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Réanimation 13 (2004) 471–476

http://france.elsevier.com/direct/REAURG/

Mise au point

Stratégie diagnostique des lésions traumatiques du rachis cervical


Diagnosis of cervical spine trauma
O. Robert a, C. Savry b,*, M. Freysz c
a
DAR, hôpital des Chanaux, 71000 Macon, France
b
Réanimation polyvalente, centre hospitalier Bretagne Sud, 56322 Lorient cedex, France
c
DAR, hôpital général, CHU de Dijon, 21033 Dijon cedex, France
Reçu et accepté le 23 août 2004

Résumé

Les lésions cervicales post-traumatiques ont une fréquence variable en fonction de la violence du traumatisme (3 à 30 %) et augmentent
avec l’âge. Les signes cliniques sont souvent trompeurs ce qui justifie un large recours à l’imagerie radiologique. Une stratégie fondée sur la
clinique, les circonstances traumatiques et l’âge doit permettre un choix raisonné de l’imagerie, stratifié en fonction du risque de lésion
traumatique du rachis cervical. Un patient, conscient, sans intoxication, sans signe neurologique focal, sans autre lésion associée et sans
cervicalgie spontanée ou provoquée par la palpation des apophyses épineuses ne justifie pas d’examen radiologique. Dans les autres cas,
l’imagerie est indispensable et le choix existe entre des radiographies standards et une tomodensitométrie hélicoïdale. La tomodensitométrie
a une meilleure sensibilité que les clichés standards dans la détection des fractures et des luxations cervicales. Elle permet de préciser les
lésions constatées sur les clichés standards ou explorer les zones difficiles d’accès (charnières). Elle est utile en première intention chez les
patients dont le risque de lésion cervicale est élevé : patient traumatisé inconscient, polytraumatisés, traumatisme crânien sévère, troubles
neurologiques focaux, traumatisme à cinétique élevée, âge supérieur à 50 ans. L’IRM est un examen de 2e intention, justifié en cas d’irritation
médullaire à TDM normale et en cas de doute sur lésion discoligamentaire ou vasculaire. L’instabilité ligamentaire est dépistée par des clichés
dynamiques, à distance du traumatisme.
© 2004 Société de réanimation de langue française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

The frequency of cervical injuries varies with the trauma violence (3 to 30 %) and increases with age. Because clinical signs are often
misleading, radiological evaluation must frequently be performed. A strategy based on clinical signs, traumatic causes, and age can allow a
reasoned choice of cervical spine imaging according to the determination of fracture risk. Some patients with no midline cervical tenderness,
no focal neurological deficit, normal alertness, not intoxicated, and not painful with no distracting injury do not need radiological examination.
In the other cases, cervical spine imaging is essential. We have the choice to perform standard radiographs or helical CT-scan. CT-scan has a
better sensibility than standard radiographs to detect cervical fractures or luxations and allows to explore the cervical spine lesions difficult to
see (hinges). CT scan is necessary in first intention among patients at high risk of cervical lesions : unconscious traumatized patients, severe
cerebral lesions on the CT-scan, multiple trauma, high energy traumatism with age older than 50. RMN is necessary in second time in case of
medullar irritation with normal CT-scan or if a vascular or disco-ligamentary lesion is suspected. The diagnosis of ligamentar instability can
justify dynamic radiographs, at distance of traumatism.
© 2004 Société de réanimation de langue française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Rachis ; Cervical ; Traumatisme ; Diagnostic

Keywords: Cervical; Spine; Trauma; Diagnosis

* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : c.savry@ch-bretagne-sud.fr (C. Savry).

1624-0693/$ - see front matter © 2004 Société de réanimation de langue française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.reaurg.2004.08.008
472 O. Robert et al. / Réanimation 13 (2004) 471–476

1. Introduction atteinte médullaire, un examen périnéal (sensibilité et toni-


cité du sphincter anal) est indispensable. Une lésion médul-
La fréquence des lésions cervicales post-traumatiques laire (section, sidération...) peut se révéler par un arrêt car-
(LCPT) est variable selon la nature du traumatisme : 2 à 3 % diorespiratoire (C0→C4), une tétraplégie flasque avec ou
de l’ensemble des patients traumatisés, 15 % en cas de sans conservation d’une autonomie respiratoire, une sidéra-
blessure du cou et 30 % en cas de traumatisme crânien grave tion sympathique avec hypertonie parasympathique relative
[1,2]. De diagnostic parfois difficile, le risque est d’ignorer (bradycardie–hypotension) [8], une béance du sphincter anal
une LCPT instable dont les conséquences fonctionnelles [4]. Le résultat de l’examen neurologique doit être consigné
peuvent être dramatiques [3]. La prudence impose donc par écrit et le score ASIA calculé [4]. Il doit être renouvelé
l’immobilisation systématique du rachis cervical par un col- régulièrement (évolutivité des lésions). Le diagnostic clini-
lier cervical rigide dès la prise en charge initiale d’un patient que de lésion médullaire est aisé lors de circonstances évo-
traumatisé [4]. En fonction des circonstances traumatiques, catrices chez un patient conscient. En revanche, le diagnostic
de l’âge et de l’examen clinique, une investigation radiologi- est difficile chez un patient comateux chez qui une atteinte
que adaptée doit être réalisée à la recherche d’une LCPT. rachidienne doit être systématiquement évoquée jusqu’à
preuve radiologique du contraire. Les syndromes incomplets
doivent attirer l’attention car ils peuvent témoigner d’une
2. L’examen clinique LCPT instable (tétraparésie, atteinte radiculaire cervicale).
Une hémiplégie peut être la conséquence d’une luxation
L’examen clinique doit être complet, structuré et précis. Il occipitoatlantoïdienne ou d’une dissection carotidienne trau-
recherche les circonstances de l’accident, une blessure du matique. Une atteinte isolée des nerfs crâniens peut être la
cou, une douleur cervicale, des troubles des fonctions supé- conséquence d’une luxation atlanto-occipitale [9]. La pré-
rieures, des signes neurologiques focaux (incluant des signes sence de lésions associées graves (polytraumatisme, trauma-
d’irritation médullaire) et des lésions associées. Les circons- tisme du bassin, fractures multiples de membre) témoigne
tances habituelles sont les accidents de la voie publique (en d’un traumatisme à cinétique élevé (donc à risque de LCPT)
particulier à haute énergie) et les accidents de sports (ski, et peut perturber l’examen cervical. La menace du pronostic
rugby, sports de contact, plongeon en eau peu profonde) [5]. vital immédiat (rupture de rate en état de choc par exemple)
La conférence d’expert et différentes études ont défini un peut conduire à surseoir provisoirement au bilan radiologi-
accident à cinétique élevée : éjection de la victime, chute de que cervical initial sous réserve d’une immobilisation cervi-
3 m (5 m pour la conférence d’expert), accident avec hyper- cale soigneuse et d’une technique d’intubation de la trachée
extension ou hyperflexion du rachis [4]. On peut rajouter préservant la rectitude de l’axe tête–cou–tronc.
d’autres éléments d’appréciation (intérêt de l’équipe
SMUR) : passager décédé dans le même véhicule, déforma-
tion du véhicule, absence de casque, port de ceinture de 3. Examen radiologique
sécurité, vitesse estimée. Le risque lié à la vitesse est variable
selon les études : il augmente pour une vitesse supérieure à L’examen clinique guide l’investigation radiologique per-
50 km h–1 dans l’étude américaine intégrant les circonstances mettant le diagnostic d’une LCPT. Les clichés standards
traumatiques dans la stratégie diagnostique [6] et pour un (CS) et la tomodensitométrie hélicoïdale (TDM) sont les
seuil de 100 km h–1 dans l’étude canadienne [7]. deux examens de première intention. Le recours à la remno-
La présence d’une lésion au niveau du cou peut d’emblée graphie (IRM) vertébromédullaire ou à une exploration vas-
attirer l’attention : torticolis, contracture, érosion, ecchy- culaire est parfois nécessaire. Les CS dynamiques ne sont pas
mose, hématome de la région cervicale. La douleur cervicale, recommandés à la phase précoce [4].
spontanée ou provoquée, est quasi constante mais peut être
masquée par des troubles de conscience associés ou par une 3.1. Clichés standards
douleur distractive. En l’absence de signes cliniques locaux
chez le patient conscient de moins de 65 ans et en dehors de Historiquement, il s’agit de l’examen de première inten-
circonstances traumatiques à risque, certaines équipes tion. Le bilan standard comprend trois incidences : cliché de
conseillent d’évaluer en plus la capacité de rotation volon- face, cliché de face bouche ouverte et cliché de profil.
taire de la tête (45°) [7]. En présence de troubles de cons- D’autres incidences peuvent être pratiquées (incidences obli-
cience (d’origine traumatique, toxique), l’examen clinique ques, de 3/4) [10], mais elles sont de réalisation difficile, avec
perd sa fiabilité alors que le risque de LCPT est supérieur à un bénéfice faible dans la détection de lésion supplémentaire
celui des patients conscients [6,7]. et l’intérêt de leur utilisation en routine n’a pas été démontré
Une atteinte médullaire doit être soigneusement recher- [11,12].
chée. L’examen neurologique comprend l’étude de la motri- Comparés à la TDM, les CS ont les avantages de la
cité volontaire, de la sensibilité (superficielle, profonde et simplicité, d’un accès technique aisé et d’une irradiation
subjective), des réflexes ostéotendineux, des signes d’atteinte moindre [13]. Cependant, la qualité des images, souvent
pyramidale, des nerfs crâniens. En cas de doute sur une médiocre, est source de difficultés d’interprétation. Les cau-
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ses, multifactorielles, incluent d’abord un mauvais dégage- porter le diagnostic d’atteinte discoligamentaire ou médul-
ment des charnières cervicales puis des superpositions de laire isolée [4].
matériel (sonde d’intubation..), des incidences radiologiques
3.3. IRM
non strictes, une non coopération du patient. Ainsi les CS
sont de mauvaise qualité chez 36 et 50 % des sujets cons- L’IRM est un examen de deuxième intention en raison de
cients [14,15] et chez plus de 90 % des traumatisés incons- contraintes techniques et de disponibilité. Elle est de moindre
cients [16]. Les principaux critères de qualité des CS sont les performance que la TDM dans la détection de fractures mais
suivants : cliché de profil strict dégageant la base de l’occiput est l’examen de choix dans les lésions médullaires, discoli-
jusqu’au bord supérieur de D1 ; cliché de face strict montrant gamentaires et des tissus mous [23,24]. La validité de l’exa-
les apophyses épineuses de C2 à D1 ; cliché de face bouche men pour le diagnostic de lésions ligamentaires est néan-
ouverte dégageant les masses latérales de C1 et l’odontoïde moins discutable car les ligaments sont couramment non
dans sa totalité [17]. L’imagerie standard dégage mal les visualisés chez le sujet sain [25].
condyles, les articulations occipitoatlantoïdienne voire C1–
C2 justifiant une TDM systématique de la charnière cervicale 3.4. Explorations vasculaires
haute chez le traumatisé crânien grave [18,19]. Enfin la Certains signes cliniques comme un déficit moteur hémi-
technique est inadaptée au diagnostic d’atteinte discoliga- corporel avec une TDM encéphalique normale, peuvent faire
mentaire isolée. Par conséquent, si la sensibilité est de l’ordre discuter d’une atteinte vasculaire et requérir une exploration
de 100 % chez le sujet conscient avec une qualité d’image adaptée. Les techniques d’évaluation peuvent être non inva-
optimale, on note, chez le traumatisé grave, entre 20 et 40 % sives (écho-doppler) ou faire appel à une injection de produit
de faux négatifs dont 50 % de fractures instables [1,19,20]. de contraste au premier rang de laquelle l’angioscanner est la
Reste le problème d’interprétation des CS qui est fréquem- plus accessible. L’angioIRM, moins disponible, donne des
ment réalisée par un médecin non spécialiste et qui expose à images plus fines de l’atteinte vasculaire et peut renseigner
une sous estimation des lésions [16]. précocement sur des lésions ischémiques cérébrales poten-
tiellement associées. L’artériographie reste la méthode de
3.2. Tomodensitométrie hélicoïdale référence.
3.5. Clichés dynamiques
La réalisation d’une TDM du rachis cervical est actuelle-
ment aisée dans beaucoup d’établissements de santé. L’ac- Les CS et la TDM sont réalisés en condition statique et ne
quisition en coupes fines de l’ensemble du rachis cervical est permettent pas le diagnostic d’instabilité ligamentaire. Le
rapide et le traitement informatique des données permet des diagnostic dépend de clichés dynamiques réalisés en flexion
reconstructions coronales et sagittales à partir des coupes ou en extension, après des clichés statiques par un médecin
natives. expérimenté. Les manœuvres, idéalement guidées par un
Elle offre une qualité d’examen constante sous réserve orthopédiste ou un neurochirurgien, doivent être interrom-
d’une immobilisation parfaite. Elle permet une visibilité de pues en cas de douleurs ou d’apparition de signes neurologi-
l’ensemble du rachis cervical. De plus l’examen est inter- ques [26]. Si ces manœuvres ne sont pas recommandées en
prété par un médecin spécialiste. Il offre une sensibilité et phase précoce, elles restent indispensables à distance au
une spécificité maximales pour le diagnostic de fractures ou moment de la décharge.
de luxations. Les données de la littérature sont néanmoins
discordantes et dépendent de l’évolution technologique de 4. Stratégie diagnostique
l’imagerie scanographique. En effet, les TDM de première
génération ont un mode d’acquisition incrémentale (coupe Le consensus est difficile sur la stratégie d’investigation
par coupe) et une rapidité limitée ne permettant pas la réali- radiologique du rachis cervical traumatique. Les pratiques
sation de reconstructions. Les TDM de dernière génération différent selon les équipes [6,7,27–30], et plusieurs recom-
(multibarettes) permettent l’analyse en coupes fines avec une mandations ont été récemment publiées [4,17]. La comparai-
grande rapidité et la réalisation de reconstructions multipla- son entre différentes approches cliniques est toujours sujette
naires augmentant la sensibilité diagnostique (étude du mur à controverse comme en témoigne une étude récente très
postérieur). Les carences de la TDM il y a quelques années discutée [31–33].
[20,21], ne sont donc plus d’actualité [2,22]. Les autres Deux questions se posent : premièrement, existe-t-il des
avantages de la TDM concernent le patient polytraumatisé où situations cliniques à bas risque permettant de se passer de
elle s’intègre dans le bilan lésionnel exhaustif. Enfin, elle l’imagerie ; deuxièmement, existe-t-il des critères de choix
permet un accès à l’angioscanner en temps réel en cas de pour utiliser en premier intention les CS ou la TDM.
doute sur une dissection carotidienne (patient avec hémiplé- 4.1. Existe-t-il des situations cliniques à bas risque
gie post-traumatique et TDM encéphalique initiale normale) justifiant de l’absence de bilan radiologique ?
ou vertébrale. Restent les problèmes de disponibilité de la
technique, du rayonnement délivré (supérieur à la radiologie Deux études comprenant de très larges effectifs ont étudié
conventionnelle) [13]. Enfin cet examen est inadapté pour cette question [7,27]. Ces deux approches ont fait l’objet
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d’une étude comparative [31] aux résultats très controversés, tion scanographique pour d’autres régions du corps et il y a
[32,33]. Les critères de Hoffman, repris par la conférence avantage à associer d’emblée une TDM du rachis cervical.
d’expert, sont : une conscience normale (score de Glasgow Par ailleurs, les CS sont de mauvaise qualité chez ces patients
≥ 14), une absence de troubles des fonctions neurologiques non coopérants, difficiles à mobiliser, et la TDM a une
supérieures, une absence d’intoxication susceptible de modi- fiabilité diagnostique nettement plus importante dans ces cas.
fier l’examen (alcool, morphiniques, drogues...), une absence L’équipe de Blackmore et al. s’est plus particulièrement
de lésion traumatique douloureuse associée, une absence de penchée sur cette question avec deux études : l’une définis-
déficit neurologique focal, objectif ou subjectif, une absence sant les catégories à risques selon des critères neurologiques,
de douleurs cervicale postérieure spontanée ou à la pression de cinétique et d’âge (seuil de 50 ans) [6], la suivante éva-
des apophyses épineuses cervicales jusqu’à D1 [4,27]. Ce- luant le rapport coût efficacité (prévention des cas de paraly-
pendant, même si ces critères ont été éprouvés avec succès sie) de l’utilisation de la TDM/CS selon les risques trauma-
sur une énorme population (34 069 patients sur 21 centres), tiques classés en trois catégories : élevé, moyen, faible [36].
ces seules données cliniques ne prennent pas en compte les D’après l’étude de Blackmore et al. [6,36,37], le risque élevé
circonstances traumatiques ni l’âge qui semblent être des concerne les patients porteurs d’un traumatisme crânien sé-
facteurs de risques associés importants [6,7,31,34]. La pré- vère et/ou d’un déficit neurologique focal et/ou victimes d’un
sence de circonstances traumatiques, impliquant notamment accident à cinétique élevée (vitesse environ > 50 km h-1 )
une cinétique élevée (d’appréciation variable selon les étu- avec un âge > 50 ans ce qui correspond à un risque de fracture
des) conduit à proposer de prendre en compte ce facteur dans du rachis compris entre 11 et 31 %. Le risque moyen (proba-
l’abstention éventuelle d’un bilan radiologique [6,7]. Enfin, bilité de fracture voisin de 5 %) concerne les patients de
le facteur âge semble avoir, à lui seul, une influence sur la moins de 50 ans présentant un traumatisme à haute énergie
survenue d’une lésion rachidienne. La limite est cependant ou ceux de plus de 50 ans présentant un traumatisme de
variable selon les études : 50 ans [6], 65 ans [7,34], avec un moyenne énergie (vitesse < 50 km h-1 ). Le risque faible
facteur aggravant particulier à partir de 75 ans [34]. Ces (probabilité de LCPT ≤ 2 %) est défini par un traumatisme de
arguments ont été mis en avant pour expliquer, dans l’étude moyenne énergie chez le patient de moins de 50 ans ou un
comparative canadienne de Stiell et al. [31], la meilleure traumatisme à énergie faible. Ainsi, comparativement au coût
sensibilité relevée de l’association — critères cliniques (sta- du handicap moteur potentiel, faire une TDM première est
économiquement rentable dans la catégorie à risque élevé
tiques et dynamique par la rotation volontaire de la tête)
[36], économiquement déficitaire mais avec une prévention
+ absence de circonstance traumatique favorisante + âge
importante des paralysies dans le groupe à risque modéré.
inférieur à 65 ans [31,33]) — sur les seuls critères cliniques
L’intérêt clinique devient très faible dans la dernière catégo-
statiques proposés par Hoffman [27]. Cependant, la diffé-
rie pour un surcoût (trop) important. Les auteurs recomman-
rence de sensibilité relevée pour le groupe « critères cliniques
dent la TDM dans les deux premières catégories [36].
seuls » est importante entre l’étude princeps de Hoffman
(99 %) et celle de Stiell (90,7 %), ce qui fait l’objet de 4.3. Pour une stratégie d’imagerie raisonnée
craintes sur la conduite de l’étude comparative avec une
controverse sur la validité du résultat [33]. La discussion Une stratégie tenant compte des différents résultats peut
reste donc ouverte. être élaborée, fondée sur les signes cliniques locaux et géné-
raux (en particulier neurologiques), les circonstances trau-
4.2. CS ou TDM en première intention ? matiques et l’âge. Cette proposition de stratégie est illustrée
Fig. 1.
Tous les cas échappant au cadre infra doivent impérative- L’exploration radiologique fait appel à :
ment bénéficier d’une exploration radiologique. La supério- • des CS si le risque de LCPT est faible ;
rité de la TDM sur les CS étant établie, la tendance est de • une TDM si le risque de LCPT est moyen ou élevé. Une
recourir largement à la TDM. Cependant, pour des raisons TDM cervicale se justifie par ailleurs chez le patient
économiques, de disponibilité et d’irradiation, le choix de cet traumatisé inconscient (fréquence de LCPT élevée et CS
examen doit aussi être raisonné. La logique veut que les de mauvaise qualité), pour préciser une lésion visible sur
patients à haut risque lésionnel puissent bénéficier d’une les CS (doute, confirmation, extension), ou chez un patient
TDM première. devant bénéficier d’une TDM d’une autre région du corps
Cette notion de risque de LCPT a été définie dans plu- (le traumatisé grave). Enfin un patient présentant manifes-
sieurs travaux [6,7,25,35,36]. Elle comprend des critères tement des signes d’irritation médullaire post-traumatique
cliniques, des circonstances traumatiques ainsi que l’âge. La doit bénéficier d’une TDM à la recherche d’une urgence
conférence d’expert définit ces patients à hauts risques selon chirurgicale. En cas de TDM normale, l’IRM recherchera
une approche clinique : traumatisme crânien, déficit neurolo- une atteinte médullaire isolée ;
gique post-traumatique attribuable à une lésion médullaire • une IRM devant un déficit neurologique avec cervicoarth-
ou radiculaire, fractures multiples, victimes polytraumati- rose et/ou canal médullaire étroit sans lésion de nature
sées [4]. Ces critères sont reconnus dans la plupart des traumatique et pour contrôler les réductions par traction
travaux [6,7,36]. Ces patients justifient déjà d’une explora- des fractures luxations du rachis cervical ;
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Fig. 1. Proposition de stratégie d’exploration radiologique initiale des traumatismes du rachis cervical (d’après [4,6,7,27,36]).

• des CS dynamiques ou une IRM en cas de doute sur une ques et de l’âge. Elle a fait l’objet de très larges études ce qui
atteinte discoligamentaire avec CS et/ ou TDM normale. permet de la rendre applicable sur le terrain. Par la hiérarchi-
sation des pratiques d’examens complémentaires en adaptant
la sensibilité des examens au risque lésionnel, on peut effec-
5. Conclusion tuer efficacement un dépistage optimal tout en ayant une
utilisation rationnelle des techniques toujours plus perfec-
Le traumatisme du rachis cervical est très fréquent et
tionnées dont nous disposons.
potentiellement grave par les conséquences fonctionnelles
d’une lésion médullaire qu’il peut entraîner [35]. Cela justifie
un bilan radiologique large mais adapté visant d’abord à
limiter au maximum le risque de lésion passée inaperçue.
C’est aussi une situation clinique à risque d’excès dans la Références
prescription d’examen complémentaire. Pour répondre à ces
deux écueils, le trop et le trop peu, une stratégie fondée sur le
risque lésionnel peut être proposée. Elle est fondée sur les [1] Gerbeaux P, Portier F. Stratégies d’imageries des traumatismes du
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