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Appendicectomie laparoscopique
G.-F. Begin
Les avantages de l’appendicectomie laparoscopique sont, outre ceux de toute procédure laparoscopique,
la réduction de la douleur, de la morbidité pariétale, de la durée de séjour et d’invalidité et le fait d’éviter,
par une exploration abdominale complète, en particulier chez la femme jeune, les erreurs de diagnostic et
de réduire les appendicectomies inutiles. Deux techniques sont utilisées : l’appendicectomie totalement
intra-abdominale avec mise en place d’un trocart optique ombilical de préférence sous contrôle visuel et
celle avec deux trocarts de 5 mm. En modifiant le site d’implantation de ces trocarts et la position de la
table, l’exérèse de l’appendice par coagulation du méso et section entre ligatures est possible quels que
soient son siège et son état pathologique. L’appendice est extrait, à l’aide d’un sac, par un trocart de
10 mm. Dans les formes suppurées et, plus encore, dans les péritonites, le lavage de la cavité péritonéale
est un autre avantage de la laparoscopie. La résection du bas fond cæcal par agrafage linéaire à la faveur
d’un trocart de 12 mm peut sembler préférable à la simple ligature. L’existence d’un abcès avec masse
abdominale représente la situation la plus difficile et la cause majeure de conversion qui survient dans 5 %
des cas. Dans l’appendicectomie extra-abdominale, la ligature du méso et l’exérèse de l’appendice sont
effectuées après extériorisation au travers d’un trocart. La variante par mono-abord ombilical (Begin),
particulièrement indiquée chez l’enfant, nécessite une optique spécifique à canal opératoire. La fréquence
des complications peropératoires, hémorragie lors de la section du méso ou rupture d’un appendice
pathologique, diminue avec l’expérience de l’opérateur.
© 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
■ Principes techniques
Consentement éclairé
Il doit être obtenu au terme d’une information claire et
précise concernant le diagnostic supposé, les différentes techni-
ques avec leurs avantages et inconvénients, les complications
éventuelles même les plus exceptionnelles. Après l’intervention,
les gestes effectués doivent être exposés avec remise d’un
document écrit confirmant l’exérèse de l’appendice malgré
l’absence d’incision iliaque droite.
Préparation et anesthésie
L’anesthésie générale est précédée du bilan habituel avec
recherche d’éventuelles contre-indications à la création du
pneumopéritoine. La préparation locale comporte le rasage
abdominal, la désinfection ombilicale et l’évacuation de la
vessie par miction. Le sondage peut être justifié chez la femme
en cas de doute diagnostique. L’antibioprophylaxie est
systématique.
Installation
Installation du patient
Le patient est en décubitus dorsal, les deux bras le long du
corps, les membres inférieurs sur des appuis afin de permettre à
l’opérateur de se placer éventuellement entre les jambes. La
mobilisation de la table en position de Trendelenburg, proclive,
roulis latéral gauche ou droit, doit être possible. Le champ
opératoire est large, exposant l’ensemble de l’abdomen et Figure 1.
permettant la mise en place de trocarts supplémentaires. A. Position du patient et de l’équipe chirurgicale. (A. assistant ; C. chirur-
L’opérateur est à gauche du patient, l’assistant en face de lui et gie ; I. instrumentiste).
l’instrumentiste à sa gauche (Fig. 1A). B. Axe chirurgien, zone opératoire, moniteur. 1. Système optique ; 2. axe
Comme dans toute procédure laparoscopique, l’axe de vision de vision ; 3. moniteur.
du chirurgien, le site de l’intervention et l’écran doivent être
situés sur la même ligne (Fig. 1B). L’écran doit être mobilisé en • un palpateur de 5 mm ;
fonction de la situation de l’appendice, à la partie inférieure • un pousse-nœud ;
droite du patient en cas de siège habituel, à la partie supérieure • un ou deux porte-aiguilles ;
droite en cas d’appendice haut situé sous-hépatique. • une canule d’aspiration-lavage de 5 ou 10 mm ;
• un sac de récupération de tissus.
Matériel La technique extra-abdominale transombilicale nécessite une
L’instrumentation est identique (Fig. 2 A-C) quelle que soit la optique spécifique à canal opérateur. Pinces, coagulateur,
technique utilisée à l’exception de la voie transombilicale aspirateur, ciseaux doivent avoir une longueur suffisante.
(Fig. 2B). Elle comporte : Le matériel ancillaire pour la fermeture des orifices de trocarts
• un système vidéo complet (Fig. 2A) ; est identique quelle que soit la technique.
• une optique à vision droite ou fore-oblique 30° ou 45° ;
• un bistouri électrique permettant la coagulation mono- et Technique de l’appendicectomie totalement
bipolaire ; intra-abdominale (dite « in »)
• un système d’irrigation-lavage à haut débit ;
• une aiguille de type Veress ; Création du pneumopéritoine et mise en place
• deux petits écarteurs de type Chigot de 5 mm ; du trocart optique T1
• un trocart optique T1 de 10 mm ; Afin d’avoir le champ visuel le plus large possible, le premier
• un trocart opérateur T2 de 5 ou 10 mm avec, si nécessaire, un trocart T1 (Fig. 3) doit être idéalement placé dans le tiers
trocart de 12 mm ; supérieur de la cavité abdominale. [12] L’ombilic est en général
• un second trocart opérateur T3 de 5 mm ; choisi pour des raisons esthétiques.
• une pince coagulante bipolaire de 5 mm ;
• des ciseaux de 5 mm (avec possibilité de coagulation mono- Création du pneumopéritoine à l’aiguille de Veress
ou bipolaire) ; L’aiguille de Veress est introduite à la partie supérieure de
• un jeu de pinces fenêtrées atraumatiques de 5 mm ; l’ombilic en l’absence d’antécédent de chirurgie abdominale.
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Figure 2.
A. Circuit vidéo avec optique à 30 ou 45°. 1. Caméra ; 2. insufflateur ; 3. processeur vidéo ; 4. source de lumière froide ; 5. système d’imagerie photo ; 6. moniteur.
B. Matériel pour appendicectomie transombilicale vidéo-assistée avec : 1. Optique décalée à canal opératoire ; 2. trocart de 10 mm. ; 3. mandrin mousse ; 4.
trocart et mandrin de 5 mm ; 5. palpateur ; 6. pince fine ; 7. crochet coagulateur ; 8. ciseaux ; 9. aspirateur.
C. Matériel pour appendicectomie laparoscopique. 1. Optique de 30° ; 2. trocart de 10 mm ; 3. trocart et mandrin mousse de 5 mm ; 4. pince bipolaire
coagulante de 5 mm ; 5. pince atraumatique de 5 mm ; 6. ciseau de 5 mm ; 7. pousse-nœud ; 8. Endoloop® ; 9. porte-aiguille ; 10. palpateur mousse ; 11. sac
de récupération des tissus mous.
Sinon, on privilégie la situation dans l’hypocondre gauche. La 10 mm, une pince à disséquer à griffe saisit l’insertion ombilicale.
bonne position est vérifiée par un test de perméabilité à l’air et En soulevant cette insertion, une incision transversale de 8 mm
un test d’instillation – aspiration avec 10 ml de sérum physio- est effectuée à sa base.
logique. Le pneumopéritoine est réalisé par insufflation de CO2 À ce niveau, il n’existe qu’un seul plan aponévrotique accolé
à un débit de 4 l min–1 jusqu’à une pression de 10 mmHg. au péritoine. Après s’être assuré, à l’aide des écarteurs, de
Un trocart T1 de 10 mm est introduit par une incision verticale l’absence d’adhérence, un trocart atraumatique (mousse ou
inférieure dans les plis radiés de l’ombilic, avec un trajet en trocart verrouillé), de 10 mm, est introduit en direction de la
baïonnette en direction de la cavité pelvienne. Chez l’enfant, un cavité pelvienne. L’étroitesse de l’incision aponévrotique permet
trocart de 5 ou 7 mm peut être utilisé. L’exploration endoscopique d’éviter toute fuite de gaz. Après insufflation d’environ 1 l de
initiale vérifie la bonne position de l’aiguille et l’absence de toutes CO 2 à un débit de 1 l/min, l’endoscope vérifie la bonne
lésions provoquées par son extraction. [8-13] position du trocart et l’absence de toute lésion provoquée par
ce temps opératoire. Ainsi, aucun geste aveugle n’est effectué. La
Création du pneumopéritoine sous contrôle visuel (« open »)
pression intra-abdominale au cours de la procédure doit être la
Le risque de plaie vasculaire ou viscérale [14] justifie d’utiliser la plus basse possible, compatible avec le bon déroulement de
mise en place sous contrôle visuel. [15, 16, 17] Après une incision l’intervention. Sauf en cas d’obésité, une pression intra-
cutanée verticale dans les plis radiés de l’ombilic de moins de abdominale de 7 mmHg est suffisante.
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B
Figure 4.
A, B. Position des trocarts et de l’instrumentation pour l’appendicectomie
latérocæcale interne ou pelvienne. 1. Trocart optique ; 2. instrumentation
main gauche ; 3. instrumentation main droite.
Figure 10. Position des trocarts mise en tension. Lorsque le méso est fixé au plan péritonéal
pour appendicectomie avec cæcum postérieur, il est libéré aux ciseaux ou à l’aide d’une coagulation
ectopique sous-hépatique. monopolaire en s’aidant, si besoin, d’un trocart T2 de 5 mm
placé en position sus-pubienne. On peut également effectuer,
lorsque l’appendice est rétrocæcal ou sous-séreux, un décolle-
ment limité du fascia de Toldt droit aux ciseaux permettant la
mobilisation cæcoappendiculaire. Le déplacement des viscères se
fait uniquement par gravité en raison de la position latérale du
patient. Dans la plupart des cas, la pince, en saisissant l’extré-
mité de l’appendice, permet son extériorisation par un trocart
de 10 mm. En cas d’appendice volumineux et de méso épais, le
dessin spécifique de la pince permet de saisir les tissus sans
risque de lésion. Dans ces circonstances, un agrandissement de
l’incision ombilicale peut être nécessaire. L’appendicectomie est
ensuite réalisée de manière conventionnelle en position extra-
abdominale. La base appendiculaire est constamment visualisée.
Après réintégration du cæcum, une antibiothérapie locale est
instillée et la paroi aponévrotique refermée. On veillera à ce que
ainsi aisé, à la faveur, des mouvements de translation latéraux la suture du plan superficiel soit lâche avec réalisation de plans
du système optique-instrument, de dérouler l’ensemble de sous-cutanés sans fermeture cutanée afin d’éviter les collections
l’intestin grêle. La cavité abdominale est ainsi explorée dans sa et les cellulites. Dans les appendicites aiguës, le lavage et
totalité. Des prélèvements peuvent être effectués et une aspira- l’aspiration de la cavité péritonéale peuvent être réalisés à l’aide
tion réalisée grâce à un instrument passé dans le canal opéra- de la canule introduite par le canal opératoire. L’expérience de
toire. L’appendice étant localisé, la pince en saisit l’extrémité et l’opérateur est essentielle dans ces cas difficiles. Toutefois,
on apprécie la capacité d’extériorisation transombilicale par sa lorsque la technique ne paraît pas réalisable sans risque, la mise
Complications précoces
Complications mineures “ Points forts
Ce sont les abcès de paroi, en général dus à une fermeture
pariétale trop étanche. Un hématome peut survenir. L’exploration laparoscopique permet d’éviter les
appendicectomies injustifiées, en particulier chez la
Complications majeures femme jeune.
La technique intra-abdominale avec deux trocarts
Les complications majeures peuvent être un abcès profond opérateurs permet l’exérèse de l’appendice quels qu’en
souvent dû à un stercolithe appendiculaire abandonné lors de
soient le siège et l’état pathologique.
l’appendicectomie. Il est donc important de faire systématique-
ment une double ligature au niveau de la base appendiculaire La technique extra-abdominale par monoabord ombilical
afin d’éviter cette complication. [25, 26] Ces abcès peuvent permet la mobilisation et l’exérèse de l’appendice grâce à
survenir tardivement, une semaine à plusieurs mois après un système optique spécifique à canal opérateur.
l’intervention. Il convient alors d’extraire le stercolithe et de L’irrigation large de la cavité péritonéale est un avantage
drainer l’abcès sous couverture antibiotique. Ce geste peut être majeur de la laparoscopie dans les appendicites suppurées
réalisé, en fonction de l’expérience de l’opérateur, par voie et les péritonites diffuses.
cœlioscopique ou par drainage du cul-de-sac de Douglas par
voie transrectale.
La persistance d’un moignon appendiculaire peut être .
[22] Meyer A, Preuss M, Roesler S, Lainka M, Omlor G. Transumbilical [25] Guillem P, Mulliez E, Proye C, Pattou F. Retrained appendicolith after
laparoscopic-assisted “one-trocar” appendectomy. TULAA. as an alter- laparoscopic appendectomy: the need for systematic double ligature of
native operation method in the treatment of appendicitis. Zentralbl Chir appendiceal base. Surg Endosc 2004;18:717-8.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Begin G.-F. Appendicectomie laparoscopique. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales -
Appareil digestif, 40-505, 2006.