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L’IMMERSION DU SALARIÉ DANS UNE EXPÉRIENCE DE TRAVAIL :

CONCEPTUALISATION ET IMPLICATIONS

Franck Brillet, Laurent Maubisson, Adama Ndiaye

ESKA | « Revue de gestion des ressources humaines »

2017/3 N° 105 | pages 54 à 77


ISSN 1163-913X
ISBN 9782747227261
DOI 10.3917/grhu.105.0054
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-de-gestion-des-ressources-
humaines-2017-3-page-54.htm
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© Éditions ESKA, 2017

­­L’IMMERSION DU SALARIÉ DANS


UNE EXPÉRIENCE DE TRAVAIL :
CONCEPTUALISATION
ET IMPLICATIONS
Franck BRILLET
VALLOREM EA 6296
IAE de Tours - Université François Rabelais

Laurent MAUBISSON
VALLOREM EA 6296
IAE de Tours - Université François Rabelais

Adama NDIAYE
VALLOREM EA 6296
IAE de Tours - Université François Rabelais

INTRODUCTION (Hamdi-­Kidar et Maubisson, 2012). Il semble


ainsi possible de considérer ­­l’analogie entre les
« ­­Lorsqu’un consommateur est immergé expériences de consommation et celles de travail
dans une expérience de consommation diver- ­­d’un individu. En effet, durant une expérience de
tissante, culturelle ou de navigation web, il travail, un individu peut ressentir des émotions
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ressent davantage ­­d’émotions positives liées variées (durant une même expérience) et
à la réalisation de cette activité et cela influence variables (d’une expérience à une autre). Plus
positivement sa satisfaction » Hamdi-­Kidar et couramment nommées « réactions affectives »,
celles-­ci peuvent être plus ou moins stables,
Maubisson (2012).
intenses, positives ou négatives. Leur origine
Le concept ­­d’immersion, qui trouve ses émane des interactions entre un individu
fondements en psychologie, est également et un environnement (on parle de contexte
mobilisé au sein des sciences de gestion et plus expérientiel), pour une période donnée, formant
particulièrement en marketing. Pour autant, le ainsi une expérience affective particulière. Le
considérer au sein d’autres
­­ champs discipli- contexte du travail semble bien correspondre
naires tel que celui de la gestion des ressources à cela et, étant établi que les expériences affec-
humaines (GRH) semble intéressant et original. tives ont une influence directe sur les attitudes
En effet, les recherches en marketing montrent et les comportements des salariés (Weiss et
que « ­­l’immersion dans ces environnements peut Cropanzano, 1996), les chercheurs et prati-
constituer un critère différenciateur du dérou- ciens ont tout intérêt à comprendre comment
lement ­­d’une expérience de consommation : un tendre vers la co-­production ­­d’une expérience
individu immergé dans un contexte expérientiel « affective » idéale dans le cadre du travail.
(proposé par un site web par exemple) La sensation d’être
­­ profondément immergé(e)
passerait alors un moment intrinsèquement plus dans une expérience (de travail, de jeux, ­­d’achat)
agréable qu’un
­­ consommateur non immergé » correspond à ce scénario. Il ­­s’agit ­­d’un moment

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

où les sens, ­­l’imaginaire et la concentration ­­d’un


individu sont sur-­stimulés. Ce dernier focalise
1. CADRE THÉORIQUE DE LA RECHERCHE
toute son attention sur ce ­­qu’il fait et rien ­­d’autre
­­n’a ­­d’importance (Csikszentmihalyi, 1990). À ce 1.1. Le concept ­­d’immersion
niveau, nous pouvons donc facilement identifier
les enjeux que cela peut représenter pour les
organisations mais également pour les équipes 1.1.1. Définition et clarifications
de travail et les individus. conceptuelles
Effectivement, l’ensemble
­­ des études menées Le concept de l’immersion
­­ trouve ses
dans ces différents champs disciplinaires origines dans les travaux pionniers du psycho-
convergent en termes de résultats : il faut favoriser logue hongrois Csikszentmihalyi (1990), qui
la sensation d’immersion
­­ chez un individu afin traitent de ­­l’expérience de flow. Cette théorie
de rendre ce moment agréable (Csikszentmihalyi précise ­­qu’un individu est heureux ­­lorsqu’il
1990 ; Novak et al., 2000 ; Fornerino et al., vit une succession ­­d’expériences immersives1.
2008), mais surtout pour augmenter la satis- Ce continuum peut alors former un « flux »
faction et l’engagement
­­ des acteurs concernés ­­d’expériences pour lesquelles ­­l’individu est
(salariés, agents, consommateurs). totalement connecté avec ­­l’action qu’il­­ réalise,
Ainsi, la problématique centrale de cette perdant ses repères spatio-­temporels, au point
recherche peut se résumer autour de la question ­­d’oublier toutes autres contraintes environne-
suivante : dans quelle mesure ­­l’immersion mentales. Cet auteur définit alors ­­l’immersion
dans une situation de travail influence-­t‑elle comme un « état pour lequel une personne est
­­l’engagement des individus  ? Les enjeux de tellement impliquée dans une activité que rien
cette interrogation sont d’une­­ double nature. Il ­­d’autre ­­n’a ­­d’importance » (Csikszentmihalyi,
conviendra dans un premier temps de vérifier la 1990). La sensation de bien-­être procurée par
pertinence de mobiliser le concept ­­d’immersion celle ­­d’être immergé dans une expérience (Carù
et de le définir dans un cadre ­­d’étude parti- et Cova, 2003) a conduit de nombreux auteurs
culier, celui ­­d’expériences de travail. Dans un à étudier ce concept en sciences de gestion, et
second temps, nous devrons évaluer ­­l’intérêt de particulièrement en marketing (tableau 1).
favoriser ­­l’immersion d’un
­­ individu dans une ­­L’immersion est alors considérée soit comme
expérience de travail, en mesurant notamment un processus ­­d’accès à ­­l’expérience de flow
son influence sur son engagement au travail. (pour Carù et Cova, 2003, 2006), mettant en
La revue de littérature transdisciplinaire sur le jeu trois phases : l’exploration,
­­ la nidification
concept ­­d’immersion et sur ses conséquences et le marquage ; soit comme un état (Fornerino,
attendues est complétée par la réalisation ­­d’une Helme-­Guizon et Gotteland, 2008 ; Charfi et
étude qualitative exploratoire qui permet de
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Volle, 2011 ; Maubisson, 2012). Considéré
mieux définir et comprendre le cadre d’analyse­­ comme un état, les définitions de l’immersion
­­
mobilisé ­­d’une part, et le modèle causal à tester convergent davantage avec celle proposée
­­d ’autre part. ­­L ’étude confirmatoire menée à ­­l’origine par Csikszentmihalyi (1990). Dans
auprès de 311 individus en situation ­­d’emploi cette approche, ­­l’ensemble de ces travaux
est présentée en suivant. La mesure tout-­à‑fait ­­s’accorde à  dire que ­­l’immersion ­­d’un individu
satisfaisante de l’immersion
­­ dans une expérience ­­n’est pas systématique et qu’il ­­ est rare que ce
de travail permet de tester son influence sur dernier vive un flux continu ­­d’expériences
­­l’engagement au travail d’un ­­ employé et immersives. Comme énoncé dans la description
­­d’identifier les conditions dans lesquelles cette de cet état par Novak et al. (2000), ­­l’immersion
relation est plus ou moins forte. Ces résultats semble davantage se produire de manière
sont alors discutés puis déclinés en implications épisodique, lorsqu’un
­­ individu trouve le difficile
théoriques et managériales. équilibre entre un défi perçu et la stimulation
de ses compétences (Csikszentmihalyi et

1. Certains rapprochements peuvent être faits entre le


concept de flow et celui de “Subjective Well Being”
(Weiss, 2002). Ils sont cependant exclus du périmètre
de cette recherche qui se concentre sur la sensation d’être
­­
immergé dans une expérience de travail (perspective
temporelle plus réduite).

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Tableau 1. Approches conceptuelles de l’immersion.


­­

Auteurs Dimensions Définition


Sentiment de :
Carù et Cova – bien-­être  ; « Processus ­­d’accès à ­­l’expérience de flux ou expérience extraordinaire. »
(2003) – développement (Hetzel, 2002).
– gratification.

« Moment fort vécu par le consommateur et résultant d’un­­ processus partiel


Fornerino, Connexion avec ou complet ­­d’appropriation de sa part (Carù et Cova, 2006, p. 60) (…) Un
Helme-­Guizon ­­l’expérience. consommateur fortement immergé dans un environnement expérientiel est
et Gotteland Déconnexion alors impliqué, absorbé et totalement engagé (Lombard et Ditton, 1997). Il
(2008) avec le réel. a oublié la réalité extérieure, a perdu la conscience de ce qu’il
­­ est dans le
monde réel au profit d’un
­­ soi dans le contexte expérientiel ».

« ­­L’immersion se traduit par le niveau d’engagement


­­ et se manifeste par le
Cognitive. degré avec lequel l’individu
­­ ignore toute autre sollicitation attentionnelle en
Charfi et Volle Sensorielle. dehors de ­­l’activité elle-­même (Simon, 2007) (…) Lors de ­­l’immersion dans
(2011) Affective. le contexte de l’expérience,
­­ les sens du consommateur sont stimulés, il vit des
Sociale. moments d’émotions
­­ fortes comme la joie ou la tristesse, produit des pensées,
agit et interagit avec les autres (Fornerino et al., 2008) ».

Évasion.
Enjoyment. « Manifestation sensorielle particulière, d’une
­­ amplitude (intensité et
Maubisson
Distorsion du durée) plus ou moins forte, caractérisée par les sensations d’évasion
­­ de
(2012)
temps. ­­l’environnement immédiat, de bien-­être et de perte de repères temporels ».
Projection de soi.

Csikszentmihalyi, 1988) : « État ­­d’esprit, parfois travail, quatre éléments (les dimensions identi-
éprouvé par les personnes profondément impli- fiées par Maubisson, 2012) doivent alors être
quées dans une certaine activité. ­­C’est le cas réunis :
par exemple ­­lorsqu’un athlète professionnel joue 1. la sensation ­­d’évasion qui représente la
particulièrement bien et adopte un état ­­d’esprit
capacité de l’individu
­­ à faire abstraction de
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où rien ­­d’autre que le jeu n’est
­­ important ; il ou
son environnement immédiat ;
elle est totalement immergé(e) dans l’expérience.
­­
2. la distorsion de temps qui correspond à la
(…) Les activités qui mènent à cet état de flow
captivent une personne durant une certaine perte de repères temporels ;
période. Quand on est dans cet état, le temps 3. ­­l’enjoyment qui est le plaisir intrinsèque
peut sembler s’arrêter
­­ et rien d’autre
­­ que ce que ressenti durant (et associé à) ce moment
­­l’on fait ne semble important ». ­­d’immersion et  ;
4. la projection de soi qui est la représentation
Au regard de ce descriptif, de l’ensemble
­­ mentale de soi sur un avenir idéalisé.
de ces définitions et approches conceptuelles
associées, nous retiendrons ainsi celle proposée Cette sensation d’immersion
­­ peut être ressentie
par Maubisson (2012) qui considère que par un individu lors ­­d’une séance de travail
­­l ’immersion est une « manifestation senso- ­­qu’il aura trouvé agréable. ­­C’est en partie pour
rielle particulière, d’une
­­ amplitude (intensité ces moments et en vivant de telles expériences
et durée) plus ou moins forte, caractérisée par ­­qu’un individu peut être satisfait de son emploi,
les sensations ­­d’évasion de ­­l’environnement du travail accompli et profondément engagé dans
immédiat, de bien-­être et de perte de repères la tâche ­­qu’il réalise (Csikszentmihalyi, 1997).
temporels ». Celle-­ci semble en effet la plus La phase empirique de cette étude, présentée
adaptée au contexte ­­d’expériences au travail. En ci-­après, montre cela. Mais il convient avant
effet, pour ­­qu’un employé ressente la sensation cette démonstration de positionner le concept
­­d’être immergé dans une situation particulière de ­­d’immersion au sein de la littérature en GRH.

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

Pour cela, nous mobilisons à présent les travaux consiste à distinguer les dimensions cognitives,
qui traitent ­­d’états affectifs en situation de travail. affectives et sociales de ces réactions, leurs
mécanismes ­­d’interactions, et ­­l’influence des
1.1.2. Immersion et états affectifs caractéristiques individuelles (« dispositions »)
de la personne étudiée (Loke, 1976). Les confu-
Cette sensation d’immersion
­­ correspond sions entre les réactions affectives (e.g. émotion)
naturellement à une réaction affective, puisque et leurs conséquences (e.g. satisfaction) sont
cette manifestation sensorielle se produit dans alors clarifiées conceptuellement, à partir de leurs
un contexte dit « expérientiel » et de manière perspectives temporelles (stabilité dans le temps)
épisodique. Les travaux qui traitent de ­­l’affect et de leur intensité. Une fois ­­l’enchainement
au sein des sciences de gestion depuis les années causal étudié entre ces deux types de variables,
trente s’inscrivent
­­ dans le courant nommé les recherches se sont intéressées à la nature
« affective experiences »2. Chronologiquement, de ces réactions. Durant cette deuxième étape
trois grandes étapes marquent cette école de (années 70), de nombreux construits ont été
pensée. La première issue des travaux ­­d’Hersey définis et permettent de mesurer la diversité
(1932) consiste à traiter une réaction affective des états affectifs qui peuvent être également
globale par le prisme de sa valence (émotion ressentis dans une situation de travail (tableau 2).
positive, neutre ou négative). La seconde étape

Tableau 2. Exemples de réactions affectives pour mesurer une expérience.

Auteurs Dimensions primaires (dimensions sous-­jacentes)


Plaisir (heureux, joyeux, rempli d’espoir,
­­ content, satisfait).
Russel et Mehrabian
Eveil (animé, excité, enflammé, stimulé, agité, survolté).
(1977)
Dominance (autonome, indépendant, meneur, puissant, maître de soi, influant).
Colère (dégoût, jalousie, exaspération, irritation, rage, tourment).
Shaver, Schwartz, Crainte (inquiétude, anxiété).
Joie (gaîté, contentement, optimisme, fascination, fierté, apaisement, enthousiasme).
Kirson et ­­O’Conner
Amour (affection, envie, désir).
(1987) Tristesse (déception, négligence, honte, souffrance, compassion).
Surprise.

Les efforts se concentrent alors sur la manière La troisième étape de ce courant est celle qui
de structurer, ou parfois déstructurer (Cropanzano adopte et utilise le terme « experience  »  : ­­l’approche
et al., 2003), la représentation globale de l’affect.
­­ phénoménologique des réactions affectives. Elle
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La plus utilisée correspond au modèle circom- ­­s’est développée en concomitance des deux précé-
plexe de ­­l’affect (cf. figure 1) développé par dentes et elle révèle l’importance
­­ de la perspective
Russel (1980) et enrichi par Russel et Carrol temporelle de ­­l’évènement (la réaction) et de la
en 1999. Sa structure repose sur deux axes variabilité du moment (Herzberg et al., 1959).
bipolaires : la tonalité hédonique (le caractère À ce propos, Frijda (1993) caractérise une réaction
plaisant/déplaisant) et le degré de manifestation affective comme un « épisode émotionnel ».
(activation forte/faible) de la réaction affective. ­­L’utilisation du terme épisode permet alors de
Quatre grands états sont alors identifiés : mettre en lumière la subjectivité de l’expérience
­­
relaxation, fatigue, nervosité et enthousiasme ; affective : elle correspond à un moment, plus ou
autour desquels gravitent des émotions. Il est alors moins court, pour lequel un individu va manifester
admis qu’un
­­ état affectif ne correspond pas le plus une réaction (sentir, ressentir, partager), plus ou
souvent à une et une seule réaction, mais bien moins intense, déclenchée par un ou plusieurs
à une « constellation » de réactions inter-­reliées stimuli, et/ou par un ou plusieurs facteurs internes
(Weiss et Cropanzano, 1996). à la personne (cf. taxonomie proposée par Zhang,
2013). Cette expérience affective est donc
connectée à un environnement. Elle prend forme
dans un contexte particulier (nommé « contexte
2. Pour une revue de littérature approfondie sur ce sujet,
expérientiel » par Carù et Cova, 2006), qui met en
voir les travaux de H. M. Weiss, qui proposent plusieurs jeu : une situation, un objet et une personne (modèle
méta-­analyses. POS de Punj et Stewart, 1983).

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Figure 1. Modèle circomplexe de l’affect.


­­ (d’après Russel, 1980 ; adapté par Larsen & Diener,
1992 ; puis enrichi par Saavedra et Kwum, 2000).

*Afin de limiter le biais lié à la qualité de traduction, plusieurs qualificatifs ont parfois été considérés.

Dans une situation de travail qu’il


­­ estimera 1.2. Les conséquences attendues
stimulante, un individu peut ainsi avoir la de ­­l’immersion
sensation ­­d’être immergé dans ­­l’activité ­­qu’il
réalise (l’objet de ­­l’expérience). Cette réaction
correspondrait alors à un état qui émergerait 1.2.1. Les conséquences attendues
durant une expérience (par nature subjective) de ­­l’immersion en marketing
de travail. Cette notion de subjectivité induit Les travaux de recherche en marketing se
que chercheurs et managers devront étudier la sont principalement focalisés sur l’indicateur
­­
combinaison de multiples facteurs favorables de référence de la relation client : la satisfaction
à ­­l’immersion. Mais si le périmètre de ce travail retirée de l’expérience
­­ vécue de consommation
exclut l’identification
­­ de ces antécédents, il (tableau 3) ; et par le truchement de cette variable
attitudinale, sur des variables d’intentions
­­ compor-
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propose d’en­­ étudier les conséquences afin de
montrer ­­l’intérêt de favoriser ­­l’immersion ­­d’un tementales (e.g. fidélité, bouche-­à‑oreille positif).
individu dans une expérience de travail.

Tableau 3. Exemples de conséquences attitudinales de l’immersion


­­ en marketing.

Recherches Conséquences (enchainement causal positif)


Fornerino, Helme-­Guizon
Immersion à Réactions émotionnelles et interactions sociales => Satisfaction
et Gotteland (2008)

Charfi (2012) Immersion à Valeur perçue (utilitaire et hédonique)


Maubisson (2012) Immersion à Satisfaction

Ces conséquences attitudinales n’ont


­­ pas managériale, bien ­­qu’intéressante ­­d’un point de
été mesurées de manière conjointe : elles vue marketing, est donc limitée dans un contexte
dépendent directement de l’expérience
­­ vécue de GRH. Ces études permettent cependant de
au cinéma (Fornerino, Helme-­G uizon et confirmer ­­l’hypothèse que ­­l’immersion influence
Gotteland, 2008), sur le site internet d’une
­­ favorablement la formation ­­d’attitudes positives
marque (Charfi, 2012) ou dans différents (satisfaction et valeur perçue de l’expérience).
­­
points de vente (Maubisson, 2012). Leur portée En dehors du champ du marketing et comme

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nous encourage à croire l’emploi


­­ du terme Bass, 1965 ; Blau, 1985). Certains auteurs
« profondément engagé » dans la définition de (Cherniss, 1980 ; Cooper, 1988 ; Cummings
­­l’immersion (e.g. Lombard et Ditton, 1997), la et Cooper, 1979 ; McMichael, 1978 ; Matthews
principale conséquence attendue de l’immersion
­­ et Saal, 1978) la caractérise comme un trait
dans une expérience de travail correspondrait de personnalité. En ce sens, Lawler et Hall
à ­­l’engagement au travail. Cette proposition (1970) indiquent que l’engagement
­­ au travail
purement exploratoire à ce stade nécessite ­­d’un individu occupe une place déterminante
davantage de justifications, qui permettront par dans la construction de son identité (Lodhal et
la suite de proposer un modèle théorique à tester. Kejner, 1965 ; Morrow, 1983) ;
–– une facette affective : qui transparait par
1.2.2. La conséquence attendue ­­l’intérêt porté au travail par rapport à ­­d’autres
de ­­l’immersion en GRH : centres ­­d’intérêt (Dubin, 1956). Thévenet
­­l’engagement au travail (2000, 2002). Elle associe à cette relation
un mélange de sentiments agréables et
La littérature à propos de l’immersion
­­ indique désagréables, à ­­l’instar du plaisir ou de la
donc clairement une connexion entre ce concept fierté ;
et celui de ­­l’engagement (Csikszentmihalyi et
–– une facette conative : qui reflète la partici-
Csikszentmihalyi, 1988 ; Lombard et Ditton,
pation active du salarié au travail (Allport,
1997 ; Fornerino, Helme-­Guizon et Gotteland,
1943). Elle ­­s’interprèterait même par des
2008) sans pour autant bien définir la nature
comportements observables tels que le temps
de ce lien. Parallèlement, celle à propos de
passé au travail et la quantité de travail fourni
­­l’engagement au travail fait également référence
à ­­l’immersion, notamment au travers de la (Wickert, 1951).
composante « absorption », définie par Schaufeli Notons toutefois que la manière ­­d’appréhender
et Bakker (2004) comme la « concentration, ­­l’engagement au travail a évolué au fil du temps
immersion complète et enthousiaste dans le (tableau 4). Dès 2010, les approches multidimen-
travail à accomplir, dont il est difficile d’en ­­ sionnelles font appel à des méthodes d’agrégation
­­
sortir ». Pourtant « immersion » et « engagement (e.g. facteur de second ordre) afin de traiter
au travail » semblent bien différents pour au ­­l’engagement au travail dans son ensemble (un
moins deux éléments : construit qui forme finalement une seule variable
–– ils ne partagent pas les mêmes essences latente). Cette forme ­­d’opérationnalisation
conceptuelles (cf. tableau 4). Les facettes empirique est cohérente avec les définitions
« dévouement » et « vigueur » (Schaufeli et retenues, qui caractérisent ­­l’engagement au
Bakker, 2004) sont par exemples exclusi- travail comme un état. Poursuivant en ce sens, les
vement associées à ­­l’engagement au travail travaux les plus récents sur ce thème de recherche
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et non à ­­l’immersion ; utilisent des mesures unidimensionnelles pour
–– ils ne ­­s’inscrivent pas dans le même registre mesurer ­­l’intensité de ­­l’engagement au travail
temporel. ­­L’immersion correspond à un ­­d’un individu.
épisode plus bref que ne ­­l’est ­­l’engagement Au regard de cette synthèse de la littérature,
au travail qui est plus stable dans le temps. ­­l’engagement au travail semble donc s’inscrire ­­
­­L’engagement au travail3 est défini comme dans une perspective temporelle plus large qu’une ­­
une attitude caractérisée par la participation réaction affective ou qu’un ­­ épisode immersif ; plus
active du salarié au travail (Allport, 1943). proche d’un ­­ trait de personnalité construit au fil du
Cette définition témoigne de la complexité temps que ­­d’une manifestation sensorielle qui se
du phénomène étudié puisqu’elle
­­ lui associe produit dans un contexte expérientiel particulier.
plusieurs facettes à travers les thèmes « attitude » Cette recherche propose ainsi d’étudier ­­
et « participation » : ­­l ’influence ­­d ’un épisode immersif sur
–– une facette cognitive : formée notamment par ­­l’engagement au travail d’un ­­ individu, et
la recherche de prestige, d’autonomie
­­ et de ­­d’explorer dans quelles conditions ce lien est
réalisation de soi (Gurin, Veroff et Feld, 1960 ; plus ou moins fort. Pour cela, nous exposons
dans les paragraphes suivant les hypothèses
qui formalisent ces relations, sollicitons l’avis ­­
3. ­­L’engagement au travail se distingue de ­­l’engagement
organisationnel dans la mesure où ce dernier est relatif ­­d’experts qui confirment ­­l’intérêt ­­d’étudier ce
à ­­l’attachement de ­­l’individu à ­­l’organisation à laquelle phénomène ­­d’immersion et notamment son
il appartient. influence sur l’engagement
­­ au travail.

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

Tableau 4. Synthèse des approches de l’engagement


­­ au travail (d’après Codo, 2010).

Auteurs Approches Description des unités ­­d’analyse


Saleh et Hosek (1976) Conative. Comportements actifs au travail.
Affective. Centralité du travail dans la vie.
Cognitive. Identification au travail.
Bellier-­Michel (2005) Calculé ou intéressé. Engagement comme moyen de satisfaction des
besoins (rémunération).
Humaniste. Volonté ­­d’agir pour ­­l’efficacité organisationnelle.
Politique. Engagement comme source de pouvoir ou de
revendication de son professionnalisme.
Thévenet (2000, 2002) Plaisir. Epanouissement.
Fierté. Satisfaction et reconnaissance.
Réalisation. Utilité.
Tension. Excitation, peur de faillir.

Schaufeli et Bakker (2004) Absorption. Concentration, immersion complète et enthousiaste


dans le travail à accomplir, dont il est difficile d’en
­­
sortir.
Dévouement. Sens du travail, fort attachement au travail se
traduisant par l’enthousiasme,
­­ l’inspiration,
­­ la capacité
de relever les défis et un sentiment de fierté.

Vigueur. Efforts, disposition à mettre beaucoup d’énergie


­­
(mentale) et de dynamisme dans le travail, à faire
preuve ­­d’ardeur et de persévérance, même lorsque les
choses ne vont pas bien.
Schaufeli et Bakker (2006) Unidimensionnelle. État affectif-­cognitif global, persistent et omniprésent.

Rich et al. (2010) 3 dimensions regroupées Degré pour lequel les employés associent leur emploi
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sous un facteur de second à leur vie en général ; de sorte ­­qu’un employé qui
ordre : émotionnelle, manifeste une forte implication dans son travail,
cognitive et physique. ­­s’identifie à son emploi et y pense même en dehors
de son travail.

Matta et al. (2015) Unidimensionnelle. Investissement simultané de l’énergie


­­ physique,
cognitive et émotionnelle d’un­­ individu dans une
forte performance active de travail (empruntée à Rich,
Lepine et Crawford, 2010).
Schmitt et al. (2016) Unidimensionnelle. État affectif et motivationnel positif, caractérisé par un
niveau élevé d’énergie
­­ et d’implication
­­ de soi.
Shantz et al. (2016) Unidimensionnelle. État affectif-­cognitif global, persistent et omniprésent
(Schaufeli et Bakker, 2006) évalué à partir d’une
­­
mesure unidimensionnelle qui regroupe les facettes
« absorption », « dévouement » et « vigueur ».

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

procéder au test de deux effets modérateurs,


1.3. Définition du modèle et des hypothèses qui concernent ­­l’ancienneté ­­d’un individu dans
de recherche une organisation et son âge. En effet, comme
précisé par Maubisson (2012) et Antéblian,
Etant établi que les réactions affectives Filser et Roederer (2013), ­­l’immersion ­­d’un
influencent positivement l’engagement
­­ au individu dans une expérience est sensible à un
travail (Muchinsky, 1983) et étant entendu que phénomène de lassitude lié au caractère répétitif
­­l’immersion est intimement lié à ­­l’engagement de ­­l’expérience. Ainsi, peuvent être formulées
(Lombard et Ditton, 1997), l’hypothèse
­­ centrale les sous-­hypothèses  :
qui guide se travail est la suivante : H1a) : «  Plus ­­l’ancienneté ­­d’un individu dans
H1 : « Plus un individu a eu la sensation une organisation est faible, plus le lien entre la
­­
d’être immergé dans son travail, plus il est sensation ­­d’être immergé dans son travail et son
engagé dans celui-­ci ». engagement au travail est fort ».
À cette hypothèse de travail, et confor- H1b) : « Plus un individu est jeune, plus le
mément aux recommandations de Weiss et lien entre la sensation d’être
­­ immergé dans son
Cropanzano (1996) pour qui les réactions travail et son engagement au travail est fort ».
affectives peuvent être affectées par des carac- La représentation graphique proposée en
téristiques individuelles, nous pensons utile de figure 2 agrège ces trois hypothèses.

Figure 2. Représentation graphique du modèle structurel.


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2. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE 2.1. Étude qualitative préalable :
­­l’avis des experts
Afin ­­d’apprécier ­­l’analogie entre expérience
de consommation et de travail et tester la trans-
férabilité du concept d’immersion
­­ à la GRH, 6 2.1.1. Collecte d’information
­­ et population
experts de cette discipline ont été interrogés. étudiée
Cette phase qualitative préalable est présentée Cette étude préalable a été menée auprès de 6
dans un premier temps. Dans un second temps, experts issus de 6 organisations différentes (voir
le design méthodologique et les qualités psycho- composition et structuration de l’échantillon
­­
métriques des mesures employées dans la partie en annexe 1). La méthodologie de cette étude
quantitative sont développés. a  consisté en ­­l ’administration ­­d ’entretiens
approfondis de récits de pratique. Il ­­s’agissait
ici, conformément à ce que Bertaux (1997,
p. 6) décrit, de faire raconter aux experts des
« épisodes » de leur expérience vécue en matière
de management des hommes et des équipes en
lien avec notre objet de recherche. Ces récits
étaient structurés autour de trois éléments : les

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

représentations que les acteurs se font du concept La troisième catégorie de résultats issus de
­­d’immersion, son utilité en GRH, et les effets cette étude révèle que les experts interrogés
perçus de cette immersion sur le comportement considèrent ­­qu’une immersion dans une situation
des employés. de travail peut avoir des effets sur le compor-
Ces résultats sont présentés sous la forme tement des individus au travail :
­­d’extraits de verbatim (en fonction de la codifi- « Des salariés immergés pour moi ce sont
cation présentée en annexe 1). des salariés qui sont engagés mais peut-­
être ­­d’ailleurs soient envers leur entreprise,
2.1.2. Principaux résultats de l’étude
­­ soit envers leur manager. » E1DRHPrivé ;
qualitative préalable « Un individu immergé c’est­­ un salarié qui se
préoccupe de son travail. Il sait se donner à fond
Les résultats témoignent de ­­l’intérêt
et il ne compte pas son temps. » E2DRHPublic ;
­­
d’introduire le concept ­­d’immersion en GRH
« Pour être immergé encore faut-­il avoir une idée
mais montrent également qu’il ­­ est important
de le définir et de le situer au regard d’autres
­­ de la valeur travail et je considère qu’un
­­ salarié
notions telles que par exemples l’implication
­­ ou immergé ­­c’est un salarié pour lequel le travail
­­l’engagement  : est une dimension importante dans sa vie. »
E6Dir ; « Je pense ­­qu’une immersion dans une
« Cela veut dire quoi l’immersion ?
­­ ­­C’est de situation de travail doit provoquer de la satis-
­­l’engagement ? Pourquoi vous ne dites pas les faction mais je ne sais pas j’ai
­­ ­­l’impression que
choses comme on en a ­­l’habitude ? » E6-Dir ;
cela apporte plus, du plaisir et de l’émotion »
­­
« Nous, dans notre entreprise on ne parle que
E3ConsultRH.
de l’implication.
­­ C’est
­­ un des axes majeurs de
la politique RH alors si maintenant vous me
demandez ce ­­qu’est ­­l’immersion, je ne vois pas Du point de vue de ­­l’analyse, trois éléments
trop… » E5-IRP ; « Dans ­­l’idée cela semble ressortent clairement de cette étude :
intéressant votre idée d’immersion
­­ et je me
représente bien la chose mais vous ne pensez –– Le premier confirme le besoin de clarifier
pas que vous devriez en donner une définition le concept d’immersion
­­ et d’en
­­ donner une
car ce ­­n’est pas commun… » E1-DRHPrivé. définition précise. Cet élément sera ainsi de
nature à mieux le différencier de notions de
RH telles que la satisfaction, ­­l’implication et
Pour autant, même si certains ont du mal ­­l’engagement  ;
à voir ce que recouvre la notion, ­­d’autres
perçoivent clairement l’intérêt
­­ de travailler sur –– Le deuxième élément souligne la proximité
­­l’immersion dans une situation de travail : entre immersion et réactions affectives. Ceci
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confirme bien ­­l’intérêt ­­d’approfondir ­­l’étude
« Moi je dis que quand je me sens immergé des réactions affectives par de nouveaux
­­c’est une implication totale et donc je suis angles ­­d’approches (tel que ­­l’immersion)
à fond. » E5-IRP ; « Les individus immergés et la nécessité de les décrire et les situer au
sont parfaitement concentrés et je pense que
sein de la littérature en GRH (largement
de temps en temps cela peut donner du « peps »
entrepris par exemple dans le modèle circom-
à son travail. » E3-ConsultRH ; « Pour moi
plexe de ­­l’affect de Russel en 1980, enrichi
une situation ­­d’immersion comme vous dites
­­c’est donner à une situation de travail un peu par Saavedra et Kwum en 2000). Notons ici
plus d’intérêt.
­­ En créant ce type de situation, que ces résultats montrent également une
­­c’est procurer de l’intérêt
­­ et du plaisir. » distinction claire entre les les émotions/
E4-ConsultQVT ; « Moi je trouve que si réactions affectives/immersion et leurs consé-
­­j’arrivais à créer des situations ou mes gars quences (satisfaction et engagement) ;
soient immergés je leur donnerai de ­­l’émotion et –– Le troisième est de remarquer que les experts
de ­­l’adrénaline. » E6-Dir ; « Être immergé dans mettent plus naturellement en relation le
quelque chose ­­c’est vraiment excitant pour la fait d’être
­­ immergé avec l’engagement
­­ des
personne et cela rend le moment enthousiasmant. salariés. Ceci est intéressant dans la mesure
Grâce à cela on rend les personnes épanouies, où ­­l’ensemble des études qui portent sur
joyeuses et confiantes. » E3-ConsultRH ­­l’immersion ont plutôt montré les liens de
cause-­à‑effet entre immersion et satisfaction.

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

étude (encadré 1) et leur qualité sémantique


2.2. Étude quantitative : ­ a été validée et vérifiée auprès du collège
­l’avis des personnes en situation ­­d’emploi ­­d’experts mobilisé dans le cadre de notre étude
exploratoire. Cette étape nous a semblé néces-
2.2.1. Échantillon et démarche saire étant donné l’analogie
­­ entre les champs
de collecte de données disciplinaires du marketing et de la GRH consi-
dérés dans ce travail.
Afin de procéder aux mesures des concepts
mobilisés dans cette étude et tester leur enchai- Conformément aux travaux d’Herzberg
­­ et al.
(1959), les attitudes et les réactions affectives
nement causal, un questionnaire produit par les
au travail sont soumises à fortes variations ­­d’un
chercheurs a été utilisé pour collecter les données.
moment à ­­l’autre et pour une période donnée.
Au total, 311 observations ont été retenues parmi
Pour cette raison, les énoncés sont associés à une
les 352 questionnaires administrés. La sélection
consigne qui invite le répondant à se remémorer
des observations supprimées a été opérée
une journée agréable de travail. Tous les répon-
à partir des questions inversées, présentées en
dants étant exposés à cette même consigne, la
fin de questionnaire (les incohérences entre
variance évaluée par cette mesure correspond
deux questions diamétralement opposées nous
bien au degré d’immersion
­­ d’un
­­ individu pour
permettant d’identifier
­­ les individus qui n’étaient
­­
une situation de travail donnée.
plus attentifs à ­­l’enquête). Ce questionnaire a été
administré auprès d’un ­­ échantillon de conve- Concernant les qualités psychométriques
nance, composé uniquement d’individus ­­ qui de la mesure, les résultats des analyses facto-
occupent un emploi à plein temps. Les catégories rielles exploratoires (annexe 3) montrent que le
socioprofessionnelles des individus sont variées construit qui permet ­­d’appréhender ­­l’immersion
et les secteurs d’activité
­­ dans lesquelles ils ­­d’un individu dans son travail est bien multidi-
évoluent également (annexe 2). La répartition mensionnel. Le nombre de dimensions retenues
par profession est donc hétérogène (de ­­l’ouvrier a été défini à partir du principe de Kaiser (valeur
agricole au chef d’entreprise)
­­ et tous les secteurs propres supérieures à 1). Le pourcentage de
­­d’activités (selon le classement INSEE) y sont variance expliquée par ce modèle de mesure est
représentés. À ce propos, nous pouvons noter satisfaisant (74,8 %). Celle-­ci est répartie de façon
toutefois une surreprésentation de la catégorie homogène sur les quatre dimensions (évasion,
employés (28 %) et du secteur d’activité ­­ enjoyment, distorsion de temps et projection de
relatif au commerce (12,5 %). Cet échantillon soi). Les indicateurs de communalité (extraction)
est composé de 49,2 % de femmes et il ­­s’agit montrent que chaque item participe bien à la
également ­­d’un public hétérogène en termes formation de ce construit. La structure factorielle
­­d’âge (moyenne : 37  ans ; écart-­type : 12,5 ; mini : de cette mesure est également satisfaisante :
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18 ans ; maxi : 64 ans) et d’ancienneté
­­ dans le chaque item est fortement corrélé à un seul axe
poste actuellement occupé (moyenne : 10,4 ans ; et les alphas de Cronbach (1951) témoignent de
écart-­type : 10,9 ; mini : 1 an ; maxi : 40 ans). Les la fiabilité interne de chaque dimension (.810 <
questionnaires ont été administrés en face-­à‑face α < .902). La mesure retenue est donc composée
et ont ensuite été saisis dans une base de données de treize items répartis sur quatre dimensions
permettant les traitements statistiques exposés (facilité ­­d’administration).
ci-­après. Cette opération a permis aux chercheurs Par ailleurs, le modèle de mesure testé dans
de bien ­­s’assurer que les questionnaires étaient cette étude est fiable et valide au regard des
correctement remplis et donc exploitables. résultats des analyses factorielles confirma-
toires présentées dans les tableaux 5 et 6. En
2.2.2. Opérationnalisation des concepts, suivant les recommandations de Gerbing et
Anderson (1988), ­­l’examen de la fiabilité de
tests des échelles et plan de traitement
la mesure à partir du Rhô de Joreskög (moins
Les deux mesures psychométriques sensible au nombre d’items­­ que l’alpha
­­ de
mobilisées dans cette étude correspondent Cronbach) est à nouveau établie (ρ >  .812).
à ­­l’immersion (échelle développée par La validité convergente et discriminante de ce
Maubisson, 2012) et à ­­l’engagement au travail construit a été vérifiée à partir de la procédure
(échelle développée par Schaufeli et Bakker, proposée par Fornell et Larcker (1981) : les Rhô
2004, 2006). La formulation des items de de validité convergente (ρvc) sont supérieurs
­­l’immersion a été adaptée à ­­l’objet de notre à 0,5 et leur valeur est systématiquement plus

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

élevée que la variance partagée avec les autres au seuil de 0,5 préconisé en gestion (Roussel et
dimensions (ρvc > λ²). Concernant la structure al., 2002) pour le coefficient de détermination
factorielle de la mesure, nous noterons que seul (R2) alors que tous les autres indicateurs sont
­­l’item «  Enjoyment 1 » est sensiblement inférieur très satisfaisants.

Encadré 1. Énoncés du construit multidimensionnel de l’immersion.


­­

À présent, remémorez-­vous une journée agréable


et récente que vous avez passée à votre travail

Dimension 1 : Évasion


À certains moments durant cette journée…
(eva1) …il ­­m’est arrivé ­­d’oublier où ­­j’étais.
(eva2) …tout ce qui m’entourait
­­ a perdu de son importance.
(eva3) …j’ai oublié les réalités du monde extérieur.
(eva4) …j’ai perdu conscience de ce qui m’entourait.
­­

Dimension 2 : Distorsion de temps


À certains moments durant cette journée…
(dist1) …je n’ai
­­ pas vu le temps passer.
(dist2) …je n’avais
­­ pas vraiment conscience du « temps qui passe ».
(dist3) …le temps s’est
­­ écoulé plus vite que d’habitude.
­­

Dimension 3 : Enjoyment


À certains moments durant cette journée…
(enjoy1) …j’ai connu des moments intenses d’excitation.
­­
(enjoy2) …j’ai eu la sensation de vivre un « grand moment ».
(enjoy3) …j’ai ressenti des émotions plus intenses que celles que je ressens habituellement dans le quotidien.

Dimension 4 : Projection de soi


À certains moments durant cette journée…
(proj1) …je me suis imaginé(e) en train de réaliser une tache similaire dans un futur proche.
(proj2) …je me projetais dans la suite de ce travail.
(proj3) …je m’imaginais
­­ dans une situation encore plus gratifiante que cette journée.
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Ces énoncés étaient associés à une échelle de Likert en sept points mesurant le degré d’accord
­­ du répondant
avec chaque item. Le texte entre parenthèses n’apparaissait
­­ pas sur le questionnaire.

Enfin, les indices ­­d’ajustement (absolus, dans le tableau 6), comme le préconisent les
incrémentaux et de parcimonie) du modèle de travaux de Maubisson (2012). Le modèle de
mesure aux données sont également excellents mesure (M1) correspond à ­­l’approche multidi-
et montrent qu’il
­­ est tout à fait acceptable de mensionnelle simple, tandis que le modèle (M2)
regrouper les dimensions de l’immersion
­­ sous présente la mesure qui intègre un facteur de
un même facteur de second ordre (figure 3 et second ordre.
amélioration des indices d’ajustement
­­ présentés

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

Tableau 5. Analyse factorielle confirmatoire de l’échelle


­­ « immersion ».

Valeur des λi
Variable R2
F1 F2 F3 F4
Évasion 2 .741 .861
Évasion 4 .748 .865
Évasion 3 .761 .872
Évasion 1 .558 .747
Enjoyment 2 .852 .923
Enjoyment 3 .662 .814
Enjoyment 1 .476 .690
Distorsion 1 .711 .843
Distorsion 3 .553 .744
Distorsion 2 .604 .777
Projection de soi 1 .654 .809
Projection de soi 2 .603 .777
Projection de soi 3 .515 .718
ρ .904 .854 .832 .812
ρvc .702 .664 .623 .591
lambda² F1 F2 F3 F4
F1
F2 .072
F3 .042 .071
F4 .076 .277 .102

Tableau 6. Indices d’ajustement


­­ des modèles de mesure d’immersion
­­ testés.

χ² ddl GFI AGFI RMSEA [Min-­Max] SRMR NFI NNFI CFI χ²/ddl
M0 1827,3 78
M1 92,3 59 .949 .921 .043 [.025-.059] .042 .949 .975 .981 1,56
M2 61,8 60 .949 .922 .010 [.000-.036] .044 .966 .999 .999 1,03
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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

Figure 3. Modèles de mesure de l’immersion


­­ testés.

­­L’estimation des paramètres entre chaque construit et qu’il


­­ sera possible d’analyser
­­ son
composante de ­­l’immersion et le facteur influence sur l’engagement
­­ au travail dans son
de second ordre (tableau 7) confirme que ensemble, sans avoir à évaluer l’influence
­­ de
­­l’immersion correspond à un seul et même chaque dimension sur cette variable endogène.
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Tableau 7. Test relatif à ­­l’acceptation d’un
­­ facteur de second ordre.

F1 F2 F3 F4
Coefficients structurels 1,049 1,986 1,103 1,966
t 5,327 8,516 5,464 8,394
p <.001 <.001 <.001 <.001

La mesure de l’engagement
­­ au travail repose variable endogène. Schaufeli et Bakker (2006)
sur le construit proposé par Schaufeli et Bakker lui confèrent des qualités psychométriques toutes
en 2006 (énoncés présentés dans ­­l’encadré 2). aussi satisfaisantes que le modèle UWES (multi-
Il ­­s’agit de la version simplifiée du modèle dimensionnel). Elle a été employée dans de
de mesure Utrecht Work Engagement Scale nombreuses études en GRH (Shantz et al., 2016 ;
(Schaufeli et al., 2002, 2004). Elle présente Schmitt et al., 2016 ; Matta et al., 2015 ; Fairlie,
­­l’avantage d’être
­­ unidimensionnelle et de traiter 2011 ; Seppälä et al., 2009 ; Xanthopoulou et al.,
­­l’engagement au travail à partir d’une
­­ seule 2009).

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

Encadré 2. Énoncés de la mesure de l’engagement


­­ au travail.

– Je suis passionné(e) par mon travail.


– Je suis fier(e) du travail que je fais.
– Faire mon métier est stimulant.
– Lorsque je me lève le matin, j’ai
­­ envie d’aller
­­ travailler.
– ­­J’aime bien quand je suis absorbé(e) par mon travail.
– Je déborde d’énergie
­­ pour mon travail.

Ces énoncés étaient associés à une échelle de Likert en sept points mesurant le degré d’accord
­­ du répondant
avec chaque item.

Dans cette étude, les qualités psychométriques du logiciel AMOS. Les effets de modération
de cette échelle sont effectivement acceptables ont été testés à partir d’analyses
­­ multigroupes
au regard des recommandations de Roussel et al. également sous équations structurelles confor-
(2002). La fiabilité des six items est satisfaisante mément aux recommandations de Roussel et al.
(α de Cronbach = 0,899 ; ρ de Joreskog = 0,913), (2002).
la validité de construit également (ρvc = 0,638) et
le modèle de mesure est bien ajusté aux données
(χ² = 38,9 ; ddl = 9 ; χ²/ddl = 4,32 ; CFI = 0,958 ; 3. RÉSULTATS
GFI = 0,929 ; RMSEA = 0,104).
Les autres mesures mobilisées dans ce travail ­­L’étude du lien structurel (H1) montre que
correspondent à des variables déclaratives la sensation d’immersion
­­ d’un
­­ individu dans
mono-­items décrites précédemment : ­­l’âge du son travail a une influence positive et signifi-
répondant et son ancienneté dans le poste actuel- cative sur l’engagement
­­ (figure 4). La valeur
du coefficient de détermination (R2) associée
lement occupé.
à ­­l’estimation de ce paramètre est relativement
Les relations causales entre ces différentes faible (16,9 % de la dispersion de la variable
variables (H1, H2 et H3) ont été testées à partir « engagement au travail » est expliquée par
de la méthode des équations structurelles, à ­­l’aide ­­l’immersion).

Figure 4. Estimation des paramètres du modèle structurel et indices d’ajustement.


­­
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Principaux indices d’ajustement :
­­ CFI : .910 ; χ²/ddl : 2,886 ; NFI : .869 ; NNFI : .898 ; RMSEA : .078 [.070 ; .086]

Ce résultat ­­s’explique en partie par la nature ­­


d’autres variables explicatives telles que des
même de la mesure de ­­l’immersion, ­­puisqu’elle réactions cognitives (e.g. concentration),
se focalise sur un moment (immersif) et non sur ­­d’attitudes envers ­­l’organisation (e.g. sentiment
une évaluation cumulée d’expériences
­­ immer- ­­d’appartenance) et de caractéristiques indivi-
sives (flow). Il montre cependant qu’un
­­ épisode duelles « dispositions » (e.g. ancienneté).
émotionnel intense, tel que la sensation ­­d’être Ce constat nous invite naturellement
immergé(e) contribue à influencer l’engagement
­­ à explorer plus spécifiquement cette relation.
au travail d’un
­­ individu. Par ailleurs, la faible En effet, comme précisé par Maubisson (2012)
valeur du R2 ­­s’explique également par la prise et Antéblian, Filser et Roederer (2013),
en compte ­­d’une seule variable indépendante ­­l’immersion ­­d’un individu dans une expérience
(l’immersion), modèle qui pourrait être enrichi est sensible à un phénomène de lassitude lié

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

au caractère répétitif de l’expérience.


­­ Pour pour chaque analyse multigroupes confirme
cette raison et dans un second temps, ­­l’effet ­­l’effet modérateur de ­­l’ancienneté dans le poste
modérateur de l’ancienneté
­­ et de l’âge
­­ a été actuellement occupé (p = 0,002) et de ­­l’âge (p
testé à partir ­­d’analyses multigroupes. La compa- = 0,011) sur le lien immersion-­engagement au
raison des modèles contraints et non-­contraints travail (tableau 8).

Tableau 8. Tests des effets modérateurs relatifs aux analyses multigroupes.

Ancienneté Age
Chi-2 ddl Chi-2 ddl
Modèle non-­contraint 484,774 168 484,774 168
Modèle contraint 727,727 351 714,668 351
∆ 242,953 183 229,894 183
p 0,002 0,011

­­
L’ancienneté moyenne des individus dans 38 ans4. Les groupes ont été déterminés à partir
une même entreprise est de 6,1 ans (Duhautois, de ces seuils (tableau 9).
2006), tandis que son âge moyen est estimé à

Tableau 9. Paramètres estimés pour les analyses multigroupes et indices d’ajustement.


­­

Coefficient Coefficient
R2 t p
structurel standardisé
H1(a) Ancienneté
Faible [1 à 6 ans] 1.367 .602 .362 5,242 .000
Forte [7 à 41 ans] .452 .293 .086 2,835 .005
H1(b) Âge
Faible [18 à 38 ans] 1.419 .673 .453 6,432 .000
Fort [38 à 64 ans] .286 .181 .033 1,682 .093

Modèle H1(a) : CFI : .896 ; χ²/ddl : 2,073 ; NFI : .818 ; NNFI : .887 ; RMSEA : 0,059 [0,053 ; 0,065]
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Modèle H1(b) : CFI : .897 ; χ²/ddl : 2,036 ; NFI : .818 ; NNFI : .889 ; RMSEA : 0,058 [0,052 ; 0,064]

Les résultats montrent effectivement que ce 4. DISCUSSION


phénomène de lassitude est probant. L’influence
­­
positive de l’immersion
­­ sur l’engagement
­­ au En suivant les recommandations de
travail est plus forte pour les jeunes individus Csikszentmihalyi (1997) qui indiquent qu’un ­­
(0,673 ; p < 0.001) et pour ceux qui occupent individu est en mesure de vivre des séquences
leur poste actuel depuis moins de 6 ans (0,602 ; immersives au travail, le principal apport de
p < 0.001). Cette relation-­causale ­­n’est pas signi- cette recherche consiste à proposer une approche
ficative lorsque les groupes sont constitués de conceptuelle de ­­l’immersion dans une expérience
personnes plus âgées (0,181 ; p = 0.093), ou elle de travail tout en montrant ses possibles effets
est faible lorsque ­­l’ancienneté dans le poste est sur ­­l’engagement. La première partie de cette
importante (0,293 ; p = 0.005). L’évolution
­­ des discussion ­­s’emploie à introduire et positionner
coefficients de détermination (R2) confirment le concept d’immersion
­­ au sein de la littérature
logiquement cette conclusion. en GRH (principales implications théoriques).
La seconde partie montre dans quelles mesures
le modèle structurel testé contribue à enrichir
4. Selon la Direction des enquêtes et des statistiques de Pôle la littérature sur les facteurs ­­d’influence de
emploi en 2016. ­­l’engagement au travail.

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

flow) ainsi que la réalisation de deux études


4.1. La définition du concept ­­d’immersion empiriques complémentaires (l’une explora-
en GRH toire et l’autre
­­ confirmatoire ; l’une
­­ qualitative et
­­l’autre quantitative) ont contribué à apporter des
­­L’immersion a principalement été étudiée éclaircissements théoriques importants à propos
en sciences de gestion dans les disciplines de ce concept. À ­­l’issue de ce travail, nous
des systèmes d’information,
­­ notamment lors proposons la définition suivante de l’immersion
­­
­­d’expériences digitalisées telles que la navigation en situation de travail :
web (Novak, Hoffman et Yung, 2000) ou lors
de jeux vidéo (Hamdi et Maubisson, 2012) et ­­
l’immersion dans une expérience de travail peut
être définie comme un épisode émotionnel durant
en marketing, lors d’expériences
­­ culturelles de
lequel un individu est absorbé par ­­l’action ­­qu’il
consommation (Carù et Cova, 2003) ou cinéma- réalise, si bien qu’il­­ fait abstraction de son
tographiques (Fornerino et al., 2008). Ce concept, environnement immédiat, ­­qu’il perd la notion du
qui trouve ses fondements en psychologie temps et ­­qu’il ressent un plaisir intrinsèquement
positive avec les travaux de Csikszentmihalyi lié à ­­l’action ­­qu’il réalise.
(1997) à propos du flow, ­­n’était pas clairement
Cette manifestation sensorielle peut être
étudié en GRH et son approche encore moins
appréhendée à partir ­­d’un construit multidi-
formalisée. Sans pouvoir prétendre à un
mensionnel (Maubisson, 2012), rejoignant ainsi
consensus quant à une définition de référence sur
­­l’idée qu’un
­­ état affectif est souvent constitué
ce thème, ce travail propose ­­d’introduire ­­l’étude
­­d’un ensemble de réactions inter-­reliées (Weiss
de ce concept dans ce champ.
et Cropanzano, 1996). Notons qu’il ­­ existe
En effet, le courant affectif en sciences de également un autre construit pour mesurer
gestion est désormais bien établi, laissant place ­­l’immersion, développé par Fornerino et al.
de façon plus marquée à celui de l’expérientiel­­ (2008). Mais ce dernier est unidimensionnel et
(Pine et Gilmore, 1999). Spécifiquement en la formulation des items semble plus éloignée
GRH, il est formalisé notamment par les travaux des différentes définitions issues de la littérature.
de Weiss (2002) qui s’intéressent
­­ aux « affective Il se concentre d’ailleurs
­­ sur la facette « évasion »
experiences ». Jusque-­là évaluées à partir d’une ­­ de l’immersion
­­ et parait ainsi moins adapté au
palette de réactions affectives matérialisée contexte des expériences de travail. ­­L’approche
dans les années 70 (Russel, 1980), éprouvée et conceptuelle multidimensionnelle proposée
enrichie par l’étude
­­ de grand nombre de situa- par Maubisson (2012) semble donc davantage
tions (e.g. Saavedra et Kwum, 2000), nous robuste et adaptée dans le contexte de la GRH
proposons dans cet article une nouvelle manière (structure factorielle du construit satisfaisante).
­­d’appréhender ces expériences de travail, sous
le prisme de ­­l’immersion. Cet angle ­­d’approche Ainsi, un individu en situation ­­d’immersion
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dépasse en effet (sans l’exclure) ­­ la facette dans une expérience de travail :
affective du vécu d’une ­­ expérience de travail –– est profondément engagé au point d’ignorer ­­
pour ­­l’enrichir d’une
­­ facette que nous quali- toutes autres sollicitations attentionnelles
fierons de « distorsion cognitive » qui intègre en dehors de ­­l’activité elle-­même (Simon,
la sensation de ­­s’évader, la perte de repères 2007 in Charfi et Volle, 2011) : dimension
temporels et la projection de soi, en plus de « évasion de ­­l’environnement immédiat » ;
­­l ’enjoyment (le plaisir intrinsèquement lié –– perd la notion du temps durant cet état :
à ­­l’action réalisée). Entendu comme un moment dimension « distorsion de temps » ;
stimulant pour l’individu­­ (Charfi et Volle, –– ressent du plaisir : dimension « enjoyment » ;
2011), comme accès à une expérience extraor- –– et se projette dans une situation idéale
dinaire (Hetzel, 2002), comme une sensation de réalisation de son travail : dimension
de bien-­être (Carù et Cova, 2003), l’immersion ­­ « projection de soi ».
correspondrait au « graal » des réactions affec- Les spécificités de l’immersion
­­ et ses
tives ressenties en situation de travail. origines conceptuelles nous amènent à croire,
Face à cela, il était donc essentiel de avec Csikszentmihalyi (1990), que favoriser
mieux comprendre ce concept et la manière ­­l’émergence ­­d’épisodes immersifs au travail
dont ce phénomène puisse être appréhendé est bon pour un individu ; notamment en consi-
lors d’expériences
­­ de travail. C’est
­­ pourquoi dérant l’analogie
­­ entre les concepts de flow et de
­­l’analyse fouillée de la littérature sur ce thème, subjective well-­being (Weiss, 2002). Favoriser
élargie à ­­l’étude de ses fondements (comme le ­­l’immersion pourrait ainsi répondre en partie

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

à des problématiques relatives à la santé et experts interviewés (cf. étude qualitative
à la qualité de vie au travail. Ces résultats exploratoire) ;
­­s’inscrivent donc en prolongement de ceux issus –– enfin, parce que l’engagement
­­ au travail
de la psychologie positive qui identifient ce que conduit à des comportements proactifs, pour
la notion de bien-­être recouvre (Seligman et lesquels un individu est plus vigoureux, plein
al., 2005). En effet, l’immersion
­­ se positionne ­­d’énergie, plus créatif et plus coopérant avec
naturellement dans le quartier nord-­e st du ses collègues (Schmitt et al., 2016).
modèle circomplexe de l’affect ­­ (Russel, 1980)
­­p uisqu’il ­­s ’agit ­­d ’un moment plaisant pour ­­D’un point de vue conceptuel, la différence
­­l’individu. Il ne correspond pas à un phénomène entre l’immersion
­­ et l’engagement
­­ au travail
nouveau observé en GRH mais davantage repose sur deux piliers : ­­l’intensité et la durée.
à une nouvelle manière ­­d’appréhender des Alors que l’immersion
­­ correspond à un épisode
expériences de travail. À ce sujet, Marion émotionnel intense, ­­l’engagement au travail
(2003) indiquait déjà que les phénomènes semble plus stable dans le temps et d’une ­­ intensité
étudiés ne sont pas réellement nouveaux, mais plus modérée. D’un ­­ point de vue sémantique, la
que ­­c’est la façon de les observer et de mieux formulation des items qui forment ces construits
les comprendre qui évolue. respectifs témoigne de cela, la nature des dimen-
sions associées à ces concepts également. Du
Mais au-­delà du bien-­être procuré par la point de vue des résultats empiriques de ce
sensation d’être
­­ immergé, ce phénomène produit travail, si ­­l’immersion était si proche concep-
également des effets sur l’engagement
­­ au travail tuellement de l’engagement
­­ au travail, la relation
des individus. causale (H1) serait bien plus forte (force du
lien et coefficient de détermination). La vérifi-
cation de cette hypothèse (ou plus exactement
4.2.­­ ­­L’influence de ­­l’immersion son non-­rejet) permet ­­d’affirmer que favoriser
­­l’immersion d’un­­ individu au travail est bon pour
sur ­­l’engagement au travail des individus
son engagement.
Les résultats de cette étude confirment que Ce résultat doit encourager la réalisation
­­
l’immersion correspond à « un état psycholo- de nouvelles études afin de consolider les
gique positif multidimensionnel » (au sens de recherches encore peu nombreuses sur ce thème.
Biétry et Creusier, 2013, 2015). En plus du bien-­ Ce travail, par exemple, se contente ­­d’étudier
être procuré par cette sensation, nos résultats ­­l’effet modérateur de seulement deux caracté-
montrent que ­­l’immersion dans une situation ristiques individuelles (l’âge et l’ancienneté).
­­
de travail influence positivement ­­l’engagement Bien que ces résultats soient intéressants ­­d’un
au travail, lui-­même source de performance point de vue managérial ­­puisqu’ils montrent que
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quotidienne au travail (e.g. Rich et al., 2010). ­­l’immersion est sensible à un effet de lassitude
Il ­­n’en demeure pas moins que sur ce point, (e.g. Antéblian et al., 2013), de nouveaux travaux
seul ­­l’engagement a été considéré et ­­qu’une des permettraient ­­d ’identifier ­­d ’autres facteurs
voies possibles de recherche consisterait à tester favorables à ­­l’immersion en situation de travail.
son influence sur d’autres
­­ variables telles que
la confiance en soi, l’optimisme
­­ ou le bien-­être
(Biétry et Creusier, 2015). Face à la pluralité 5. CONCLUSIONS,
des variables dépendantes envisageables, celle
retenue concerne ­­l’engagement au travail. LIMITES DE LA RECHERCHE
­­L’immersion d’un ­­ employé dans une expérience ET IMPLICATIONS MANAGÉRIALES
de travail n’ayant
­­ pas été étudiée de manière
approfondie à notre connaissance, le choix de Les résultats de cette étude montrent ­­l’intérêt
cette variable dépendante se justifie : de favoriser ­­l’émergence ­­d’épisodes immersifs
lors d’expériences
­­ de travail et permettent
–– ­­d’une part, par la volonté de bien discriminer de mieux appréhender ce phénomène dans
­­l’immersion de l’un ­­ de ses plus proches le domaine de la GRH. Ils s’inscrivent
­­ ainsi
voisins (cf. revue de la littérature) ; dans le prolongement des travaux initiés par
–– ­­d’autre part, car l’effort ­­ de clarification Csikszentmihalyi et Csikszentmihalyi (1988) qui
entre ­­l’immersion et ­­l’engagement au travail indiquent qu’il
­­ est bon de cultiver des expériences
est la principale difficulté abordée par les immersives pour accéder au bonheur. L’apport
­­

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

de ce travail, au regard de ceux précédemment de ces concepts permettrait de tester à nouveau


cités, consiste à proposer une conceptualisation leur singularité (validité convergente/discrimi-
de ce phénomène. Considéré comme un épisode nante entre ces différents construits) ainsi que
émotionnel durant lequel un employé est absorbé leur capacité prédictive (influence sur la satis-
par ­­l’action ­­qu’il réalise, nous avons montré que faction, l’engagement
­­ au travail, etc.).
la sensation ­­d’être immergé dans une expérience Enfin, ­­d’un point de vue managérial, les
de travail se caractérise par plusieurs compo- implications de ce travail sont doubles.
santes : l’abstraction
­­ de son environnement
immédiat, au profit d’une­­ représentation mentale La première est essentiellement pédago-
de soi dans un avenir idéalisé, une perte de gique et ­­s’adresse aussi bien aux managers
repères temporels et un plaisir intrinsèquement ­­qu’aux employés. En effet, la sensation d’être ­­
lié à ­­l’action réalisée. ­­L’immersion vient alors immergé(e) dans une expérience de travail forme
enrichir le quartier nord-­est du modèle circom- un attribut différenciant d’expériences
­­ routi-
plexe de ­­l’affect (Russel, 1980) en ce ­­qu’elle nières de travail. Lors d’épisodes
­­ immersifs, un
est une réaction affective positive, constituée individu est profondément absorbé par la tâche
­­d’une constellation de réactions inter-­reliées ­­qu’il réalise (abstraction de ­­l’environnement
(évasion, projection, enjoyment, distorsion de immédiat), perd la notion du temps (distorsion
temps). Ces spécificités lui confèrent naturel- temporelle), ressent du plaisir (enjoyment) et son
lement certaines proximités conceptuelles avec imaginaire est fortement stimulé (projection de
le Self-­Well Being bien ­­qu’ils ­­s’inscrivent sur soi). Nous avons par ailleurs montré ­­l’influence
une perspective temporelle clairement diffé- positive de cette sensation (épisodique) sur
rente : ­­l’un à long terme et ­­l’autre à court terme. ­­l’engagement au travail (davantage stable dans
Emergeant de manière épisodique, l’influence ­­ le temps). Ainsi, cette conceptualisation de
de ­­l’immersion sur l’engagement
­­ au travail a été ­­l’immersion que nous souhaitons introduire
vérifiée, permettant ainsi d’affirmer
­­ qu’il
­­ est bon en GRH offre aux managers, employés et
de favoriser ­­l’immersion ­­d’un employé pour chercheurs, une grille d’analyse
­­ qui permet de
­­qu’il soit épanouit à court terme (plaisir intrin- mieux appréhender ce phénomène complexe.
sèquement lié à ­­l’état) ou à long terme (effet Formalisée à partir d’un
­­ construit multidimen-
positif sur ­­l’engagement). sionnel issu des méthodes psychométriques, sa
mesure (à ­­l’instar des études de satisfaction),
Cette recherche présente toutefois des limites
peut constituer un excellent indicateur du
qui constituent autant de pistes ­­d’amélioration
caractère expérientiel de différentes situations
pour des recherches futures. Il serait par
de travail (exemples : séances de team building,
exemple intéressant de prolonger ce travail par
­­l’étude longitudinale ­­d’un panel ­­d’employés séminaires, jeux d’entreprise
­­ ou créatifs, analyse
pour mieux comprendre les conséquences de la perception de nouveaux locaux ou vérifier
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­­d’épisodes cumulés ­­d’immersion. Cela permet- ­­l’aspect stimulant de nouvelles méthodes de
trait entre-­autre de vérifier par un nouvel angle travail, etc.). Notons également que les managers
­­d’approche l’effet
­­ de lassitude constaté dans ces et DRH peuvent trouver en ­­l’immersion un
résultats. Un protocole qualitatif et longitudinal nouveau facteur ­­d’influence sur ­­l’engagement
permettrait également de décrire et caractériser au travail de leurs collaborateurs. ­­L’effort de
les contextes et situations au cours desquels se conceptualisation de l’immersion
­­ proposé dans
produisent ces épisodes immersifs. À ce sujet, les ce travail leur permettra de mieux ­­s’approprier
travaux de Csikszentmihalyi et Csikszentmihalyi ce concept (demande formulée dans l’étude ­­
(1988) qui suggèrent que l’immersion­­ peut se qualitative exploratoire).
produire lors ­­d’un équilibre entre le défi perçu La seconde implication est plus pragma-
et les compétences mobilisées constituent, tique et concerne des recommandations
selon nous, un point de départ intéressant. Par étroitement liées aux leviers ­­d’action et aux
ailleurs, afin de mieux comprendre les spéci- pratiques qui pourraient faciliter l’immersion.­­
ficités de l’immersion
­­ dans une expérience de En effet, sans avoir cherché à identifier les
travail, nous encourageons la réalisation de facteurs qui influencent favorablement la
nouvelles études afin de comparer cet épisode sensation d’être
­­ immergé, l’analyse­­ de la litté-
émotionnel à ­­d’autres, telles que les émotions rature et les résultats de la phase empirique
et réactions affectives répertoriées par exemple de cette étude sont riches d’enseignements­­
par Saavedra et Kwum (2000). Mobilisant cette pour mieux comprendre la manière dont
fois des approches psychométriques, la mesure émerge ce phénomène. Le premier est relatif

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

à la temporalité et au rythme de l’expérience.­­ Bass B. M. (1965) Organizational psychology,


Avec Carù et Cova (2003), nous encoura- Boston : Allyn et Bacon.
geons les managers à privilégier des « bains de Bertaux D. (1997) Les récits de vie, Nathan,
pieds » plutôt ­­qu’un « grand plongeon » pour Paris : collection 128.
favoriser la sensation d’être ­­ immergé(e). Par B iétry F., C reusier J. (2013) « Proposition
cette métaphore, ces auteurs indiquent que ­­d’une échelle de mesure positive du bien-­être au
­­l’immersion est rarement totale, profonde et travail », Revue de Gestion des Ressources Humaines,
longue. Les expériences de travail, inscrites 87, 1, pp. 23-41.
dans un registre de quotidienneté ou parfois plus Biétry F., Creusier J. (2015) « Le bien-­être au
exceptionnelles, sont constituées ­­d’épisodes travail : les apports d’une
­­ étude par profils », Relations
immersifs plus ou moins forts. L’objectif ­­ est Industrielles / Industrial Relations, 70, 1, pp. 11-35.
alors moins de se concentrer sur leur durée que B rillet F., C outelle P., H ulin A. (2013)
sur leur fréquence et sur l’intensité
­­ de cette « Prospective du management des ressources
sensation. Les résultats montrent bien que plus humaines face aux comportements des jeunes salariés
un individu est immergé, plus son engagement très qualifiés »,  Revue Management & Avenir, 63/5.
au travail est élevé (cf. hypothèse 1 vérifiée). Brillet F., Hulin A. (2010) « Vers un renouvel-
La mesure de l’immersion
­­ proposée ici permet lement des dispositifs prévisionnels des ressources
très justement d’apprécier
­­ cette intensité. Bien-­ humaines : la question de la complémentarité entre
entendu il conviendra de vérifier si le caractère prévision et prospective », Revue Management &
Avenir, Juin.
répétitif ­­d’épisodes immersifs produit le même
effet. Blau G. J. (1985) “A multiple study investigation
of the dimensionality of job involvement”, Journal
À ce sujet, la deuxième implication managé- of Vocational Behavior, 27, pp. 19-36.
riale de cette étude concerne l’identification
­­ Carù A., Cova B. (2003) « Approche empirique
­­d’un effet de lassitude qui semble fondamental de l’immersion
­­ dans l’expérience
­­ de consommation :
à explorer dans les études qui s’inscrivent
­­ dans les opérations ­­d ’appropriation  », Recherche et
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doit être approfondie et permettra certainement
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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

ANNEXE 1 : COMPOSITION ET STRUCTURATION DE ­­L’ÉCHANTILLON –


ÉTUDE EXPLORATOIRE « EXPERTS »

Profession - Emploi Secteur ­­d’activité de ­­l’entreprise Codification

Directeur des Ressources Humaines Aéronautique E1-DRHPrivé


Directeur des Ressources Humaines Enseignement supérieur et recherche E2-DRHPublic
Consultant en Ressources Humaines Conseil E3-ConsultRH
Consultant en Qualité de Vie au travail
Conseil E4-ConsultQVT
(QVT)
Représentant syndical Vente Automobile E5-IRP
Dirigeant Énergie E6-Dir

ANNEXE 2 : DESCRIPTION DE ­­L’ÉCHANTILLON

Profession Pourcentage
Agriculteurs exploitants 0,6
Artisans 1,6
Commerçants et assimilés 1,9
Chefs ­­d’entreprise de 10 salariés ou plus 1,9
Professions libérales et assimilés 2,3
Cadres de la fonction publique, profession intellectuelles et artistiques 6,8
Cadres ­­d’entreprise 22,8
Professions intermédiaires de l’enseignement,
­­ de la santé, de la fonction publique et assimilés 7,1
Professions intermédiaires administratives et commerciales des entreprises 2,9
Techniciens 7,4
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Contremaîtres, agents de maîtrise 3,2
Employés de la fonction publique 7,1
Employés administratifs ­­d’entreprise 10,3
Employés de commerce 10,6
Personnels des services directs aux particuliers 2,6
Ouvriers qualifiés 7,1
Ouvriers non qualifiés 3,5
Ouvriers agricoles 0,3

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

Secteur ­­d’activités Pourcentage


Agriculture, sylviculture et pêche 2,6
Industries extractives 1,3
Industrie manufacturière 8,7
Production et distribution d’électricité,
­­ de gaz, de vapeur et d’air
­­ conditionné 1,0
Production et distribution d’eau ;
­­ assainissement, gestion des déchets et dépollution 0,3
Construction 5,1
Commerce ; réparation d’automobiles
­­ et motocycles 12,5
Transports et entreposage 5,8
Hébergement et restauration 4,5
Information et communication 5,5
Activités financières et d’assurance
­­ 9,6
Activités immobilières 1,9
Activités spécialisées, scientifiques et techniques 8,4
Activités de services administratifs et de soutien 2,6
Administration publique 4,5
Enseignement 8,0
Santé humaine et action sociale 8,7
Arts, spectacles et activités récréatives 0,3
Autres activités de services 8,4
Activités extra-­territoriales 0,3

Genre Pourcentage
Masculin 50,8
Féminin 49,2

Indicateur Ancienneté dans le poste* Age*


Moyenne 10,350 36,560
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Ecart-­type 10,852 12,486
Mini / Maxi 1 / 40 18 / 64

* en années

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­­L’immersion du salarié dans un e expérience de travail : conceptualisation et implicatio

ANNEXE 3 : ANALYSE FACTORIELLE EXPLORATOIRE DE ­­L’ÉCHELLE « IMMERSION »

Variable Ext. F1 F2 F3 F4
Évasion 2 .820 .901
Évasion 4 .802 .891
Évasion 3 .798 .869
Évasion 1 .688 .810
Enjoyment 2 .842 .877
Enjoyment 3 .774 .847
Enjoyment 1 .684 .794
Distorsion 1 .797 .884
Distorsion 3 .718 .831
Distorsion 2 .733 .831
Projection de soi 1 .780 .848
Projection de soi 2 .730 .805
Projection de soi 3 .690 .796
Variance (%) 24,0 17,7 17,3 16,8
Variance totale expliquée (%) 75,8
Alpha de Cronbach .902 .830 .845 .810

KMO : .805 ; Chi-2 : 2019,47 ; ddl : 78 ; p. : < .001 ; N=311
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