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L’ ÉCONOMIE DE L’EMPLOI
PLAN
• Chapitre 1 : Travail et emploi
• Chapitre 2 : L’offre et la demande de travail
• Chapitre 3 : L’analyse néoclassique et keynésienne du marché du
travail
• Chapitre 4 : Les analyses contemporaines du marché du travail
La théorie du capital humain,
La théorie du signal,
La théorie de la recherche d’emploi,
La théorie des contrats implicites
la théorie du salaire d’efficience
Le modèle insiders-outsiders
• Chapitre 5 : Les inégalités et les discriminations sur le marché du
travail
• Chapitre 6 : La qualité de l’emploi
Les exposés
• Axe 1: La microéconomie du travail
• Axe 2: La macroéconomie du travail
• Axe 3: Emploi et salaire
• Axe 4: Immigration et emploi
• Axe 5: Les politiques de l’ emploi
• Axe 6: Formation et emploi
• Axe 7: Le télétravail
• Axe 8: La fin du travail
• CH 1 : TRAVAIL ET EMPLOI
• 1. DÉFINITION/HISTORIQUE
• Le travail est une activité qui existe dans toutes les sociétés humaines, il a pris dans les économies occidentales des
formes et un sens particulier à partir de la Révolution industrielle.
• À la question « Pourquoi travaillons-nous ? », Jean Fourastié répond dans un texte célèbre (1964) que toute société
humaine est confrontée à la nécessité de transformer la nature pour la rendre apte à satisfaire les besoins humains.
L’emploi est un cadre pour une activité de production rémunérée, une place dans le processus de production, une
situation dans la hiérarchie de l’ entreprise. L’emploi est un cadre économique, social, institutionnel et juridique dans
lequel le travail va être organisé.
• L’étude historique montre que la conception moderne du travail a émergé récemment. La société antique ou de l’Ancien
Régime avait une vision négative du travail, notamment manuel, dénué de dignité sociale. Les travailleurs manuels
étaient situés en bas de la hiérarchie sociale.
• Si certaines professions garantissent sous l’Ancien Régime une position sociale, c’est parce qu’elles sont réservées
aux couches supérieure. Le travail indigne, c’est le travail salarié comme le rappelle Robert Castel (1995).
• L’invention du travail, pour reprendre l’expression de Michel Freyssenet (1993), c’est l’invention du rapport
salarial, c’est-à-dire le développement et la généralisation progressive à partir du XVIIIe siècle d’une relation
contractuelle entre le travailleur et son employeur.
• Au XIXe siècle le salariat se développe et devient central, au sens où il devient le principe de l’organisation de
l’économie et de la société. Une activité industrielle se met en place qui embauche par contrat et contre
rémunération des individus. La disparition des terres communautaires et la modernisation de l’agriculture
développent également le salariat agricole. Un marché du travail émerge permettant la rencontre entre
• En réalité, le contrat de travail est largement asymétrique : le rapport de force est en défaveur des
travailleurs-offreurs de travail, d’autant plus que les syndicats sont interdits. La liberté du marché s’apparente
à la liberté « du renard libre dans le poulailler libre » ; Karl Marx et Friedrich Engels, dans Le manifeste du parti
communiste (1848) considèrent que les ouvriers sont les esclaves de la classe bourgeoise, n’ayant que la
liberté de choisir à quel bourgeois individuel ils devront se vendre.
• Karl Polanyi (1944) considère également que la caractéristique centrale de la société capitaliste est
• On sait que les conditions de travail et de salaire pouvaient être effroyables au XIXe siècle. Ce siècle est
XIXe et surtout le XXe siècle vont être ceux de la reconnaissance progressive du droit du travail, encadrant
et protégeant le salariat (temps de travail, conditions de travail, protection de l’emploi puis sécurité
sociale…).
• Pour reprendre les termes de Robert Castel, le travail passe de la logique de tutelle sous l’Ancien Régime
à celle du contrat au XIXe siècle et enfin au salariat-statut au XXe siècle. Le travail représente le cœur
d’une société salariale où il est la condition normale des individus, leur ouvrant et leur garantissant, à eux
et à leur famille, des droits (systèmes d’assurances sociales), une identité, une position sociale et un
statut.
• 2. LES TRANSFORMATIONS DU TRAVAIL ET DE L’EMPLOI
• Depuis l’émergence de la conception moderne du travail, au XIXe siècle, de profondes transformations ont marqué
le travail et l’emploi.
• 2.1. DÉFINITIONS
2.1.1.Taux d’activité
• Le taux d’activité mesure le pourcentage de la population âgée de 15 ans et plus hors institution qui occupe un
emploi ou qui en cherche un activement. Le taux d’activité indique en fait le taux de participation de la main-
d’oeuvre sur le marché du travail. Cette fois, le groupe de référence est la population de 15 ans et plus. On le
calcule comme suit :
Quatre régions enregistrent des taux d’activité supérieurs à la moyenne nationale (45,2%). Il s’agit des régions de
Tanger-Tétouan-Al Hoceima (51,2%), de Casablanca-Settat (47,5%), de Marrakech-Safi (46,5%) et de Rabat-Salé-
Kénitra (45,7%). En revanche, les taux les plus bas sont enregistrés dans les régions de Souss-Massa (39,9%), de
Béni Mellal-Khénifra (41,7%) et de Fès-Meknès (42%).
Taux d’activité selon les régions au deuxième trimestre de
2022(en%)
National 45,2
Souss-Massa 39,9
Drâa-Tafilalet 43,0
Marrakech-Safi 46,5
Casablanca-Settat 47,5
Rabat-Salé-Kénitra 45,7
Fès-Meknès 42,0
Oriental 43,1
En deuxième trimestre 2022, le taux d’emploi a stagné à 40,2% au niveau national (graphique)
Evolution du taux d’emploi aux deuxièmes trimestres par milieu de
résidence (en%)
Entre le deuxième trimestre de 2021 et la même période de 2022,le taux de chômage au Maroc est passé de 12,8% à
11,2%.
• 2.2. Les formes du chômage
• Le chômage conjoncturel varie avec les fluctuations de l’activité économique au contraire du chômage structurel qui
s’explique par des raisons liées à l’évolution des technologies (on parle de chômage technologique) ou par une
mauvaise adéquation entre les qualifications offertes et recherchées. On parle parfois aussi de chômage naturel.
• Le chômage frictionnel correspond à la période nécessaire au passage d’un emploi à l’autre (adaptation de la population
active aux nouveaux emplois créés) ; il dépend du degré de mobilité professionnelle des individus.
• Le chômage volontaire est lié au fait que les gens refusent de travailler au taux de salaire en vigueur sur le marché du
travail. Les chômeurs volontaires s’écartent donc volontairement du marché du travail et ne font pas partie de la
population active. Pour les économistes classiques ou libéraux, si les marchés sont parfaitement flexibles, le chômage
ne peut être que volontaire. En fait, il n’y a pas alors de chômage au sens commun du terme. Le chômage involontaire
résulte du fait que les gens ne trouvent pas de travail au taux de salaire en vigueur sur le marché. Les chômeurs
involontaires forment la partie de la population active qui n’est pas employée et qui est à la recherche d’un emploi.
• 2.3.La loi d’Okun
Arthur Okun était un économiste américain, professeur à Yale et conseiller économique auprès des présidents
Kennedy puis Johnson. Okun était un spécialiste des rapports entre productivité, taux de croissance et niveau de
l’emploi. Ses travaux les plus influents portent par ailleurs son nom : la loi d’Okun. Cette loi montre une relation
initialement linéaire entre la variation du taux de chômage et le taux de croissance du PIB. Ainsi, le chômage a
tendance à croître, respectivement décroître, lorsque la croissance est inférieure, respectivement supérieure, à un
certain seuil. Dès lors, cette relation permet d’établir un coefficient indiquant le taux de croissance (du PIB)
nécessaire afin de stabiliser le taux de chômage.
• La courbe de Phillips a été publiée pour la première fois par William Phillips en 1958 sous le titre The Relation
between Unemployment and the Rate of Change of Money Wage Rates in the United Kingdom, 1861-1957. Le
travail de l’économiste était alors d’établir une corrélation entre le taux de chômage et les taux de salaire
nominal élargi ensuite aux taux d’inflation:
• ΔW= a-bu
• où a et b sont des paramètres positifs, ΔW désigne le taux de croissance du salaire nominal (égal à la variation
du logarithme du salaire nominal) et u le taux de chômage.
• La logique sous-tendue par Phillips était qu’un fort taux de croissance nécessitait un fort emploi des facteurs de
production, ce qui avait pour conséquence une hausse des salaires – et donc de l’inflation. En revanche, une
baisse de l’activité, réduit la demande d’emploi et diminue donc l’inflation.
• Le gouvernement ne peut choisir qu’entre la situation A (forte inflation, faible chômage) et la situation B (faible
inflation, fort chômage).
La situation A est le résultat d’une politique de relance (politique de go)obtenue par une augmentation des
dépenses publiques, des salaires ou des revenus de répartition, une augmentation de la masse monétaire, une
baisse des taux d’intérêt.
La situation B est celle d’une politique de stabilisation (politique de stop) obtenue par la réduction des dépenses
publiques, le freinage des salaires et celui de la hausse de la masse monétaire, notamment par l’augmentation
des taux d’intérêt.
• 3. EXPLICATIONS
• Pour comprendre mais aussi pour pouvoir anticiper l’évolution quantitative et qualitative de l’activité et de
l’emploi, il est nécessaire d’analyser leurs principaux déterminants.
• 3.1. EXPLICATION DE L’ÉVOLUTION QUANTITATIVE
• L’évolution de la population active dépend de l’évolution de la population totale et de celle de la participation à
l’activité, mesurée par le taux d’emploi ou d’activité :
• ΔPA = ΔPT. ta + PT. Δta (avec PA la population active, ta le taux d’activité et PT la population totale ; Δ indiquant
une variation).
• On peut donc retrouver l’évolution de la population active par la décomposition de ces différents éléments.
L’évolution démographique explique sur le long terme l’essentiel des évolutions quantitatives de l’activité. Elle
dépend du solde naturel et du solde migratoire. Le solde naturel résulte des flux de naissances et de décès.
• Les flux migratoires ont également une influence sur la population active. Celle-ci est plus directe car une partie
importante de l’immigration depuis la fin du XXIe siècle est une immigration d’actifs (même si des politiques de
regroupement familial ont également joué). Deuxième caractéristique, les flux migratoires sont largement
dépendants des politiques migratoires, elles-mêmes corrélées à la situation sur le marché du travail.
• Les explications sont multiples : impact positif de l’immigration sur la demande de biens et services ;
adaptabilité des techniques de production utilisées à cette nouvelle offre de travail ; augmentation de l’activité
permise par l’arrivée de ces nouveaux offreurs de travail (ce dernier facteur dépendant de la disponibilité et de la
flexibilité du facteur capital)… Dans le détail, l’effet d’une vague d’immigration de travail peu qualifié est positif
pour le capital et pour les rémunérations du travail qualifié, avec qui il est complémentaire, mais négatif pour le
travail peu qualifié et en particulier pour les migrants de la vague précédente qui sont les plus substituables aux
nouveaux migrants.
• L’immigration a également des conséquences sur les pays de départ. Elle diminue la population active, et
souvent la partie la plus diplômée et qualifiée de celle-ci, privant le pays d’une main-d’oeuvre dont il a pourtant
souvent pris en charge les coûts d’éducation, au moins partiellement. Là aussi, les effets réels sont plus
complexes. D’abord les migrants permettent des transferts de richesses vers les pays d’origine. L’envoi d’argent
aux familles représente dans le Tiers Monde des sommes supérieures à celles de l’aide publique au
développement. Les transferts sont aussi technologiques et en capital humain : une partie des migrants
retourne au pays après une période plus ou moins longue, enrichis d’expériences et de connaissances nouvelles.
Enfin, les politiques migratoires sélectives des pays d’accueil peuvent inciter les candidats à investir dans un
capital humain qui restera en partie au pays si le nombre de candidats est supérieur au nombre de places.
• 3.2.LA DESTRUCTION CRÉATRICE
• La notion de destruction créatrice, développée en 1942 par Joseph Schumpeter est le processus par lequel de
nouvelles innovations se produisent continuellement et rendent les technologies existantes obsolètes, de
nouvelles entreprises viennent constamment concurrencer les entreprises en place, et de nouveaux emplois et
activités sont créés et viennent sans cesse remplacer des emplois et activités existants.
Les économistes Pierre Cahuc et André Zylberberg ont popularisé en France cette approche peu connue du
fonctionnement du marché du travail ; dans un ouvrage intitulé Le chômage, nécessité ou fatalité, (2004), puis en
2015, Les ennemis de l’emploi. Ils observent qu’en France, en moyenne, chaque jour, 10 000 emplois sont détruits
et 10 000 emplois sont créés. En moyenne, chaque jour, 30 000 personnes perdent leur emploi et 30 000 personnes
trouvent un emploi.
CH 2: L'OFFRE ET LA DEMANDE DE TRAVAIL
1. L'OFFRE DE TRAVAIL
• L'offre de travail est une fonction à pente positive (graphique ), qui indique les différentes quantités de travail qui
seraient offertes par les travailleurs sur le marché du travail à différents taux de salaire. On suppose que plus le
salaire est élevé, plus grand sera le nombre de personnes qui se présenteront sur un marché du travail
spécifique. L'offre de travail est celle des travailleurs qui offrent leurs services de travail. Le salaire est indiqué en
ordonnée alors que les quantités de travail offertes sont placées sur l'abscisse.
• Offre de travail sur le marché X
1.1.L'arbitrage entre revenu de travail et loisir
• Les ménages répartissent leur temps total disponible entre le loisir et le travail rémunéré. Ici, nous
entendons par loisir la totalité du temps qui n'est pas consacré au travail rémunéré. Il inclut donc le
temps consacré au travail domestique (cuisine, bricolage, courses...) et celui réservé au sommeil, aux
activités de détente et aux relations familiales ou sociales. Le loisir procure des satisfactions aux
individus, mais il a un coût d'opportunité : les revenus que les individus pourraient obtenir en
consacrant ce temps à un travail rémunéré. Plus les rémunérations offertes par les employeurs sont
élevées, plus le coût d'opportunité du loisir est élevé et plus les ménages sont incités à consacrer une
part importante de leur temps au travail rémunéré.
• Dans la figure qui oppose les revenus de travail placés en ordonnée et les loisirs disposés en
abscisse, nous trouvons une courbe d’indifférence ou courbe d’iso-utilité. Partout le long de cette
courbe, les diverses combinaisons de revenus de travail et de loisirs génèrent un même niveau d’utilité
ou de bien-être U0. Lorsque, comme au point « a », les revenus de travail et les loisirs sont bien
équilibrés, il n’y a pas de difficulté a remplacer les uns par les autres. Les revenus n’ont qu’a augmenter
de y0 a y1 pour compenser la perte de loisirs. Mais, lorsque l’individu travaille davantage, comme c’est
le cas au point « b », il faut que les revenus augmentent plus que proportionnellement, soit de y1 a y2,
pour compenser la perte d’utilité associée a une réduction additionnelle, mais pourtant égale, du
temps de loisirs.
• Parce que la pente (en valeur absolue) de la courbe d’iso-utilité décroît de gauche a droite, on dit que
les taux marginaux de substitution entre le travail et les loisirs sont décroissants.
• L’arbitrage revenus de travail-loisirs
• La carte des courbes d’iso-utilité rassemble des courbes d’indifférence graduées en fonction de leur
éloignement par rapport a l’ordonnée a l’origine. C’est C’est le cas, par exemple, de la courbe U3 par rapport
aux courbes U2 et U1 présentées dans la figure . Inversement, on peut aussi dire que les courbes d’utilité
plus rapprochées de l’origine, comme U1 et U2, donnent des niveaux de bien-être inférieurs a U3.
• Carte des courbes d’iso-utilité
2. LA DEMANDE DE TRAVAIL
La demande de travail est une fonction à pente négative (graphique ), qui indique les différentes quantités de
travail qui seraient demandées par les employeurs sur le marché du travail à différents taux de salaire. On suppose
que plus le salaire est élevé, plus faibles seront les quantités de travail demandées par 'les employeurs. La
demande de travail est celle des employeurs qui demandent les services de travail de la part des travailleurs.