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Le fait religieux

Objectifs du cours :
- proposer une définition
- se pencher sur la nuance entre acteurs religieux et pratiques religieuses dans la Russie contemporaine
- on va considérer la religion comme une activité particulière au sein de la culture

Dimension transversale du phénomène humain (D. Hervieu-Léger).

- acteur religieux = individu, un groupe local, ou transnational ; porteur d’une conception du monde d’un imaginaire
culturel, social ou anthropologique ; agit sur la scène nationale et internationale, entre en rapport avec des acteurs
économiques ou politiques.
→ orthodoxie peut être considérée comme transnationale, puisqu’il y a des liens entre les églises orthodoxes dans le
monde.
- on peut étudier le fait religieux au niveau d’une paroisse.
Ce phénomène constitue une réalité sociale, culturelle et psychologique.

- pratiques religieuses = activités d’un acteur, car on considère un acteur religieux qui peut être un laïc, peut être
individuel ou collectif.
→ cet acteur n’est pas nécessairement seulement cantonné à la sphère religieuse.
- étudier les pratiques religieuses = essayer de comprendre les stratégies des
acteurs.

-des pratiques se fabriquent et échappent aux institutions.


→ orthodoxie populaire, mais plus généralement sur la religion en tant que mémoire, il s’agit d’un processus.

- activité se manifeste par réinterprétation en permanente des traditions qui s’adaptent aux nouvelles circonstances, ré-
évaluées sans cesse.
- religion apparaît comme immobile, mais en réalité toujours insérée dans son temps, improvise de nouvelles relations
entre clergé et laïques.
→ époque soviet = pas la même religion qu’aujourd’hui ; depuis les années 90, on voit apparaître
beaucoup de nouveautés.

Les différentes approches pour comprendre le fait religieux.

2 types d’approche pour le comprendre : quantitative et qualitative.

quantitative : prendre en compte la mesure, les statistiques, les pourcentages pr


étudier les comportements religieux.
→ quel est le nombres d’orthodoxe à souvent fréquenter la liturgie.
- c’est tout ce qui est susceptible à être quantifié.
→ le nombre de paroisses
- sondages (accomplis régulièrement par le FOM, Centre Levada, Sreda) :
portent sur les systèmes de croyance, permettant de mieux les comprendre ; intéressants pour analyser l’évolution des
pratiques.

qualitative :
→ cette approche est herméneutique, sémiotique et phénoménologique.
- herméneutique : science de l'interprétation des textes (philosophiques, religieux).
- sémiotique : théorie générale des systèmes de signes.
- phénoménologique : étude de phénomènes, étude dont la structure se fonde sur l'analyse directe de l'expérience vécue
par un sujet.

-on se met au niveau de l’acteur, on s’interroge sur la perception du monde.


→ quelle est sa conception du « sens de la vie », de la « signification » des choses ; on se penche sur ce que les
croyants pensent et éprouvent, ce qu’ils énoncent.

- présomptueux d’imaginer savoir ce qui se passe dans la tête d’autrui, c’est pourquoi on regarde les pratiques, mais
également les énoncés,
qui sont tangibles et sujets à une approche quantitative.
→ que signifie croire pour un individu ?

C. Geertz : il existe une culture religieuse, qui se définit par des cadres de perception, des formes symboliques et des
horizons moraux.
- on a aussi des approches comparatives (Russie/Europe, Occident…)

Polysémie de la religion.

- religion = terme polysémique (qui a plusieurs sens) ; c’est pourquoi il est difficile de définir une religion.
→on parle de religion civile par analogie, qui ne fait pas nécessairement référence à un au-delà ou a un dieu personnel.
analogie : ressemblance établie par l'esprit (association d'idées) entre deux ou plusieurs objets de pensée
essentiellement différents (cellule et cuisine).

- quand on parle de religion, est ce qu’on adopte une définition très large ?
Friedrich Daniel Ernst Schleiermacher : parle du sentiment de dépendance absolue vis-à-vis d’une réalité englobante
qui nous dépasse.
→ on peut alors envisager le bouddhisme ou le taoïsme, dans lesquels il n’y a pas nécessairement de dieu personnel,
comme on en trouverait dans le christianisme, l’islam ou le judaïsme.
- la définition de F.Schleiermacher est très large : est-ce qu’elle englobe aussi les religions civiles ?

- si on parle de religion en termes de divinité personnelle, on aura un sens plus restrictif.


→ dans ce cas-ci, le bouddhisme ne serait pas considéré comme une religion, alors qu’il l’est
par la loi russe
→ il y a des religions établies, reconnues, et certaines bénéficient d’un certain privilège.

- on peut non seulement définir la religion en termes de représentation, mais aussi de pratique.
→ peut-être considéré comme religieux quelque chose qui adopte, où ou on peut déceler un
comportement religieux : l’idée d’illumination, un terme qui donne accès à une réalité
plus fondamentale.

→ dans l’hindouisme, ce type d’approche est paradigmatique, l’illumination peut être considérée comme étant
religieuse.

paradigmatique : qui relève du paradigme = représentation du monde, une manière de voir les choses, un modèle
cohérent du monde qui repose sur un fondement défini.
- dans le rapport à la foi, on interroge ce que signifie croire pour un individu : comment la croyance s’énonce ?
→ pour certains, c’est par l’observation de certains rites religieux, respect des pratiques prescrites par des autorités
religieuses (dans ce cas on parle plus de comportement) ou encore appartenance à des Églises ou à des communautés
de croyants.

La religion comme activité culturelle.

C.Geertz : article « La religion comme système culturel » (1973) :


- risque une définition de la religion : tend à la définir comme un concept opérationnel.
- avant tout, la religion est une activité culturelle, c’est un système des symboles, de manière à susciter chez les hommes
des aspirations, motivation et dispositions puissantes, profondes et durables en formant des conceptions d’ordre général
durables sur l’existence, et en donnant à ses conceptions une telle apparence de réalité que ces dispositions ne
semblent s’appuyer que sur le réel.

- religion fait partie de la culture, mais à la différence de l’idéologie, elle est agencée en ethos.

Ethos :désigne d'abord le lieu familier, la demeure d'un individu, mais aussi le caractère habituel, la manière d'être,
l'ensemble des habitudes d'une personne. Il se rapproche du comportement.

- le système symbolique est lié à un comportement, et ne fait sens qu’en lien avec ces pratiques.
- modèle de et modèle pour : on peut dire que le système symbolique modèle également, donne une sorte d’abrégé de
ces activités ; selon le système symbolique, cet ethos peut varier énormément.
- pour lui, les tendances d’accomplissement d’une action ou le développement d’une émotion sont sujets à une
motivation vectorielle.
→ Modèle de :
→ Modèle pour :

- une religion peut être plutôt esthétisante ou moralisante, elle peut davantage avoir affaire avec le mood ; c’est un
climat, une atmosphère, même une humeur.
→ atmosphère dans une église orthodoxe n’est pas la même que dans une mosquée, ou une église catholique, il y a une
différence de culture religieuse.

- intéressant que mood soit aussi traduit comme une humeur, puisque l’atmosphère colore la totalité de l’expérience.
- conceptions générales de l’existence deviennent, en se répétant, en devenant rites, un
comportement ritualisé.
→ observation des périodes de carême, du Ramadan.

Sergey Sergeyevich Averintse (philologue et connaisseur de l’orthodoxie) :


→ développe le религиозный вкус ; d’après ce dernier, on peut se pencher sur la subjectivité du croyant face au
système.
→ pour un orthodoxe dans une église catholique, la messe peut sembler trop rigide, alors que, inversement, un catho
dans une église orthodoxe peut y voir un chaos, puisque les personnes circulent.
- une religion peut enseigner une résiliation stoïque, ou au contraire un activisme.
- même au sein des relations chrétiennes, il y a des différences importantes.

La religion en mouvement.

Le déracinement.

C.Geertz : notion du déracinement


- suite au constat du retour de la religion sur la scène publique, mais aussi de la dispersion des croyances et pratiques
dans le monde contemporain, et à l’émergence de nouvelles forme de religiosité qui, pour Geertz, exigent une façon
nouvelle d’analyser le phénomène religieux.

déracinement : processus de transformation et de reformulation de chaque religion particulière.


- religions séparées des lieux, peuples et formations sociales, des sites et des civilisations qui les
ont vues naître.
→ orthodoxes en France : pas la terre native de l’orthodoxie, mais elle s’est implanté en France.

- processus en cours, propre à toutes les religions, notamment du fait des mouvements de migration. - lorsqu’il y a
migration, il y a généralement remise en cause quant aux traditions religieuses, on exerce une sélection pour définir ce
qui constitue le noyau authentique dont on ne peut se passer et ce qui est dispensable
- religions qui se disent les plus traditionalistes sont en réalité passées par ce processus d’ajustement au monde moderne
en privilégiant certains éléments
- quand on parle de déracinement, on peut parler d’immigration, mais on peut aussi parler de
déracinement au sens historique
→ Russie, en URSS, a vécu une vraie rupture avec l’orthodoxie ; au moment de son retour, on a dû déterminer les
éléments qui resteraient.

- découvrir la foi et inventer des pratiques : un individu né dans une famille non-religieuse, avec des parents non
croyants, qui n’a pas grandi avec la religion dans son enfance aura un autre rapport à la religion que celui dont la
religion fait partie de l’environnement familial, ou qui a vécu dans un pays avec une homogénéité religieuse, et ou
l’alternative de ne pas croire ne s’est pas présentée.

Individualisation et subjectivation.

- autre facteur important, qui peut être conçu en prenant l’expérience soviétique : l’individualisation et la
subjectivation de la religion.

Charles Taylor, dans « A Secular Age » :


- parle de la trajectoire de la sécularisation en Occident depuis le Moyen Âge.

Sécularisation : faire passer des biens d’Église dans le domaine public, ou soustraire à l’influence des institutions
religieuses des fonctions ou des biens qui lui appartenaient.

- il part de l’évolution de la religion : en 1500 elle était l’option par défaut.


→ Lucien Febvre présente François Râblais comme un croyant – certains le présentent comme un champion de
l’athéisme - car l’athéisme n’était pas une option disponible ;
Spinoza a été accusé d’athéisme, pas car il ne croyait pas en Dieu (personne ne peut le savoir), mais parce qu’il
refusait les rites, dogmes et sacrements.

- individualisme moderne et croyances inscrits dans les pratiques, langages, gestes et automatismes.
- dans les sociétés traditionnelles, (ex. dans celle en 1500), la religion se confond avec la culture.
- pas de réelle distinction, on peut dire que la religion agit comme une teinture.
- rapport avec le divin s’établit toujours au travers d’une forme d’autorité sociale, que
ce soit le chef de maison, le magistrat ou le membre d’une cité.
Révolution expressiviste.

- dans les sociétés modernes, les religions sont des objets flottants, et on assiste à
l’émergence d’individualisme expressif, la recherche par les acteurs d’une manière authentique de
vivre sa foi
- idéal d’authenticité doit être contextualisé dans une histoire : avant, dans les sociétés
traditionnelles, on s’identifiait à un rôle : on avait une identité sociale, de laquelle dépendait
reconnaissance et réputation. Lorsque, au XVIIIe siècle, cet ordre social est brisé, apparaissent des
mouvements comme le romantisme, et on voit apparaître cette idée d’authenticité qu’il s’agit
d’acquérir, on se rebelle contre son rôle, contre le statut attribué.
Être soi-même/ se retrouver prend une dimension sociale importante, et devient un idéal de l’accomplissement de soi.
- parallèlement, on voit le rôle de la religion évoluer : lutte pour la tradition authentique consiste à trouver sa voie, vivre
en accord avec elle, au lieu de se soumettre à un conformisme, un modèle imposé de l’extérieur.

Danielle Hervieu-Léger (ayant étudié ces modalités modernes de la croyance), dans « La religion
pour mémoire », et dans « Le pèlerin et le converti » :
- distingue 2 figures types de la période de l’individualisation de la religion :

1. le pèlerin qui est embarqué dans cette quête de sensibilité : c’est une vocation exigeante, il faut avoir les ressources
intellectuelles, matérielles et spirituelles : nouvelle forme de quête spirituelles, on parle aujourd’hui de développement
personnel.
2. le converti qui se soumet à une autorité et embrasse une identité religieuse dans sa totalité : cette figure est plus
accessible, car il suffit de prendre ce qui est déjà fait, de répéter des gestes ; aussi une dimension d’authenticité dans la
mesure où l’adoption de ce mode de vie est sincère, on le fait avec une véritable adhésion.

- ce sont deux formes de sensibilité religieuses : le convertit n’est pas non plus le croyant moderne, un converti et
souvent un chrétien zélé, qui revient, redécouvre une tradition qui peut lui être
étrangère.

- religion-patrimoine et bricolage / dissémination du religieux = 2 aspects de cette


évolution.
- religion patrimoine = manière de réinterpréter une tradition, liant cela à la
problématique de mémoire – la religion comme mémoire ; spécificité de la religion, avant
tout attachement à une lignée croyante, une certaine généalogie, une tradition, mais qui peut aussi
donner une dissémination des interprétations très différentes, des fragmentations : c’est le
cas du pèlerin et du converti.

- l’individualisme peut basculer sur une action commune : Charles Taylor : « la vie religieuse, à
laquelle je participe, ne doit pas seulement relever d’un choix, elle doit aussi avoir un sens par
rapport à mon cheminement spirituel ».
- aussi cette idée du cheminement spirituel, de témoignage.

-Danielle Hervieu-Léger : une religion est avant tout un dispositif idéologique, pratique et
symbolique (on retrouve beaucoup d’élément de similitude avec Geertz) par lequel est constitué,
entretenu, ou développé le sens individuel et collectif de l’appartenance à une communauté
croyante particulière.

Tendances globales de la spiritualité en Occident.

-Russie : on retrouve souvent les mêmes tendances qui découlent de cette sensibilité, qui émergent
des différentes révolutions modernes
→ spiritualité plus intra-mondaine où l’accent est moins mis sur le salut dans l’autre monde, que sur le fait de vivre en
harmonie dans ce monde.

Yves Lambert : les anthropologue et sociologues de la religion ne mettent plus dans leur enquête le terme de salut, parce
qu’il n’est pas intelligible : mais qu’est-ce que le salut ?
→ quelque chose qui était évident pour les générations passées, mais ne l’est plus aujourd’hui ; ce n’est pas que l’idée
n’est pas là, mais on recherche plus une sorte d’illumination dans la quête spirituelle dans laquelle est engagé le pèlerin
(cependant, lorsqu’on parle des bienfaits de la religion, on répond souvent qu’elle permet de vivre en harmonie avec ce
monde, sans mentionner la notion de salut.)

L’article d’Yves Lambert

- on observe l’essor de la spiritualité individuelle en termes de réalisation de soi et d’expressivisme.


- on observe une dé-hiérarchisation et dé-dualisation entre corps / âme, matière/ esprit.
- parle de l’organisation en réseaux diffus et privés de centre, connecté par des
affiliations génériques
→ cela peut être les réseaux sociaux.
- parle aussi de para-scientificité
→ on peut se dire orthodoxe et croire en l’astrologie ou la télépathie ; en quelque sorte une foi relativiste, pluraliste,
fluctuante, lorsqu’on parle du pèlerin

La “sécularisation forcée” ou 70 ans d’athéisme d’État.

- comprendre la Russie contemporaine (qui n’est pas étrangère à ce mouvement général) = se pencher sur la trajectoire
particulière du religieux.
- sécularisation forcée et les 70 ans d’athéisme ont laissé une marque : conditions socio-politiques soviétiques ont
modifié la place de la religion dans la vie quotidienne ; rites sont transmis, mais leurs sens sont en grande partie oubliés,
puisque les monastères sont fermés (ou très peu subsistent). → monastère de Solovki transformé en Goulag.

- années 20, dans le cadre de la collectivisation, on commence souvent par la destruction de l’église du bourg, ce qui fait
qu’il reste très peu d’églises ouvertes.
→ autorités bolcheviques encouragent les manifestations spontanées contre une institution accusée d’être contre-
révolutionnaire : exécution sommaire des membres du clergé, vandalisme et profanation des reliques des saints.
→ environ 600 évêques et 400 prêtres orthodoxes sont physiquement éliminés entre 1918 et 1938, soit 80-85% du
clergé.

- élaboration de la législation soviétique = premières persécutions systématiques se


traduisant par la confiscation d’objets de cultes et nombreux procès arbitraires.
- beaucoup des évêques restants partent au goulag.
- pendant la guerre, Staline accepte quelques concessions aux croyants, qui permettent la réorganisation des institutions
ecclésiales, après 1961 ; mais c’est un répit de courte durée, puisque sous Khrouchtchev, dans le cadre de la
modernisation accélérée, un nouvel assaut est mené contre l’Église.
- Khrouchtchev soucieux de montrer sa fidélité au léninisme, et d’endiguer un réveil trop ostentatoire de la foi religieuse
dans une société en marche vers le communisme : cela ne faisait pas bonne figure.
- chute de Khrouchtchev = fin des persécutions, mais la religion reste surveillée.

- sous Brezhnev, la hiérarchie est embrigadée pour promouvoir la politique extérieure soviétique sur la scène
internationale ; clergé infiltré par le KGB.
- sorte de nomenklatura ecclésiastique qui vit dans une cage dorée, très éloignée du simple croyant.
→ à la veille de la perestroïka, à Pâques, on pouvait faire passer à la télévision un concert de chanteur italien pour
empêcher les gens d’aller à l’Église : on n’affichait pas le fait d’aller à l’église, car cela pouvait entacher la carrière.

- religions animistes : lutte contre le chamanisme ; persécutions ciblées.


→ début des années 70, (sous Brezhnev), on assiste a un fameux procès : celui
d’un bouddhiste passé par les camps staliniens qui attirait beaucoup l’intelligentsia ; il est mort dans un camp en dépit
de sa vieillesse.

Commentaire de la diapo 6 : La ligue des sans-Dieux militants, la première édition de безбожник, nous avons le
programme (?).
- С земными царями разделались, принимаемся за небесных, « on a fini avec les souverains terrestres et maintenant
on s’en prend au souverain du ciel ».
- slogans comme « prendre le ciel d’assaut », concernant les trois monothéismes ou les autres religions.
- recensement du 6 janvier 1937 (dont on a pris connaissance dans les années 90, car tenu secret – les autorités ont
accusée les participants de sabotage), en URSS, 57 % de la population adulte se déclare être croyante : la question était
« croyez-vous en Dieu ? ».
- àl’époque circulaient des rumeurs qui disaient que ce sondage était un moyen pour les autorités de distinguer les
croyants et de les punir
→ on peut donc imaginer que certains ont répondu non, car ils craignaient les retombées.

Spécificités de la situation religieuse en Russie à l’aube de l’expérience soviétique.

plusieurs impacts sur la situation religieuse :

• survie des pratiques religieuses


- baisse de la pratique religieuse, mais aussi transformation dans le sens de la décentralisation et
désinstitutionnalisation de la religion : moins de clergés, moins d’églises ; encadrement paroissial, déjà peu fort,
disparaît.

• coexistence des rites soviétiques et religieux


- analyse la naissance et la coexistence, moins conflictuelle qu’on pourrait le décrire, entre ces deux rites.
→ il n’est pas rare d’être au camp de Somol ou membre du parti, et d’aller en même temps discrètement à l’église.

• compromission du haut clergé avec le régime (« nomenklatura ecclésiastique »

• renouveau religieux des années 1970 et 1980


- renouveau dans ces années, qui se fait également dans la littérature : retour du religieux commence dès les années 70 ;
on pratiquait discrètement + pas rare d’avoir une cachette pour cela.

• féminisation des cadres religieux (бабушки) qui transmettent des pratiques


- répressions conduisent à la féminisation des cadres religieux, dans la mesure où la religion se conserve par la mémoire
du geste.
D. Hérvieu-Léger : propose de s’interroger sur la religion pour mémoire ; essentiellement la reproduction des
pratiques, notamment celles des grand-mères, car c’est à elles qu’on
prête le savoir + une affinité par lieu commun dans la pratique des бабушки, qui consiste à
fréquenter régulièrement une église
- бабушки jouent un rôle très important dans la transmission religieuse, notamment du fait de leur rôle déjà important
dans la famille russe
- pas rare qu’elles aillent discrètement baptiser un enfant (différence avec les hommes, puisque si les pères baptisent les
enfants, et que cela se sait, il y aura moins d’indulgence).

• renforcement des solidarités (familiales, locales, ethniques…)


- ont joué un rôle incontestable dans le développement du religieux.

Une renaissance religieuse ?

- adhésion religieuse : se manifeste par la capacité à reproduire le plus fidèlement possible les gestes
répétés dans la famille (sans que leur signification ne soit toujours interrogée)
-1987, 2 ans après l’arrivée de Gorbatchev au pouvoir, signes avant-coureurs de changements de comportements
d’attitude des autorités
→ commémoration, en 1988, du baptême de la Russie : événement inédit, a constitué un tournant psychologique.

- après cette date, on avait plus peur d’afficher la croyance et on pouvait même voir un prêtre organiser des soirées pour
présenter et promouvoir la religion orthodoxe à un public, souvent, non-croyant
- gestes de bonnes volontés des autorités se sont multipliés : constatation d’une volonté de coopération, même si
l’appareil bureaucratique oppose une résistance.

- septembre 1990 : adoption de la « Loi sur la liberté de conscience », en remplacement de l’ancienne réalimentation
stalinienne
- efforts pour faire renaître la vie paroissiale
- églises ont le droit de faire la bienfaisance de la catéshèse.
→ à l’époque soviet l’église était seulement cantonnée à la liturgie, les paroisses
étaient loin, pas rare de parcourir 20 km pour en trouver des ouvertes, alors parfois on se
rassemblait dans des entrepôts.

- médias accordent + de place aux questions de spiritualités


- généralisation de cours sur la religion dans les établissements secondaire et supérieurs
- canonisation de nombreux saints : reconnaissance du martyr subi par les croyants lors des persécutions apporte un
nouvel élan spirituel, constituant un gage de purification intérieure après des années de compromission et de silence
→ le patriarche Alekseï II a exprimé son repentir pour toutes les fautes commises envers la hiérarchie ; le pouvoir ne
pouvait plus ignorer l’évolution d’une partie de la société.

- élites intellectuelles abandonnent les principes de base du marxisme et se


tournent de plus en plus vers la spiritualité et vers l’héritage culturel national
- ce retour du spirituel est indissociable d’un retour d’une identité nationale, morale et culturelle vers la religion
orthodoxe.
Une société post-athée.

- trajectoire intéressante ; on peut se demander s’il s’agit d’une société post-athée, dont
certains chercheurs développent le concept.
- 2012 : seulement 13 % de personnes se disent athées, après 70 ans de communisme
- 2013 : seulement 5 - 6% (selon le centre Levada.) + environ 70 % « croit en Dieu ».

La question de la sécularisation.

Marcel Gauchet, dans « Le désenchantement du monde » : développe la sécularisation.


- diverses théories sociologiques à ce sujet, mais on peut les ramener à 2 orientations distinctes :

1. Peter Berger parle de sécularisation en termes de pluralisme religieux, c’est-à-dire que la religion est envisagée
comme un domaine parmi tant d’autres : parmi la politique et l’économie. Ces domaines acquièrent une autonomie vis-
à-vis du religieux. Les religions traditionnelles ne remplissent plus la fonction intégrative qui était la leur autrefois.
Cette initiative est remplie par d’autres institutions
→ l’enseignement passe à l’école / l’université.
Cela entraîne une sorte de privatisation de la sphère religieuse.
Souvent, on parle d’institutions dans la définition de la sécularisation (on voit en Russie dès Pierre le Grand une
première sécularisation.)

2. Marx Weber : parle de sécularisation en termes d’Entzauberung (désenchantement/ démagification). : la causalité


scientifique prend le pas sur la croyance aux esprits, la sorcellerie, le mauvais sort, le mauvais œil.
- il met l’accent sur la rationalisation croissante des sociétés modernes.
- la science prétend expliquer le monde sans reste, c’est-à-dire qu’elle rend inutile tout retour à une causalité non
historique, transcendante, étant étrangère au domaine de l’expérience / de l’expérimentation.
- le refus de recourir à quelque chose d’irrationnel ou surnaturel (cela est valable dans le comportement comme dans les
institutions) constitue l’essence de ce processus.
→ pour se soigner, on a pas recours à des sorts ou des prières, mais croyants comme non-croyant vont à l’hôpital.
- la religion n’est plus la référence ultime de toutes les activités humaines et termes de causalité.
- autrefois dominante, elle se retrouve en compétition avec d’autres univers religieux,
scientifique, etc ; cela a une répercussion sur la manière dont le fidèle acquiert une confiance plus
aiguë de la relativité historique et sociale de sa croyance.
- pluralisme religieux indispensable pour comprendre la place de la religion aujourd’hui.

- critiques de cette théorie – pour Taylor le déclin de la religion n’est pas inexorable, il y a
une transformation, parce que les conditions de croyance changent.
- ceux qui consentent au caractère englobant et uniforme de cette notion soulignent que c’est une catégorie qui repose
sur une représentation mythique de l’âge de la foi, où la sécularisation est vue comme la fin de l’histoire.
- lors du passage à la société post-athée, on entend parler de réenchantement du monde ; d’après
Taylor, la sécularisation interne des contenus religieux et culturels ne doit pas être vue en termes de
pertes (de l’emprise de la religion sur une société, qui se veut maîtresse de son destin), mais plutôt
en termes de mutation interne et de recomposition des représentations – idem que Geertz, avec son
idée de déracinement.
- la vie religieuse se transforme, mais ne disparaît pas, sous la base de 3 facteurs :
déracinement, sécularisation et individualisme.
Sécularisation – définition.
Peter Berger (1971): « Nous entendons par sécularisation […] le processus par lequel des secteurs de la société et de
la culture sont soustraits à l’autorité des institutions et des symboles de la religion. »

- sécularisation des sociétés


- sécularisation des consciences

José Casanova :
1. l’importance décroissante de la religion dans la société
2. le retrait de l’espace public de la religion
3. la libération de certaines parties de la société (économie, science, art ou politique) du contrôle direct de la religion.

Cliford Geertz :
postule l’existence d’un cosmos sacré : il offre un rempart à 3 fléaux, qui sont la perplexité, la souffrance et le mal.
- utilise le terme bafflement (compliqué à traduire) pour décrire la perte de repères/ de sens dans la vie, dans laquelle
peuvent apparaître des questions existentielles et des suspicions quant à sa propre foi ; elle agit à un niveau mental.
- la souffrance est physique, et le mal est moral ; et la religion a vocation à répondre à ces 3
préoccupations inévitables dans l’existence ; pour cette raison, on peut penser que la religion a une
certaine pérennité.
- penseur russe Vassili Rozonov écrivait dans «Mes malheurs»:
« la souffrance de la vie est plus grande que la volonté de connaître la vie, c’est pour cette raison que la religion sera
toujours triomphante de la science ».
- la souffrance porte une dimension psychologique, intellectuelle, et physique.

Spécificités de l’anthropologie religieuse de l’Orthodoxie.

- difficulté au niveau de l’analyse de l’impact du religieux dans une culture/ société.


- dans les études, comme celles de Taylor, orthodoxie très peu évoquée, il est plutôt question du monde
catholique/protestant ; pas suffisamment d’étude – hors étude de cas.
- anthropologie orthodoxe suppose un rapport particulier au monde (la religion en tant que système symbolique forme
un ethos) où l’institution religieuse est traditionnellement faible, mais surtout, où la théosis, divinisation de l’homme,
est au cœur du salut.
- vision du monde, dans lequel ce dernier doit être facilement transfiguré / absorbé par
les énergies divines ; en découle une idée de divino-humanité, dont le mystère permet de penser
l’unité, elle exclut tout dualisme qui séparerait l’Église du monde/de la culture ou encore le sacré du
profane.
- idée de symphonie entre le ciel sur la terre.
- vision d’un monde où l’État disparaît et devient Église, on a l’idée de christianisation de la culture qui est très
caractéristique de l’orthodoxie.
- théologie négative (apophatique) qui interdit toute figuration de la divinité ineffable, qui échappe à toute définition
- orthodoxie se présente comme une religion du mystère divin dont l’atmosphère/ mood/ tonalité dominante tournent
autour de ce mystère ; il imprègne la culture religieuse de l’orthodoxie.
→ le silence, la pratique mystique créent cette atmosphère du mystère, ou le primat va à l’indicible ; ce qui ne peut
être dit est difficilement mesurable, alors comment exprimer ce qui ne se dit pas toujours ?
- incidence sur la théologie politique : on s’interroge ici sur la nature d’une autorité politique
légitime, par exemple une Église.
Kathy Rousselet, spécialiste de la religion : s’appuie sur le théologien américain, Richard Bergeron, pour présenter les 2
options / attitudes possibles dans le rapport entre christianisme et culture.
- selon elle, il y a « Christ contre la culture » et « Christ dans la culture » : dans l’orthodoxie les deux sont présents.
→ dans les frères Karamazov, on voit le christ dans la culture.

- Christ dans la culture : vise à intégrer/ christianiser l’intérieur de la culture.


- théologiens religieux, tels que Serge Boulgakov, au XXe siècle, étaient partisans du christ dans la culture, la valeur
intrinsèque religieuse de la culture.
- on cherche une harmonisation des 2 éléments.

Christ contre la culture : condamnation de cette dernière, vue comme corrompue ; cette vision est aussi présente dans le
monachisme russe.

Monisme autoritaire.
Serge Averintsev – qui détermine le rapport envers le pouvoir dans l’orthodoxie, qui diffère de ce
qu’on trouve dans le catholicisme/protestantisme – développe que la culture a une dimension
autoritaire, elle est y historiquement liée
- on ne distingue pas le profane du sacré, le public du privé
→ manuel de conduite ménager, qui donne les règles de conduite aussi bien à l’église qu’en privée : comment se
comporter à table, envers son épouse...

Pluralisme autoritaire.
En Occident (ce n’est pas autorité en Russie et liberté en Occident) il y a aussi de l’autoritarisme,
mais ce qui est plus propre à l’Occident est le pluralisme autoritaire.
→ artiste de la renaissance, Cereni ? Qui, au XVIe siècle, a peint des fresques osées, et s’est vu accusé par
l’Inquisition ; il a invoqué, pour s’en sortir, les traditions de l’ordre monastique auquel il appartenait – les
franciscains, chez lesquelles ces « transgressions » étaient admises.

- Occident, jamais seulement un seul maître (ordres/guides), ce qui permet un certain jonglé avec les autorités, car
chaque ordre a sa spécificité/discipline, qui peut être rigoureuse, mais pas autant qu’en Russie.
- tradition de pensée orthodoxe russe, qui définit la personne, личность, et non l’individu, par sa relation avec la
communauté, соборность, que l’on traduit par conciliarité.
- par sa relation avec sa communauté les liens d’amour qui unissent les personnes membres de l’Église.

Les chiffres et la difficulté de leur interprétation.

- aujourd’hui, communauté et l’identité collective mises en avant


- entre 1990 et 2010, pourcentage de personnes se déclarant orthodoxes oscillait entre 60 % et 80 %
- Islam: 6-7%
- sondages : révèlent un décalage entre ceux qui se déclarent orthodoxe et ceux qui pratiquent ; plusieurs explications à
ce fait : très souvent ces chiffres (ex : fréquentation de la messe) jugés comme un indice important de la
sécularisation, mais il faut prendre en compte la spécificité sociologique/ anthropologique
religieuse orthodoxe, qui déteint sur sa théologie et aussi sur la pratique religieuse
- réponse la plus partagé : le fait d’être orthodoxe n’a rien à voir avec une quelconque
religiosité, mais de marquer une identité collective → sert à désigner une appartenance ethnique
ou nationale, comme sujet de la fédération de Russie

- 3% – 8 % des sondés fréquentent régulièrement l’église –> le chiffre peut monter à 10-12%
si on tient compte de ceux qui communient plusieurs fois dans l’année
- sondage en 2012 (Institut Sreda), seulement 41 % des personnes interrogées se disent orthodoxes dans l’Église : qui
ont une pratique quelconque, même 1 fois par an ; seuls 16 % des sondés et 29 % des personnes se disant orthodoxes
font confiance au patriarche = autre difficulté méthodologique
- les énoncés du patriarche doivent prendre en compte ces données
- Russie, l’imaginaire qui est attaché à la figure du chef de l’Église est celle de quelqu’un de spirituel – ce qui
n’est pas forcément le cas du patriarche actuel, Cyril
- pour le pape, pas la même exigence que pour le patriarche : chef d’un État, le Vatican, doit donc tenir ensemble
l’Église, alors que dans l’orthodoxie c’est différent
→ on a la figure du père spirituel éminent ; quand on cite le Patriarche, garder à l’esprit que cela ne reflète pas
nécessairement l’opinion des orthodoxes.

- Église russe pas pour habitude de diviser les fidèles en catégories (baptisé/pratiquant occasionnel/sympathisant), on
oblige pas une participation régulière à la liturgie
- chiffres importants, mais il est en notre droit d’apporter un regard critique, en interrogeant d’abord quelle est
l’importance portée à la fréquentation de la liturgie dans la religion elle-même
- une partie de vérité (et pourquoi pas de faits de mode), mais aussi cette dimension à laquelle on accède
uniquement si on prend le point de vue de l’indigène (concept de Geertz, sur la considération d’un
élément, par le croyant, dans son échelle de valeurs).

La « religion minimale » (Mikhaïl Epstein).

Mikhaïl Epstein – érudit littéraire et essayiste russo-américain :


- d’autres éléments à prendre en compte, notamment les 70 ans de communisme, qui laissent des traces dans la
reconstruction d’une spiritualité chrétienne
- idée de foi à épurer, la foi pure et simple, qui constitue une sorte de minimalisme religieux fondé sur une expérience
immédiate du divin en dehors la tradition (ni doctrine, ni temple, ni rite)
- en même temps elle reprend à son compte et réinterprète certaines traditions et valeurs orthodoxes
- pensée religieuse du début du XXe siècle a aussi apporté des éléments : certains sont mis en valeur, comme la
pauvreté, le dépouillement, le silence actif/écoute
- souci du concret qui postule la valeur absolue du singulier ou du prochain
- entretiens très dirigés peuvent être un remède pr le sociologue afin de détecter ce qui passe sous les radars
entretien, L.Thévenot interrogeait un écologiste sur ses motivations, ce dernier n’a parlé de chrétienneté qu’au moment
où cela lui a été directement demandé, nous apprennant que sa foi est une motivation première : cela s’inscrit dans la
religion minimale, qui n’est pas si éloignée de la tradition orthodoxes

- disciples de Lev Platonovitch Karsavin (historien et penseur religieux) postulaient que la religion devrait intégrer aussi
l’athéisme, dans la mesure où il débarrasse de fausse conception de Dieu
- absence ou retrait de Dieu comme une marque paradoxale de sa présence est vécue dans un cercle immédiat
→ auprès de sa famille, d’amis, de proches plutôt qu’au sein d’une église.

- religion minimale = forme de modernisme religieux porté vers l’œcuménisme et difficilement saisissable et
quantifiable (Epstein = 18 % pop croyante)
- certains se déclarent simplement chrétiens sans préciser davantage, personnes susceptibles de s’apparenter à ce type de
religion

- encrage historique, dès le XVIIe on a une icône qui représente ce silence, celle de Saint-Jean le Théologien dans le
silence : fait le geste du silence + en posant sa main gauche sur sa bouche = symbolise le caractère ineffable du
caractère divin, tandis que sa main droite est posée sur la parole : révèle la parole de Dieu
- même si elle est difficile à cerner, c’est une pratique qui a une mémoire culturelle et revendique un héritage
- culture c’est la mémoire non héréditaire d’une société, elle doit être transmise

Citation d’Epstein : « Elle [la religion minimale, бедная религия – IP] cherche à honorer ‘l’image et la ressemblance
de Dieu’ dans les personnes qui partagent nos vies […] Parce que cette religion est née hors des structures
confessionnelles elle a sa propre forme d’universalisme, une forme d’œcuménisme spontané et irréfléchi, où la
coexistence de formes plurielles de spiritualité et de culte est prise pour acquise. Même lorsque des gens qui partent de
ce type de spiritualité finissent par rejoindre une église, comme beaucoup le font, ils conservent quelque chose de la
conception première ».
- la religion minimale est un mouvement dépassé, pr laisser place à des mouvements plus voyants et revendicateurs
- religion minimale = tendance difficilement quantifiable, mais pas impossible à mesurer.

Boris Dubin sur les convertis

Boris Dubin – sociologue russe et traducteur :


- nouveaux/anciens croyants
- pr une certaine partie de la pop orthodoxe, les pratiques religieuses qu’on retrouve ont pr but de restaurer une
civilisation entièrement orthodoxe, impliquant public et privé : cette petite minorité n’est pas négligeable, surtout à l’ère
des réseaux sociaux
- élaboration de nouvelles normes religieuses laissent apparaître les virtuoses religieux (Marx W), avant tout des moines
au M-A
- époque soviet, culture religieuse avant tout portée par des laïcs que par des prêtres → change avec le nouveau courant
des sachants, entre les mains desquelles se trouve la religion

- pr nouveaux convertis ce n’est pas tant ce qui est transmis qui importe, mais ce qui est lu
- tradition de transmission délaissée au profit de vision d’une catégorie d’experts, qui s’oppose à ceux qui ont transmis
la tradition, ce qui entraîne, parfois, des conflits à l’intérieur des paroisses

Dubin : différences : ceux qui se déclarent les+ croyants (jeunes niveau d’études supérieures) se disent aussi les + attirés
par la magie et l’astrologie : défendent adhésion religieuse minimale où les pratiques religieuses, acquérant une
visibilité publique, s’intègrent à des modes de vie complètement sécularisés
- absence d’engagement = phénomène qui traverse l’ensemble des sphères sociales en Russie, ce n’est pas spécifique à
la religion

- nouveaux croyants, autour de prêtres eux aussi récemment convertis, découvrent un mode de vie intégralement
religieux
- invention/élaboration de la tradition : on peut la qualifier de conservatrice, antilibérale et parfois pro-monarchiste

- cet élan vise à la renaissance d’une langue religieuse spécifique : marqué par une vision manichéenne du monde où la
notion de péché prend une place considérable
- vie du croyant pratiquant régulier présentant comme étant sans réelle autonomie, d’où la nécessité de l’obéissance à un
père spirituel
- pratique de plus en plus exigeante, allant jusqu’à vouloir adopter un mode de vie monacal, l’idéal = virtuose religieux.
Kathy Rousselet : phénomène de délégation, soulève que le faible nombre de pratiquants correspond au nombre de
ceux qui se disent orthodoxes, car « pour les croyants qui préfèrent déléguer à ceux qui savent, la pratique se réduit à
la demande de prière pour les vivants et les défunts de leurs familles, aux cierges qu’ils font brûler pour ceux qui leur
sont chères et aux objets sacrés achetés ».
délégation :
- dynamique où ce qui paraît opposé se renforce
- orthodoxie n’est plus intimement liée au monde rural, importante transformation
→ aujourd’hui la pop est urbaine et les nouveaux membres pleinement inscrits dans la civilisation post-soviétique
découvrent le style de vie orthodoxe à travers les médias.

La paroisse en chiffres.
- paroisse = unité de base du religieux au quotidien, s’inscrit dans le rythme quotidien
- on assiste actuellement à l’accroissement du nombre de paroisses : fin des années 1980 (7 000 paroisses) à 2013 (35
000 paroisses), x 5
- accroissement continu régulier, au rythme de 7-800 par an
- paroisse = lieu important, celui de la socialisation religieuse : là se transmet la mémoire des gestes, des pratiques et
des croyances.

Les pratiques religieuses par le « bas » (la paroisse).


- différence importante sur le plan historique entre les 90s et les 2000s
- 1990, on construit des paroisses et on restaure des églises à l’abandon : cet engagement = moment fort de la
constitution des identités, participer soi-même en équipe avec d’autres à la construction d’une paroisse = sorte de mise
en pratique d’un idéal religieux commun
- valeurs qui ressortaient le plus à l’époque = l’autolimitation, l’ascèse.
Ascèse : effort visant à la perfection spirituelle par une discipline constante de vie

- ajd encore on distingue églises édifiées par des volontaires dites « sur les larmes » et celles construites par les
businessmen dites « sur l’or ».
- 90, nombre important de personnes éprouvant des difficultés matérielles et absence d’attaches familiales, se sentant
seules, trouvent dans la modestie et sobriété affichées de l’église une famille : peuvent s’impliquer dans la vie de la
paroisse, dans l’unité vers but commun
- s’agit aussi de construire une nouvelle identité religieuse.

- Olga Koveneva, sur les différents modes de mis en commun en Russie (le travail physique collectif) :
« Dans cette modalité du commun, les actions concrètes, y compris celles qui prennent la forme d’un travail physique
côte-à-côte, s’épaulant et se serrant les coudes, ont tendance à être davantage valorisées que la participation a des
débats publics et organes de concertation ».

- 2000, autre phénomène, afflux des paroissiens plus aisés, famille, ayant découvert la religion par la lecture : arrivent à
l’église avec déjà une motivation religieuse, ce qui n’est pas toujours le cas dans les 90
→ anciens militaires, qui pouvaient finir par rejoindre la communauté, participaient souvent à la construction de
l’église, vivaient à l’aide des paroissiens, finissaient avec le temps par devenir + religieux
- paroissiens qui accordent beaucoup d’importance de la réputation de père spirituel
- ds les 2 cas l’appartenance à une communauté choisie prime largement sur l’inscription dans l’institution religieuse.
- logiques informelles en conflit avec les processus institutionnels de réinvention des traditions et d’introduction de
nouvelles normes.

La paroisse et l’évolution de la culture religieuse (K. Sergazina).

- culture ds paroisse orthodoxe a évolué dans 2 directions différentes :

1er courant : cherche à conserver la tradition locale, coutumes/idées perpétrées dans la famille
→ célébrations, fêtes, traditions liées à la sanctification d’un espace privé, corps ou habitation avec les objets
porteurs de grâce, (pain eucharistique, eau bénite.)
- pr ces fidèles, vie religieuse s’intègre dans l’espace du régime soviétique
- maintien des prières doma permet de garder le lien avec la culture des ancêtres ; c’est pk reconstruction des églises
particulièrement importante pr ces fidèles, car elle symbolise un retour à ce passé.
2e courant : apparu dans les 2000s, possède une nouvelle culture religieuse d’en haut, en créant de nouveaux croyants
et de nouveaux textes → livres, émissions de tv, prêches, usage des réseaux sociaux (vidéocassettes).
- donner sens neuf aux substrats anciens = construction nouvelle culture pensée comme un retour à la tradition des
ancêtres, comme renaissance de la culture russe.
- reconstruction de la vie religieuse remplacée par construction d’une nouvelle réalité orthodoxe.
→ voyages remplacés par pèlerinages, littérature mondaine par celle orthodoxe, films par des sur-cassettes.

- souvenir de l’importance des objets sacrés provenus de monastères


- on accorde une grande importance aux jeûnes et carêmes
- faute considérée comme une tentation
- conflit entre les nouveaux et anciens croyants :
- certains membres actifs pensent que tous les orthodoxes devraient prononcer les vœux monastiques
- idéalisation de la Russie d’avant XVII se manifeste par rejet d’icônes occidentales
- nouvelle tradition religieuse
→ chanteurs issus de la première communauté peuvent être assis ou debout dans le chœur, mais gardent le silence ;
recueil des chants habituel constitué de chants religieux polyphonique ; de l’autre côté, le chœur d’hommes et de
femmes s’efforce de rétablir les anciens chants, du XV-XVIe siècle dont la maîtrise a été interrompue ; paroissienne de
la 1ere génération dit : « ils répètent tous comme au concert, nous on chante Dieu sans répétition. Il faut jeter ces notes
au feu, on en a assez d’avoir peur, on est chez nous quand même ».

- croyant de la communauté de la 2e période familiarisés avec les traditions de l’église par les femmes de la 1ere période -
venir à l’église = vision plus complexe.

- thèse de Charles Taymor, sur les nouvelles conditions de croyance : peut expliquer la réactivation d’une spiritualité
restauratrice.

A. Agadjanian : 2 types de paroisses :

1. constitue un petit univers de certitude, dans lequel on observe une homogénéité des croyances et des pratiques ;
fonction = ordonner les expériences individuelles.
2. constitue une communauté sans frontières fixes, qui agit sans rechercher l’homogénéité maximale ; « procès de
‘convergence’ mutuellement reconnue des démarches personnelles de ses membres ».

- ces 2 types sont actuels et constituent une reconfiguration de l’univers de la piété, des religions-mémoire, c’est-à-dire
qu’ils créent et engendrent une chaîne mémorielle.

La question de « l’Orthodoxie populaire ».

→ tt cela ns conduit à la question de l’orthodoxie populaire


étude de Boris Doubine : il existe une double foi ou foi multiple = certaines idées et symboles chrétiens cohabitent
avec des survivances magiques traditionnelles (→ mauvais œil, amulettes…)
- orthodoxie populaire = objet d’étude pr folkloristes et ethnographes qui étudient les pratiques religieuses hors du
cadre de pratique conventionnel

- conflit / lutte pour l’authenticité entre les nvx détenteurs de la norme et porteurs de la « religion populaire » :
ds Orthodoxie, 2 types d’autorités religieuses + 2 modes de légitimation de l’autorité qui s’affrontent :
1. autorité traditionnelle → clergé
2. autorité charismatique → « femmes savantes » ; époque soviet → starcy (pères spirituels).

- selon clergé, religion populaire empreinte de superstitions païennes et bcp militent pr conservation/renaissance de la
culture ancienne liée aux icônes miraculeuses
- clergé + clément pr culte des icônes, lieux de pèlerinage, eau bénite, fabrication de nouveaux saints
→ Pélagie de Riazan, Evgenij Rodionov…
L’hypothèse continuiste (K. Rousselet).

« Le religieux est un élément intrinsèque d’un certain mode de gouvernement, rendu possible par
une reconstruction identitaire entamée par les élites et rapidement poursuivie par l’ensemble de la
société. Paradoxalement, ce mode de gouvernement s’inscrit dans la continuité du gouvernement
soviétique ».

- dynamique vient + du côté de l’État que du côté de l’Église, mm si y’a certaine


connivence
- Nikolaï Mitrokhine (historien) : coexistence reste difficile, soutien que l’État accordait à l’Église orthodoxe en Russie
n’est qu’un « mythe utile aux deux parties » :
« il est utile à Vladimir Poutine pour être reconnu comme père de la nation, par le pouvoir sacré et la société civile ; et
la hiérarchie de l’Église reçoit sans contexte beaucoup plus d’attention de la part de l’État que les autres religions
présentent en Russie. Elle utilise activement le capital symbolique
de l’attention qui lui est apporté par la première figure de l’État et nombres de c es représentant, au
niveau de l’État et pas au niveau local. Ils sont loin de répondre à toutes ses attentes par des
propositions sérieuses de l’Église à l’État qui prétend de devenir un partenaire sérieux stratégiquedans une des sphères
de la vie sociale et politique ».
→aucune des propositions n’a été adoptée au cours des 8 dernières années, c’est pr ça qu’il parle d’un mythe utile.

Structures et gouvernance de l’Église.

organisation :
→ Saint-Synode
→ Patriarcat
- rassemble les chrétiens à l’intérieur de l’ex-URSS (sauf Géorgie et Ukraine) ;
- 5ème Place après le patriarcat œcuménique ;
- ensemble pluriethnique ;
- 2008, L’Église = 478 monastères, 5 académies, 3 universités orthodoxes, 2 instituts théologiques, 38 séminaires, 39
collèges.
- K. Rousselet : « L’Église n’impose pas sa matrice. En fait, c’est bien plutôt la matrice politique qui est imposée au
religieux ».
- autoritarisme prime sur conciliarité.
- clientélisme et réseaux dominent dans le gouvernement de l’Église

→ Patriarche = manière de + en + autoritaire de gouverner l’Église, ce qui n’est pas du


t dans la tradition orthodoxe, mais il s’agit d’un claque sur l’État : Vladimir Poutine exerce un
certain autoritarisme, le patriarche en fait autant ; idem pr la gouvernance en réseau.

L’État et la religion aujourd’hui.


K. Rousselet : décrit l’État en termes d’autoritarisme, d’affirmation d’une spécificité nationale et une
volonté de modernisation : « L’instrumentalisation de la liberté de conscience et de la laïcité à des
fins de modernisation politique demeure en partie visible au cœur du régime de Vladimir Poutine ».

- fin du régime soviet, religion au cœur de l’entreprise de moralisation de l’espace public, lors de célébration du
millénaire de la Russie, thème dominant = « purification »/détachement à l’égard du soviétisme.
- Le Repentir (1984), film soviétique de T. Abouladzé= allégorie sur le stalinisme ; pose la question de la possibilité de
retrouver la voie vers le temple.

- ajd question différente : on entend parler de valeur morale ou de valeur traditionnelle, lorsqu’elles sont mentionnées
par les représentants de l’autorité, pour les opposer à la globalisation.
- à l’époque, on s’opposait au soviétisme, dans une sorte de repentir suite à la révélation des crimes staliniens.
K.Rousselet : « elle [la législation religieuse] s’inscrit dans un imaginaire fondé sur un passif
ethnoreligieux, qui classifie et hiérarchise des mouvements en fonction de leu lien historique avec
les peuples qui composent la Russie ».
L’arsenal législatif.

Il régule les relations entre l’Église et l’État :


- 1997 : Loi sur la liberté de conscience ; écrite sous pression de l’Église orthodoxe russe, désigne les religions dites
traditionnelles = orthodoxie, Islam, judaïsme et bouddhisme + leur accorde des privilèges dont ne bénéficient pas les
autres mouvements religieux.
→ écrite sous Eltsine, par la pression de l’Église orthodoxe qui avait peur des cercles protestants, ou de l’Église
catholique.

-2002, 2007 : Loi sur la « lutte contre les activités extrémistes » = permet de restreindre la liberté de
tout groupe religieux indésirable pour protéger la « sécurité de l’État ».
→ élargit la définition de l’incitation à la « haine religieuse ».

- 2010 : Loi sur le « transfert aux organisations religieuses de biens de nature religieuse, propriétés de
l’État ou des municipalités ».
→ a fait de l’Église le plus grand propriétaire de Russie et a renforcé son poids économique.

-2010 : Introduction de l’enseignement du religieux à l’école, « Fondements de la culture orthodoxe ».


→ a suscité beaucoup de réaction (d’où sondage de 2013, 54 % des personnes interrogées considèrent que ce sont la
famille/les parents qui sont responsables de l’éducation religieuse des enfants; 11 % et 9 % estiment respectivement que
c’est à l’école et à l’Église de s’en charger; 29 % sont contre l’introduction du cours de culture religieuse et d’éthique.)

-2013 : Loi sur « l’offense aux sentiments religieux » (blasphème ?), instauration d’une responsabilité
pénale qui peut aller jusqu’à l’emprisonnement pour atteinte aux symboles et textes religieux
→ suite aux Pussy Riot en 2012.
→ loi ouverte à l’arbitraire : puisqu’il s’agit de sentiment religieux, il n’y a pas de limite définie.

But arsenal= établir un cadre, qui n’existait pas et relevait du besoin, mais qui à l’époque, a été influencé par l’Église ;
État voit dans cette législation une sorte d’instrument de contrôle.

L’Église, le patriotisme et l’identité nationale.

K. Rousselet : religion orthodoxe instrumentalisée par le pouvoir y voyant un objectif de moralisation, comme jadis
l’idéologie communiste; mvts religieux traditionnels mobilisés pr délivrer une nouvelle pensée officielle, permettant,
entre autres, d’opérer une distinction entre eux et nous.
- discours civilisationnel, notamment d’opposition de la Russie à l’Occident, fait souvent référence aux racines
religieuses de la civilisation russe
- partie importante des Fondements de la doctrine sociale de l’Église orthodoxe russe consacrée aux relations entre
Église et nation, ainsi qu’au patriotisme. (→ 2005, ce texte était très attendu)

- pas vraiment de consensus sur les droits de l’homme ; ds la pratique, droits du groupe priment sur droits de l’individu
- ds domaine international, Église défend un modèle de cohabitation et de dialogue des civilisations qui s’opposent à
une conception unipolaire du monde → fait écho à la politique extérieure défendue par le pouvoir
- objectivement, renforce les discours internationaux de la fédération de Russie.

Un conflit de grammaires ? (L. Thévenot).

- conflit de grammaire entre le mode civique de vivre ensemble et le mode de vivre ensemble autour d’une « cause
commune ».

mode civique de vivre ensemble : liberté de conscience, laïcité ainsi qu’une certaine forme de religieux – définie non
pas tant par une confession que par une façon de penser la place du religieux dans la société.
mode de vivre ensemble autour d’une « cause commune » : patriotisme, morale unanimiste et une autre forme de
religieux y sont liés.

- insistance sur l’orthopraxie = insistance sur les pratiques plus que sur les croyances (= orthodoxie).
- flexibilité de la religion orthodoxe permettrait à celle-ci de s’adapter aux besoins des individus.
L’affaire Pussy Riot (2012)
- affaire est très intéressante puisque complexe → a suscité bcp de passion
- il s’agit de prier, mais en même temps d’irruption pendant l’office, dcp on peut se poser la
question de Благошестие / Богохульство = Piété / Blasphème.
- suite de cet événement, manif près de l’église : on peut se demander pk avoir choisi ce lieu
- cathédrale du Christ Sauveur, construite au XIXe = souvenir historique + élément de l’identité nationale ; monument
patriotique commémoratif (guerre de 1812)
- église-symbole de la religion, du patriotisme et de la dynastie
- détruite sous Staline et reconstruite dans les 90 (dons des croyants + municipalité de Moscou)
- symbole du retour à la foi ; Patriarche Kirill → offense au patriotisme en plus de l’offense au sentiment religieux.

Géopolitique de l’Orthodoxie russe: « territoire canonique » et « civilisation ».

- ajd nouvel environnement concurrentiel, tensions avec patriarcat de Constantinople + création environnement
concurrentiel
→ Si paroissien pas content, peut changer d’église ou même de confession.
- rupture de communion → notamment dû à la situation en Ukraine depuis 2014.

- 90, accélération de processus de globalisation = Église orthodoxe russe ébranlée par émergence des nvx États
(Étranger proche), alors qu’elle s’organise depuis ses origines autour de l’État russe.
- migrations transforment cet équilibre qui existait, mm si précaire, et posent question de
l’organisation juridictionnelle de la diaspora. (France = question est brûlante.)

- une partie de l’Église orthodoxe n’a pas reconnu ce qu’elle considère comme une compromission du patriarcat
de Moscou avec le pouvoir soviétique, préférant se référer au patriarcat de Constantinople.
- ds 3 pays (Russie, Biélorussie, Ukraine), l’Église prône l’existence d’un seul « peuple orthodoxe », du monde russe,
de la Sainte Russie, dont Kiev est le cœur et l’origine, et du territoire canonique dans « l’étranger proche ».
→ mm pb en Moldavie et Estonie, où il y a une diaspora russe.
- idée que le patriarcat religieux doit être défini en fonction des frontières territoriales d’un pays.

- pr Église orthodoxe, pluralisme = notion importée par Occident, qui n’a pas le mm héritage historique
- notion théologique de predanie, et politique de tradicija lui est opposée.

- Église, notamment Kirill, défend modèle de cohabitation des civilisations contre globalisme, sécularisation et
uniformisation des normes internationales, pr unité de l’Église.

Patriarche Kirill en 2016 (Xe Assemblée du Monde russe) – « Nous parlons de l’Eglise orthodoxe russe
comme d’une force morale dominante qui a assuré les conditions d’existence du Monde russe. S’il n’y avait
pas l’orthodoxie, la Russie, grande et multinationale, n’existerait pas, le Monde russe non plus, car dans ce
Monde russe et en Russie les autres ne se sentiraient pas à l’aise et ils lutteraient contre un centre qui
écraserait leur identité ».

La situation en Ukraine.

Plusieurs autres Églises orthodoxes sont apparues ou réapparues à partir de la fin des années 1980 :

- 1989 : renaissance d’une église orthodoxe apostolique autocéphale ukrainienne, fondée lors d’un
concile à Kiev en 1921 → 1 200 paroisses
- 1990 : exarchat ukrainien sous la juridiction du patriarcat de Moscou s’est transformé en église orthodoxe d’Ukraine
ayant un statut d’église auto-administrée = plus d’autonomie au sein du patriarcat de Moscou → 12 000 paroisses
- 1992 : métropolite Philarète Denissenko de Kiev, à la tête de cette église, a fait scission et créé avec l’Église
orthodoxe autocéphale ukrainienne une église orthodoxe ukrainienne-patriarcat de Kiev → 5 300 paroisses
- janvier 2019 : Constantinople accorde l’autocéphalie de l’Église orthodoxe d’Ukraine
- Église gréco-catholique, qui avait été intégrée de force à l’Église orthodoxe russe en 1946, renaît également

→ Maïdan (2014) = plusieurs conflits, que concile pan-orthodoxe en Crète (2016 )visait à apaiser : échec.
- XIXe siècle, intérêt de l’Église russe pour les lieux saints, a partir de 1840 elle achète des terrains à Jérusalem sur
lesquels elle érige des églises, notamment l’église Sainte-Marie- Madeleine, sur le Mont des Oliviers.
- présence de l’Église russe dans les lieux saints soutenue par le pouvoir, Dmitri Medvedev s’est rendu en Jordanie pour
se baigner dans le Jourdain.
- Poutine parle de dimension morale et culturelle associée à la puissance.
Autres religions.

- Islam : 6-9 millions de muslim, mm dynamiques et processus vus pr l’orthodoxie, avec les 2 types de croyant, la
même complexité avec les traditions et interprétations + communauté croissante, 870 mosquées en 1991 à + de 7000 en
2001 (dont 1348 au Tatarstan) ; arrivée d’imams (sunnites) formés en Arabie Saoudite dans la tradition hanbalite =
conflits au sein d’une communauté traditionnellement plus ouverte (hanafites et chafi’tes).
- Bouddhisme : 550,000 - Judaïsme : 50,000 - Catholicisme : 1 million - Vieux-Croyants : 1,5 million
- Protestants : 1,5 -1,8 million - Nvx mvts ‘Groupes évangéliques’ (USA) : 330,000.

Le néopaganisme slave (rodnoverie) et les nouveaux mouvements religieux.

- parmi nvx mouvements religieux, on trouve le néopaganisme slave.


- présents en Europe orientale + pays scandinaves + pays baltes
- pas organisation comparable aux églises, pas le même bagage théologique
- nébuleuse protéiforme, en essor depuis la fin des années 1980, rassemble groupes très divers pouvant
pencher vers le nationalisme xénophobe ou la sensibilité écologique.

- on peut parler d’invention d’une religion-tradition


→ souvent bricolage et reconstruction des rites et croyances à partir des sources livresques supposées slaves :
Maslenica, Kupala, Solcevorot (Solstice).

- néopaganisme « intellectualisé », dont les membres sont urbains et éduqués ;


- néopaganisme « rural », où la continuité est plus avérée (Schnirelmann).

- Russie, occutilsme + une affaire d’homme que de femme, contrairement aux USA
- mm lutte pour l’authenticité – ou du moins sa recherche.

Occutilsme : ensemble des arts et sciences occultes (alchimie, astrologie, magie, divination, médecine occulte)
touchant aux secrets de la nature, à ce qui est non visible.

- néopaganisme = environ 1M d’adeptes qui ont en point commun le culte de la nature et de ses divinités
slaves, la protection de la nature contre la civilisation moderne, le refus du cosmopolitisme & globalisation, les valeurs
nationales + sont en opposition aux grandes religions monothéistes

- 2003, néo-païens proposent une définition de leurs pratiques :


« Le païen – porteur d’une vision du monde païenne, c’est-à-dire de la foi en la nature – est celui qui se sent être en
harmonie avec la nature et qui en fait part. Il ne cherche pas à posséder une partie [du tout] il en fait lui-même
partie, possédant par cela même le tout. Il voit la Terre comme un organisme vivant, ce qui équivaut
à la considérer en tant que Principe divin ».
→ d’où la sensibilité à l’écologie radicale.
→ l’invention des divinités païennes est reconnue et le noyau véritable noyau est la nature.

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