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Séance 5 : La primauté
***
Questions :
➔ Définition : primauté. La notion de primauté fait référence « pour une source de droit
dans la hiérarchie des normes, [à une] autorité supérieure d’où résulté parfois, pour la
norme qui en est dotée, la vocation à s’appliquer, en cas de contrariété, de préférence
à une norme inférieure »1. Ainsi, la question de la primauté est intimement liée à la
question de hiérarchie des normes.
➔ Hiérarchie des normes : de quoi parle-t-on ? L’admission d’une hiérarchie entre les
différentes normes juridiques n’est pas d’une évidence absolue. Si la réflexion est plus
aisée dans un ordre juridique donné (exemple : droit interne, la loi est supérieure aux
décrets) l’enjeu est plus délicat concernant l’articulation entre les ordres juridiques.
Particulièrement, c’est l’interrogation du règlement de conflit entre une norme de droit
1
Cornu G., Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, 12 ed. mise à jour, 2018, p.804
international ou de l’Union européenne (ci-après droit de l’UE) avec une norme de de
droit interne.
Question doctrinale par essence, cet enjeu mobilise le débat entre les conceptions
dualiste et moniste des systèmes juridiques.
- Selon la doctrine dualiste (ou pluraliste), les systèmes juridiques international et interne
sont indépendants, séparés et donc égaux. => Pas de supériorité de principe, les conflits
se règlent par les principes très généraux du droit (notamment, application de la norme
la plus récente).
- La doctrine moniste plaide pour l’unité des systèmes juridiques => Donc il y a une
hiérarchie entre les diverses composantes. L’ensemble des ordres juridiques constitue
alors un système ordonnancé, cohérent avec une hiérarchie.
Il conviendrait d’ailleurs de se référer aux monismes en raison d’une pluralité de
courants. Cette doctrine reposant sur une hiérarchie implique donc une primauté qui
diffère selon les écoles de pensées, selon les auteurs :
- Principe traditionnel selon lequel le droit international prime sur le droit interne des
Etats. Une telle conception constitue une victoire de la doctrine moniste.
- La primauté du droit international est reconnu de longue date (doc. 1, 1874), bien avant
l’existence des communautés.
Extrait : « To this the undersigned will remark that in such a case a treaty is superior to the constitution,
which latter must give way. The legislation of the republic must be adapted to the treaty, not the treaty to
the laws »
Dans cette affaire, la Colombie a prétendu que les dispositions de sa Constitution l’empêchaient de
respecter les termes d’un traité conclu avec les Etats-Unis. La sentence arbitrale condamne cette
conception (extrait ci-dessus)
Autres exemples, solutions similaires : SA, 15 sept. 1872, États-Unis d’Amérique c/ Royaume-Uni, affaire
de l’Alabama ; SA, 1928, Georges Pinson, Arbitre Verzjil, ONU, RSA, V, 327
Lien avec le document 2 : CPJI, 25 mai 1926, Rec., série A, n°07, Certains intérêts allemands en
Haute Silésie
Citation pertinente : « Au regard du droit international et de la Cour qui en est l’organe, les lois nationales
sont de simples faits, manifestations de la volonté et de l’activité des États, au même titre que les décisions
judiciaires ou les mesures administratives. »
Dans l’extrait présenté, l’affaire affaire concerne la conformité d’une loi polonaise à la Convention de
Genève.
Plusieurs leçons sont à tirer de cette décision :
- Affirmation de la primauté du droit international sur la loi
- Contrôle de validité indirect de l’acte juridique interne. Contrôle limité à sa validité du droit
international (contrôle de conformité)
- Le juge international a un pouvoir limité concernant les règles d’un ordre juridique différent du
sien (droit interne). Il n’a ni le pouvoir d’interpréter ni d’annuler la norme de droit interne. Le
juge international peut seulement contrôler la conformité du droit interne et, le cas échéant,
condamner un Etat.
Autres exemples, solutions similaires : CPJI, 17 août 1923, Rec., série A, affaire du Vapeur
« Wimbledon », p. 29-30 ; CPJI, Rec., avis consultatif du 31 juil. 1990, série B, n°17, affaire des
communautés gréco-bulgares, p.32
Solution repris par la CIJ : CIJ, 28 nov. 1958, Rec., Pays-Bas c. Suède, p.65
Article 103
En cas de conflit entre les obligations des Membres des Nations Unies en vertu de la présente Charte et
leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront.
De manière liminaire, cet article a pour objet de consacrer la primauté de la Charte de l’ONU. Plusieurs
réflexions peuvent être entamées :
- Dans une perspective moniste (normativiste), cet article permettrai de considérer la charte de
l’ONU comme « la constitution de la société internationale »2. Un parallèle avec les normes du
jus cogens pourrait être établi mais ne relève pas de notre matière.
- Limitation de la primauté : cet article pose une règle de conflit et la sanction constitue
uniquement l’inopposabilité (pas de nullité).
- Limitation rationae materiae : cet article s’intéresse uniquement aux autres accords
internationaux (traités, convention etc.) et non au droit international général.
- N’a pas vocation à s’appliquer au droit de l’UE.
Lien avec le document 4 : CEDH, 30 janvier 1998, n° 19392/92, Parti communiste unifié de Turquie
et autres c. Turquie
Extrait : « l’organisation institutionnelle et politique des Etats membres doit-elle respecter les droits et
principes inscrits dans la Convention. Il importe peu, à cet égard, que se trouvent en cause des dispositions
constitutionnelles […] ou simplement législatives »
Autre exemple, solution similaire : CEDH, 28 oct. 1999, Zielinski et Pradal et Gonzales et autre c/ France,
RUDH, 1999, pp. 301-311
2
Carreau D., « Traité international », Répertoire de droit international, Septembre 2010 (actualisation : Avril
2019), pp. 90 et s.
III. La primauté du droit de l’UE
- Peut se définir (à tort) comme un principe de supériorité du droit de l’UE sur le droit
interne des Etats membres.
- D’une manière plus nuancée, la primauté intéresse la question de l’articulation entre
le droit de l’UE et les droits nationaux des Etats membres.
Lien avec le Document 12 : CJUE, 22 février 2022, RS, 430/21
§52 « la Cour détient une compétence exclusive pour fournir l’interprétation définitive du
droit de l’Union »
§53 « que le principe de primauté du droit de l’Union impose au juge national […] d’assurer
le plein effet des exigences de ce droit dans le litige dont il est saisi en laissant au besoin
inappliquée, de sa propre autorité, toute réglementation ou pratique nationale, même
postérieure, qui est contraire à une disposition du droit de l’Union d’effet direct »
§93 « le principe de primauté du droit de l’Union, doit être interprété en ce sens qu’il
s’oppose à une réglementation ou à une pratique nationale permettant d’engager la
responsabilité disciplinaire d’un juge national au motif que celui-ci a appliqué le droit de
l’Union, tel qu’interprété par la Cour, en s’écartant d’une jurisprudence de la cour
constitutionnelle de l’État membre concerné incompatible avec le principe de primauté du
droit de l’Union. »
Apport de l’arrêt. Il ne peut pas être reproché au juge d’avoir appliqué le droit de
l’Union, notamment la primauté, au détriment de son droit national
(constitutionnel). La responsabilité du juge ne peut pas être engagée pour ce motif.
➔ La primauté du droit de l’UE est tout d’abord une consécration prétorienne (doc. 5)
Lien avec le document 5 : CJCE, 15 juillet 1964, Costa/ENEL, 6/642)
Extrait : « impossibilité pour les Etats de faire prévaloir, contre un ordre juridique accepté par eux sur
une base de réciprocité, une mesure unilatérale ultérieure ». sous peine de « mettre en péril la réalisation
des buts du traité »
➔ La primauté est générale. Elle bénéficie, par principe, à toutes les normes bénéficiant
d’un caractère obligatoire ou produisant des effets de droit (Traités, législation dérivée
dont Règlements et Directives, décisions)
➔ La primauté est absolue. Elle s’impose, par principe, à toute norme nationale quelque
soit sa place dans la hiérarchie ou son moment d’édiction. Ainsi, le droit de l’UE est
supérieur aux normes constitutionnelles des États membres (document 6)
Lien avec le document 6 : CJCE, 17 décembre 1970, Internationale Handelsgesellschaft, Aff. 11/70
(Extraits)
Extrait : Un principe. « le droit né du traite, issu d’une source autonome, ne pourrait, en raison de sa
nature, se voir judiciairement opposer des règles de droit national quelles qu’elles soient, sans perdre son
caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base juridique de la communauté elle-même ».
Ainsi, « l’invocation d’atteintes portées, […] aux principes d’une structure constitutionnelle nationale, ne
saurait affecter la validité d’un acte de la communauté ou son effet sur le territoire de cet État »
- Le droit de l’UE prime également sur la Constitution des États membres. Solution est donc
similaire à celle du droit international (point commun !)
Extrait : Une exception : « il convient toutefois d’examiner si aucune garantie analogue, inhérente au droit
communautaire , n’aurait été méconnue ».
Ainsi, « le respect des droits fondamentaux fait partie intégrante des principes généraux du droit dont la
cour de justice assure le respect », « la sauvegarde de ces droits, tout en s’inspirant des traditions
constitutionnelles communes aux états membres, doit être assurée dans le cadre de la structure et des
objectifs de la communauté »
Articulation entre droit communautaire et droits fondamentaux. Il faut rechercher s’il y a, dans le
droit communautaire, des équivalents aux droits fondamentaux ou aux principes généraux afin d’en
garantir leur respect.
L’arrêt CJCE, 5 févr. 1963, van Gend & Loos, aff. 26/62 définissait déjà le principe
de le principe de la primauté par l’« Impossibilité pour les États de faire prévaloir,
contre [le droit communautaire], une mesure unilatérale ultérieure »
C. Reconnaissance de la primauté
La primauté du droit de l’UE reprend certes des solutions similaires au droit international mais
s’en distingue par la spécificité de son ordre juridique. En effet, la primauté est une «
condition existentielle »3 du droit de l’UE.
- Ordre juridique sui generis de l’UE : Arrêt CJCE, 5 févr. 1963, van Gend & Loos, aff.
26/62 « la Communauté constitue un nouvel ordre juridique de droit international, au
profit duquel les États ont limité, bien que dans des domaines restreints, leurs droits
souverains et dont les sujets sont non seulement les États membres mais également leurs
ressortissants »
L’ordre juridique de l’UE ne peut pas avoir la qualification d’ordre juridique
international ni celle d’ordre juridique interne. L’UE n’est en effet ni une OI ni un E
fédéral. Donc, originalité de cet ordre juridique. Caractères :
3
Pescatore P., Le droit de l’intégration, Émergence d’un phénomène nouveau dans les relations internationales
selon l’expérience des Communautés européennes, Bruylant, 1972, réed. 2005
➔ 1. Autonomie de l’ordre juridique de l’E par rapport au droit des E membres et au droit
international
➔ 2. Importance et étendue du pouvoir normatif des institutions de l’UE.
2. Articulation avec le droit national : caractère intégré du droit de l’UE
Découlant de l’ordre juridique autonome, le droit de l’UE se distingue par son intégration en
droit interne. L’intégration est entendu comme la « pénétration » du droit de l’UE en droit
interne
- L’ordre juridique international n’est pas internalisé par le droit national : les interactions se
limitent aux règles de conflits de normes, au contrôle de conventionnalité par le juge (point
commun avec le droit de l’UE) et aux condamnation par les juges internationaux
- Au contraire, le droit de l’UE pénètre dans le droit interne des Etats membres
- Applicabilité direct des règlements (art. 288 TFUE) : poursuite du point précédent, les
règlements sont directement applicables aux Etats et résidents de l’UE dès leur entrée en
vigueur, sans action requise de la part des Etats membres
- Obligation de transposer les directives (ibid.) : les Etats membres doivent transposer les
directives du droit de l’UE dans un délai imparti. Les Etats membres doivent alors poursuivre
une procédure (législative la plupart du temps) et édicter un acte transposant la directive dans
leur droit national. Les Etats membres ont une marge de manœuvre dans la transposition. Les
directives définissent un niveau d’harmonisation. Distinction entre harmonisation minimale
et maximale. Non-respect des délais ou absence de transposition : sanctions et recours en
manquement (art. 258 TFUE).
- La question préjudicielle (art. 267 TFUE) : compétence exclusive du juge de l’union pour toute
interprétation des règles du droit de l’UE. Obligation des juges nationaux de transmettre
toute question préjudicielle. Interprétation uniforme du droit de l’union
D’autres pays feront pareil à différentes époques (France, Espagne, Pologne pour citer
les principaux).
Notamment, en France : Cons. consti décision concernant la loi pour la confiance dans
l’économie numérique (2004) et la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins
dans la société de l'information (2006). Intéresse la notion de l’identité constitutionnelle.
- Par principe, incompétence du juge de contrôler la constitutionnalité d’une loi de
transposition relevant d’une obligation constitutionnelle (art. 88-1), à moins que celles-
ci soient contraires à une disposition expresse de la Constitution.
Primauté à relativiser :
- Absence de primauté dans les compétences purement internes (Etats membres) même
si elles se raréfient.
- Lien entre primauté et effet direct (document 8)
La relativisation de la primauté peut entraîner des atteintes
Lien avec le document 8 : CJUE, 24 juin 2019, Poplawski, 573/17
Cet arrêt permet de présenter globalement l’articulation entre primauté et effet direct. La CJUE précise sa
position concernant les directives.
§60 « Le principe de primauté du droit de l’Union ne saurait dès lors aboutir à remettre en cause la
distinction essentielle entre les dispositions du droit de l’Union disposant d’un effet direct et celles qui en
sont dépourvues, ni, partant, à instaurer un régime unique d’application de l’ensemble des dispositions
du droit de l’Union par les juridictions nationales. »
§61. « tout juge national, saisi dans le cadre de sa compétence a, en tant qu’organe d’un État membre,
l’obligation de laisser inappliquée toute disposition nationale contraire à une disposition de droit de
l’Union qui est d’effet direct dans le litige dont il est saisi (voir, en ce sens, arrêts du 8 septembre 2010,
Winner Wetten, C 409/06 »
§62. « En revanche, une disposition du droit de l’Union qui est dépourvue d’effet direct ne peut être
invoquée, en tant que telle, dans le cadre d’un litige relevant du droit de l’Union, afin d’écarter
l’application d’une disposition de droit national qui y serait contraire »
La CJUE cite notamment la charte des droits fondamentaux de l’UE dans le §63.
§67. « même claire, précise et inconditionnelle, une disposition d’une directive ne permet pas au juge
national d’écarter une disposition de son droit interne qui y est contraire, si, ce faisant, une obligation
supplémentaire venait à être imposée à un particulier »
Application de l’exception aux directives. Contrairement aux règlements qui sont directement
applicables dans les Etats membres (art. 288 TFUE) la directive ne possède par un tel effet et
nécessite une transposition par les Etats membres (même art.)
Cet affaire, dite Taricco II est la suite de l’affaire Taricco I (Quelle révélation !). De manière très brève,
Taricco I constitue une affirmation classique de la primauté en appliquant – sans la citer – les
enseignements de l’arrêt Simmenthal : c’est-à-dire l’inopposabilité des dispositions nationales contraire au
droit de l’union.
Seulement, les dispositions concernées dans cette affaire sont très particulières : il s’agit de délai de
prescription en matière pénale, liée inévitablement au principe de légalité des délits et des peines. Ainsi,
Taricco I avait pour conséquence d’écarter la prescription en matière fraude. Les infractions devenaient
alors imprescriptibles.
Limitant ostensiblement la portée de l’arrêt Taricco I, la CJUE utilise une réflexion poussée (poussive ?)
pour déterminer l’importance du principe de légalité des délits et des peines dans l’ordre juridique de l’UE
et dans les ordres juridiques nationaux. Sont notamment invoqués : la Charte des droits fondamentaux de
l’Union, la Conv. EDH et la jurisprudence de la Cour EDH.
In fine, la Cour revient sur l’arrêt précédent en écartant le droit de l’union. Ainsi, la primauté du droit
de l’UE peut céder devant certaines normes constitutionnelles ou droits fondamentaux (avec une
base juridique suffisamment solide).
§5. « tout en consacrant l'existence d'un ordre juridique de l'Union européenne intégré à l'ordre juridique
interne, dans les conditions mentionnées au point précédent, l'article 88-1 confirme la place de la
Constitution au sommet de ce dernier »
§6. « il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen tiré de la méconnaissance d'une disposition ou
d'un principe de valeur constitutionnelle, de rechercher s'il existe une règle ou un principe général du
droit de l'Union européenne qui […] garantit […] l'effectivité du respect de la disposition ou du principe
constitutionnel invoqué. Dans l'affirmative, il y a lieu pour le juge administratif, afin de s'assurer de la
constitutionnalité de l'acte réglementaire contesté, de rechercher si la directive que cet acte transpose ou
le règlement auquel cet acte adapte le droit interne est conforme à cette règle ou à ce principe général du
droit de l'Union […] En revanche, s'il n'existe pas de règle ou de principe général du droit de l'Union
garantissant l'effectivité du respect de la disposition ou du principe constitutionnel invoqué, il revient au
juge administratif d'examiner directement la constitutionnalité des dispositions réglementaires
contestées. »
Reprise du raisonnement tiré de l’arrêt Arcelor en 2007. A titre indicatif, cet arrêt est
régulièrement surnommé « Arcelor II ».
Contrôle par équivalence. Articulation entre contrôle de constitutionnalité et conventionnalité.
Le juge, saisi du contrôle d’un acte de transposition doit chercher une équivalence. Si le principe
constitutionnel est garantie en droit de l’UE, le juge doit effectuer un contrôle de conventionnalité
de l’acte. Dans le cas contraire, un contrôle de constitutionnalité.
Globalement respectueux de l’ordre juridique autonome de l’UE, même s’il a pour effet indirect
de vérifier la constitutionnalité d’une directive.
§7. « s’il est saisi par le défendeur d'un moyen, […] tiré de ce qu'une règle de droit national, alors même
qu'elle est contraire à la disposition du droit de l'Union européenne invoquée dans le litige, ne saurait
être écartée sans priver de garanties effectives une exigence constitutionnelle, il appartient au juge
administratif de rechercher s'il existe une règle ou un principe général du droit de l'Union européenne qui
[…] garantit […] l'effectivité de l'exigence constitutionnelle invoquée. Dans l'affirmative, il lui revient
[…] d'écarter cette argumentation avant de faire droit au moyen du requérant, le cas échéant. Si, à
l'inverse, une telle disposition ou un tel principe général du droit de l'Union n'existe pas ou que la portée
[…] n'est pas équivalente à celle que la Constitution garantit, il revient au juge administratif d'examiner
si, en écartant la règle de droit national au motif de sa contrariété avec le droit de l'Union européenne, il
priverait de garanties effectives l'exigence constitutionnelle dont le défendeur se prévaut et, le cas échéant,
d'écarter le moyen dont le requérant l'a saisi. »
Nouvel enseignement de l’arrêt. Malgré une contradiction avec le droit de l’UE, le juge
administratif peut écarter la primauté de l’UE (ayant pour effet l’inopposabilité ou l’annulation
de l’acte) au profit du droit national en cas de contrariété d’une garantie constitutionnelle non ou
insuffisamment protégée par le droit de l’UE.
Assure la primauté de la Constitution et – de manière détournée – réfute l’application du droit de
l’UE et sa primauté.
§8. « contrairement à ce que soutient le Premier ministre, il n'appartient pas au juge administratif de
s'assurer du respect, par le droit dérivé de l'Union européenne ou par la Cour de justice elle-même, de la
répartition des compétences entre l'Union européenne et les Etats membres. »
Sur le contrôle ultra vires : il faut un « excès de compétence […] suffisamment caractérisé. Pour qu’un
excès de compétence suffisamment caractérisé puisse être constaté, la violation des compétences par la
puissance publique de l’Union doit être manifeste, et l’acte contesté doit entraîner dans le système de
répartition des compétences entre les États membres et l’Union un glissement structurellement significatif
aux dépends des États membres. »
Contrairement à son homologue polonais, la Cour allemande repose son contrôle sur des critères
précis.
Le contrôle n’est alors pas arbitraire.
Relativisation de la primauté
« Le contrôle d’actes ultra vires doit être exercé avec retenue et d’une manière ouverte au droit européen.
L’interprétation et l’application du droit de l’Union, y compris la détermination de la méthode à y
appliquer, appartiennent en premier lieu à la Cour de justice »
« il n’appartient pas à la Cour constitutionnelle fédérale de substituer son interprétation à celle opérée
par la Cour de justice lors de questions d’interprétation du droit de l’Union »
« Article 1, first and second paragraphs, in conjunction with Article 4(3) of the Treaty on European Union
[…] enters “a new stage” in which:
a) the European Union authorities act outside the scope of the competences conferred upon them by the
Republic of Poland in the Treaties;
b) the Constitution is not the supreme law of the Republic of Poland, which takes precedence as regards
its binding force and application;
c) the Republic of Poland may not function as a sovereign and democratic state »
Le point c) est très intéressant car il permet de faire le lien avec le document 13, particulièrement les
développements sur la démocratie. Selon le tribunal polonais, les actes de l’UE ferait priverait de sa
substance la démocratie et la souveraineté de l’Etat polonais.