Vous êtes sur la page 1sur 31

 18-037-E-15

Vascularites à anticorps antimembrane


basale glomérulaire
S. Faguer

Résumé : Le syndrome de Goodpasture est une maladie auto-immune rare (0,5 à un cas par million
d’habitant par an) caractérisée par le développement d’anticorps polyclonaux ciblant deux épitopes par-
ticuliers de la chaîne alpha-3 du collagène 4 (anticorps antimembrane basale glomérulaire [anti-MBG]).
Le dépôt de ces anticorps sur les membranes basales glomérulaires et alvéolaires s’accompagne d’un
tableau de glomérulonéphrite rapidement progressive, d’hémorragie intra-alvéolaire, ou d’une atteinte
pneumorénale concomitante. Une double positivité anticorps anti-MBG et anticytoplasme des polynu-
cléaires neutrophiles est identifiée chez 15 à 30 % des patients avec un syndrome de Goodpasture et
impacte le pronostic à long terme. Outre la prise en charge symptomatique, souvent réanimatoire, un trai-
tement combinant cortisone, cyclophosphamide et échanges plasmatiques doit être débuté en extrême
urgence, parfois même avant la confirmation du diagnostic par une méthode non invasive (dosage des
anti-MBG circulants) ou invasive (biopsie rénale). La survie à long terme est désormais supérieure à
85 % mais le pronostic rénal reste sombre malgré une prise en charge adaptée (30 à 60 % de patients
en insuffisance rénale terminale à 1 an). La sévérité de l’atteinte rénale initiale, le retard à l’initiation
du traitement et l’absence de triple thérapie immunosuppressive sont les principaux facteurs prédictifs
de mauvais pronostic rénal. La place des nouveaux immunosuppresseurs (anticorps monoclonaux anti-
CD20, bloqueurs du complément) reste à déterminer. Le risque de rechute est faible et une greffe rénale
peut être proposée à distance de l’épisode aigu chez les malades en insuffisance rénale terminale.
© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Anticorps antimembrane basale glomérulaire ; Goodpasture ; COL4A3 ; Syndrome pneumorénal ;


Hémorragie intra-alvéolaire ; Glomérulonéphrite rapidement progressive

Plan la maladie de Goodpasture, désormais dénommée vascularite à


anticorps antimembrane basale glomérulaire (MBG). La vascula-
■ Introduction 1 rite par anti-MBG est une maladie auto-immune particulièrement
rare caractérisée par le développement d’anticorps ciblant la
■ Épidémiologie 1 chaîne alpha-3 du collagène IV présent dans les MBG et mem-
■ Mécanismes physiopathologiques 2 branes basales alvéolaires. Elle se présente principalement sous la
■ Présentation clinique 2 forme d’un syndrome pneumorénal associant une gloméruloné-
Atteinte pulmonaire 2 phrite rapidement progressive et une hémorragie intra-alvéolaire.
Atteinte rénale 2 La gravité de la vascularite par anti-MBG tient à la sévérité de
Autres atteintes 2 l’insuffisance rénale, souvent sévère d’emblée et requérant une

épuration extrarénale, et de l’insuffisance respiratoire pouvant
Examens diagnostiques 2
compliquer l’hémorragie intra-alvéolaire (syndrome de détresse
■ Diagnostics différentiels 3 respiratoire aiguë).
■ Traitements spécifiques 3 La prise en charge des vascularites par anti-MBG repose princi-
Plasmaphérèse 4 palement sur des données cliniques anciennes issues de courtes
Cortisone 4 séries observationnelles ou de cas cliniques qui présentent un cer-
Traitement immunomodulateur 4 tain nombre d’analogies avec d’autres vascularites auto-immunes.
Durée du traitement 4
Transplantation rénale 5
■ Survie et pronostic fonctionnel 5  Épidémiologie
■ Perspectives 5
■ Conclusion 5 Avec une incidence de 0,5 à un cas par million d’habitants, la
vascularite par anti-MBG est une pathologie auto-immune extrê-
mement rare [1–3] . Elle a été décrite chez des patients d’origines
ethniques diverses, sans différence évidente de symptomatologie
 Introduction ou de sévérité. Elle semble toutefois plus fréquente chez les indi-
vidus à peau blanche. On identifie deux pics d’incidence : une
Le syndrome de Goodpasture correspond à l’association d’une forme précoce entre 20 et 30 ans, et une forme tardive entre 60
insuffisance rénale aiguë ou rapidement progressive avec syn- et 70 ans. Les hommes et les femmes sont touchés de manière
drome glomérulaire et d’une hémorragie intra-alvéolaire. Il inclut similaire [4, 5] .

EMC - Néphrologie 1
Volume 32 > n◦ 1 > janvier 2020
http://dx.doi.org/10.1016/S1762-0945(19)68853-4
18-037-E-15  Vascularites à anticorps antimembrane basale glomérulaire

 Mécanismes d’isotypes IgG4 , une molécule activant peu le complément, sug-


gère que les mécanismes de la vascularite sont probablement plus
physiopathologiques complexes et éventuellement, pour une part, indépendants de
l’activation du complément.
La vascularite par anti-MBG est caractérisée par le développe- De manière exceptionnelle, on décrit également l’apparition
ment d’anticorps ciblant des épitopes particuliers de la chaîne d’autoanticorps ciblant la chaîne alpha-3 du collagène IV dans
alpha-3 du collagène IV (COL4A3). L’épitope principalement les suites d’une transplantation rénale, chez des patients por-
reconnu par les autoanticorps anti-MBG est un peptide mono- teurs d’un syndrome d’Alport (maladie liée à l’X secondaire à une
mérique de 28 kDa appartenant au domaine non collagénique de mutation du gène COL4A5) [22] . Cette situation immunologique
COL4A3 (domaine alpha-3 [IV] NC1) [6, 7] . Deux épitopes confor- particulière (allo-immunisation spécifique contre COL4A5) a une
mationnels recouvrant les acides aminés 17 à 31 (épitope EA) et présentation clinique particulière et n’est pas détaillée ici.
127 à 141 (épitope EB) d’alpha-3 [IV] NC1 ont été reconnus [6, 8] .
Les anticorps anti-MBG sont principalement d’isotypes immu-
noglobulines G (IgG1 ) et IgG3 , sans restriction des chaînes légères  Présentation clinique
(IgG polytypiques), mais de rares cas de vascularites par anti-MBG
liées à des dépôts d’IgG2 ou IgG4 ou d’IgA ont été décrits [9, 10] . La présentation habituelle des vascularites par anti-MBG est
Rarement, des formes atypiques associant une faible proliféra- un syndrome pneumorénal brutal. Après une phase courte faite
tion extracapillaire et des dépôts linéaires d’IgG monotypique de prodromes non spécifiques (fatigue, malaise, arthralgies, nau-
sans anti-MBG circulants ont été décrites [11] . De plus, la diffu- sées, vomissements, pâleur), les patients développent des atteintes
sion de l’auto-immunité contre d’autres épitopes de COL4A3/4/5 rénale et pulmonaire (60 à 80 %), une atteinte rénale isolée (20 à
a été observée (notion de réactivité croisée) et semble associée aux 40 %) ou une atteinte pulmonaire isolée (moins de 10 %) [2, 5, 23] .
formes les plus sévères d’atteintes rénales [8] .
Malgré une expression ubiquitaire de COL4A3, les anticorps se Atteinte pulmonaire
fixent principalement sur les MBG et membranes basales alvéo-
Elle est caractérisée par une hémorragie intra-alvéolaire, se pré-
laires. Cette spécificité pourrait être secondaire à l’organisation
sentant sous la forme d’une toux sèche, d’une hémoptysie et/ou
tridimensionnelle des chaînes de COL4A3 dans ces deux mem-
d’une dyspnée. Dans les formes frustes, c’est le lavage bronchoal-
branes basales, qui les rend plus accessibles à d’éventuels
véolaire (évaluation du score de Golde) qui affirme le diagnostic.
autoanticorps circulants.
Les formes les plus sévères se caractérisent par un syndrome
L’émergence d’autoanticorps anti-MBG, et peut-être leur patho-
de détresse respiratoire aiguë nécessitant une prise en charge
génicité, sont largement influencées par le génotype human
réanimatoire. Dans ces situations, l’hémoptysie, l’anémie souvent
leukocyte antigen (HLA) sous-jacent. On observe en effet une
profonde, l’imagerie thoracique (Fig. 1) et l’absence habituelle
prévalence plus élevée des haplotypes HLA-DR15 (ancienne-
de fièvre orientent vers une cause non infectieuse d’hypoxémie,
ment HLA-DR2), DRB1*03 et DRB1*04, et au contraire une
et doivent faire évoquer le diagnostic afin de débuter un traite-
moindre prévalence des haplotypes DRB1*01 et DRB1*07 [12] . On
ment spécifique en urgence (cf. infra). Le développement d’une
observe également une très forte association entre l’haplotype
hémorragie intra-alvéolaire est plus fréquemment observé chez les
HLA-DRB1*1501 (à un degré moindre HLA-DRB1*1502) et le
patients fumeurs.
développement de la maladie, mais cet haplotype est porté
par un tiers de la population blanche, suggérant une forte
influence d’autres facteurs génétiques ou environnementaux [13] . Atteinte rénale
L’implication du système HLA, la synthèse d’une IgG1 ou d’une
Elle est caractérisée par une glomérulonéphrite rapidement pro-
IgG3 , et l’infiltration lymphocytaire T CD4+ sous-tendent égale-
gressive. La protéinurie est principalement composée d’albumine.
ment l’implication de la réponse lymphocytaire T. Chez l’animal,
Son intensité est variable, rarement néphrotique. L’hématurie
la spécificité et l’intensité de la réponse T (lymphocytes T auto-
est constante et une hématurie macroscopique n’est pas rare.
réactifs) modulent le phénotype de la glomérulonéphrite [14] .
L’insuffisance rénale est souvent sévère d’emblée. Dans une étude
Chez un grand nombre de malades porteurs de l’haplotype
rétrospective récente ayant inclus 122 malades pris en charge en
HLA-DR15 et développant une vascularite à anti-MBG,
France entre 1983 et 2006, 60 % des patients avaient une créatini-
l’interrogatoire rapporte une exposition à un facteur poten-
némie supérieure à 500 ␮mol/l [4] , et 68 % ont requis une épuration
tiellement responsable de lésions de la barrière alvéolocapillaire :
extrarénale dans le mois suivant le diagnostic. Une hypertension
tabagisme, exposition à des solvants organiques ou des hydro-
artérielle est classique et oriente vers une rétention hydrosodée
carbures, infection (en particulier influenza A2), inhalation
associée. Les douleurs lombaires sont rares au diagnostic.
de cocaïne, exposition à des poussières de métaux, traitement
antilymphocytaire (par exemple alemtuzumab) [15, 16] . Ainsi,
une vascularite par anti-MBG se développe chez des malades Autres atteintes
dont les caractéristiques génétiques favoriseraient l’émergence
Plus rarement, certains patients avec une vascularite par anti-
d’une auto-immunité ciblant le domaine alpha-3 [IV] NC1, et
MBG présentent une atteinte de l’oreille interne caractérisée par
qui vont présenter une altération aiguë de la membrane alvéo-
une perte d’audition uni- puis bilatérale, une sensation de pléni-
locapillaire (environnement, maladie dysimmunitaire) exposant
tude de l’oreille et/ou des acouphènes [24, 25] .
le domaine alpha-3 [IV] NC1 aux cellules immunitaires circu-
lantes permettant alors le développement d’une auto-immunité
spécifique et la reconnaissance par l’anticorps pathogène. Cette
cascade d’événements permettrait d’expliquer le développement
 Examens diagnostiques
d’autoanticorps anti-MBG chez environ 10 à 20 % des malades Le diagnostic de vascularite par anti-MBG doit être évoqué chez
présentant une vascularite à anticorps anticytoplasme des poly- tous les malades présentant une glomérulonéphrite rapidement
nucléaires neutrophiles (ANCA) de localisation essentiellement progressive, un syndrome pneumorénal, une hémorragie intra-
rénale [17–19] . alvéolaire ou une détresse respiratoire aiguë isolée de mécanisme
Dans un certain nombre de cas, le dépôt de l’immunoglobuline indéterminé. L’anémie profonde, dissociée dans le contexte d’une
pathologique le long des membranes basales s’accompagne d’une insuffisance rénale habituellement aiguë, oriente le diagnostic et
activation des voies classiques et alternes du complément, et est un bon reflet de la gravité de l’atteinte pulmonaire.
secondairement d’un afflux de polynucléaires neutrophiles sur Le diagnostic de vascularite par anti-MBG repose sur la mise en
le site des lésions. L’activation du complément se caractérise par évidence d’anticorps anti-MBG circulants par méthode enzyme-
le dépôt de fragments de C3 bien visibles en immunofluores- linked immunosorbent assay (Elisa) ou radio-immunologique, ou
cence conventionnelle, mais également du complexe d’attaque de manière plus spécifique en phase solide (anticorps anti-alpha-
membranaire C5b9 [20, 21] . Toutefois, la description d’authentiques 3 [IV] NC1). Une immunofluorescence indirecte utilisant des
vascularites à anti-MBG avec des anticorps anti-MBG circulants lames de reins de primates peut également permettre d’aboutir au

2 EMC - Néphrologie
Vascularites à anticorps antimembrane basale glomérulaire  18-037-E-15

A B C
Figure 1. Aspect radiologique et scanographique d’une hémorragie intra-alvéolaire dans le cadre d’une vascularite avec anticorps antimembrane basale
glomérulaire (MBG).
A. Radiographie thoracique de face d’un patient de 62 ans avec une vascularite avec anti-MBG (glomérulonéphrite rapidement progressive et hémorragie
intra-alvéolaire grave caractérisée par un syndrome de détresse respiratoire aiguë nécessitant une oxygénothérapie à haut débit). Opacités alvéolo-interstitielles
bilatérales symétriques sans cardiomégalie (diagnostic différentiel de l’œdème aigu du poumon).
B. Scanner thoracique sans injection d’une patiente de 19 ans avec une vascularite avec anti-MBG caractérisée par une glomérulonéphrite rapidement
progressive et hémorragie intra-alvéolaire peu sévère. Aspect en « verre dépoli » hétérogène dans les deux champs pulmonaires.
C. Scanner thoracique sans injection du patient de la Figure 1A à j15 de la prise en charge montrant un épanchement pleural bilatéral, des lésions réticulaires
séquellaires et la persistance de quelques condensations alvéolaires.

diagnostic. La sensibilité et la spécificité de ces techniques sont d’anticorps antimyéloperoxydase et antiprotéinase 3 chez tous les
supérieures à 95 et 97 %, respectivement [26] . Toutefois, environ malades présentant une vascularite par anti-MBG. Cette associa-
5 % des malades avec une authentique vascularite à anti-MBG tion doit particulièrement être recherchée chez les malades avec
ne présentent pas d’anticorps anti-MBG circulants détectables ; une présentation clinique plus lente.
le diagnostic de certitude repose alors sur la biopsie rénale. Cette
situation peut être secondaire à un défaut de sensibilité de la tech-
nique ou à une vascularite par anti-MBG associée à des anticorps
anti-MBG d’isotypes IgA, IgG2 ou IgG4 , non reconnus par les tests
 Diagnostics différentiels
sanguins usuels [9, 10] .
Des atteintes pulmonaire et rénale concomitantes, en parti-
L’analyse en microscopie optique de la biopsie rénale montre
culier lorsque le diagnostic de glomérulonéphrite rapidement
une glomérulonéphrite nécrosante avec croissants extracapillaires
progressive et/ou d’hémorragie intra-alvéolaire est posé, imposent
comblant la chambre urinaire des glomérules (Fig. 2). Les crois-
d’évoquer et de rechercher une vascularite par anti-MBG mais
sants sont le plus souvent circonférentiels et touchent l’ensemble
doivent également faire éliminer les autres causes de syndrome
des glomérules (lésions d’âge identique). Dans les formes plus
pneumorénal immunologique : vascularite à ANCA, cryoglobuli-
lentes, des croissants fibreux peuvent cohabiter avec des crois-
némie, lupus érythémateux aigu disséminé, purpura rhumatoïde.
sants cellulaires. Des lésions de nécrose tubulaire aiguë sont
Une glomérulonéphrite rapidement progressive peut également
également observées, tout comme des cylindres hématiques intra-
se compliquer d’une rétention hydrosodée à l’origine d’un œdème
tubulaires. L’immunofluorescence affirme le diagnostic et montre
aigu du poumon se présentant par une hémoptysie. Ce diag-
des dépôts linéaires d’IgG polytypiques (absence de monotypie
nostic doit être évoqué en cas d’aggravation de l’hypoxie après
kappa/lambda) le long des MBG (Fig. 2). Rarement, la mem-
quelques jours de traitements (rétention hydrosodée favorisée par
brane basale du tube distal peut également être le siège de dépôts
l’insuffisance rénale aiguë, la cortisone, l’oligurie, les échanges
d’IgG [27] . Les dépôts d’IgG sont habituellement accompagnés de
plasmatiques).
dépôts de la fraction C3 du complément [20] . Une analyse en
Une infection pulmonaire grave peut également se compliquer
immunofluorescence doit donc être systématiquement associée
d’une détresse respiratoire aiguë et d’une insuffisance rénale aiguë
à l’analyse en microscopie optique.
fonctionnelle ou organique (nécrose tubulaire aiguë). L’absence
La réalisation de la biopsie rénale peut être difficile à la phase
de fièvre et d’état de choc tout comme la négativité des exa-
aiguë (anémie profonde, troubles de la coagulation secondaires
mens microbiologiques doivent orienter vers une vascularite par
aux séances quotidiennes d’aphérèse, détresse respiratoire). Elle
anti-MBG. L’évaluation du sédiment urinaire peut être décisive en
ne doit pas retarder la mise en place d’un traitement spécifique,
démontrant le caractère glomérulaire de l’insuffisance rénale.
le pronostic rénal étant corrélé à la rapidité de la mise en route
Dans tous les cas, la biopsie rénale permet d’écarter les diag-
de celui-ci (cf. infra). Chez les malades ayant un anticorps anti-
nostics différentiels et doit donc être proposée en urgence en cas
MBG circulant confirmant le diagnostic, la biopsie rénale peut
d’incertitude diagnostique.
être proposée dans un deuxième temps afin de préciser le pro-
nostic de l’insuffisance rénale, d’évaluer les possibilités de sevrage
de l’épuration extrarénale et de moduler l’intensité du traitement
immunosuppresseur.  Traitements spécifiques
La sensibilité élevée du dosage des anticorps anti-MBG et le
recours à une biopsie rénale permettent d’aboutir à un diagnostic Avant la description de l’efficacité d’un traitement associant
dans plus de 90 % des situations. La réalisation d’une biopsie pul- échanges plasmatiques, cortisone et cyclophosphamide par Lock-
monaire est donc exceptionnellement nécessaire mais elle peut wood et al. en 1975 [28] , la mortalité des patients présentant une
être proposée dans les situations d’hémorragie intra-alvéolaire vascularite par anti-MBG était supérieure à 90 % à un an, en raison
isolée inexpliquée sans anticorps anti-MBG circulants. Celle-ci de la sévérité de l’hémorragie intra-alvéolaire ou de l’insuffisance
montre des images d’hémorragie intra-alvéolaire avec une accu- rénale. Désormais, la survie est supérieure à 85 % à un an [4, 29]
mulation de macrophage dans les alvéoles, parfois accompagnée et la mortalité est principalement secondaire à des complications
d’une alvéolite neutrophilique et de lésions alvéolaires diffuses. infectieuses, en particulier opportunistes. Dans une large étude
Enfin, l’association fréquente d’une vascularite par anti-MBG rétrospective chinoise, l’utilisation concomitante des trois traite-
et d’une vascularite à ANCA, en particulier à anticorps antimyé- ments était associée à une meilleure survie globale et rénale que
loperoxydase (cf. supra) nécessite de tester la présence d’ANCA et l’utilisation de cortisone seule [30] .

EMC - Néphrologie 3
18-037-E-15  Vascularites à anticorps antimembrane basale glomérulaire

A * B

*
C D
Figure 2. Aspect histologique rénal (microscopie optique) d’une vascularite avec anticorps antimembrane basale glomérulaire.
A, B. Coloration au trichrome de Masson. Présence de croissants inflammatoires extracapillaires comblant la chambre urinaire (A, flèche), cylindre hématique
intratubulaire (B, flèche) et nécrose tubulaire aiguë (B, astérisque).
C. Coloration argentique de Jones. Présence de croissants inflammatoires extracapillaires comblant la chambre urinaire (astérisque) avec disparition du floculus
glomérulaire et de la membrane basale glomérulaire.
D. Immunomarquage anti-immunoglobulines G linéaire le long des membranes basales glomérulaires.

Plasmaphérèse rénale sévère). Sa dose est secondairement adaptée à l’évolution


de la fonction rénale et à la tolérance hématologique. Plusieurs
De multiples modalités de plasmaphérèses permettent une éli- raisons ont incité à identifier des alternatives thérapeutiques
mination rapide des anticorps anti-MBG (échanges plasmatiques au cyclophosphamide : le caractère réfractaire de la maladie, la
en centrifugation ou par filtration ; double-filtration en cascade, toxicité hématologique du cyclophosphamide avec le risque de
immunoadsorption). Les plasmaphérèses doivent être débutées en thrombopénie se développant dans un contexte à risque hémorra-
urgence, dès la suspicion diagnostique, et visent une épuration gique, le risque de ménopause précoce chez des patientes jeunes, le
de 1,5 à 1,7 volume plasmatique (ou 60 ml/kg). Si des échanges risque de néoplasie vésicale à distance. L’azathioprine a longtemps
plasmatiques sont réalisés, le soluté de substitution utilisé est été proposé en relais du cyclophosphamide chez les malades pré-
composé d’albumine et de plasma frais congelé. La part relative sentant des anticorps toujours positifs à trois mois. Par analogie
de chaque soluté dépend du risque hémorragique (hémorragie avec le traitement proposé dans les vascularites à ANCA et un
intra-alvéolaire, biopsie rénale, anémie). Les aphérèses sont quo- certain nombre de pathologies auto-immunes dépendantes d’un
tidiennes pendant les 7 à 10 premiers jours puis progressivement anticorps pathogène, le rituximab (anticorps anti-CD20 induisant
espacées. Le nombre total d’aphérèses n’est pas consensuel. Un une déplétion lymphocytaire B) a été proposé comme alternative
minimum de huit séances semble associé à une meilleure survie thérapeutique au cyclophosphamide ou en relais dans les formes
rénale [4] . Si la mesure des anti-MBG peut être obtenue rapidement, réfractaires [31] . Celui-ci semble efficace mais la rareté de la maladie
la fréquence et le nombre des séances d’aphérèses sont parfois n’a pas permis de l’évaluer dans une étude comparative prospec-
modulés en fonction du taux résiduel d’anti-MBG mesuré à j7 et tive.
j14 (attitude non consensuelle).

Durée du traitement
Cortisone
La difficulté de prise en charge des vascularites par anti-MBG
Habituellement, trois bolus quotidiens de méthylpredniso- tient en particulier au risque de complications infectieuses sous
lone (500 à 1000 mg) sont proposés puis une corticothérapie traitement d’une part, et au mauvais pronostic rénal d’autre
intraveineuse ou orale quotidienne (1 mg/kg/j) est débutée [26] . part (cf. infra). La possibilité d’une transplantation rénale dans
L’antibioprophylaxie repose sur l’association triméthoprime- les 9 à 12 mois suivant l’épisode aigu chez les malades survi-
sulfaméthoxazole. vant à la poussée de vascularite par anti-MBG mais requérant
une hémodialyse chronique impose de moduler l’intensité de
l’immunosuppression en fonction de la probabilité d’une réponse
Traitement immunomodulateur rénale et de la qualité de la réponse pulmonaire. La durée consen-
Le traitement de référence est le cyclophosphamide. Il est pro- suelle du traitement est de trois mois pour le cyclophosphamide
posé par voie orale à raison de 2 mg/kg par jour (en ciblant un et de 3 à 6 mois pour la cortisone. Toutefois, le traitement
taux de leucocytes supérieur à 5000/mm3 ) mais de nombreuses peut être raccourci chez les malades avec une atteinte rénale
équipes l’utilisent par voie intraveineuse (0,5–0,6 g/m2 toutes les irréversible (cf. infra, facteurs prédictifs) et avec une atteinte res-
3 à 4 semaines pendant 3 mois en l’absence d’insuffisance rénale piratoire en rémission complète. La persistance des anticorps à
sévère ; 500 mg par injection dose maximale en cas d’insuffisance trois mois doit faire maintenir le traitement immunosuppresseur

4 EMC - Néphrologie
Vascularites à anticorps antimembrane basale glomérulaire  18-037-E-15

pendant 6 à 9 mois ou discuter une alternative thérapeutique. pathogènes) afin de prévenir les lésions rénales secondaires dans
Chez les malades âgés ou porteurs de comorbidités importantes, l’attente de l’efficacité du traitement immunosuppresseur (clini-
une atteinte rénale exclusive, suffisamment sévère pour être caltrials.gov NCT 03157037).
considérée comme irréversible (créatininémie > 600 ␮mol/l ou Outre un éventuel impact thérapeutique et pronostique, ces
glomérulosclérose > 90 %), peut motiver une abstention théra- études devraient permettre de mieux préciser le rôle du complé-
peutique [32] . ment et des anticorps anti-MBG dans la physiopathologie de la
Chez les patients présentant une double positivité des anticorps vascularite à anti-MBG.
anti-MBG et des ANCA, le risque de rechute de la vascularite rénale
est estimé à 50 % [18] . Le délai médian avant la rechute étant de
4,8 ans, la place d’un traitement d’entretien selon les modalités  Conclusion
utilisées chez les patients présentant une vascularite à ANCA est
à préciser. La vascularite par anti-MBG est une maladie auto-immune
rare, ciblant spécifiquement les membranes basales alvéolaires
(hémorragie intra-alvéolaire) et les MBG (glomérulonéphrite rapi-
Transplantation rénale dement progressive). Les pronostics vital et fonctionnel sont
Une transplantation rénale peut être proposée chez les malades sombres sans traitement. Le recours en urgence à une triple thé-
en insuffisance rénale terminale. Un délai de six mois après la rapie immunosuppressive associant plasmaphérèse, cortisone et
négativation des anti-MBG est habituellement recommandé afin cyclophosphamide améliore drastiquement le pronostic global
de s’assurer de la rémission complète de la maladie. La rechute de (survie > 80 % à 5 ans) mais seulement 30 à 60 % des patients
la maladie après transplantation rénale est exceptionnelle. seront indépendants d’une épuration extrarénale chronique à un
an. La place des nouvelles thérapeutiques immunosuppressives
(anticorps anti-CD20) et anticomplémentaires est à préciser.
 Survie et pronostic fonctionnel
La gravité de la vascularite par anti-MBG tient à la sévérité
des atteintes respiratoire et rénale initiales, à l’âge des patients
et au recours à des alternatives thérapeutiques en raison d’une
“ Points essentiels
forme réfractaire de vascularite par anti-MBG [4, 33] . La survie glo-
• Le diagnostic de vascularite par anticorps anti-MBG
bale à un et cinq ans est désormais supérieure à 80 % [4, 23, 33] .
Une part importante de la mortalité est désormais à rattacher aux repose sur l’identification d’anticorps anti-MBG circulants
complications du traitement (infection, néoplasie, dialyse). et/ou de dépôts linéaires d’IgG (plus rarement IgA) poly-
L’atteinte rénale des vascularites par anti-MBG est particulière- typiques le long des MBG (biopsie rénale).
ment sévère mais la survie à un an ne semble pas impactée par • Le traitement doit être débuté en urgence, sans
le recours à une épuration extrarénale [4] . Dans une large cohorte attendre le diagnostic de certitude, en cas d’association
française issue du registre de la Société d’hémaphérèse, 60 % des d’une glomérulonéphrite rapidement progressive et d’une
patients présentaient une créatininémie supérieure à 500 ␮mol/l à hémorragie intra-alvéolaire.
l’admission et 68 % avaient besoin d’épuration extrarénale dans le • Le traitement repose sur l’association d’échanges plas-
premier mois. À un an, la dépendance à l’hémodialyse était prédite
matiques quotidiens (minimum sept en 10 j), d’une
par la sévérité de l’insuffisance rénale au diagnostic (créatininé-
corticothérapie (1 mg/kg/j, précédée de trois bolus quoti-
mie > 500 ␮mol/l), un pourcentage de croissants extracellulaires
supérieur à 75 % sur la biopsie rénale et un âge supérieur à 60 diens) et de cyclophosphamide.
ans [4] . Le pronostic rénal est donc fortement corrélé à la rapidité • La durée du traitement dépend de la réponse immuno-
du diagnostic et la précocité du traitement immunosuppresseur, logique, de la probabilité de récupération rénale et de la
incluant les échanges plasmatiques [33, 34] . sévérité de l’atteinte respiratoire.
Les données concernant les séquelles tardives de l’atteinte • La place du rituximab (anticorps anti-CD20) doit être
respiratoire sont pauvres et ne permettent pas de proposer de précisée.
recommandations formelles de surveillance à long terme. • Une transplantation rénale peut être proposée 9 à 12
Une fois la rémission immunologique de la vascularite par anti- mois après l’épisode aigu chez les patients en insuffisance
MBG obtenue à l’aide du traitement d’induction (anticorps anti-
rénale terminale et en rémission complète immunolo-
MBG circulants négatifs), le risque de rechute de la maladie est
gique.
faible (< 2 %) [1, 34] .

 Perspectives
Déclaration de liens d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts
La vascularite par anti-MBG appartient au groupe des maladies en relation avec cet article.
immunologiques rares et le développement de nouvelles théra-
peutiques ne peut reposer sur les études prospectives comparatives

 Références
conventionnelles. La caractérisation des mécanismes d’initiation
et de progression de la maladie rénale chez l’animal, et la meilleure
caractérisation des données histologiques chez l’homme, ont
[1] Segelmark M, Hellmark T, Wieslander J. The prognostic signifi-
permis d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques. À titre
cance in Goodpasture’s disease of specificity, titre and affinity of
d’exemple, l’activation des voies classiques et alternes du complé-
anti-glomerular-basement-membrane antibodies. Nephron Clin Pract
ment dans le rein des patients avec syndrome de Goodpasture 2003;94:c59–68.
ouvre la voie à un essai testant la place des anticomplémen- [2] Taylor DM, Yehia M, Simpson IJ, Thein H, Chang Y, de Zoysa JR.
taires comme l’éculizumab (anticorps bloquant la fraction C5 du Anti-glomerular basement membrane disease in Auckland. Intern Med
complément) [20] . L’utilisation de peptides inhibant l’interaction J 2012;42:672–6.
entre l’IgG anti-MBG et le récepteur FcRn exprimé dans les glo- [3] Savage CO, Pusey CD, Bowman C, Rees AJ, Lockwood CM. Antiglo-
mérules permet également de bloquer le développement de la merular basement membrane antibody mediated disease in the British
glomérulonéphrite chez l’animal [35] . Enfin, une étude de phase Isles 1980-4. Br Med J 1986;292:301–4.
II teste actuellement la place de l’IdeS, une protéinase strepto- [4] Huart A, Josse A-G, Chauveau D, Korach J-M, Heshmati F, Bauvin
coccique spécifique des IgG, dans les vascularites par anti-MBG. E, et al. Outcomes of patients with Goodpasture syndrome: a nation-
L’objectif de cette approche novatrice est d’éliminer pharmaco- wide cohort-based study from the French Society of Hemapheresis. J
logiquement et transitoirement les IgG du sérum (dont les IgG Autoimmun 2016;73:24–9.

EMC - Néphrologie 5
18-037-E-15  Vascularites à anticorps antimembrane basale glomérulaire

[5] Hellmark T, Segelmark M. Diagnosis and classification of Goodpas- [20] Ma R, Cui Z, Hu S-Y, Jia X-Y, Yang R, Zheng X, et al. The alterna-
ture’s disease (anti-GBM). J Autoimmun 2014;48-49:108–12. tive pathway of complement activation may be involved in the renal
[6] Cui Z, Zhao M-H. Advances in human antiglomerular basement mem- damage of human anti-glomerular basement membrane disease. PLoS
brane disease. Nat Rev Nephrol 2011;7:697–705. One 2014;9:e91250.
[7] Lerner RA, Glassock RJ, Dixon FJ. The role of anti-glomerular [21] Ma R, Cui Z, Liao Y, Zhao M. Complement activation contributes to
basement membrane antibody in the pathogenesis of human glome- the injury and outcome of kidney in human anti-glomerular basement
rulonephritis. J Exp Med 1967;126:989–1004. membrane disease. J Clin Immunol 2013;33:172–8.
[8] Zhao J, Cui Z, Yang R, Jia X, Zhang Y, Zhao M. Anti-glomerular [22] Gillion V, Dahan K, Cosyns J-P, Hilbert P, Jadoul M, Goffin E, et al.
basement membrane autoantibodies against different target anti- Genotype and outcome after kidney transplantation in Alport syn-
gens are associated with disease severity. Kidney Int 2009;76: drome. Kidney Int Rep 2018;3:652–60.
1108–15. [23] Srivastava A, Rao GK, Segal PE, Shah M, Geetha D. Characteris-
[9] Ossman R, Buob D, Hellmark T, Brocheriou I, Peltier J, Tamouza R, tics and outcome of crescentic glomerulonephritis in patients with
et al. Factors associated with pathogenicity of anti-glomerular basal both antineutrophil cytoplasmic antibody and anti-glomerular base-
membrane antibodies. Medicine 2016;95:e3654. ment membrane antibody. Clin Rheumatol 2013;32:1317–22.
[10] Moulis G, Huart A, Guitard J, Fortenfant F, Chauveau D. IgA- [24] Bovo R, Ciorba A, Martini A. Vertigo and autoimmunity. Eur Arch
mediated anti-glomerular basement membrane disease: an uncommon Otorhinolaryngol 2010;267:13–9.
mechanism of Goodpasture’s syndrome. Clin Kidney J 2012;5: [25] Greco A, Fusconi M, Gallo A, Marinelli C, Macri GF, De Vincen-
545–8. tiis M. Sudden sensorineural hearing loss: an autoimmune disease?
[11] Nasr SH, Collins AB, Alexander MP, Schraith DF, Herrera Hernandez Autoimmun Rev 2011;10:756–61.
L, Fidler ME, et al. The clinicopathologic characteristics and outcome [26] Greco A, Rizzo MI, De Virgilio A, Gallo A, Fusconi M, Pagliuca
of atypical anti-glomerular basement membrane nephritis. Kidney Int G, et al. Goodpasture’s syndrome: a clinical update. Autoimmun Rev
2016;89:897–908. 2015;14:246–53.
[12] Yang R, Cui Z, Zhao J, Zhao M-H. The role of HLA-DRB1 alleles [27] Alenzi FQ, Salem ML, Alenazi FA, Wyse RK. Cellular and molecular
on susceptibility of Chinese patients with anti-GBM disease. Clin aspects of Goodpasture syndrome. Iran J Kidney Dis 2012;6:1–8.
Immunol 2009;133:245–50. [28] Lockwood CM, Boulton-Jones JM, Lowenthal RM, Simpson IJ, Peters
[13] Zhou X-J, Lv J-C, Zhao M-H, Zhang H. Advances in the gene- DK. Recovery from Goodpasture’s syndrome after immunosuppres-
tics of anti-glomerular basement membrane disease. Am J Nephrol sive treatment and plasmapheresis. Br Med J 1975;2:252–4.
2010;32:482–90. [29] Alchi B, Griffiths M, Sivalingam M, Jayne D, Farrington K. Predictors
[14] Hopfer H, Hünemörder S, Treder J, Turner J-E, Paust H-J, Meyer- of renal and patient outcomes in anti-GBM disease: clinicopatho-
Schwesinger C, et al. Glomerulopathy induced by immunization with logic analysis of a two-centre cohort. Nephrol Dial Transplant
a peptide derived from the Goodpasture antigen ␣3IV-NC1. J Immunol 2015;30:814–21.
2015;194:3646–55. [30] Cui Z, Zhao J, Jia X, Zhu S, Jin Q, Cheng X, et al. Anti-glomerular base-
[15] Kobayashi S, Inokuma S. Intrapulmonary hemorrhage in collagen- ment membrane disease: outcomes of different therapeutic regimens in
vascular diseases includes a spectrum of underlying conditions. Intern a large single-center Chinese cohort study. Medicine 2011;90:303–11.
Med 2009;48:891–7. [31] Touzot M, Poisson J, Faguer S, Ribes D, Cohen P, Geffray L, et al.
[16] Williamson SR, Phillips CL, Andreoli SP, Nailescu C. A 25-year expe- Rituximab in anti-GBM disease: a retrospective study of 8 patients. J
rience with pediatric anti-glomerular basement membrane disease. Autoimmun 2015;60:74–9.
Pediatr Nephrol 2011;26:85–91. [32] Radhakrishnan J, Cattran DC. The KDIGO practice guideline on glo-
[17] Weber MF, Andrassy K, Pullig O, Koderisch J, Netzer K. merulonephritis: reading between the (guide)lines–application to the
Antineutrophil-cytoplasmic antibodies and antiglomerular basement individual patient. Kidney Int 2012;82:840–56.
membrane antibodies in Goodpasture’s syndrome and in Wegener’s [33] Tang W, McDonald SP, Hawley CM, Badve SV, Boudville NC,
granulomatosis. J Am Soc Nephrol 1992;2:1227–34. Brown FG, et al. Anti-glomerular basement membrane antibody
[18] McAdoo SP, Tanna A, Hrušková Z, Holm L, Weiner M, Arulkuma- disease is an uncommon cause of end-stage renal disease. Kidney Int
ran N, et al. Patients double-seropositive for ANCA and anti-GBM 2013;83:503–10.
antibodies have varied renal survival, frequency of relapse, and out- [34] Levy JB, Turner AN, Rees AJ, Pusey CD. Long-term outcome
comes compared to single-seropositive patients. Kidney Int 2017;92: of anti-glomerular basement membrane antibody disease treated
693–702. with plasma exchange and immunosuppression. Ann Intern Med
[19] Olson SW, Arbogast CB, Baker TP, Owshalimpur D, Oliver DK, 2001;134:1033–42.
Abbott KC, et al. Asymptomatic autoantibodies associate with future [35] Olaru F, Luo W, Suleiman H, St John PL, Ge L, Mezo AR, et al.
anti-glomerular basement membrane disease. J Am Soc Nephrol Neonatal Fc receptor promotes immune complex-mediated glomerular
2011;22:1946–52. disease. J Am Soc Nephrol 2014;25:918–25.

S. Faguer, Professeur, MD, PhD (stanislas.faguer@inserm.fr).


Département de néphrologie et transplantation d’organes, Centre de référence des maladies rénales rares – SORARE, Institut national de la santé et de
la recherche médicale (Inserm), Unité 1048 – Institut des maladies métaboliques et cardiovasculaires (équipe 12 : fibrose rénale : détection précoce et
mécanismes de la progression), Hôpital Rangueil, CHU de Toulouse, 1, avenue Jean-Poulhès, 31059 Toulouse cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Faguer S. Vascularites à anticorps antimembrane basale glomérulaire. EMC - Néphrologie 2020;32(1):1-6
[Article 18-037-E-15].

Disponibles sur www.em-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos/ Documents Information Informations Auto- Cas
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations clinique

6 EMC - Néphrologie
 18-061-C-10

Rein et infection chronique par le virus


de l’hépatite C
S. Pol, L. Parlati

Résumé : L’infection par le virus de l’hépatite C (VHC) est au moins quatre fois plus fréquente chez les
patients insuffisants rénaux, notamment chez les dialysés ou les greffés rénaux, que dans la population
générale et est associée à une mortalité plus élevée. Les insuffisances rénale et hépatique et leur morbi-
mortalité conséquente sont aussi plus fréquentes chez les greffés rénaux infectés par le VHC que chez les
non-infectés. Le VHC est associé à une plus grande incidence et à une progression plus rapide du dia-
bète, de complications systémiques dont des manifestations cardiovasculaires et une insuffisance rénale
chronique (IRC) qui sont diminuées par la réponse virologique soutenue (RVS) (ou guérison virologique)
associée au traitement antiviral. Cela justifie les recommandations récentes de dépistage de l’infection
active par le VHC des patients insuffisants rénaux et d’accès aux thérapies antivirales orales. Les traite-
ments par les antiviraux directs (AVD) oraux du VHC, étendus aux IRC terminales et aux greffés rénaux,
ont montré un taux de guérison du VHC supérieur à 95 % : tous les patients infectés par le VHC doivent
être traités et guéris par un traitement combinant les AVD, en priorisant ceux qui en ont le plus besoin
(vascularite cryoglobulinémique symptomatique, fibrose hépatique étendue ou IRC de grade 4-5 selon
la classification Kidney Disease: Improving Global Outcomes [KDIGO]). Le traitement par AVD peut être
retardé après la transplantation rénale chez ceux dont le temps d’attente serait significativement réduit
par un greffon dérogatoire infecté par le VHC. Une question en suspens est celle de l’impact rénal à long
terme des AVD, qui exige une réévaluation. L’élimination du VHC du champ néphrologique semble ainsi
possible, à condition que le traitement par AVD soit couplé à des précautions d’hygiène universelle pour
prévenir infections et réinfections dans les unités d’hémodialyse.
© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Insuffisance rénale chronique ; Transplantation rénale ; Hémodialyse ; Virus de l’hépatite C (VHC) ;
Antiviraux directs du VHC (AVD)

Plan ■ Questions en discussion 8


Quand traiter les dialysés infectés par le virus de l’hépatite
■ Introduction 1 C candidats à la greffe rénale ? 8
Traitement antivirus de l’hépatite C et utilisation des greffons
■ Épidémiologie du virus de l’hépatite C chez les patients infectés par le virus de l’hépatite C 9
avec insuffisance rénale chronique 3
■ Conclusion 9
■ Virus de l’hépatite C, cause d’insuffisance rénale 3
Causes de dysfonctionnement rénal chez les sujets infectés
par le virus de l’hépatite C 3
Épidémiologie de l’insuffisance rénale chronique chez les patients
infectés par le virus de l’hépatite C 4  Introduction
Impact négatif du virus de l’hépatite C sur l’histoire naturelle
de l’insuffisance rénale chronique 4 Les hépatites virales tuent 1 450 000 personnes dans le
Bénéfices associés à la réponse virologique soutenue 4 monde chaque année, autant que le virus de l’immunodéficience
humaine (VIH) et plus que la tuberculose ou le paludisme [1] .
■ Traitement de l’infection virale C 5
Alors que les décès dus au VIH/syndrome de l’immunodéficience
Options de traitement dans l’infection virale C 5
acquise (sida) ont diminué depuis 2010, les décès dus aux hépa-
Options thérapeutiques chez les insuffisants rénaux 5
tites virales ont augmenté de 22 % depuis l’an 2000. Les virus de
Sofosbuvir et insuffisance rénale 6
l’hépatite B (VHB) et de l’hépatite C (VHC) causent la majorité
Mécanismes de la néphrotoxicité potentielle du sofosbuvir 7
des décès, principalement du fait de la cirrhose et du cancer du
Réactivation virale B pendant le traitement par antiviraux oraux
foie (carcinome hépatocellulaire [CHC] principalement). Depuis
directs 7
1990, les décès dus au VHB ont stagné, tandis que ceux dus au
■ Défis de demain 7 VHC augmentent et devraient continuer dans ce sens au moins
Améliorer dépistage et prévention chez les insuffisants rénaux 7 pour la prochaine décennie.
Micro-élimination du virus de l’hépatite C chez les insuffisants L’hépatite C chronique est une maladie fréquente, affec-
rénaux : l’initiative European Association for the Study of the Liver/ tant environ 71 millions de personnes dans le monde [2, 3] . La
European Renal Association–European Dialysis and Transplant réplication du VHC touche principalement les hépatocytes, ce
Association 7 qui explique que la maladie est principalement une maladie
Améliorer le suivi des patients avec réponse virologique soutenue 8 hépatique virale liée à des mécanismes principalement immuno-
Réduction du taux de réinfection en néphrologie 8 médiés : la reconnaissance des hépatocytes infectés exprimant

EMC - Néphrologie 1
Volume 32 > n◦ 1 > janvier 2020
http://dx.doi.org/10.1016/S1762-0945(19)86755-4
18-061-C-10  Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C

Hépatite chronique
Cirrhose Troubles
Hépatotropisme VHC
Carcinome neurocognitifs
hépatocellulaire

• Insulino-
Inflammation
Lymphotropisme résistance
chronique
• Diabète

Cryoglobulinémie IRC Infarctus

AVC
Glomérulonéphrite
Lymphome B Vascularite
Membrano-proliférative
Cancers
extrahépatiques

Figure 1. L’infection chronique par le virus de l’hépatite C (VHC) est une maladie systémique du fait de l’hépatotropisme et du lymphotropisme du VHC,
et du fait de l’inflammation chronique associée à l’infection chronique. IRC : insuffisance rénale chronique ; AVC : accident vasculaire cérébral.

à leur surface les protéines virales par les cellules immunitaires que dans la population générale [21–23] , du fait du risque persis-
spécifiques entraîne une nécro-inflammation et la fibrose avec tant d’infection, en particulier dans les unités d’hémodialyse et du
un risque de cirrhose lorsque l’inflammation persiste ou qu’il dépistage sous-optimal des donneurs de sang dans de nombreux
existe des comorbidités hépatiques (consommation excessive pays à faibles revenus.
d’alcool, diabète, surpoids et syndrome métabolique). La cirrhose L’infection chronique par le VHC peut être directement respon-
est associée à un risque de 3 à 5 % d’apparition d’un CHC et sable de l’apparition d’une maladie rénale [23] , principalement une
à un taux similaire de complications non carcinomateuses de glomérulonéphrite, avec ou sans cryoglobulinémie [24] , et accé-
la cirrhose, incluant hémorragies variqueuses, ascite et infection lère la progression de l’IRC vers l’insuffisance rénale terminale
spontanée du liquide d’ascite par translocation bactérienne [4] (IRT) [25] , encore augmentée par des comorbidités préexistantes
(Fig. 1). Le VHC peut également se répliquer dans les lymphocytes comme le diabète ou l’hypertension [10] .
B : son infection ou sa stimulation chronique peuvent générer L’infection par le VHC accroît également la morbidité et la mor-
une cryoglobulinémie, voire une sélection clonale de lympho- talité des patients dialysés, principalement par des manifestations
cytes B à l’origine d’un lymphome non hodgkinien (LNH) [5] . extrahépatiques (MEH), en particulier cardiovasculaires et diabé-
Enfin, l’infection chronique par le VHC est associée à une tiques, encore accrues par le VHC [26] . La transplantation rénale
inflammation chronique avec surexpression de cytokines pro- reste le meilleur traitement de l’IRC, mais l’infection par le VHC
inflammatoires (interleukine [IL]-1, tumor necrosis factor α [TNF-␣] a un impact négatif sur la survie des patients et des greffons [27–29]
et IL-6) [6] , production d’espèces réactives de l’oxygène [7] , d’oxyde et cet impact négatif n’a pas diminué au cours des deux dernières
nitrique [8] et une dérégulation de l’autophagie [9] . En plus de décennies [30] .
l’inflammation hépatique impliquée dans la progression de la Après l’ère de l’interféron débutée en 1988, les premiers anti-
fibrose et la survenue du CHC, l’inflammation extrahépatique viraux directs (AVD) oraux ciblant les protéines du VHC ont été
est associée à un risque accru de diabète [10] , de maladies vascu- approuvés en 2011 : inhibiteurs de protéase NS3/4A, inhibiteurs
laires [11–13] , de troubles neurocognitifs et de cancers extrahépati- du complexe de réplication NS5A ou inhibiteurs de polymérase
ques [14–17] . (ou NS5B) nucléos(t)idiques et non nucléos(t)idiques. Au début,
L’insuffisance rénale chronique (IRC) est définie par un les AVD étaient combinés à l’interféron pégylé et la ribavirine.
débit de filtration glomérulaire (DFG) estimé inférieur à Depuis 2015, on combine deux ou trois AVD de seconde généra-
60 ml/min/1,73 m2 , ou par d’autres signes de lésions rénales tion sans interféron ni ribavirine pour 8 à 16 semaines selon les
cliniquement pertinents par analyse d’urine, imagerie ou his- profils de patients et de virus incluant le stade de fibrose hépa-
topathologie rénales. L’IRC a une prévalence globale d’environ tique évalué par des tests non invasifs (Fibroscan® , Fibrotest® ou
10 % et un impact délétère croissant dans le monde [18] . Les Fibromètre® ), génotype et sous-type, charge virale, histoire théra-
principaux facteurs de risque de l’IRC sont, en plus de l’âge, le peutique antérieure du patient (naïf de traitement ou prétraité) et
diabète, l’hypertension, l’ethnie (avec une plus grande prévalence variantes de résistance préexistantes. La plupart de ces combinai-
chez les Afro-Américains) et les antécédents familiaux de maladie sons ont une puissance antivirale élevée définie par une réponse
rénale [18] . virologique soutenue (RVS) élevée (définie par un acide ribonu-
Le VHC et l’IRC sont étroitement liés épidémiologiquement cléique [ARN] viral C indétectable dans le sérum 12 semaines après
pour deux raisons principales : d’abord parce que les patients la fin du traitement) supérieure à 95 %, une tolérance satisfaisante
atteints d’IRC sont surexposés au virus [19] et deuxièmement parce et un nombre réduit de comprimés (1 à 3). Au-delà des limitations
que le VHC augmente le risque et le taux de progression de liées au dépistage de l’infection virale C et de l’accès aux soins, les
l’IRC [20] . recommandations internationales sont de traiter tous les patients
Avant le dépistage des anticorps anti-VHC dans les années 1990, infectés par le VHC, y compris ceux atteints d’IRC, chez qui des
l’exposition au VHC était très fréquente et principalement liée résultats très prometteurs ont été rapportés [31–33] , pour réduire le
à la transmission nosocomiale dans les unités de dialyse ou risque de MEH, y compris l’aggravation de l’IRC [26] . Il est main-
aux transfusions sanguines contaminées ou aux greffons [19] . tenant bien établi que les RVS, correspondant à une guérison
L’amélioration progressive des précautions d’hygiène universelle, virologique, réduit le risque de progression de la maladie hépa-
l’amélioration spectaculaire de l’hémovigilance et l’utilisation tique, mais aussi le risque de MEH [34] , y compris le diabète [10] ,
de l’érythropoïétine ont réduit de façon significative le risque la maladie cardio- ou cérébrovasculaire [10–13] , les cancers extra-
d’infection [19] . Malgré cette réduction de la prévalence et de hépatiques [14–17] et la morbidité et la mortalité rénale [20, 26] . Le
l’incidence de l’infection par le VHC chez les patients dialysés, la traitement des patients dans les unités de dialyse réduit le risque
prévalence de l’infection virale C demeure beaucoup plus élevée de contamination : la RVS permet ainsi des bénéfices individuels

2 EMC - Néphrologie
Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C  18-061-C-10

Tableau 1. centres de dialyse, mais la preuve que sans traitement antiviral


Prévalence de l’infection virale C chez les patients dialysés selon le pays et une diminution de la prévalence, voire une élimination du VHC,
l’année de publication. n’est pas envisageable.
Pays Année Prévalence (%) En résumé, quelle que soit la zone géographique, la prévalence
du VHC demeure trois à cinq fois plus élevée chez les patients dia-
États-Unis 1997 22,8 lysés et chez les greffés rénaux que dans la population générale,
France 1998 22,4 du fait de l’histoire ancienne des patients mais aussi du risque
2004 16,4 d’infection virale C persistant, en particulier dans les centres
d’hémodialyse et dans les pays à faibles revenus ayant un niveau
2017 1,4
médiocre d’hémovigilance [36, 40] .
Suède 2004 8,9
Espagne 2009 6,7
2010 13,6  Virus de l’hépatite C, cause
d’insuffisance rénale
et communautaires montrés dans d’autres situations épidémiolo- Causes de dysfonctionnement rénal
giques que l’IRC.
Enfin, Kidney Disease: Improving Global Outcomes (KDIGO) chez les sujets infectés par le virus
recommande d’évaluer la fonction rénale de tout patient infecté de l’hépatite C
par le VHC.
La diminution de la prévalence et de l’incidence du VHC chez Le lymphotropisme du VHC représente un des mécanismes
les patients atteints d’IRC [21, 22] et les traitements par AVD ont principaux des MEH liées au VHC dont l’atteinte rénale. Deux
ainsi le potentiel de changer radicalement l’épidémiologie et le mécanismes principaux participent à l’IRC, des lésions tissulaires
parcours de soins des patients infectés par le VHC atteints d’IRC à médiation immunitaire et des effets directs du VHC.
qui ont aujourd’hui tous la possibilité de guérir. Ce chapitre Les antigènes du VHC provoquent à la fois l’activation des
détaille l’épidémiologie réciproque du VHC et de l’IRC, la façon lymphocytes T et des lymphocytes B avec la production de
dont les patients infectés par le VHC devraient être traités et dis- divers autoanticorps et de complexes immuns cryoprécipitants
cute des problèmes restants dans le domaine, à savoir la sécurité ou non [5, 41, 42] .
rénale des AVD, l’optimisation du temps du traitement chez les Le dépôt rénal de complexes immuns contenant des
candidats à la transplantation rénale (avant ou après ?), les options antigènes du VHC est le principal mécanisme pathogé-
thérapeutiques disponibles, la prévention de la réinfection par le nétique de l’inflammation glomérulaire par la production
VHC dans le cadre de la dialyse et l’utilisation de greffons infectés d’immunoglobulines G (IgG) anti-VHC, d’anticorps anti-
par le VHC, sur la base de l’actualisation des recommandations du endothéliaux par l’activation du complément. L’inflammation, y
groupe KDIGO et des sociétés savantes internationales [31–33] . compris l’activation du complément, est responsable de la nécrose
fibrinoïde des vaisseaux glomérulaires, de la surexpression des
molécules d’adhérence qui recrutent des cellules inflammatoires,
et favorisent l’activation et l’agrégation plaquettaire. Enfin, les
 Épidémiologie du virus lésions capillaires permettent un passage de cryoglobuline dans
de l’hépatite C chez les patients la lumière urinaire, contribuant au développement de croissants
et de moulages tubulaires [41, 42] .
avec insuffisance rénale chronique Le VHC peut contribuer directement aux lésions tissulaires en
infectant l’endothélium, les cellules épithéliales tubulaires et les
Malgré une diminution marquée depuis l’introduction des leucocytes infiltrants [43] . Il a été montré que le VHC pouvait
agents stimulant l’érythropoïèse, le dépistage du sang et des dons directement induire l’apoptose des cellules endothéliales. Les cel-
d’organes et l’amélioration des précautions d’hygiène univer- lules épithéliales de la capsule de Bowman peuvent être infectées
selle [21, 22, 35] , la prévalence du VHC demeure environ quatre fois par le VHC, causant une atteinte directe des podocytes des cel-
plus élevée chez les IRC que dans la population générale des pays lules épithéliales [43] . Enfin, un effet direct du virus sur les cellules
analysées (Tableau 1) [21, 22, 36] . Les données des études Dialysis mésangiales ne peut être exclu [44] . D’autres facteurs, génétiques,
Outcomes and Practice Patterns Study (DOPPS) chez les patients les comorbidités (hypertension artérielle et diabète), la vascularite
dialysés montrent une diminution de la prévalence de 14,7 % en cryoglobulinémique et les traitements néphrotoxiques peuvent
2004 à 8,7 % en 2012 à 2015 [37] par rapport à environ 0,4 à 2,0 % contribuer à l’atteinte rénale. Les médicaments sont responsables
dans les populations générales correspondantes. d’environ 20 % des IR aiguës et, chez les sujets âgés, l’incidence
La prévalence du VHC chez les candidats à la greffe et les greffés d’une néphrotoxicité peut atteindre 66 % [45] . Leur impact rénal
rénaux a ainsi diminué : elle est d’environ 5 % dans les pays occi- est variable (néphrite interstitielle aiguë ou chronique, gloméru-
dentaux [33, 36–38] . Les chiffres restent débattus : une récente étude lonéphrite, rhabdomyolyse, etc.) et ce sont principalement les
du Registre français des patients dialysés et des candidats à la greffe analgésiques (anti-inflammatoires non stéroïdiens, aspirine, acé-
rénale entre 2005 et 2013 rapporte une prévalence de 1,4 % [21] . taminophène), l’amytryptiline ou le lithium, les antimicrobiens
Au cours d’une période similaire (janvier 1993 à décembre 2010), (antibiotiques, antiviraux ou amphotéricine B), les drogues car-
parmi les 31 433 adultes greffés rénaux chez lesquels des sérolo- diotropes, des herbes ou de l’allopurinol, etc. [45] .
gies étaient disponibles pour le VHB et le VHC (19 580 hommes L’infection virale C est associée à trois lésions rénales
et 11 853 femmes) dans la base de données Cristal du Registre principales : la cryoglobulinémie mixte (néphropathie cryoglo-
français de l’Agence de biomédecine, 1060 étaient anti-VHC posi- bulinémique), la glomérulonéphrite membrano-proliférative et la
tifs (3,37 %), tandis que 29 798 n’avaient pas d’infection par le néphropathie glomérulaire [41] .
VHC et le VHB (94,8 %) [39] . La prévalence du VHB a diminué après L’atteinte rénale la plus fréquente au cours de l’infection par le
2003 (de 2,26 à 1,4 %) (p < 0,0001), alors que la prévalence du VHC VHC est la glomérulonéphrite membrano-proliférative [46] , asso-
est demeurée stable (3,38 versus 3,36 %) [39] . La diminution de la ciée à une vascularite cryoglobulinémique (principalement de
prévalence du VHB est liée à l’amélioration de l’hémovigilance, la type II associant une Ig polyclonale [IgG] à une Ig monoclonale,
vaccination massive contre le VHB chez les patients atteints d’IRC habituellement du type IgM kappa) [43, 47] mais sa prévalence réelle
(les dialysés et les infirmières de dialyse ont été les premiers à être demeure incertaine dans l’ensemble de la population infectée par
vaccinés dans les années 1980), l’utilisation de l’érythropoïétine le VHC.
à la place des transfusions sanguines mais aussi la mortalité hépa- La physiopathologie de la cryoglobulinémie mixte est fondée
tique des nombreux greffés historiquement infectés par le VHB. La sur la précipitation intraluminale de cryoglobulines, les dépôts
stabilité de la prévalence du VHC dans le temps indique l’efficacité d’IgM dans les boucles capillaires et les dépôts sous-endothéliaux
de l’hémovigilance et des règles d’hygiène universelle dans les qui apparaissent, en microscopie électronique, comme des

EMC - Néphrologie 3
18-061-C-10  Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C

structures complexes ressemblant à des empreintes digitales [43, 47] . sans VHC [27, 28, 29, 30] . Cela a été récemment confirmé dans une
Pour les deux autres lésions rénales, certains patients atteints du étude française : le VHC était encore associé à une plus faible sur-
VHC ont une maladie rénale qui est classée, à l’examen histo- vie des patients et des greffons [39] par contraste avec l’infection
logique, comme glomérulonéphrite membrano-proliférative sans chronique par le VHB qui a eu longtemps un impact négatif sur
la présence simultanée de cryoglobuline, tandis que la néphro- la survie des patients et des greffons avant l’utilisation des trai-
pathie glomérulaire est caractérisée par un épaississement des tements oraux anti-VHB, à savoir les analogues nucléos(t)idiques
membranes basales glomérulaires, qui contiennent des dépôts (Nucs), lamivudine, entécavir ou ténofovir. La plupart des greffés
immuns, mais les aspects de prolifération sont absents [43] . rénaux infectés par le VHB sont actuellement traités par Nucs qui
ont permis la « normalisation » de l’espérance de survie de ceux
infectés par le VHB [55] . La survie à dix ans reste plus faible chez les
Épidémiologie de l’insuffisance rénale greffés atteints d’hépatite C (71,3 %) que chez ceux infectés par le
chronique chez les patients infectés VHB (81,2 % ; p = 0,0004) ou non infectés (82,7 % ; p < 0,0001). La
survie à dix ans des greffés rénaux avec ARN VHC détectable est
par le virus de l’hépatite C significativement plus faible (66,1 % ; IC 95 % : 61,1–77,1 %) que
celle des témoins avec ARN VHC indétectable (81,5 % ; IC95 % :
L’infection par le VHC augmente le risque d’IRC [20, 48, 49] qui est
78,1–84,9 % ; p = 0,003) avec un HR de 1,61 (IC 95 % : 1,18–2,21) ;
rapporté chez 9,1 % des patients infectés par le VHC, comparati-
les survies à dix ans correspondantes des greffons sont de 45,7 %
vement à 5,1 % (p = 0,04) chez les témoins négatifs appariés sur
(IC 95 % : 38,2–53,2 %) versus 59,2 % (IC 95 % : 55,3–63,1 % ;
l’âge, la race et le sexe [50] . Les patients infectés par le VHC ont un
p = 0,01) avec un HR de 1,31 (IC95 % : 1,06–1,61) [39] .
risque de 27 % plus élevé de problèmes rénaux que les contrôles
non infectés (hazard ratio [HR] : 1,27, intervalle de confiance [IC]
95 % : 1,18 à 1,37) [50] . Le risque augmente de 8,5 % chez les Bénéfices associés à la réponse virologique
patients infectés par le VHC âgés de 20 à 64 ans à 26,5 % chez
ceux âgés de plus de 65 ans [51] . Dans la cohorte française Hepather soutenue
C022 de l’Association française pour l’étude du foie/Agence natio-
La RVS est définie par ARN du VHC indétectable dans le sérum
nale de recherche sur le sida et les hépatites virales (AFEF/ANRS)
12 semaines après la fin de tout traitement antiviral [31, 32] . La
(8571 évaluables parmi les 12 456 inclus infectés par le VHC),
biologie du VHC est facile (réplication de l’ARN VHC dépen-
la prévalence d’une IRC chronic kidney disease (CKD) stade supé-
dante d’une ARN polymérase intracytoplasmique, traduction en
rieur à 3, définie par un DFG (CKD-epidemiology collaboration [EPI])
une polyprotéine qui est clivée par une protéase en protéines
inférieur à 60 ml/min à l’inclusion, était de 7,3 % et était associée
structurales et non structurales qui participent à l’organisation
en analyse multivariée à l’âge, l’hypertension artérielle, le diabète,
des virions, à leur réplication et à leur exportation) et il n’y
l’hypercholestérolémie et un antécédent de cardiopathie mais pas
a pas d’intégration du génome viral dans le génome de l’hôte
à la sévérité de l’hépatopathie [52] .
(contrairement au VHB et autres rétrovirus) et aucun réservoir
Les patients infectés par le VHC présentent également un risque
(contrairement aux rétrovirus comme le VIH). Ainsi, la RVS cor-
plus élevé de manifestations extrahépatiques, avec un risque accru
respond à une guérison virologique complète définie par un
de 2 à 2,5 [53] de développer des événements cardiovasculaires,
ARN du VHC indétectable dans le sérum 12 semaines après
cérébro- ou rénovasculaires et un risque accru de développement
la fin du traitement antiviral (critère de jugement habituel).
d’une insulino-résistance et un diabète de type 2 [54] (Fig. 1). En
Il est alors aussi indétectable dans le foie ou dans les cellules
plus de la maladie rénale associée au VHC (par cryoglobuliné-
mononucléées du sang périphérique (PBMC) [56] . Cette guérison
mie ou inflammation chronique entraînant une augmentation
virologique est habituellement associée au pire à une stabilisa-
de l’insulino-résistance, la libération de médiateurs solubles avec
tion, au mieux à une réversibilité des manifestations liées au VHC.
leur effet direct sur l’athérosclérose) [13] , le risque d’IRC est éga-
L’arrêt de l’activité nécrotico-inflammatoire permet un remode-
lement augmenté par les comorbidités (vieillissement, diabète,
lage de la fibrose, même chez les patients cirrhotiques chez qui
hypertension, infection par le VIH, etc.) [25] et les co-médications
une réversibilité de la cirrhose a été prouvée chez 10 à 25 % des
néphrotoxiques (anti-inflammatoires non stéroïdiens, antirétro-
patients atteints de RVS [57] . Une réversibilité des manifestations
viraux ou analogues de nucléotides, médicaments antidiabétiques
extrahépatiques est également observée, rapidement pour les
et antihypertenseurs) [45] . En résumé, l’infection chronique par le
lésions cutanées (purpura, acrodermatite nécrosante) ou rénales
VHC est associée à un risque plus élevé d’IRC par rapport à la
(syndrome néphrotique), moins rapidement pour les troubles
population non infectée. Dans la cohorte taïwanaise longitudi-
neurocognitifs, vasculaires ou les dysglycorégulations, plus lente-
nale (REVEAL-HCV) de 23 785 sujets, le risque d’IRC augmentait
ment pour les manifestations de neuropathie périphérique, toutes
avec la charge virale chez les patients ayant une virémie C détec-
majoritairement liée à la cryoglobulinémie qui devient indétec-
table et par comparaison à ceux ayant des anticorps anti-VHC mais
table chez 50 % des patients guéris à un an par les AVD [53, 58, 59] .
une virémie C indétectable ou l’absence d’anticorps [26] . La morta-
La RVS n’exclut pas le risque de réinfection. Ainsi, le dépistage
lité liée à une IRT était plus élevée chez les sujets virémiques (4,3 %
devrait être maintenu dans les populations à haut risque, incluant
des 124 patients à charge virale élevée et 2,6 % des 371 patients à
les usagers de drogues intraveineuses, les hommes qui ont des
charge virale basse) que chez les non-virémiques (0,3 % des 330)
relations sexuelles avec des hommes [60] , mais aussi les dialysés [61] .
ou les patients non infectés par le VHC (0,5 % des 16 629 sujets)
Les avantages de la RVS ont été établis dans la population
(p < 0,001). Le risque était inférieur chez ceux ayant reçu un trai-
générale, tant pour la réduction de la progression hépatique vers
tement par interféron que chez les patients non traités (HR : 0,15 ;
la cirrhose et le carcinome hépatocellulaire [61–64] que pour les
IC 95 % : 0,07–0,31 ; p < 0,001) [26] .
manifestations extrahépatiques [59, 65] . Dans la cohorte prospective
française Hepather, il est montré non seulement une réduction
du risque de la survenue du CHC mais aussi une diminution de la
Impact négatif du virus de l’hépatite C mortalité globale chez les patients traités par AVD par comparai-
sur l’histoire naturelle de l’insuffisance rénale son avec ceux qui n’ont pas été traités [66] .
chronique L’amélioration de la fonction hépatique n’est pas non plus le
seul avantage du traitement antiviral C des patients avec IRC.
La mortalité est plus élevée chez les patients dialysés infectés En effet, la RVS réduit les risques de diabète, de complications
par le VHC que chez les patients non infectés, en particulier en cardiaques et d’accident vasculaire cérébral chez les patients diabé-
raison de l’augmentation du fardeau cardiovasculaire et du dia- tiques, les manifestations de vascularite cryoglobulinémique et est
bète [10] , en plus du risque beaucoup plus élevé de complications associée à une meilleure qualité de vie des patients ayant une IRC
hépatiques [3, 4] . Chez les greffés rénaux, l’infection chronique par avec une CKD stade 4-5 dans l’étude C-surfer [67] . Enfin, les risques
le VHC réduit la survie des patients et des greffons, en raison de de détérioration rénale et de mortalité liée à l’IRT sont inférieurs
la maladie hépatique ou de complications septiques liées à la cir- chez les patients traités comparativement à ceux non traités [65] .
rhose et au traitement immunosuppresseur par rapport aux greffés Une étude suédoise récente de registre montre un bénéfice du

4 EMC - Néphrologie
Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C  18-061-C-10

traitement des dialysés avant la transplantation rénale : 17 % Study of Liver Diseases (AASLD) [31] , et « tous les patients atteints
des patients dialysés infectés seulement ont été traités pour leur d’IRC et les greffés rénaux infectés par le VHC devront être évalués
hépatite C chronique ; 24 % des traités sont décédés contre 56 % pour un traitement antiviral » selon KDIGO [33] .
des non-traités (p < 0,0001) ; l’amélioration de la survie par le Les recommandations internationales de choix thérapeu-
traitement antiviral avait un odds ratio de 3,901 (p = 0,001) [65] . tique pour les patients atteints d’IRC avec DFG supérieur à
Contrairement à celle des greffés rénaux infectés par le VHB (car 30 ml/min/1,73 m2 sont les mêmes que celles pour la popu-
traités par Nucs) [55] , la survie des greffés rénaux infectés par le VHC lation générale infectée par le VHC [31, 32] . En 2019, le choix
ne s’est pas améliorée en 20 ans [27–30, 39] . Dans l’étude récente des doit être fait entre sofosbuvir/lédipasvir, sofosbuvir/velpatasvir
auteurs de la base de données Cristal (voir ci-dessus), les greffés et grazoprévir/elbasvir pendant 8 à 12 semaines selon le géno-
rénaux avec ARN du VHC indétectable avaient une survie à dix type et le sous-type (il y a sept génotypes majeurs de 1 à 7 et
ans (86,5 % ; IC 95 % : 77,8–95,3 %) plus élevée que celle des plusieurs sous-types classés selon l’ordre alphabétique), et la mala-
patients avec ARN du VHC détectable mais aussi de leurs témoins die hépatique sous-jacente, principalement sur les combinaisons
non infectés correspondants (77,9 % ; IC 95 % : 72,5–83,4 % ; pangénotypiques sofosbuvir/veltapasvir/voxilaprevir et glécapré-
p = 0,04) avec un HR de 0,50 (IC 95 % : 0,25–0,98). La survie à dix vir/pibrentasvir pendant huit semaines chez les non-cirrhotiques
ans des greffons était comparable (63,8 % ; IC 95 % : 52,8–74,0 %) et 12 semaines chez les patients cirrhotiques [32] . La cirrhose
à celle des patients non infectés (61,5 % ; IC 95 % : 55,7–67,3 % ; décompensée contre-indique l’utilisation d’inhibiteurs de pro-
p = 0,3) avec un HR de 0,84 (0,57 à 1,22) [39] . À l’inverse, dans téase qui peuvent avoir un certain degré d’hépatotoxicité (liée à
cette étude cas-témoins, la survie à dix ans des greffons et des l’accumulation des produits ou de leur métabolite) : une combi-
patients avec ARN du VHC détectable était clairement inférieure naison sans inhibiteur de protéase (sofosbuvir/velpatasvir) doit
à celle des malades non infectés [39] . Ces données soutiennent être utilisée pendant 12 semaines en combinaison avec la ribavi-
fortement, comme celles obtenues avec le traitement antiviral rine.
B [55] , l’impériosité du contrôle de la réplication virale chez les Les inhibiteurs de protéase ou inhibiteurs de NS5A sont
insuffisants et les greffés rénaux infectés par le VHC. Le dévelop- principalement métabolisés par le foie et ne nécessitent pas
pement des AVD [68, 69] , aujourd’hui disponibles et efficaces en cas d’ajustement de dose au DFG et sont de bons candidats pour
d’IRC [70, 71] , constitue une opportunité unique pour l’élimination le traitement des patients avec IRC, notamment les CKD stades
du VHC du champ néphrologique. 4 et 5. Cela explique les excellents résultats obtenus avec la
combinaison grazoprévir/elbasvir dans la plus grande étude ran-
domisée contrôlée chez les patients avec IRC CKD 4-5 infectés
 Traitement de l’infection virale C par des génotypes 1 (C-surfer) : 99 % de RVS en analyse per
protocole [70] .
Options de traitement dans l’infection virale L’essai RUBY-1 (paritaprévir/ritonavir, ombitasvir, dasabuvir
avec ou sans ribavirine) a également rapporté des taux élevés de
C (Fig. 2) RVS (100 % de RVS 4 chez les 10 patients sur 20 qui ont atteint
Depuis plus de 20 ans, le traitement du VHC était principa- la semaine de post-traitement 4) chez les patients infectés par le
lement fondé sur l’interféron, y compris sa formulation pégylé, génotype 1 du VHC avec des stades 4-5 d’IRC [71] . L’essai RUBY-2
en combinaison avec la ribavirine après 1995. Lors des 24 à sans ribavirine rapporte également un taux élevé de RVS, et semble
48 semaines de traitement à base d’interféron, de nombreux évé- être une meilleure option (puisque sans ribavirine).
nements indésirables (syndrome grippal, troubles neurocognitifs, Dans la pratique, aucun ajustement de la dose à la fonction
fatigue, activation de maladies dysimmunitaires, myélosuppres- rénale n’était nécessaire avec siméprévir et daclatasvir, mais la
sion, etc.) sont majorés par l’ajout de la ribavirine et ses puissance antivirale optimale était seulement obtenue en combi-
inconvénients intrinsèques (prurit, dépression et anémie hémo- naison avec le sofosbuvir. C’est la première classe d’inhibiteur
lytique) [72, 73] . Le faible taux de RVS (de 15 à 50 % selon les nucléotidique de la polymérase NS5B, épine dorsale de la plu-
génotypes) et le taux d’effets indésirables graves en limitaient son part des combinaisons d’AVD pouvant être co-formulée dans une
utilisation chez les patients avec IRC chez lesquels le métabolisme seule tablette avec l’inhibiteur NS5A lédipasvir ou velpatasvir,
rénal de la ribavirine nécessitait fréquemment une réduction de voire avec velpatasvir et l’inhibiteur de protéase, le voxilaprévir.
posologie (60 % environ), voire un arrêt du traitement (15 à 30 %). L’utilisation de la dose standard de sofosbuvir (400 mg/j), qui est,
Cela restait vrai à l’époque des AVD de première génération qui comme la ribavirine, éliminé par le rein, n’est pas recommandé
étaient combinés avec l’interféron pégylé et la ribavirine. Après chez les patients avec un DFG inférieur à 30 ml/min/1,73 m2 [31, 32] ,
2015, les combinaisons pangénotypiques de deux ou trois AVD de empêchant l’utilisation des combinaisons contenant le sofosbu-
deuxième vague ou de deuxième génération ont montré une forte vir chez ces patients compte tenu du risque de surexposition
puissance antivirale (taux de RVS supérieur à 95 %), une tolérance au sofosbuvir et à son métabolite GS-007, qui pourrait entraîner
satisfaisante pour un à trois comprimés par jour pendant huit à un risque potentiel d’augmentation de la toxicité rénale intrin-
16 semaines, sans interféron ni ribavirine dans la population géné- sèque. Alors que les doses inférieures sont suboptimales [77] , une
rale [31, 32, 74–76] mais aussi chez les patients avec IRC [31–33, 70, 71] . Le dose standard de sofosbuvir (400 mg/j) administrée en associa-
choix du traitement est fondé sur le stade de la fibrose, génotype tion avec d’autres AVD à des patients ayant un DFG inférieur à
et sous-type, charge virale initiale, antécédent de traitement anti- 30 ml/min/1,73 m2 pourrait détériorer la fonction rénale dans
viral (le patient est naïf ou prétraité) et variantes de résistance environ 25 % des cas [78] .
préexistants [31, 32] . Cependant, les pharmacocinétiques sont rassurantes [79] et le
sofosbuvir pourrait être utilisé hors label chez les patients ayant un
DFG inférieur à 30 ml/min/1,73 m2 en l’absence d’autres options
Options thérapeutiques chez les insuffisants thérapeutiques.
rénaux Les données d’AVD publiées chez les greffés rénaux sont
rares [80, 81] : un essai international comparant 12 ou 24 semaines
Du fait des interactions réciproques entre VHC et IRC, des avan- de sofosbuvir et lédipasvir chez des greffés rénaux avec un DFG
tages rénaux et cardiovasculaires associés à la RVS chez les patients supérieur à 40 ml/min/1,73 m2 a montré une efficacité antivirale
avec IRC et de l’impact négatif persistant du VHC chez les greffés élevée (100 % en analyse per protocole avec 12 ou 24 semaines)
rénaux, les recommandations internationales sont de traiter tous et une bonne tolérance sans détérioration rénale pendant et après
les patients infectés [31, 32] . Les patients avec IRC sont des patients la thérapie [82] .
prioritaires pour réduire les risques hépatiques et extrahépatiques, En résumé, les options thérapeutiques disponibles pour les
en particulier la détérioration rénale et le diabète chez les patients génotypes 1 et 4 étaient, avant 2018, une combinaison de
avec IRC : « en raison du risque élevé de complications graves, les paritaprévir boosté par le ritonavir, ombitasvir et dasabuvir ou
patients atteints d’IRC nécessitent d’être traités » selon l’European grazoprévir/elbasvir pendant 12 semaines sans ribavirine [83] . Il n’y
Association for the Study of the Liver (EASL) [32] , « le traitement avait pas d’option approuvée pour les génotypes 2, 3, 5 et 6 chez
doit être réalisé sans délai » selon l’American Association for the les patients ayant une clairance inférieure à 30 ml/min/1,73 m2 ,

EMC - Néphrologie 5
18-061-C-10  Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C

Trois classes d'AVD : inhibiteurs protéases, NS5A ou NS5B (polymérase)

Encadrement de la prescription des


ATU nouveaux AAD par les RCP

Paritaprévir
/ombitasvir
Sofosbuvir (Viekirax® )
Sofosbuvir Siméprévir Daclatasvir /lédipasvir Dasabuvir Grazoprévir,
(Sovaldi® ) (Olysio®) (Daklinza® ) (Harvoni®) (Exviera® ) elbasvir

2013 2014 2015


Octobre Décembre Mars Mai Novembre Décembre Octobre
Sofosbuvir
Sofosbuvir Siméprévir /lédipasvir Daclatasvir Viekirax® Grazoprévir,
(Sovaldi®) (Olysio®) (Harvoni® ) (Daklinza® ) Exviera® elbasvir
(Zepatier®)
AMM

Restriction initiale du remboursement CPAM aux patients


Fibrose sévère Indépendamment du stade de fibrose
- F3-F4 - Cryoglobuline symptomatique Extension des ATU
- Avant/après - Lymphone B • F2 sévère
traitement hépatique • VIH F0-F1-F2

Ouverture à tous les patients en janvier 2017


Figure 2. Résumé des traitements antiviraux directs (AVD) oraux de l’infection chronique par le virus de l’hépatite C (VHC). Développés à partir de 2010,
ils ont été précédés de plus de 20 années d’utilisation de l’interféron alpha standard (1988) ou pégylé (1997) en association avec la ribavirine (1992). AMM :
autorisation de mise sur le marché ; ATU : autorisation temporaire d’utilisation ; AAD : antiviraux à action directe ; RCP : résumés des caractéristiques du
produit ; CPAM : Caisse primaire d’assurance maladie ; VIH : virus de l’immunodéficience humaine.

même si les résultats de la vie réelle rapportaient un taux de atteints d’IRC sans ribavirine, selon les recommandations KDIGO
RVS élevé et un bon profil de tolérance du sofosbuvir. Les trai- récentes [33] .
tements pangénotypiques (Fig. 2) ont modifié les indications, en Dans une étude de 100 greffés, dont 20 receveurs de rein,
particulier la combinaison de glécaprévir/pibrentasvir (Maviret® ) 12 semaines de glécaprévir/pibrentasvir a également eu un bon
qui peut être utilisée indépendamment du stade d’IRC et du profil d’efficacité et d’innocuité [89] .
génotype. Dans l’étude EXPEDITION-4, la combinaison glécapré-
vir/pibrentasvir a été administrée à 104 patients avec IRC stade
4-5, incluant une majorité (82 %) de dialysés et 19 % des patients
cirrhotiques. Un traitement de 12 semaines a permis un taux
Sofosbuvir et insuffisance rénale
de RVS de 98 % en intention de traiter et 100 % en inten- La confrontation des données d’enregistrement et des don-
tion de traiter modifiée (les échecs étant liés à un décès et à nées de vraie vie donnent des résultats discordants sur les risques
une perte de suivi). La tolérance était satisfaisante sur le plan rénaux du sofosbuvir. Les autres AVD que les inhibiteurs de
clinico-biologique et les effets indésirables n’étaient pas liés au polymérase, dont le sofosbuvir, sont largement à métabolisme
traitement [84] . EXPEDITION-5, en utilisant 8 (n = 84), 12 (n = 13) hépatique et excrétés dans les fèces. Ils n’ont pas été associés
ou 16 (n = 4) semaines selon le label américain ou européen de à des signaux rénaux de tolérance dans les études observation-
glécaprévir/pibrentasvir, a donné des résultats similaires (100 % nelles post-marketing [88] . Au contraire, des études suggèrent un
de RSV12 en intention de traiter modifiée) chez des patients naïfs risque rénal, avec le sofosbuvir [78, 90] mais les résultats sont discu-
ou prétraités par interféron/ribavirine et/ou un inhibiteur de pro- tables avec des limites méthodologiques, les facteurs confondants
téase de première génération infectés par un génotype GT1 à 6 (sévérité de l’hépatopathie, traitements néphrotoxiques, etc.) et
et avec une IRC de stade 3B, 4 ou 5 [85] . Aucun patient n’a eu peu de données analytiques sur la fonction rénale, voire discor-
d’effet indésirable significatif, notamment de détérioration de la dants [79–82, 91–94] . Les études alarmantes [78, 90] sont contrebalancées
fonction rénale. par des résultats contradictoires sur l’évolution de la fonction
Dans le programme global de développement du glécapré- rénale [91–94] .
vir/pibrentasvir (2238 patients traités qui ont reçu 8, 12 ou Dans une étude longitudinale, les auteurs ont modélisé les varia-
16 semaines de traitement), la fonction rénale initiale ne modi- tions du DFG mesurées par un modèle mixte avant, pendant et
fiait ni l’efficacité thérapeutique (RVS : 93 à 100 %), ni le profil de après le traitement par AVD chez 749 patients avec une fonction
tolérance clinique ou biologique [86] . Fait intéressant, les patients rénale ou peu modifiée initialement (96,5 % avaient un DFG ≥
atteints d’une IRC de stade 3 ont eu une amélioration de leur 60 ml/min/1,73 m2 ) [95] . Alors que la fonction rénale n’était pas
fonction rénale [87] , confirmant des données similaires avec la modifiée dans les deux ans qui précédaient le traitement, les traite-
combinaison grazoprévir/elbasvir [88] ou avec des régimes à base ments sans sofosbuvir s’accompagnaient d’une augmentation du
de sofosbuvir (cf. infra). Chez les patients atteints d’IRC stade 4-5, DFG (+2,96 ml/min/1,73 m2 ), à l’inverse de ceux à base de sofos-
en raison de la contre-indication à l’utilisation du sofosbuvir, cette buvir (suivi médian de 24 semaines) (–2,6 ml/min/1,73 m2 ) [95] .
combinaison pangénotypique (trois comprimés en une prise quo- Les observations post-marketing de détérioration rénale sous
tidienne) semble être une excellente option thérapeutique quel sofosbuvir contrastent avec l’absence de détérioration rénale dans
que soit le génotype, mais la combinaison grazoprévir/elbasvir les études prémarketing [96] . L’exclusion des patients avec des
(un seul comprimé pendant 12 semaines mais huit semaines DFG inférieurs à 50 ml/min/1,73 m2 et l’utilisation d’échelles
sont en en cours d’investigation, avec des résultats encourageants insuffisamment sensibles dans les études prémarketing, incluant
chez les patients infectés par les génotypes 1b et 4) demeure une les plus récentes, ne pourraient seules l’expliquer car de nom-
bonne option chez les patients infectés par les génotypes 1 et 4 breuses études postmarketing n’ont pas rapporté de risque rénal

6 EMC - Néphrologie
Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C  18-061-C-10

chez les patients traités par sofosbuvir. Une méta-analyse incluant de suivi, 38,8 % des patients avaient un taux plasmatique de
264 patients avec une IRC CKD 4-5 traités par sofosbuvir ou NGAL supérieur à la norme contre 11,1 % initialement (p = 0,054).
non n’a pas suggéré de différence d’efficacité (RVS 12 de 89,4 et Les auteurs concluent que la diminution négligeable du DFG
94,7 %, respectivement) ou de tolérance (incidence poolée des contraste avec une augmentation significative du NGAL dans un
effets indésirables de 12,1 % et taux d’arrêt thérapeutique pour petit sous-groupe, ce qui pourrait refléter un dysfonctionnement
effet indésirable de 2,2 %) [91] . Des résultats rassurants ont même tubulaire [103] . D’autres études suggèrent une atteinte glomérulaire
été rapportés dans une étude rétrospective incluant 97 patients possible.
avec un DFG inférieur à 60 ml/mn et un certain degré de protéi- Étant donné que le traitement du VHC se déplace des centres
nurie (42 % IRC stade 1-2 et 58 % IRC stade 3, 49 % avec diabète, tertiaires vers des professionnels de santé non spécialisés, le DFG
38 % avec cirrhose et 33 % avec une greffe d’organe) recevant des doit être surveillé chez les patients recevant un traitement par
traitements incluant le sofosbuvir : un modèle de régression a ana- AVD, surtout chez les patients à risque de progression d’une mala-
lysé les variations de DFG entre l’initiation et la fin du suivi. Le die rénale. Le traitement par AVD est également recommandé pour
DFG était comparable sous traitement aux valeurs initiales sauf les patients recevant des greffes de donneurs séropositifs au VHC.
chez sept patients ayant une augmentation du DFG supérieur à L’impact rénal des AVD, notamment de ceux incluant le sofosbu-
1,5 fois la valeur initiale : tous sauf un ont guéri. Un patient avec vir, va devoir être exploré à l’avenir avec des études analytiques
une IRC stade 3 avec RVS a amélioré sa clairance de 9,3 ml/min complètes.
dans les six mois post-traitement [92] . Des résultats similaires ont
été rapportés chez 71 patients avec IRC (84,5 % en hémodialyse et
23,9 % avec cirrhose) ayant reçu les doses d’un générique de sofos- Réactivation virale B pendant le traitement
buvir en combinaison avec la ribavirine chez 26 pour 12 semaines, par antiviraux oraux directs
lédipasvir chez 26 pour 12 semaines et daclatasvir chez 19 pour
12 semaines : une RVS 12 était obtenue chez 100 % des patients ; Le risque de réactivation du VHB après clairance du VHC était
un patient du groupe lédipasvir a rechuté à 24 semaines et un connu après les traitements à base d’interféron [104] et a également
patient du groupe ribavirine à 48 semaines [93] . La créatininémie été rapporté avec des AVD oraux [105] . C’est pourquoi le dépistage
dans les 12 semaines post-traitement n’avait augmenté de plus de l’antigène HBs doit être réalisé avant le début d’un traitement
de 0,3 mg/dl que chez deux patients traités par ribavirine, un par AVD. Même si des cas de réactivation sévère (définie par une
avec une infection urinaire et l’autre sans facteur d’aggravation augmentation de plus de 1 log de l’acide désoxyribonucléique
identifié : il n’y avait pas de variation significative du DGF médian. (ADN) du VHB et une hypertransaminasémie) pouvant entraîner
Une étude italienne rétrospective d’une cohorte prospective la mort ou une transplantation du foie ont été rapportés [105] , les
a évalué les variations du DFG (CKD-EPI) chez 403 patients expériences espagnole et chinoise [106, 107] montrent que la plupart
traités par AVD (RVS de 98 %). Le DFG médian augmentait des patients HBsAg positif présentent seulement une augmenta-
avec le traitement de 84,54 à 88,12 ml/min. L’augmentation du tion modeste et asymptomatique de l’ADN du VHB [107] .
nombre de CKD 1-2 était de 83,1 % initialement à 87,8 % à En pratique, une prophylaxie de la réactivation virale B par ana-
12 semaines post-traitement (p < 0,05). Une amélioration signi- logues nucléos(t)idiques doit être mise en place chez les patients
ficative était notée chez les patients sans diabète (p < 0,01), co-infectés VHB/VHC pour la durée du traitement antiviral C et
chez les cirrhotiques (p < 0,05), seulement chez ceux recevant au moins les 12 semaines suivant le traitement du VHC [32] .
sofosbuvir-lédipasvir (p < 0,01) (et pas chez ceux traités par ombi-
tasvir/partitaprévir/ritonavir/dasabuvir avec ou sans ribavirine)
(p < 0,05), seulement chez ceux ayant une IRC avec un stade CKD  Défis de demain
supérieur à 2 (p < 0,01) et chez ceux avec RVS (p < 0,05) [97] . Une
amélioration de la fonction rénale chez des patients avec RVS 12 Améliorer dépistage et prévention
a été rapportée chez 523 patients, quelle que soit l’option théra- chez les insuffisants rénaux
peutique par comparaison avec les patients sans RVS confirmant,
d’une part, l’impact de l’infection virale C sur la fonction rénale et L’infection chronique par le VHC est souvent asymptomatique,
d’autres manifestations extrahépatiques et, d’autre part, la néces- de sorte que le dépistage des anticorps anti-VHC par enzyme-
sité de guérir ces patients [98] . linked immuno assay (Elisa) est nécessaire pour détecter l’infection
Ces résultats vont dans le même sens que ceux de chez les populations à haut risque, en particulier les patients
la cohorte ERCHIVES [99] rapportant une détérioration de commençant l’hémodialyse en centre et ceux transférés d’une
la fonction rénale chez 3728 patients traités par ombitas- autre structure de dialyse ou ayant changé leur modalité de dia-
vir/partitaprévir/ritonavir/dasabuvir mais pas chez 12 018 traités lyse [33] . Les patients dialysés à sérologie VHC négative sont testés
par sofosbuvir, à l’inverse des résultats poolés des études Sapphire I tous les six mois. L’infection aiguë par le VHC chez un hémodia-
et II et RUBY I et II, essais cliniques ne suggérant pas de dysfonc- lysé doit être signalée aux autorités de santé et tous les patients
tion rénale après traitement [100] . Il est difficile de conclure en du même centre doivent être testés. La surveillance mensuelle de
2019 sur l’éventuelle néphrotoxicité des AVD et les futures études l’alanine aminotransférase (ALAT) sérique est un moyen peu coû-
de cohorte offriront probablement une réponse fiable. teux de dépistage de l’infection aiguë du dialysé. En outre, compte
tenu de la relation épidémiologique étroite entre IRC et infection
chronique par le VHC, le KDIGO recommande un dépistage du
Mécanismes de la néphrotoxicité potentielle VHC au moment du premier diagnostic d’IRC [33] . Enfin, les can-
du sofosbuvir didats à la transplantation rénale doivent être tous testés pour
l’infection à VHC lors de l’évaluation initiale pour la greffe [33] .
Les mécanismes de néphrotoxicité potentielle du sofosbuvir ne
sont pas clairs et ne semblent pas semblables à ceux des ana-
logues nucléotidiques du VHB ou du VIH avec leur néphrotoxicité Micro-élimination du virus de l’hépatite C
spécifique incluant l’accumulation de la drogue dans les tubules chez les insuffisants rénaux : l’initiative
rénaux proximaux médiés par le transporteur d’anions organiques
de type 1 (OAT1) et la protéine de résistance aux médicaments de European Association for the Study of the
type 4 (MRP4) responsable d’une toxicité mitochondriale moins Liver/European Renal Association–European
avec le ténofovir qu’avec l’adéfovir ou surtout le cidofovir [101, 102] . Dialysis and Transplant Association
L’évolution du DFG et du neutrophil gelatinase-asociated lipo-
calin (NGAL) a été évaluée rétrospectivement dans une cohorte Globalement, les données justifient fortement le contrôle de la
de 102 patients sous AVD. Une réduction du DFG était obser- réplication virale chez les patients atteints d’IRC, y compris les
vée (de 86,2 initialement à 84,4 ml/min à la semaine 12 de greffés rénaux, comme la meilleure approche pour améliorer la
suivi) (p = 0,049) et le taux moyen de NGAL augmentait chez 18 survie des patients (et des greffons). L’utilisation du traitement
patients (de 121,9 à 204,1 ng/ml ; p = 0,014). À la 12e semaine antiviral a été limitée à l’époque de l’interféron, en raison du

EMC - Néphrologie 7
18-061-C-10  Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C

risque de rejet de greffe, de la mauvaise tolérance de l’interféron surveillés. Les agents anti-protéinuriques doivent être adminis-
et de la fréquence élevée de l’anémie en cas d’utilisation de la riba- trés à des patients présentant des protéinuries significatives. Le
virine chez ces patients avec IRC. La disponibilité de nombreux cas échéant, les diurétiques et les antihypertenseurs doivent être
AVD pour les patients avec IRC et greffés rénaux est un progrès administrés pour atteindre la pression artérielle cible recomman-
majeur qui va permettre d’améliorer la cascade de soins du dépis- dée pour les patients atteints d’IRC.
tage à l’accès aux soins et au traitement. L’accès au traitement Enfin, le suivi de la maladie hépatique dépend de l’étape de
a été jusqu’à récemment anecdotique chez les patients atteints la fibrose hépatique avant de commencer le traitement par AVD.
d’IRC [33, 37] , même s’ils ont été considérés comme des patients Les patients atteints de fibrose sévère (F3-F4) doivent effectuer
prioritaires pendant au moins trois ans et en dépit des avantages une échographie hépatique tous les six mois selon les direc-
hépatiques et extrahépatiques associés à la RVS. tives internationales et l’endoscopie gastro-intestinale supérieure
C’est pourquoi, au nom de la Fondation de l’EASL, une initia- chez les patients cirrhotiques selon le nombre de plaquettes
tive européenne pour l’élimination du VHC (réunissant EASL et (< 150 000/mm3 ) et l’élasticité hépatique (Fibroscan® < 25 kPa)
l’European Renal Association-European Dialysis and Transplant avant le traitement antiviral selon les directives Baveno VI [110] .
Association [ERA-EDTA]) a débuté en mars 2018 à Amsterdam
pour unir les efforts des deux sociétés pour un programme de
« micro-élimination » de l’hépatite virale chez les patients atteints Réduction du taux de réinfection
d’IRC [108] . en néphrologie
On estime que seuls 34 à 48 % des porteurs chroniques du
VHC sont référés et reçoivent un traitement contre l’hépatite La prévention dans les unités de dialyse reste la pierre angu-
C dans les pays du Nord, mais ce chiffre est inférieur à 1 % laire de la stratégie de micro-élimination du VHC [111, 112] ou
dans les pays à faible revenu [109] . Par conséquent, l’instauration éviter les réinfections. En effet, la guérison de l’infection par
de modèles de soins susceptibles de surmonter les obstacles et le VHC par un sous-type spécifique du VHC ne confère pas
d’améliorer l’accès aux soins constitue un objectif essentiel pour d’immunité contre l’infection par d’autres sous-types, et la réin-
modifier l’épidémiologie du VHC dans le but d’atteindre l’objectif fection par un autre génotype du VHC a déjà été rapportée chez
de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (réduction de 90 % un patient hémodialysé après un traitement antérieur [113] . Ainsi,
de la prévalence de l’hépatite et réduction de 60 % de la morta- le risque de transmission nosocomiale persiste aussi longtemps
lité liée aux hépatites d’ici 2030) [3] . Pour atteindre cet objectif qu’un seul patient infecté par le VHC est présent dans une unité
d’« élimination du VHC », tous les efforts devraient être faits donnée.
pour l’élaboration de programmes éducatifs ciblant les popula-
tions à risque. Compte tenu des manifestations systémiques de
l’infection virale C et des multiples communautés concernées,  Questions en discussion
l’approche doit nécessairement être multidisciplinaire.
La voie vers l’élimination du VHC doit permettre de promou- Malgré de grands progrès dans le traitement du VHC et une
voir l’accès et le traitement pour tous, et elle est fondée sur meilleure compréhension des interactions entre le VHC et l’IRC,
des initiatives visant à sensibiliser les communautés (groupes à de nombreuses questions demeurent sans réponse : le moment du
risque, population générale, professionnels de santé, et sur les pro- traitement antiviral chez les candidats à la transplantation (avant
grammes éducatifs et de formation pour les médecins et autres ou après ?), l’utilisation de greffons (dérogatoires) infectés par le
travailleurs de la santé). VHC, les bénéfices hépatiques et extrahépatiques à long terme des
Enfin, l’ouverture de la prescription des AVD à un spécialiste RVS chez les patients avec IRC.
non hépatologue est certainement un moyen de simplifier la ges-
tion des patients atteints du VHC.
L’éducation des médecins et des patients est associée à des Quand traiter les dialysés infectés par le virus
résultats positifs dans divers modèles de soins du VHC [60] , de l’hépatite C candidats à la greffe rénale ?
y compris l’augmentation des connaissances spécifiques à la
maladie, l’intérêt pour le traitement, la volonté d’accepter le trai- Le moment du traitement antiviral, avant ou après la trans-
tement, et d’augmenter la fréquentation clinique de soins de plantation rénale, chez les patients ayant une IRC stade 4-5 qui
santé du foie. L’approche centrée sur le patient a le potentiel sont des candidats à la transplantation rénale reste débattu. Les
d’influencer la gestion du VHC, d’accroître l’intérêt pour la récep- considérations prises en compte sont le type de donneur (vivant
tion du traitement par le VHC et d’améliorer les résultats du ou décédé), le temps d’attente escompté, la politique spécifique
traitement. au centre pour l’acceptation de greffons dérogatoires séropositifs
pour le VHC, le génotype spécifique du VHC et la sévérité de la
fibrose hépatique (généralement évaluée par des méthodes non
Améliorer le suivi des patients avec réponse invasives).
virologique soutenue Avant les AVD, les experts recommandaient le traitement du
VHC avant la transplantation rénale en raison du risque accru
La RVS est une guérison virologique. Les patients peuvent avoir de rejet du greffon induit par un traitement à base d’interféron.
des manifestations hépatiques et extrahépatiques sous-jacentes. Actuellement, le moment du traitement du VHC avant ou après
Le suivi des patients atteints de RVS est obligatoire parce qu’il une greffe rénale dépend de la sévérité des lésions hépatiques et
existe un risque persistant de réinfection chez les populations à de la disponibilité d’une greffe : le traitement peut être commencé
haut risque [60, 61] , y compris les patients qui reçoivent une dia- après la greffe si la greffe est rapidement disponible (par exemple
lyse, mais aussi parce qu’il existe un risque de progression des dans le cas d’un donneur vivant) ou avant transplantation rénale ;
manifestations cliniques de base, notamment en cas de comorbi- cela peut être une option, au moins pour les patients qui n’ont
dités hépatiques. La RVS est associée à une stabilisation ou à une pas de fibrose hépatique significative. Le patient peut alors être
amélioration de la situation clinique. Cependant, les comorbidi- transplanté plus tôt avec un greffon infecté par le VHC et un trai-
tés hépatiques (surcharge pondérale, syndrome métabolique, abus tement antiviral peut être administré après la transplantation avec
d’alcool) peuvent induire une progression de la fibrose. Chez les les avantages escomptés [33] qui sont semblables à ceux signalés
patients atteints d’IRC, même si une amélioration de la fonction pour le VHB [39] . La décision est principalement influencée par
rénale est constatée au stade 3 de l’IRC et des MEH, la réduction la disponibilité locale de greffons infectés par le VHC qui réduit
de la mortalité chez les patients recevant une dialyse et des greffés significativement le temps d’attente pour la transplantation (cf.
rénaux est acquise, nous devons fournir des résultats prospec- infra). La grande variabilité entre les pays ou les régions est illus-
tifs à long terme concernant l’impact rénal de ces traitements. trée par le fait que le taux de greffons positifs pour le VHC est
Chez tous les patients traités ayant une RVS, les changements passé de 1,2 à 13,7 % de 2000 à 2016 aux États-Unis alors qu’il est
de la fonction rénale, l’évolution de la protéinurie et les effets demeuré systématiquement inférieur à 1 % en Europe au cours de
indésirables du traitement antiviral doivent être soigneusement la même période.

8 EMC - Néphrologie
Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C  18-061-C-10

Comme le moment de la transplantation rénale est souvent


imprévisible, les interactions médicamenteuses possibles entre
 Conclusion
AVD et inhibiteurs calcineurine, le pronostic péjoratif chez les La relation entre le VHC et l’IRC souligne la besoin d’une colla-
patients avec IRC sévère en cas d’infection par le VHC, les clini- boration étroite entre les néphrologues et les hépatologues pour
ciens sont incités à traiter ces patients dès que possible, c’est-à-dire éliminer l’infection par le VHC dans ces patients et fournir les
avant la transplantation rénale. soins de suivi appropriés. Les médicaments actuellement dispo-
Tous les patients doivent être traités selon les recommanda- nibles permettent de guérir en utilisant des combinaisons d’AVD.
tions. L’efficacité et la sécurité élevées des AVD ainsi que la courte Les preuves disponibles montrent que ces agents peuvent être
durée de traitement (8 à 12 semaines) des AVD pangénotypiques utilisés chez les patients atteints d’IRC, y compris ceux sous main-
changent radicalement la gestion du VHC dans l’IRC, en prenant tenance dialysés ou transplantés rénaux. Des études ont montré
en compte le risque significatif d’interactions médicamenteuses. l’importance d’obtenir une RVS en termes d’effets bénéfiques sur
la maladie hépatique et les manifestations extrahépatiques de
Traitement antivirus de l’hépatite C l’infection par le VHC. L’élimination du VHC chez les patients
atteints d’IRC est le prochain grand défi et va nécessiter une
et utilisation des greffons infectés par le virus approche multidisciplinaire pour aborder l’éducation du patient
de l’hépatite C et du clinicien, améliorer l’accès aux AVD et le suivi pour prévenir
réinfection.
Près de 100 000 patients aux États-Unis sont en attente pour la
transplantation de rein, et chaque année, seuls 12 000 reçoivent
une greffe de donneur décédé. Ainsi, les temps d’attente dépassent Remerciements : au Professeur Michel Jadoul pour son aide dans la préparation
trois à cinq ans aux États-Unis [114] . En 2013, en France, 4467 nou- du manuscrit.
veaux patients ont été en attente pour la greffe de rein, 14 336
patients étaient sur la liste d’attente et 3074 ont été transplantés.
Déclaration de liens d’intérêts : S. Pol a été orateur pour BMS, Janssen, Gilead,
En France, le temps d’attente médian a augmenté graduellement
MSD, Abbvie ; a reçu des bourses de Gilead, Abbvie, MSD et a été membre de
de 14,5 à 28,6 mois entre 1996 à 1999 et 2011 à 2013 [115] .
board pour BMS, Janssen, Gilead, MSD et Abbvie.
Malgré le besoin substantiel d’organes, plus de 800 reins de L. Parlati déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.
donneurs décédés souffrant d’infection à VHC n’ont pas été uti-
lisés aux États-Unis en 2016, historiquement du fait des taux de
guérison faibles et des effets indésirables importants des anciens
traitements contre le VHC à base d’interféron (risque de rejet  Références
d’allogreffe), les résultats de l’utilisation de greffons infectés par
le VHC semblent encourageants [116, 117] . Cependant, on ne sait [1] Stanaway JD, Flaxman AD, Naghavi M, Fitzmaurice C, Vos T, Abu-
pas si les candidats à la transplantation rénale non infectés par le bakar I, et al. The global burden of viral hepatitis from 1990 to
VHC seraient disposés à accepter des organes de donneurs infectés 2013: findings from the Global Burden of Disease Study 2013. Lancet
par le VHC. En particulier, l’étude pilote qui transplante des reins 2016;388:1081–8.
infectés par le VHC à des receveurs infectés a inclus dix patients [2] Polaris Observatory HCV Collaborators. Global prevalence and geno-
type distribution of hepatitis C virus infection in 2015: a modelling
qui ont tous guéri avec un traitement par AVD après la greffe [118] .
study. Lancet Gastroenterol Hepatol 2017;2:161–76.
De même, dans l’étude Expander, huit patients atteints de VHC
[3] World Health Organization. Eliminate hepatitis (news release,
ont reçu des reins de donneurs séropositifs. Les receveurs ont reçu
Geneva). WHO http://www.who.int/news-room/detail/27-07-2017-
une dose unique de grazoprévir/elbasvir avant la greffe et quoti- eliminate- hepatitis-who.
diennement pendant 12 semaines après la greffe. L’ARN du VHC a [4] Trinchet JC, Bourcier V, Chaffaut C, Ait Ahmed M, Allam S, Marcellin
été détecté chez quatre receveurs au premier jour postopératoire, P, et al. Complications and competing risks of death in compensated
et jamais plus tard [119] . viral cirrhosis (ANRS CO12 CirVir prospective cohort). Hepatology
2015;62:737–50.
[5] Pozzato G, Mazzaro C, Dal Maso L, Mauro E, Zorat F, Moratelli
G, et al. Hepatitis C virus and non-Hodgkin’s lymphomas: meta-
“ Points essentiels analysis of epidemiology data and therapy options. World J Hepatol
2016;8:107–16.
[6] Del Campo JA, Gallego P, Grande L. Role of inflammatory response
• L’infection par le VHC est au moins quatre fois plus fré- in liver disease: therapeutic strategies. World J Hepatol 2018;10:1–7.
quente chez les patients insuffisants rénaux, notamment [7] Muriel P. Role of free radicals in liver diseases. Hepatol Int
chez les dialysés ou les greffés rénaux, que dans la popu- 2009;3:526–36.
[8] García-Monzón C, Majano PL, Zubia I, Sanz P, Apolinario A, Moreno-
lation générale.
Otero R. Intrahepatic accumulation of nitrotyrosine in chronic viral
• L’infection par le VHC est une maladie systémique,
hepatitis is associated with histological severity of liver disease. J
associée à une morbidité et une mortalité plus élevées, Hepatol 2000;32:331–8.
notamment en cas d’insuffisance rénale. [9] Vescovo T, Refolo G, Romagnoli A, Ciccosanti F, Corazzari M, Alonzi
• Le VHC est associé à une plus grande incidence et à T, et al. Autophagy in HCV infection: keeping fat and inflammation at
une progression plus rapide du diabète, de complications bay. Biomed Res Int 2014;2014:265353.
systémiques dont des manifestations cardiovasculaires et [10] Fukui M, Kitagawa Y, Nakamura N, Yoshikawa T. Hepatitis C
virus and atherosclerosis in patients with type 2 diabetes. JAMA
une IRC.
2003;289:1245–6.
• Les traitements par les AVD oraux du VHC, étendus aux
[11] Adinolfi LE, Restivo L, Zampino R, Guerrera B, Lonardo A, Rug-
IRC terminales et aux greffés rénaux, ont montré un taux giero L, et al. Chronic HCV infection is a risk of atherosclerosis.
de guérison du VHC supérieur à 95 %. Role of HCV and HCV- related steatosis. Atherosclerosis 2012;221:
• Les recommandations internationales sont le dépistage 496–502.
de l’infection active par le VHC de tous les patients insuffi- [12] Mostafa A, Mohamed MK, Saeed M, Hasan A, Fontanet A, Godsland
sants rénaux et leur accès aux thérapies antivirales orales. I, et al. Hepatitis C infection and clearance: impact on atherosclerosis
• L’élimination du VHC du champ néphrologique est pos- and cardiometabolic risk factors. Gut 2010;59:1135–40.
[13] Petta S, Macaluso FS, Craxi A. Cardiovascular diseases and HCV
sible, à condition que le traitement par AVD soit couplé à infection: a simple association or more? Gut 2014;63:369–75.
des précautions d’hygiène universelle pour prévenir infec- [14] Pol S, Vallet-Pichard A, Hermine O. Extrahepatic cancers and
tions et réinfections dans les unités d’hémodialyse. chronic HCV infection. Nat Rev Gastroenterol Hepatol 2018;15:
283–90.

EMC - Néphrologie 9
18-061-C-10  Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C

[15] Allison RD, Tong X, Moorman AC, Ly KN, Rupp L, Xu F, et al. [39] Fontaine H, Alric L, Labreuche J, Legendre B, Louvet A, Antoine C,
Increased incidence of cancer and cancer-related mortality among per- et al. Control of replication of hepatitis B and C virus improves patient
sons with chronic hepatitis C infection, 2006-2010. J Hepatol 2015;63: and graft survival in kidney transplantation. J Hepatol 2019;70:831–8.
822–8. [40] Thursz M, Fontanet A. HCV transmission in industrialized coun-
[16] Fiorino S, Bacchi-Reggiani L, de Biase D, Fornelli A, Masetti M, tries and resource-constrained areas. Nat Rev Gastroenterol Hepatol
Tura A, et al. Possible association between hepatitis C virus and mali- 2014;11:28–35.
gnancies different from hepatocellular carcinoma: a systematic review. [41] Ozkok A, Yildiz A. Hepatitis C virus associated glomerulopathies.
World J Gastroenterol 2015;21:12896–953. World J Gastroenterol 2015;20:7544–54.
[17] Mahale P, Torres HA, Kramer JR, Hwang LY, Li R, Brown EL, et al. [42] Zignego AL, Gianini C, Gragnani L. HCV and lymphoproliferation.
Hepatitis C virus infection and the risk of cancer among elderly US Clin Dev Immunol 2012;2012:980942.
adults: a registry-based case-control study. Cancer 2017;123:1202–11. [43] Sabry A, E-Agroudy A, Sheashaa H, El-Husseini A, Mohamed Taha N,
[18] Mills KT, Xu Y, Zhang W, Bundy JD, Chen CS, Kelly TN, et al. A Elbaz M, et al. HCV associated glomerulopathy in Egyptian patients:
systematic analysis of worldwide population- based data on the global clinicopathological analysis. Virology 2005;334:10–6.
burden of chronic kidney disease in 2010. Kidney Int 2015;88:950–7. [44] Wörnle M, Schmid H, Banas B, Merkle M, Henger A, Roeder M, et al.
[19] Fissell RB, Bragg-Gresham JL, Woods JD, Jadoul M, Gillespie B, Hed- Novel role of toll-like receptor 3 in hepatitis C-associated glomerulo-
derwick SA, et al. Patterns of hepatitis C prevalence and seroconversion nephritis. Am J Pathol 2006;168:370–85.
in hemodialysis units from three continents: the DOPPS. Kidney Int [45] Naughton CA. Drug-induced nephrotoxicity. Am Fam Physician
2004;65:2335–42. 2008;78:743–50.
[20] Park H, Adeyemi A, Henry L, Stepanova M, Younossi Z. A meta- ana- [46] Sethi S, Fervenza FC. Membranoproliferative glomerulonephritis: a
lytic assessment of the risk of chronic kidney disease in patients with new look at an old entity. N Engl J Med 2012;366:1119–31.
chronic hepatitis C virus infection. J Viral Hepat 2015;22:897–905. [47] Sansonno D, Gesualdo L, Manno C, Schena FP, Dammacco F. Hepa-
[21] Isnard Bagnis C, Couchoud C, Bowens M, Sarraj A, Deray G, Tourret titis C virus-related proteins in kidney tissue from hepatitis C virus-
J, et al. Epidemiology update for HCV and HBV in ESRD in France infected patients with cryoglobulinemic membranoproliferative glo-
(REIN registry). Liver Int 2017;37:820–6. merulonephritis. Hepatology 1997;25:1237–44.
[22] Sauné K, Kamar N, Miédougé M, Weclawiak H, Dubois M, Izopet J, [48] Fabrizi F, Plaisier E, Saadoun D, Martin P, Messa P, Cacoub P. Hepatitis
et al. Decreased prevalence and incidence of HCV markers in haemo- C virus infection, mixed cryoglobulinemia, and kidney disease. Am J
dialysis units: a multicentric French survey. Nephrol Dial Transplant Kidney Dis 2013;61:623–37.
2011;26:2309–16. [49] Satapathy SK, Lingisetty CS, Williams S. Higher prevalence of chro-
[23] Su FH, Su CT, Chang SN, Chen PC, Sung FC, Lin CC, et al. Association nic kidney disease and shorter renal survival in patients with chronic
of hepatitis C virus infection with risk of ESRD: a population-based hepatitis C virus infection. Hepatol Int 2012;6:369–78.
study. Am J Kidney Dis 2012;60:553–60. [50] Park H, Chen C, Wang W, Henry L, Cook RL, Nelson DR. Chronic
[24] Tarantino A, Campise M, Banfi G, Confalonieri R, Bucci A, Montoli hepatitis C virus (HCV) increases the risk of chronic kidney disease
A, et al. Long-term predictors of survival in essential mixed cryoglo- (CKD) while effective HCV treatment decreases the incidence of CKD.
bulinemic glomerulonephritis. Kidney Int 1995;47:618–23. Hepatology 2017;67:492–504.
[51] Molnar MZ, Alhourani HM, Wall BM, Lu JL, Streja E, Kalantar-Zadeh
[25] Li L, Chang A, Rostand SG, Hebert L, Appel LJ, Astor BC, et al. A
K, et al. Association of hepatitis C viral infection with incidence and
within-patient analysis for time-varying risk factors of CKD progres-
progression of chronic kidney disease in a large cohort of US veterans.
sion. J Am Soc Nephrol 2014;25:606–13.
Hepatology 2015;61:1495–502.
[26] Lee MH, Yang HI, Lu SN, Jen CL, You SL, Wang LY, et al. Chronic
[52] Fontaine H, Thervet E, Bonnemains V, Alric L, Boffa JJ, Mathurin
hepatitis C virus infection increases mortality from hepatic and extra-
P, et al. Cross-sectional study of chronic kidney disease prevalence
hepatic diseases: a community-based long-term prospective study. J
in association with monoinfected patients hepatitis C virus in ANRS
Infect Dis 2012;206:469–77.
CO-22 Hepather cohort. [abstract 798]. Hepatology 2016;64:393.
[27] Pol S, Debure A, Degott C, Carnot F, Legendre C, Brechot C, et al.
[53] Negro F, Forton D, Craxì A, Sulkowski MS, Feld JJ, Manns MP.
Chronic hepatitis in kidney allograft recipients. Lancet 1990;335:
Extrahepatic morbidity and mortality of chronic hepatitis C. Gastroen-
878–80.
terology 2015;149:1345–60.
[28] Bruchfeld A, Wilczek H, Elinder CG. Hepatitis C infection, time in [54] Hwang JC, Jiang MY, Lu YH, Weng SF. Impact of HCV infection
renal-replacement therapy, and outcome after kidney transplantation. on diabetes patients for the risk of end-stage renal failure. Medicine
Transplantation 2004;78:745–50. 2016;95:e2431.
[29] Scott DR, Wong JK, Spicer TS, Dent H, Mensah FK, McDonald S, et al. [55] Cosconea S, Fontaine H, Méritet J-Fo, Corouge M, Sogni P, Vallet-
Adverse impact of hepatitis C virus infection on renal replacement Pichard A, et al. Benefits associated with antiviral treatment in kidney
therapy and renal transplant patients in Australia and New Zealand. allograft recipients with hepatitis B chronic infection. J Hepatol
Transplantation 2010;90:1165–71. 2012;57:55–60.
[30] Fabrizi F, Martin P, Dixit V, Bunnapradist S, Dulai G. Hepatitis C virus [56] Fontaine H, Chaix ML, Lagneau JL, Bréchot C, Pol S. Recovery from
antibody status and survival after renal transplantation: meta-analysis chronic hepatitis C in long-term responders to ribavirin plus interferon
of observational studies. Am J Transplant 2005;5:1452–61. alfa. Lancet 2000;356:41.
[31] AASLD-IDSA. HCV guidance: recommendations for testing, mana- [57] Pol S, Carnot F, Nalpas B, Lagneau JL, Fontaine H, Serpaggi J. Rever-
ging, and treating hepatitis C. HCV Guidelines http://www. sibility of hepatitis C virus-related cirrhosis. Hum Pathol 2004;35:
hcvguidelines.org. 2017. 107–12.
[32] European Association for the Study of the Liver. EASL recommenda- [58] Hermine O, Lefrère F, Bronowicki JP, Mariette X, Jondeau K,
tions on treatment of hepatitis C 2016. J Hepatol 2017;66:153–94. Eclache-Saudreau V, et al. Regression of splenic lymphoma with lym-
[33] Jadoul M, Berenguer MC, Doss W, Fabrizi F, Izopet J, Jha V, et al. phocytes after treatment of hepatitis C virus infection. N Engl J Med
Executive summary of the 2018 KDIGO hepatitis C in CKD guide- 2002;347:89–94.
line: welcoming advances in evaluation and management. Kidney Int [59] Cacoub P, Desbois AC, Comarmond C, Saadoun D. Impact of sustai-
2018;94:663–73. ned virological response on the extrahepatic manifestations of chronic
[34] Hsu YC, Ho HJ, Huang YT, Wang HH, Wu MS, Lin JT, et al. Associa- hepatitis C: a meta-analysis. Gut 2018;67:2025–34.
tion between antiviral treatment and extrahepatic outcomes in patients [60] Boerekamps A, van den Berk GE, Lauw FN, Leyten EM, van Kasteren
with hepatitis C virus infection. Gut 2015;64:495–503. ME, van Eeden A, et al. Declining hepatitis C virus (HCV) incidence
[35] Jadoul M. Transmission routes of HCV infection in dialysis. Nephrol in Dutch human immunodeficiency virus-positive men who have sex
Dial Transplant 1996;11:36–8. with men after unrestricted access to HCV therapy. Clin Infect Dis
[36] Goodkin DA, Bieber B. International prevalence of hepatitis C positi- 2018;66:1360–5.
vity among hemodialysis patients awaiting transplantation. Kidney Int [61] Simmons B, Saleem J, Hill A, Riley RD, Cooke GS. Risk of late relapse
2018;93:1249. or reinfection with hepatitis C virus after achieving a sustained virolo-
[37] Goodkin DA, Bieber B, Jadoul M, Martin P, Kanda E, Pisoni RL. Mor- gical response: a systematic review and meta-analysis. Clin Infect Dis
tality, hospitalization, and quality of life among patients with hepatitis 2016;62:683–94.
C infection on hemodialysis. Clin J Am Soc Nephrol 2015;12:287–97. [62] Nahon P, Bourcier V, Layese R, Audureau E, Cagnot C, Marcellin P,
[38] Baid-Agrawal S, Schindler R, Reinke P, Staedtler A, Rimpler S, Malik et al. Eradication of hepatitis C virus infection in patients with cirrhosis
B. Prevalence of occult hepatitis C infection in chronic hemodialysis reduces risk of liver and non-liver complications. Gastroenterology
and kidney transplant patients. J Hepatol 2014;60:928–33. 2017;152:142–56.

10 EMC - Néphrologie
Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C  18-061-C-10

[63] Ioannou GN, Green PK, Berry K. HCV eradication induced by direct- [83] Gane E, Sola R, Cohen E, Roberts SK, George J, Skoien R,
acting antiviral agents reduces the risk of hepatocellular carcinoma. J et al. RUBY- II: efficacy and safety of a ribavirin- free ombitas-
Hepatol 2017;68:25–32. vir/paritaprevir/ritonavir ± dasabuvir regimen in patients with severe
[64] Mallet V, Gilgenkrantz H, Serpaggi J, Verkarre V, Vallet-Pichard A, renal impairment or end-stage renal disease and HCV genotype 1a or
Fontaine H, et al. Brief communication: the relationship of regres- 4 infection. Presented at the 2016 AASLD Meeting in Boston, USA
sion of cirrhosis to outcome in chronic hepatitis C. Ann Intern Med (11-15 November 2016).
2008;149:399–403. [84] Gane E, Lawitz E, Pugatch D, Papatheodoridis G, Bräu N, Brown A,
[65] Söderholm J, Millbourn C, Büsch K, Kövamees J, Schvarcz R, Lindahl et al. Glecaprevir and pibrentasvir in patients with HCV and severe
K, et al. Higher risk of renal disease in chronic hepatitis C patients: renal impairment. N Engl J Med 2017;377:1448–55.
antiviral therapy survival benefit in patients on hemodialysis. J Hepatol [85] Persico M, Flisiak R, Abunimeh M, Sise M, Park JY, Kaskas M,
2018;68:904–11. et al. Efficacy and safety of glecaprevir/pibrentasvir in renally-impaired
[66] Carrat F, Fontaine H, Dorival C, Simony M, Diallo A, Hezode C, patients with chronic hepatitis C virus genotype 1-6 infection. [Abstract
et al. Clinical outcomes in patients with chronic hepatitis C follo- THU-363]. J Hepatol 2018;68:S292.
wing direct-acting antiviral therapy: a prospective cohort study. Lancet [86] Puoti M, Foster GR, Wang S, Mutimer D, Gane E, Moreno C, et al. High
2019;393:1453–64. SVR12 with 8-week and 12-week glecaprevir/pibrentasvir therapy: an
[67] Bruchfeld A, Roth D, Martin P, Nelson DR, Pol S, Londoño MC, integrated analysis of HCV genotype 1-6 patients without cirrhosis. J
et al. Elbasvir plus grazoprevir in patients with hepatitis C virus infec- Hepatol 2018;69:293–300.
tion and stage 4-5 chronic kidney disease: clinical, virological, and [87] Pol S. Safety and efficacy of glecaprevir/pibrentasvir in adults with
health-related quality-of-life outcomes from a phase 3, multicentre, chronic hepatitis C virus infection genotype 1-6 and chronic kid-
randomised, double-blind, placebo controlled trial. Lancet Gastroen- ney disease: an integrated analysis. [Abstract SAT-273]. J Hepatol
terol Hepatol 2017;2:585–94. 2018;66:S738.
[68] Liang TJ, Ghany MG. Therapy of hepatitis C: back to the future. N [88] Reddy KR, Roth D, Bruchfeld A, Hwang P, Haber B, Robertson MN,
Engl J Med 2014;370:2043–7. et al. Elbasvir/grazoprevir does not worsen renal function in patients
[69] Pawlotsky JM, Feld JJ, Zeuzem S, Hoofnagle JH. From non-A, non-B with hepatitis C virus infection and pre-existing renal disease. Hepatol
hepatitis to hepatitis C virus cure. Hepatology 2015;62:S87–99. Res 2017;47:1340–5.
[70] Roth D, Nelson DR, Bruchfeld A, Liapakis A, Silva M, Monsour Jr [89] Reau N, Kwo PY, Rhee S, Brown Jr RS, Agarwal K, Angus P, et al.
H, et al. Grazoprevir plus elbasvir in treatment naive and treatment- Glecaprevir/pibrentasvir treatment in liver or kidney transplant patients
experienced patients with hepatitis C virus genotype 1 infection and with hepatitis C virus infection. Hepatology 2018;68:1298–307.
stage 4-5 chronic kidney disease (the C- SURFER study): a combina- [90] Maan R, Al Marzooqi SH, Klair JS, Karkada J, Cerocchi O, Kowgier
tion phase 3 study. Lancet 2015;386:1537–45. M, et al. The frequency of acute kidney injury in patients with chro-
[71] Pockros PJ, Reddy KR, Mantry PS, Cohen E, Bennett M, Sulkowski nic hepatitis C virus infection treated with sofosbuvir-based regimens.
MS, et al. Efficacy of direct- acting antiviral combination for patients Aliment Pharmacol Ther 2017;46:46–55.
with hepatitis C virus genotype 1 infection and severe renal impairment [91] Sise ME, Backman E, Ortiz GA, Hundemer GL, Ufere NN, Chute
or end-stage renal disease. Gastroenterology 2016;150:1590–8. DF, et al. Effect of sofosbuvir-based hepatitis C virus therapy on
kidney function in patients with CKD. Clin J Am Soc Nephrol
[72] McHutchison JG, Lawitz EJ, Shiffman ML, Muir AJ, Galler GW,
2017;12:1615–23.
McCone J, et al. Peginterferon alfa-2b or alfa-2a with ribavirin for
[92] Li T, Qu Y, Guo Y, Wang Y, Wang L. Efficacy and safety of direct-
treatment of hepatitis C infection. N Engl J Med 2009;361:580–93.
acting antivirals-based antiviral therapies for hepatitis C virus patients
[73] Manns MP, McHutchison JG, Gordon SC, Rustgi VK, Shiffman M,
with stage 4-5 chronic kidney disease: a meta-analysis. Liver Int
Reindollar R, et al. Peginterferon alfa-2b plus ribavirin compared with
2017;37:974–81.
interferon alfa-2b plus ribavirin for initial treatment of chronic hepatitis
[93] Kumar M, Nayak SL, Gupta E, Kataria A, Sarin SK. Generic sofosbuvir
C: a randomized trial. Lancet 2001;358:958–65.
based direct-acting antivirals in hepatitis C virus infected patients with
[74] Zeuzem S, Foster GR, Wang S, Asatryan A, Gane E, Feld JJ, et al. chronic kidney disease. Liver Int 2018;38:2137–48.
Glecaprevir-pibrentasvir for 8 or 12 weeks in HCV genotype 1 or 3 [94] Gilead Sciences Inc. Sovaldi [package insert]. Gilead. Com http://
infection. N Engl J Med 2018;378:354–69. www.gilead.com/∼/media/Files/pdfs/medicines/liver-disease/
[75] Jacobson IM, Lawitz E, Gane EJ, Willems BE, Ruane PJ, Nahass RG, sovaldi/sovaldi pi.pdf. 2017.
et al. Efficacy of 8 weeks of sofosbuvir, velpatasvir, and voxilaprevir [95] Mallet V, Parlati L, Dorval O, Kramer L, Hervann A, Laurain A, et al.
in patients with chronic HCV infection: 2 phase 3 randomized trials. Estimated glomerular filtration rate variations and direct acting anti-
Gastroenterology 2017;153:113–22. virals treatment for chronic hepatitis C: a retrospective longitudinal
[76] Kwo PY, Poordad F, Asatryan A, Wang S, Wyles DL, Hassanein T, study. J Hepatol 2018;68:S22.
et al. High SVR rates upon 8- or 12-week treatment with glecaprevir [96] Bourlière M, Gordon SC, Flamm SL, Cooper CL, Ramji A, Tong M,
and pibrentasvir in patients with chronic HCV genotype 1-6 infection et al. Sofosbuvir, velpatasvir, and voxilaprevir for previously treated
without cirrhosis. J Hepatol 2017;67:263–71. HCV infection. N Engl J Med 2017;376:2134–46.
[77] Gane E, Robson R, Bonacini M, Maliakkal B, Kirby B, Liu L, et al. [97] Coppola N, Portunato F, Buonoma A, Staiano L, Scotto R, Pinchera
Safety, and anti- viral efficacy and pharmacokinetics (PK) of sofos- B, et al. Interferon-free regimens improve kidney function in patients
buvir (SOF) in patients with severe renal impairment. [Abstract 966]. with chronic hepatitis infection. J Nephrol 2019 [Epub ahead of print].
Hepatology 2014;60(Suppl.):133A. [98] Aby ES, Dong TS, Kawamoto J, Pisegna JR, Benhammou JN. Impact
[78] Saxena V, Khungar V, Verna EC, Levitsky J, Brown Jr RS, Hassan MA, of of sustained virologic response on chronic kidney disease progres-
et al. Safety and efficacy of current direct-acting antiviral regimens in sion in hepatitis C. World J Hepatol 2017;9:1352–60.
kidney and liver transplant recipients with hepatitis C: results from the [99] Butt AA, Ren Y, Puenpatom A, Arduino JM, Kumar R, Abou-Samra
HCVTARGET study. Hepatology 2017;66:1090–101. AB. HCV treatment initiation in persons with chronic kidney disease
[79] Desnoyer A, Pospai D, Lê MP, Gervais A, Heurgué-Berlot A, Laradi A, in the directly acting antiviral agents era: results from ERCHIVES.
et al. Pharmacokinetics, safety and efficacy of a full dose sofosbuvir- Liver Int 2018;38:1411–7.
based regimen given daily in hemodialysis patients with chronic [100] Mehta DA, Cohen E, Charafeddine M, Cohen DE3 Bao Y, Sanchez
hepatitis C. J Hepatol 2016;65:40–7. Gonzalez Y, et al. Effect of hepatitis C treatment with ombitas-
[80] Kamar N, Marion O, Rostaing L, Cointault O, Ribes D, Lavayssière L, vir/paritaprevir/R + dasabuvir on renal, cardiovascular and metabolic
et al. Efficacy and safety of sofosbuvir based antiviral therapy to treat extrahepatic manifestations: a post-hoc analysis of phase 3 clinical
hepatitis C virus infection after kidney transplantation. Am J Transplant trials. Infect Dis Ther 2017;6:515–29.
2016;16:1474–9. [101] Ho ES, Lin DC, Mendel DB, Cihlar T. Cytotoxicity of antiviral nucleo-
[81] Fernández I, Muñoz-Gómez R, Pascasio JM, Baliellas C, Polanco N, tides adefovir and cidofovir is induced by the expression of human renal
Esforzado N, et al. Efficacy and tolerability of interferon-free antivi- organic anion transporter 1. J Am Soc Nephrol 2000;11:383–93.
ral therapy in kidney transplant recipients with chronic hepatitis C. J [102] Kohler JJ, Hosseini SH, Green E, Abuin A, Ludaway T, Russ R, et al.
Hepatol 2017;66:718–23. Tenofovir renal proximal tubular toxicity is regulated by OAT1 and
[82] Colombo M, Aghemo A, Liu H, Zhang J, Dvory-Sobol H, Hyland MRP4 transporters. Lab Invest 2011;91:852–8.
R, et al. Treatment with ledipasvir-sofosbuvir for 12 or 24 weeks [103] Strazzulla A, Coppolino G, Barreca GS, Gentile I, Rivoli L, Post-
in kidney transplant recipients with chronic hepatitis C virus geno- orino MC, et al. Evolution of glomerular filtration rates and neutrophil
type 1 or 4 infection: a randomized trial. Ann Intern Med 2017;166: gelatinase-associated lipocalin during treatment with direct acting anti-
109–17. virals. Clin Mol Hepatol 2018;24:151–62.

EMC - Néphrologie 11
18-061-C-10  Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C

[104] Saitta C, Pontisso P, Brunetto MR, Fargion S, Gaeta GB, Niro GA, [111] Jadoul M, Horsmans Y. Towards eradication of hepatitis C virus from
et al. Virological profiles in hepatitis B virus/hepatitis C virus coin- dialysis units. Lancet 2015;386:1514–5.
fected patients under interferon plus ribavirin therapy. Antivir Ther [112] Jadoul M. The prevention of hepatitis C virus transmission to hemo-
2006;11:931–4. dialysis patients and staff members. Hemodial Int 2018;22:S104–9.
[105] Bersoff-Macha SJ, Cao K, Jason M, Ajao A, Jones SC, Meyer T, [113] O’Shaughnessy MM, O’Regan JA, Murray FE, Connell JA, Duffy
et al. Hepatitis B reactivation associated with direct acting Antivi- MP, Francis VM, et al. Re-infection following sustained virological
ral therapy for hepatitis C: a review of spontaneous post-marketing response with a different hepatitis C virus genotype: implications for
cases. AASLD The Liver meeting 2016. Hepatology 2016 [Abstract infection control policy. Clin Kidney J 2012;5:250–3.
LB17]. [114] US Department of Health & Human Services. Organ procurement and
[106] Londoño MC, Lens S, Mariño Z, Bonacci MS, Pla A, Bartres C, et al. transplantation network. HRSA.gov https://optn.transplant.hrsa.gov/.
Hepatitis B (HBV) reactivation during anti-hepatitis C (HCV) therapy 2018.
with interferon (IFN)-free regimens: a prospective study. AASLD the [115] Haute Autorité de santé. HAS homepage [French]. HAS https://
Liver meeting 2016. Hepatology [Abstract 596]. www.has-sante.fr/. 2018.
[107] Wang C, Ji D, Chen J, Liu H, Jun G, Zhang XY, Shao Q, et al. Hepatitis [116] Roth D, Ladino M. Transplantation of kidneys from HCV-positive
due to HBV reactivation in chronic hepatitis B and C co-infected Chi- donors: how to best use a scarce resource. J Am Soc Nephrol
nese treated with direct acting antivirals. AASLD the Liver meeting 2017;28:3139–41.
2016. Hepatology [Abstract 1459]. [117] Gupta G, Kang L, Yu JW, Limkemann AJ, Garcia V, Bandyopadhyay
[108] Lazarus JV, Wiktor S, Colombo M, Thursz M, EASL International D, et al. Long-term outcomes and transmission rates in hepatitis C
Liver Foundation. Micro-elimination: a path to global elimination of virus-positive donor to hepatitis C virus-negative kidney transplant
hepatitis C. J Hepatol 2017;67:665–6. recipients: analysis of United States national data. Clin Transplant
[109] Razavi H, Robbins S, Zeuzem S, Negro F, Buti M, Duberg AS, 2017;31:e13055.
et al. Hepatitis C virus prevalence and level of intervention requi- [118] Reese PP, Abt PL, Blumberg EA, Van Deerlin VM, Bloom RD,
red to achieve the WHO targets for elimination in the European Potluri VS, et al. Twelve-month outcomes after transplant of hepa-
Union by 2030: a modelling study. Lancet Gastroenterol Hepatol titis C-infected kidneys into uninfected recipients. Ann Intern Med
2017;2:325–36. 2018;169:273–81.
[110] de Franchis R, Baveno VI Faculty. Expanding consensus in portal [119] Durand C, Brown D, Wesson R, Bhair N, Naqvi F. EXPANDER-
hypertension: report of the Baveno VI consensus workshop: strati- 1: exploring renal transplants using hepatitis-C infected donors
fying risk and individualizing care for portal hypertension. J Hepatol for HCVnegative recipients [abstract 2]. Am J Transplant
2015;63:743–52. 2017;17(Suppl.3):207.

S. Pol, MD, PhD (stanislas.pol@aphp.fr).


L. Parlati.
Département d’hépatologie, Hôpital Cochin, AP–HP, Inserm U1223, UMS-20, Université Paris-Descartes, Institut Pasteur, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques,
75679 Paris cedex 14, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Pol S, Parlati L. Rein et infection chronique par le virus de l’hépatite C. EMC - Néphrologie 2020;32(1):1-12
[Article 18-061-C-10].

Disponibles sur www.em-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos/ Documents Information Informations Auto- Cas
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations clinique

12 EMC - Néphrologie
 18-064-O-10

Cystinose
G. Deschênes, A. Bertholet-Thomas

Résumé : La cystinose est une maladie lysosomiale marquée par une accumulation lysosomiale de cystine.
La cause de la maladie est une mutation du gène codant la cystinosine, qui a pour fonction le transport
transmembranaire de la cystine. Elle débute par une atteinte rénale précoce au cours de la première
année de vie sous la forme d’une insuffisance tubulaire proximale ou syndrome de Fanconi. Le syndrome
de Fanconi est responsable des principaux signes d’appel : retard de croissance staturale et rachitisme
vitaminorésistant. Le diagnostic repose sur la présence de cristaux de cystine dans la cornée, sur le taux
élevé de la cystine intraleucocytaire et sur la mise en évidence de la mutation du gène de la cystinosine.
La progression vers l’insuffisance rénale terminale est inéluctable, le plus souvent avant l’âge de 20
ans. La maladie systémique est plus lentement progressive, mais touche tous les organes. Les atteintes
endocriniennes sont les plus précoces : insuffisance thyroïdienne et diabète insulinoprive. La maladie
neuromusculaire est la plus tardive mais est à l’origine d’une limitation ou d’une perte de l’autonomie
motrice. Le traitement spécifique repose sur la cystéamine comportant un groupement thiol capable
de réduire le pont disulfure de la cystine et de la rompre en deux cystéines. Le traitement est d’autant
plus efficace sur la progression de la maladie rénale et l’apparition des atteintes d’organes qu’il a été
commencé plus tôt dans la vie. L’atteinte cornéenne n’est pas influencée par le traitement oral, mais par
l’instillation pluriquotidienne d’un collyre à la cystéamine.
© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Syndrome de Fanconi ; Maladie rénale chronique ; Cystéamine ; Malvoyance ; Myopathie ; Diabète ;
Infertilité ; Insuffisance thyroïdienne

Plan ■ Traitement 8
Syndrome de Fanconi : syndrome de perte de sel et équilibre
■ Introduction 1 acidobasique 8
Syndrome de Fanconi : phosphates et vitamine D 9
■ Modes de présentation 2 Syndrome de Fanconi : L-carnitine 10
Syndrome de Fanconi 2 Gastrostomie 10
Retard de croissance statural 3 Hormone de croissance 10
Rachitisme hypophosphatémique 3 Traitement systémique par la cystéamine 10
Anorexie, vomissements, déshydratation extracellulaire 4 Collyre 11
Atteinte cornéenne 4 Greffe rénale 11
■ Évolution et progression de la maladie 4 Traitements des atteintes extrarénales 11
Maladie rénale chronique 4 Transition enfant–adulte 11
Retard de croissance 5 Prise en charge dans les pays émergents 11
Maladie osseuse 5 ■ Conclusion 11
Atteinte ophtalmologique 5
Atteinte pancréatique 5
Atteinte thyroïdienne 5
Hypogonadisme et infertilité 5
Atteinte neuromusculaire 6  Introduction
Calcifications vasculaires 8

La cystinose (ORPHA 213, OMIM 219800) est une maladie géné-
Diagnostic 8
tique rare de transmission autosomique récessive caractérisée par
Diagnostic clinique 8
une accumulation progressive de cystine dans les lysosomes de
Cystine intraleucocytaire 8
toutes les cellules de l’organisme. Le gène CTNS code la cystino-
Génétique moléculaire 8
sine qui est le transporteur de cystine et qui permet son évacuation
Diagnostic différentiel 8
hors des lysosomes. C’est une maladie progressive qui touche tous

EMC - Néphrologie 1
Volume 32 > n◦ 1 > janvier 2020
http://dx.doi.org/10.1016/S1762-0945(19)51026-9
18-064-O-10  Cystinose

les organes [1] . L’incidence de la cystinose est estimée à environ tation extracellulaire chronique [8] . Il n’y a pas de signes cliniques
1/200 000 naissances vivantes, soit quatre ou cinq nouveaux cas spécifiques de la déplétion sodée chronique, et ils se limitent à une
par an en France. tachycardie modérée et un pincement de la pression artérielle.
Dans la forme infantile classique, l’atteinte rénale est généra- Elle expose aux accidents graves de déshydratation extracellu-
lement précoce, dès les premiers mois de vie. La cystinose est laire aiguë en cas de gastroentérite aiguë infectieuse et de pertes
effectivement la première cause de syndrome de Fanconi chez le digestives de sodium. Ces accidents sont parfois compliqués de
nourrisson. La néphropathie de la cystinose progresse systémati- collapsus cardiovasculaire et peuvent menacer la vie des malades
quement vers l’insuffisance rénale chronique. En plus de l’atteinte dans la première enfance. La déplétion sodée est aussi un des deux
rénale, la cystinose touche successivement les yeux, la thyroïde, le facteurs déterminants dans l’insuffisance de croissance staturale
pancréas endocrine, les organes génitaux internes, l’appareil res- dès le quatrième ou le sixième mois de vie. Les signes biologiques
piratoire, les muscles et le système nerveux central. Un très petit consistent en une élévation de la protidémie plasmatique et de
nombre de malades ont une forme juvénile dont le diagnostic est l’hématocrite, une élévation des concentrations circulantes de
fait à l’adolescence et qui évolue beaucoup plus lentement. Enfin, rénine et d’aldostérone. Il est important de comprendre que la
quelques malades n’ont pas de maladie rénale apparente et sont natrémie est souvent normale car la perte urinaire de sodium est
diagnostiqués à l’âge adulte sur l’atteinte ophtalmologique [2] . iso-osmotique au liquide extracellulaire.
Le traitement spécifique repose sur l’utilisation de la cystéamine
qui permet de dériver la cystine intralysosomiale vers le trans-
porteur de la lysine. Le traitement symptomatique du syndrome
Acidose métabolique
de Fanconi et des différentes atteintes d’organes est un fardeau Elle est générée par le défaut de sécrétion des ions hydrogènes
pour les malades et les familles par la multiplication exception- et le défaut associé de réabsorption des bicarbonates par le tube
nelle des médicaments nécessaire pour équilibrer la maladie. La contourné proximal, qui n’est pas suffisamment compensé par
néphropathie de la cystinose ne récidive pas après la greffe de la sécrétion distale d’ion hydrogène [9] . C’est également un para-
rein [3] . mètre qui peut décompenser en cas de diarrhée aiguë. C’est aussi le
deuxième facteur majeur de l’insuffisance de croissance staturale.

 Modes de présentation Déplétion potassique


Syndrome de Fanconi Les mécanismes moléculaires du transport et de la réabsorption
du potassium au niveau de la cellule proximale sont imparfaite-
Physiopathologie ment connus [10] . Ils dépendent étroitement de la sécrétion d’ion
Il est l’expression clinique et biologique d’une insuffisance hydrogène qui génère un potentiel favorable dans les dernières
tubulaire proximale. Le phénomène biologique le plus évident convolutions du tubule proximal et paraissent complètement
est la déplétion en adénosine triphosphate et l’altération du indépendants de la réabsorption du sodium. Il est également pos-
fonctionnement de la pompe à sodium dans la cellule tubulaire sible que l’activation du canal collecteur cortical par l’aldostérone,
proximale [4] . L’irréversibilité du syndrome de Fanconi est liée à secondaire à la déshydratation chronique, contribue à la perte de
l’apoptose progressive des cellules tubulaires proximales du glo- potassium comme dans les syndromes de Bartter [11] . Elle est aggra-
mérule vers l’anse de Henle [5] . La cellule du tube contourné vée par les vomissements et expose à des troubles de la conduction
proximal a quatre fonctions principales [6] (Fig. 1) : cardiaque qui peuvent menacer la vie des malades [12] . Elle parti-
• la réabsorption d’environ 60 % de l’eau et des solutés filtrés par cipe également à la faiblesse musculaire.
le glomérule ;
• la sécrétion des ions hydrogènes ;
Déplétion en phosphates
• la transcytose des protéines qui ont été filtrées dans l’urine pri-
mitive ; Elle est directement liée au défaut de réabsorption des phos-
• l’hydroxylation en 1 de la vitamine D. phates par la cellule tubulaire proximale, mais aussi à un défaut
En conséquence, une dysfonction tubulaire proximale conduit d’absorption intestinale lié au déficit en vitamine D active. Elle
à une fuite urinaire massive des principaux solutés minéraux nor- est associée à un abaissement réactionnel du niveau plasmatique
malement réabsorbés par le tube contourné proximal : sodium, de l’hormone parathyroïdienne (PTH) et du fibroblast growth factor
potassium, bicarbonates, calcium et phosphates. Les solutés orga- 23 (FGF-23) qui est un moyen de l’évaluer [13] . Elle est participe à
niques comme les acides aminés, l’acide urique, le glucose, les la constitution du rachitisme [14] et a un impact important sur la
protéines, sont également concernés par l’altération des méca- force musculaire [15] .
nismes spécifiques de leur réabsorption dans le tube contourné
proximal. Le syndrome de Fanconi est par conséquent défini par
Déplétion en calcium
une association complexe d’un syndrome de perte de sel, d’une
acidose métabolique, d’une déplétion potassique, d’une déplétion Elle est secondaire aux pertes rénales et à une absorption
en phosphates et d’un défaut d’hydroxylation de la vitamine D digestive diminuée par le défaut de vitamine B active. Elle est
responsables d’un rachitisme « vitaminorésistant », d’une hyper- responsable d’une stimulation de la résorption osseuse et de
calciurie, d’une aminoacidurie, d’une glycosurie orthoglycémique l’ostéopénie qui en résulte [16] .
et d’une protéinurie [7] . Dans la forme « infantile » classique, le
syndrome de Fanconi est précoce et son début est marqué par une Autres solutés
polyurie qui conduit à un diagnostic entre 6 et 18 mois de vie.
Le syndrome de Fanconi est également caractérisé par une
glucosurie orthoglycémique, une aminoacidurie supérieure à
Syndrome de perte de sel 1200 nmol/␮mol de créatinine urinaire et une augmentation de
Le syndrome de perte de sel aboutit à une déplétion sodée, à une la fraction d’excrétion de l’acide urique parfois responsable d’une
contraction du volume extracellulaire (Fig. 2) et à une déshydra- hypo-uricémie très marquée, inférieure à 100 ␮mol/l [7] .

Formes tardives à début « juvénile »


“ Point fort Le syndrome de Fanconi est parfois très modéré et sans tra-
duction clinique évidente. Le diagnostic de la maladie est fait
sur des examens biologiques systématiques à l’adolescence ou
La cystinose est la première cause de syndrome de Fanconi chez le jeune adulte [17] . Ces formes sont lentement progressives
avant l’âge de 5 ans. et l’insuffisance rénale terminale est plus tardive, souvent bien
au-delà de l’âge de 20 ans [17] .

2 EMC - Néphrologie
Cystinose  18-064-O-10

Interstitium-sang
Pôle basolatéral FGF23 protéines
& Klotho Na HCO3
O2 3 Na+
Pompe à sodium Na-bicarbonates

Vésicule
2 K+ exocytose
ADP Lysosome
OCRL1
ATP
25-hydroxycholecalciferol H+ + HCO3 CTNS
(25-hydroxy vitamine D3)

H2O
OH

cystine
In Kidney
HO
Car2
1,25 dihydroxycholecalciferol
Glucose

(1,25-dihydroxy vitamine D3)

OH

Active form
CO2 ClC5

HO OH Na Vésicule
+ H2O Cl- endocytose
AQP1
Car4, Car14 mégaline-cubuline
Na-Glucose

Na-Acides organiques
NPT2a

Échangeur Na-proton
+
H & récepteur FcRN

Na-Acides aminés
NPT2c
GLUT2

CO2 + H2O protéinurie


Urine H+ + HCO3
Pôle apical

Figure 1. Cellule tubulaire proximale. La cellule tubulaire proximale est la cible la plus précoce de la cystinose dans les formes infantiles classiques. C’est
une cellule à tout faire dont le fonctionnement est particulièrement complexe. Elle assure 60 % de la réabsorption tubulaire totale des solutés qui ont été
filtrés avec les 150 l/j de plasma. De gauche à droite de la figure : 1 : le système de réabsorption des solutés est animé par le couple mitochondrie–pompe
à sodium (en bleu-rouge-violet). Le glucose contenu dans l’urine tubulaire est absorbé par la cellule tubulaire proximale par un facilitateur du transfert
du glucose (GLUT2) et par le cotransporteur sodium-glucose (Na-glucose) ; il sert à alimenter la mitochondrie dont le fonctionnement aérobie permet de
transformer le glucose en métabolites énergétiques (ATP : adénosine triphosphate). L’énergie contenue dans le phosphate ␥ de l’ATP est consommée et
convertie par la pompe à sodium à la face basale (côté interstitiel) de la cellule pour générer le transport de sodium du cytoplasme dans le compartiment
interstitiel contre un gradient de concentration (145 mmol dans l’interstitium et 10 mmol dans le cytoplasme). Le transport croisé de deux potassium
contre trois sodium est générateur d’une différence de potentiel selon le principe de Nernst (troisième principe de thermodynamique) ; 2 : le système de
réabsorption active du sodium au pôle basal entraîne toute une série de cotransporteurs sodium au pôle apical (côté urine) : le cotransporteur sodium-glucose
qui alimente la machinerie énergétique de la mitochondrie, les cotransporteurs sodium-acides qui réabsorbent les acides organiques et les acides aminés,
ainsi que les cotransporteurs sodium-phosphate (NPT2a et NPT2c) dont l’expression est régulée et inhibée par le signal Klotho-FGF23 (fibroblast growth factor
23, l’hormone phosphaturiante, en gris) et à la parathormone. Le signal Klotho-FGF23 contrôle également négativement l’hydroxylation de la vitamine D en
position 1␣ ; 3 : la réabsorption active du sodium entraîne également l’échangeur sodium-hydrogène au pôle apical qui est ainsi responsable de la sécrétion
acide d’hydrogène (en noir au milieu de la cellule). L’hydrogène tamponne les bicarbonates urinaires en équilibre avec l’acide carbonique et le gaz carbonique
(CO2 ) par l’intermédiaire des anhydrases carboniques de surface (Car-4 et car-14). Le CO2 diffuse à travers la membrane plasmique et alimente l’anhydrase
carbonique 2 (Car-2) intracellulaire qui remet en équilibre l’acide carbonique et les bicarbonates. Les bicarbonates sont réabsorbés à la face basale de la cellule
par le cotransporteur sodium-bicarbonates en profitant de la différence de potentiel transmembranaire générée par la pompe à sodium ; 4 : la surface apicale
urinaire de la cellule tubulaire proximale exprime le couple mégaline-cubuline et le récepteur néonatal des immunoglobulines (qui est le même que celui
exprimé par le placenta pour transférer les immunoglobulines maternelles dans la circulation fœtale) qui sont de véritables récepteurs à protéines aptes à
récupérer les protéines filtrées par la paroi glomérulaire et à les transférer dans une vésicule d’endocytose à l’intérieur de la cellule. L’acidification des vésicules
d’endocytose par l’échangeur chlore-hydrogène ClC5 permet de décoller les protéines de leur récepteur. Elles sont dégradées dans les structures lysosomales
ou rejetées intactes dans l’interstitium par une vésicule d’exocytose née du bourgeonnement de l’appareil de Golgi et du système de trafic cellulaire ; 5 : les
aquaporines 1 et 3 assurent la perméabilité transcellulaire à l’eau et l’équilibre osmotique des transferts de solutés.

Retard de croissance statural chondroblastes et l’élongation du cartilage de croissance, mais la


cystéamine n’a pas nécessairement un effet majeur sur la crois-
Il est précoce, avec une cassure de la courbe de taille dès les sance en taille des malades [16] .
premiers mois de vie [18, 19] . Il est principalement lié à la déplé-
tion sodée chronique du syndrome de Fanconi, à la contraction
du volume extracellulaire qui lui est conséquente et à l’acidose Rachitisme hypophosphatémique
métabolique qui jouent un rôle majeur. La malnutrition systéma-
tiquement présente chez ces enfants est un facteur ajouté qui ne C’est un mode de présentation classique et plus tardif lorsque
doit pas être négligé. La modification du métabolisme des pro- le syndrome de Fanconi et la polyurie sont modérés, et passent
téines IGF-BP explique l’intérêt de discuter une supplémentation inaperçus dans la petite enfance. Les signes de rachitisme sont
en hormone de croissance après l’âge de 2 ans [20] . Il est également dominés par les déformations osseuses et par la résistance au trai-
possible que la cystinose impacte directement la prolifération des tement par la vitamine D native [18] .

EMC - Néphrologie 3
18-064-O-10  Cystinose

• Pincement de la pression artérielle


et tachycardie en cas de déplétion
sodée aiguë (diarrhée et vomissements)
• Hypersécrétion de rénine et d’aldostérone

Na
plasma Concentration du volume
K
plasmatique avec
Masse augmentation de
cellulaire l’hématocrite et des
H2O
interstitium protides totaux
Volume
intracellulaire

Stimulation volémique de l’hormone


antidiurétique : l’excès de réabsorption
d’eau est responsable de l’hyponatrémie
Figure 2. Effet de la déplétion sodée sur le volume extracellulaire. Le sodium alimentaire est complètement absorbé par le tube digestif (physiologiquement,
les matières fécales contiennent très peu de sodium ou n’en contiennent pas) et diffuse dans le fluide extracellulaire où sa concentration est de 145 mmol/l.
Le fluide intracellulaire a une concentration très faible de sodium (10 mmol/l) due à l’activité de la pompe à sodium à la surface de toutes les cellules. En
revanche, le fluide extracellulaire est une solution saline de sodium (principalement de chlorure et de bicarbonates de sodium) dont l’osmolalité est fixée
physiologiquement à 300 mosmol/kg (145 mmol de sodium et 5 mmol de potassium + 100 mmol de chlore, 25 mmol de bicarbonates, 25 mmol de matières
organiques, dont l’urée, le glucose et les acides organiques). La déplétion sodée se traduit par une adaptation du volume d’eau afin de préserver la constance
de l’osmolalité à 300 mosmol, et donc à une contraction du volume de fluide extracellulaire. La contraction du volume extracellulaire se traduit cliniquement
par un pincement de la pression artérielle et biologiquement par une concentration de la phase solide, c’est-à-dire par une élévation de l’hématocrite et des
protides plasmatiques. La contraction du volume extracellulaire génère une cascade d’adaptations secondaires sous la dépendance des voies hormonales.
L’augmentation de la sécrétion de rénine sous l’effet de la réduction de la pression artérielle au niveau de l’appareil juxtaglomérulaire aboutit à la sécrétion
d’angiotensine 2 et d’aldostérone. Ces hormones stimulent la réabsorption du sodium et la sécrétion du potassium dans le canal collecteur. La contraction
du volume de fluide extracellulaire a également un effet stimulant la sécrétion de l’hormone antidiurétique. La réabsorption d’eau dans le canal collecteur est
alors dissociée de la régulation osmolaire, et aboutit à un excès d’eau dans le fluide intracellulaire et extracellulaire avec une hyponatrémie.

Anorexie, vomissements, déshydratation


extracellulaire “ Point fort
Les troubles digestifs sont très fréquents tout au long de
l’évolution de la maladie [21] . Les difficultés alimentaires et les Le moyen le plus rapide et le plus simple de faire le diag-
vomissements sont précoces, et gênent la croissance pondérale nostic est l’examen ophtalmologique quand il objective
dès les premiers mois de la vie. Les épisodes de gastroentérite l’accumulation de cristaux de cystine dans la cornée.
aiguë qui aggravent la déplétion sodée et potassique chroniques
peuvent parfois menacer la vie des malades par l’importance de
la déshydratation extracellulaire [22] et des risques propres de
l’hypokaliémie. La gravité de la déshydratation extracellulaire
alliée à la conservation paradoxale d’un volume de diurèse peut
alerter sur une pathologie rénale et conduire au diagnostic précoce
de la maladie.
“ Point fort
La cystinose est une maladie systémique qui atteint
Atteinte cornéenne l’ensemble des organes et des tissus.
L’atteinte cornéenne est un moyen très simple et immédiate-
ment accessible pour confirmer un diagnostic de cystinose sur la
présence de cristaux (Fig. 3), en particulier en périphérie de la cor-
née au début de la maladie [23] . Un examen négatif n’élimine pas Maladie rénale chronique
formellement le diagnostic, en particulier chez l’enfant de moins
Les malades atteints de la forme infantile classique et de la forme
de 1 ou 2 ans. C’est le mode de découverte classique des rares
juvénile évoluent systématiquement vers l’insuffisance rénale
formes « adulte » de la maladie où le syndrome de Fanconi est
chronique secondaire à une fibrose interstitielle extensive dont
réduit à une expression biologique pure et où l’insuffisance rénale
le mécanisme moléculaire n’est pas connu. Une protéinurie mas-
est retardée [17] .
sive de rang néphrotique peut précéder cette phase et est en
rapport avec des lésions des podocytes [25] . Le délai médian de
l’insuffisance rénale terminale est inférieur à dix ans en l’absence
 Évolution et progression de traitement spécifique alors qu’il est supérieur à 15 ans si les
malades sont traités par cystéamine de manière continue avant
de la maladie l’âge de 2,5 ans. Le pronostic de fonction rénale est dépendant
de la précocité de la mise en place du traitement par cystéamine
La cystinose est une maladie systémique et progressive cau- et donc du diagnostic [26] . Une progression très lente de la mala-
sée par l’accumulation des cristaux de cystine dans les tissus [24] die rénale chronique avec une fonction rénale autonome au-delà
(Fig. 4). de l’âge de 20 ans chez les malades traités très précocement est

4 EMC - Néphrologie
Cystinose  18-064-O-10

A B
Figure 3. Dépôts cornéens de cystine.
A. Photographie à la lampe à fente de la cornée d’une patiente de 17 ans montrant de très nombreux cristaux de cystine intracornéens (cliché A. Labbé,
Hôpital national d’ophtalmologie des Quinze-Vingts, Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines).
B. Image en microscopie confocale in vivo (400 ␮m × 400 ␮m) du stroma cornéen. De très nombreux cristaux de cystine sont visibles (cliché A. Labbé,
Hôpital national d’ophtalmologie des Quinze-Vingts, Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines).

maintenant devenue banale, mais ne concerne encore qu’une seur de l’os cortical et à une inhibition de l’activité ostéoclastique
minorité de patients [27] . qui limite le renouvellement de la structure osseuse [31, 32] .
Les supplémentations, en particulier en phosphates et en potas-
sium, doivent être adaptées au niveau de la fonction rénale lorsque Atteinte ophtalmologique
la clairance est abaissée au-dessous de 25 ml/min/1,73 m2 . La poly-
urie et la fuite de solutés, et en particulier des phosphates, par les L’évolution naturelle est rapidement sévère, avec une cécité
reins propres persistent au stade d’insuffisance rénale terminale et complète avant l’âge de 20 ans. La destruction de la cornée est
même après la greffe rénale. secondaire à l’accumulation des dépôts des cristaux de cystine
dans toutes les couches du tissu cornéen. Cette accumulation est
centripète, débutant par la périphérie et progressant vers le centre
de la cornée. L’accumulation des dépôts cornéens est insensible au
“ Point fort traitement systémique par cystéamine en raison du caractère avas-
culaire de ce tissu [33] . Les lésions rétiniennes participent largement
à la cécité par la constitution d’une véritable rétinopathie pigmen-
La maladie rénale évolue toujours vers l’insuffisance rénale taire avec un épaississement de la rétine [34] . Les lésions rétiniennes
terminale. sont accessibles au traitement oral par la cystéamine. Un glaucome
peut venir compléter les lésions rétiniennes et cornéennes [34] .

Atteinte pancréatique
Retard de croissance Elle touche la fonction exocrine et la fonction endocrine.
L’évolution naturelle de la maladie non traitée est marquée L’insuffisance pancréatique exocrine n’a pas été étudiée systé-
par un blocage complet de la croissance en taille comme en matiquement dans de grandes séries de malades, mais elle est
poids. La taille finale des enfants non traités est comprise entre responsable d’une malabsorption digestive qui participe à la mal-
110 et 120 cm [18] . Une taille pratiquement normale peut être nutrition de ces enfants [35] . Il n’est cependant pas habituel
obtenue par la supplémentation en bicarbonates, l’équilibre de de supplémenter les malades par pancréatine. Dans l’évolution
la balance sodée, la prévention des déformations osseuses et naturelle de la maladie, le diabète insulinoprive survenait après
une amélioration de l’état nutritionnel. Le traitement substitu- la transplantation rénale, et la prescription de prednisone et
tif d’une hypothyroïdie et l’utilisation d’hormone de croissance d’inhibiteurs de la calcineurine (ciclosporine et surtout tacro-
recombinante en fonction de la surveillance biologique et auxo- limus) [36] . Le délai d’apparition du diabète insulinoprive est
logique apportent également un bénéfice substantiel pour la aujourd’hui considérablement retardé sinon prévenu par le trai-
croissance [20] . tement spécifique par cystéamine commencé précocement dans
la vie [27] .

Maladie osseuse Atteinte thyroïdienne


Les mécanismes possibles sont multiples : déplétion en phos- Le développement de l’hypothyroïdie est lié à une produc-
phate, déplétion en calcium, maladie neuromusculaire, impact tion insuffisante de thyréoglobuline et à l’altération du trafic
de la maladie primaire et de l’accumulation de cystine dans les intracellulaire dans la glande thyroïdienne [37] . Le premier signe
cellules osseuses et cartilagineuses [16] , déficit en cuivre [28] res- biologique est classiquement une élévation de la thyréostimu-
ponsable de lésions d’ostéolathyrisme (cf. infra). Les principales line hypopysaire plasmatique. L’hypothyroïdie est précoce avant
manifestations à l’âge pédiatrique sont les déformations osseuses l’âge de 15 ans dans les formes non traitées de la maladie, mais
axiales qui touchent principalement les membres inférieurs à type moins de 50 % des malades traités précocement par la cystéamine
de genu valgum, de déformation antéropostérieure des os longs développent une hypothyroïdie [27] .
en lame de sabre et plus rarement la colonne vertébrale sous la
forme d’une scoliose [16] . La maladie dentaire peut en être rap-
prochée (taurodontisme et fragilisation par déficit en émail) [29] . À
Hypogonadisme et infertilité
l’âge adulte, les fractures osseuses et les tassements vertébraux sont Ce problème touche principalement sinon exclusivement les
fréquents [30] . Ces fractures ont été rapportées à un déficit en épais- hommes. L’hypogonadisme est à l’origine d’une puberté retardée

EMC - Néphrologie 5
18-064-O-10  Cystinose

et incomplète ainsi que de testicules de taille réduite dans 70 % des Atteinte neuromusculaire
cas [38] . En revanche, l’infertilité est complète et touche 100 % des
hommes par azoospermie [39] . Paradoxalement, la spermatogenèse L’atteinte neuromusculaire est la plus tardive mais aussi la
est normale au niveau testiculaire [39] et la fécondation in vitro plus invalidante. L’atteinte du système nerveux central est très
d’un ovule par du sperme intratesticulaire recueilli par ponction variée : hypertension intracrânienne, encéphalopathie posté-
a permis de donner naissance à deux jumeaux à terme et en bonne rieure et accidents vasculaires cérébraux peuvent émailler la vie
santé [40] . des malades mal traités ou traités tardivement par la cystéamine,

D
Figure 4. Dépôts tissulaires de cystine. Les dépôts de cystine sont systémiques et touchent toutes les cellules de l’organisme : rein (A), foie (B), pancréas (C),
thyroïde (D), ganglion (E), rate (F), cellules sanguines polynucléées et mononucléées (G), testicule (H) (clichés M.-C. Gubler Inserm U1163, Laboratoire des
maladies héréditaires du rein, Institut Imagine et O. Fenneteau AP–HP Robert-Debré, Université Sorbonne Paris Cité, Laboratoire d’hématologie).* microscopie
en contraste de phase.

6 EMC - Néphrologie
Cystinose  18-064-O-10

H
Figure 4. (suite) Dépôts tissulaires de cystine. Les dépôts de cystine sont systémiques et touchent toutes les cellules de l’organisme : rein (A), foie
(B), pancréas (C), thyroïde (D), ganglion (E), rate (F), cellules sanguines polynucléées et mononucléées (G), testicule (H) (clichés M.-C. Gubler Inserm
U1163, Laboratoire des maladies héréditaires du rein, Institut Imagine et O. Fenneteau AP–HP Robert-Debré, Université Sorbonne Paris Cité, Laboratoire
d’hématologie).* microscopie en contraste de phase.

et conduire à un état pseudobulbaire irréversible [41, 42] . Par ailleurs, lisation des cellules musculaires et à la transformation du tissu
l’accumulation de cystine serait délétère sur le fonctionnement musculaire en tissu adipeux [46] . La carence chronique en carnitine
cérébral, la coordination motrice, la cognition et le dévelop- aggrave potentiellement le déficit musculaire, mais aucune étude
pement de la mémoire, mais le retentissement scolaire de ces de l’impact de celle-là sur la force musculaire n’a été conduite
anomalies n’est pas formellement démontré [43–45] . jusqu’à présent [24] . Cliniquement, une amyotrophie distale avec
Sur le plan musculaire, la prévalence de la perte de la masse une disparition des éminences thénars marque le début de la
musculaire et de la faiblesse musculaire qui en résulte varie de maladie. L’extension de l’amyotrophie et la progression du défi-
30 à 60 % en fonction de l’âge des malades (Fig. 5). Elle repré- cit musculaire sont responsables d’une difficulté à la mobilité,
sente la complication la plus invalidante de la maladie à l’âge de troubles de la déglutition [47] , de pneumopathies d’inhalation
adulte [24] . La myopathie de la cystinose correspond à une vacuo- ainsi que d’un syndrome restrictif [48] qui progresse vers une

EMC - Néphrologie 7
18-064-O-10  Cystinose

insuffisance respiratoire chronique et qui peut conduire à la mort


des malades.

“ Point fort
L’atteinte neuromusculaire est responsable d’une amyo-
trophie distale dont la progression est marquée par une
perte de l’autonomie et une insuffisance respiratoire.

Calcifications vasculaires
Elles ont été décrites chez les malades transplantés, c’est-à-dire
après une période plus ou moins prolongée d’insuffisance rénale
chronique et d’épuration extrarénale qui peut être à l’origine
de calcifications vasculaires par elle-même. Néanmoins, l’étude
d’une cohorte américaine ancienne a rapporté une prévalence des
calcifications coronariennes de 30 % après l’âge de 30 ans. Les
calcifications peuvent également toucher l’aorte, les artères céré-
brales et vertébrales. Elles aggravent le pronostic cardiovasculaire
des malades [49] .
Figure 5. Amyotrophie distale sévère. Le malade est en fauteuil roulant
et a définitivement perdu toute autonomie motrice.
 Diagnostic
une délétion européenne sur un allèle et une deuxième altéra-
Diagnostic clinique tion du gène sur l’autre allèle (substitution, décalage du cadre de
Le diagnostic de la maladie dans sa forme infantile classique lecture, délétion–insertion, etc.). Une minorité de patients cau-
peut reposer sur l’examen de la courbe de croissance et une bio- casiens sont homozygotes pour la délétion européenne. Dans les
logie évocatrice de syndrome de Fanconi. La coexistence d’une ethnies non européennes, les malades sont homozygotes quand
polyurie, d’un retard de croissance staturale avec une inflexion de ils sont issus de familles avec des liens de consanguinité ou double
celle-ci autour de l’âge de 6 mois, et d’un résultat de bandelette hétérozygotes quand ce n’est pas le cas [56] . Dans tous les cas, les
urinaire avec une protéinurie de faible abondance et au mieux parents doivent être informés de la possibilité qui leur est offerte
une glycosurie, sont très évocateurs du diagnostic [50] . Une aci- de recourir à un diagnostic prénatal ou un diagnostic préimplan-
dose métabolique, une hypokaliémie et une hypophosphatémie tatoire lorsqu’un premier enfant a été diagnostiqué préalablement
sont suffisantes pour évoquer le syndrome de Fanconi. L’existence et que la ou les mutations du gène ont été authentifiées.
de cristaux cornéens à la lampe à fente est pathognomonique de
la maladie à cet âge et avec ce contexte clinique [51] .
Diagnostic différentiel
En théorie, les diagnostics différentiels de la cystinose sont
Cystine intraleucocytaire toutes les causes de syndrome de Fanconi chez l’enfant. En pra-
Le dosage de la concentration de cystine à l’intérieur des cel- tique, la cystinose est la première cause de syndrome de Fanconi
lules blanches circulantes du sang est une technique complexe [52] . isolé survenant après la période néonatale et avant la deuxième
Le prélèvement de sang doit être fait sur acide-citrate-dextrose année de vie. Les autres maladies à considérer en l’absence de
et parvenir au laboratoire en moins de 48 heures pour optimi- cristaux cornéens sont :
ser la séparation des cellules blanches totales du sang ou plus • la glycogénose hépatorénale (ou syndrome de Bickel-Fanconi)
précisément des polynucléaires. Après réduction de la cystine, secondaire à une mutation du gène GLUT2 marquée par une
le dosage du contenu cellulaire en cystéine est ensuite réalisé hépatomégalie et une glycosurie très abondante [57] ;
par chromatographie liquide puis spectrométrie de masse en tan- • une maladie de Dent (gènes ClC5 ou OCRL1) ou un syndrome
dem, et rapporté à la quantité de protéines cellulaires mesurée de Lowe (gène OCRL1) en cas de lésions oculaires et de retard
par la méthode Lowry ou par l’acide bicinchroninique. Le résultat du développement psychomoteur, qui peuvent être évoquées
est rendu en nanomole d’hémicystine par milligramme de pro- chez le garçon [7] ;
téines (une cystine est égale à deux cystéines). La valeur normale • les maladies métaboliques comme la tyrosinémie et la galacto-
est inférieure à 0,1 nmol/mg, celle des parents hétérozygotes est sémie [7] ;
comprise entre 0,1 et 1 nmol/mg et celle des malades au dessus • le syndrome GRACILE secondaire à des mutations du gène
de 1 nmol/mg en l’absence de traitement par cystéamine [53] . Le BCSL1, qui est facile à éliminer avec l’atteinte neurologique et
dosage fait sur la couche totale des cellules blanches est moins de la cholestase [58] .
sensible que celui fait sur les polynucléaires isolés en raison de À l’âge habituel du diagnostic de la cystinose, une cause acquise,
l’absence de lysosomes dans les lymphocytes [53] . en particulier une intoxication (plomb, cadmium, pesticides), est
un diagnostic exceptionnel et difficile [7] .

Génétique moléculaire
Le séquençage du gène apporte une preuve irréfutable de la  Traitement
maladie [54] . Les nouvelles techniques next generation sequencing
facilitent considérablement la tâche et le résultat peut être rendu Syndrome de Fanconi : syndrome de perte
dans un délai de quelques jours si un diagnostic prénatal est en de sel et équilibre acidobasique
jeu. En Europe et aux États-Unis, l’altération la plus fréquente
du gène de la cystinosine est la délétion européenne de 57 kilo- Le traitement du syndrome de Fanconi consiste à supplémenter
bases [55] . Les malades sont le plus souvent hétérozygotes, avec toutes les fuites de solutés [7] . C’est un traitement difficile pour le

8 EMC - Néphrologie
Cystinose  18-064-O-10

Tableau 1.
Tableau récapitulatif des traitements.
Produits Présentation habituelle Dose usuelle moyenne
Bicarbonate de sodium Anhydre : 1 g = 12 mmol de HCO3 et de Na 2 mmol/kg/j
Solution molaire à 84 ‰ : 1 ml = 1 mmol
Solution semi-molaire à 42 ‰ 1 ml = 0,5 mmol
Bicarbonate de potassium Anhydre : 1 g = 10 mmol de HCO3 et de K+ 1 mmol/kg/j
Citrate de sodium Anhydre : 1 g = 3,8 mmol de citrate et 10 mmol de Na 0,3 mmol/kg/j
Citrate de potassium Anhydre : 1 g = 3,3 mmol de citrate et 9 mmol de K+ 0,3 mmol/kg/j
Chlorure de sodium Anhydre : 1 g = 17 mmol 1 mmol/kg/j
Solution molaire à 5,85 % : 1 ml = 1 mmol
Potassium Kaleorid® 1 mmol/kg/j
Diffu-K® 600 mg : 8 mmol de K+
Sirop de potassium
Phosphore (P) Phosphoneuros® 10 gouttes = 0,43 ml = 79 mg de P = 2,5 mmol de P 30 mg/kg/j
Phocytan® ampoule de 10 ml à 0,66 % = 200 mg de P, soit 6,6 mmol
de P et 13,2 mmol de Na
Phocytan® flacon de 100 ml à 0,33 % = 1000 mg de P, soit 33 mmol
de P et 66 mmol de Na
Carnitine Lévocarnil® 1 flacon de 5 ml = 1 g 1 à 2 flacons/j
Anti-inflammatoires non stéroïdiens Indométacine 1 ml = 5 mg 1 à 3 mg/kg/j
Ibuprofène 1 ml = 20 mg, une dose-poids = 10 mg/kg 10 à 30 mg/kg/j
Vitamine D Un-Alfa® solution 1 goutte = 0,1 ␮g Dose initiale
Un-Alfa® capsules à 0,25, 0,5, 1 ␮g 0,25–1 ␮g/jour
Cystéamine Cystagon® 1200–1900 mg/m2 /j
Procysbi® 1200–1900 mg/m2 /j
Collyre à la cystéamine Cystadrops® 1 à 4 gouttes/œil/jour

Tableau 2.
Valeurs pédiatriques normales des concentrations plasmatiques en phosphates, calcium, phosphatases alcalines et fibroblast growth factor 23 (FGF-23) (valeurs
établies d’après [83–85] ).
Âge Phosphorémie Calcémie Calcémie Phosphatases alcalines FGF-23
[ans] (mmol/l) totale ionisée (UI/L) (RU/ml)
(mmol/l) (mmol/l)
0–12 mois 1,54–2,72 2,30–2,80 1,22–1,38 295–745 43–324
1–5 ans 1,38–2,19 2,20–2,80 1,20–1,38 311–526 33–235
6–12 ans 1,33–1,92 2,20–2,70 1,20–1,38 255–641 41–130
12–15 ans 1,02–1,79 2,10–2,70 1,20–1,38 204–596 37–140
> 15 ans 0,95–1,62 2,20–2,60 1,16–1,32 50–210 22–127

malade en raison du nombre total de gélules et par la répétition pédiatrique. Leur effet clinique sur la polyurie est souvent specta-
des prises. Le Tableau 1 résume l’ensemble des traitements utili- culaire et ils ont également la capacité de réduire la calciurie [60] .
sables pour l’équilibre du syndrome de Fanconi, ainsi que les doses Ce traitement doit être arrêté en cas de gastroentérite aiguë et
moyennes des solutés qui sont utilisés dans la cystinose. L’apport quand le débit de filtration glomérulaire passe au-dessous du seuil
de grandes quantités de solutés et le trouble de la concentration de 30 ml/min/1,73 m2 . Les troubles digestifs à type de vomisse-
urinaire sont à l’origine d’une exacerbation de la polyurie. Celle- ments ou de diarrhée liquidienne sont une menace vitale dans les
ci suppose un apport d’eau abondant pour respecter l’équilibre premières années de vie. Les malades doivent être systématique
osmotique du liquide extracellulaire. Le volume hydrique est tel examinés, prélevés et perfusés avec du sérum physiologique ou
qu’il peut faire vomir les jeunes enfants et il est alors préférable du Ringer lactate dès les premiers signes.
de s’aider d’une gastrostomie. Les grands enfants et les adultes
avant transplantation rénale doivent avoir un accès libre à l’eau
de boisson. Syndrome de Fanconi : phosphates
Le traitement est initialement adapté sur la surveillance bio- et vitamine D
logique mensuelle qui peut être rapidement élargie à une
surveillance trimestrielle. La surveillance biologique du syndrome Il est plus facile de procéder en deux temps. Le premier
de Fanconi et les adaptations thérapeutiques qu’elle implique temps concerne l’équilibre de la déplétion en phosphore. La
est résumée dans le Tableau 2. L’équilibre acidobasique peut être supplémentation en phosphates repose sur la prescription de
indifféremment maintenu par une supplémentation en bicarbo- Phosphoneuros® dont le goût est acide ou de Phocytan® dont
nates ou en citrates, ou par un mélange des deux [59] . La tolérance le goût est salé. La supplémentation en vitamine D active
digestive des citrates est notablement meilleure que celle des bicar- (Alfacalcidol® ) (Tableau 1) est indispensable pour optimiser
bonates qui sont anorexigènes et induisent des vomissements à l’absorption intestinale des phosphates. Les deux supplémen-
fortes doses. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens permettent tations sont prudemment augmentées jusqu’à obtenir une
une épargne de la supplémentation en sodium dans les syn- phosphorémie dans les limites de la normale pour l’âge
dromes de perte rénale de sel [60] . Ils permettent d’optimiser la (Tableau 2), un niveau détectable de PTH dans le plasma, au mieux
réabsorption du sodium dans le canal collecteur par inhibition supérieur à 20 ng/l, et une concentration circulante de FGF-23 au
de la production des prostaglandines et de leur action natriuré- dessus de 20 à 30 RU/ml. Dans un second temps, il faut s’attacher à
tique [61] . L’ibuprofène et l’indométacine sont les deux produits les caler la concentration plasmatique de calcium ionisé entre 1,20 et
plus utilisés car ils sont commercialisés sous la forme d’un soluté 1,25 mmol/l (Tableau 2) afin d’optimiser la cristallisation osseuse

EMC - Néphrologie 9
18-064-O-10  Cystinose

Tableau 3.
Principaux éléments de la surveillance biologique du syndrome de Fanconi.
Marqueur biologique plasmatique Valeurs usuelles
Équilibre acidobasique Réserve alcaline 22–28 mmol/l
Hydratation extracellulaire Protides totaux 55–70 g/l
Rénine plasmatique < 120 mU/l
Aldostérone plasmatique 100–700 pg/ml
Potassium Kaliémie 4,1–4,8 mmol/l
Métabolisme osseux Parathormone 40–90 pg/ml
Carnitine Carnitine totale 50–100 ␮mol/l

en modulant la supplémentation en vitamine D active. La sup- régulièrement espacées de six heures ou à libération retardée
plémentation en calcium est contre-productive en précipitant le (Procysbi® ) à donner en deux prises régulièrement espacées de
phosphore contenu dans la lumière intestinale sous forme de 12 heures (Tableau 1) [65] . La forme à disponibilité immédiate
phosphates tricalciques insolubles et non absorbables. oblige à un réveil et une prise nocturnes très inconfortables avec
le temps. En pratique, environ 30 à 40 % des malades sont cou-
verts de façon suffisante avec trois prises par jour [52] . Le coût du
Syndrome de Fanconi : L-carnitine Procysbi® est 20 fois supérieur à celui du Cystagon® et limite son
La supplémentation en L-carnitine est donnée sous forme de emploi aux pays riches. La biodisponibilité de la cystéamine est
Lévocarnil® (Tableau 1). de 20 à 40 % plus importante lorsqu’elle est prise à distance d’un
Les éléments de surveillance de l’ajustement des traitements du repas riche en protéines et en lipides, et il est recommandé de
syndrome de Fanconi sont résumés dans le Tableau 3. garder un délai de 60 minutes entre le dernier repas et la prise
pour améliorer la biodisponibilité [66] . Les séances d’hémodialyse
modifient significativement la biodisponibilité [67] .
Gastrostomie
Posologie et surveillance
Elle permet avant tout l’administration facile de la cystéamine
et de l’ensemble des solutés de manière discontinue chez les très La posologie quotidienne est comprise entre 1300 et
jeunes enfants. Elle est également utilisée pour des suppléments 1950 mg/m2 par jour ou 50 à 80 mg/kg par jour [52] . La dose ini-
nutritionnels en cas d’anorexie et de vomissements induits par la tiale est de 30 mg/kg par jour et elle est secondairement augmentée
maladie et par les traitements. C’est un des moyens pour mainte- en fonction de la tolérance. La dose est ensuite progressivement
nir une croissance pondérale et un état trophique de bonne qualité ajustée sur les niveaux résiduels de cystine intraleucocytaire pour
chez des enfants dont l’alimentation est difficile [62] . viser théoriquement le taux des malades hétérozygotes : inférieur à
0,5 nmol/mg de protéine en cas de dosage sur leucocytes totaux et
inférieur à 1,0 nmol/mg de protéine en cas de dosage sur polynu-
Hormone de croissance cléaires neutrophiles. Dans la pratique, la posologie de cystéamine
nécessaire pour atteindre ces objectifs dépasse assez nettement les
Son utilisation doit être systématiquement considérée chez les
posologies recommandées. Il est donc recommandé de maintenir
malades après deux ans pour obtenir une croissance acceptable
un taux de cystine intraleucocytaire entre 0,8 et 1,5 nmol/mg de
bien que la sécrétion endogène d’hormone de croissance soit nor-
protéine sur leucocytes totaux, et entre 2,0 et 3,0 nmol/mg de pro-
male quantitativement chez la plupart des malades. Une dose
téine sur polynucléaires neutrophiles [52] . La posologie rapportée
comprise entre 0,2 et 0,4 mg/kg par semaine permet d’obtenir un
à la surface corporelle décroît très lentement avec l’âge et la poso-
rattrapage d’une à deux déviations-standards et surtout d’obtenir
logie adulte s’établit à 2000 mg/j. Il est important de préciser que
une taille finale satisfaisante. L’effet de la supplémentation en hor-
le taux résiduel de cystine intraleucocytaire doit être prélevé six
mone de croissance est optimal chez les malades dont le syndrome
heures après la dernière prise de Cystagon® et 30 minutes après
de Fanconi est équilibré avec précision et dont l’état nutritionnel
la prise de Procysbi® (c’est-à-dire 12 heures 30 après la précédente
est normal [20] .
prise dont on mesure le taux résiduel). La surveillance du trai-
tement par la concentration résiduelle circulante de cystéamine
Traitement systémique par la cystéamine n’est pas rentrée dans les habitudes. Un taux plasmatique résiduel
compris entre 4 et 7 ␮mol/l est considéré comme efficace [52] .

“ Point fort Efficacité


La cystéamine est un traitement efficace pour reculer l’âge de
l’insuffisance rénale terminale et pour la prévention des autres
Le traitement spécifique de la cystinose est la cystéamine. atteintes d’organes comme le diabète et l’insuffisance thyroï-
Le pronostic de la maladie est directement corrélé à la dienne [27] . Elle est d’autant plus efficace qu’elle a été débutée
précocité du traitement. tôt dans la vie et les deuxièmes enfants ont un avantage certain.
En revanche, le syndrome de Fanconi est irréversible quand il est
déjà manifeste. Un traitement très précoce peut le prévenir ou
l’atténuer dans certain cas, mais certainement pas chez tous les
Généralités malades [68, 69] . La cystéamine orale doit être maintenue tout au
long de la vie quelle que soit la fonction rénale. Elle est arrêtée
Les effets de la cystéamine sur le niveau de cystine intraleu-
transitoirement au moment de la transplantation rénale pendant
cocytaire ont été reconnus en 1976 et les premiers malades ont
quelques jours et au cours de la grossesse.
été traités expérimentalement au cours de la même année [63] . La
cystéamine possède un groupement thiol, a la capacité de réduire
le pont disulfure et permet de rompre la molécule en deux cys-
Tolérance et complications
téines. Il a été montré secondairement que la cystéine se liait Le problème majeur de la cystéamine est l’odeur sulfurée qu’elle
à la lysine et empruntait le transporteur PQLC2 pour gagner le procure [70] . Il s’agit d’une odeur comparable à celle des œufs pour-
cytoplasme où elle est recyclée dans la synthèse des protéines [64] . ris qui traduit une très bonne adhésion au traitement. Elle est
Le bitartrate de cystéamine est commercialisé sous une forme à particulièrement mal tolérée par l’entourage scolaire et limite la
disponibilité immédiate (Cystagon® ) à donner en quatre prises socialisation des malades. C’est le principal obstacle à une bonne

10 EMC - Néphrologie
Cystinose  18-064-O-10

adhésion au traitement. La cystéamine a également très mauvaise repris pour prévenir les atteintes extrarénales et en particulier la
réputation en termes de tolérance digestive [21] . En fait, la tolé- maladie neuromusculaire [80] .
rance digestive est nettement améliorée lorsque la cystéamine est
donnée à distance des solutés minéraux et en particulier des bicar-
bonates. L’adjonction d’inhibiteurs de la pompe à protons a été Traitements des atteintes extrarénales
autrefois préconisée pour prévenir les vomissements itératifs et Ils concernent principalement les insuffisances endocriniennes
les douleurs abdominales [71] , mais elle est maintenant décon- de la cystinose, mais n’ont aucune particularité. L’insuffisance
seillée en raison d’un bénéfice incertain et des complications à thyroïdienne peut être compensée par Lévothyrox® (compri-
long terme de ce traitement. Ils diminuent la biodisponibilité de més de 25 à 200 ␮g) en comprimés ou par L-Thyroxine®
la forme à libération prolongée (Procysbi® ). La tolérance de la (1 goutte = 5 ␮g) en gouttes buvables. Le diabète insulinoprive est
cystéamine au long cours est également plus problématique. La traité conventionnellement par insulinothérapie, mais celle-ci est
cystéamine comme tous les produits comportant un groupement rarement débutée à l’âge pédiatrique. Les déformations osseuses
thiol est un agent intercalaire, c’est-à-dire capable de se fixer dans axiales comme le genu valgum ou la scoliose doivent être évaluées
des structures hélicoïdales comme les alphahélices de collagène et et traitées par une équipe d’orthopédie pédiatrique expérimentée.
l’acide désoxyribonucléique où elle pourrait modifier l’expression La surveillance de l’état dentaire est tout à fait recommandable [80] .
des gènes. Précisément, la cystéamine gêne le pontage des chaînes
de collagène et aggrave les déformations osseuses similaires à celle
de l’ostéolathyrisme [28, 72] . D’autre part, la viabilité physiologique Transition enfant–adulte
des cellules endothéliales est augmentée par des concentrations Avec les progrès considérables de la survie des malades, plus
croissantes de cystéamine et explique probablement les manifes- de la moitié des 200 malades répertoriés en France sont adultes.
tations d’angioendothéliomatose marquées par une prolifération La transition enfant–adulte est devenue un enjeu important. Le
microvasculaire dermique qui ont été rapportées chez plusieurs mieux est certainement d’éviter la dispersion des malades et
malades [73] . La posologie de cystéamine était élevée entre 2200 d’avoir un seul référent adulte par région. Les malades transplan-
et 2900 mg/m2 par jour chez trois malades et à la dose classique tés à l’âge pédiatrique doivent donc être transférés simultanément
(1700 mg/m2 /j) chez un quatrième. Les lésions ont été réversibles dans un centre de transplantation adulte et à un néphrologue
après la diminution de la posologie entre 1200 et 2000 mg/m2 adulte référent dans la maladie. L’augmentation substantielle de
par jour selon les malades. Ces manifestations doivent inciter à la l’espérance de vie expose les malades aux atteintes extrarénales
prudence en matière de maintien prolongé des doses au-delà du d’apparition plus tardives comme la maladie neuromusculaire.
seuil de 2000 mg/m2 par jour. La prévalence des cancers chez le Ces atteintes exigent une prise en charge spécialisée et il faut
jeune adulte [19] atteint de cystinose et traité par cystéamine pen- particulièrement insister auprès des malades sur la poursuite du
dant toute la période pédiatrique pourrait répondre à ce même traitement par cystéamine à vie [81] .
problème et mérite une attention accrue avec la durée du traite- La scolarité comme l’insertion professionnelle sont gênées
ment. par l’halitose secondaire à la prise de cystéamine. Néanmoins,
nombre de malades suivent maintenant une scolarité normale,
Adhésion au traitement et acquièrent la possibilité d’apprendre et d’exercer un métier.
Elle est bonne dans la première et la deuxième enfance quand le L’influence d’une équipe comportant une psychologue, une assis-
traitement est encadré par les parents, mais elle est très mauvaise tante sociale, une infirmière de liaison et de coordination ainsi
chez l’adolescent et le jeune adulte, principalement par l’odeur qu’une infirmière d’éducation thérapeutique est un apport déter-
dégagée dans les heures qui suivent l’ingestion de cystéamine et la minant du succès des projets d’insertion sociale.
mauvaise tolérance de l’entourage social [74, 75] . La mauvaise adhé-
sion au traitement est responsable de l’aggravation des atteintes
d’organes et de l’apparition précoce de la maladie neuromuscu- Prise en charge dans les pays émergents
laire chez l’adulte [27] .
Elle est souvent très limitée par le coût de la surveillance biolo-
gique et du traitement. Le traitement par cystéamine représente
Collyre une dépense minimale d’environ 10 000 D par an, même si le
nombre de prises quotidiennes est réduit à trois ou à deux. Le trai-
L’atteinte cornéenne est insensible au traitement oral par cys- tement par hormone de croissance est bien souvent écarté pour
téamine. Le développement de collyres, d’abord à 0,1 % puis à des raisons financières [82] .
0,55 % (Cystadrops® à 3,8 mg/ml de cystéamine-base), a trans-
formé le pronostic ophtalmologique [76] . L’administration de
quatre gouttes par œil et par jour permet une clarification des
couches de la cornée et la dose d’une goutte par œil et par jour peut
 Conclusion
être suffisante pour prévenir l’apparition des dépôts lorsque le La cystinose est une maladie systémique qui débute précoce-
traitement est commencé très précocement. La surveillance oph- ment par une maladie rénale tubulaire et progresse rapidement
talmologique est au moins annuelle et l’évaluation de la charge vers l’insuffisance rénale terminale. Les autres atteintes conti-
cornéenne en cristaux est faite à la lampe à fente par le score de nuent de progresser après la greffe rénale et gênent les malades
Gahl ou au mieux à l’aide d’un microscope confocal [76, 77] . à l’âge adulte. Le traitement par cystéamine a considérablement
amélioré le pronostic des malades, mais il reste beaucoup à faire
Greffe rénale pour prévenir une morbidité croissante avec l’âge.

La surveillance de la fonction rénale permet d’organiser une


greffe rénale préemptive avant la nécessité d’une épuration Déclaration de liens d’intérêts : G. Deschênes : Orphaneurope, Chiesi.
extrarénale. L’immunosuppression initiale et le traitement de A. Bertholet-Thomas : Chiesi.
maintenance contre le rejet de greffe ne sont pas différents des
protocoles habituels, bien que la tolérance immunitaire de la
greffe et la survie des greffons soient bien meilleures chez ces
malades [78] . L’ablation des reins propres est recommandée à cause
 Références
du risque de persistance des anomalies biologiques du syndrome [1] Veys KR, Elmonem MA, Arcolino FO, van den Heuvel L, Levtchenko E.
de Fanconi après la greffe [79] : une première néphrectomie homo- Nephropathic cystinosis: an update. Curr Opin Pediatr 2017;29:168–78.
latérale est faite le jour de la greffe et la seconde à six mois de [2] Elmonem MA, Veys KR, Soliman NA, van Dyck M, van den Heuvel LP,
distance. Le traitement par cystéamine est interrompu de 1 à 4 Levtchenko E. Cystinosis: a review. Orphanet J Rare Dis 2016;11:47.
semaines selon les équipes pour ne pas interférer avec l’induction [3] Ariceta G, Giordano V, Santos F. Effects of long-term cysteamine treat-
du traitement immunosuppresseur, puis il est systématiquement ment in patients with cystinosis. Pediatr Nephrol 2019;34:571–8.

EMC - Néphrologie 11
18-064-O-10  Cystinose

[4] Coor C, Salmon RF, Quigley R, Marver D, Baum M. Role of adenosine [32] Claramunt-Taberner D, Flammier S, Gaillard S, Cochat P, Peyruchaud O,
triphosphate (ATP) and NaK ATPase in the inhibition of proximal tubule Machuca-Gayet I, et al. Bone disease in nephropathic cystinosis is related
transport with intracellular cystine loading. J Clin Invest 1991;87:955–61. to cystinosin-induced osteoclastic dysfunction. Nephrol Dial Transplant
[5] Cherqui S, Courtoy PJ. The renal Fanconi syndrome in cystinosis: 2018;33:1525–32.
pathogenic insights and therapeutic perspectives. Nat Rev Nephrol [33] Tsilou E, Zhou M, Gahl W, Sieving PC, Chan CC. Ophthalmic manifes-
2017;13:115–31. tations and histopathology of infantile nephropathic cystinosis: report
[6] Morel F, Doucet A. Functional segmentation of the nephron. In: Seldin of a case and review of the literature. Surv Ophthalmol 2007;52:
DW, Giebisch G, editors. The Kidney: Physiology and Pathophysiology. 97–105.
New York: Raven Press; 1992. p. 1049–86. [34] Sonmez K, Ozcan PY. Angle-closure glaucoma in a patient with the
[7] Foreman JW. Fanconi Syndrome. Pediatr Clin North Am 2019;66: nanophthalmos-ocular cystinosis-foveoschisis-pigmentary retinal dys-
159–67. trophy complex. BMC Ophthalmol 2012;12:23.
[8] Tatum R, Zhang Y, Salleng K, Lu Z, Lin JJ, Lu Q, et al. Renal salt wasting [35] Fivush B, Flick JA, Gahl WA. Pancreatic exocrine insufficiency in a
and chronic dehydration in claudin-7-deficient mice. Am J Physiol Renal patient with nephropathic cystinosis. J Pediatr 1988;112:49–51.
Physiol 2010;298:F24–34. [36] Robert JJ, Tete MJ, Guest G, Gagnadoux MF, Niaudet P, Broyer M.
[9] Alexander RT, Bitzan M. Renal tubular acidosis. Pediatr Clin North Am Diabetes mellitus in patients with infantile cystinosis after renal trans-
2019;66:135–57. plantation. Pediatr Nephrol 1999;13:524–9.
[10] Giebisch G, Krapf R, Wagner C. Renal and extrarenal regulation of [37] Gaide Chevronnay HP, Janssens V, Van Der Smissen P, Liao XH, Abid
potassium. Kidney Int 2007;72:397–410. Y, Nevo N, et al. A mouse model suggests two mechanisms for thyroid
[11] Deschenes G, Fila M. Primary molecular disorders and secondary biolo-
alterations in infantile cystinosis: decreased thyroglobulin synthesis due
gical adaptations in Bartter syndrome. Int J Nephrol 2011;2011:396209.
to endoplasmic reticulum stress/unfolded protein response and impaired
[12] Kardalas E, Paschou SA, Anagnostis P, Muscogiuri G, Siasos G,
lysosomal processing. Endocrinology 2015;156:2349–64.
Vryonidou A. Hypokalemia: a clinical update. Endocr Connect
[38] Levtchenko E. Endocrine complications of cystinosis. J Pediatr
2018;7:R135–46.
[13] Dhayat NA, Ackermann D, Pruijm M, Ponte B, Ehret G, Guessous I, 2017;183S:S5–8.
et al. Fibroblast growth factor 23 and markers of mineral metabolism in [39] Besouw MT, Kremer JA, Janssen MC, Levtchenko EN. Fertility sta-
individuals with preserved renal function. Kidney Int 2016;90:648–57. tus in male cystinosis patients treated with cysteamine. Fertil Steril
[14] Lambert AS, Linglart A. Hypocalcaemic and hypophosphatemic rickets. 2010;93:1880–3.
Best Pract Res Clin Endocrinol Metab 2018;32:455–76. [40] Veys KR, D’Hauwers KW, van Dongen A, Janssen MC, Besouw MTP,
[15] Pesta DH, Tsirigotis DN, Befroy DE, Caballero D, Jurczak MJ, Rahimi Y, Goossens E, et al. First successful conception induced by a male cystinosis
et al. Hypophosphatemia promotes lower rates of muscle ATP synthesis. patient. JIMD Rep 2018;38:1–6.
FASEB J 2016;30:3378–87. [41] Broyer M, Tete MJ, Guest G, Bertheleme JP, Labrousse F, Poisson M.
[16] Bacchetta J, Greco M, Bertholet-Thomas A, Nobili F, Zustin J, Cochat Clinical polymorphism of cystinosis encephalopathy. Results of treatment
P, et al. Skeletal implications and management of cystinosis: three case with cysteamine. J Inherit Metab Dis 1996;19:65–75.
reports and literature review. Bonekey Rep 2016;5:828. [42] Martin-Begue N, Alarcon S, Wolley-Dod C, Lara LE, Madrid A, Cano P,
[17] Servais A, Moriniere V, Grunfeld JP, Noel LH, Goujon JM, Chadefaux- et al. Intracranial hypertension in cystinosis is a challenge: experience in
Vekemans B, et al. Late-onset nephropathic cystinosis: clinical a children’s hospital. JIMD Rep 2017;35:17–22.
presentation, outcome, and genotyping. Clin J Am Soc Nephrol 2008;3: [43] Besouw MT, Hulstijn-Dirkmaat GM, van der Rijken RE, Cornelissen
27–35. EA, van Dael CM, Vande Walle J, et al. Neurocognitive functio-
[18] Broyer M, Guillot M, Gubler MC, Habib R. Infantile cystinosis: a ning in school-aged cystinosis patients. J Inherit Metab Dis 2010;33:
reappraisal of early and late symptoms. Adv Nephrol Necker Hosp 787–93.
1981;10:137–66. [44] Maurice T, Hippert C, Serratrice N, Dubois G, Jacquet C, Antignac C,
[19] Greco M, Brugnara M, Zaffanello M, Taranta A, Pastore A, Emma F. et al. Cystine accumulation in the CNS results in severe age-related
Long-term outcome of nephropathic cystinosis: a 20-year single-center memory deficits. Neurobiol Aging 2009;30:987–1000.
experience. Pediatr Nephrol 2010;25:2459–67. [45] Viltz L, Trauner DA. Effect of age at treatment on cognitive performance
[20] Wuhl E, Haffner D, Offner G, Broyer M, van’t Hoff W, Mehls O. Long- in patients with cystinosis. J Pediatr 2013;163:489–92.
term treatment with growth hormone in short children with nephropathic [46] Cheung WW, Cherqui S, Ding W, Esparza M, Zhou P, Shao J, et al. Muscle
cystinosis. J Pediatr 2001;138:880–7. wasting and adipose tissue browning in infantile nephropathic cystinosis.
[21] Dohil R, Newbury RO, Sellers ZM, Deutsch R, Schneider JA. The evalua- J Cachexia Sarcopenia Muscle 2016;7:152–64.
tion and treatment of gastrointestinal disease in children with cystinosis [47] Sonies BC, Almajid P, Kleta R, Bernardini I, Gahl WA. Swallowing dys-
receiving cysteamine. J Pediatr 2003;143:224–30. function in 101 patients with nephropathic cystinosis: benefit of long-term
[22] Arant BS, Greifer I, Edelmann Jr CM, Spitzer A. Effect of chronic salt cysteamine therapy. Medicine 2005;84:137–46.
and water loading on the tubular defects of a child with Fanconi syndrome [48] Anikster Y, Lacbawan F, Brantly M, Gochuico BL, Avila NA, Travis
(cystinosis). Pediatrics 1976;58:370–7. W, et al. Pulmonary dysfunction in adults with nephropathic cystinosis.
[23] Dureau P, Broyer M, Dufier JL. Evolution of ocular manifestations in Chest 2001;119:394–401.
nephropathic cystinosis: a long-term study of a population treated with
[49] Ueda M, O’Brien K, Rosing DR, Ling A, Kleta R, McAreavey D, et al.
cysteamine. J Pediatr Ophthalmol Strabismus 2003;40:142–6.
Coronary artery and other vascular calcifications in patients with cys-
[24] Nesterova G, Gahl W. Nephropathic cystinosis: late complications of a
tinosis after kidney transplantation. Clin J Am Soc Nephrol 2006;1:
multisystemic disease. Pediatr Nephrol 2008;23:863–78.
555–62.
[25] Wilmer MJ, Christensen EI, van den Heuvel LP, Monnens LA, Levt-
chenko EN. Urinary protein excretion pattern and renal expression [50] Bertholet-Thomas A, Llanas B, Servais A, Bendelac N, Goizet C, Chou-
of megalin and cubilin in nephropathic cystinosis. Am J Kidney Dis kroun G, et al. Significance of the urine strip test in case of stunted growth.
2008;51:893–903. Arch Pediatr 2015;22:756–62.
[26] Markello TC, Bernardini IM, Gahl WA. Improved renal function [51] Biswas S, Gaviria M, Malheiro L, Marques JP, Giordano V, Liang H.
in children with cystinosis treated with cysteamine. N Engl J Med Latest clinical approaches in the ocular management of cystinosis: a
1993;328:1157–62. review of current practice and opinion from the Ophthalmology Cys-
[27] Brodin-Sartorius A, Tete MJ, Niaudet P, Antignac C, Guest G, Ottolen- tinosis Forum. Ophthalmol Ther 2018;7:307–22.
ghi C, et al. Cysteamine therapy delays the progression of nephropathic [52] Bouazza N, Treluyer JM, Ottolenghi C, Urien S, Deschenes G, Ricquier
cystinosis in late adolescents and adults. Kidney Int 2012;81:179–89. D, et al. Population pharmacokinetics and pharmacodynamics of cystea-
[28] Besouw MT, Schneider J, Janssen MC, Greco M, Emma F, Cornelissen mine in nephropathic cystinosis patients. Orphanet J Rare Dis 2011;6:
EA, et al. Copper deficiency in patients with cystinosis with cysteamine 86.
toxicity. J Pediatr 2013;163:754–60. [53] Levtchenko E, de Graaf-Hess A, Wilmer M, van den Heuvel L, Monnens
[29] Bassim CW, Gautam P, Domingo DL, Balog JZ, Guadagnini JP, Gahl L, Blom H. Comparison of cystine determination in mixed leukocytes vs
WA, et al. Craniofacial and dental findings in cystinosis. Oral Dis polymorphonuclear leukocytes for diagnosis of cystinosis and monitoring
2010;16:488–95. of cysteamine therapy. Clin Chem 2004;50:1686–8.
[30] Zimakas PJ, Sharma AK, Rodd CJ. Osteopenia and fractures in cys- [54] Kalatzis V, Nevo N, Cherqui S, Gasnier B, Antignac C. Molecular
tinotic children post renal transplantation. Pediatr Nephrol 2003;18: pathogenesis of cystinosis: effect of CTNS mutations on the trans-
384–90. port activity and subcellular localization of cystinosin. Hum Mol Genet
[31] Bertholet-Thomas A, Claramunt-Taberner D, Gaillard S, Deschenes G, 2004;13:1361–71.
Sornay-Rendu E, Szulc P, et al. Teenagers and young adults with nephro- [55] Town M, Jean G, Cherqui S, Attard M, Forestier L, Whitmore SA, et al. A
pathic cystinosis display significant bone disease and cortical impairment. novel gene encoding an integral membrane protein is mutated in nephro-
Pediatr Nephrol 2018;33:1165–72. pathic cystinosis. Nat Genet 1998;18:319–24.

12 EMC - Néphrologie
Cystinose  18-064-O-10

[56] Soliman NA, Elmonem MA, van den Heuvel L, Abdel Hamid RH, Gamal [74] Ariceta G, Lara E, Camacho JA, Oppenheimer F, Vara J, Santos F, et al.
M, Bongaers I, et al. Mutational spectrum of the CTNS gene in egyptian Cysteamine (Cystagon® ) adherence in patients with cystinosis in Spain:
patients with nephropathic cystinosis. JIMD Rep 2014;14:87–97. successful in children and a challenge in adolescents and adults. Nephrol
[57] Santer R, Schneppenheim R, Dombrowski A, Gotze H, Steinmann Dial Transplant 2015;30:475–80.
B, Schaub J. Mutations in GLUT2, the gene for the liver-type glu- [75] Nesterova G, Williams C, Bernardini I, Gahl WA. Cystinosis: renal
cose transporter, in patients with Fanconi-Bickel syndrome. Nat Genet glomerular and renal tubular function in relation to compliance with
1997;17:324–6. cystine-depleting therapy. Pediatr Nephrol 2015;30:945–51.
[58] de Lonlay P, Valnot I, Barrientos A, Gorbatyuk M, Tzagoloff A, Taan- [76] Labbe A, Baudouin C, Deschenes G, Loirat C, Charbit M, Guest G, et al.
man JW, et al. A mutant mitochondrial respiratory chain assembly protein A new gel formulation of topical cysteamine for the treatment of corneal
causes complex III deficiency in patients with tubulopathy, encephalopa- cystine crystals in cystinosis: the Cystadrops OCT-1 study. Mol Genet
thy and liver failure. Nat Genet 2001;29:57–60. Metab 2014;111:314–20.
[59] Fjellstedt E, Denneberg T, Jeppsson JO, Tiselius HG. A comparison of the [77] Gahl WA, Kuehl EM, Iwata F, Lindblad A, Kaiser-Kupfer MI. Corneal
effects of potassium citrate and sodium bicarbonate in the alkalinization crystals in nephropathic cystinosis: natural history and treatment with
of urine in homozygous cystinuria. Urol Res 2001;29:295–302. cysteamine eyedrops. Mol Genet Metab 2000;71:100–20.
[60] Gasongo G, Greenbaum LA, Niel O, Kwon T, Macher MA, Maisin A, [78] Van Stralen KJ, Emma F, Jager KJ, Verrina E, Schaefer F, Laube GF, et al.
et al. Effect of nonsteroidal anti-inflammatory drugs in children with Improvement in the renal prognosis in nephropathic cystinosis. Clin J Am
Bartter syndrome. Pediatr Nephrol 2019;34:679–84. Soc Nephrol 2011;6:2485–91.
[61] Hao CM, Breyer MD. Physiological regulation of prostaglandins in the [79] Malekzadeh MH, Neustein HB, Schneider JA, Pennisi AJ, Ettenger RB,
kidney. Annu Rev Physiol 2008;70:357–77. Uittenbogaart CH, et al. Cadaver renal transplantation in children with
[62] Elenberg E, Norling LL, Kleinman RE, Ingelfinger JR. Feeding problems cystinosis. Am J Med 1977;63:525–33.
in cystinosis. Pediatr Nephrol 1998;12:365–70. [80] Langman CB, Barshop BA, Deschenes G, Emma F, Goodyer P, Lipkin
[63] Thoene JG, Oshima RG, Crawhall JC, Olson DL, Schneider JA. Cysti- G, et al. Controversies and research agenda in nephropathic cystino-
nosis. Intracellular cystine depletion by aminothiols in vitro and in vivo. sis: conclusions from a “Kidney Disease: Improving Global Outcomes”
J Clin Invest 1976;58:180–9. (KDIGO) Controversies Conference. Kidney Int 2016;89:1192–203.
[64] Jezegou A, Llinares E, Anne C, Kieffer-Jaquinod S, O’Regan S, Aupetit [81] Ariceta G, Camacho JA, Fernandez-Obispo M, Fernandez-Polo A, Gamez
J, et al. Heptahelical protein PQLC2 is a lysosomal cationic amino acid J, Garcia-Villoria J, et al. A coordinated transition model for patients with
exporter underlying the action of cysteamine in cystinosis therapy. Proc cystinosis: from pediatrics to adult care. Nefrologia 2016;36:616–30.
Natl Acad Sci U S A 2012;109:E3434–43. [82] Bertholet-Thomas A, Bacchetta J, Tasic V, Cochat P. Nephropathic
[65] Langman CB, Greenbaum LA, Sarwal M, Grimm P, Niaudet P, Deschenes cystinosis–a gap between developing and developed nations. N Engl J
G, et al. A randomized controlled crossover trial with delayed-release Med 2014;370:1366–7.
cysteamine bitartrate in nephropathic cystinosis: effectiveness on white [83] Adeli K, Higgins V, Trajcevski K, White-Al Habeeb N. The Canadian
blood cell cystine levels and comparison of safety. Clin J Am Soc Nephrol laboratory initiative on pediatric reference intervals: A CALIPER white
2012;7:1112–20. paper. Crit Rev Clin Lab Sci 2017;54:358–413.
[66] Dohil R, Cabrera BL, Gangoiti J, Rioux P. The effect of food on cystea- [84] Turan S, Topcu B, Gökçe İ, Güran T, Atay Z, Omar A, et al. Serum
mine bitartrate absorption in healthy participants. Clin Pharmacol Drug alkaline phosphatase levels in healthy children and evaluation of alkaline
Dev 2012;1:170–4. phosphatase Z-scores in different types of rickets. Clin Res Ped Endo
[67] Besouw M, Levtchenko E. Pharmacokinetics of cysteamine in a cys- 2011;3:7–11.
tinosis patient treated with hemodialysis. Pediatr Nephrol 2011;26: [85] Stokes VJ, Nielsen MF, Hannan FM, Thakker RV. Hypercalcemic disor-
639–40. ders in children. J Bone Mineral Res 2017;32:2157–70.
[68] da Silva VA, Zurbrugg RP, Lavanchy P, Blumberg A, Suter H, Wyss
SR, et al. Long-term treatment of infantile nephropathic cystinosis with
cysteamine. N Engl J Med 1985;313:1460–3. Pour en savoir plus
[69] Reznik VM, Adamson M, Adelman RD, Murphy JL, Gahl WA, Clark
KF, et al. Treatment of cystinosis with cysteamine from early infancy. J Orphanet. www.orpha.net/consor/cgi-bin/Disease Search.php?lng=FR&
Pediatr 1991;119:491–3. data id=11&Disease Disease Search diseaseGroup=cystinose&
[70] Besouw M, Blom H, Tangerman A, de Graaf-Hess A, Levtchenko E. The Disease Disease Search diseaseType=Pat&Maladie(s)/groupes%20
origin of halitosis in cystinotic patients due to cysteamine treatment. Mol de%20maladies=Cystinose&title=Cystinose&search=Disease Search
Genet Metab 2007;91:228–33. Simple.
[71] Dohil R, Fidler M, Barshop B, Newbury R, Sellers Z, Deutsch R, et al. Vaincre les maladies lysosomales. www.vml-asso.org/-cystinose-.
Esomeprazole therapy for gastric acid hypersecretion in children with Association pour l’information sur les maladies rénales génétiques.
cystinosis. Pediatr Nephrol 2005;20:1786–93. www.sfndt.org/sn/PDF/epublic/asso/AIRG/livrets/cystinose.pdf.
[72] Bornstein P. The cross-linking of collagen and elastin and its inhibition Haute Autorité de santé. Programmes nationaux de diagnostic et de soins.
in osteolathyrism. Is there a relation to the aging process? Am J Med www.has-sante.fr/portail/jcms/c 2867367/fr/cystinose.
1970;49:429–35. Cystinosis foudation. www.cystinosisfoundation.org/.
[73] Besouw MT, Bowker R, Dutertre JP, Emma F, Gahl WA, Greco M, Cohorte radico. https://radico.fr/fr/connaitre-radico/nos-cohortes-et-autres-
et al. Cysteamine toxicity in patients with cystinosis. J Pediatr 2011;159: programmes-associes/9-uncategorised/142-radico-ecysco.
1004–11. Filiere orkid. www.filiereorkid.com/.

G. Deschênes (georges.deschenes@aphp.fr).
Service de néphrologie pédiatrique, Hôpital Robert-Debré, AP–HP, Université Sorbonne Paris Cité, 48, boulevard Sérurier, 75019 Paris, France.
A. Bertholet-Thomas.
Service de néphrologie pédiatrique, Hospice civil de Lyon, Hôpital Femme-Mère-Enfants, 59, boulevard Pinel, 69500 Bron, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Deschênes G, Bertholet-Thomas A. Cystinose. EMC - Néphrologie 2020;32(1):1-13 [Article 18-064-O-10].

Disponibles sur www.em-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos/ Documents Information Informations Auto- Cas
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations clinique

EMC - Néphrologie 13

Vous aimerez peut-être aussi