protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de
maintien de la paix et de la sécurité, signe a Dakar le 21 décembre 2001, qui a permis à
la CEDEAO de peser réellement sur la gouvernance démocratique des Etats membres.

➢ Moratoire sur l’importation et la fabrication des armes légères en octobre 1998.


Conscients du fait que l’accumulation et la prolifération des armes légères constituent
une menace sérieuse à la paix et à la sécurité de la sous-région, les chefs d’États de la
CEDEAO ont déclaré, le 31 octobre 1998, un Moratoire sur l’importation, l’exportation
et la fabrication des armes légères et de petit calibre en Afrique de l’Ouest. Ce Moratoire
a été entériné le 14 juin 2006 par la signature d’une Convention de la CEDEAO sur les
armes de petit calibre, entrée en vigueur le 29 septembre 2009. En mars 2010, les
ministres de la défense de la sous-région ont adopté un plan quinquennal d’action pour
la mise en œuvre de cette convention et ont approuvé le mécanisme d’une base de
données pour la gestion du processus d’exemption pour l’importation d’armes par les
Etats membres.

28
Ces protocoles viennent compléter, renforcer et élargir :

➢ l’Accord-cadre de non-agression et d’assistance en matière de défense (ANAD) signé


le 9 juin 1977 dans le cadre de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest et
destiné à assurer la paix et la sécurité par la prévention des conflits, le règlement des
différends par les moyens pacifiques et l’assistance militaire en cas d’agression. Le
Protocole d’application de l’ANAD a été signé à Dakar le 14 décembre 1981 et un
Protocole additionnel du 20 décembre 1982 a prévu la possibilité de constituer une force
de paix pour contrôler une zone de délimitation des activités des forces armées en
conflit;

➢ le Protocole d’Assistance Mutuelle en matière de défense (PAMD), entré en vigueur en


1986. Le 22 avril 1978, l’ANAD a été étendu à la CEDEAO par un Protocole de non-
agression qui a conduit à la signature, le 29 mai 1981 à Freetown, d’un deuxième texte
déterminant pour l’orientation future de la communauté.

Dans le cadre de son programme de mise en œuvre de la politique paix, sécurité et gouvernance,
la CEDEAO a créé l’ECOWAS Monitoring Group (Groupe d'Observation militaire de 1a
CEDEAO), plus connu sous le sigle ECOMOG et le Conseil de Médiation et de Sécurité. En
effet, c’est en vue du maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité dans la sous-région,
que le protocole a institué des structures spécifiques, notamment le Conseil de Médiation et de
Sécurité et le Groupe de Contrôle du Cessez-le-feu (ECOMOG). L’ECOMOG qui est une force
militaire, est intervenue au Libéria (1993-1997, 2003), en Sierra Leone (1997-2000) et en
Guinée-Bissau (1999), en Côte d'Ivoire (2003 et 2004).
B. Cadre institutionnel de la CEDEAO dans le domaine social
Au titre du chapitre XI du Traité révisé de la CEDEAO « Coopération dans les domaines des
Ressources Humaines, de l’Information, des Affaires Sociales et Culturelles », ses pays
membres ont pris de nombreux engagements dans divers domaines sociaux : Ressources
Humaines, Affaires Sociales, Affaires Culturelles, Genre, Population, Information et Presse. En
particulier, dans les pays membres se sont engagés à, :
• dans le domaine des ressources humaines, coopérer par :
✓ le renforcement de leur coopération en matière d’éducation, de formation et
d’emploi en harmonisant et coordonnât leurs politiques dans ces domaines ;
✓ le renforcement des institutions de formations existantes, la redynamisation de
leurs systèmes éducatifs et l’encouragement des échanges dans ces domaines ;
✓ l’encouragement des échanges de main-d’œuvre spécialisée entre membres ;
• dans le domaine des affaires sociales, coopérer par :
✓ la promotion des échanges d’expérience et d’informations relatives à
l’alphabétisation, la formation professionnelle et l’emploi ;
✓ l’harmonisation des législations nationales du travail et des régimes de sécurité ;
✓ la promotion des organisations de femmes et de jeunes ainsi que des associations
professionnelles afin d’assurer la participation populaire aux activités de la
communauté ;
✓ la promotion et le renforcement de leur coopération dans le domaine de la santé ;

29
✓ la promotion et le développement de la pratique sportive, en vue de rapprocher
les jeunes de la région et leur assurer un développement équilibré ;
• dans le domaine des affaires culturelles, à promouvoir :
✓ les échanges culturels par tous les moyens et sous toutes les formes ;
✓ développer et améliorer, au besoin, les structures et les mécanismes de
production, de diffusion et d’exploitation des industries culturelles ;
✓ l’enseignement et la diffusion d’une langue ouest africaine en tant facteur
d’intégration communautaire ;
• dans le domaine du genre et développement, élaborer, harmoniser, coordonner et définir
des politiques et des mécanismes appropriés pour améliorer les conditions économiques,
sociales et culturelles des femmes, par :
✓ l’identification et l’examen des contraintes empêchant les femmes d’apporter
une contribution plus grande aux efforts de développement régional ;
✓ la fourniture d’un cadre dans lequel ces contraintes seront prises en compte ainsi
que les préoccupations et les besoins des femmes ;
✓ l’encouragement du dialogue entre eux sur les projets et programmes au profit
des femmes ;
✓ la mise en place d’un mécanisme de coopération avec les organisations
bilatérales, multilatérales et non gouvernementales ;
✓ la promotion et la mise en place d’un mécanisme d’échanges d’informations et
d’expériences entre eux
• dans le domaine de la population, adopter individuellement et collectivement des
politiques et des mécanismes nationaux en matière de population intégrant la variable
démographique dans le développement socio-économique par :
✓ l’attribution d’une place importante à la population dans la formulation et la mise
en œuvre des programmes et politiques de développement ;
✓ l’élaboration de politiques nationales en matière de population ainsi que la
création d’institutions spécialisations sur la question ;
✓ la sensibilisation des populations sur les questions de démographie ;
✓ la collecte, l’analyse et l’échange d’informations et de données relatives aux
questions de population ;
• dans le domaine de l’information, la radiodiffusion et la télévision, coordonner leur
efforts, mettre en commun leurs ressources, encourager la création de centres régionaux
d’échanges de programmes et utiliser leurs systèmes de radio et de télévision pour
promouvoir la réalisation des objectifs du processus d’intégration régionale ;
• dans le domaine de la presse, coopérer en :
✓ assurant le libre accès des professionnels de la communication aux sources de
l’information ;
✓ facilitant les échanges d’information entre leurs organes de presse ;
✓ respectant les droits du journaliste ;
✓ incitant les investissements dans les entreprises de communication des Etats
membres ;
✓ modernisant leurs organes de presses ;
✓ promouvant et encourageant la diffusion des informations dans les langues
nationales.

30
Pour concrétiser ces engagements, la CEDEAO a entrepris d’importants efforts pour la mise en
place d’un cadre institutionnel opérationnel, pertinent et efficace dans tous ces domaines.
Ainsi :
• dans le domaine du genre, la Commission de la CEDEAO a :
✓ transformé I'AFAO en Centre de la CEDEAO pour le Développement du Genre
(CCDG) (la Décision A/DEC.16/01/03) ;
✓ mise en place une commission technique chargée des questions relatives à
l’égalité des genres (Décision A/DEC. 7/12/03) ;
✓ mis en place une politique du genre de la CEDEAO ainsi que de tous les
instruments de sa mise en œuvre (Décision A/DEC. 01/01/05) ;
✓ adopté un système de gestion du genre de la CEDEAO (Décision
A/DEC.2/01/05) ;
✓ En outre, les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO, ont adopté, au
cours de leur 47ème Session Ordinaire, tenue le 19 mai 2015 à Accra, en
République du Ghana, l’ « Acte Additionnel A/SA.02/05/15 Relatif à l’Egalité
de Droits entre les Femmes et les Hommes pour le Développement Durable dans
l’Espace CEDEAO » ;
• dans le domaine de l’Education :
✓ les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO, ont adopté, le Protocole
A/P3/1/03 sur l'Education et la Formation ;
✓ la CEDEAO a adopté une Convention Générale relative à la reconnaissance et à
l’équivalence des diplômes, grades, certificats et autres titres dans ses Etats
membres (CONVENTION GENERALE A/Cl/I/03) ;
✓ Promotion de la circulation des étudiants et enseignants au sein de la CEDEAO,
et de la reconnaissance mutuelle des diplômes ;
✓ Promotion de la création d’institutions communes d’enseignement supérieur et
de formation professionnelle par la CEDEAO ;
✓ Promotion de la Coordination des programmes d’enseignement et de formation ;
✓ la CEDEAO a élaboré une Politique de recherche (ECORP), adoptée par les
Chefs d’Etats et de Gouvernement en juillet 2013 dont découlent divers
programmes de recherche comme le PRRE (Programme Régional de Recherche
Economique);
✓ la CEDEAO a adopté une Politique en Science, Technologie et Innovation
(ECOPOST) ;
• dans le domaine de la santé :
✓ Mise en place de l’Organisation Ouest-Africaine de la Santé ou OOAS
(Protocole NP.2/7/87 du 9 juillet 1987) ;
✓ Réalisation d’études sur l’application des normes et standards d’assurance
qualité des soins dans l’espace CEDEAO ;
✓ Campagne de lutte contre le VIH/SIDA ;
✓ Plan régional opérationnel intégré de réponse au virus Ebola ;
• dans le domaine de la culture :
✓ La CEDEAO a mis en œuvre les axes prioritaires du Programme de la CEDEAO
pour le développement de la culture (A/DEC.4/11/96), de l’Accord cadre

31
culturel entre les états membres (A/DEC.1/7/87) et du Plan d’action du NEPAD
pour la Culture (A/DEC.6/01/03) ;
• dans le cadre des affaires sociales :
✓ la Commission de la CEDEAO a mis en place un Centre de développement de
la Jeunesse et des Sports de la CEDEAO ;
✓ elle a également mis en œuvre le Programme des Volontaires de la CEDEAO ;
✓ la CEDEAO a adopté une Politique Régional du Travail et de l’Emploi ainsi que
son Plan quinquennal de mise en œuvre (Acte Additionnel A/SA.2/09) ;
✓ la CEDEAO a créé un Forum de Dialogue Tripartie (Acte Additionnel
AlSA.1/07/10) et ses règlements d’application (Règlement C/REG.6/05/09 et
Règlement C/REG13/06/13) ;
✓ l’élargissement de la Fédération à la Région CEDEAO a été prise à BAMAKO
les 17 et 18 mars 1998 et a été effective lors de l’Assemblée Générale
constitutive de la FOPAO (FOPAO : Fédération des Organisations Patronales
d’Afrique de l’Ouest) tenue à Conakry les 13 et 14 février 2006 ;
✓ la création, en 1976, d’une Fédération des Chambres de Commerce et
d’Industrie d’Afrique de l’Ouest (FCCIAO ou FEWACCI de son sigle anglais) ;
✓ la Commission de la CEDEAO a favorisé la création de plusieurs structures de
défense des intérêts des populations ouest africaines tant au niveau des
employeurs ;
✓ la création en juin 2000, à Cotonou, du ROPPA (Réseau des Organisations
Paysannes et des Producteurs Agricoles de l’Afrique de l’Ouest), mais une
initiative propre aux organisations paysannes et des producteurs agricoles de
l’Afrique de l’Ouest ;
• dans le domaine de la population :
✓ la déclaration des Présidents des Parlements nationaux des Etats membres de la
CEDEAO, de la Mauritanie et du Tchad à Ouagadougou (Burkina Faso) le 22
juillet 2017.

C. Conclusion
En conclusion, qu’il s’agisse des domaines politiques ou sociaux, en 43 ans d’existence, la
CEDEAO a réalisé d’énormes progrès en termes de mise en place d’un cadre institutionnel.

III. Transposition des textes régionaux dans les législations


nationales
En somme, si nous faisons le bilan de la CEDEAO en termes de mise en place d’un cadre
institutionnel cohérent et pertinent tant du point de vue de la prévisibilité et l’automaticité des
activités économiques, de la fluidité de la circulation des biens et services entre ses pays
membres, de la liberté d’entreprendre en son sein, celui-ci est très positif.
En termes de bilan, deux questions restent cependant à poser dans ce cas :
➢ Premièrement, quel est le degré d’appropriation et de mise en œuvre de ce cadre
institutionnel régional pertinent et cohérent au niveau national ?

32
➢ Deuxièmement, quel est l’impact des efforts engagés sur l’évolution des activités
économiques, de la gouvernance et des caractéristiques sociales des populations de la
zone CEDEAO ?
Si la réponse à la seconde question est l’objet de la 2ème partie de notre présentation, la réponse
à la première question nous sert plutôt de conclusion à notre première partie. Cette réponse est
résumée dans le tableau 4 suivant.

Tableau 4 : État de ratification des protocoles et conventions (à la date du 15 novembre


2013)

PAYS Etat de ratification


Nombre de Taux de ratification
du Traité révisé de
Protocoles et des Protocoles et
la CEDEAO Conventions Conventions (en %)
ratifiées
Benin Oui 38/51 75%
Burkina Faso Oui 51/51 100%
Cabo Verde Oui 24/50 47%
Cote d’Ivoire Oui 31/51 61%
Gambie Oui 42/51 82%
Ghana Oui 43/51 84%
Guinée Oui 39/51 76%
Guinée-Bissau Non 24/51 47%
Liberia Oui 25/51 49%
Mali Oui 42/51 82%
Niger Oui 43/51 84%
Nigeria Oui 40/51 78%
Senegal Oui 42/51 82%
Sierra Leone Oui 42/51 82%
Togo Oui 43/51 84%
Source : Rapport Commission Economique de l’UN et CEDEAO (2016)
L’on constate bien que tous les textes régionaux ne sont pas encore transposés dans les textes
de lois nationales, ce qui pose un problème dans la mesure où un texte non transposé dans la
législation nationale n’est pas appliquée.

33
2ème Partie : les impacts de l’intégration régionale au sein de la
CEDEAO

Les gains attendus de tout processus d’intégration régionale sont divers et nombreux. Ainsi, les
arguments ne manquent pas pour justifier les initiatives d’intégration économique régionale. En
effet, les attendus peuvent être politiques, sociaux et économiques. Ces affirmations restent
valables dans le cadre du processus d’intégration régionale au sein de la CEDEAO dont les
gains attendus sont à la fois politique, sociaux et économiques. Mais, parler de gains attendus
est une autre façon de dire les objectifs matériels recherchés. Dans ce cadre, faire le bilan du
processus d’intégration régionale au sein de la CEDEAO, revient également à évaluer l’impact
du processus sur le niveau des principaux indicateurs de ces domaines. Notre présentation des
résultats du processus d’intégration économique régionale au sein de la CEDEAO est organisée
en deux chapitres : les résultats économiques dans un premier et, les résultats politiques et
sociaux dans un second chapitre.

34
Chapitre 3 : Les résultats économiques
Les gains économiques attendus de tout processus d’intégration économique régionale sont
également divers et nombreux engendrant diverses classifications selon l’angle sous lequel l’on
aborde la question. En effet, l’on peut parler de gains statiques et de gains dynamiques d’une
part, de gains liés aux effets d’allocation et de gains liés aux effets d’accumulation d’autre part,
mais également l’on peut parler de gains de court terme, de moyen et de gains de long terme.
Une présentation des résultats de la CEDEAO selon les trois termes temporels mais en mettant
en avant la distinction effets allocation et effets d’accumulation reviendrait à distinguer deux
parties. Dans une première partie elle conduirait à distinguer les effets sur le commerce des
pays membres de la CEDEAO et les effets sur la convergence des prix. Dans une deuxième
partie, elle conduirait à distinguer les effets sur les investissements directs étrangers et les effets
sur la croissance économique des pays membres de de la CEDEAO.
Cependant, je ne présenterai pas les effets de l’intégration régionale au sein de la CEDEAO sur
les prix pour la simple raison que je ne dispose pas des données en la matière et surtout du
temps nécessaire pour faire un bilan complet du processus d’intégration régionale au sein de la
CEDEAO.
Aussi, notre présentation des effets économiques de l’intégration régionale au sein de la
CEDEAO va distinguer les effets sur le commerce, les effets sur les investissements et les effets
sur la croissance des pays membres.

I. Les effets sur le commerce


Les effets d’un processus d’intégration économique sur le commerce peuvent être mesurés à
plusieurs niveaux : sur le volume des échanges mutuels, sur la nature des échanges mutuels sur
la proportion que les échanges mutuels représentent dans les échanges totaux et en termes
d’effets marginaux (impacts structurels) sur les échanges mutuels. Nous présenterons des
indicateurs surtout des effets volume et part du commerce intra régional.
Dans le cas de l’UEMOA et de la CEDEAO, l’analyse des principaux indicateurs commerciaux
et économiques montre que leurs résultats sont faibles. En particulier, l’analyse du volume des
échanges commerciaux intra régionaux montre que celui-ci se situe à un très faible niveau
malgré les efforts engagés. En effet, en 2015, selon les chiffres de la CNUCED, la part des
exportations intra-CEDEAO dans ses exportations totales était de l’ordre de 10,83%, celle de
l’UEMOA 12,62% tandis que celle de l’ASEAN et du MERCOSUR étaient respectivement de
l’ordre de 24,45% et de 13,36%. L’évolution de ces parts sur la période 1995-2015 ne plaide
pas non plus en faveur d’un impact important de l’UEMOA et de la CEDEAO sur le volume
du commerce mutuel de leurs membres (figure 1).

35
Figure 1: Evolutions comparées des exportations intra-groupe CEDEAO, UEMOA, ASEAN et
MERCOSUR, période 1995-2015

30

25

20

15

10

CEDEAO (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest)


UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine)
ASEAN (Association des nations de l'Asie du Sud-Est)
MERCOSUR (Marché commun du Sud)

Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur

De même, l’analyse des importations intra régionales montre une très faible performance de
l’UEMOA et de la CEDEAO. En effet, en 2015, alors que la part des importations intra-groupes
de la CEDEAO était de l’ordre de 9,30%, celle de l’UEMOA était de l’ordre de 8,86% de leurs
importations totales respectives sur la période 1995-2015. Celle de l’ASEAN atteignait les
23,29% et celle du MERCOSUR était à 13,77%. L’analyse de l’évolution de ces parts ne montre
pas une bonne performance de la CEDEAO non plus (Figure 2).

36
Figure 2: Evolutions comparées des importations intra-groupe CEDEAO, UEMOA, MERCOSUR et
ASEAN, période 1995-2015

30

25

20

15

10

2011
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010

2012
2013
2014
2015
CEDEAO (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest)
UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine)
MERCOSUR (Marché commun du Sud)
ASEAN (Association des nations de l'Asie du Sud-Est)

Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur

Cette faiblesse des échanges intra-groupe de la CEDEAO est confirmée par l’analyse de ses
intensités commerciales7. En effet, l’intensité du commerce intra-groupe varie entre 7 et 11,2%
pour la CEDEAO et entre 10 et 13,2% pour l’UEMOA sur la période 1995-2015. Sur la même
période, l’intensité commerciale intra-groupe de l’ASEAN varie entre 18 et 22,4% tandis que
celle du MERCOSUR varie entre 20 et 23,85% (Figure 3). En d’autres termes, la part que
représente le total des exportations et importations intra-CEDEAO est inférieure à 12% de ses
échanges totaux. En outre, l’évolution de cette intensité montre une tendance baissière.
Autrement dit, la part des échanges intra régionaux dans les échanges totaux de la CEDEAO
baisse au fil du temps depuis 2005. Cette situation laisse à penser que de deux choses l’une.
D’un, soit la faible amélioration qui a été apportée aux échanges intra régionaux relève des
reformes de libéralisation unilatérales. De d’eux, soit que les efforts de construction régionale
entrepris au sein de la CEDEAO sont contraints par des facteurs dont l’impact négatif augmente
avec le temps. Cependant, la première interprétation est insatisfaisante dans la mesure où les
pays de la CEDEAO subissent des réformes libérales depuis le début des années 1990 de sorte
que leurs effets négatifs n’auraient pas attendus 15 ans avant de se manifester. La seconde
hypothèse semble donc la plus plausible. Nous continuerons nos réflexions sur cette question
le quatrième jour de ce séminaire avec les défis.

7
L’intensité commerciale intra-zone est le rapport de la somme des exportations et importations intra-zone sur
la somme du total de ses exportations et du total de ses importations.

37
Figure 3: Evolutions comparées des intensités commerciales intra-groupe de la CEDEAO, UEMOA,
ASEAN et MERCOSUR, période 1995-2015

30

25

20

15

10

CEDEAO (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest)


UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine)
MERCOSUR (Marché commun du Sud)
ASEAN (Association des nations de l'Asie du Sud-Est)

Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur

A ce stade de notre raisonnement, il apparaît que malgré les efforts consentis par les pays de
l’UEMOA et de la CEDEAO, ces IER ont eu des impacts très limités sur leur commerce intra-
groupe. Toutefois, ces constats négatifs sont à nuancer lorsque l’analyse porte sur les variations
moyennes des exportations et des importations intra-groupes (tableaux 5, 6 et 7). En effet,
l’analyse de la moyenne des variations des exportations et des importations sur la période 1995-
2015 montre que les performances de l’UEMOA comparées à celles de l’ASEAN et du
MERCOSUR ne sont pas si médiocres. Pour exemple, concernant les exportations, la moyenne
des variations des échanges intra-groupe de 1995 à 2015 est de 1,45% pour l’UEMOA, 1,43%
pour l’ASEAN, 1,42% pour le MERCOSUR contre 1,01% pour la CEDEAO (tableau 5,
colonne 6). Cette relative performance de l’UEMOA s’observe également dans la moyenne des
variations des importations intra-groupe (tableau 6, colonne 6). Cet espoir n’est pas observable
dans l’évolution des intensités des échanges intra-groupe ni de l’UEMOA ni de la CEDEAO
même si les performances de l’UEMOA apparaissent meilleures que celles de la CEDEAO
(tableau 7, colonne 6). Par ailleurs, l’analyse des moyennes des variations des intensités des
échanges intra-groupes, confirment la tendance baissière de ces derniers (tableau 7).
Tableau 5: Moyennes des variations des exportations intra-groupe

Variations moyennes 1996-2000 2001-2005 2006-2010 2011-2015 1995-2015


CEDEAO 0,98 1,02 0,97 1,08 1,01
UEMOA 2,73 1,02 0,97 1,08 1,45
ASEAN 2,72 1,02 1,00 1,00 1,43
MERCOSUR 2,72 0,92 1,05 0,98 1,42
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur

38
Tableau 6: Moyennes des variations des importations intra-groupe

Variations moyennes 1996-2000 2001-2005 2006-2010 2011-2015 1995-2015


CEDEAO 1,10 1,01 0,96 0,99 1,01
UEMOA 2,75 1,01 0,96 0,99 1,43
MERCOSUR 2,73 0,99 0,98 0,96 1,42
ASEAN 2,77 1,03 0,99 0,99 1,45
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur
Tableau 7:Moyennes des intensités commerciales

Moyennes des intensités 1995-2000 2001-2005 2006-2010 2011-2015 1995-2015


CEDEAO 10,21 10,98 9,62 9,04 9,98
UEMOA 11,64 12,16 11,41 10,64 11,47
MERCOSUR 22,39 23,07 23,54 23,05 22,98
ASEAN 20,08 21,05 22,15 20,91 21,00
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur

II. Diversification des échanges mutuels


Le processus d’intégration régionale de la CEDEAO semble avoir eu un impact positif faible
sur la diversification des échanges commerciaux régionaux. Mais, là également l’évaluation
précise de cet impact est difficile étant donné l’existence de l’UEMOA et des mesures de
libéralisation unilatérale des échanges mises en œuvre au cours des programmes d’ajustement
structurel entre 1990 et 1994.

III. Les effets sur les IDE et la croissance des pays


Du point de vue des effets d’accumulation des richesses notamment en termes de flux et de
stocks sortants et entrants des investissements étrangers directs, l’impact de la CEDEAO n’est
guère mieux que ses échanges intra-groupes. En volume, les flux d’investissements étrangers
directs entrant de la CEDEAO et de l’UEMOA restent faibles. En effet, à l’analyse, l’évolution
des flux d’IDE entrant de l’UEMOA et de la CEDEAO montre certes un début d’amélioration
dès 1998 qui s’amplifie à partir de 2004, mais toute cette amélioration reste, en termes absolu
très faible, dans la mesure où le meilleur niveau atteint est inférieur à 20 milliards de dollars
USA en 2011. Cette faiblesse des performances de la CEDEAO est plus visible encore dans
une comparaison avec les flux d’IDE entrants de l’ASEAN et du MERCOSUR (figures 4). En
somme, l’attractivité que devait induire les efforts fournis dans le cadre de la mise en place d’un
cadre institutionnel et juridique automatique et prévisible au sein de la CEDEAO est très faible.
Ce constat est d’autant inquiétant que le volume d’IDE entrants est en baisse depuis 2011. Cela
pourrait suggérer un essoufflement de l’impulsion donnée par la CEDEAO à la capacité
attractive de ses pays membres. Notons toutefois que la baisse du volume des IDE entrants est
constatée également du côté de l’ASEAN et du MERCOSUR, mais la différence avec le cas de
l’UEMOA et de la CEDEAO est que cette baisse se stabilise voire s’inverse à partir de 2012.
Toutefois, la situation financière mondiale suite à la crise de 2007-2008 ainsi que les tendances
de ‘’démondialisation’’ (financière ici notamment) peuvent expliquer au moins en partie cette
situation.
L’analyse de l’évolution des flux d’IDE sortant de la CEDEAO en volume montre une très
faible performance. En effet, les courbes représentatives du volume des IDE sortants pour ces
IER ne décollent guère contrairement à celle de l’ASEAN par exemple (figure 5).
39
La faiblesse relative des flux d’IDE (entrants et sortants) de l’UEMOA et de la CEDEAO en
comparaison à ceux de l’ASEAN et du Mercosur se mesure encore plus en termes de rapport
de volumes (tableaux 8 et 9). Par exemple, en 2015, le volume des flux d’IDE sortant de
l’ASEAN représentait plus de 195 fois celui de l’UEMOA. Tandis que le volume des flux d’IDE
entrant de l’ASEAN représentait plus de 65 fois celui de la CEDEAO. De son côté, le volume
des flux d’IDE entrant du MERCOSUR représentait plus de 8 fois celui des flux d’IDE entrant
de la CEDEAO. Le rapport volume des flux d’IDE sortant du MERCOSUR et de celui de la
CEDEAO est de 1,5 fois.
De même, en termes d’impact sur le stock d’IDE, les performances de l’UEMOA et de la
CEDEAO semblent également très limitées. En effet, la comparaison de l’évolution des stocks
d’IDE entrants et sortants de la CEDEAO et de l’UEMOA d’un côté avec ceux de l’ASEAN et
le MERCOSUR de l’autre montre une grande différence. En particulier, même si à partir de
2002, il y a une tendance à la croissance des stocks d’IDE entrant, cette augmentation semble
plus forte pour l’ASEAN et le MERCOSUR que pour la CEDEAO et l’UEMOA. Il en est de
même, pour le stock d’IDE sortant. En outre, la tendance à la croissance semble moins
prononcée pour l’UEMOA et la CEDEAO que pour l’ASEAN et le MERCOSUR. Dans la
même optique, la comparaison des PIB courants conduit au même constat (figure 6). L’impact
sur le PIB par tête de leurs pays membres semble également faible en termes de volume (figure
7).
La conclusion qui s’impose à la suite de ces analyses en termes de volume est sans équivoque,
du processus d’intégration régionale au sein de la CEDEAO ne semble pas avoir eu un impact
important sur les capacités de ses pays membres en matière d’accumulation de richesses. Mais,
cette conclusion est à nuancer lorsque l’on s’intéresse à la variation relative des flux et stock
d’IDE. En effet, l’analyse comparée des variations moyennes des flux d’IDE entrant de la
CEDEAO, de l’UEMOA du MERCOSUR et de l’ASEAN montre des performances
presqu’égale pour la CEDEAO (1.12%), l’UEMOA (1.13%) et l’ASEAN (1.14%) sur la
période 1995-2015 (tableau 10, colonne 6). Il en va de même pour les Stocks d’IDE entrant
(tableau 11 colonne 6). L’idée que la CEDEAO ont un impact sur les performances des
économies de leurs pays membres est plus visible dans l’analyse comparée des moyennes des
taux de croissance sur la période 1962-1992 d’une part et la période 1993-2015 d’autre part
(tableau 14). L’analyse comparée de ces moyennes montre que les performances des pays
membres de la CEDEAO se sont améliorées entre la période 1962-1992 d’une part et la période
1993-2015 d’autre part tandis que celles des pays membres de l’ASEAN et du MERCOSUR
ont baissé.
Toutefois, la médiocre performance relative de la CEDEAO en matière de flux et de stocks
d’IDE sortant n’est pas démentie par l’analyse des variations moyennes de ces indicateurs sur
la période 1995-2015 (tableaux 9 et 11).

40
Figure 4: Evolutions comparées des flux entrants d'IDE de la CEDEAO, l'UEMOA, le MERCOSUR et
l'ASEAN sur la période 1970-2015

140000

120000

100000

80000

60000

40000

20000

0
1970
1972
1974
1976
1978
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012
2014
-20000

CEDEAO UEMOA MERCOSUR ASEAN

Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur


Figure 5: Evolutions comparées des flux d'IDE sortant CEDEAO, UEMOA, ASEAN, MERCOSUR,
période 1995-2015

90000

80000

70000

60000

50000

40000

30000

20000

10000

-10000

-20000

CEDEAO UEMOA ASEAN MERCOSUR

Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur

41
Tableau 8: Rapport flux IDE entrant ASEAN, MERCOSUR sur flux IDE sortant CEDEAO UEMOA en
2015

Rapport 2015
ASEAN/UEMOA 65,43
ASEAN/CEDEAO 13,37
MERCOSUR/UEMOA 41,55
MERCOSUR/CEDEAO 8,49
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur
Tableau 9: Rapport flux IDE sortant ASEAN, MERCOSUR sur flux IDE sortant CEDEAO UEMOA en
2015

Rapport 2015
ASEAN/UEMOA 195,17
ASEAN/CEDEAO 33,08
MERCOSUR/UEMOA 9,13
MERCOSUR/CEDEAO 1,55
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur
Figure 6: Evolution comparée du PIB courant en dollar US UEMOA, CEDEAO, ASEAN, MERCOSUR,
période 1962-2014

3E+11

2,5E+11

2E+11

1,5E+11

1E+11

5E+10

0
1964
1962

1966
1968
1970
1972
1974
1976
1978
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012
2014

UEMOA CEDEAO ASEAN MERCOSUR

Sources : données Banque Mondiale

42
Figure 7: Evolution comparée du PIB par tête en dollar US UEMOA, CEDEAO, ASEAN, MERCOSUR,
période 1962-2014

14000

12000

10000

8000

6000

4000

2000

0
1962
1964
1966
1968
1970
1972
1974
1976
1978
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012
2014
UEMOA CEDEAO ASEAN MERCOSUR

Sources : données Banque Mondiale


Tableau 10: Moyenne des variations des flux d’IDE entrant

Variations moyennes 1996-2000 2001-2005 2006-2010 2011-2015 1995-2015


CEDEAO 1,04 1,29 1,15 0,99 1,12
UEMOA 1,14 1,11 1,28 1,00 1,13
MERCOSUR 1,38 0,94 1,59 0,98 1,22
ASEAN 1,01 1,19 1,32 1,03 1,14
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur
Tableau 11: Moyenne des variations des flux d’IDE sortant

Variations moyennes 1996-2000 2001-2005 2006-2010 2011-2015 1995-2015


CEDEAO 0,74 -0,13 1,34 1,18 0,78
UEMOA 3,62 -2,22 -0,34 -64,51 -15,86
ASEAN 1,12 1,60 1,38 1,04 1,28
MERCOSUR 1,32 0,81 1,10 4,22 1,86
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur

Tableau 12: Moyenne des variations du stock d’IDE entant 1990-2015

Variations moyennes 1996-2000 2001-2005 2006-2010 2011-2015 1995-2015


ASEAN 1,10 1,13 1,22 1,08 1,13
CEDEAOS 1,07 1,05 1,18 1,11 1,10
UEMOA 1,04 1,15 1,18 1,10 1,12
MERCOSUR 1,22 1,06 1,24 0,96 1,12
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur

43
Tableau 13: Moyenne des variations du stock d’IDE sortant

Variations moyennes 1996-2000 2001-2005 2006-2010 2011-2015 1995-2015


CEDEAO 1,10 1,23 1,23 1,09 1,16
UEMOA 2,79 1,23 1,23 1,09 1,59
MERCOSUR 2,79 1,07 1,13 1,05 1,51
ASEAN 2,77 1,81 1,41 1,56 1,89
Sources : données de la CNUCED et calculs de l’auteur
Tableau 14: Moyenne du taux de la croissance du PIB avant et après 1992
Rubriques 1962-1992 1993-2015
CEDEAO 3,20 3,92
UEMOA 2,81 4,57
ASEAN 5,87 5,70
MERCOSUR 4,74 4,26
Sources : données Banque Mondiale et calculs de l’auteur

En conclusion, les effets accumulation du processus d’intégration régionale au sein de la


CEDEAO restent limités. Son impact structurel reste certes à être mieux mesurer, mais il ne
semble pas encore grandement influencer les performances des économies de cette région
d’Afrique tant en matière de commerce intra régional qu’en termes de PIB et d’IDE.
En conclusion à cette présentation des effets économiques de la CEDEAO, l’on peut dire que
globalement, les résultats de la CEDEAO sont décevants tant en termes de commerce,
d’attraction des IDE que de croissance économique. Cependant, elle a réalisé une percée
importante dans le domaine des transports aériens et de la circulation des capitaux. Ces
jugements sont à mettre en parallèle avec les efforts fournis par les pays membres de la
CEDEAO en matière de construction d’un cadre juridique et institutionnel adéquat. Cette
conclusion semble être confortée par l’évolution de l’inverse du niveau de risque économique
(Figure 6).

44
Figure 6:Evolution comparée de l’inverse du niveau de risque économique sur la période
1985-2013 pour différents processus d’intégration régionale

50,00

45,00

40,00

35,00

30,00

25,00

20,00

15,00

10,00

5,00

0,00

2002
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001

2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
UE-15 CEDEAO-14 COMESA-11 ASEAN-6 MERCOSUR-5
MCAC CAN CEMAC ALENA

Source : données d’ICRG et calculs de l’auteur

Nonobstant ce qui vient d’être dit, il est à noter que sur le plan économique, en dépit du
ralentissement de la croissance économique au niveau mondial, la région CEDEAO a connu
une croissance robuste qui est ressorti à 6,2% en 2014 ; toute chose qui a pu être favorisé par le
processus d’intégration régionale. Cependant, tout doit être fait pour que l’accroissement du
stock de richesse contribue de manière significative à la réduction de la pauvreté dans la région.

45
Chapitre 4 : l’impact de la CEDEAO sur la gouvernance, sécurité et le
social
Globalement, les efforts de la CEDEAO en matière politique et sociale sont appréciables et
importants. Cependant, ces efforts ne semblent pas encore avoir structurellement un impact
positif sur les économies et les sociétés ouest-africaines. A l’instar du domaine économique, les
gains attendus des efforts de la CEDEAO en matière politique et sociale sont nombreux et
divers.

I. Les effets sur la Paix, la Sécurité et la Gouvernance dans les pays


d’Afrique de l’Ouest
Les gains politiques attendus de tout processus d’intégration économique régionale sont très
mal connus. En effet, dans l’analyse économique, deux principaux types de gains politiques
sont mis en avant : la création de biens publics internationaux et les gains stratégiques. Ces
deux types de gains peuvent être de nature et d’importance diverses.
Concernant les biens publics, il s’agit notamment de la paix, de la sécurité et de la gouvernance
dans toutes leurs dimensions et à trois échelles : nationales, régionales et mondiales. La
gouvernance dans sa dimension mondiale se réfère ici aux effets liés à la géopolitique mondiale.
Les gains stratégiques sont les gains liés principalement au pouvoir découlant de la taille de la
région. On peut en distinguer au moins deux types : les pouvoirs de négociation et les effets de
diffusion (ou d’entraînement) des bonnes pratiques en matière de réformes économiques,
sociales et politiques.
Peu de données statistiques existent concernant les pouvoirs de négociation, d’effet de diffusion
des bonnes pratiques ainsi qu’en termes de géopolitiques, aussi, notre présentation des effets
politiques de l’intégration régionale au sein de la CEDEAO va se focaliser seulement sur les
effets sur la sécurité et les effets sur la gouvernance des pays membres.
A. Les effets sur la gouvernance
Nous allons chercher à saisir l’impact du processus d’intégration régionale au sein de la
CEDEAO sur la gouvernance à travers trois types d’indicateurs. Il va être saisi à travers
l’évolution du niveau de responsabilité démocratique dans les pays membres de la CEDEAO
dans un premier temps. Il va également être saisi à travers la nature des changements
démocratiques (indice du risque politique) au sein de la CEDEAO dans un second temps. Enfin,
Il va être saisi à travers la qualité des institutions de lutte contre la corruption par le biais de
l’indice de perception de la corruption au sein de la CEDEAO dans un troisième temps. Ces
indicateurs seront passés en revue à deux niveaux : d’abord en comparaison CEDEAO et
d’autres processus d’intégration régionale de préférence entre pays en développement, ensuite
en absolu dans leur évolution au niveau de chaque pays de la CEDEAO.

46
1. L’évolution de la responsabilité démocratique au sein de la
CEDEAO

a) En termes de comparaison avec d’autres processus


d’intégration régionale
En termes de responsabilité démocratique, les pays membres de la CEDEAO ont connu, en
moyenne, une amélioration. En effet, à l’analyse de l’évolution du niveau moyen de
responsabilité démocratique au sein de la CEDEAO sur la période 1985 à 2013, l’on observe
une certaine amélioration parfois en dent de scie à partir de 1992. Certaines périodes de recul
correspondant à des années spécifiques pour certains pays membres de la CEDEAO comme
1998 (forte tension en Côte d’Ivoire suivi d’un coup d’Etat en 1999), 2001 (forte tension
politique en Côte d’Ivoire suivi d’une rébellion en 2002). En outre, comparée à la situation
d’autres processus d’intégration régionale, l’évolution du niveau de responsabilité
démocratique au sein de la CEDEAO n’est pas la meilleure, mais elle n’est pas la pire non plus
(figure 7).
Figure 7: évolution comparée du niveau de responsabilité démocratique entre divers
processus d'intégration régionale de pays en développement sur la période 1985-2013

6,00

5,00

4,00

3,00

2,00

1,00

0,00
1988

1998
1985
1986
1987

1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997

1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013

CEDEAO-14 COMESA-11 ASEAN-6 MERCOSUR-5


MCAC CAN CEMAC

Source : données d’ICRG et calculs de l’auteur

47
b) En termes d’évolution en absolu
Mais, cette situation d’ensemble cache des disparités importantes en pays membres de la
CEDEAO. En effet, en comparant les évolutions moyennes du niveau de responsabilité
démocratique sur les périodes 1985-1992 d’une part et 1993-2013 d’autre part, l’on constate
que la situation s’est améliorée pour la plupart des pays membres de la CEDEAO à l’exception
notable de la Côte d’Ivoire et du Niger (tableau 11)
Tableau 15: Evolution comparée de la variation moyenne du niveau de la responsabilité
démocratique dans les pays membres de la CEDEAO pour les périodes 1985-1992 et 1993-
2013
Période 1985-1992 1993-2013
Pays
Burkina Faso 1,6 3,0
Côte d'Ivoire 3,1 2,4
Gambie 3,7 3,1
Ghana 1,5 3,7
Guinée 1,1 2,2
Guinée-Bissau 1,0 2,9
Liberia 0,8 3,8
Mali 1,4 3,1
Niger 4,0 3,6
Nigeria 2,3 2,9
Sénégal 2,5 4,0
Sierra Leone 1,9 2,8
Togo 0,9 2,2
Source : données d’ICRG et calculs de l’auteur

En somme, en termes de gouvernance, la situation structurelle des pays membres de la


CEDEAO s’est améliorée (à l’exception de la Côte d’Ivoire, de la Gambie et du Niger) même
si le niveau absolu de la gouvernance de tous les pays reste très médiocre.
Toutefois, notons que les perspectives en matière de démocratie et de bonne gouvernance sont
prometteuses au regard des avancées enregistrées au cours des dernières années. L’accession
au pouvoir par coups d’état est quasi révolue et les seuls cas enregistrés ces dernières années
ont échoué dus à la détermination des Chefs d’Etat de la CEDEAO de faire barrage à
l’imposture.
La culture de démocratie fait son chemin en Afrique de l’Ouest de telle sorte que l’avenir laisse
augurer un environnement politique complètement pacifique et des Etats où il existe la bonne
gouvernance, les valeurs démocratiques, l'égalité des sexes, la justice le respect des droits de
l'homme.

48
2. La qualité des institutions politiques (risque politique)

a) En termes de comparaison avec d’autres processus


d’intégration régionale
L’analyse du niveau inverse du risque politique montre que le risque d’instabilité politique est
relativement plus élevé, en moyenne, au sein de la CEDEAO que dans la plupart des processus
d’intégration régionale entre pays en développement. Mais, surtout, le niveau moyen de
l’inverse du risque politique de la CEDEAO est dans la catégorie risque élevée. En effet, le
niveau inverse du risque politique de la CEDEAO varie entre 44,71% en 1985 et 56,27% en
2006, celui de l’ASEAN varie entre 56,71% en 1989 et 72,97% en 1997, celui du MCAC
(Marché Commun d’Amérique Centrale) varie entre 40,40% en 1986 et 71,20% en 1998. Seul
le COMESA (Marché Commun de l’Afrique de l’Est et Australe) présente un risque pays
moyen aussi élevé que la CEDEAO avec des valeurs extrêmes qui varient de 41,20% en 1991
à 59,98% en 1998 (figure 8).
Figure 8: Evolution comparée de l'inverse du niveau moyen de risque politique au sein de
certains processus d'intégration régionale de pays en développement entre 1985 et 2013

80,00

70,00

60,00

50,00

40,00

30,00

20,00

10,00

0,00
1988

2003
1985
1986
1987

1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002

2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013

CEDEAO-14 COMESA-11 ASEAN-6 MERCOSUR-5


MCAC CAN CEMAC

Source : données d’ICRG et calculs de l’auteur

b) En termes d’évolution en absolu


Mais cette situation générale cache des disparités parfois importantes entre les pays membres
de la CEDEAO. Pour exemple, la Côte d’Ivoire dont le risque politique était le moins élevé sur
la période 1985-1992, a vu sa situation se dégrader fortement sur la période 1993-2013. En
effet, d’un niveau de risque élevé entre 1985 et 1992 (64,17% de l’inverse du niveau de risque
49
politique), la Côte d’Ivoire est passée dans la catégorie risque politique très élevé sur la période
1993-2013 (51,24% de l’inverse du niveau risque politique). Seul le Sénégal a vu sa situation
politique se dégrader sur les deux périodes mais très légèrement de 57,38% sur la période 1985-
1992 à 57,17% sur la période 1993-2013. La situation des autres pays se sont améliorée même
si dans l’ensemble les pays de la CEDEAO restent en majorité dans la catégorie risque politique
très élevé à l’exception de la Gambie et du Ghana (tableau 12).
Tableau 16: Evolution comparée de la variation moyenne du niveau inverse du risque politique dans
les pays membres de la CEDEAO pour les périodes 1985-1992 et 1993-2013

Période 1985-1992 1993-2013


Pays
Burkina Faso 48,71 59,05
Côte d'Ivoire 64,17 51,24
Gambie 61,33 65,81
Ghana 49,38 64,69
Guinée 47,00 49,14
Guinée-Bissau 44,14 50,64
Liberia 23,00 44,07
Mali 38,13 58,93
Niger 51,00 52,05
Nigeria 46,00 46,55
Sénégal 57,38 57,17
Sierra Leone 46,00 48,21
Togo 46,50 50,83
Source : données d’ICRG et calculs de l’auteur

En somme, en termes de risque politique, la situation structurelle des pays membres de la


CEDEAO s’est améliorée (à l’exception de la Côte d’Ivoire et du Sénégal) même si le niveau
absolu du risque politique de tous les pays reste dans la catégorie du niveau risque très élevé
sauf la Gambie et le Ghana qui sont de la catégorie niveau risque politique élevé.

3. Le niveau de perception de la corruption

a) En termes de comparaison avec d’autres processus


d’intégration régionale
A l’analyse, la qualité de la lutte contre la corruption s’est améliorée ces dernières années.
Toutefois, l’évolution de la qualité de la lutte contre la corruption se fait en dent de scie de sorte
qu’il est difficile de considérer que le processus d’intégration régionale au sein de la CEDEAO
ait un impact significatif dans ce domaine. En d’autres termes, le processus d’intégration
régionale au sein de la CEDEAO n’a pas un impact positif significatif dans la lutte contre la
corruption au sein de ses pays membres. Bien que la qualité des institutions de lutte contre la
corruption soit mauvaise pour tous les processus d’intégration régionale de pays en
développement, celle de la CEDEAO est pire sauf par rapport à la CEMAC (Communauté
Economique et Monétaire d’Afrique Centrale). Cela laisse donc penser que même si le
processus d’intégration régionale au sein de la CEDEAO a eu un impact positif sur la qualité
des institutions de lutte contre la pauvreté, celui-ci reste très faible et surtout insuffisant.
50
Figure 9: Evolution comparée de l’indice moyen de perception de la corruption pour divers
processus d'intégration régionale sur la période 1998-2014

90

80

70

60

50

40

30

20

10

0
1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

UE-15 CEDEAO-15 COMESA-11


ASEAN-10 MERCOSUR-5 MCAC-5
CAN-4 CEMAC-6 ALENA-3

Source : données Tranparency International et calculs de l’auteur

b) En termes d’évolution en absolu


Du point de vue de chaque pays membre, bien que la situation soit variable, l’observation de
l’indice de corruption de l’ONG Transparency International, montre que les constats posés au
niveau de la région, en termes de qualité des institutions de lutte contre la corruption, restent
valident (figure 10).

51
Figure 10: Evolution de l'indice de perception de la corruption pour les pays membres de la CEDEAO
entre 2007 et 2016

70

60

50

40

30

20

10

0
2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016

Bénin Burkina Faso Cap-Vert Côte d'Ivoire Gambie


Ghana Guinée Guinée-Bissau Libéria Mali
Niger Nigéria Sénégal Sierra-Leone Togo

Source : données de Transparency International


En somme, la CEDEAO ne semble pas avoir eu un impact positif et significatif sur le niveau
de corruption de ses pays membres.
Qu’en est-il des questions de sécurité ?
B. Les effets sur la sécurité
Nous pourrions chercher à saisir l’impact du processus d’intégration régionale au sein de la
CEDEAO sur la sécurité dans ses pays membres à travers trois types d’indicateurs tel que le
nombre d’actes de violence au sein de la CEDEAO sous différentes formes traduisant différents
types de besoin de sécurité : émeutes et protestations, Violence faite aux civiles, conflits
frontaliers entre Etats membres, actes de tortures, etc. Ces indicateurs pourraient être analysés
à deux niveaux : d’abord en comparaison CEDEAO et d’autres processus d’intégration
régionale de préférence entre pays en développement, ensuite en absolu dans leur évolution au
niveau de chaque pays de la CEDEAO. Toutefois, compte tenu de la disponibilité des données
statistiques et du temps qui nous a été données, nous présenterons seulement les émeutes et ou
protestations en termes absolu.

1. Le nombre d’émeutes et/ou protestations au sein de la CEDEAO


Le processus d’intégration régionale au sein de la CEDEAO ne semble pas avoir un impact
positif sur les questions de sécurité en son sein. En effet l’analyse de l’évolution des émeutes
et/ou protestations violentes menées dans les pays de la CEDEAO sur la période 1997-2016
montre que celles-ci, dans l’ensemble, a un tendance croissante. Pire, les émeutes et/ou
protestations au sein de la CEDEAO semblent même avoir été favorisées par le processus
d’intégration régionale (figure 11).
52
Figure 11: Evolution du nombre total d'émeutes/protestations au sein de la CEDEAO sur la période
1997-2016

1240
1123 1096

674

384
292
95 110 165 180 79 60 82 150 178 60 65 56 91 192

Source : données d’ACLED et calculs de l’auteur


Evidemment, les situations individuels sont fort différentes : entre le Cap-Vert, où de telles
violences n’ont pas été enregistrées et le Nigéria où il y a tout le temps des émeutes et/ou
protestations violentes, il est clair que la situation de la sécurité n’est pas la même. Ce qui pose
également question, puisque le Cap-Vert est-un petit pays (une île) très spécifique qui n’a pas
eu besoin des mécanismes régionaux de gestion de la sécurité pour parvenir à maîtriser celle-ci
au sein de sa population (figure 12).

53
Figure 12: évolution du nombre total d'émeutes/protestations pour quelques pays de la CEDEAO sur la période 1997-2016

Source : données d’ACLED


54
II. Les effets sociaux de la CEDEAO
Concernant l’impact social du processus d’intégration régionale au sein de la CEDEAO, il peut
être appréhendé à travers divers indicateurs qui se complètent plus ou moins comme l’indice
du développement humain (IDH), le niveau d’inégalité de revenu, le niveau d’accès aux
services de base (eau potable, électricité, logement, habillement, alimentation), le niveau de
chômage, le niveau d’emploi précaire, etc. Toutefois, compte tenu de la disponibilité des
données statistiques et du temps qui nous a été données, nous allons nous limiter à présenter
seulement l’évolution de l’IDH.
A. L’IDH moyen de la CEDEAO
Figure 13:évolution de l’indice moyen de l’IDH des pays membres de la CEDEAO sur la période 1990-
2014

CEDEAO
0,5
0,45
0,4
0,35
0,3
0,25
0,2
0,15
0,1
0,05
0
1994

1996
1990
1991
1992
1993

1995

1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014

Source : données PNUD et calculs de l’auteur


A l’analyse on observe une amélioration continue de l’IDH au sein de la CEDEAO et ce depuis
1990, ce qui laisse penser que cette amélioration est structurelle. Toutefois, il est lente car il
passe de 0,3267 en 1990 à seulement 0,4666 en 2014 soit une croissance de 42,822 % sur une
période de 24 ans ; donc une augmentation de moins de la moitié. Autrement dit, l’IDH moyen
de la CEDEAO a été multiplié par seulement 1,43 entre 1990 et 2014.
B. L’IDH des pays membres de la CEDEAO
Le constat régional est conforme à la situation individuelle des pays membres de la CEDEAO
à l’exception notable du Ghana.

55
Figure 14: Evolution de l'IDH des pays membres de la CEDEAO sur la période 1990-2014

0,7

0,6

0,5

0,4

0,3

0,2

0,1

0
1994

2011
1990
1991
1992
1993

1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010

2012
2013
2014
Benin Côte d'Ivoire Gambia Ghana
Guinea Mali Niger Senegal
Sierra Leone Togo

Source : données PNUD

Conclusion
En conclusion, la CEDEAO a réalisé d’importants efforts en matière de conception et de mise
en place d’un cadre institutionnel régional opérationnel, efficace et pertinent. Cependant, la
transposition et l’appropriation de ce cadre régional au niveau national laisse encore à désirer,
mais les réformes institutionnelles et juridiques donnant la primauté des textes régionaux sur
les textes nationaux continuer à porter leurs fruits. Toutefois, les acquis structurels découlant
de ces efforts semblent très faibles même si pour une appréciation plus pertinente il conviendrait
de procéder à des études plus approfondies (analyses économétriques par exemple).
Au-delà, la CEDEAO devra poursuivre la mise en œuvre de son programme d’activité afin
d’aboutir, notamment à:
• l’achèvement de l’Union douanière : rendre effectif le fonctionnement de l’Union
douanière par l’application du Tarif Extérieur Commun (TEC), la suppression des
obstacles à la libre circulation des personnes et des biens et la levée des barrières
non tarifaires ;

56
• la mise en œuvre de l’Accord de Partenariat Economique (APE) signé avec l’Union
Européenne mais de manière à ce qu’il soit équitable, équilibré et axé sur le
développement ;
• l’Intégration monétaire qui consiste en l’harmonisation des politiques économiques
et financières des Etats membres, devant conduire à la création de la monnaie unique
de l’ensemble de la CEDEAO ;
• développement des Infrastructures régionales : impulser la mise en place des plans
d’action adoptés notamment par la mise en œuvre des actions de facilitation définies
dans le programme de facilitation des transports et du transit routier, la libéralisation
effective du transport aérien dans la région ;
• développement agricole : poursuive le processus d’élaboration des programmes
nationaux d’investissement agricole et assurer la mise en œuvre de la Politique
Agricole Commune de la CEDEAO (ECOWAP) ainsi que l’offensive régionale
pour la production alimentaire et la lutte contre la faim.
• la consolidation de la paix et la sécurité : promouvoir le dialogue et la diplomatie
préventive et assurer un leadership dans le renforcement du processus de
démocratisation en Afrique de l’ouest notamment en en Guinée Bissau, en Guinée,
et au Mali, puis la consolidation de la paix et la démocratie.

Bibliographie indicative
Belaouane-Gherar, Sylvie et Gherari Habib (1989) Les organisations régionales africaines :
recueil de textes et documents, Collection Analyses et documents/Ministère de la coopération
et du développement.
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Diversify its Exports´´, The World Economy, Journal Compilation, pp. 1326-1345.
Commission Economique pour l’Afrique (2012) Harmonisation des politiques visant à
transformer l’environnement commercial. Dans Etat de l’Intégration régionale en Afrique
(ARIA VI), Rapport 2013.
Commission Economique pour l’Afrique (2012) Vers une zone de libre-échange continentale
africaine. Dans Etat de l’Intégration régionale en Afrique (ARIA V)., Rapport 2012.
Corden, W.M (1976) ``Customs Unions Theory and Non-uniformity of Tariffs´´, Journal of
International Economics, vol.6, pp.99-106.
Foroutan, Faezeh and Land Pritchett (1993) ``Intra-Sub-Saharn African Trade : is it too
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Goldstein, Andrea (2002) ``Le nouveau régionalisme en Afrique subsaharienne : l’arbre cahe-
t-il la forêt ?´´, Cahier de Politique Economique N°20, Centre de Développement de l’OCDE.
Koné Salif (2012) Is the economic integration between developing countries a singular
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l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest, Rapport.
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58

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