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LEUCEMIE MYELOIDE CHRONIQUE

Cours d’hématologie en Master 1 Médecine


Présenté le 20/02/2023

OBJECTIFS
1. Définir une leucémie myéloïde chronique
2. Evoquer une LMC
3. Citer les examens complémentaires à recommander pour le diagnostic de la LMC
4. Enumérer les complications d’une LMC
5. Connaitre les phases d’évolution d’une LMC
6. Enoncer les principes du traitement

PLAN
I. GENERALITES
a. DEFINITION
b. EPIDEMIOLOGIE
c. PHYSIOPATHOLOGIE
II. DIAGNOSTIC POSITIF
a. ASPECTS CLINIQUES
b. EXAMENS COMPLEMENTAIRES
c. PRONOSTIC
d. EVOLUTION
III. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
IV. PRINCIPAUX ASPECTS THERAPEUTIQUES

INTRODUCTION
Il s’agit d’une prolifération maligne et systématisée de la lignée granulocytaire sans blocage
de maturation qui fait partie des syndromes myéloprolifératifs chroniques (SMP).
Une anomalie cytogénétique est constamment associée à la maladie : le chromosome Philadelphie
(Ph1), qui génère une protéine de fusion à forte activité tyrosine kinase, responsable de
l’hématopoïèse leucémique.
La plupart des cas de LMC en phase chronique sont diagnostiqués avec l’hémogramme et la
détection du chromosome Philadelphie t(9;22)(q34.1;q11.2), ou plus spécifiquement de l’anomalie
moléculaire BCR-ABL1. Cependant une aspiration médullaire est indispensable pour obtenir
suffisamment de matériel pour obtenir un caryotype complet et pour confirmer morphologiquement
la phase chronique.
Du fait des traitements utilisant un ITK, les patients peuvent espérer une durée de vie normale,
mais un suivi régulier de la maladie résiduelle moléculaire et l’absence d’évolution cytogénétique
sont indispensables pour appréhender la résistance aux ITK et détecter une progression de la
maladie. L’OMS 2016 propose, sous forme d’entité provisoire, des critères liés à une résistance aux
ITK.
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I. GENERALITES
a. DEFINITION
Syndrome myéloprolifératif prédominant sur les lignés granuleuses et caractérisé par la
présence d’une anomalie cytogénétique acquise clonale, le chromosome Philadelphie (Ph), résultant
d’une translocation réciproque t(9,22). Cette translocation conduit à une fusion entre les gènes BCR
et ABL. Le produit de ce gène de fusion est une protéine p210 dont l’activité tyrosine kinase dérégulé
est nécessaire et suffisante à la leucémogenèse.

b. EPIDEMIOLOGIE
Maladie rare : 1000 nouveaux cas / an en France (incidence = 1-2 nouveaux cas / 100 000 H/an)
Découverte à tout âge : plus fréquente chez l'adulte au-delà de 60 ans (médiane d'âge au diagnostic
= 67 ans), moins de 10% des cas avant l'âge de 20 ans.
Discrète prédominance masculine : sex ratio = 1,1 à 1,2.
Etiologie inconnue, mais dans 5% des cas elle est secondaire à une exposition chronique au benzène
ou aux radiations ionisantes.

c. PHYSIOPATHOLOGIE
Le chromosome Philadelphie (Ph) est présent dans 90 à 95% des cas de leucémie myéloïde
chronique. Le chromosome Ph est le produit d'une translocation réciproque entre les chromosomes
9 et 22, t(9;22). Au cours de cette translocation, un fragment du chromosome 9 contenant
l'oncogène ABL est transféré sur le chromosome 22 et fusionné au gène BCR. Le gène de fusion
chimérique BCR-ABL est responsable de la production de l'oncoprotéine tyrosine kinase bcr-Abl.
L'oncoprotéine bcr-abl a une activité tyrosine kinase non contrôlée qui dérégule la prolifération
cellulaire, diminue l'adhésion des cellules leucémiques au stroma de la moelle osseuse et protège les
cellules leucémiques de la mort cellulaire programmée normale (apoptose).
La leucémie myéloïde chronique se développe lorsqu’une cellule-souche progénitrice
pluripotente anormale initie une production excessive de toutes les cellules de la lignée myéloïde,
principalement dans la moelle osseuse, mais aussi dans des sites extramédullaires (rate, foie). Bien
que la production de granulocytes prédomine, le clone malin comprend des globules rouges, des
mégacaryocytes, des monocytes et même une certaine proportion de lymphocytes B et T.
Les cellules-souches normales sont inhibées et peuvent émerger après suppression du clone
leucémique de la leucémie myéloïde chronique par le traitement.

Non traitée, la leucémie myéloïde chronique passe par 3 phases:


 Phase chronique: une phase chronique indolente initiale qui peut durer 5 à 6 ans
 Phase accélérée: échec du traitement, aggravation de l'anémie, thrombopénie ou
thrombocytose progressives ou aggravation persistante de la splénomégalie, évolution
clonale, augmentation des basophiles du sang, et augmentation des blastes osseux ou
sanguins (jusqu'à 19%)
 Phase blastique: accumulation de blastes dans les sites extramédullaires (os, système
nerveux central, ganglions lymphatiques, peau), blastes dans le sang ou la moelle augmentés
à ≥ 20%
La phase blastique conduit à des complications d'évolution rapide similaires à celles observées dans
la leucémie aiguë (sepsis, hémorragies). Certains patients progressent directement de la forme
chronique vers la phase blastique.

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II. DIAGNOSTIC POSITIF
a. ASPECTS CLINIQUE S
Dans 50% des cas : absence de symptômes ; la découverte est fortuite avec l’hémogramme.

La splénomégalie est quasi constante (asymptomatique dans 50% des cas), de volume modéré à très
important, indolore, mobile avec la respiration et isolée (l’échographie abdominale en définit
précisément la taille, +/- proportionnelle à l'hyperleucocytose).
Absence d'adénopathies
Autres signes (inconstants) :
- asthénie, sueurs nocturnes, perte de poids.
- plus rarement : complications thrombotiques inaugurales

b. EXAMENS COMPLEMENTAIRES

1. HEMOGRAMME

Anémie modérée.
Origine : centrale par insuffisance de production, et +/- périphérique par hypersplénisme
Hémoglobine : 11-13 g/dL; < 10 g/dL chez 15% des pts (Hb plus basse si forte hyperleucocytose)
L'anémie est normochrome normocytaire, non régénérative.
Morphologie des hématies : normale sur frottis. Présence de quelques hématies en larme
(dacryocytes) quand la splénomégalie est volumineuse.
Nombre d’érythroblastes circulants : < 2%

Hyperleucocytose franche.
Leucocytes : > 100 G/L dans 50% des cas, pouvant atteindre 500 G/L
(médiane au diagnostic = 105 G/L)

- Polynucléose neutrophile avec myélémie importante. Polynucléaires


neutrophiles : 40 -60 %
- Myélémie : 30 - 60 % ; essentiellement des métamyélocytes et myélocytes, et
quelques promyélocytes (< 5 %).
- Blastes non différenciés et myéloblastes : < 3 % (si Nb élevé : envisager une phase
accélérée).
- Absence de dysgranulopoïèse.
- Excès quasi constant de granulocytes basophiles jusqu’à 10 - 15% du total
leucocytaire.
- Petit excès d’éosinophiles : pouvant parfois dépasser 10 G/L (= 5 - 20% du total
leucocytaire)
- Lymphocytes : nombre normal mais parfois augmenté en valeur absolue
(augmentation du Nb de lymphocytes T)
- Monocytes : nombre normal (sauf très rares cas d’hypermonocytose associée à un
transcrit particulier)

Taux plaquettaire : augmentée dans 50 % des cas 3


(parfois > 1000 G/L) (diagnostic différentiel à envisager avec la TE si l’hyperleucocytose est modérée,
mais il n’y a pas de Ph1 dans la TE)
Présence de quelques noyaux nus de mégacaryocytes sur frottis sanguin dans 25% des cas

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2. MYELOGRAMME

Nécessaire au diagnostic pour :


* définir le % blastes (phase d’accélération ou blastique débutante ?)
* réaliser le caryotype et l'étude moléculaire.

Ponction médullaire facile à réaliser ; os de dureté normale (à l’opposé de la splénomégalie


myéloïde)

Frottis médullaires : richement cellulaires.


- Les mégacaryocytes sont en nombre normal ou augmenté, souvent de taille réduite et avec noyau
peu segmenté.

Hyperplasie globale de la lignée granuleuse (tous stades bien représentés), habituellement sans
excès de blastes (si blastes > 5%, envisager une phase accélérée)
- Excès d’éosinophiles et de basophiles, en parallèle de l’excès sanguin.
- Erythroblastopénie, classiquement < 10 %

Biopsie ostéomédullaire : pas indispensable au diagnostic.


* Moelle très riche avec raréfaction ou disparition des adipocytes : hyperplasie
granulocytaire: rapport G/E = 10 – 30 (normale = 2-5)
* Myélofibrose absente, ou modérée de type réticulinique (plutôt associée aux formes avec
volumineuse splénomégalie et/ou anémie et/ou excès de blastes).

3. CARYOTYPE
Sur prélèvement de sang si myélémie nette, si non sur prélèvement médullaire.

Dans > 95% des cas : présence du chromosome Philadelphie ou Ph1 qui correspond à un
chromosome 22 raccourci, résultat de la translocation réciproque et équilibrée entre les bras longs
des chr 9 et 22 : t(9;22)(q34;q11).

Caryotype médullaire montrant un chromosome 22 raccourci correspondant au chromosome Philadelphie

Sur le bras long du chromosome 9 le gène ABL (abelson) se coupe (souvent entre les régions Ib et a2)
et sa partie télomérique (a2 …e19…) vient se localiser à la place de la partie télomérique du bras long 4
du chromosome 22, après b2,b3,…, dans une région appelée BCR (breakpoint cluster region)

Cette translocation aboutit à un chromosome 22 très court (= Ph1) sur lequel se trouve le gène
chimérique BCR-ABL, formé du début de BCR et le la fin d’ABL

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Dans < 5% des cas le Ph1 n’est pas retrouvé tel quel, mais impliqué dans des translocations
complexes (= Ph1 masqué)

Au diagnostic le Ph1 est généralement isolé (= pas d’autre anomalie).

Parfois on retrouve une ou quelques anomalies associées (trisomie 8 ou 19, duplication du Ph1,
anomalies du 17) qui correspondent à une évolution clonale.

Remarque : - Le Ph1 est présent dans toutes les cellules myéloïdes et lymphocytaires B, plus rarement
dans les lymphocytes T)

4. BIOLOGIE MOLECULAIRE
La translocation juxtapose une partie du gène bcr (breakpoint cluster région) du chr 22 de l'oncogène
Abelson (c-abl) situé sur le chr 9.
La conservation du cadre de lecture permet la synthèse d'ARN messagers hybrides
dits chimériques comportant des séquences bcr en 5' et c-abl en 3'.

Les points de cassure sont regroupés entre Ib et Ia sur abl, alors qu’il existe plusieurs régions de
cassure sur bcr : 5

- La région M bcr (Major bcr) est majoritairement impliquée dans la LMC: le transcrit est b3a2 (=
e14a2 dans 60% des cas) ou b2a2 (= e13a2 dans 35% des cas). L'ARN chimérique bcr/abl est traduit

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en une protéine de fusion p210 bcr/abl ayant un pouvoir oncogénique avec très forte activité
tyrosine kinase.

Remarque : on peut retrouver les 2 transcrits chez 5 à 10% des pts

- La région m bcr (minor bcr) est impliquée dans 0.4 % des LMC: le transcrit est e1a2, qui produit la
protéine p190 (ce transcrit est fréquemment associé à : monocytose, absence de basophilie, et
absence de splénomégalie (par ailleurs m bcr est retrouvé dans environ 2/3 des LAL Ph+)

- La région µ bcr (micro bcr) est impliquée dans < 0.1 % des LMC: le transcrit est e19a2, qui produit
la protéine p230 (thrombocytose au premier plan, parfois > 1000 G/L et pouvant être isolée).

Mise en évidence de l’anomalie :


On recherche et on quantifie le transcrit chimérique par technique RQ-PCR
Le ratio initial de transcrit chimérique par rapport au gène ABL [BCR-ABL/ABL] reflète la
masse leucémique totale : il sera mesuré régulièrement pour le suivi de l'efficacité thérapeutique.

Remarque : il existe un kit permettant la mise en évidence de la protéine de fusion par cytométrie de
flux, utilisant des billes recouvertes d’Ac ajoutées à un lysat de cellules à tester.

Pathogénie moléculaire
L’activité tyrosine kinase de BCR-ABL est très augmentée (200 fois) par rapport à celle de ABL seule,
et a au moins 2 effets dans la LMC :
- stimulation des voies de signalisation et de prolifération, augmentant la prolifération et
diminuant l’apoptose : augmentation du compartiment myéloïde ;
- modulation des réponses aux lésions de l’ADN et mutagenèse via les ROS (radicaux libres
oxygénés), qui provoquent : instabilité génomique, mutations supplémentaires, doublements
géniques, translocations et cassures chromosomiques supplémentaires.

5. AUTRES EXAMENS
- Hyperuricémie (témoin de l'hypercatabolisme cellulaire).
- Augmentation des LDH sériques.
- Augmentation de la vitamine B12 sanguine, jusqu'à 10 fois la normale, par augmentation du
transporteur transcobalamine 1 synthétisé par les granulocytes ( mais cette vit B12 est peu
disponible pour l'hématopoïèse)
- Artéfacts biologiques (in vitro) observables chez les patients très hyperleucocytaires :
* pseudohyperkaliémie si analyse faite sur sérum, secondaire au relargage de potassium
par les leucocytes lors de la coagulation dans le tube;
* hypoglycémie et hypoxémie de consommation par les leucocytes.

- La cytochimie des phosphatases alcalines leucocytaires (PAL; absence de positivité pour cette
enzyme au Dg de la LMC) n'est plus prescrite.

III. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL


1. DEVANT UNE POLYNUCLÉOSE NEUTROPHILE AVEC MYÉLÉMIE 6
La situation clinique est généralement bien différente.

- Etats infectieux ou inflammatoires sévères : mais la N° leucocytaire est rarement > 50 G/L, la
myélémie modérée < 15%, et il n’y a pas d’excès de polynucléaires basophiles.

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- Syndrome paranéoplasique par synthèse de cytokines stimulant la granulopoïèse : N° leucocytaire
parfois > 100 G/L, mais sans myélémie.

2. LES AUTRES SYNDROMES MYÉLOPROLIFÉRATIFS


- Dans quelques cas (5-10 %) la LMC peut se présenter sous une forme où la polyglobulie ou
l’hyperthrombocytose prédominent : ceci justifie la recherche systématique d’un remaniement bcr-
abl au cours de toutes les polyglobulies vraies et les TE.
La recherche de la mutation JAK2 n’est jamais présente dans la LMC.

- La splénomégalie myéloïde chronique peut être initialement hyperleucocytaire, mais il existe alors
une érythromyélémie (érythroblastes = 2 - 10%), et des anomalies morphologiques franches des
hématies (anisopoïkilocytose, nombreuses hématies en larme) et des plaquettes
(macrothrombocytes). Outre l’absence de Ph1, la ponction médullaire est de réalisation technique
difficile (os très dur) ; la BOM permet le diagnostic définitif.

3. LES SYNDROMES MYÉLOPROLIFÉRATIFS / MYÉLODYSPLASIQUES.

- Dans sa forme proliférante la leucémie myélomonocytaire chronique (LMMC) associe


splénomégalie, hyperleucocytose, polynucléose neutrophile et myélémie : mas il existe une
monocytose excessive (> 1G/L), la myélémie est plus modérée, une dysgranulopoïèse est souvent
présente. Il n’y a pas de chromosome Ph1.

- Les exceptionnelles LMC atypiques ressemblent plus ou moins à des LMMC proliférantes, et sont
toujours Ph1 négatives.

IV. PRONOSTIC
Plusieurs scores sont utilisés pour définir le pronostic initial du patient, tenant compte de l’âge, du
volume splénique, de la N° plaquettaire, du nombre de blastes, éosinophiles et basophiles sanguins.
On peut calculer des scores (risque faible, intermédiaire, élevé d’évolution vers la phase blastique) en
consultant les sites internet :
Score de SOKAL (1984) : prend en compte l'âge, le volume splénique, la N° plaquettaire et le % de
blastes sanguins (voir : http://www.roc.se/sokal.asp )
Score EURO (ASHFORD, 1998) : prend en compte l'âge, le volume splénique, la N° plaquettaire et le %
de blastes, le % de basophiles sanguins, et le % d'éosinophiles (voir http://www.pharmacoepi.de/cgi-
bin/cmlscore.cgi )

Score EUTOS (2011) : prend en compte le volume splénique et le % de basophiles sanguins


(voir http://www.leukemia-net.org/content/leukemias/cml/eutos_score/index_eng.html

Ces scores définissent les risques relatifs (faible, intermédiaire, élevé) : il semble actuellement que
les patients de risque intermédiaire n'aient pas une évolution différente de ceux du groupe de faible
risque.

V. EVOLUTION : de la phase chronique à la phase blastique.


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* En l’absence de traitement la LMC évoluait le plus souvent en 3 phases successives : chronique,
puis accélérée, puis blastique, cette dernière correspondant à une leucémie aiguë et survenant 3 à 8
ans après le diagnostic.

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* Les traitements myélofreinateurs (busulfan, hydrea) diminuent la leucocytose et le volume
splénique, mais sont sans effet sur la durée de la phase chronique et le délai d'apparition de la
phase blastique.

* L’utilisation d’inhibiteurs de tyrosine kinase a modifié l’évolution naturelle de la maladie : la durée


de la phase chronique est allongée, avec un rythme de transformation blastique = 1-2 % par an.

* Avec le traitement ITK la phase blastique de la maladie est plus rare et ses critères de définition
sont moins universellement acceptés. L’OMS 2016 propose des critères en ce sens.

LES CRITÈRES DE LA PHASE CHRONIQUE.


Un pt recevant un traitement est en phase chronique si les critères sanguins suivants sont
présents (Jabbour et al. Blood 2011 ;117 :1822-7):
blastes < 15 %
blastes + myéloblastes < 30 %
basophiles < 20 %
N° PLT > 100 G/L

Ces critères permettent de ne pas considérer une partie des patients comme étant en phase
accélérée ou blastique pour l'inclusion dans des protocoles

LA PHASE ACCÉLÉRÉE.
Elle est présente chez 10% des pts dès le diagnostic ou apparaît en cours de traitement : en l’absence
de traitement elle précède de 3 à 12 mois la phase blastique.
Certains des signes cliniques de la phase blastique sont parfois retrouvés.

Critères de la phase accélérée de la LMC (OMS 2016) : un ou plusieurs des critères suivants.
- Persistance ou augmentation de la splénomégalie, ne répondant pas au traitement
- Persistante ou augmentation du Nb des leucocytes au-delà de 10 G/L, ne répondant pas au
traitement
- Persistance ou augmentation de la thrombocytose (> 1000 G/L), ne répondant pas au
traitement
- Persistance d’une thrombopénie < 100 G/L, sans lien avec le traitement
- Présence d’au moins 20% de basophiles dans le sang
- Présence de 10-19% dans le sang et ou la moelle osseuse
- Présence d’anomalies cytogénétiques clonales additionnelles au Ph1, incluant les anomalies de
première importance (doublement du Ph1, trisome 8, isochromosome 17q, trisomie 19), ou un
caryotype complexe, ou des anomalies en 3q26.2
- Toute anomalie clonale nouvelle dans des cellules Ph1+ survenant pendant le traitement

De grandes plages de petits mégacaryocytes anormaux associées à une fibrose réticulinique ou


collagène dans les BOM évoque une phase blastique, mais habituellement les autres critères de la
liste ci-dessus sont déjà présents
La découverte de lymphoblastes dans la MO, même en nombre < 10% est suspecte de
transformation aiguë et doit faire réaliser les investigations génétiques et moléculaires.

LA PHASE BLASTIQUE.
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Présente des signes cliniques : réapparition de la splénomégalie, sueurs nocturnes, perte de poids,
douleurs osseuses; des adénopathies et des chloromes blastiques extramédullaires sont possibles.

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La phase blastique nécessite (critères OMS 2016) la présence d’au moins 20% de blastes dans le sang
et/ou la moelle osseuse, ou la présence d’une maladie extramédullaire avec infiltration blastique (les
blastes pouvant être lymphoïdes ou myéloïdes).

Anémie et thrombopénie sont d’importance variable.

Critères OMS 2008 ELN

% blastes Sg ou MO ≥ 20 % ≥ 30 %

prolifération blastique extramédullaire + +


(sauf la rate)

Présence de grands amas blastiques à la BOM +

[les critères « blastes > 30% » et « blastes + promyélocytes > 30% » sont équivalents, car en
terminologie anglo-saxonne il n’y a pas de granulations dans les myéloblastes et l’apparition de
granulations définit le stade promyélocyte]

Aspects morphologiques
La phase blastique se présente sous forme d'une LA lymphoblastique dans 1/3 des cas et sous forme
de LA myéloïde dans 2/3 des cas.

VI. PRINCIPAUX ASPECTS THERAPEUTIQUES

Le traitement est nécessaire (décès en < 2 ans sans ttt).

TRAITEMENT POTENTIELLEMENT CURATIF : GREFFE DE CELLULES SOUCHES ALLOGÉNIQUES.


- C'est le seul traitement pouvant rendre les patients durablement négatifs sur le plan moléculaire.
- Parfois utilisé à la phase chronique, le plus souvent en phase accélérée ou blastique.

- Résultats d'une étude récente (Saussele et al, Blood 2010) :


- décès liés à la transplantation = 8 %
- GVH chronique = 46 %
- Survie globale à 3 ans : 88 % pour les patients greffés en phase chronique, 94 % pour les
patients greffés en phase accélérée, 59 % pour les patients greffés en phase blastique.

CHIMIOTHÉRAPIE.

Son but est de diminuer le plus possible le nombre de cellules Ph1+ (éradiquer ?), car la présence du
Ph1 entraîne une instabilité du génome, l’apparition d’anomalies cytogénétiques complémentaires et
à terme la transformation aiguë (blastique).

La chimiothérapie utilisant exclusivement le busulfan ou l’hydroxyurée permet un contrôle de la 9


leucocytose, du volume splénique, mais ne rallonge pas la durée de la phase chronique.

Certains traitements sont parfois proposés, associées ou non aux ITK : interféron alpha ; aracytine .

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Inhibiteurs de tyrosine kinase (ITK). Les protocoles thérapeutiques actuels utilisent l’hydroxyurée en
traitement court s’il faut diminuer rapidement une grande hyperleucocytose, puis un inhibiteur de
l’activité tyrosine kinase BCR-ABL, associé ou non à une autre molécule (interféron alpha, aracytine).

On peut utiliser un ITK de première ou de seconde génération pour la mise en place du traitement
initial.

Chez les patients recevant un traitement ITK de première génération : 89 % de survie sans
progression à 5 ans, et 65 % de survie sans évènement à 5 ans. Pour la moitié des pts en échec avec
ITK de première génération 55 % auront une survie sans progression à 5 ans avec un ITK de seconde
génération.

Les événements des 5 premières années ont sélectionné les patients : les mauvais répondeurs et
ceux qui évoluent (phase accélérée ou blastique) reçoivent un ITK de seconde génération ont seront
allogreffés. Si la maladie demeure en rémission au dela de 6 ans la probabilité de transformation
blastique devient quasi nulle.

Avec les ITK on obtient 98% de rémissions hématologiques. La probabilité de survie à 8 ans est de
89% (étude européenne EUTOS).

Un arrêt du ttt ITK est possible après plusieurs années, s'il y a réponse moléculaire complète.
D’autres voies thérapeutiques, impliquant des molécules des voies de signalisation, la vaccination, le
trioxyde d’arsenic, sont en cours d’étude.

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