Vous êtes sur la page 1sur 75

Ecrire l’histoire environnementale du Jardin du Roi

(1626-1789)

Jan Synowiecki – Université de Caen (HisTeMé UR 7455)


Séminaire « Muséum , objet d’histoire »
Muséum d’histoire naturelle
Jeudi 13 avril 2023
I. Un jardin au service de l’acclimatation et
de la conservation de la nature
Pierre Poivre,
intendant de l’île de
France (1766-1772)
Philibert Commerson Bernardin de Saint-
(1727-1773) Pierre (1737-1814)
Jardin de
Pamplemousses
(île Maurice)
I. Un jardin au service de l’acclimatation et
de la conservation de la nature

´ 1. De la notion de conservation
La plûpart des matieres végétales & animales seches, comme feuilles, racines,
viperes, & cloportes séchées, &c. les poudres, sont sur-tout exposées à cette
altération, par la multiplicité des surfaces qu’elles présentent à l’air. On doit donc
tenir toutes ces substances dans des lieux secs & dans des vaisseaux bien
bouchés, ou des boîtes exactement fermées. L’importance de cette méthode
est très-sensible, par la comparaison des plantes seches que les herboristes
gardent en plein air dans leurs boutiques, & de celles qui ont été soigneusement
serrées dans des boîtes ; les premieres, quelque exactement qu’elles ayent été
desséchées, deviennent noires, molles, à demi-moisies ; les dernieres au contraire
sont aussi vertes & aussi saines qu’au moment qu’on les a renfermées. On doit
aussi principalement tenir dans un lieu sec certaines tablettes sujettes à se ramollir
par l’humidité de l’air, comme celles de diacarthami, de citron, &c. & les poudres
dans lesquelles il entre du sucre. Les sels déliquescens qu’on veut garder sous la
forme seche, tels que la pierre à cautere, la terre foliée, &c. doivent être sur-tout
scrupuleusement préservées de toute communication avec l’air, toûjours assez
humide pour les faire tomber en liqueur.
Denis Diderot et Jean le Rond d’Alembert (dir.), Encyclopédie ou Dictionnaire
raisonné des sciences, des arts et des métiers, 1751, t. IV, p. 38-42.
´ « le seul moyen d’y remédier serait de dessécher les
grains et d’arrêter, même de détruire les principes de
fermentation et de corruption dépendant de l’humidité
qu’ils contiennent »
´ Archives nationales, 127 AP 63, Dossier « 1785. Mémoire
sur la conservation des grains, par Fougeroux de
Bondaroy », n° 1, « Premier mémoire sur la conservation
des grains au moyen des étuves, par M. Fougeroux de
Bondaroy »
Jean Henri Samuel
Formey (1711-1797)
Conserver et multiplier

´ « Combien d’expériences à faire pour trouver des règles


certaines sur les différentes manières de multiplier, de
rendre précoces ou tardives et de conserver les espèces
de fleurs et des fruits par les tailles, les transplantations,
les engrais et les arrosages. »
´ Bibliothèque centrale du Muséum national d’histoire
naturelle (BCMNHN), ms. 284, « Discours prononcé le 27
mai 1720 ».
Conserver pour augmenter les
richesses de l’État
´ « […] car les richesses d’un état ne se soutiennent pas
par elles-mêmes, elles ne se conservent & s’augmentent
qu’autant qu’elles se renouvellent par leur emploi dirigé
avec intelligence. » :
´ François Quesnay, « Grains », in Denis Diderot et Jean le
Rond d’Alembert (dir.), Encyclopédie…, op. cit., 1757,
t. VII, p. 830.
´ « L’herbe & les forêts des pays les plus éloignés &
inhabités contribuent à notre conservation, ainsi que
nous contribuons à la leur »
´ Jan Ingenhousz, Expériences sur les végétaux,
spécialement sur la propriété qu’ils possèdent à un haut
degré, soit d’améliorer l’air quand ils sont au soleil, soit
de le corrompre la nuit, ou lorsqu’ils sont à l’ombre, Paris,
Didot, 1780, p. XIV.
Une naturalisation par degrés

´ « [L’arbre de cire de la Louisiane et de la Caroline] pourroit


peut-être réussir dans nos provinces méridionales, surtout si on
l’y amenoit par degrés, en le laissant passer par d’autres pays
d’une température plus analogue à son pays natal, & en
cueillant de la graine venue dans ce pays, qui donneroit des
arbres plus robustes & moins délicats que ceux venus dans
leur pays natal. »
´ Jacques Lacombe, Encyclopédie méthodique. Arts et métiers
mécaniques, Paris, Panckoucke, 1789, t. VI, p. 394.
I. Un jardin au service de l’acclimatation et
de la conservation de la nature

´ 1. De la notion de conservation
´ 2. Les serres au Jardin du Roi : une conservation sous
tension
Jean-Baptiste Hilair, Jardin du Roy. Les serres, 1794, Dessin à la
Jean-Baptiste
plume Hilair,
et encre de Chine,Jardin du Roy.
aquarelle Les serres,
et rehauts de 1794,
blanc,Dessin
17,4 x à25la
plume et encre
cm, BNF, de Chine, Estampes
département aquarelle et
et photographie,
rehauts de blanc, 17,4 x 25
RESERVE
cm, BNF, département Estampes et photographie,
FOL-VE-53 RESERVE
(F), gallica.bnf.fr.
FOL-VE-53 (F), gallica.bnf.fr.
´« les substances solides, liquides, gazeuses, et les
fluides impondérables indispensables à la vie
des plantes »
´André Thouin, Cours de culture et de
naturalisation des végétaux, vol. I, Paris, Mme
Huzard et Deterville, 1827, p.198.
L’imperfection des serres

´ « Ce qui empêche les curieux de cultiver les plantes


étrangères, c’est la difficulté de les conserver, soit
qu’on ait des serres ou qu’on en ait point ; quand
on n’a pas la commodité d’en avoir, les Plantes les
moins délicates périssent par les froids & les mauvais
temps de l’hiver ; & quand on en a, elles sont pour
l’ordinaire si mal construites, que les plantes sont
étouffées & empoisonnées par la vapeur du
charbon de terre. »
´ Richard Bradley, Le Calendrier des jardiniers, avec
la description d’une bonne serre ; ou Conseils de M.
Bradley, Paris, Lamy, 1783 [1e éd. 1743], p. 149.
Jean-Baptiste Hilair, Jardin du Roy. Les serres, 1794, Dessin à la
plume et encre de Chine, aquarelle et rehauts de blanc, 17,4 x 25
cm, BNF, département Estampes et photographie, RESERVE
FOL-VE-53 (F), gallica.bnf.fr.
Jean-Baptiste Hilair, Jardin du Roy. Les serres, 1794, Dessin à la
Jean-Baptiste
plume et encreHilair, Jardin
de Chine, du Roy.etLes
aquarelle serres,de1794,
rehauts Dessin
blanc, 17,4 xà 25
la
plume
cm, et encre
BNF, de Chine, aquarelle
département Estampesetetrehauts de blanc,
photographie, 17,4 x 25
RESERVE
cm, BNF, département Estampes et photographie,
FOL-VE-53 RESERVE
(F), gallica.bnf.fr.
FOL-VE-53 (F), gallica.bnf.fr.
L’humidité des serres

´ « employé dix huit journées à enlever & transporter dans


les massifs des nouvelles rampes de la glacière 15
pouces de terre prise derrière la serre des ananas pour
éloigner l’humidité de ce lieu qui la communiquait à la
serre voisine. »
´ AN, O1 21251, « Mémoire de la dépense que j’ai faite
pour le Jardin du Roy depuis le 1er juillet jusqu’et compris
le dernier septembre 1777 ».
AN, AJ/15/511, n° 432. Plan des serres en
construction, environ 1789-1790.
Agrandir ou entretenir ?

´ « Les applaudissements qu’il [Buffon] a reçus d’avoir


fait une collection si immense, luy ont fait naître des
projets pour rendre les autres parties du jardin aussi
somptueuses, et dans cette idée nos serres étant
condamnées à être détruites, les réparations n’y sont
presque plus, on les laisse tomber en ruine. La moitié
du jardin reste inculte et il se fait une sorte de
désertion dans nos plantes à cause du défaut
d’entretien, dont les fonds passent à celuy du
cabinet. »
´ BCMNHN, ms. 1934, dossier XXII, « Exposition de l’état
actuel du Jardin du Roy par Antoine de Jussieu ».
De la dégénérescence de la nature
´ « Effectivement toutes nos serres chaudes ne doivent
être considérées que comme des lieux destinés à
reculer plutôt qu’à conserver quelques individus plus
ou moins languissants, plus ou moins dégradés,
parce qu’on est forcé de les tenir dans de petits
vases et de les tailler souvent pour les empêcher
d’occuper une trop grande étendue. De là il arrive
qu’une partie de ces végétaux et surtout parmi les
arbres, ne fleurissent jamais et que s’ils peuvent
suffire pour l’étude de la botanique, ils sont cultivés
en pure perte pour les progrès de la naturalisation. »
´ BCMNHN, ms. 1934, dossier XXXI, « Notes pour servir
à l’histoire du jardin du Roi sous l’administration de
Buffon. Thouin. 1788 ».
I. Un jardin au service de l’acclimatation et
de la conservation de la nature

´ 1. De la notion de conservation
´ 2. Les serres au Jardin du Roi : une conservation sous
tension
´ 3. Serres et climat(s)
Micro-géographie des variations
climatiques
´ « Les gros Tulipiers du Jardin du Roy n’ont pas souffert, mais les
jeunes sont morts aux Chartreux ; il en a été de même des
Lauriers-tulipiers. Je n’ai perdu aucun arbre de Judée, quoique
j’en eusse de forts petits, il en a été de même au Jardin du
Roy, cependant il en est mort plusieurs jeunes aux Chartreux ;
les gros pins n’ont pas souffert, mais les petits sont presque tous
morts, j’en ai seulement réchappé quelques-uns de ceux
qu’on appelle le Pin maritime ; l’Arbousier, moyennant une
légère couverture, a résisté dans le Jardin des Chartreux, mais
il est mort dans celuy du Roy, jusqu’aux racines, qui ont
repoussé au Printemps ; les gros Barba-Jovis ont résisté au
Jardin du Roy, mais les petits ont péri & au Jardin du Roy & aux
Chartreux ; tous les Chèvrefeuilles même celui qui est toujours
verd, ont résisté, ils ont seulement perdu beaucoup de menues
branches. »
´ Henri-Louis Duhamel du Monceau, « Observations botanico-
météorologiques pour l’année 1740 », in Histoire de
l’Académie royale des sciences…, op. cit., 1741, p. 156.
´ « de la zone torride », des
« zones tempérées » ou des
« païs froids »
´ Michel Adanson, Familles des
plantes, Paris, Vincent, 1763,
p.124.
L’« inconséquence » des serres
´ « Cette manière de considérer les plantes montre même
quelle quantité de feu on doit accorder ou refuser à
toutes les herbes méridionales qu’on veut conserver dans
les régions du nord pendant les froids de l’hiver : elle nous
montre aussi l’inconséquence de loger dans une même
serre une variété étonnante de plantes de différents
climats qui demandent à Paris, par exemple, divers
degrés de feu conservateur, en sorte que leur limite
assignée sur les thermomètres est une borne factice
qu’on doit varier selon les différents climats des plantes
qu’on veut conserver. »
´ Jean-Louis Giraud-Soulavie, Histoire de la France
méridionale. Seconde partie. Les végétaux, Paris, Quillau,
Merigot l’aîné et jeune et Belin, Paris, 1782, t. I, p. 177.
´ « Ainsi la zone torride, quoique près d’une fois plus petite
que les deux zones tempérées, prises ensemble, produit
autant de plantes, & presque une fois davantage
qu’elles, à proportion de l’étendue du terrain ; elle est
donc la plus variée dans ses productions végétales, & les
tempérées paroissent être les plus fertiles & les plus
abondantes par la somme totale de ces mêmes
productions. »
´ Michel Adanson, Familles des plantes, op. cit., p. 54.
II. Agrandir le Jardin du Roi, un enjeu
environnemental

´ 1. La conservation de la salubrité du jardin versus la


circulation dans la ville
Jean-Baptiste Hilair, Jardin du Roy. Les serres, 1794, Dessin à
Jean-Baptiste Hilair,de
la plume et encre Jardin du Roy.
Chine, Les serres,
aquarelle 1794, Dessin
et rehauts à la
de blanc,
plume
17,4 xet
25encre
cm, de Chine,
BNF, aquarelle Estampes
département et rehauts et
de photographie,
blanc, 17,4 x 25
cm, BNF, départementRESERVE
Estampes et photographie,
FOL-VE-53 RESERVE
(F), gallica.bnf.fr.
FOL-VE-53 (F), gallica.bnf.fr.
Jean de La Caille,
Description de la
ville et des
fauxbourgs de
Paris en vingt
planches, Paris,
Jean de La Caille,
1714.
´ Hôtel de Vauvray
´ Pierre Perreau
´ Girardin de Vauvray
´ Nicolas Joseph Foucault, marquis de Magny
« On ne peut se dissimuler qu'elle est [l'école de botanique]
la plus belle d'Europe et qu’elle est perdue si cet
établissement des fiacres qui entraîne avec lui l’air le plus
infecte pour les fumiers, l’urine croupie des chevaux, les
établissements des maréchaux pouvoit avoir lieu. Aucunes
plantes étrangères n’y résisteroient, et le moindre
inconvénient sera de voir cet établissement désert. »
Lettre d’Amelot de Chaillou à Necker, 24 août 1779. AN, O1
420, p. 286-287.
II. Agrandir le Jardin du Roi, un enjeu
environnemental

´ 1. La conservation de la salubrité du jardin versus la


circulation dans la ville
´ 2. Des nuisances aux pollutions
(…) « il résulte de toutes ces circonstances que les eaux servant à
préparer les boyaux coulent le long du ru qui passe devant plusieurs
maisons, et qu'en mêlant dans l'eau presque stagnante de la rivière
elles doivent répandre dans tous les environs et la puanteur et la
corruption. Que cet inconvénient doit se faire sentir à proportion des
chaleurs et dans tous les changements de temps. Le S. de Buffon
directeur du jardin royal des plantes s'est plaint en particulier que
l'odeur se porte sur ce jardin à un degré assez considérable et fort
incommode pour ceux qui fréquentent cette école de botanique. »
AN, Y 9480A, Commissaire Lemaire, Rapport fait par Lemaire à
l'audience de police du 13 juin 1777.
´ Les amidonneries, les carreleurs et les potiers, « dont les
fours engloutissent ce quartier de fumée de charbon de
terre insupportable »
´ AN, AJ/15/514, n° 640, « Projet d’embellissement du
Jardin du Roy et du faubourg Saint-Marcel de Paris », f° 1.
II. Agrandir le Jardin du Roi, un enjeu
environnemental

´ 1. L’urine et le fumier
´ 2. Des nuisances aux pollutions
´ 3. « On veut enfermer, ombrager, infecter le Jardin du
Roi »
« On veut enfermer, ombrager, infecter le Jardin du Roi
en plaçant tout auprès de tous les chevaux et voitures
des fiacres de Paris »
Georges-Louis Leclerc, Comte de Buffon,
Correspondance générale, Paris, Le Vasseur, 1884-1885,
t. XIII, p. 436-437.
« Les plantes ombragées par les bâtiments élevés ou par
d’autres plantes ne s’acquittent pas de ce devoir, c’est-
à-dire n’améliorent pas l’air, mais au contraire exhalent
un air malfaisant et répandent un vrai poison dans l’air qui
nous environne. »
Jan Ingenhousz, Expériences sur les végétaux,
spécialement sur la propriété qu'ils possèdent à un haut
degré, soit d'améliorer l'air quand ils sont au soleil, soit de
le corrompre la nuit, ou lorsqu'ils sont à l'ombre, Paris,
Théophile Barrois le jeune, 1787, t. 1.
« Indépendamment de ces différentes
substances [l’eau de pluie et les sels] qui
sont étrangères à l’air, on ne sauroit
douter que ce fluide [l’air] lui-même
n’entre en proportion très considérable
dans la texture des végétaux, & qu’il ne
contribue pour beaucoup à en
constituer les parties solides ».

Antoine Lavoisier, « Premier mémoire sur


la nature de l’eau, et sur les Expériences
par lesquelles on a prétendu prouver la
possibilité de son changement en terre
», in HARS, Paris, Boudot, 1770, p. 78.
´ « mettre dans les appartements où l’on voudroit qu’il régnât
un air toujours pur, des plantes dont la végétation absorbe
ce mauvais air ».
´ Journal de Paris, vendredi 29 janvier 1779, p. 113-114.
´ « Seul un jeune curé, accompagné de quelques enfants envoyés de la
province, ainsi que de leur mère, tous joyeux, gravissaient comme nous, entre
des arbres et des arbustes indigènes et exotiques, le chemin qui montait en
spirale vers la partie la plus élevée du jardin d’où l’on jouit d’une vaste vue sur
une grande étendue de la ville et de la région. […] Nous aurions été étonnés
par les immenses réserves de bois si nous n’avions pas vu, par la même
occasion, la fumée des milliers de cheminées qui exigent une quantité énorme
de combustible. Mais comme le soleil devenait brûlant, nous abrégeâmes nos
observations et redescendîmes à l’ombre de grands buis vers la partie basse du
jardin ; il y avait là une section nouvelle comprenant un long étang, divisé sur les
quatre côtés en étroites plates-bandes de fleurs et arbustes exotiques. À
l’extrémité du jardin la vue dégagée s’étend sur la Seine, avec ses
bateaux-bains, hauts de deux étages. Comme ils servent à des fins de santé,
ces bateaux ne sauraient occuper une place plus appropriée car, après le
bain, on peut venir respirer dans le jardin botanique le parfum d’un millier de
plantes médicinales. […] C’eût été une bien triste transition que de quitter
Buffon pour aussitôt s’engouffrer dans une voiture exiguë et parcourir des rues
étroites. Il convenait beaucoup mieux de marcher à l’air libre, pour encore
demeurer, en quelque sorte, sous les ailes de son génie, et contempler depuis
les hauteurs du jardin une grande partie de la nature dont il parvient presque à
embrasser toute la divine grandeur. J’avais ressenti à peu près la même chose
en Savoie alors que je m’éloignai du Mont Blanc. »
´ Sophie von La Roche, Journal d’un voyage à travers la France. 1785, Saint-
Quentin de Baron, Les Éditions de l’Entre-deux-mers, 2012, p. 127-128.
III. Des visions différentes de l’espace et de
l’environnement

´ 1. Contester les nuisances


´ « Le Roi règne par les loix, sa volonté n’est point un
caprice. En respectant la propriété des particuliers il fait
respecter ses droits et les loix. Une des plus sacrées est
celle de la propriété. Sa Majesté à son avènement au
trône a annoncé l’intention où elle étoit de n’y donner
aucune atteinte, et ce seroit enfreindre cette loi
respectable que de gêner l’exercice du droit des
propriétaires en les empêchant de bâtir. »
´ AN, AJ/15/513, n° 534, f° 4-5.
´ Arrêt du Conseil du 19 octobre 1671
´ Ordonnance du 9 avril 1672
´ « Non seulement elle a cherché à prévenir ces inconvéniens, mais elle a
voulu que les Etablissemens qu’elle formeroit devinssent utiles au voisinage
par l’abondance d’eau qu’ils pourroient procurer dans les cas de
sècheresse & surtout d’incendie. […] L’établissement de la rue de Seine S.
Victor, diffère de celui du faubourg S. Denis, en ce qu’il est beaucoup plus
vaste. Du reste il offre les mêmes avantages du côté de la salubrité & dans
les cas d’incendie. La machine de M. Bralle devenoit d’autant plus
nécessaire rue de Seine, que le terrein est méphitique à un degré
étonnant, ce qui provient de ce que c’étoit anciennement des marais.
L’automne dernier on s’occupa du curement & de la réparation de cinq
puits qui y existent ; & dont on cherchoit à tirer parti. Il étoit impossible d’y
pénétrer ; les lumières s’y éteignoient à trois pieds de la surface du terrein,
& les tentatives auroient coûté la vie aux Ouvriers sans la prudence de M.
Siguy. La Compagnie s’adressa à M. Cadet de Vaux, & du moment où ce
Physicien y eût placé son appareil pneumatique, ces puits devinrent
praticables. »
´ Journal de Paris, 1er mai 1782, p. 482-483.
´ Première proposition de Buffon : 83 500 livres => rejetée
´ L’intérêt du particulier « cède à la vérité à l’intérêt public, mais il est
dédommagé, et l’état le rembourse de la valeur du bâtiment ou du
terrein qu’il est forcé d’abandonner. » (AN, AJ/15/513, n° 534, f° 5.)
´ Les entrepreneurs demandent le remboursement des frais d’acquisition,
équivalant à 164 000 livres, des droits de lots, des indemnités déboursées
ainsi que des matériaux qu’ils ont amassés pour la somme de 40 000 livres
´ édit de Turgot (février 1776)
´ Arrêt du Conseil du Roi du 30 octobre 1779 garantissant « l’étendue de la
vue, la salubrité de l’air et les bonnes influences du soleil levant » (AN,
AJ/15/513, n° 540 bis).
´ En 1785, les fiacres acceptent de vendre leur marais au Roi pour la
somme de 33 598 livres (une somme bien inférieure à celle demandée…)
(AN, O1 426, p. 85-86 et AN, O1 128, p. 409-416.)
III. Des visions différentes de l’espace et de
l’environnement

´ 1. Contester les nuisances


´ 2. Bataille sur les quais au nom de l’utilité publique
Jean de La Caille,
Description de la
ville et des
fauxbourgs de
Paris en vingt
planches, Paris,
Jean de La Caille,
1714.
´ « L’accroissement de la ville par rapport à son étendue et au
nombre de ses habitans ayant produit une consommation
beaucoup plus considérable de Bois à brûler et de charbon, et les
lieux de dépôt de l’une et l’autre marchandise ayant été reconnus
insuffisants, il fut réglé par la déclaration enregistrée au Parlement le
20 décembre 1735 que l’emplacement total de l’Isle Louvier seroit
destiné à contenir ces deux genres d’approvisionnement et que le
chantier forain des bois de construction qui en occupoit une partie,
seroit transféré sur ce même terrein acquis en 1678 dont il est ici
question. »

´ AN, H2 1954, n° 404.


´ « L’exécution d’un projet d’agrandissement pour le Jardin du Roy, le faste et
l’ostentation n’est entré pour rien dans la distribution de son plan, la noble
simplicité, l’utilité publique à font seul le mérite, de vastes pépinières pour la
multiplication des arbres étrangers qui serviront à l’aménagement de nos forests
et qui doivent être utiles dans les arts, des quarrés destinés à la multiplication
des végétaux utiles à l’agriculture rurale, et aux teintures enfin à une culture
destinée à l’approvisionnement de plantes médicinales, les hôpitaux et les
hospices de charité de cette capitale. […]
´ Ces raisons étaient plus que suffisantes pour mériter de la ville une réponse plus
favorable pour que lors même que l’établissement du Jardin du Roy n’aurit eu
pour but qu’une promenade fastueuse plus propre à entretenir la nonchalance
de ses habitants qu’à contribuer à leur bonheur, elle n’auroit pu lui marquer
plus d’indifférence, mais il est facile à prouver qu’indépendamment de tous les
avantages indiqués ci dessus, la ville trouvera à l’augmentation projetté du
Jardin du Roy un bénéfice pécuniaire. Une partie des revenus de ce corps est
assignée sur les droits d’entrée. Il suffit de connoitre le local actuel du terrein qui
se trouve entre le Jardin du Roy et la barrière St Bernard pour être convaincu de
la facilité des moyens de faire la contrebande. Aussi en passe-t-il par cet
endroit une quantité immense, malgré les brigades commis soudoyés pour
l’empêcher. »
´ AN, AJ/15/513, n° 545 ter, « Réponse à la délibération du Bureau de la Ville ».
Conclusion

´ Quel gouvernement de la nature à Paris ?


´ Tension entre un usage patrimonial des jardins et un
usage utilitaire/utilitariste

Vous aimerez peut-être aussi