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Communication brève
Résumé
Introduction. – Le Cryptococcus neoformans infecte électivement le système nerveux central en réalisant des tableaux variés de méningite
ou de méningoencéphalites avec ou sans lésion focale (abcès ou granulome), mais les localisations intramédullaires sont exceptionnelles.
Exégèse. – Les auteurs rapportent le cas d’un homme de 70 ans, sous corticoïdes pour une fibrose pulmonaire depuis le traitement d’une
maladie de Hodgkin qui installa en huit jours une ataxie, un syndrome pyramidal et une bradypsychie. L’IRM montrait une lésion intramé-
dullaire rehaussée en masse avec le gadolinium en D4, ainsi que d’autres plus petites en particulier au niveau de la moelle terminale. Le LCR
comptait 190 GB à prédominance lymphocytaire, une hyperprotéinorachie (2,28 g/l), une hypoglycorachie (1,5 mmol/l) et la présence d’anti-
gènes solubles cryptococciques (réaction d’agglutination au 1/4). Le traitement par amphotéricine B et flucytosine puis pendant six mois par
fluconazole permit une évolution favorable.
Conclusion. – L’origine cryptococcique d’une myélopathie isolée ou intégrée dans un tableau de méningoradiculoencéphalomyélite doit
être recherchée par l’étude des antigènes solubles dans le LCR, tout particulièrement en cas de déficit de l’immunité à médiation cellulaire. Le
traitement antifongique doit être utilisé en première intention, réservant la chirurgie aux cas d’aggravation clinique avec en IRM un aspect de
compression médullaire et nécessite d’être prolongé en cas d’immunodéficience.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Abstract
Introduction. – If meningoencephalitis with or without mass lesion (granuloma or abscess) is the most common pattern of CNS crypto-
coccal infection, intramedullary involvement is very uncommon.
Exegesis. – The authors report an 70-year-old male with Hodgkin’s disease treated by chemotherapy then corticosteroids because of
pulmonary fibrosis who was presenting for eight days ago, an ataxia, pyramidal syndrome, and bradypsychy. Spinal MRI revealed a gadoli-
nium T1 weighted homogeneous enhancing T4 level intramedullary lesion. CSF had showed 190 GB/mm3 of lymphomonocytes, increased
protein level (2.28 g/l), decreased glucose level (1.5 mmol/l) and positivity for crytococcal antigen. Treatment by amphotéricine B and
flucytosine then fluconazole for six months was instituted and symptoms gradually improved.
Conclusion. – A cryptococcus infection must be searched by antigen in CSF in case of myelopathy isolated or associated with meningo-
radiculoencephalomyelopathy, specially in patients with a cellular immunodeficience. Antimycotic agents must be firstly used, surgery would
be restricted to decompression if aggravation of disease and compressive effect on the adjacent structures radiologically (MRI) became
evident. Prolonged treatment is necessary in case of immunodeficience.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : drouetalain@yahoo.fr (A. Drouet).
0248-8663/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.revmed.2004.12.005
404 A. Drouet et al. / La revue de médecine interne 26 (2005) 403–408
1. Observation
2. Discussion
Fig. 3. IRM cérébrale, coupes axiales, en pondération T2 (FLAIR) : a) plages discrètement hyper-intenses au niveau du vermis médian et des hémisphères
cérébelleux autour du V4 ; b) non retrouvées quatre mois plus tard.
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Tableau 1
Cas de la littérature
Sexe Âge VIH Délai Signes et symptômes Imagerie LCR Histologie Cryptococcus Évolution Traitement
neurologiques rachidienne cerveau GB P : g/l culture/ médullaire néoformans
encre/
Ag
Carton et F 56 – 120 jours Paraparésie, prédominance NF NF GB ? 4,2 NF Abcès/ + Séquelles Opéré
Mount 1951, distale, aréflexie, niveau Granulome
cas 2 sensitif L1
Ramamurthi F 17 – 120 jours Syndrome pyramidale des myelo anormale NF 4 GB (ly) 0,2 NF Granulome + Normal Opéré
1954 membres inférieurs avec D2 12 mois
ment impliquée, à l’exception d’un cas où il s’agit du curva- l’arrêt prématuré du traitement antifongique. La chirurgie
tus [12]. Le tableau neurologique s’installe en moyenne en seule n’a été réalisée que dans les deux cas les plus anciens,
44,45 jours (2 à 120 jours), deux patients souffrant de plus et a précédé (4 fois) ou suivi (1 fois) le traitement médical.
d’une douleur radiculaire dorsale ou lombaire localisée depuis Ce dernier a utilisé de l’amphotéricine B (9/10), le plus sou-
36 et 22 mois. Il s’agit le plus souvent d’une paraparésie vent en association (fluconazole, 4 fois ; flucytosine, 2 fois),
(8 cas) à prédominance distale avec hyporéflexie diffuse (4/6) ; avec un relais plus ou moins prolongé par fluconazole en cas
une tétraparésie [11], une monoparésie du membre inférieur de séropositivité pour le VIH et chez notre patient. La loca-
gauche [13, cas 1], un syndrome pyramidal irritatif pur [8], et lisation médullaire exclusive ou prédominante de l’infection
une ataxie avec un signe de Babinski bilatéral (cas person- dans ces observations reste inexpliquée, même si elle devrait
nel) ont aussi été rapportés, sans signe d’atteinte cérébrale, être relativisée en l’absence d’une exploration IRM cérébrale
excepté chez notre patient et le premier de Gumbo et al. [13] pour la majorité d’entre elles. Si l’on peut vraisemblable-
qui souffrait de céphalée. Si les anomalies radiculaires détec- ment écarter chez notre patient le caractère abcédé de la lésion
tées par l’EMG sont imputables à l’infection cryptococcique, dorsale, sa prise de contraste en masse et extensive en largeur
la polyneuropathie sensitive axonale est dans notre observa- évoque plus une myélite transverse qu’un granulome dont
tion vraisemblablement d’origine iatrogène (vinblastine). La l’aspect est habituellement plus circonscrit. Cette constata-
myélographie est anormale deux fois sur deux, tandis que le tion pourrait être rapprochée du fait que deux aspects histo-
scanner X (un seul cas étudié) et l’IRM chez trois patients pathologiques sont possibles dans cette infection et refléte-
VIH+ ne montrent pas d’anomalie médullaire. En revanche, raient le degré d’immunodépression de l’hôte : un granulome
l’IRM décèle chez cinq autres malades (un seul étant inflammatoire renfermant très peu de levures est présent chez
VIH+)une lésion iso-intense selon T1, prenant le contraste les sujets immunocompétents où la prolifération fongique peu
en anneau (3) ou en masse (2) avec le gadolinium sur une intense, limitée par les réactions de défenses de l’hôte inté-
hauteur de moins d’un corps vertébral, hyper- (2) ou hypo- resse surtout les méninges et moins l’encéphale de façon alors
(1) intense en T2, entourée d’œdème (2) et déformant la modérée ; à l’inverse en cas d’immunodéficience induite
moelle (4). De multiples lésions médullaires et arachnoïdien- notamment par le VIH de très nombreux amas de cryptoco-
nes au niveau de la queue de cheval n’ont été observées que ques intra- et extracellulaires entourant quelques cellules
chez notre patient, à rapprocher des constatations anatomi- inflammatoires infectent plus largement le parenchyme [1].
ques du cas de Skultety qui présente une lésion intramédul- L’absence de lésion osseuse et (ou) ganglionnaire au voisi-
laire à hauteur de D6 et de nombreux granulomes le long des nage de la myélopathie dans les cas rapportés de la littérature
racines lombosacrées [9]. Il faut noter chez les sept patients plaide en défaveur d’une contamination par contiguïté, ren-
(le notre compris) où une lésion médullaire unique ou prédo- forçant l’hypothèse d’une dissémination par voie hémato-
minante a été détectée grâce à la myélographie (2) ou à l’IRM gène avec passage direct de la levure à travers l’endothélium
(5), son siège dorsal haut (D2 ; D4 ; D6) ou dorsolombaire qui compose la barrière hématoencéphalique [1].
(D11–D12, 2 fois ; D12 ; L1). Au niveau cérébral, le scanner
X a été chaque fois normal (5 cas), mais l’IRM réalisée à
trois reprises, seulement une fois: hormis le cas de notre 3. Conclusion
patient, celui de Grosse et al.[12]présente ainsi six lésions
d’aspects identiques à celles de la moelle. L’analyse du LCR L’origine cryptococcique d’une myélopathie qu’elle soit
retrouve rarement une méningite lymphocytaire avec alors isolée ou intégrée dans un tableau de méningoradicu-
une hypoglycorachie (Gumbo et al., cas 1 ; cas personnel), loencéphalomyélite doit être recherchée par l’étude des anti-
tandis qu’une hyperprotéinorachie est fréquente (7/11). Le gènes spécifiques dans le LCR, tout particulièrement chez le
diagnostic de l’infection a été néanmoins assuré par l’ana- sujet porteur d’un déficit de l’immunité à médiation cellu-
lyse du LCR dans les huit cas où elle a été effectuée grâce à la laire. Le traitement antifongique doit être utilisé en première
détection plus ou moins associée d’antigènes cryptococci- intention, réservant la chirurgie aux cas d’aggravation clini-
ques (4/4), et d’une positivité de la culture (4/6) ou de l’encre que avec en IRM un aspect de compression médullaire et
de chine (6/7) ; dans le sang, la présence d’antigènes a été nécessite d’être prolongé en cas d’immunodéficience.
notée trois fois sur trois. Sept patients ont bénéficié d’une
étude histologique de la lésion médullaire chaque fois posi-
Références
tive (5 granulomes, 2 abcès, 1 lésion mixte), le diagnostic
étant porté par ce seul moyen trois fois. L’évolution a été [1] Neuville S, Dromer F, Chretien F, Gray F, Lortholary O. Physio-
favorable sans séquelle en un à 12 mois pour huit patients pathologie des méningoencéphalites dues à Cryptococcus neofor-
grâce au traitement chirurgical (1), médical (4, dont notre cas) mans. Ann Med Interne (Paris) 2002;5:323–8.
ou associant les deux (3). Des séquelles marquées ont été [2] Salaki JS, Louria DB, Chmel H. Fungal and yeast infections of the
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