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Contemplations, Victor Hugo

« J’aime l’araignée », Livre III « Les Luttes et les Rêves »

Vers la première moitié du XIXème siècle, un courant littéraire majeur révolutionne l’héritage
poétique, il s’agit du romantisme prenant en compte les sentiments personnels du poète, du fait
de la supériorité spirituelle de ce dernier sur les autres hommes. De nombreux auteurs
appartiennent à ce courant littéraire comme Musset, Vigny, Lamartine ou encore Hugo, un
artiste engagé qui écrit Contemplations en 1856 pendant son exil à la suite du coup d’état de
Napoléon III. « J’aime l’araignée » est un poème écrit dans le troisième livre composant les
« Contemplations » se nommant « Les Luttes et les Rêves ».
LECTURE EXPRESSIVE

Dans ce poème, Victor Hugo prend la défense de l’araignée et de l’ortie mises de côté par
la société, c’est un artiste engagé qui incite le lecteur à faire preuve de pitié et d’amour à travers
son poème argumentatif.

Nous pouvons nous poser la question suivante :

« Comment le poète lance-t-il un appel à la compassion à travers un poème argumentatif


faisant l’éloge de la laideur des araignées et des orties ? »

Nous distinguons deux mouvements dans ce texte :

1er mouvement (4 premiers quatrains) : Le poète reprend la vision péjorative traditionnellement


associée à l’araignée et à l’ortie

2ème mouvement (3 derniers quatrains) : Le poète lance un appel à la compassion du lecteur.

1er mouvement = Le poète reprend la vision péjorative traditionnellement associée à l’araignée


et à l’ortie

On peut observer l’anaphore « Parce que » qui lui permet à chaque fois d’intégrer un argument

Mais également que les vers sont mêlés, le poète alterne entre décasyllabe (plus utilisé en
poésie, il pourrait représenter la pensée générale de la société) et pentasyllabe (plus rare en
poésie donc représente la pensée du poète). Donc il montrerait qu’il est possible de mélanger
différentes manières de penser. Il se peut aussi que par le choix de ces vers inhabituels il montre
qu’il s’intéresse aux choses peu communes.

(v.1) Nous voyons un parallélisme et une répétition du mot j’aime désignant une double
déclaration d’amour envers ces choses. Il crée également un effet étrange en déclarant qu’il
aime ces choses habituellement détestées.
(v.1 et 2) Le poète utilise ensuite une antithèse avec le verbe aimer et haïr ce qui montre qu’il est
différent, il lance une petite provocation qui retient l’attention du lecteur.

Il utilise le pronom « j’ » pour se désigner et le pronom « on » pour désigner la société, il


démontre donc qu’il s’oppose à la société et à l’idée générale, il pose une thèse.

(v.3) Il emploie ensuite une antithèse avec « tout » et « rien » pour donner l’idée que le monde
s’acharne sur ces choses et que personne ne les aide, c’est une fatalité.

L’utilisation du présent de vérité générale montre que c’est une habitude pour les gens de
détester ces choses, c’est trop ancré dans leur quotidien pour espérer un changement.

(v.4) L’oxymore « morne souhait » donne une tonalité pathétique, le désir d’être aimée
qu’éprouves les araignées et les orties est illusoire.

On observe au quatrain 2 des allitérations en « R », des sonorités dures qui rappellent la rugosité
de l’araignée et de l’ortie

(v.5 et 6) Il utilise le registre pathétique (maudites, chétives) et le vocabulaire du mal (Noir,


maudites)

La périphrase « noirs êtres rampants » désigne les araignées et donne l’idée du dégoût, elles
rampent donc elles sont vulnérables du fait qu’elles se déplacent lentement sur le sol, on peut
donc les écraser sans trop de mal.

(v.7 à 8) Nous voyons un enjambement qui mime l’enfermement de ces êtres dans leur tristesse
provoquée par l’image négative qu’elles portent.

Le registre tragique donne l’idée de fatalité, elles sont enfermées et ne peuvent rien y faire

(v.9) Ce vers 9 fait écho au vers précédent, elles sont piégées par leur apparence, leur laideur.

(v.10) Le poète donne ensuite une image forte, il attire l’attention du lecteur grâce à
l’apostrophe lyrique « Ô ». L’utilisation d’une double ponctuation exclamative peut également
attirer nôtre attention mais également symboliser la colère et la frustration du poète car ces être
sont marginalisés à cause de leur apparence inextricable.

(v.11) Une animalisation de l’ortie la comparant à la couleuvre rappelle les similitudes entre ces
deux choses, elles font peur à cause de l’image dangereuse qu’on leur associe mais elles sont en
réalité inoffensives.

(v.12) L’araignée est ensuite comparée à un gueux à travers une personnification, encore une
fois cela rappelle des similitudes, les deux n’ont pas choisi leur sort mais ils font fuir les gens.

On retrouve dans le quatrain 4 l’expression « Parce que » qui est répétée 3 fois donc cela laisse
entendre qu’il a beaucoup d’arguments

(v.14) Hugo dénonce la superstition au vers 14, nous avons peur donc nous fuyons alors que ces
choses sont justes victimes de leur constitution.

(v.15 à 16) Nous avons un enjambement qui met en valeur le mot « victime » ce qui appuie sur le
malheur qu’elles subissent à cause de l’homme. Le poète nous invite à changer notre regard et à
avoir plus d’empathie.
(v.16) L’antéposition et le pléonasme avec « sombre nuit » insiste sur l’obscurité de la nuit ce qui
montre que la situation des araignées et des orties est vraiment déplorable. La nuit fait
référence également à l’obscurantisme, les araignées et les orties sont victimes de l’ignorance
des gens.

(v.17) L’apostrophe « Passants » est utilisée pour interpeller non pas seulement le lecteur mais
un maximum de personnes car tout le monde peut se considérer comme « un passant ».

Il donne aussi l’idée du mouvement, le passant ne s’attarde pas sur la chose, ne prend pas le
temps de l’observer afin d’ouvrir son cœur et son esprit pour mieux reconsidérer ces êtres et
pouvoir les juger à leur juste valeur.

(v.19) Le poète utilise le présent de l’impératif comme pour supplier le lecteur d’avoir de la
compassion pour ces choses plus que pour lui donner un ordre.

L’anaphore du verbe « plaignez » insiste sur l’appel à la pitié du lecteur pour ces choses.

(v.21) Victor Hugo emploi ensuite une hyperbole au vers 21 « rien qui n’ait sa mélancolie » ainsi
qu’une antithèse avec le « tout veut un baiser » pour nous faire comprendre que ces êtres n’ont
jamais connues la tendresse, ce besoin d’amour est presque vital.

(v.23 à 25) Il y a ensuite une répétition de l’expression « pour peu que » qui nous indique qu’il
suffirait d’un tout petit effort, une légère attention pour entendre l’appel à l’amour provenant
des araignées et des orties.

(v.23 à 24) Le rejet entre les vers 23 et 24 « Pour peu qu’on oublie / de les écraser » mime le pas
en suspens comme un moment d’hésitation juste avant de les écraser.

(v.25) Le verbe jeter donne l’idée de violence, de rapidité, on agresse ces choses d’un simple
regard. L’auteur nous demande d’être objectif et d’arrêter d’attribuer des étiquettes.

(v.26) Le poète passe ensuite la parole aux araignées et le fait que ces choses parlent « tout
bas » nous donne l’idée qu’elles ont été tellement maltraitées qu’elles n’osent plus parler trop
fort pour ne pas se faire remarquer ou pour ne pas déranger.

(v.28) Le verbe « murmurer » reprend l’idée qu’elles n’osent pas se faire remarquer.

De plus, elles murmurent amour malgré leur maltraitance ce qui montre une profonde
gentillesse et bonté intérieure, il serait compréhensible qu’elles aient envie de se venger de tout
ce mal qu’on leur fait mais non, ces êtres ne recherchent que de l’amour.

Nous voyons que le poème se termine sur le mot « Amour » et qu’il commençait par « J’aime »
donc finalement ce poème n’est qu’un appel à l’amour universel, le poète nous demande
simplement de faire attention à ne mettre de côté personne.

Conclusion :

Dans ce poème, Victor Hugo prend la défense des araignées et orties qui subissent une haine
injustifiée de la société. Il rappelle qu’elles n’ont pas choisi leur sort cruel, et que malgré tout le
mal qu’on leur fait, elles n’ont besoin de rien d’autre que de l’amour. Il écrit donc ce poème
argumentatif afin de faire changer les mentalités, il cherche à protéger les plus faibles et à ne
mettre de côté personne.

Nous pouvons ouvrir sur le poème « Une Charogne » de Baudelaire dans lequel il fait une
description détaillée d’une charogne. Baudelaire dans ce poème ne cherche pas à faire passer de
message d’amour mais il s’émerveille comme Victor Hugo devant des choses habituellement
détestées ou qui provoquent le dégoût.

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