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Droit civil : La famille

Leçon 3 : Les effets du mariage


, Bernard BEIGNIER
, Yann PUYO

Table des matières


Section 1. Les effets personnels du mariage...........................................................................................................p. 2
§1. Les devoirs réciproques entre les époux...................................................................................................................................... p. 2
A. La communauté de vie entre les époux...................................................................................................................................................................... p. 2
B. Le devoir de respect.................................................................................................................................................................................................... p. 3
C. Le devoir de fidélité..................................................................................................................................................................................................... p. 4
D. Le devoir d'assistance..................................................................................................................................................................................................p. 5
§2. Le rôle des époux dans l'institution familiale.................................................................................................................................p. 5
Section 2. Les effets pécuniaires du mariage..........................................................................................................p. 6
§1. Les devoirs pécuniaires entre époux.............................................................................................................................................p. 6
A. Le devoir de secours....................................................................................................................................................................................................p. 6
B. La contribution aux charges du mariage..................................................................................................................................................................... p. 6
C. La cogestion du logement familial............................................................................................................................................................................... p. 7
§2. L'indépendance des époux............................................................................................................................................................ p. 8
A. L'indépendance professionnelle................................................................................................................................................................................... p. 8
B. L'indépendance bancaire..............................................................................................................................................................................................p. 9
C. L'indépendance de gestion sur les biens meubles......................................................................................................................................................p. 9
D. L'indépendance de gestion sur le patrimoine personnel............................................................................................................................................. p. 9
E. L'indépendance de gestion pour les besoins de la famille..........................................................................................................................................p. 9
§3. Les mesures de crise.................................................................................................................................................................. p. 10
A. L'autorisation judiciaire............................................................................................................................................................................................... p. 11
B. La représentation judiciaire........................................................................................................................................................................................ p. 11
C. Les autres mesures judiciaires.................................................................................................................................................................................. p. 11

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Le mariage impose aux époux :
• d'une part, un régime matrimonial qui peut librement être choisi par eux et qui organise leur patrimoine
dans le but d'une communauté de vie ;
• d'autre part, un régime primaire, impératif qui s'applique à tous les époux sans qu'ils puissent y déroger
et qui a pour but d'organiser cette communauté de vie dans une finalité familiale. Le régime matrimonial
ne fait pas l'objet de cette étude, à la différence du régime primaire. Ce dernier énoncé aux articles 212
et suivants crée des droits et des devoirs entre époux d'ordre personnel et d'ordre pécuniaire.

Section 1. Les effets personnels du


mariage
Certains effets créent des devoirs réciproques entre époux, d'autres prévoient le rôle des époux dans la famille.

§1. Les devoirs réciproques entre les époux


Avant tout, le mariage implique une communauté de vie entre les époux. L'article 212 du Code civil dispose
que :
« Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance. »Le devoir de secours ayant un
aspect purement pécuniaire sera étudié ultérieurement (cf. infra).

A. La communauté de vie entre les époux


L'article 215 alinéa 1 du Code civil énonce que :
« Les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie. »Selon l'alinéa 2 du même texte, ils choisissent
ensemble le logement de la famille. Cependant, la communauté de vie se traduit plus par une volonté réelle
de vivre ensemble qu'une résidence commune puisque l'article 108 du Code civil autorise les époux à résider
séparément dès lors que les règles relatives à la communauté de vie sont respectées.
Exemple
« Pour des motifs d'ordre professionnel, les époux peuvent avoir un domicile distinct, sans qu'il soit pour
ère
autant porté atteinte à la communauté de vie » (Cass. civ. 1 , 12 février 2014, Bull. civ. I, n° 25).
Le devoir de cohabitation comprend aussi le devoir conjugal (CA de Paris, 27 octobre 1959, D. 1960, 144).
Ainsi, un époux a pour obligation d'entretenir des relations sexuelles avec son conjoint. L'absence de relations
peut ainsi constituer une faute justifiant le divorce.

Ce texte étant d'ordre public, les époux ne peuvent pas y déroger par une convention organisant une séparation
amiable. Néanmoins, lorsque les époux sont séparés de fait (cf. infra pour la notion), ils peuvent conclure un
pacte parental afin d'organiser l'exercice de l'autorité parentale, pacte qui peut ensuite être homologué par
le juge aux affaires familiales (art. 373-2-7 et 376-1 du C. civ.). Indirectement, l'homologation d'un tel pacte
aboutit à la légitimation judiciaire de l'organisation de la séparation par les époux.

La communauté de vie cesse dans deux catégories d'hypothèses : la séparation de fait et la séparation
de droit.

• Les époux peuvent décider mutuellement de ne plus cohabiter ou l'un des époux peut le décider de façon
unilatérale quand cette cohabitation rend la vie commune intolérable. Cette situation correspond alors
à une séparation de fait.

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• Celle-ci s'oppose à la séparation de droit qui suppose une décision de justice. La séparation de corps est
une procédure au terme de laquelle une décision de justice est rendue qui laisse les époux dans les liens
du mariage mais qui met fin au devoir de cohabitation et les soumet au régime de la séparation de biens.

B. Le devoir de respect
La loi n° 2066-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein d'un couple ou
commises contre les mineurs a introduit au sein de l'article 212 du Code civil un devoir de respect mutuel entre
les époux. Cet ajout a été proposé par Robert Badinter, le respect étant considéré comme la « base d'une
vie de couple harmonieuse et préalable à indispensable à la prévention des violences conjugales » (Rapport
n° 160 de M. Henri de Richemont). Il faut voir dans ce devoir une manifestation du principe de respect de la
dignité humaine appliqué aux conjoints.

La loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences
au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants a attribué à ce devoir de respect une
réelle portée juridique en permettant à l’époux victime de violences de saisir le JAF pour qu’il lui délivre une
ordonnance de protection (art. 515-9 du C. civ. – Sur le lien entre la loi du 9 juillet 2010 et celle du 4 avril
2006, v. les rapports consultables sur le site du Sénat : n° 2684 et 2293 de M. Guy Geoffroy, n° 553 de Mme
Françoise Laborde, n° 564 de M. François Pillet). Cette loi du 9 juillet 2010 a été complétée par de nouvelles
dispositions issues de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes
(sur le sujet, v. M. Lamarche, « Violences conjugales : trois fois sur le métier remettez votre ouvrage », Dr.
fam., oct. 2014, alerte 41), puis, réformée par la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 vissant à agir contre
les violences au sein de la famille. Celle-ci a été complétée par une nouvelle loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020
visant à protéger les victimes de violences conjugales.

Il faut souligner que cette action est également ouverte à tout partenaire ou concubin, et plus largement à toute
personne victime de violences exercées par un ancien époux, partenaire ou concubin, et cela qu'il y ait ou non
cohabitation (art. 515-9 du C. civ.).
Sur ce dernier point, la loi a ainsi consacré la jurisprudence rappelant que la communauté de vie qui préside au
mariage ou au concubinage n'instaure pas un devoir de cohabitation et que les concubins ou époux peuvent
ère
résider séparément (Cass. civ. 1 , 12 févr. 2014, n° 13-13873).

Aucun dépôt préalable de plainte n'est nécessaire, la saisine du JAF se fait par voie de requête ou d'assignation.
Le Ministère public peut également saisir le JAF avec l'accord de la partie demanderesse, victime (art. 515-10,
al. 1 du C. civ.)

Dès réception de la demande d’ordonnance, le juge est chargé de convoquer les parties ainsi que le ministère
public pour avis. Selon les circonstances, l’audience des parties se fait à huis clos et l'audition des parties
peut, selon les circonstances, se faire séparément et ce, même d'office (art. 515-10, al. 2 du C. civ. et art.
1136-6 du CPC).

Le juge rend une ordonnance de protection s’il « existe des raisons sérieuses de considérer comme
vraisemblables la commission des faits de violences allégués et le danger auquel la victime est exposé »
er
(art. 515-11, al. 1 , C. civ.). La décision du juge civil est donc fondée sur une possibilité de violences et la
nécessité de protéger le demandeur, ce qui ne saurait lier le juge pénal dans l’hypothèse d’une procédure
pénale postérieure (cf. Rapport n° 2684 susvisé). A priori, les éléments de fait justifiant qu’une ordonnance de
protection sont laissés à l’appréciation souveraine des juges du fond. Cependant, la Cour de cassation pourrait
être amenée à exercer un contrôle en vérifiant que les juges ont suffisamment caractérisé les conditions
imposées par la loi.

L'ordonnance de protection doit être rendue « dans le délai de six jours à compter de la fixation de la date
er
d’audience » (art. 515-11, al. 1 , C. civ.), voire « en urgence » lorsqu'une personne majeure est menacée de
er
mariage forcée (art. 515-13, al. 1 , C. civ.). Dans l'absolu ce bref délai est totalement justifié relativement à la
gravité de la situation et à la nécessité d'y apporter une réponse rapide lorsque les conditions sont réunies. Pour

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autant, ce délai s'adapte mal des contraintes procédurales et principalement du respect de la contradiction.
En effet, le respect du contradictoire suppose un échange de pièces et d'écritures suffisant afin que chaque
partie puisse faire valoir ses demandes et moyens et surtout que le juge puisse statuer en connaissance de
cause. Néanmoins, cette exigence de bref délai de six est atténuée au moins par deux éléments :
• le premier réside dans la maîtrise par le greffe et le juge du point de départ du délai consistant en la
date de fixation de l'audience. En principe, celle-ci devrait être fixée par voir d'ordonnance du juge et ce,
"sans délai" (art. 1136-3, al. 3, C. civ.). Cependant, cette obligation devra nécessairement s'entendre à
l'aune du principe du contradictoire qui ne saurait être écarté par une exigence d'urgence. Il ne pourrait
en aller autrement que dans une procédure dépourvue de contradictoire telle que les requêtes de droit
commun. Or, ce n'est pas ce qui a été instauré par le législateur. C'est pourquoi, l'article 1136-6, alinéa 4,
du Code de procédure civile dispose que : « Le juge s'assure qu'il s'est écoulé un temps suffisant entre
la convocation et l'audience pour que le défendeur ait pu préparer sa défense. »
• Le second consiste en l'absence de sanction prévue par le texte en cas de non-respect du délai. Certes,
il ne s'agit pas d'un blanc-seing laissé au JAF pour s'affranchir de cette obligation. Néanmoins, cette
absence de sanction a le mérite de prendre en considération la réalité de la surcharge de travail, tant du
greffe, que du juge. Fixer une date d'audience le plus rapidement possible et rendre une décision dans
les six jours tout en respectant le contradictoire n'est pas mission impossible, mais difficile en termes
d'audiencement, d'effectif, et de disponibilités.
Le juge peut prendre de nombreuses mesures au titre de cette ordonnance de protection (cf. art. 515-11 du
C. civ.). Ainsi, il peut notamment :
• interdire au défendeur de rencontrer certaines personnes ou de rentrer en relation avec elles ;
• interdire au défendeur de paraître dans certains lieux dans lesquels se trouvent habituellement la partie
demanderesse ;
• prendre des mesures quant à la titularité et l’exercice de l’autorité parentale (cf. infra leçon 9 pour plus
de détails) ;
• autoriser la victime des violences à dissimuler son domicile et à élire domicile chez une personne morale
qualifiée ;
• proposer au défendeur une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ou un stage de
responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes.
S'agissant plus spécifiquement du logement conjugal ou du logement commun aux concubins et partenaires
pacsés, ce texte prévoit que le juge en attribue la jouissance à la victime des violences sauf ordonnance
spécialement motivée. le cas échéant, il peut mettre à la charge du conjoint violent les frais afférents à cette
attribution. Autrement dit, l'attribution de la jouissance du logement à la victime des violences est de plein droit,
raison pour laquelle cette décision n'a pas à être motivée. En revanche, dans le cas contraire où le juge ne
déciderais pas d'une telle attribution, il devrait spécialement le motiver.

Concernant l'interdiction de recontrer certaines personnes, l'article 515-11-1 instauré par la loi n° 2020-936
du 30 juillet 2020, dispose que :« Le juge aux affaires familiales peut prononcer une interdiction de se
rapprocher de la partie demanderesse à moins d'une certaine distance qu'il fixe et ordonner, après avoir
recueilli le consentement des deux parties, le port par chacune d'elles d'un dispositif électronique mobile
anti-rapprochement permettant à tout moment de signaler que la partie défenderesse ne respecte pas cette
distance. En cas de refus de la partie défenderesse faisant obstacle au prononcé de cette mesure, le juge aux
affaires familiales en avise immédiatement le procureur de la République. »
En principe, les mesures prises au titre de cette ordonnance de protection ne peuvent excéder six mois.
Toutefois, elles peuvent être prolongées en cas de requête en divorce, en séparation de corps, ou relative à
l'exercice de l'autorité parentale (art. 515-12 du C. civ.). Ces mesures se veulent temporaires, ce qui explique
la possibilité pour le juge de les modifier, voire de les supprimer à tout instant sur demande de l’une des parties
ou du ministère public.

Le procureur de la République peut prendre des mesures d'éloignement contre l'auteur des faits (art. 41-1,
6° et art. 41-2, 14° du CPP) et attribuer à la victime un système de « téléprotection », avec éventuellement
géolocalisation, qui lui permettra d'alerter rapidement les autorités publiques (art. 41-3-1 du CPP).

C. Le devoir de fidélité
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Corrélativement à l'obligation de vie commune, les époux se doivent fidélité. Cette obligation interdit l'adultère.
Comme tout devoir prévu par le régime primaire, la fidélité s'impose jusqu'à ce que la décision de divorce soit
passée en force de chose jugée (décision insusceptible de voie de recours suspensive et donc exécutoire).
L'infidélité peut constituer une cause de divorce pour faute au titre de l'article 242 du Code civil et un dommage
réparable au sens des articles 1240 et 1241 du même Code.

Exemple
Cependant, selon les circonstances, la jurisprudence écarte l'adultère comme faute pouvant entraîner le
ème
divorce, notamment lorsque les époux ont été autorisés à résider séparément (Cass. civ. 2 , 29 avril 1994,
RTD civ. 1994, 571 obs. J. Hauser ; CA de Paris, 4 octobre 2000, Dr. fam. 2001, comm. 28 H. Lécuyer).

D. Le devoir d'assistance
Contrairement au devoir de secours qui n'est que pécuniaire, le devoir d'assistance revêt un aspect plus
moral que pécuniaire. C'est l'aide mutuelle que se doivent les époux face aux difficultés de la vie. Ainsi, cette
aide peut être matérielle, lorsque les époux effectuent les tâches ménagères ou s'aident réciproquement dans
leur travail, mais aussi morale, quand l'un des époux est malade ou perd un être cher.

§2. Le rôle des époux dans l'institution


familiale
L'article 213 du Code civil est celui qui explique en quoi le mariage a une destination familiale puisqu'il attribue
aux époux leur rôle dans cette institution. Aux termes de ce texte,« Les époux assurent ensemble la direction
morale et matérielle de la famille. Ils pourvoient à l'éducation des enfants et préparent à leur avenir. »
En se mariant les époux fondent donc une famille dont ils ont la direction sur un pied d'égalité. Ce pouvoir
attribué aux époux dans l'intérêt du groupement dont ils font parties, dans l'intérêt de la famille.

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Section 2. Les effets pécuniaires du
mariage
Les époux ont des devoirs pécuniaires réciproques visant à assurer une vie familiale. Cependant, le mariage
instaure également une certaine indépendance entre les conjoints. Si l'ensemble de ces mécanismes de
liberté et d'obligations fonctionne mal, le droit a prévu des mesures spécifiques permettant de résoudre ce
dysfonctionnement.

§1. Les devoirs pécuniaires entre époux


Les conjoints sont en charge de la direction matérielle de la famille. Ainsi, ils doivent s'entraider
financièrement, contribuer aux charges du mariage et assurer un logement à la famille.

A. Le devoir de secours
Le devoir de secours ne se manifeste concrètement que si les époux sont séparés de corps ou de fait par le
versement d'une pension alimentaire à l'époux qui se trouve dans le besoin. Pendant la communauté de
vie, les conjoints doivent contribuer aux charges du mariage, ce qui implique la prise en charge des besoins
de l'époux qui n'aurait aucun revenu.

B. La contribution aux charges du mariage


Selon l'article 214 du Code civil chaque époux doit contribuer aux charges de la famille. La notion n'est pas
définie par la loi et c'est la jurisprudence qui, progressivement, lui a donné un contenu. Ainsi, ce sont, non
seulement, les dépenses nécessaires à la famille, mais aussi les dépenses d'agrément.A cet égard, la
Cour de cassation affirme le principe suivant : « La contribution aux charges du mariage, distincte, par son
fondement et par son but, de l'obligation alimentaire, peut inclure des dépenses d'investissement ayant pour
objet l'agrément et les loisirs du ménage. »
ère
(Cass. civ. 1 , 18 décembre 2013, n° 12-17420).

Exemple
ère
Dépenses nécessaires : le loyer de l'habitation principale (Cass. civ. 1 , 7 novembre 1995, Bull. civ. I, 394).
ère
Acquisition d'une résidence secondaire (Cass. civ. 1 , 18 décembre 2013 préc. – V. antérieurement, dans
ère
le même sens : Cass. civ. 1 , 20 mai 1981, Bull. civ. I, 176).
Cette règle étant d'ordre public, les époux ne peuvent pas déroger à la contribution aux charges du
mariage. Néanmoins, le texte leur permet d'aménager les modalités de la contribution dans leur convention
matrimoniale. Ainsi, ils peuvent fixer, dans un contrat de mariage, à quelle hauteur ils contribuent à ces charges,
à défaut, l'article précise qu ' « ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives ».
Il est fréquent que le contrat de mariage stipule une clause selon laquelle les époux contribuent aux charges
du mariage au jour le jour de telle sorte qu'ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux à ce propos. Le
cas échéant, les juges du fond ont un pouvoir souverain d'appréciation sur la portée de cette clause et peuvent
ainsi déterminer si elle a pour effet ou non d'instaurer une présomption interdisant de prouver que l'un ou l'autre
des époux ne s'est pas acquitté de sa contribution aux charges du mariage.
Exemple
ère ère
Cass. civ. 1 , 16 septembre 2014, n° 13-18935 ; Cass. civ. 1 , 24 septembre 2014, n° 13-21005 ; Bull. civ.
ère er
I, n° 152 ; Cass. civ. 1 , 1 avril 2015, n° 14-14349 et n° 14-12938.

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En tout état de cause, les époux peuvent toujours demander la modification du montant de la contribution
ère
qu'ils avaient fixé, si un changement est intervenu dans leur situation financière (Cass. civ. 1 , 3 février 1987,
Defrénois 1987, p. 765 note J. Massip).
En principe, la séparation de fait ne met pas un terme à la contribution aux charges.
Toutefois, elle peut avoir un effet sur l'application du principe.
Exemple
Ainsi, il a été jugé que l'occupation par le mari et les enfants du logement familial constitue, pour la femme qui
a quitté ce logement, une manière de contribuer aux charges du mariage dans la mesure où elle n'a aucun
ère
revenu (Cass. civ. 1 , 6 mars 1990, Bull. civ. I, 58).
La contribution aux charges du mariage a une dimension particulière en régime de séparation de biens. Elle
est souvent invoquée pour causer ou justifier un déséquilibre au sein d'une indivision particulière. Ainsi, au
moment du divorce, il est fréquemment soutenu que si tel époux a contribué au financement du bien indivis, ou
à des travaux sur ce bien, au-delà de ses droits dans l'indivision, cela ne lui donne pas un droit à rétablissement
sur le fondement de l'article 815-13 du Code civil car il ne s'agissait là que d'une forme de contribution aux
charges du mariage. Selon les circonstances de l'espèce, et plus particulièrement lorsqu'existe une différence
importante de revenus entre les conjoints, les juges du fond sont assez enclins à admettre une telle solution.
Toutefois, la Cour de cassation pose une restriction relativement à l'origine des deniers affectés au financement
du bien indivis ou des travaux.
Exemple
Ainsi, elle considère que « sauf convention matrimoniale contraire, l'apport en capital provenant de la vente
de biens personnels, effectuées par un époux séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de
l'acquisition d'un bien affecté à l'usage familial, ne participe de l'exécution de son obligation de contribuer
ère
aux charges du mariage. » (Cass. civ. 1 , 3 oct. 2019, n° 18-20828). De même, l'apport en capital de fonds
personnels par un époux séparé de biens afin de financer la part de son conjoint lors de l'acquisition d'un
biens indivis affecté à l'usage familial ne participe pas de son obligation de contribuer aux charges du mariage
ère
(Cass. civ. 1 , 9 février 2022, n° 20-14272).
Autrement dit, les deniers personnels ou issus d'un bien personnel et remployés dans l’acquisition d'un bien
indivis sont, sauf convention matrimoniale contraire, sujets à rétablissement selon l'article 815-13 du Code civil.

De surcroît, s'il existe une clause de contribution au jour le jour empêchant tout compte entre les époux (cf.
supra) celui qui a réalisé ces dépenses et qui veut en obtenir le « remboursement » ne pourrait donc pas arguer,
en principe, qu'il a « surcontribué » aux charges du mariage (v. les arrêts préc. – Sur le sujet : S. David, « Les
créances entre époux séparés de biens : une neutralisation échevelée ou maîtrisée ? », AJF, sept. 2015, p.
452). Cependant, en l'absence d'une telle clause interdisant tout compte au titre de la contribution aux charges
du mariage, il est possible que celui des époux qui a contribué au-delà de son obligation légale, justifie ainsi
d'une indemnité pour cette « surcontribution ».
Exemple
ère er
Sur la nécessité d'en rapporter la preuve : Cass. civ. 1 , 1 avril 2015, n° 14-13795.
Tel est le cas, toujours pour les époux séparés de bien, lorsque l'un d'eux participe à l'activité professionnelle
de l'autre ou gère le ménage de telle sorte qu'il lui procure des économies importantes. Dans cette hypothèse,
l'époux qui s'est appauvri peut prétendre à une indemnité sur le fondement de l'enrichissement sans cause. La
solution est en principe différente pour les époux soumis au régime de communauté car les revenus du travail
enrichissent celle-ci (pour ces questions, v. le cours relatif aux régimes matrimoniaux).

En cas d'inexécution de son obligation par l'un des époux, l'autre peut saisir le juge aux affaires familiales pour
qu'il détermine la contribution de son conjoint (art. 214 al. 2 du C. civ . et art. 1070 et s. du CPC).

C. La cogestion du logement familial


L'habitation qui permet le logement de la famille fait l'objet d'une protection accrue par la loi qui instaure
une règle de cogestion. Ainsi, en vertu de l'article 215 du Code civil, les époux ne peuvent pas conclure
seuls des actes de disposition sur le logement de famille (vente, hypothèque, etc...) et plus largement tout acte

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qui aurait pour effet de priver la famille (bail) de sa résidence. La même règle s'applique pour les meubles
meublants du logement, c'est-à-dire pour les meubles qui le garnissent. Ces actes, pour être valables, doivent
être conclus soit par les deux époux, soit par l'un d'eux mais avec le consentement de l'autre.

Le conjoint qui n'a pas donné son consentement à l'acte peut en demander la nullité dans le délai d'un an
à compter du jour où il a eu connaissance de cet acte et, au plus tard, un an après la dissolution du régime
matrimonial.

Cette cogestion n'a pour objectif que d'assurer aux époux, et plus largement à la famille, la jouissance de
l'immeuble qui constitue le logement familial.
Exemple
Aussi, l'époux qui est le propriétaire exclusif du logement familial peut valablement le donner, sans le
consentement de son conjoint, dès lors qu'il s'en est réservé l'usufruit assurant ainsi l'usage et la jouissance
ère
de l'immeuble pendant toute la durée du mariage (Cass. civ. 1 , 22 mai 2019, n° 18-16 666)

Si le bien est indisponible, il n'est pas pour autant insaisissable par les créanciers qui peuvent inscrire une
ère
hypothèque judiciaire (Cass. civ. 1 , 4 octobre 1983, Defrénois 1983, art. 1593, obs. Champenois).

L'autorisation de résider séparément résultant d'une ordonnance de non-conciliation et l'attribution du


logement à l'un des époux ne modifie pas la destination familiale du logement qui demeure ainsi soumis au
ère
principe de cogestion posé par l'article 215, alinéa 3, du Code civil (Cass. civ. 1 , 26 janvier 2011, Bull. civ.
I, n° 17 – Cet arrêt fait une application stricte de ce texte en approuvant les juges du fond d'avoir prononcer la
nullité d'une vente conclue par le mari seul sur l'immeuble constituant le logement de la famille, lui appartenant
en propre et dont la jouissance exclusive lui avait été attribué alors même que son épouse et ses enfants
n'y résidaient plus). En d'autres termes, il faut bien comprendre que l'instance en divorce ne remet pas en
cause l'existence du logement de la famille.

Remarque
Voir l'intervention de Marc Nicod, Professeur à l'Université Toulouse 1 - Capitole, sur la protection légale du
logement de la famille lors des séances de l'Académie de Législation.

§2. L'indépendance des époux


Bien que le mariage fonde une famille dans laquelle les époux ont des devoirs réciproques, la loi leur garantie
des libertés. Liberté, d'avoir une profession, un compte bancaire, de gérer seul les biens mobiliers et ses
propres biens, de gérer seul les besoins de la famille.

A. L'indépendance professionnelle
L'article 223 du Code civil prévoit que :« Chacun des époux peut librement exercer une profession, percevoir
ses gains et salaires et en disposer après s'être acquitté des charges du mariage. »Cet article est le fruit d'une
longue évolution législative qui a eu surtout pour but de consacrer l'indépendance professionnelle et financière
de la femme. Le Code Napoléon ne prévoyait rien car la femme devait demander à son mari l'autorisation pour
travailler et ses revenus tombaient en communauté et étaient administrés par ce dernier.

Le texte énonce deux libertés :


• d'une part, les époux choisissent et exercent librement leur profession ;
• d'autre part, ils disposent de leurs gains et salaires librement. Si la première liberté n'appelle aucune
remarque particulière, ce n'est pas le cas de la seconde qui est limitée par l'intérêt de la famille. Le
conjoint ne peut disposer librement de ces gains et salaires qu'après avoir contribuer aux charges
du mariage.

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B. L'indépendance bancaire
L'article 221 du Code civil relatif aux relations entre le banquier et le couple marié comporte deux règles
correspondant respectivement aux deux alinéas du texte. Le premier consacre l'indépendance bancaire de
chaque époux qui conséquemment peut ouvrir seul un compte de dépôt ou de titres. Le second pose une
présomption bancaire au profit du banquier.Ainsi, « à l'égard du dépositaire, le déposant est toujours réputé,
même après la dissolution du mariage, avoir la libre disposition des fonds et des titres en dépôt ».
En d'autres termes, le banquier n'a pas à demander à son client l'origine des fonds pour s'assurer que ce
ème
dernier a bien le pouvoir d'en disposer (CA de Paris, 5 septembre 2000, Dr. fam. 2001, comm. 75, 4 arrêt et
la note). Sauf le cas de fraude, le banquier se trouve ainsi exempté de toute responsabilité envers le conjoint
de son client au cas où celui-ci déposerait des fonds qui ne seraient pas à lui.

C. L'indépendance de gestion sur les biens meubles


« Si l'un des époux se présente seul pour faire un acte d'administration, de jouissance ou de disposition sur
un bien meuble qu'il détient individuellement, il est réputé, à l'égard des tiers de bonne foi, avoir le pouvoir de
faire seul cet acte. » (art. 222, al. 1, C. civ.).Ce principe signifie d'une part, qu'un époux peut, seul, passer
un acte quelconque sur un meuble (vente, location...) qu'il détient ; d'autre part, qu'à l'égard du tiers de
bonne foi, il est réputé avoir le pouvoir d'accomplir un tel acte. Le texte pose ainsi une règle de pouvoir
et de présomption. Le pouvoir de disposer seul d'un bien meuble dont il a la détention et la présomption de
pouvoir en disposer à l'égard du tiers de bonne foi. Ceci appelle deux observations : la simple « détention
» suppose un plus grand nombre d'hypothèses que la possession et la présomption ne joue qu'à l'égard de
celui qui ignore que l'époux n'a aucun pouvoir. Par conséquent, si le tiers est de mauvaise foi, il appartiendra
à l'époux qui était propriétaire du bien de le prouver afin d'obtenir l'anéantissement de l'acte.

En revanche, la règle ne joue pas dans deux hypothèses prévues par l'alinéa 2 du même texte:

• La première exception reprend l'article 215 alinéa 3 du Code civil selon lequel un époux ne peut disposer
seul des biens qui garnissent le logement de famille (cf. supra).
• La seconde concerne les « meubles corporels dont la nature fait présumer la propriété de l'autre conjoint
». Dans le régime de la communauté légale ces biens font parties des propres par nature.

Exemple
Exemples de tels biens : les vêtements et les instruments professionnels.

Remarque
Même si ces exceptions sont totalement justifiées, elles ne sont peut-être pas toujours efficaces notamment
concernant les meubles meublants du logement de famille. En effet, si le tiers est de bonne foi l'annulation
sera dure à obtenir car il faudra prouver que le meuble se trouvait dans le logement de famille.

D. L'indépendance de gestion sur le patrimoine


personnel
« Chacun des époux administre, oblige et aliène seul ses biens personnels. » (art. 225 du C. civ.).L'article
consacre l'indépendance patrimoniale de chaque époux. Même mariés sous le régime de communauté légale,
les époux conservent leur pouvoir sur les biens qui composent leur patrimoine respectif. Cependant, cette
règle peut connaître une restriction en application de l'article 220-1 alinéa 2 du Code civil (cf. infra les mesures
de crise).

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E. L'indépendance de gestion pour les besoins de la
famille

L'alinéa 1 de l'article 220 énonce que :« Chacun des époux a pouvoir de passer seul les contrats qui ont
pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l'un oblige l'autre
solidairement. »Ce texte prévoit non seulement, l'indépendance des époux dans la gestion de la famille, mais
aussi leur solidarité.

Chaque époux peut donc passer des contrats pour la vie courante de la famille.
Exemple
Bien que le texte limite expressément ce pouvoir à la conclusion de contrats, la jurisprudence l'a étendu à
ère
tous les actes ayant pour objet l'entretien du ménage et l'éducation des enfants (Cass. civ. 1 , 7 juin 1989,
D. 1989, p. 21, note J. Massip).
Le texte indique avec précision le domaine des dettes. Ce sont des dettes qui sont nécessaires à la famille.
Exemple
Factures d'électricité, de chauffage, achats de vêtements, frais de scolarité, d'hospitalisation des enfants...
Sont, par conséquent, exclues :
Exemple
les dépenses de loisirs dès lors qu'elles ont un caractère anormal par rapport au train de vie du ménage (v. en
sens inverse pour une dépense de loisir normale au regard du train de vie de la famille : CA de Paris, Dr. fam.
ère
1997, comm. 50 et la note) et les opérations d'investissement (Cass. civ. 1 , 11 janvier 1984, Bull. civ., I, 13).
En principe, toutes les dettes prévues à l'article 220 alinéa 1 du Code civil, engagent les époux solidairement,
ce qui signifie que le créancier peut poursuivre chacun d'eux pour l'intégralité de la dette.

Toutefois, il existe trois exceptions prévues aux alinéas 2 et 3 :


• Tout d'abord, toutes les dettes qui sont manifestement excessives au regard du train de vie du ménage,
qui sont inutiles, ou qui ont été conclues par un tiers de mauvaise foi n'entraînent pas la solidarité. Ici,
tout dépendra du cas d'espèce.
• Ensuite, la solidarité ne joue pas non plus pour les achats à tempérament, c'est-à-dire pour les achats
dont le paiement du prix est échelonné dans le temps.
• Enfin, la solidarité est exclue en matière d'emprunts. Néanmoins, cette exception comporte une limite
pour les emprunts « modestes et nécessaires aux besoins de la vie courante » et dont le montant cumulé
(en cas de pluralité d'emprunts) n'est pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage.
Cette atténuation à l'exception est restrictive puisqu'elle suppose la réunion de trois conditions :
1. les emprunts doivent être modestes,
2. nécessaires aux besoins de la vie courante
3. et leur montant cumulé ne doit pas être manifestement excessif par rapport à leur train de vie du ménage.
Dit autrement, il faut comprendre que les époux sont solidaires pour tout emprunt modeste, au regard de leurs
ressources, essentiel, au regard des besoins de la famille, et non excessif, eu égard à leur train de vie.

§3. Les mesures de crise


Trois articles du Code civil (217, 219, 220-1) permettent d'aménager les pouvoirs des époux ou de prendre des
mesures afin de trouver des solutions aux situations de crise que peut connaître la famille. Les articles 217 et
219 du Code civil permettant respectivement de recourir à une autorisation et à une représentation judiciaire
lorsque l'un des époux est hors de manifester sa volonté sont très importants en pratique, notamment lorsque
la personne concernée pourrait faire l'objet d'une mesure de protection (sauvegarde, tutelle, curatelle). En
effet, l'article 428 du Code civil rappelle le principe de subsidiarité (selon lequel de les mesures de protection

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juridiques des majeurs ne doivent être mises en place que s'il n'existe pas une autre solution juridique) et
indique corrélativement que doivent être prioritairement mises en œuvre d'autres règles notamment les articles
217 et 219.

A. L'autorisation judiciaire
L'article 217 du Code civil prévoit une dérogation temporaire à la règle de cogestion sur les biens qu'impose
parfois le régime impératif ou le régime matrimonial. Il prévoit la possibilité pour un époux de se faire autoriser
par justice à passer seul un acte qui nécessite, en principe, le consentement de l'autre conjoint.

Le texte envisage deux hypothèses :


• Il peut s'agir du cas ou l'un des époux est « hors de manifester sa volonté ». Ainsi en est-il lorsque le
conjoint est dans le coma ou quand il fait preuve d'insanité mentale.
• L'autorisation est également possible lorsque le refus de l'époux de passer l'acte « n'est pas justifié
par l'intérêt de la famille ». Dans cette dernière hypothèse, l'époux qui invoque le bénéfice de l'article
217 devra prouver que le refus va à l'encontre de l'intérêt de la famille. L'autorisation judiciaire permet
au conjoint de se passer du consentement de son époux. L'acte est alors opposable à ce dernier sans
créer d'obligation personnelle à sa charge (art. 217 al. 2 du C. civ.).
Ce texte peu notamment être utilisé pour obtenir l'autorisation de vendre le logement de la famille pendant
l'instance en divorce et le fait que l'un des époux s'en est vu attribué la jouissance par l'ordonnance de non-
conciliation ne suffit pas à justifier le refus d'autorisation (Cass. civ., 30 sept. 2009, Bull. civ. I, n° 196).

B. La représentation judiciaire
La représentation judiciaire est prévue par l'article 219 alinéa 1 du Code civil.

Elle permet à un époux de se faire autoriser par justice à représenter son conjoint. L'article ne prévoit
qu'un seul cas de représentation : lorsque l'époux est hors d'état de manifester sa volonté. La représentation
vaut soit pour certains actes particuliers d'administration et de disposition, soit « d'une manière générale ».
Dans ce dernier cas, le juge devra préciser les modalités de la représentation.

Cet article attribue un pouvoir plus important que celui de l'article 217, puisqu'il ne s'agit pas de passer
outre une règle de cogestion, mais de se substituer à l'autre époux, et parfois de manière générale.
Par conséquent, contrairement à ce qui a été vu précédemment à propos de l'habilitation judiciaire, l'époux qui
est représenté est engagé par les actes passés par son conjoint. Cet article est même applicable si l'époux,
ère
devant être représenté, est déjà soumis à un régime de protection (curatelle, tutelle) (Cass. civ. 1 , 18 février
ère
1981, Bull. civ. I, 60) ou s'il remplit les conditions pour être soumis à un tel régime (Cass. civ. 1 , 9 novembre
1981, JCP 1982, II, 19808 note Prévault).

A défaut de représentation légale ou de représentation judiciaire, un époux peut toujours donner mandat
à son conjoint pour que celui-ci le représente dans l'exercice des pouvoirs que lui attribue le régime
matrimonial (art. 218 du C. civ.). Il s'agit alors d'un mandat classique qui suppose l'entente entre les époux.
A défaut de tout système de représentation voulue ou subie, l'article 219, alinéa 2, du Code civil dispose que
« les actes faits par un époux en représentation de l'autre ont effet, à l'égard de celui-ci, suivant les règles de
la gestion légale » (pour la gestion d'affaires cf. cours de droit des obligations).

C. Les autres mesures judiciaires


Le juge aux affaires familiales peut prescrire toute mesure urgente lorsqu'un époux manque à ses obligations
et met ainsi en péril l'intérêt de la famille (art. 220-1, al. 1, C. civ.). L'alinéa 2 de l'article 220-1 offre une liste
indicative de ces mesures, ce qui signifie que le juge n'est en rien lier par ce texte et peut prendre d'autres
mesures qui ne sont pas énoncées par la loi. Cependant, la question se pose encore de savoir si le juge peut

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prendre des mesures à caractère extrapatrimonial (Sur le sujet, v. particulièrement : A. Karm, J.-Cl. Civ. Code,
art. 216 à 226. Fasc. 40, n° 78).

Exemple
Interdire à l'époux qui met en péril l'intérêt de la famille de faire des actes de disposition sur ses biens sans
le consentement de son conjoint, habiliter l'époux à recouvrir des créances appartenant à la communauté.
Le juge statue par ordonnance et ces mesures ne peuvent pas excéder trois ans.

Les actes réalisés en violation de l'ordonnance sont nuls s'ils ont été passés avec un tiers de mauvaise foi ou,
s'agissant d'un bien dont l'aliénation est sujette à publicité, s'ils sont postérieurs à la publication de l'ordonnance
(art. 220-3 alinéa 1 du C. civ.). Il s'agit d'une nullité relative ouverte à l'époux requérant qui a deux ans
pour agir à compter de la connaissance de l'acte ou deux ans à compter de la publication légale de
l'acte.

Depuis la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004, le juge peut ordonner la résidence séparée des époux lorsque l'un
d'eux a exercé des violences qui mettent en danger l'autre époux ou les enfants.

En principe, il doit alors attribuer la jouissance du logement conjugal à l'époux victime des mesures.
A cette occasion, le juge peut également statuer sur les conditions d'exercice de l'autorité parentale et la
contribution aux charges du mariage.

L'ensemble de ces mesures est caduque dans les 4 mois de leur prononcé si aucune requête en divorce
ou séparation de corps n'a été déposée. Cette nouvelle disposition insérée à l'alinéa 3 de l'article 220-1
a pour but de protéger l'époux victime de violences en prenant une mesure rapide.

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