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UNIVERSITE SIDI MOHAMMED BEN ABDELLAH

ECOLE NATIONALE DE COMMERCE ET DE


GESTION

FES

I-Introduction à la stratégie
La pensée stratégique est relativement récente, elle commence à devenir véritablement un objet de recherche et une
nouvelle discipline du management à partir des années 60. L'ouvrage fondateur d’Igor Ansoff en 1965 : Corporate
strategy marque le début de son développement, dans un contexte à la fois de forte croissance et d'ouverture des
économies. Largement inspirée de la stratégie militaire à son origine (Sun Tzu, Von Clausewitz) elle a
progressivement gagné en autonomie, sous l'impulsion des stratèges (dirigeants) est des stratégistes (universitaires
et consultants). Les premiers voient dans la stratégie un ensemble d’outils leur permettant d'assurer durablement (?)
le succès de leur organisation, ou du moins de mieux réussir leur insertion à leur environnement (ce qui n'est
finalement pas très loin d'une définition de la stratégie), les seconds essayaient à partir de leurs analyses de
comprendre les faits stylisés qui marquent son évolution.

Comme toute autre discipline de gestion, la stratégie est donc tout à la fois résolument tournée vers l'action et
l'objet de nombreux développements sur le plan théorique. Considérant qu'en matière de stratégie, l'action précède
le plus souvent la réflexion, certains auteurs n’hésitent cependant pas à affirmer que la stratégie n'est peut-être rien
d'autre que « de l'histoire qui se prendrait pour de la science».

La stratégie se repère le plus souvent par sa partie émergée, à travers ce que l'on appelle les manœuvres
stratégiques : rachat d'un concurrent, implantation dans un pays émergent, diversification sur un métier connexe ou
recentrage, etc. En effet, la stratégie ou plutôt la réflexion stratégique se situe (ou doit se situer) en amont de ces
actions stratégiques qui n’en sont que la traduction. Ainsi, l'analyse stratégique a connu au cours de cette période
un enrichissement progressif de ses concepts et de ses outils. D'abord forgée en interne, sans tenir véritablement
compte de l'environnement, elle s'est ensuite progressivement ouverte sur ce dernier sous l’impulsion notamment
des cabinets de consultants comme le BCG, AD Little et Mac Kinsey. Elle a ensuite intégré une dimension
technologique puis plus récemment organisationnelle. L'interaction stratégie - environnement est ainsi devenue plus
riche et plus dynamique, et l'on considère aujourd'hui qu'une bonne stratégie est le produit de facteurs à la fois
endogènes et exogènes.

1-1 Stratégie d’entreprise-Généralités


1-2 Les écoles de la pensée stratégique

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Définitions de la stratégie
Le concept de stratégie d'entreprise est apparu dans les années 60 aux USA et sa terminologie est directement
empruntée au vocabulaire militaire : Stratos = Armée et Agos = Je conduis. Plusieurs tentatives de définitions de la
stratégie méritent d’être présentées :
➢ Dans l’art de la guerre, Von Clausewitz définit la stratégie autour de trois idées :
- La concentration des forces : mobiliser ses forces sur les points faibles de l'adversaire.
- L’économie des moyens : mobiliser uniquement les ressources nécessaires.
- Choix du lieu et du moment : mobilité, liberté d'action.
➢ Détermination des buts et des objectifs de long terme d'une entreprise, l'adoption de moyens d'action et
d'allocation des ressources nécessaires pour atteindre ces objectifs (Chandler)
-Les ressources allouées peuvent être humaines, technologiques, financières, etc.
Plus que les ressources, ce sont les processus de mise en œuvre de ces ressources qui sont considérés, aujourd'hui,
comme étant stratégiques.
- L’horizon de la stratégie est le long terme, et suppose donc une certaine permanence dans l'action. Cette « vision
longue » de l'environnement est cependant, aujourd'hui, contestée. L’horizon est également différent selon les
secteurs : Aéronautique (10 ans), Automobile (5 ans), Informatique (2 ans).
➢ Combinaison d'objectifs que s’efforce d'atteindre l'entreprise et des moyens par lesquels elle cherche à les
atteindre (M. Porter).
- Les objectifs traduisent ce que l’entreprise veut faire et sont fonction à la fois de ses missions et de ses métiers.
Les moyens traduisent ce que l’entreprise peut faire en fonction de ses forces et faiblesses.
- Cette combinaison est également fortement affectée par l'histoire et la culture de l'organisation, les valeurs et les
croyances ses dirigeants, etc.
➢ Projet de la direction générale de l’entreprise en vue de lui permettre de renforcer durablement sa position
concurrentielle.
- La stratégie reste l'apanage des dirigeants (CA, directeurs de généraux, de division,…)
A noter cependant l'intervention croissante d'experts extérieurs à l'organisation (cabinets de conseil en stratégie).
- Ce qui est possible, aujourd'hui, est sans doute moins de créer un avantage concurrentiel durable, que de chercher
à créer durablement des avantages concurrentiels provisoires.
➢ Réponse de l'entreprise à son environnement
- La stratégie est avant tout ici action, et se matérialise par un ensemble de décisions.
- Par sa stratégie, l’entreprise cherche à influencer son environnement à son avantage, afin de réduire la pression
exercée par ce dernier. Chaque stratégie s'élabore cependant dans un contexte où les pressions exercées par
l'environnement (menaces et opportunités) sont spécifiques.
➢ Habileté à saisir l'essentiel au sein d'une masse de faits, l'intuition permettant de déceler parmi plusieurs
hypothèses également plausibles, celle qui se révélera juste dans l'avenir (H. Kissinger).
- La stratégie apparaît ici davantage comme un art que comme un processus formel et rationnel.
- Elle est faite de relatif, de subjectif, de bricolage et d’habilité. Elle a un caractère politique.
➢ Oeuvre qui se construit par la dialectique du projet est de son exécution, de la conception et des moyens, de
l'imaginaire et du réel, du présent et du futur (L. Poirier)
- La stratégie est une construction spécifique et une œuvre personnelle.
- Elle est sous tension permanente entre projet et réalisation, entre vouloir et pouvoir.
Cette définition souligne l'interaction entre l'acteur et le contexte, et insiste sur l’apprentissage.
➢ Former une stratégie, c'est engendrer des significations sur la nature, l’objet, la direction de l’entreprise qui
permettent aux acteurs de rendre le monde organisationnel intelligible et d'expliquer aux autres que ce
qu’ils font a un sens (Green- 1988)
- La stratégie vise surtout ici à donner de la visibilité et du sens aux différents acteurs (internes comme externes) de
l'entreprise, au-delà de toute rationalité économique.
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La stratégie : une réflexion en évolution
D’origine militaire, le concept stratégie a été intégré dans le monde des entreprises à partir des années 50. Après la première
définition de A.D. Chandler, les outils, les démarches et les analyses se sont évolués donnant une légitimité à des générations
de stratégie alors que le mot est parfois vu comme synonyme de guerre, de combat, de victoire, de défaite,…

Peter Druker, a hésité à utiliser le vocable de la stratégie, en 1955, pour ne pas faire peur aux dirigeants d’entreprise. Mais,
après plusieurs décennies, la stratégie a connu une notoriété remarquable sous l’impulsion des recherches tant universitaires
que pragmatiques donnant aussi lieu à une théorisation accrue des démarches et outils stratégiques. Le mot stratégie a été
même utilisé par des gens ordinaires dans des jeux, la chasse, la pêche,… En effet, le spécialiste rencontre moins de difficultés
pour augmenter l’intérêt de la notion, mais se trouve moins convaincant en dévoilant son domaine, son objet, ses méthodes et
la pensée qui constitue, tant de discours sont nombreux, disparates, parfois contradictoires et, dans tous les cas, de qualité fort
inégale.

La notion de stratégie, qui occupe l’esprit des managers et chercheurs, doit être d’abord cadrée par son contexte historique,
puis présenter certains modèles pour présenter des repères d’une véritable pensée.

1- Aperçu historique :
On peut dire que les années 50 connaissent la première émergence structurée et explicite de la notion de stratégie dans le
domaine des entreprises. Deux raisons fondamentales expliquent cette intégration d’un concept militaire dans le domaine des
affaires : d’une part, les techniques de gestion d’entreprise n’intègrent pas les décisions à caractère stratégique
« longtermiste », l’horizon de réflexion des chefs d’entreprises ne dépasse pas généralement une année. D’autre part, la théorie
micro-économique notamment de Walras exclut la stratégie dans tous les écrits sur les firmes.

C’est les théoriciens des organisations qui ont introduit implicitement la stratégie dans le cadre des explications données à la
concurrence imparfaite (Chamberlain, Robinson, Clark, Caose), de l’innovateur (Shumpeter), du risque (Knight). Le
dilemme du prisonnier, la théorie des jeux, dans le cadre de l’explication de l’équilibre sur le marché oligopole, donne à la
stratégie un nouvel essor en parlant des choix stratégiques menés par un acteur pour gagner le jeu, la compétition ou la
concurrence.

Fayol puis Barnard s’intéressent à la fonction de direction avant que Selznik et Newman ne commencent à cerner en quoi
l’activité stratégique se distingue de l’exploitation routinière : constituant la première réflexion sur une distinction qui doit être
ou devrait être faite entre ce qu’un manager fait au quotidien et ce qu’il fait de manière beaucoup plus réfléchie avec cette
vision sur le long terme. En parallèle, les travaux de March et Simon puis de Cyert et March conceptualisent les processus de
décision et de traitement de l’information.

La pensée stratégique : à la recherche d’une autonomie


Le début des années 60 trace la véritable émergence de la stratégie d'entreprise avec la publication de trois ouvrages :

➢ C'est tout d'abord l'historien des affaires Alfred Chandler qui, en décrivant l'histoire de quatre grandes compagnies
américaines, montre comment les managers s’occupent des tâches qui concernent la fixation des objectifs et des voies
d'action à long terme, l’allocation des ressources ainsi que la conception d'une structure qui les permette et les supporte :

(Stratégie = buts + allocation des ressources + organisation).

➢ C'est ensuite, en 1965, quatre professeurs à Harvard (Learned, Christensen, Andrew, Guth), auteurs de « Politique
générale d'entreprise » qui a donné lieu à un célèbre modèle « LCAG » en reprenant les initiales des auteurs. L’un
deux, Andrew, approfondira le concept de stratégie quelques années après. On peut, aujourd'hui, mesurer l'importance
de ces textes en nombre des dirigeants, de consultants ou d'étudiants en gestion « qui font de LCAG sans même le
savoir ». Ces auteurs ont en effet proposé une démarche simple, très ouverte, guidant les dirigeants dans l'élaboration du
diagnostic stratégique, forces et faiblesses de l’entreprise, opportunités et menaces de l’environnement, et dans la
formulation de stratégie après explicitation et intégration de leurs systèmes de valeurs et de leurs objectifs.

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➢ Enfin, la même année, H. Igor Ansoff publie corporate strategy dont le succès était important. Il définit clairement la
stratégie « comme une règle pour prendre des décisions fondées sur un champ d'activité produit X marché, un vecteur
de croissance, un avantage concurrentiel et des synergies ». Il propose également une classification des décisions :
stratégiques, administratives, opérationnelles sur laquelle de nombreux auteurs allaient travailler. Depuis cette date, H.I
Ansoff a publié plusieurs ouvrages pour proposer, affiner et développer le concept de management stratégique et ses
attributs dans différents types d'environnement.

L’enrichissement de la pensée stratégique, l’analyse concurrentiel…


Parallèlement, les années soixante marquent la production de nombreux travaux sur les procédures de planification stratégique.
De grands cabinets américains vont alors développer un nouveau métier, le conseil en stratégie, en proposant des modèles plus
ou moins élaborés, mais qui vont favoriser une diffusion rapide de certaines notions stratégiques dans les grandes entreprises
occidentales : l'analyse concurrentielle.

➢ Le premier travail est celui de Bruce Henderson, président du Boston consulting Group, qui vulgarise la courbe
d'expérience, la matrice part de marché /taux de croissance et la typologie des situations afférentes (dilemmes, stars,
vaches à lait, Poids morts) dans le cadre d’une gestion du portefeuille d’activités… La clarté apparente des concepts,
le caractère très visuel de la matrice et l'aspect logique des manœuvres stratégiques suggérées expliquent sans doute
l'extraordinaire succès de « la méthode BCG ».

➢ En réaction d'autres cabinets, notamment Arthur D. Little et Mc Kinsey, vont proposer d'autres matrices, souvent
présentées comme des variantes mais en réalité de nature fort différente puisque totalement qualitatives, multicritères
est sans contenu théorique explicite.

➢ En 1982, un jeune professeur à Harvard, Machaël Porter enrichit l'analyse concurrentielle en transposant de façon
très habile des principaux concepts de l'économie industrielle. Ce nouveau conseiller de la stratégie, au cours des
années quatre-vingt, suggère une analyse fine des forces concurrentielles et des rapports de pouvoir susceptibles de
s'instaurer dans une activité et conseille aux dirigeants d'élaborer une véritable cartographie de leur industrie. Il devait
détailler dans un deuxième ouvrage la façon d'identifier les sources d’avantage concurrentiel : la chaîne de la valeur.
Par ses contributions, Porter consacre les démarches analytiques privilégiant les dimensions technico- économiques,
l'univers concurrentiel et la formulation de la stratégie, en laissant dans l’ombre le côté créatif, les variables socio-
politiques et les problèmes de mise en oeuvre de la stratégie. On retrouve peu ou prou des caractéristiques dans la
plupart des travaux qui se centrent sur l'analyse de la compétition, qu'ils soient de type statistique comme PIMS
(Profil Impact Of market Strategy), qui mesure les corrélations entre certains variables stratégiques et les
performances à partir d’une large base de données ou de type méthodologique comme la matrice BCG 2 ou le tableau
de bord stratégique proposé par le cabinet MID et F. Gouillart.

La stratégie, une notion en pleine expansion


Les années 80 connaissent des attaques remarquables autour de la stratégie surtout contre le caractère rationnel, programmé
voir mécanique de la formulation stratégique. L'accent est généralement mis sur l’un ou l’autre du trio : technologique-
organisation- ressources humaines.

C'est l'époque où « le modèle japonais » est invoqué pour prôner une forte interaction entre stratégie et technologie. A
nouveau, les cabinets et notamment A.D Little, Mc Kinsey,… attirent l'attention en proposant de nouveaux outils élaborés à
partir de concepts anciens comme les courbes en S de prévision technologique ou le portefeuille des technologies. En liaison
avec la technologie, mais de façon plus modeste, plus fine et plus durable, l'on enregistre aussi à cette époque de nombreux
travaux sur l'organisation et la stratégie industrielle, la flexibilité... qui permettent de mieux articuler ces deux domaines restés
jusque-là séparés que sont la gestion de production et la stratégie.

De façon plus discutable, la nouvelle faveur dont jouit l'entreprise à cette époque offre une audience naïve à de nombreux
discours sur la mobilisation des ressources humaines, la culture de l'excellence… Les propos excessifs des ouvrages à succès

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ne doivent pas occulter l'essentiel, à savoir une meilleure compréhension des processus humains sociaux et politiques à l'œuvre
dans les changements stratégiques.

Quoique très différents, ces travaux contribuent peu ou prou à désacraliser la notion de la stratégie, à mettre davantage l'accent
sur la mise en œuvre et des processus d'intégration alors que la période précédente avait privilégiée la formulation des grandes
manœuvres et les aspects analytiques. Il en ressort une conception plus réaliste, mais aussi beaucoup plus diluée de la notion de
la stratégie qui se trouve ainsi entourée par les disciplines fonctionnelles : production, ressources humaines mais aussi
marketing et finance.

Le balancier est aussi revenu sur l'intérieur de l'entreprise alors que le marché et l'environnement avaient été les objets
d'analyse privilégiés. C'est que l’on peut interpréter comme une série de contributions strictement stratégiques qui popularisent
les concepts d’intention stratégique, de pôle et de plate-forme de compétences, de compétition fondée sur la maîtrise du
temps... Certains estiment que ce primat accordé aux ressources et à la volonté de proposer une offre globale signifie
l'émergence d'un paradigme qui se substituait à l'ancien, davantage gouverné par le souci d'une adaptation à l'environnement :
le strategic intent plutôt que le strategic fit pour reprendre les vocables anglo-saxons. L'opposition et surtout sémantique, car
dans la pratique de la stratégie, ces concepts et outils sont plutôt complémentaires aux précédents.

Mais en mettant l'accent sur la capitalisation des ressources et des compétences, sur la nécessité d'une vision longue et de la
durée pour développer les stratégies efficaces, ces travaux favorisent un dernier rapprochement : celui de la stratégie et de la
cognition. C'est ainsi que le thème de l'apprentissage et de « l'entreprise apprenante » marque fortement le début des années 90.
L'on redécouvre, ce faisant, les contributions plus anciennes d’Argyris, March, Simon, mais aussi des notions ancestrales
qu'un rationalisme excessif avaient poussées hors de la pensée managériale : la conversation, la communication, la parole, la
confiance…

Ainsi, en quarante ans, la pensée stratégique d'entreprise s'est imposée comme l'une des dimensions fortes des recherches et les
discours sur le management. Des modèles et théories s’accumulent pour enrichir le concept.

2- La pluralité des modèles


Il existe différents travaux qui ont aboutis à la formulation des modèles de stratégie d’entreprise. Mais, il est difficile d’établir
une classification ou trouver un modèle unique qui satisfait les différentes logiques.

Cette complexité fait que la plupart des écoles et des auteurs adoptent un point de vue qui ne peut embarrasser la totalité du
problème. Toutefois, on peut repérer quatre logiques fondamentales sous-jacentes aux théories et modèles.

➢ La téléo-logique : selon cette logique, l’entreprise est vue comme un système que des dirigeants doivent gouverner,
finaliser, organiser, animer ; autour de ce pôle s’ordonner la plupart des concepts, outils, méthodes qui s'adressent aux
directions et qui, un peu comme les militaires, envisagent plutôt la stratégie des positions ou à construire ou à
conquérir, des manœuvres à concevoir est à mettre en œuvre, de grandes décisions (diversification,
internationalisation, absorption…) à prendre.
➢ L’éco-logique : cette perspective donne un rôle majeur à l’environnement ou au moins au marché. L'accent est mis
sur l'aptitude des firmes à satisfaire aux exigences de ce qui sont censés sélectionner les plus habiles et les plus
adaptées. L'inspiration économique y est forte qui remet au premier plan les concepts d’efficience, de coûts, de
compétitivité…
➢ La socio-logie : de très nombreux travaux voient avant tout l'entreprise comme une organisation sociale marquée par
les relations entre acteurs, les rapports de pouvoir, les jeux politique... Dans cette optique, la stratégie apparaît
davantage comme une résultante a posteriori de la vie socio-économique de l'organisation qui trace ainsi, pas à pas,
par tâtonnements et négociations, sa voie dans la société.
➢ L’idéo-logique : ce pôle regroupe des contributions, récentes pour l'essentiel, qui mettent l'accent sur les processus
mentaux, cognitifs et langagiers, par lesquels se forgent et s'explicitent les stratégies que certains acteurs parviennent
à faire accepter. La stratégie apparaît essentiellement comme une construction mentale et un discours, une « mise en
scène » provisoires.

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Au-delà de la simple classification, ce schéma permet de comprendre les grandes tensions qui traversent, de façon permanente,
la pensée stratégique : La plus forte est la dialectique théo-logique / éco- logique ou entreprise /environnement. En limite, pour
les uns, le volontarisme de l'entreprise peut faire des miracles alors que, pour les autres, le déterminisme de l'environnement et
quasi total. Evidemment, les situations réelles procèdent des deux : l’environnement et le marché imposent incontestablement
des contraintes et des règles dont il faut tenir compte, mais longtemps l’entreprise dispose le plus souvent de degrés de liberté
et de marge de manœuvre qu'il faut repérer et exploiter. L'art de la stratégie se situe justement dans cette intelligence : prendre
l'environnement pour mieux s'en servir.

Une deuxième tension forte existe entre le pôle théo-logique et le pôle socio-logique. En limite là encore, certains stratèges
sont tentés de voir l’entreprise de façon désincarnée, dotée de forces et de faiblesses, des mécanismes de fonctionnement... A
l’inverse, une attitude excessivement sociologique conduit quelques auteurs à exagérer le jeu des acteurs, à présenter à
l'entreprise comme une seule arène politique qu'il est pratiquement impossible de piloter économiquement. Une nouvelle fois,
la réalité procède le plus souvent des deux : les intentions et des décisions stratégiques ont d’autant plus de chance d'être mis
en oeuvre qu'on a pris en compte les acteurs et leurs comportements, mais l’on ne peut perdre de vue que les l’entreprise et ses
marchés sont d'abord constitués des clients, de produits, des techniques, de prix, de coûts... Bref de « mécanismes
économiques ».

Les orientations de la pensée et les discours stratégiques


Ainsi, en quarante ans à peine, la stratégie d'entreprise est passée de l'ignorance à l’exubérance. La relative cohérence dans
laquelle ont été forgés les premiers concepts et outils a cédé la place à une diversité, une complexité mais aussi une
fragmentation de la pensée et des discours. Compte par le passé, le monde du conseil continue d'y contribuer. Mais l'évolution
la plus frappante se situe plutôt du côté des institutions universitaires où la stratégie est désormais à « un objet scientifique »
qui engendre des programmes de recherche, des revues et des associations savantes, des chercheurs et des enseignants, des
colloques internationaux. Il n'est dès lors pas étonnant de trouver trois orientations principales, aujourd'hui :

➢ Le pragmatisme restrictif
La stratégie constituant un marché significatif continue à susciter un flux régulier d'ouvrages et publications qui multiplient les
conseils et des prescriptions à l'usage des cadres et des dirigeants. Cette littérature est la plus visible, la mieux promue et la
plus accessible. Elle tend à favoriser un renouvellement accéléré du vocabulaire sinon des concepts et des outils et se
présentant bien sûr de façon très schématique.

➢ L’explication scientifique
Pour constituer la stratégie en objet scientifique, de nombreux universitaires adoptent une démarche scientifique classique en
Occident : la recherche et la validation des lois de causalité qui nécessitent le plus souvent de traiter statistiquement une masse
importante de données sur des entreprises, leurs stratégies, leurs performances… Comme dans tous les domaines, ce type de
recherche tend à devenir très technique, met en œuvre des méthodes de plus en plus sophistiquées et se donne à avoir surtout
dans les revues et colloques académiques. Elle fournit une part importante de la pensée stratégique savante, mais n'est pas d'un
succès aisé pour les entreprises qui, de surcroît, n’en voient pas toujours les applications directes.

➢ La recherche ingénierique
D'autres chercheurs s'efforcent plutôt de proposer des concepts et des outils utilisables par les dirigeants, mais fondés autant
que faire se peut sur une intention et des méthodes scientifiquement éprouvées. Opératoire dans ses objectifs, ce style de
recherche veut se différencier du pragmatisme excessif et peu établi de la première voie comme de l’explication peu soucieuse
d'utilisation de la deuxième. En ce sens, la recherche stratégique s'apparente aux sciences de l'ingénieur ou aux nouvelles
« techno-sciences » : informatique, intelligence artificielle, de recherche médicale… et contribue alors directement aux
sciences de l'action.

Cahiers Français n°275 Mars-Avril 1998, la documentation française

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Pourquoi la stratégie?

Il y a lieu aussi de s’interroger sur les motivations de l’élaboration d’une stratégie ou tout court pourquoi une
stratégie ?
➢ Pour réagir aux évolutions de l'environnement

L’entreprise doit réfléchir à l'orientation de ses actions, de ses activités, de ses objectifs et des moyens en fonction
des forces et des contraintes de l'environnement économique, technologique, politique et social. Confrontée à un
contexte turbulent et incertain, elle doit réagir en adaptant ses décisions.
Le stratège doit piloter l’organisation dans cette complexité et rechercher des orientations d’action en se fondant sur
ses atouts et ses spécificités.

➢ Pour rechercher une compétitivité- coût et hors- coût de manière intrinsèque

Dans une approche classique en termes de prix, la compétitivité, c'est la capacité de vendre durablement et avec
profit ce que l’entreprise produit (Martinet, Stratégie, Paris, Vuibert, 1983).
Les choix stratégiques doivent permettre à l'entreprise de gérer au mieux ses ressources et ses compétences pour
proposer des biens et des services au moindre coût donc à des prix attractifs pour dégager du profit.
Mais aujourd'hui, les clients attendent aussi une qualité et des services attachés au produit ce qui pousse l'entreprise
à rechercher une compétitivité hors- coûts ; les choix stratégiques doivent donc aussi intégrer les facteurs de
qualité, innovation, de flexibilité, de services.
Ainsi, dans cette double dimension coût est hors- coût, la compétitivité devient la capacité de répondre aux besoins
des clients tout en réalisant un profit.

➢ Pour rechercher à se différencier des autres partenaires

La stratégie doit permettre à l'entreprise de se positionner sur ses différents marchés par rapport à ses concurrents ;
par ses orientations stratégiques l'entreprise recherche des avantages concurrentiels c'est-à-dire les différences avec
ses principaux concurrents qui vont lui permettre d'être préférée par les clients.

➢ Pour se développer : la croissance

Enfin, les orientations stratégiques doivent permettre d'assurer à l'entreprise sa survie, voir son extension, sa
croissance dans de multiples de directions, en produits, en marchés, à l'étranger.
Bref, la stratégie doit permettre d'assurer l'avenir de l'entreprise.
Une des problématiques que nous pouvons retenir, est la capacité de la réflexion stratégique menée par une
entreprise à aboutir à la formulation d’une stratégie cohérente, adaptative et efficace afin d’améliorer sa
performance et sa pérennité. Il convient ici de présenter la stratégie comme un processus décisionnel qui commence
par la réflexion de construction d’une stratégie jusqu’à la décision stratégique et son contrôle.
Ainsi, nous aborderons dans un premier point, un essai de découverte de la notion de stratégie d’entreprise, puis
dans un second point, l’analyse de l’environnement concurrentiel, dans un troisième point, l’analyse technologique
et organisationnelle et nous traitons dans un dernier point, la décision stratégique et les exigences de sa mise en
œuvre.

J-L CHARRON et S. SEPARI, Organisation et gestion de l'entreprise, DECF, Epreuve 3, DUNOD, 2001

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Délimitation du champ de la stratégie
On peut délimiter le champ de la stratégie en résumé dans le tableau suivant :
Gestion courante Gestion stratégique
Exploiter de la meilleure manière Recréer le potentiel de la firme.
Finalité
possible le potentiel existant.
Efficience Efficacité
But
Productivité Adaptabilité - pérennité
Gérer à l’intérieur des règles existantes Créer, modifier les règles du jeu
Attitude
Mot d’ordre
OPTIMISER INNOVER
Problématique Fait-on les choses comme il faut ? Fait –on les choses qu’il faut ?
Ligne hiérarchique Sommet stratégique
Niveau dans l’organisation
Nature des décisions
Horizon Court terme, moyen terme Long terme
Réversibilité Possible Difficile, voir impossible
Fréquence Elevée Faible
Décideurs Multiple Peu nombreux
Formalisation Possible Impossible
Exemples Compagne publicitaire Changement de métier
Embauche de deux ingénieurs R&D Implantation à l’étranger

Stratégie et contexte
Le contexte peut être un élément déterminant dans les conditions de l’établissement d’une stratégie, G.Koenig,
dans le management stratégique – NATHAN, présente un schéma pour illustrer l’interaction entre la stratégie et le
contexte :

Contexte
+

Dominant Stratégies Hétéronomes (1)

Influent Interactions Stratégiques

Négligeable Stratégies volontaristes

-
Acteur
- Dominé Influent Autonome +

(1) Se dit d’une entité qui reçoit de l’extérieur les principes qui la gouvernent.
Les stratégies contraintes (Hétéronomes)
Une première manière de concevoir les rapports de l'entreprise à son univers stratégie consiste à les assimiler aux relations
qu'entretiennent les organisations biologiques avec leur milieu écologique.
Adopter cette perspective revient à considérer que les entreprises n'ont pas d'autres choix que de s'adapter aux évolutions de
leur environnement et de conformer leurs projets aux contraintes externes. Bien qu'il s'agisse d'une conception très restrictive
de l'action stratégique, cette manière de voir conserve en effet une certaine pertinence dans le cas où les degrés de liberté de
l'entreprise sont peu nombreux. Elle mérite donc être approfondie et discutée. Premièrement, affirmer que les actions
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stratégiques doivent être adaptées aux conditions extérieures n’a de porté que si l’on sait repérer les caractéristiques pertinentes
de l'environnement et définir en fonction de celles-ci les choix appropriés. Deuxièmement, l'affirmation que les entreprises
doivent s'adapter suppose implicitement qu'elles soient en mesure de le faire ; or des observations récentes mettent en évidence
les limites somme toute étroite de la capacité d'adaptation des entreprises.
Avancer l’idée que les entreprises doivent choisir des solutions adaptées à leur situation est à l'évolution de celle-ci revient
affirmer qu'il n'existe pas de solution universelle qui soit valable en tous lieux et à toutes époques. La doctrine du choix
approprié était née. Il peut se formuler de la manière suivante :
- Il n'existe pas de solution qui soit systématiquement préférable à toutes les autres.
- Dans une situation donnée, il existe des solutions meilleures d'autres.
Les travaux qui s'inscrivent dans cette perspective cherche à aider les praticiens à faire de bons choix, c'est-à-dire à prendre des
décisions adaptées. Ils suivent en général une démarche en trois temps.
Le premier consiste à déterminer les caractéristiques auxquelles le dirigeant doit plus particulièrement prêter attention
lorsqu'il est confronté à un certain genre de problème. Le deuxième, de caractériser la situation dans laquelle le problème se
pose. Un troisième volet définit les différentes options envisageables dans chacune des situations typiques que le dirigeant est
censé rencontrer.
Les stratégies volontaristes
Si les contraintes de l'environnement sont maîtrisables, l’entreprise peut élaborer des projets délibérés. C’est ce qu'on appelle
la planification stratégique. Le rôle du dirigeant consiste à donner à l'entreprise des cibles conformes à sa mission. Une
analyse rigoureuse lui permet d’établir les programmes et les budgets correspondants. Si des écarts surviennent par rapport à la
trajectoire préétablie, ils font l’objet d'actions correctrices. Ces ajustements n'ont pas vocation à modifier profondément le
contenu d’une stratégie conçue par le sommet de la hiérarchie et qu’il incombe à l'organisation d'exécuter fidèlement.
Les processus stratégiques comprennent une fonction d'élaboration et une fonction de contrôle. Celles-ci peuvent être assumées
de diverses manières au sein des organisations. Un des aspects essentiels de la gestion stratégique consiste dans la répartition
des rôles entre la direction générale et les responsables opérationnels. Deux variables essentielles caractérisent le style de
direction adopté par la direction générale vis-à-vis des divisions : l'influence exercée sur le contenu des stratégies, d'une part, la
rigueur du contrôle de la réalisation des objectifs affichés, d'autre part. L'influence sur le contenu des stratégies concerne les
efforts déployés par la direction générale pour donner forme et substance à la stratégie avant que les décisions ne soient prises.
D'intensité variable cette influence peut s’exercée par diverses voies :
- le découpage organisationnel (en divisions, branches, etc.);
- Les dispositifs (recrutement, évaluation, rémunération,… permettant d'orienter les comportements.
- La gestion des relations entre divisions, l'accent pouvant être mis sur l'autonomie ou au contraire sur la complémentarité des
divisions ;
- La révision des plans soumis par les divisions ;
- la mise en avant de thèmes stratégiques ;
- Le remodelage du portefeuille d'activités (création, abandon,…)
- Des suggestions spécifiques ;
- L’allocation des ressources.
Cette démarche peut présenter des limites surtout lorsque l’environnement dans lequel se déploie l'activité planifiée ne peut
être qu'un univers domestiqué. En effet, pour que la planification soit un mode d'action efficace, il est nécessaire de mettre le
projet stratégique à l'abri des perturbations extérieures. Pour obtenir ce résultat il n'est pas indispensable que l'environnement
soit stable, mais il faut que ces évolutions soient prévisibles ou contrôlables. Il faut pour cela que la tendance lourde ou le cycle
c'est-à-dire les phénomènes réguliers, prennent le pas sur l'événement par définition surprenant et difficilement prévisible.
Les stratégies interactives
Les stratégies contraintes, comme les stratégies volontaristes reposent sur la dissymétrie. L’initiative est à l’univers ou à
l'acteur, mais les deux ne peuvent être actifs à la fois. Les stratégies interactives se caractérisent au contraire par une activité
partagée, et une interdépendance dynamique entre l'acteur et son univers.
S'il arrive qu'il faille soumettre à la contrainte et si, à l'inverse, il est parfois possible d’imposer sa vision des choses, ce sont là
des cas limites. En règle générale, l'acteur stratégique se trouve dans des situations qui, loin d'être figées, reste souvent
malléable, tandis que ses propres projets se transforment à mesure qu'ils dégénèrent ici, qu'ils se ressourcent là, en un mot
qu'ils mûrissent. L'action stratégique se construit dans le cadre de contraintes qu'elle aménage et qu’elle tire parti du projet
d'autres acteurs qui conservent pourtant leur logique propre.
Encore plus que dans le passé, la réalité stratégique correspond à un processus continu d’équilibrage évolutif entre les
décisions et les comportements de tous les acteurs d’un espace concurrentiel, devenu très instable.

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Historique de la stratégie

La stratégie est relativement récente. Elle est apparue dans les années 60 aux USA et sa terminologie est
directement empruntée au vocabulaire militaire (Stratos= Armée et Agos = je conduis). Les premiers
"Stratèges" des grands groupes américains comme General Electric, Ford, Boeing,... sont d'ailleurs
souvent d'anciens officiers de l'armée américaine.
Terminologie militaire Terminologie d'entreprise
Economie des moyens Allocation optimale des ressources
Rapidité Savoir-faire, adaptabilité, innovation
Disponibilité des moyens Liquidités, slack
Motivations des troupes Mobilisation des RH
Stratégie total: détermination des moyens globaux Corporate strategy: allocation des ressources entre les
activités
Stratégie opérationnelle: répartition des moyens entre Business strategy: répartition des moyens à l'intérieur des
les zones activités
Stratégie fonctionnelle: répartition des moyens entre les Allocation des ressources entre les différentes fonctions
acteurs (marine, terre) de l'entreprise
Tactique militaire Management au quotidien

Année 60 Année 70 Année 80 Année 90


- Environnement certain - Environnement plus - Environnement - Turbulence forte de
- Croissance du pouvoir aléatoire incertain l'environnement;
d'achat - ralentissement de la - Processus d'intégration - Renforcement de la
Environnement
- De l'économie de croissance économique et mondialisation
de la stratégie
production à l'économie - Epuisement du financière des - Impératif de réactivité,
de la consommation modèle fordien économies de flexibilité
industrialisées
Prise en compte -- + +++ ++
de Approche déterministe Approche moins Approche contingente Approche interactive
l'environnement déterministe
- Stratégie fortement - Stratégie plus - Intégration de la - Intégration de
programmatrice, opérationnelle bien technologie et des RH l'organisation dans la
planificatrice encore fortement dans la réflexion réflexion stratégique
Caractéristiques - Influence des déterministe stratégique - Vision plus
dominantes de la universitaires et des - Meilleure prise en - ouverture de la introspective de la
stratégie militaires compte de stratégie sur son stratégie
l'environnement environnement - Valorisation des
- Influence des ressources et des
consultants compétences
Planification Planification Gestion stratégique Management stratégique
Mot clé stratégique

1965 Modèle 1972 PIMS (Harvard 1980-85 M.Porter 1993 Hammer


LCAG/SWOT Business School) Les stratégies Le Reengineering
1965 I.Insoff: Corporate Matrices de génériques Le Benchmarking
Outils- Modèles
Strategy portefeuilles (BCG, Les 5 forces La théorie des
ADL, ...) concurrentielles ressources (MRC)
La chaine de la valeur

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Les différents mode de la formation de la stratégie
PLANIFIEE
Consignés dans les plans formels, la stratégie repose sur des intentions précises, articulées, les unes aux autres par
une instance centrale. Afin, d'éviter toutes surprise désagréable, la mise en œuvre est contrôlée rigoureusement. Ce
sont les environnements favorables, contrôlables ou prédictibles qui conviennent le mieux à ce processus de
formation d'une stratégie essentiellement délibérée.
ENTREPRENEURIALE
La stratégie prend se source dans la vison cardiale d'un leader, mais cela n'implique pas que les différentes
incitatives soient rigoureusement articulées les unes aux autres. La stratégie est en conséquence susceptible
d'intégrer les opportunités qui se présentent. Placée sous le contrôle du chef d'entreprise, l'organisation vit à l'abri
d'une niche. La stratégie est relativement délibérée mais peut intégrer des éléments émergents.
IDEOLOGIQUE
La stratégie procède de croyances partagées, les intentions s'inscrivent dans une vision collective peu sujette à
évoluer. Elles respectent des normes qui font l'objet d'un endoctrinement ou d'une socialisation. L'organisation est
souvent proactive vis- à - vis de son univers stratégique et les conduites ont tendance à être délibérées.
CANALISEE
les dirigeants définissent en termes substantiels l'enveloppe à l'intérieur de laquelle les autres membres de
l'organisation développent une activité soumise aux sautes de l'environnement. La stratégie est en partie délibérée,
en partie émergente et en partie délibérément émergente.
CONTROLEE
La stratégie trouve sa consistance dans les contrôles qu'exercent les dirigeants sur les processus (recrutement,
promotion, cirières et niveaux de performance...). En revanche, le contenu est laissé à l'initiative des responsables
opérationnels. La stratégie est en partie délibérée, en partie émergente et, de nouveau, en partie délibérément
émergente.
NON CONNECTEE
Des stratégies se développent au sein d'enclaves: des unités reliées de manière lâche au reste de l'organisation
agissent suivant une logique qui leur est propre et le font en l'absence ou même en contradiction avec les intentions
de la direction générale. Qu'une intention existe ou non au niveau des enclaves, la stratégie de l'organisation est
essentiellement émergente.
CONSENSUELLE
En l'absence d'intentions clairement établies au niveau central, la stratégie trouve sa cohérence au travers de
processus d'ajustement mutuel qui assurent la convergence d'initiatives autonomes. La stratégie est plutôt
émergente.
IMPOSEE
La stratégie trouve son origine dans l'environnement. Celui-ci oriente l'action par injonction ou de manière
implicite en limitant les degrés de la liberté de l'organisation. La stratégie est essentiellement émergente, bien
qu'elle puisse être internalisée par l'organisation et prendre de ce fait une tournure délibérée.
Mintzberg H. et Waters J.A, "Of Strategies, dliberate and emregnt", Startegic Management, Vol. 6, 1985, pp. 257-272

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Une stratégie largement émergente : la conquête par Honda du marché américain

Véritablement constituée à la fin des années quarante, Honda détient en 1954 15 % du marché nippon. Ce résultat,
le constructeur le doit principalement à une conception et à des méthodes de production supérieures. Fin 1958,
deux responsables de Honda effectuent un voyage d'étude aux Etats-Unis avec comme seul objectif de voir s'il est
possible d'y réaliser quelques ventes. Ils en reviennent avec une impression mitigée et l'intuition qu'il devrait
néanmoins être possible de vendre au bout de plusieurs années quelques 10 % des 60 000 machines importées
chaque année aux Etats-Unis.

La connaissance du marché américain par des représentants de Honda et si sommaire que leur installation sur la
côte ouest coïncide avec la fin de la saison. Au printemps suivant, après plusieurs mois d'effort, la firme nippone
compte une quarantaine de revendeurs qui n'ont en stock que les plus grosses machines: les 250 et de 350 cc. Il est
vrai qu'au cours des huit premiers mois, convaincus qu'il n'y avait pas place aux E.U pour les petites cylindrées, les
responsables japonais n'ont guère essayé de placer le Supercub 50 cc. Contraignant de se déconsidérer auprès de
clients potentiels qu'ils n'arrivent pas à imaginer autrement qu'avec un aigle sur le dos, les cadres de Honda
n'utilisent les 50 cc que comme moyen de déplacement. Ceux-ci ont beau retenir l'attention, la ligne politique reste
ferme: intéressé par le modèle, Sears se voit opposer une fin de non-recevoir.

En avril 1960, les premières grosses machines viennent à peine d'être vendues que des problèmes techniques
apparaissent. Fuites d'huile et problèmes d'embrayage: les motos de l'archipel supportent mal la conduite
américaine! Il devient difficile de faire la fin bouche, les Supercub sont mis sur la marché et connaissent un succès
immédiat... auprès des magasins d'articles de sport! Il est clair que la clientèle qui se dirige spontanément vers les
petites cylindrés japonaises n'affectionne pas particulièrement les vestes de cuir noir; aussi les responsables de
Honda hésitent-ils à franchir le pas, craignant toujours de s'aliéner le segment de clientèle le plus rentable. En dépit
des signaux du marché, la publicité de Honda continue donc de "ratisser large".

Au printemps 1963, la proposition d'un étudiant d'UCLA, reprise par Grey Advertising: "You Meet the Nicest
People on a Honda", va diviser les responsables de la filiale américaine. Finalement adopté, le slogan va contribuer
à renforcer le succès du constructeur nippon. L'année suivante il contrôle pratiquement 50% du marché américain!

Grâce à une série d'événements fortuits qui en cinq ans transforment complètement sa stratégie, Honda est
parvenue à identifier et à exploiter un segment de marché jusqu'alors passé inaperçu.

G.Koenig (pages 35-36), Managment Stratégique, Nathan

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Les écoles stratégiques selon H. Mintzberg

Il s'agit par cette lecture de faire un détour par l'examen des différentes écoles de stratégie existantes. En fait, ma
visée, est d'interroger la standardisation de l'action qui s'est opérée dans le secteur de l'intervention sociale par la
référence maintenant hégémonique à la méthodologie de projet ; celle-ci en fait a relégué la réflexion et la pratique
sur la spécificité d'une démarche de dynamisation sociale qui me semblent être la priorité essentielle. C'est un peu
le même processus que celui que l'on a observé concernant la pédagogie par objectifs, qui a pu pendant toute une
période effacer la réflexion sur l'apprentissage. Mintzberg distingue des stratégies délibérées et des stratégies
effectives, des stratégies émergentes dans lesquelles ce qui est réalisé n'était pas expressément prévu. Les
définitions de la stratégie insistent sur la "position", sur la perspective ou la manœuvre, voire le stratagème. La
stratégie désigne tantôt la démarche d'action tantôt la modélisation de l'action.

Les dix écoles


L’école de la conception
L'action y est déterminée par le processus de conception de l'action. On en connaît le modèle de base : évaluation
externe, évaluation interne, repérage des menaces et opportunités de l'environnement, forces et faiblesse dans
l'organisation. Au croisement de ces données et à la lumière des valeurs retenues on définit des scénarios puis vient
le choix des stratégies Enfin on passe à la mise en œuvre.

L’école de la planification
Pour cette école comme pour la précédente, l'élaboration stratégique est un procédé délibéré de réflexion consciente
sur une situation qu'il faut modifier. Ici c'est le processus formel qui prime. L'élaboration et la mise en œuvre sont
garanties par une personne ou l'équipe dirigeante. Le plus souvent cette conception est stabilisée dans le fameux
tableau de bord. C'est dire l'importance qui est donnée à la formulation, ce n'est qu'après leur formulation que les
stratégies peuvent s'appliquer. Ces approches reposent sur une distinction nette entre pensée et action. Ce ne sont
pas les mêmes qui produisent la connaissance et qui mettent en oeuvre. Se pose alors la question de l'appropriation
de la connaissance produite.
Cette approche suppose que la situation est relativement stable et prévisible, le scénario est un outil essentiel dans
l'arsenal du stratège, il est le moyen par lequel on restitue la décision à la direction politique. Définition et
quantification des objectifs permettent de lui conférer l'instance de contrôle. L'action est pensée en termes de
contrôle et de réduction des écarts par rapport aux objectifs formulés.

L’école du positionnement (Le fameux Porter et son échelle)


Cette école met l'accent sur les interactions avec l'environnement sur l'étude préalable à l'action. L'environnement
est appréhendé essentiellement en termes économiques de marché de concurrence.
Définir une stratégie c'est avant tout se positionner dans un contexte concurrentiel.

L’école entrepreneuriale
Elle met l'accent sur le leadership personnalisé. Ce qui compte c'est la vision stratégique, le dirigeant doit s'être fait
une image mentale d'un état futur possible et souhaitable de l'organisation. Dans cette perspective, la stratégie
existe dans l'esprit du dirigeant comme orientation à long terme, vision d'avenir elle est enracinée dans l'expérience

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et l'intuition du leader. La stratégie est indissociable de la personnalité d'un personnage, elle dépend des processus
contenus dans la boîte noire de sa personne.

L’école cognitive
Pour cette école, seule une représentation préalable et claire du but à accomplir permet de guider l'action. On fait le
postulat que c'est en améliorant les représentations préalables que l'on va améliorer l'efficacité de l'action. Le
dirigeant est à la fois cartographe et utilisateur de carte. Pour cette école, l'environnement est moins appréhendé
dans son objectivité que construit ; l'action dépend de la construction d'une représentation de l'environnement et des
buts à atteindre. Dans cet environnement perçu, il y a coexistence entre plusieurs points de vue. Il s'agit alors,
moins de réduire l'écart entre des visions erronées ou imparfaites" et la "réalité de l'environnement que de gérer la
tension entre différents points de vue et de donner un sens partagé à l'action.
Dans cette approche, il s'agit d'abandonner le principe selon lequel l'organisation doit s'adapter à son
environnement, il faut par des actions ponctuelles tester, expérimenter et donc construire en avançant le plus
possible.
L'école de l'apprentissage
Pour elle, l'élaboration de la stratégie est pensée comme processus émergent. Cette école part d'une réflexion sur
l'action politique et non sur l'entreprise. Elle constate que les réorientations stratégiques pertinentes ne viennent pas
tant d'une volonté unique d'une direction générale mais que des inflexions majeures se font par une série de petites
actions et décisions prises par des gens différents.
Bien souvent les stratégies effectives sont le résultat non d'un plan préalable, mais s'élaborent par ajustements
successifs, à mesure que les décisions internes et événements extérieurs s'ajoutent pour créer un consensus qui
n'était pas prévu au départ Les stratégies délibérées mettent l'accent sur le contrôle pour s'assurer que les intentions
sont bien réalisées, dans l'action, les stratégies "émergentes" mettent l'accent sur l'apprentissage. Gérer dans cette
perspective ne veut pas dire préconcevoir les stratégies mais reconnaître les dynamismes qui peuvent contribuer à
la finalité visée définie de manière large. Il y a ici une remise en cause de la division pensée action. La méthode
consiste à agir, faire puis sélectionner ce qui fonctionne bien. La formulation n'est plus un préalable c'est parfois la
réalisation qui met sur la voie de la formalisation. Au regard de l'hyper formalisation des écoles précédentes, il y a
là un retour à ce qui peut paraître un pragmatisme.
Pourtant il s'agit bien d'un autre modèle de l'action : on prend acte qu'il n'existe plus un seul pôle de conception de
l'action mais plusieurs pôles de gestation de la stratégie. Le rôle du dirigeant ne consiste plus à pré concevoir une
stratégie mais à gérer le processus d'apprentissage à parti duquel la stratégie prendra forme. Son rôle essentiel et de
donner sens à l'action.
Pour que ce processus d'apprentissage se développe, il faut faire circuler les apprentissages, les expérimentations,
"les bonnes pratiques", il faut rechercher des savoirs extérieurs, faire circuler les savoirs d'un secteur à l'autre.
Mintzberg est conscient que cette école comporte des risques. Elle peut se confondre avec la débrouillardise, à trop
insister sur l'apprentissage, on peut sous-estimer la nécessité de directives pour traiter la complexité et l'incertitude
présentes dans une situation.

L'école du pouvoir
Elle insiste quant à elle sur la stratégie comme processus de négociation. Ses postulats : Les organisations sont des
coalitions entre des individus et des groupes d'intérêts Il y a des différences durables entre ces groupes. Les
décisions et objectifs émergent du marchandage, de la négociation ou de l'intrigue. On peut cartographier les
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structures du pouvoir et s'en servir, soit dans une perspective de renforcement autocratique, soit dans une
perspective d'élaboration coopérative des stratégies. Les effets de cette approche : les stratégies qui résultent de ces
processus conduisent à définir plus des stratagèmes que des perspectives.

L'école culturelle
La stratégie comme processus collectif. Les principes : L'élaboration d'une stratégie est un processus d'interaction
basé sur les croyances, les convictions partagées par les membres de l'entreprise. La stratégie est déterminée par
une perspective ayant ses racines dans des intentions collectives.
Cette approche conduit à porter l'attention sur les ressources les capacités dynamiques présentes dans un
environnement et une organisation. Ses effets : pour Mintzberg le risque de cette approche vient du fait qu'elle
encourage souvent moins le changement que la perpétuation de la stratégie existante.

L’école environnementale
Ses principes : L'environnement est l'acteur principal du processus d'élaboration de la stratégie. L'entreprise doit
lire l'environnement et faire en sorte de s'adapter : trouver des "niches pour son développement où mourir. Dans
cette perspective "d'écologie des populations", les évolutions se font avec des horizons temporels très longs. Pour
les organisations, l'extinction n'est pas une honte. Ses effets : dans cette perspective par opposition au volontarisme
rationnel qui sou tend les modèles précédents, on renonce quasiment à la notion de stratégie sauf en tant que
processus d'adaptation permanente.

École de la configuration
La stratégie comme processus de transformation. Le changement ne peut être géré, on peut l'ignorer, lui résister, lui
répondre mais pas le gérer le faire avancer par un processus ordonné, pas à pas. Il s'agit de tenir la tension entre
stabilité et transformation, la clef du management stratégique est de maintenir la stabilité ou du moins une
évolution stratégique adaptative le plus longtemps possible reconnaître aussi la nécessité de transformation et
savoir gérer ce processus sans détruire l'entreprise. Le processus d'élaboration de stratégie peut consister en
élaboration conceptuelle, planification formelle, apprentissage collectif, lutte politique ou concurrentielle, analyse
systématique et imagination directive, socialisation collective ou riposte aux forces de l'environnement … Et
autres, chaque formule doit répondre à l'époque et au contexte approprié aux configurations particulières. Les
stratégies peuvent prendre la forme de plan modèle de positionnement ou de perspectives, de manœuvres, mais au
moment voulu et en réponse à une situation donnée.
On devine que c'est là la "doctrine" actuelle de Mintzgerg pour sortir du dogmatisme de chaque école, faire du sur
mesure en faisant feu de tout bois. Vive le syncrétisme qui fait faire l'économie de définir des principes ses
méthodes puisqu'elles sont toutes bonnes!

Annette Obin, les écoles de stratégie selon Mintzberg, Note de lecture de Voyage en pays stratégique, l'exploration des
grands courants de la pensée stratégique, Ed. Village mondial, 1999

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