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CRYPTOCOCCOSE AU COURS DU SIDA

OBJECTIFS PEDAGOGIQUES
1- Préciser les circonstances favorisant le développement d’une cryptococcose.
2- Exposer les arguments diagnostiques de la cryptococcose.
3- Exposer les principes du traitement curatif et prophylactique de la cryptococcose
Cette infection opportuniste peut intéresserle système nerveux central (méningite) ou
le poumon chez des patients très immunodéprimés.

DEFINITION
La cryptococcose est due à un champignon ubiquitaire, Cryptococcus neoformans.
EPIDEMIOLOGIE
Agent pathogène
Cryptococcus neoformans représente la quasi totalité des Cryptococcus
pathogènes pour l’homme. C’est une levure encapsulée dont il est décrit 3 variétés :
C. neoformans var. neoformans retrouvé chez l’immunodéprimé par le VIH, C.
neoformans var. gattii retrouvé chez l’immunocompétent et C. neoformans var. grubii
plus rare.
Réservoir
C. neoformans var. neoformans est ubiquitaire et retrouvé dans les déjections des
oiseaux (pigeons).
La variété gattii est isolée à partir des eucalyptus dans les zones tropicales et sub-
tropicales.
Transmission
Elle se fait par inhalation à partir des poussières contaminées dispersées par le vent.
Plusieurs espèces animales peuvent être contaminées par le cryptocoque mais
aucune transmission de l’animal à l’homme n’a été démontrée. La transmission
interhumaine est possible mais rare (après transplantation de cornée et après un
AES)
Incidence annuelle
0,4-1,3 cas pour 100 000 personnes dans la population générale contre 2-7 cas pour
1000 parmi les personnes infectées par le VIH.
Physiopathologie
Après inhalation du cryptocoque, l’atteinte primitive a lieu au niveau des poumons.
Elle peut rester localisée ou se disséminer par voie sanguine, déterminant des
localisations extra-pulmonaire, dont l’atteinte du système nerveux central. La
cryptococcose survient, habituellement, lorsque les CD4 sont inférieures à 50
cellules par mm3.
TABLEAUX CLINIQUES
_ L’atteinte pulmonaire est la forme localisée qui précède la diffusion systémique.
Elle est souvent asymptomatique. Plus rarement, elle prend l’allure d’un syndrome de
détresse respiratoire aiguë.
_ La cryptococcose méningée commence souvent par des signes non spécifiques
(asthénie, fébricule, céphalées). Le syndrome méningé est inconstant. Les signes
d’encéphalite, les convulsions et les déficits localisés peuvent témoigner de
l’existence d’abcès intracérébraux.
DIAGNOSTIC
Le LCR peut être normal ; habituellement, il s’agit d’un aspect de méningite
lymphocytaire avec hyperalbuminorachie et une hypoglycorachie (20-30%). Le
diagnostic est confirmé par :
_ L’examen direct du LCR qui met en évidence des levures encapsulées après
coloration à l’encre de Chine.
_ La culture qui pousse en 2 à 5 jours
_ La détection et le titrage de l’antigène capsulaire du cryptocoque dans le LCR
et le sang (Test d’agglutination au latex)
La réalisation d’un antifongigramme permet de s’assurer de la sensibilité du germe
aux antifongiques.
EVOLUTION ET PRONOSTIC
Une antigénorachie initiale basse est de bon pronostic. Une pression intracrânienne
supérieure à 200 mm d’eau est un facteur pronostic péjoratif
TRAITEMENT
1- Prophylaxie
_ Prophylaxie primaire : Non recommandée
_ Prophylaxie secondaire : Elle se correspond au traitement d’entretien.
Amphotéricine B (0,5-1 mg/Kg/J) +Fluorocytosine (25 mg/Kg x 4/ Jour)
2-Traitement curatif
_ Traitement d’attaque : il comprend
une phase d’induction de 2 semaines
− Amphotéricine B (0,5-1 mg/Kg/J) +Fluorocytosine (25 mg/Kg x 4/ Jour)
Traitement de référence
− Amphotéricine B seule
− Fluconazole d’emblée (400 à 800 mg/J).
une phase de consolidation pour compléter 6 à 8 semaines au total :
Fluconazole (400 mg/J)
_ Traitement d’entretien : (Prophylaxie secondaire)
Fluconazole (200 à 400 mg/J)
Ou Amphotéricine B (1 mg/Kg une fois par semaine)
- Interruption des prophylaxies. Il semble actuellement possible d’envisager l’arrêt
du traitement d’entretien lorsque le taux de CD4 est supérieur à 200/mm3 depuis au
moins 6 mois. S’assurer que la durée totale de traitement est supérieure à 9 mois et
que l’antigène cryptococcique est négatif ou à un taux faible depuis au moins 3 mois
est une précaution supplémentaire.
TOXOPLASMOSE CEREBRALE
AU COURS DU SIDA

OBJECTIFS PEDAGOGIQUES
1- Préciser les circonstances de transmission de T. gondii et les principes de la
prophylaxie d’exposition.
2- Exposer les arguments diagnostiques de la toxoplasmose cérébrale (TC).
3- Exposer les principes du traitement préventif et curatif de la TC

La toxoplasmose cérébrale (TC), la plus fréquente des infections opportunistes à


l’origine de manifestations neurologiques centrales, est accessible à une prophylaxie
efficace et peu coûteuse.
DEFINITION
La toxoplasmose est due à un protozoaire, parasite opportuniste, Toxoplasma gondii.
Chez l’immunodéprimé, il s’agit le plus souvent de la réactivation d’une infection
ancienne. L’atteinte cérébrale est la localisation la plus fréquente.
EPIDEMIOLOGIE
-Agent pathogène
T. gondii existe sous trois formes :
• La forme végétative (tachyzoïte) qui se multiplie dans les cellules de l’hôte. Les
tachyzoïtes sont les formes du parasite à l’origine des lésions cliniques.
• Le kyste, résultant de nombreuses multiplications d’une forme végétative, et qui
contient de très nombreux bradyzoïtes, formes à division lente, non pathogènes. Ces
kystes, localisés principalement dans le tissu nerveux et les muscles, entretiennent
l’immunité de l’hôte immunocompétent.
• L’oocyste, fruit de la multiplication dans l’intestin du chat, peut être responsable de
la contamination humaine à partir d’aliments souillés par les excréments des chats.
-Cycle
Le cycle complet se déroule chez l’hôte intermédiaire (herbivores et carnivores) puis
chez l’hôte définitif, le chat.
-Répartition géographique. Prévalence.
La toxoplasmose humaine est ubiquitaire. La séroprévalence de la toxoplasmose
dans la population générale est variable selon les régions : 50 à 70% en France,
moins de 30% dans les pays scandinaves et les Iles Britanniques, 20 à 50% en
Europe méridionale et en Afrique.
-Physiopathologie
Chez les patients infectés par le VIH, la TC correspond, le plus souvent, à une
réactivation d’une toxoplasmose ancienne secondaire à la rupture des kystes. Ces
réactivations surviennent lorsque la baisse de l’immunité cellulaire du patient ne
permet plus de maintenir l’équilibre avec les formes quiescentes du parasite (en
règle, lorsque les CD4 sont inférieures à 100 cellules par mm3).
CLINIQUE
-Forme encéphalitique abcédée focalisée (80% des cas) : se traduit par un syndrome
déficitaire focalisé avec des signes d’hypertension intracrânienne (HIC) et parfois des
convulsions. La fièvre est souvent présente.
-Forme encéphalitique diffuse : se traduit par un syndrome d’HIC et/ou des
convulsions généralisées.
DIAGNOSTIC POSITIF
Le diagnostic est retenu sur un faisceau d’argument mais c’est la réponse au
traitement spécifique qui constitue le critère diagnostique essentiel.
-Arguments sérologiques : La négativité de la sérologie toxoplasmique est un
argument contre
-Arguments neuroradiologiques : La règle est de pratiquer une tomodensitométrie
(TDM) ou une imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale devant tout déficit
neurologique focalisé et/ou toutes céphalées fébriles. L’aspect typique est l’image en
cocarde : hypodensité/hyposignal centrale entourée d’une prise de contraste en
anneau avec, en périphérie de la lésion, une zone d’hypodensité/hyposignal
importante (oedème périlésionnel).
-La biopsie stéréotaxique n’est pas faite en première intention, elle est indiquée en
cas de non réponse au traitement spécifique.
-Arguments apportés par l’étude du LCR si la PL n’est pas contrindiquée : permet
d’éliminer d’autres infections. La recherche du T. gondii par PCR ou des IgM ou IgA
spécifiques (technique ISAgA) sur LCR ne sont pas de pratique courante.
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
1- Devant toute anomalie neurologique d’origine centrale chez un patient infecté par
le VIH, la TC doit être évoquée et un traitement spécifique démarré. Cependant,
toutes les étiologies des lésions focalisées du système nerveux centrale se discutent
(Tuberculose, abcès à pyogène, lymphome cérébral…)
2-Devant les signes radiologiques : lymphome cérébral, LEMP…
EVOLUTION ET PRONOSTIC
L’évolution clinique et radiologique favorable constitue la preuve du diagnostic. Des
complications sont possibles : convulsions, troubles de l’état de conscience,
complications du décubitus, toxicité médicamenteuse. La précocité du traitement est
l’élément majeur du pronostic vital et neurologique.
TRAITEMENT
1- Prophylaxie
- Prophylaxie d’exposition : La sérologie toxoplasmique doit être réalisée de façon
systématique au cours du bilan biologique initial de tout patient infecté par le VIH.
Pour les patients ayant une sérologie toxoplasmique négative, conseiller les mesures
hygiènodiététiques suivantes : éviter le contact des chats et ne pas manger de
crudités ou de viande insuffisamment cuite.
- Prophylaxie primaire : Pour les malades ayant une sérologie toxoplasmique
positive, comme pour la pneumocystose, il est recommandé de commencer la
prophylaxie à partir de 200 CD4 et le cotrimoxazole constitue une prophylaxie
combinée protégeant contre les deux IO.
(Tableau I)
- Prophylaxie secondaire : Faisant suite au traitement curatif d’attaque, elle est
constituée par les mêmes molécules en réduisant les doses. Cependant, le
pyriméthamine seul peut constituer une alternative. (Tableau I)
- Interruption des prophylaxies. Un taux de lymphocytes CD4 > 200/mm3 pendant
au moins 3 mois permet d’arrêter la prophylaxie primaire. Il est préférable d’attendre
un délais de 6 mois avant d’interrompre la prophylaxie secondaire. Cependant, la
prévention doit être reprise en cas d’échappement thérapeutique ou d’interruption
momentanée ou définitive des antirétroviraux.
2-Traitement curatif (Tableau II)
La durée du traitement d’attaque est habituellement de 6 semaines.
PNEUMOCYSTOSE PULMONAIRE
AU COURS DU SIDA

OBJECTIFS PEDAGOGIQUES
1- Préciser les circonstances de survenue de la pneumocystose pulmonaire (PCP)
2- Exposer les arguments diagnostiques en faveur de la PCP.
3- Exposer les principes du traitement préventif et curatif de la PCP

Historiquement, c’est l’infection opportuniste qui a permis d’individualiser le


syndrome d’immunodéficience acquise (augmentation de son incidence dans la
population homosexuelle aux USA). Elle peut être efficacement prévenue grâce à la
chimioprophylaxie et au traitement antirétrovirale.
DEFINITION
C’est une infection due à un Pneumocystis, germe classé actuellement parmi les
champignons. Ce germe peut se développer dans plusieurs organes (oeil, ganglions,
moelle osseuse), mais préférentiellement dans le poumon.
EPIDEMIOLOGIE
1- Le germe
Initialement appelé Pneumocystis carinii, il a longtemps été considéré comme un
parasite. En fait, il a des caractéristiques tinctorales et de biologie moléculaire qui le
font classer actuellement parmi les champignons. Le genre Pneumocystis comprend
plusieurs espèces dont une seule est pathogène pour l’homme. Il s’agit de
Pneumocystis jirovecii.
2-Hôte
Les Pneumocystis sont caractérisés par une très forte spécificité d’hôte : P. jirovecci
pour l’homme, P. macaca pour le macaque, P. carinii et P. wakefeldi pour le rat… Ce
n’est donc pas une zoonose.
4-Sources et réservoirs
La source de contamination est l’homme malade ou porteur sain de Pneumocystis.
Très probablement, il existe d’autres sources et réservoirs dans l’environnement.
5-Transmission
La transmission aérienne est une certitude. A l’heure actuelle, il est démontré que la
pneumocystose de l’immunodéprimé n’est plus liée à la réactivation d’un portage
pulmonaire chronique. Ainsi, la pneumocystose de l’immunodéprimé est considérée
comme résultant de l’acquisition de novo du champignon à partir d’une source
exogène.
TABLEAUX CLINIQUES
_ Le début est habituellement insidieux, marqué par l’apparition et l’aggravation
progressive d’une toux sèche avec dyspnée et fièvre, l'évolution se faisant vers un
tableau d'insuffisance respiratoire aiguë. La PCP survient surtout lorsque les CD4
sont inférieures à 200 cellules /mm3, témoignant d’une immunodépression avancée.
Tant que le diagnostic de l’infection à VIH reste tardif, la PCP restera une
circonstance de découverte fréquente. Par contre, lorsque l’infection à VIH est
connue, la thérapie antirétrovirale et la chimioprophylaxie permettent une
remarquable réduction d’incidence.
_ Formes disséminées extrapulmonaires plus rares (ganglionnaire, médullaire...).
L’usage d’aérosols de pentamidine favoriserait ces formes extrapulmonaires.
DIAGNOSTIC POSITIF
Devant des signes respiratoires évocateurs, le diagnostic est conforté par :
_ La radiographie du thorax qui met en évidence des opacités interstitielles ou
alvéolaires bilatérales. L’évolution peut se faire vers l’aspect de ‘poumon blanc’.
_ Le dosage des lacticodéshydrogénases sériques (LDH) qui est très utile en
urgence. Des LDH très élevées orientent vers la PCP (diagnostic différentiel).
La confirmation de la PCP repose sur la mise en évidence du Pneumocystis dans les
sécrétions broncho-alvéolaires recueillies par lavage broncho-alvéolaire (LBA) ou par
expectorations induites ou dans des fragments biopsiques.
Les sécrétions ou les appositions d'organes seront colorés par le Gomori-Grocott
ainsi que par le May-Grünwald-Giemsa (M.G.G) ou le bleu de Toluidine.
Pneumocystis ne pousse pas sur les milieux habituellement usités en mycologie. On
peut également utiliser des techniques d'Immunofluorescence directe utilisant des
anticorps monoclonaux. Actuellement, des études font état de l'intérêt de l'utilisation
de sonde génomique et amplification par PCR pour rechercher legerme dans les
produits biologiques. La sérologie n'est pas de pratique courante et elle n'a qu’un
intérêt épidémiologique.
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
Devant les manifestations respiratoires : tuberculose pulmonaire, pneumonies à
bactérie pyogène, à cryptocoque, toxoplasme ou cytomégalovirus,
EVOLUTION ET PRONOSTIC
L’évolution dépend de la sévérité de la PCP et de la précocité du traitement.
Plusieurs types de complications peuvent émailler l’évolution : pneumothorax,
insuffisance respiratoire aiguë, toxicité médicamenteuse.
Plusieurs facteurs pronostiques ont été identifiés : une PaO2 inférieure à 50 mmHg
au début du traitement, une élévation majeure des LDH, un pourcentage de
neutrophiles supérieur à 10% au LBA.
TRAITEMENT
1-Prophylaxie
Prophylaxie primaire de la Pneumocystose
Il est recommandé de commencer la prophylaxie chez tout patient infecté par le VIH
si les CD4 sont inférieures à 200 cellules/mm3 ou si les CD4 sont compris entre 200
et 500 mais chutent rapidement.
La meilleure prophylaxie est le cotrimoxazole (Tableau I). En cas d’allergie, il est
conseillé de tenter une désensibilisation avant d’abandonner définitivement ce
produit. La prophylaxie primaire est prescrite à vie. Cependant, avec l’utilisation des
multithérapies antirétrovirales permettant une restauration de l’immunité, on peut
actuellement envisager l’interruption de ces prophylaxies sous certaines conditions.
Prophylaxie secondaire de la pneumocystose Elle est identique à la prophylaxie
primaire. La restauration immunitaire permet d’envisager l’interruption des
prophylaxies. Des CD4 supérieures à 200/mm3 pendant au moins 3 mois permettent
d’arrêter la prophylaxie primaire et secondaire de la pneumocystose. Cependant, la
prévention doit être reprise en cas d’échappement thérapeutique ou d’interruption
momentanée ou définitive du traitement.
2-Traitement curatif
Il nécessite un traitement d’attaque par cotrimoxazole pour une durée de 21 jours,
suivi d’un traitement d’entretien (prophylaxie secondaire).
Une corticothérapie courte est indiquée en cas d’hypoxémie (Pao2 < 60 mmHg). Elle
peut être administrée soit per os (prednisone : 80 mg/J X 5J, puis 40 mg/J X 5J, puis
20 mg/J X 11J), soit par voie IV (méthylprednisolone : 240 mg/J X 3J, puis 120 mg/J
X 3J, puis 60 mg/J X 3J).
Le recours à une oxygénation par sonde nasale est souvent nécessaire. En cas
d’hypoxémie sévère, l’oxygénation au masque en pression expiratoire positive
permet d’éviter l’intubation et l’assistance respiratoire.

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