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[i

EPIGRAPHE
‹‹ les organes chargés de la gestion des élections émergent ainsi comme des acteurs
majeurs de la performance desquels dépendent l'étendue et la qualité de la
participation des citoyens aux affaires de leur pays ››.

Pascal KAMBALE
[ii

DÉDICACE

A ceux qui me sont liés d'une manière affective, voici les réalisations tangibles de ce
que vous avez ensemencé.

A vous mes estimés et mirifiques parents : YAV KAPEND Samy et KAJ A MBAY
Albertine, pour vos sacrifices consentis à un prix inestimable tant sur le plan
financier, spirituel que moral.
[iii

REMERCIEMENTS

Bâtir un édifice n'est jamais l'oeuvre d'une seule personne. Pour la simple raison
que nous ne sommes que les héritiers de ceux qui nous ont précédés et les
bénéficiaires de nos contemporains.

Au terme de ce travail sanctionnant la fin de nos études universitaires de premier


cycle en Droit. De ce fait, qu'il nous soit permis d'abord, d'exprimer notre gratitude
extrême au tout-puissant , créateur des cieux et de la terre, qui cesse de nous
renouveler les fruits spirituellement saints.

En suite, nous tenons à adresser un sincère merci à notre directeur de mémoire le


professeur LUMBIKA Richard, non seulement pour son appui et ses conseils pour la
rédaction de ce pénible travail, mais aussi pour son soutien inconditionnel et
indispensable, et à mon encadreur de la codirection TSHIBANGU François, pour ses
judicieux conseils et ses critiques constructives, sans lesquels ce jour n'aurait pas lieu
dans notre vie. Veuillez trouver ici chers monsieurs le Professeur et co-directeur,
l'expression de ma profonde gratitude.

A vous mes soeurs et frères soucieux de mes études : Carine Yav, Arlette Yav,
Christelle Yav, Monsieur l'abbé Jean-Jacques Patron YAV, Michel Yav , Benny
Mayamba, ainsi qu'à Benny Musenga.

C'est l'occasion pour moi de leur exprimer ma profonde gratitude pour le concours
dont ils ont fait montre en ma personne, je pense, à titre illustratif, à mes compagnons
de lutte, Aristote BONKUNDO, Rebecca BAMBATA, Daniel MENA, Laetitia
GAKALY, David BONIANGA, Tyna KAPINGA ainsi qu'à Splendide MPOSO.

Jonathan MBAY YAV


[iv

LISTES DES SIGLES ET PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

1. Al : alinéa
2. Art. : article
3. BD : Bureau de vote
4. BV : Bureau de dépouillement
5. BVD : Bureaux de vote et de dépouillement
6. CADEG : Charte Africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance
7. CAHP : Charte Africaine de droits de l'homme et des peuples
8. CENCO : Conférence Épiscopale Nationale du Congo
9. CEI : Commission Électorale Indépendante
10. CENI : Commission Électorale NationaIe Indépendante
11. Cfr : confer
12. CLCR : Centre local de compilation des résultats
13. CIRGL : Communauté Internationale de la Région de Grands Lacs
14. CNS : Conférence nationale souveraine
15. CSAC : Conseil Supérieur de l'Audiovisuel et de la Communication
16. DIC : Dialogue inter congolais
17. DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l'Homme
18. Ed : édition
19. IDEA : Institution international pour la démocratie et l'assistance électorale
20. IFES : International Foundation for Electoral Systems
21. JO : Journal officiel
22. MONUSCO : Mission des Nations unies pour la stabilisation au Congo
23. NED : National Endowment for Democracy
24. NDI : National Democratic Institute
25. OGE : Organe de gestion des élections
26. Op.cit : Observation déjà citée
27. OSC : Organisations de la Société Civile
28. RDC : République démocratique du Congo
29. SADC: Communauté de développement de l'Afrique australe
30. SYMOCEL : Synergie des Missions d'observation Citoyenne des Élections
31. UA : Union africaine
32. UE : Union européenne
33. USAID : United states Agence for international development
[1]

INTRODUCTION

I. PROBLÉMATIQUE

L'institution de la Commission Electorale Nationale Indépendante, CENI, en sigle, en


République Démocratique du Congo, comme cadre organisationnel crédible
permettant un déroulement harmonieux du processus électoral qui emporte la
confiance et l'adhésion de tous les protagonistes du jeu électoral à des règles
consensuelles, est le gage minimal des élections libres, démocratiques et apaisées,
conquête et acquis d'un processus démocratique, passé dans la législation congolaise.

La CENI, considérée comme une institution d'appui à la démocratie conformément


aux articles 211 de la constitution et 2 de la loi organique du 19 Avril 2013 1, a, en
effet, pour mission en garantissant cette crédibilité sur base des principes
démocratiques et de libertés de l'individu, d'organiser des élections crédibles et
inclusives, tout en gardant une position neutre et impartiale,dans le souci d'éviter
l'immixtion d'autres institutions, et ce, en promouvant la perception de son
indépendance.

L'indépendance des institutions d'appui à la démocratie évoque cependant l'absence


d'injonctions d'autres institutions dans leur organisation et fonctionnement.

La constitution du 18 Février 2006 institue la commission électorale nationale


indépendante, dotée de la personnalité juridique est chargée du processus électoral
notamment l'enrôlement des électeurs, la tenue du fichier électoral, les opérations de
vote, de dépouillement et du référendum.

L'organisation et le fonctionnement de la CENI a fait l'objet de la loi organique n°


13/012 du 19 Avril 2013 modifiant et complétant celle organique n° 10/013 du 28
Juillet 2010, qui fait d'elle une institution neutre et indépendante.

A la lumière de ces dispositifs constitutionnels et légaux, il sied de déduire que la


CENI est une institution totalement indépendante.

Une rapide radioscopie dans le chef de la CENI peint un tableau lugubre tombé en
déliquescence, quoique jouissant théoriquement de son indépendance organique et
fonctionnelle sur le plan du droit, des textes juridiques qui l'organisent, mais dans la
pratique celle-ci dépend entièrement de l'exécutif, à tel point qu'elle n'arrive à décider
sans consulter ce dernier.

La raison principale est la promixité trop grande de cette centrale électorale avec le
pouvoir en place, d'où l'inféodation, laquelle constitue le germoir des facteurs érosifs

1
La constitution de la République Démocratique Du Congo du 18 février 2006, tels que modifiée et
complétée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certaines articles de la constitution
de la République Démocratique Du Congo et loi-organique n°13/ 012 du 19 Avril 2013
modifiant et complétant la loi-organique n°10/ du 28 juillet 2010 portant organisation
et fonctionnement de la Commission Électorale Nationale Indépendante
[2]

de l'indépendance de la CENI.2 Tout en gardant à l'esprit les débats et les marchés de


protestation contre la désignation de l'animateur de la présidence de cette CENI.

Exerçant ses prérogatives constitutionnelles et légales, cette centrale électorale a


effectivement organisé en 2011 des élections couplées : celle présidentielle,
législatives, urbaines et municipales qui ont mis à rude épreuve son caractère
indépendant tant dans la composition de ses organes techniques que la gestion
proprement dite du processus électoral3. Cette rudesse ne serait-ce à y croire que de la
résultante d'un manque des moyens financiers accru, qu'a subi cette institution. Raison
pour laquelle les élections provinciales et locales ont été reportées aux calendes
grecques.

Prévues fin 2016, les élections générales sur l'ensemble du territoire national
congolais ont été repoussées plusieurs fois faute de financement, période au cours de
laquelle le pays fut plongé par des crises politiques, débouchant par des accords
politiques, et à quoi l'on joint également et logiquement aux aspects techniques ( la
mise à jour du fichier électoral, par ex.) liés à l'organisation des élections ne pouvant
permettre à la CENI de respecter son calendrier électoral.

Ceci dit, si le gouvernement ne finance pas, nonobstant son caractère indépendant


affirmé, la CENI ne peut être en mesure d'organiser les scrutins, car nul n’ignore
qu’elle est largement financée par le gouvernement. Elle dépend donc totalement du
tempérament des autorités exécutives quant à son financement, ainsi que des
différents partenaires extérieurs, notamment les bailleurs de fonds, en l'occurrence la
MONUSCO.

Ne serait-ce t-il pas de l'adage populaire : "La main qui donne est toujours au dessus
de celle qui reçoit ? " et un autre qui le confirme: " on n'organise pas une élection pour
la perdre."4 Il est inéluctablement légitime de constater que cette institution ne peut
être maître de son chronogramme, et cet état des choses éffrittent l' indépendance de
l’organe chargé du processus électoral en RDC.

En outre, malgré la nature d'indépendance et de neutralité de cet organe électoral, on


observe que ce dernier est torpillé par les forces politiques en présence, quant à sa
composition paritaire 5, loin d'être un facteur qui puisse garantir la représentativité etla
neutralité dudit organe, constitue plutôt un facteur érosif de paralysie de cette
institution électorale.

Ce modèle basé sur la partisannerie, dont on tente de camoufler le risque de partialité


par une logique de représentativité équilibrée de forces politiques en présence,
accentue sans nul doute la politisation de la CENI6, censée être apolitique.
2
YANGONZELA Didier, Institutions Politique D’Afrique Contemporaine, UCC, Kinshasa, faculté
de droit, notes de cours, 2019-2020
3
Exposé de motif de la loi organique n°10/013 du 28 juillet 2010 portant organisation et
fonctionnement de la Commission Electorale Nationale Indépendante
4 Déclaration du Président congolais Pascal LISSOUBA Cité par KOKOROKO (D) : « les élections
4

disputées : réussites et échecs », in pouvoirs n°129, Avril 2009, p. 118.


5
Aux termes de l’article 10 de la loi organique n°13/012 du 19 avril 2013 modifiant et complétant celle
n°10/013 du 28 juillet 2010 portant organisation et fonctionnement de la Commission Electorale
Nationale Indépendante
6
Rapport du bureau international d’étude pour la paix et le développement : nouvelle structuration de
la commission électorale, p. 4.
[3]

Étant donné que cette commission électorale est composée selon cette logique de
représentativité, où la majorité des membres désignés par les forces politiques de
l'Assemblée nationale, rêvent d'une CENI sous sa coupe comme garantie des victoires
répétées restant ainsi redevables vis-à-vis de leurs partis qui les ont hissés, ne pourra
bénéficier de la crédibilité de tous.

A l'en croire, comment la CENI, une institution d'appui à la démocratie, est politisée
et/ou taillée sur mesure au service du pouvoir en place, car cette institution électorale
compte, dans la pratique, parmi les outils les plus utilisés par les partis au pouvoir
pour assurer leur victoire répétée aux élections, créant ainsi d'innombrables
dysfonctionnements, source de toute crise de légitimité institutionnelle. Ainsi, au
cours du processus électoral de 2018, nous avons constaté, à titre exemplatif
l'ntroduction du système de seuil pour des élections législatives et provinciales7.

En sus, on a pu constater, le fait d'écarter les électeurs de Béni, Butembo et Yumbi à


participer à l'élection présidentielle, ce qui porte à décrier une forte violation de
l'article 5 de la constitution qui démontre in nuce l'expression de ‹‹ la souveraineté du
peuple congolais ››.

Parallèlement à cela, le partage organisé quant à l'usage des machines à voter, flou
sémantique entretenu sciemment entre le pouvoir et la CENI, qui d'ailleurs proscrit
l'article 237 ter de la loi électorale , n'a inspiré confiance des citoyens Congolais face
au processus électoral en cours.

Ce qui fut, par voie de conséquence, Ia contestation des résultats des élections
présidentielle, législatives nationales et provinciales du 30 décembre 2018 par les
forces politiques de l'opposition et une bonne partie de la population congolaise, y
compris la Conférence Épiscopale Nationale du Congo, CENCO, en sigle 8. Dès lors,
la perception des citoyens congolais, des observateurs nationaux et internationaux
reste ainsi marquée par l'idée que les résultats de ces élections, entachées des
vicissitudes, n'ont pas reflété fidèlement le choix du peuple ; l'indépendance,
l'impartialité et la neutralité de cette commission électorale sont (re-) mises en doute
dans l'imaginaire collectif.

C'est donc une CENI conflictuelle qui, placée dans le champ de rivalité des appétits
politiciens et de lutte d'antagonisme, est chargée d'organiser les élections, alors que
l'idéal serait qu'un organe essentiellement technique au professionnalisme et à la
neutralité irréprochable gère le processus électoral en RDC.

De tout ce qui précède, pour une meilleure appréhension de notre réflexion, des
questions sont soulevées concernant l'autonomie de la CENI au regard de l'attitude du
gouvernement et des autres parties prenantes au processus électoral, pouvant détailler
notre lanterne :

7
Article 118 de la loi électorale telle que modifiée à ce jour.
8
Lire également le rapport final d’observation des élections directes et indirectes de 2018 et 2019 par la
synergie des missions d’observation citoyenne des élections, SYMOCEL en sigle.
[4]

 Quels sont les obstacles auxquels la commission électorale nationale


indépendante est confrontée dans l'accomplissement de ses missions et
attributions dans la gestion du processus électoral ?

 Comment surmonter ces obstacles qui éffrittent l'indépendance de la CENI,


par ricochet garantir davantage cette indépendance, thermomètre de la
crédibilité et de fiabilité de tout cycle électoral en RDC ?

Telles sont entre autres des questions qui structurent cette réflexion voulue
praxeologique dans sa finalité.

II. HYPOTHES DU TRAVAIL

Pour le professeur Jules DOBO, toute étude qui se veut scientifique, doit au préalable
répondre à cette exigence notamment la formulation des hypothèses, une phase très
délicate, exprimant ce à quoi s'étend à l'issue des recherches: ce que devraient
confirmer ou infirmer les résultats de recherche9.
Il sied de souligner que, malgré son statut de l'institution indépendante, la CENI
demeure à ce jour dépendante, inféodée aux politiques. De ce fait, elle est liée aux
obstacles qui découleraient de sa composition paritaire, de l'influence du climat
politique, du retard dans le financement tant au niveau national qu'international, des
problèmes logistiques et techniques, de violations des textes légaux régissant les
élections, parfois taillés au service du pouvoir en place, etc.

Pour surmonter ces obstacles, la CENI devrait, selon nous, mettre en application un
certain nombre de remèdes en vue de l'organisation rationnelle des élections. Ces
remèdes seront, dans ce travail, circonscrits en quatre points majeurs, notamment :

 les remèdes techniques : l'existence d'une administration territoriale


compétente, équipée et neutre ; le recensement au préalable de la population,
l'identification des nationaux, l'enrôlement fiable des électeurs, etc.

 les remèdes logistiques : L'existence d'une infrastructure matérielle dont on


doit non seulement prévoir le volume de manière précise et fiable, mais
également l'allocation dans les conditions les plus satisfaisantes.

 les remèdes financiers : Ne pas attendre l'année électorale pour financer :


l'Etat doit mettre en place un mécanisme d'autofinancement anticipatif de la
CENI, lequel épargnerait cette institution de dépendre des humeurs des
politiciens et, éventuellement, des partenaires extérieurs. Ceci suppose une
bonne volonté politique dans le chef des autorités exécutives.

 les remèdes politiques : il est impérieux de se méfier du schéma politique par


le choix des animateurs de la CENI, pour éviter la politisation. In aliis verbis,
nous préconisons que les politiciens ne fassent plus parties de cette institution,
pour la simple raison leurs partis concourent aux élections et qu'on ne peut être
juge et partie.

9
DOBO KUMA Jules, cours d’initiation à la recherche scientifique, UCC, faculté de droit, 2019-
2020, p. 30.
[5]

 les remèdes juridiques et judiciaire : visent un respect des règles légalement


établies en matière électorale, réformer mieux harmoniser certaines
dispositions de la loi électorale à d'autres, d'une part; garantir l'indépendance
de la justice (cours et tribunaux) par le truchement du juge siégeant en matière
de contentieux électoral, d'autre part.

III. CHOIX ET INTÉRÊT DU SUJET

Le choix d'une telle étude demeure évident, car en RDC nous avons constaté que
l'organe chargé de la gestion des élections est actuellement indispensable pour un
déroulement harmonieux du processus électoral, gage de la paix sociale dans un État
démocratique.

L'intérêt de cette étude a pour vocation d'aiguiser la réflexion sur un sujet d'actualité,
où l' ambition est de démontrer l'importance et la contribution d'un tel organe
indépendant à la conduite et à la gestion du processus électoral en République
Démocratique du Congo, en vue de consolider la démocratie, de cet État en voie de
développement.

A cet égard, il est à noter qu'il s'agit de l'analyse d'une institution fondamentale pour
la démocratie, car ‹‹ nul gouvernement n'est légitime que si son autorité et ses
fonctions ne découlent pas du consentement des gouvernés ››10, raison pour laquelle
nous allons déceler les facettes qui entourent la crise électorale et post-électorale plus
précisément celle de l'inféodation et/ou la politisation de la CENI.

Nous viserons à cet effet à proposer les approches des solutions pour une amélioration
de la neutralité voire indépendance de la CENI qui reste congénitale à la démocratie
face aux restrictions qui lui sont formulées par ses détracteurs en vue d'aboutir à des
élections libres, démocratiques et transparentes.

Analysée sous cet angle, l'étude sur l'indépendance de la CENI par ce billet
constituerait une gageure considérée comme un outil susceptible déguiser non
seulement les appétits de chercheurs, mais aussi et surtout en matière électorale.

IV. MÉTHODOLOGIE DU TRAVAIL

Il est important et nécessaire que tout travail scientifique ou toute recherche use d'un
cheminement logique, d'un processus, d'une méthode.

Selon jules DOBO, la méthodologie se veut la science de la méthode, aussi l'ensemble


des méthodes, techniques et procédures que l'on suit d'une investigation scientifique.11

Pour chuter, Jean-Louis Esambo considère qu'il n ya pas de « prêt à porter », ni de «


copier coller » en matière de méthodes de recherche en droit public. L'essentiel réside
dans la pertinence des idées que l'on veut développer à travers une approche,
mûrement réfléchie et adaptée à l'objet de son étude.12
10
https://www.memoireonline.com/L'apport-des-commissions-electorales-au-renforcement-de-la-democratie-
en-Afrique-contraintes-pr.html. Consulté le 30 Mai 2020 à 15h
11
DOBO KUMA Jules, op.cit., p.33.
12
ESAMBO J.L., la République Démocratique Du Congo, à l’épreuve de l’alternance au pouvoir,
academia-l’harmattant, Belgique, 2013, p.18.
[6]

Ainsi, dans le cadre de cette étude, il est pour nous évident de recourir aux méthodes
rassemblées autour d'un chemin qui emprunte à la fois les aspects juridique et
sociologique:

· La méthode Juridique : nous a permis d'interpréter des textes juridiques en


vigueur, précisément ceux relatifs à l'organisation et fonctionnement de la
CENI, notamment dans la conduite et la gestion du processus électoral en
RDC;

· La méthode sociologique : nous a servi à éclairer les textes grâce au contexte


socio-politique dans lequel est confrontée la CENI aux diverses contraintes.

En outre, diverses techniques d'interprétations seront utilisées tout au long de notre


travail, à savoir :

· La technique d'interview : qui facilite le dialogue avec les experts en matière


électorale en vue d'obtenir des plus amples éclaircissements sur certaines
zones d'ombres que nous décélerons.

· La technique documentaire : nous a permis de consulter des ouvrages, des


notes de cours, articles qui aideront à mieux cerner la réalité du processus
électoral en RDC.

V. DÉLIMITATION DU TRAVAIL

Le présent travail scientifique mérite d'être délimité dans le temps comme dans
l'espace, afin de bien le circonscrire.

Dans le temps, notre étude va de la période électorale de 2011 à 2018, laquelle


période couvrant deux cycles électoraux. Cependant, le présent travail s'intéresse aux
élections présidentielle, législatives nationales et celles provinciales. Et dans l'espace,
la République Démocratique du Congo constitue notre champ d'investigation, en
particulier la ville province de Kinshasa.

VI. CANEVAS DU TRAVAIL

Outre l'introduction et la conclusion, notre travail sera divisé en deux chapitres. Le


premier sera focalisé sur les fondements théoriques et concepts de base et le second
s'articulera sur la problématique de l'indépendance de la CENI dans la gestion du
processus électoral en RDC.
[7]
[8]

CHAPITRE I:

FONDEMENTS THÉORIQUES ET CONCEPTS DE BASE

Ce chapitre sera subdivisé en trois sections majeures: primo sera consacrée aux
définitions de concepts de base (section 1) , secundo se propose de donner une vision
panoramique de la CENI (section 2); par quelques points de repère essentiels, en
partant de ses origines les plus fondamentales et en abordant certains points qui lui
sont rattachés notamment sa nature juridique, sa composition et structures, mode de
désignation ainsi que le siège et coordonnées ; infine, se focalisera sur les missions et
attributions (section 3) qui ont été assignées à cet organe de gestion des élections
(OGE), en RDC.

SECTION 1: DÉFINITIONS DES CONCEPTS DE BASE

Tout travail scientifique exige une définition claire de ses concepts de façon à
éviter les confusions sur la différente compréhension d'un même terme, question de
placer ce travail dans un contexte général qui lui donne une cohérence.

C'est dans cet ordre d'idées que tout au long de cette section, nous allons définir tour à
tour les notions telles que processus électoral, démocratie, élection et enfin
l'indépendance d'une commission électorale.

1.1. Le processus électoral

Le terme ‹‹ processus électoral ››, désigne ordinairement l'ensemble des opérations


nécessaires au bon déroulement des éléctions qu'il s'agisse de l'enrôlement, de la
confection des listes électorales, des procédés de votation jusqu'à la proclamation des
résultats électoraux.13

In aliis verbis, le ‹‹ processus électoral ›› entendu comme une démarche qui favorise
et promeut la mise en œuvre ou la jouissance des droits électoraux du souverain
primaire, c’est-à –dire le peuple. En effet bien que le processus électorale fait souvent
l’objet de critique dans nombreuse pays, mais il sied de noter qu’il constitue ne en
moins le thermomètre de la vitalité de toute démocratie dans un État.

Le terme ‹‹ démocratie ››, étymologiquement tire ses origines du grec: dêmokratia,


formé de Démos : ‹‹ peuple ›› et de Kratos : ‹‹ pouvoir ››.Littéralement, c'est donc ‹‹
le pouvoir du peuple ›› ou ‹‹ le gouvernement du peuple ›14.

Pour certains auteurs, dont H. KELSEN, la démocratie est simplement une forme, une
méthode de création de l'ordre social, impliquant donc la volonté politique de tous, sur
un pied d'égalité.15 Pour d'autres, notamment L. KARL et C. SCHMITTER, constatent
que la démocratie est un système de gouvernement dans lequel les citoyens agissent

13
Selon le sens de l’article 211 de la constitution du 18 février 2006. Lire également les principes et
lignes directrices régissant les élections démocratiques de la SADC, partie préliminaires
14
BERGHMANS M. et NSAYI N., les élections apportent-elles plus de démocratie au Congo ?
MO*papers, n°67,1060 Bruxelles, 2012, p.4.
15
MUKONDE MUSULAY P., Démocratie électorale en Afrique Subsaharienne : entre droit, pouvoir et
argent, Globethics.net african Law 4, Genève, 2016, p. 30.
[9]

(in -) directement, au moyen des élections, sur la compétition entre leurs


représentants.16

Vue sous cet angle, la démocratie dans le monde actuel prend souvent la forme d'une
démocratie fondée sur le principe selon lequel la souveraineté appartient au peuple qui
l'exerce à travers ses représentants au terme des élections régulièrement et librement
organisées.

L'élection17 est, en effet, la désignation libre, par le vote d'électeurs, des dirigeants
destinés à les représenter ou occuper une fonction en leur nom. Ainsi l'organisation
des élections libres, régulières et transparentes devient le critère d'évaluation d'un État
qui se veut démocratique. D'où, l'expression ‹‹ démocratie electorale ››.

C'est ainsi, à la faveur du développement de la démocratie pluraliste, l'élection s'est


aujourd'hui imposée à la fois comme un mode d'expression de l'opinion du peuple,
comme un mode de désignation des gouvernants par les gouvernés par le biais de
vote, étant donné que nul gouvernement n'est légitime que si son autorité et ses
fonctions ne découlent du consentement des gouvernés18.

Ainsi, il supposse qu'un régime politique puisse découler du pouvoir du peuple, c'est-
à-dire les gouvernants auxquels on a octroyé cette légitimité du pouvoir politique sont
appelés à travailler pour le peuple : connaître leurs exigences, leurs attentes ainsi que
leurs problèmes , afin de résoudre les difficultés auxquelles est confronté ce dernier.

Les élections sont à cet effet un élément central de démocratisation, car elles
permettent non seulement aux citoyens de jouir librement de leurs droits, électoraux,
consacrés par les différentes lois constitutionnelles de chaque État, ainsi que par la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH) 19. Mais surtout, de faire
participer ces derniers dans la gestion de la res publica.

Même si les élections, libres et transparentes soient-elles, ne sauraient être l'apanage


d'une démocratie, synonyme de réduire cette notion de tout son sens, elles constituent
néanmoins l'un des piliers indispensables à la démocratie, par laquelle les dirigeants,
élus, acquièrent la légitimité de gouverner. Parler donc de la démocratie en matière
électorale n'est rien d'autre que faire participer la population dans la gestion de la res
publica en désignant leurs gouvernants par le vote.

Pour garantir à cet effet, cette démocratie en matière électorale et sachant que le droit
de vote est une liberté fondamentale garantie par les constitutions des Etats, par la
déclaration universelle des droits de l'homme et par les différents pactes
internationaux, son organisation et sa tenue ne peuvent être que dans les mains d'une
institution (Commission électorale) partiellement ou totalement indépendante à
d'autres institutions.

1.2. L'indépendance d'une commission électorale


16
Idem, p. 31
17
A la différence du scrutin, compris comme un ensemble d’opérations et actes qui participent à un
vote, tel que l’enregistrement des électeurs, l’ouverture des urnes, etc. lire ESAMBO J.L. notes de
cours G1, droit constitutionnel général, UCC, kinshasa, 2017-2018.
18
idm
19
Aux termes de l'article 21 de la déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) de 1948
[10]

1.2.1.Le fondement théorique et juridique de l'indépendance d'une commission


électorale

1.2.1.1. Le fondement théorique d'une commission électorale

Sur le plan théorique, il convient de saisir la définition de l'indépendance d'une


commission électorale, d'une part; tout en relevant le sens de sa relativité : les notions
voisines seront examinées pour leur caractère complémentaire, d'autre part.

A. Définition de l'indépendance d'une commission électorale

Suivant l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale ( IDEA en


anglais), l'indépendance d'une commission électorale voudrait signifier : ‹‹ la capacité
d'accomplir le travail sans être sous l'influence ou le contrôle d'une force extérieure
telle que le gouvernement, le parti politique au pouvoir, l'opposition ou la
communauté internationale ››20.

En d'autres termes, une commission électorale prend ses décisions sans l'influence de
forces politiques, sociales et économiques extérieures à elle. Elle n'est soumise qu'à
l'objectif d'organiser des élections crédibles et transparentes.

Il sied cependant de préciser que cette indépendance n'est pas synonyme de son
autarcie, car pour pouvoir accomplir sa mission, une commission électorale doit
impérativement travailler avec le concours d'autres institutions de la République 21.
L'on note, par exemple, pour parvenir à l'établissement d'un fichier électoral fiable,
l'administration électorale comptera sur les éléments démografiques lui fournis par
l'administration publique.

B. Les notions voisines et complémentaires de l'indépendance d'une commission


électorale

Les notions voisines et complémentaires à l'indépendance d'une commission


électorale sont: l'impartialité, la neutralité, l'intégrité, la crédibilité, la transparence
ainsi que le professionnalisme.

1. L'impartialité, la neutralité, l'intégrité et la crédibilité d'une commission


électorale

Une commission électorale doit être impartiale, en ce sens qu'elle doit traiter tous les
participants aux élections de manière équilibrée, égale et sans parti pris conformément
à la loi. Ainsi, elle se traduit par l'idée de sa neutralité celle de ne pas donner ou ‹‹
paraître donner quelques avantages que ce soit à un parti politique ou à un
regroupement d'intérêts ››.22

L'intégrité d'une commission électorale concerne ses membres pris collectivement et


individuellement. Ainsi, elle se traduit par leur détermination à conduire les activites
20
IDEA, gestion électorale. Un aperçu du guide international IDEA, Stockholm, 2008, https// www. Idea,
international. Consulté le 23 juin 2020, à 15 h 30
21
Article 2 de la loi organique.
22
²³ IDEA, gestion électorale, op.cit. p. 30
[11]

électorales avec un sens aigu d'intégrité, d'honnêteté, de bonne conduite, etc. donnant
ainsi lieu à la crédibilité d'une commission électorale, tout en respectant la
constitution et les lois de la République.

2. La transparence et le professionnalisme

Une commission électorale est dite transparente lorsqu'elle dispose de la ‹‹ capacité de


faire preuve d'ouverture et d'honnêteté dans sa gestion, exceptées dans les situations
où l'ouverture peut compromettre le secret du vote ou sa sécurité ››. Entre ici en
considération ‹‹ l'accès à l'information à toutes les étapes du processus électoral, la
prévention et la lutte contre la fraude électorale ››23.

Le professionnalisme d'une commission électorale, quant à lui, est de s'assurer que


tous les responsables électoraux sont formés correctement à leurs tâches et possédent
les compétences nécessaires. ‹‹ Une formation professionnelle contribue à donner au
public l'impression que l'ensemble du processus électoral est entre les bonnes mains
››24.

1.2.1.2. Les fondements juridiques de l'indépendance d'une commission


électorale

Les fondements juridiques de l'indépendance d'une commission électorale sont


constitués par les textes nationaux et internationaux, en vigueur. Dans le cas de la
CENI en RDC, il s'agit de la constitution qui prévoit une loi-organique portant
organisation et fonctionnement de la CENI. En outre, la RDC a ratifié des traités
internationaux qui génèrent des engagements touchant à l'indépendance d'une
commission électorale.

23
Idem. p .31
24
Ibidem. P.33
[12]

A. Les instruments juridiques nationaux relatifs à l'indépendance de la CENI

L'article 211 de la constitution du 18 février 2006 qui a institué la CENI l'a voulue
Indépendante. Dans le même sens , les articles 2, 6 et 8 de la loi-organique du 28
juillet 2010 telle que modifiée et complétée par la loi-organique du 19 Avril 2013, y
compris l'art. 2 de la loi électorale de 2006 disposent que la CENI est une institution
indépendante.

B. Les instruments juridiques internationaux relatifs à l'indépendance de la


CENI

Les articles 2 et 3 de la charte africaine de la démocratie, des élections et de la bonne


gouvernance (CADEG) signée par la RDC en 2008, consacrent de manière indirecte
l'indépendance d'une commission électorale dans les Etats membres de l'UA. C'est
plutôt l'art. 17 qui est plus précis quant à ce. En effet, la CADEG a entre autres
objectifs de promouvoir la tenue régulière des élections transparentes, libres et justes
en vue d'assurer la stabilité politique et la bonne gouvernance, en terme de légitimité
institutionnelle.

La RDC, en ratifiant le traité de la Southern Africa Development Communauty


(SADC), a également adhéré aux principes pour la gestion des élections dans la région
de la SADC, lesquels principes visent à assurer l'indépendance de l'institution chargée
de l'organisation des élections. En outre, aux termes de l'article 6 du pacte sur la
sécurité, la stabilité et le développement dans la région de grands lacs (CIRGL)
impose aux Etats membres à promouvoir les principes et les normes démocratiques.

SECTION 2. PRESENTATION DE LA CENI

2.1. Historique et nature juridique

2.1.1. Historique

Le renouveau démocratique au cours des années 90, fondé sur les libertés
fondamentales figure parmi les éléments caractérisant les efforts les plus notables en
RDC. En vue de rompre avec un passé marqué par les guerres civiles et un régime
dictorial, des consultations populaires, quête pour une démocratie plus effective, ont
été déclenchées par le président Joseph Désiré Mobutu.

Le processus de démocratisation de la République du Zaïre, actuellement la RDC, tel


que déclenché par le maréchal Mobutu, en date du 24 Avril 199025, a eu à rassembler
le peuple congolais autour de plusieurs tables de négociations politiques, depuis au
cours de l'historique "Conférence Nationale Souveraine"(CNS) ténue en 1992-1993, 26
constatant son échec, exacerbé par des crises politiques; en passant par le dialogue
inter-congolais (DIC), ténu en 2002 à Sun City, en République Sud-africain, où
différentes forces politiques ont pris part pour la recherche de sortie des crises
politiques.
25
ISMAILA MADIOR F., et al. les organes de gestion des élections en Afrique de l’ouest, une étude
comparative de la contribution des commissions électorales au renforcement de la démocratie,
Johannesburg, open society foundations, 2012, p.15.
26
ISMAILA M.F., op.cit. p. 16.
[13]

La recherche des solutions à ce dialogue a été caractérisée par une spirale de


signatures de plusieurs accords dont le plus important reste l'Accord Global et
Inclusif, conclu à Pretoria en Afrique du Sud en 2002.27

S'inspirant de l'Accord Global et Inclusif adopté à Sun City le 1er Avril 2003 ainsi
que de la constitution de transition du 04 Avril 2003, sur base desquels ont été mises
en place des institutions d'appui à la démocratie, parmi lesquelles la Commission
Électorale Indépendante, CEI en sigle, actuellement CENI, était chargée de
l'organisation du référendum et des élections à différents niveaux des structures
politiques de l'Etat, jusqu'en 2006

Il sied de noter qu'en raison du retard constaté dans l'adoption par le parlement de la
loi-organique portant organisation et fonctionnement de la CENI, étant entendu ce
n'est qu'une loi-organique qui puisse créer un organe et non une constitution, la CEI a
légalement organisé les scrutins, sur base de la constitution de transition du 04 Avril
200328. Mais Avec l'installation effective du parlement le 3 février 2007, la CEI n'était
plus une institution d'appui à la démocratie en vertu de l'article 222, al. 2 de la
constitution de 2006.

Conformément à la constitution du 18 février 2006, après des longues négociations au


sein du parlement national pour succéder à la CEI, une loi-organique n°10/ 013 du 28
Juillet 2010 telle que modifiée et complétée par celle n°13/ 012 du 19 Avril 2013
portant organisation et fonctionnement de la CENI, crée la Commission Electorale
Nationale Indépendante (CENI), chargée de la gestion du processus électoral en RDC.

Cependant, il a fallu attendre sept mois pour pouvoir, les membres du bureau de la
CENI composés de quatre membres de la majorité et de trois membres de l'opposition
politique, être investis le 26 Février 2011 par l'ordonnance n°11/ 012 du 03 Février
2011 portant investiture des membres du bureau de la CENI. 29C'est seulement le 30
Mars 2011 qu'intervient la remise et reprise entre la CEI et la CENI, soit huit mois
avant la fin du mandat constitutionnel du président de la République.

C'est donc dans cette perspective que fut créée la commission électorale nationale
indépendante.

2.1.2. Nature Juridique

La CENI est un organisme de droit public, permanent et neutre doté de la


personnalité juridique. Elle jouit de l’autonomie administrative et financière. Elle
dispose d’un budget propre sous forme de dotation. Celle-ci peut être complétée par
des apports extérieurs.30

Dans l’exercice de sa mission, la CENI jouit de l’indépendance d’action par rapport


aux autres institutions de la République. Elle bénéficie néanmoins de leur
27
NGOMA P., OTEMIKONGO Y., MANDEBU Y.., démocratie et participions a la vie politique :
une évaluation des premiers pas de la III ème république, une étude d’afri.Map et de l’open society
initiative for South Africa, RDC, 2020, p.12.
28
Article 153 de la constitution de transition du 04 avril 2003.
29
Ordonnance n°11/012 du 3 février 2011 portant investiture des membres du bureau de la CENI.
30
Art. 2 al. 1 et 6 de la loi organique.
[14]

collaboration, si cela s'avère nécessaire 31. Et cela ne signifierait en aucun cas que la
CENI est rattachée à une quelconque institution. Ce rattachement n'est pas absolu, et
donc relatif, de peur à entacher son indépendance qui la caractérise.

2.1.3. Composition et Structures

2.1.3.1. Composition

Aux termes de l'art.10 de sa loi organique, la CENI est composée de treize


membres désignés par les forces politiques au sein de l’Assemblée nationale à raison
de six délégués dont deux femmes par la Majorité et de quatre dont une femme par
l’Opposition politique. La Société civile y est représentée par trois délégués issus
respectivement de :

 confessions religieuses;
 des organisations féminines de défense des droits de la femme;
 et des organisations d’éducation civique et électorale.

2.1.3.2. Structures

La CENI comprend des organes ci-après :

 l'Assemblée Plénière;
 le Bureau.

A. L' Assemblée plénière

1. Rôle

L’Assemblée Plénière est l’organe de conception, d’orientation, de décision,


d’évaluation et de contrôle de la CENI. L’Assemblée Plénière ne siège valablement
qu’à la majorité absolue de ses membres.32

Ses séances, présidées par son président, se tiennent à huis clos et ses décisions se
prennent par consensus, à défaut, par vote à la majorité absolue de ses membres. Elle
se réunit en séance inaugurale dans les quinze jours qui suivent l'investiture des
membres de la CENI.33

2. Composition

La composition actuelle de l’Assemblée plénière comprend tous les membres de la


CENI34, tenant compte de la représentativité nationale, dont celle du genre, c'est-à-dire
composée de façon paritaire.

B. Le bureau
31
Art. 7 de la loi organique.
32
Art. 12 de la loi organique.
33
Art.23 ter de la loi organique.
34
Art. 23 quater de la loi organique.
[15]

1. Rôle

Le Bureau est l’organe de gestion et de coordination de la CENI. Il assure l’exécution


des décisions de l’Assemblée Plénière. Il veille au respect des Lois électorales et
référendaire par les autorités politico-administratives, les partis politiques, les
candidats, les observateurs nationaux et internationaux, les électeurs ainsi que les
témoins.35

2. Composition.

Sur pied de l'art 24 bis de la loi organique, le bureau est composé des six représentants
de différentes forces politiques au sein du parlement. Cette composition se présente
comme suit :

 Un président, issu de la société civile ;


 Un vice-président, issu de la majorité ;
 Un rapporteur, issu de l'opposition politique ;
 Un 1er rapport-adjoint, issu de la majorité;
 Un Questeur, issu de la majorité ;
 Un Questeur-Adjoint, issu de l'opposition politique.

Pour l'organisation du processus électoral, notamment l'enrôlement des électeurs, la


tenue du fichier électoral, l'inscription des candidats, les opérations de vote, de
dépouillement et de proclamation des résultats provisoires, la CENI s'appuie sur des
structures techniques et opérationnels. Elle dispose cependant d'un secrétariat exécutif
national (SEN), d'un secrétariat exécutif provincial (SEP) au chef-lieu de chaque
province et d'une antenne dans chaque ville et dans le chef-lieu de territoire.

2.1.4. Mode de désignation

D’entrée de jeux, pour être désigné membre de la CENI, il faut préalablement


remplir certaines conditions, notamment être de nationalité congolaise, être âgé de
trente ans au moins, etc.36 En effet, selon l’art. 12 de la loi organique régissant la
CENI, ses membres sont choisis parmi les personnalités indépendantes reconnues
pour leur compétence, intégrité morale, probité et honnêteté intellectuelle.

En l'occurrence pour la désignation du Président de la CENI, la lecture minutieuse de


l’art. 24 bis de la même loi organique, nous fait entendre que le Président est issu de
la Société civile, composée des confessions religieuses, d’organisations féminines de
défense des droits de la femme et d’organisations d’éducation civique et électorale.
En d’autres termes, la société civile, suivant leur corporation, désigne respectivement
une personne conformément aux conditions prévues par la loi. Cette désignation sera
transmise à l’Assemblée nationale pour son entérinement37.

Après avoir bénéficié de cet entérinement, comme tout autre membre de la CENI, le
Président doit être investi par ordonnance du Président de la République 38 pour un
35
Art. 24 de la loi organique.
36
Art. 16 de la loi organique.
37
Art. 12 al.2 de la loi organique.
38
Art. 12 de la loi organique.
[16]

mandat de six ans non renouvelables. Mais avant la prise des fonctions par le nouveau
patron de la CENI, il lui est fait obligation de prêter serment devant la Cour
constitutionnelle. Une fois investi de pouvoir, le président a rang des ministres et les
autres membres de vice-ministres.

Notons enfin que, le mandat de membres de la CENI prend fin par expiration du
terme (six ans), exceptionnellement en cas de décès, démission,etc.( Cfr. L'art.14 de la
même loi).

2.1.5. Siège et coordonnées

Le siège de la CENI est situé à Kinshasa, capitale de la République


Démocratique du Congo. En vertu de l’article 5 de la Loi organique, le siège et les
bureaux de représentation provinciale et locale de la CENI sont inviolables.

Adresse : immeuble BCCE, boulevard du 30 juin (en face du building ONATRA).


Internet : cenirdc@yahoo.fr , infos@ceni-rdc.org site : www.cei-rdc.org.
[17]

SECTION 3. MISSIONS ET ATTRIBUTIONS DE LA CENI

3.1. Missions

La constitution du 18 février 2006 de la RDC consacre la Commission


Electorale Nationale Indépendante, comme une institution d’appui à la démocratie,
chargée ‹‹ du processus électoral notamment l'enrôlement des électeurs, la tenue du
fichier électoral, les opérations de vote, de dépouillement et du référendum ››.

En outre, loi électorale du 06 Mars 2006, telle que modifiée à ce jour portant
organisation des élections présidentielle, législatives, Provinciales, urbaines,
municipales et locales, la charge de l'organisation de desdites élections.39

En clair, sa mission primordiale est donc d'organiser sur base des principes
démocratiques et de liberté de l'individu, des élections crédibles en RD.Congo tout en
gardant une position neutre et impartiale par rapport aux autres institutions, aux
candidats et aux électeurs.

3.2. attributions

Conformément aux termes de l'art.9 al.2 de la loi organique, pour une bonne
organisation des élections s'ajoutent à la mission principale des attributions,
notamment :

 Organiser et gérer les opérations pré-électorales, électorales et référendaires


notamment l’identification et l’enrôlement des électeurs, l’établissement et la
publication des listes électorales, le vote, le dépouillement, la centralisation et
l’annonce des résultats provisoires ;

 Transmettre les résultats provisoires à la juridiction compétente pour


proclamation des résultats définitifs , selon les cas;

 Passer des marchés afférents aux opérations pré-électorales, électorales et


référendaires conformément à la législation en vigueur ;

 Contribuer à l’élaboration du cadre juridique relatif au processus électoral et


référendaire ;

 Elaborer les prévisions budgétaires et le calendrier relatifs à l’organisation des


opérations électorales et référendaires ;

 Vulgariser en français et en langues nationales les lois relatives au processus


électoral et référendaire ;

39
la loi n°06/ 006 du 9 Mars 2006 portant organisation des élections présidentielle, législatives,
Provinciales, municipales, urbaines et locales telle que modifiée par la loi n°11/ 003 du 25 juin
2011, la loi n°15/ 001 du 12 février 2015 et la loi n° 17/ 013 du 24 décembre 2017.
[18]

 Coordonner la campagne d’éducation civique de la population en matière


électorale, notamment par la réalisation d’un programme d’information et de
sensibilisation des électeurs en français et en langues nationales ;

 Assurer la formation des responsables nationaux, provinciaux et locaux


chargés de la préparation et de l’organisation des scrutins électoraux et
référendaires ;

 Elaborer et vulgariser un code de bonne conduite et des règles de déontologie


électorale ;

 Découper les circonscriptions électorales au prorata (proportion) des données


démographiques actualisées ;

 Déterminer et publier le nombre et les localisations des bureaux de vote et de


dépouillement ainsi que ceux des centres locaux de compilation des résultats
par circonscription électorale ;

 Veiller à la régularité des campagnes électorales et référendaires ;

 Examiner et publier les listes des candidats ;

 Accréditer les témoins, les journalistes et les observateurs nationaux et


internationaux.

 Veiller à l'application des lois référendaire et électorale ;

IL nous a paru impérieux de détailler les missions et les attributions de la CENI, en


raison du fait que la mise en place d'un régime constitutionnel ne saurait être
démocratique que par le truchement d'un organe électoral crédible et indépendant à
qui la compétence lui est reconnue.

Considérant dès lors la délicatesse que revêt l'organisation des élections par le biais
des missions et attributions dévolues à cette centrale électorale, le législateur n'est pas
resté en marge de cette considération. Pour ce faire, le législateur lève l'option celle
d'un encadrement juridique approprié, permettant une effeciente gestion du processus
électoral.
[19]

3.3. Encadrement Juridique des élections

Le régime juridique des élections se caractérise par la cohabitation des


règles de nature et valeur juridique marquée par la très grande variété et l'importante
diversité des normes qui régissent la matière. Cette situation s'explique par
l'immensité de l'étendue géographique du pays et, par le nombre important des
scrutins qui y sont organisés au cours de chaque processus électoral en RDC.

Cependant, l'ordonnancement juridique y est donc très complexe. Dès lors, il convient
de présenter cet encadrement juridique relatif aux élections en RDC, classées selon
qu'elles se rattachent :
- Aux instruments juridiques à caractère universel et régional relatifs à l'organisation
des élections, dont les plus importants sont :

 la charte africaine des droits de l'homme et des peuples (DAHP) adoptée par
l'organisation de l'unité africaine le 27 juin 1981;

 la déclaration de l'OUA sur les principes régissant les élections démocratiques


en Afrique, adoptée 8 juillet 2002;

 les principes et les lignes directrices régissant les élections démocratiques


adoptés par la SADC le 20 juillet 2015; et

 la charte Africaine de démocratie, élections et de bonne gouvernance


(CADEG), signée le 29 Juin 2008, etc.

- Aux instruments juridiques à caractère national relatifs à l'organisation des élections.


Le cadre légal relatif à l'organisation des élections de 2011 et 2018-2019 en RDC
s'appuie essentiellement sur les textes, dont les plus importants :

 la constitution du 18 février 2006 telle que modifiée et complétée par celle


n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision des certains articles de la
République Démocratique du Congo ;

 la loi-organique n°13/ 012 du 19 Avril 2013 modifiant et complétant la loi-


organique n°10/ du 28 juillet 2010 portant organisation et fonctionnement de
la Commission Électorale Nationale Indépendante ;

 la loi n°06/ 006 du 9 Mars 2006 portant organisation des élections


presidentielle, législatives, Provinciales, municipales, urbaines et locales telle
que modifiée par la loi n°11/ 003 du 25 juin 2011, la loi n°15/ 001 du 12
février 2015 et la loi n° 17/ 013 du 24 décembre 2017;

 la loi n° 04/ 028 du 24 décembre 2004 portant identification et enrôlement des


électeurs en RDC modifiée et complétée par la loi n° 16/ 007 du 29 Juin 2016
et la loi n° 18/007 du 27 juin 2018;

 La loi n°004/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise ;


[20]

 L'accord de la Saint Sylvestre du 31 décembre 2016, etc.

Cet ordonnancement juridique de l'organisation relative aux élections tant nationale


qu'internationale pose non seulement des limites légales de cet organe de gestion
électorale, dans la mesure où celui-ci ne peut aller en dehors du cadre tracé par ces
textes, mais aussi et surtout cet encadrement juridique constitue des moyens
légalement puissants permettant à la CENI d'accomplir ses missions et attributions, en
terme de ses activités électorales. Et éventuellement en concert avec l'administration
publique.

C'est ainsi que toutes les activités pré-électorales, électorales et post-electorales


devront être réalisées conformément aux textes juridiques en vigueur, au cours de
chaque processus électoral. Et par ce fait, nous devons comprendre cela par étapes,
que nous répartissons en période :

3.3.1. La période pré-électorale

La période pré-électorale est une phase au cours de laquelle est constitué


d'un certain nombre d'opérations que la CENI ,organe de gestion des éléctions en
RDC, doit effectuer, éventuellement en concert avec l'administration publique et dont
les plus importantes sont: le recensement; le découpage de circonscriptions
électorales; l'indentification et l'enrôlement des électeurs; l'inscription des partis et
regroupements politiques, candidants indépendants; la campagne électorale et
l'aménagement des bureaux de vote.

1. Le recensement

Le recensement de la population globale est une donnée majeure du


processus électoral. Les résultats de toute élection ne peuvent être fiables que
lorsqu'on a des statistiques fiables sur le nombre total des électeurs c'est-à-dire ceux
qui remplissent toutes les conditions pour l'être.40

En effet, si le nombre de la population n'a pas été déterminé au préalable d'une


manière correcte, sur base duquel qu'on fixe le nombre des sièges par circonstance
électorale, cela compromettrait l’intégrité de processus électoral.

40
Art. 5 de la loi électorale.
[21]

2. Le découpage des circonscriptions électorales

Le découpage est l'acte par lequel le législateur divise le territoire national


en une ou plusieurs circonscriptions électorales 41, au sein desquelles les électeurs
élisent leurs differents candidats. En effet, c'est l'étape indispensable d'une
cartographie à l'attribution des sièges au sein des assemblées délibérantes, le
parlement par exemple.

En RDC, la circonscription pour l'élection du président de la République est le


territoire national, celle des députés nationaux, dans chaque province, la ville de
Kinshasa étant constituée de quatre circonscriptions électorales, la circonscription
électorale pour les sénateurs est la province ou la ville de Kinshasa, celles des députés
provinciaux, la ville ou le territoire, dans les provinces et la commune , dans la ville
de Kinshasa. La commune est également identifiée comme devant servir de
circonscriptions électorales pour les conseillers urbains et municipaux, tandis que les
conseillers de secteur ou de chefferie ont comme circonscriptions électorales le
groupement ou la chefferie, selon le cas.42

3. L' identification et l'enrôlement des électeurs

Avant les élections, les individus qui remplissent les conditions d'éligibilité,
après s'être identifiés , conformément à l'art. 5 de la loi électorale, se voient être
inscrits sur les listes électorales dans les circonscriptions où ils sont appelés à voter. Il
faut cependant veiller à ce qu'ils ne se fassent pas enrôler sur plusieurs listes ni dans
plusieurs circonscriptions à la fois. D'ailleurs, c'est ce qui fut le cas lors des opérations
d'enrôlement en 2018, où une bonne frange d' électeurs se faisaient enrôler de suite.

4. Inscription de candidature de partis et regroupements politiques et


candidats Indépendants

L'une des grandes étapes du processus électoral est celle de l'inscription des
partis et regroupements politiques et candidats Indépendants. En effet, le protagoniste
désireux exercé un mandat électif, devra faire acte par un dépôt de candidature auprès
de la CENI. Cette étape est réglementée par la loi électorale ( donne la durée, la
qualification des candidats et des pièces à produire), décisive pour la tenue du scrutin
et permet la préparation des bulletins de vote43. Et qui s'en suivra de la campagne
électorale des candidats inscrits.

41
Par circonscriptions électorales, il faut attendre par districts, au sein desquels les centres de vote y
implantés, étant généralement des écoles, où les électeurs sont destinés à voter leurs candidats.
42
Lire les Articles.110, 115, 128, 138, 174, 120, 207 de la loi électorale.
43
Lire les articles 12, 15, 18, 20, 22, 23, 24, 25, 104 et 121 de la loi électorale.
[22]

5. La Campagne électorale

La loi n'a pris le loin de définir la campagne électorale. Il semble bien


donc que soit l'œuvre de la doctrine.

Selon Jean Louis Esambo, La campagne électorale est une action coordonnée et
systématisée à laquelle se livrent les candidats en vue d’amener les électeurs à adhérer
à leurs idées ou projets de société. Elle se décline en une doctrine politique professée
pour solliciter le vote des électeurs dans le cadre d’une compétition réglementée.44

En effet, Aux termes de l'article 28 de la loi électorale, la campagne électorale ne peut


durerqu'au maximum trente jours, Elle prend fin vingt-quatre heures avant la date du
scrutin. Pendant la période de campagne électorale, le Conseil supérieur de
l’audiovisuel et de la communication, CSAC en sigle, instituée également par l'article
211 de la constitution, joue un rôle de grande importance, en ce sens que :

 IL veille au respect du principe d’égalité de production entre les candidats en


ce qui concerne la diffusion dans les médias publics de leurs activités, écrits,
déclarations, ainsi que la publication de leurs programmes.

 Il peut, par une décision dûment motivée et notifiée, s’opposer à la diffusion


d’une émission de la campagne électorale si les propos tenus sont injurieux,
diffamatoires ou révèlent un manquement aux dispositions de la Constitution
ou des lois, etc. (Lire les articles 33 et 35 de la loi électorale).

5. L'aménagement des bureaux de vote

La tenue d'une élection crédible exige au préalable qu'il soit organisé


une bonne et minutieuse préparation technique et logistique. L'on note, par exemple,
que pour y parvenir, il faut les isoloirs, les urnes, les bulletins de vote, chaises, etc.
qui parviennent en bon état dans des bureaux de vote.

3.3.2. La période électorale

C'est la période des activités du scrutin proprement dit, à savoir : le vote


proprement dit, le dépouillement, l'annonce et l'affichage des premiers résultats dans
les bureaux de vote.

44
ESAMBO KANGASHE, Droit électoral, L'Harmattan, p. 65.
[23]

1. Le vote proprement dit

En droit électoral congolais, le scrutin, sur pied de l'art 5 de la loi électoral


qui détermine la qualité de l'électeur, se déroule selon les modalités et la procédure de
votation. Aux termes de cette loi électorale, seule la personne munie de sa carte
d'électeur et inscrite sur la liste électorale d'un bureau de vote est autorisée à voter.
Toutefois, certaines personnes se voient être exclues de ce droit de vote, à savoir :

 Les personnes privées par décision judiciaire définitive de leurs droits civils et
politiques et celles frappées d'une incapacité mentale médicalement prouvée ;

 Les membres des Forces armées et de la Police nationale congolaise ; les


personnes non inscrites sur les listes électorales.( Cfr. L'art 7 du code
électoral).

Cependant, Il sied de noter que le législateur congolais organise le vote par bulletin
papier, cas de 2011, celui réalisé par procuration, dérogation et, exceptionnellement
celui électronique (lire les articles 47 al. 1 et 57 al. 6 de la loi électorale).

2. Le Dépouillement

Étape décisive dans la gestion d'une élection, le dépouillement consiste au


dévoilement du secret des urnes qui se réalisent conformément au plan arrêté dans le
manuel des procedures, selon la modalité de vote, le dépouillement peut être manuel
ou électronique.

La loi électorale congolaise indique, aussitôt le scrutin terminé, le bureau de vote


(BV) se transforme, immédiatement, en bureau de dépouillement(BD). Il doit, pour ce
faire, être sécurisé et équipé en matériel et documents nécessaires, parmi lesquels
l'urne, les lampes d'éclairage, les tables, le cachet portant mention nul, les bulletins de
vote, les procès-verbaux des opérations de vote et ceux de dépouillement, le registre
de vote par dérogation, etc.

En vue de s'assurer de la régularité du scrutin, de la transparence et crédibilité de la


procédure de votation, le président dudit bureau, en présence des autres membres et
personnes autorisées, par exemple les délégués de candidats, procède à l'annonce et
affichage des premiers résultats dans le bureau de vote.

3. L'annonce et l'affichage des premiers résultats dans le bureau de


vote

Pour des raisons de transparence, la loi électorale congolaise organise l'annonce à


trois étapes, des résultats de vote, à savoir:

Le législateur indique que premièrement, aussitôt le dépouillement terminé, les


résultats de chaque bureau soient , selon la procédure prévue, annoncées par le
président du bureau de dépouillement en présence d'autres membres du bureau :
délégués des candidats de partis ou regroupements politiques , et autres témoins et
observateurs. Ils sont affichés dans les BD et diffusés par tous les moyens de droit,
notamment la presse.
[24]

La deuxième intervient au niveau du centre local de compilation des résultats (CLCR)


situé dans chaque circonscription électorale. Après compilation, les résultats des
centres de vote sont rendus public par le président des CLCR pour les élections
législatives, Provinciales, urbaines, municipales et locales et celle présidentielle au
niveau de la ville (lire les articles 70 al. 3 et de la loi électorale).

Enfin, la dernière étape se réalise, après consolidation des résultats de tous les CLCR,
lesquels résultats sont, généralement suivies des signatures des personnes habilitées et
de tout document requis par les législations électorales, transmis aux organes et
institutions compétents.

3.3.3. La période post-électorale

Cette période comprend la centralisation des résultats, l'annonce des


résultats provisoires par l'organe de gestion des élections, la publication officielle des
résultats par la juridiction compétente, en l'occurrence la cour constitutionnelle et le
contentieux électoral.

1. La centralisation des résultats et leur transmission aux organes et


institutions compétents

La procedure de la transmission des résultats des bureaux de vote à


l'échelon immédiatement supérieure est minutieusement régie dans la loi électorale.
Collectés au niveau de chaque BD, ces résultats sont transmis pour centralisation,
compilation et traitement du CLCR situé dans chaque circonscription. Après ces
opérations, les résultats seront communiqués à la CENI qui en ordonne, après
rectification des erreurs matérielles, la publication des résultats provisoires.45

Il ressort qu'après cette publication par la CENI que peuvent naître des conflits de
nature diverse et qui font intervenir généralement différents organes, selon les cas,
constituant ainsi le contentieux électoral.

45
Art. 70 de la loi électorale.
[25]

2. Le contentieux électoral

En principe, il est admis que tout citoyen candidat à l'élection, selon le cas,
peut la contester s'il estime qu'il y a eu des irrégularités (fraude, tricherie, etc.)
entachées à cette dernière. Pour ce faire, la saisine de la juridiction compétente, selon
les cas, par requête s'avère indispensable.

En effet, l'art. 33 de la loi organique dispose que : ‹‹ en cas de recours porté devant la
juridiction compétente pour connaître des contentieux électoraux, la CENI apporte au
juge tous les éléments d'information (...) relativement au fait évoqué dans le
recours...›› Notons enfin que, chacune des juridictions devant connaître du
contentieux des élections, après examen dudit recours, rendra officiellement public les
résultats définitifs.46

46
Il s’agit de la cour constitutionnelle pour les élections présidentielles et législatives ; la cour
administrative d’appel pour les élections provinciales et le tribunal administratif pour les élections
urbaines, municipale et locale. (Art. 74 de la loi électorale).
[26]

CHAPITRE 2 :

LA PROBLÉMATIQUE DE L'INDÉPENDANCE DE LA CENI DANS LA


GESTION DU PROCESSUS ÉLECTORAL EN RDC.

Ce second chapitre sera subdivisé en deux articulations majeures : la première, à la


lumière des informations recueillies dès la création de la CENI jusqu'à ce jour,
s'emploie à décéler la nature des obstacles entravant l'action de celle-ci dans ses
prérogatives(section 1) ; et la seconde, fort des observations relatives à la nature de
ces obstacles, s'articule à ériger de mécanismes de reconquête en vue de consolider
l'indépendance de la CENI (section 2).

SECTION 1. LES OBSTACLES À L'INDÉPENDANCE DE LA CENI

Ces obstacles peuvent être circonscrits selon quatres ordres: d'abord, les
obstacles d'ordre matériel ( technique et logistique) et financier, ensuite les obstacles
d'ordre politique et émanant de sa composition paritaire ; et enfin ceux d'ordre
juridique et judiciaire.

1.1. Obstacles d'ordre matériel et financier

1.1.1. Obstacles d'ordre matériel

L'organisation d'une élection conforme aux standards internationaux exige de


l'organe qui en a la charge, dans le respect de la loi qui régit la matière, d'un
chronogramme réaliste axé autant sur une préparation technique ( manière dont
doivent être organisées les élections en toute expertise) que logistique ( concerne la
prise en charge du transport et du déploiement du matériel, et ce, à travers le territoire
national)47.

Cette double exigence à laquelle est confrontée la CENI est liée à l'immensité du
territoire national. Car, elle se voit obliger de déployer au cours de chaque processus
électoral les différents matériels électoraux ( bulletins de vote, urnes, Isoloirs, etc.) au
niveau de toutes les circonstances électorales, et ce, sur un espace territorial dont la
superficie est de 2.345.410 km². Elle ne dispose cependant de toute la logistique
nécessaire pour atteindre les coins et recoins de l'ensemble du territoire.

Ainsi, on a pu constater, à titre illustratif, lors du processus électoral en 2011, le plan


de déploiement de matériels électoraux a été affecté par la finalisation très tardive, dès
lors des cas où les bulletins de vote étaient insuffisants, des centres de vote où on
avait envoyé des kits vieillis et d’autres où des kits étaient tout neuf. Ces difficultés
logistiques rencontrées ont conduit à des nombreux retards quant à l'ouverture dans 85
% des BV.48

C'est ce qui oblige à la CENI de recourir, au cours de chaque processus électoral, à la


flotte aérienne de la MONUSCO ou de faire appel au concours des autres pays,
notamment l'Angola et l'Afrique du Sud, où sont imprimés les bulletins de vote49. Cet

47
ESAMBO J.L., droit électoral, op.cit. p.116
48
Rapport final : élection présidentielle et législative du 28 février 2011 de la Mission d’Observation
Electorale de l’Union Européenne ( MOE EU) RDC, P.39.
49
La MOE EU a constaté que l’impression de bulletin de vote est faite en Afrique du sud qui s’est
déroulée jusqu’au jour même de scrutin. Son acheminement a été assuré par l’armée sud-africaine puis
[27]

appui extérieur met souvent en difficulté son indépendance, et qui influe


considérablement sur les décisions de la CENI. C'est dans ce sens que Corneil
Nangaa, suite à l'incendie de l'entrepôt central de la CENI survenu à Kinshasa à l'éveil
des élections en décembre 2018, a été contraint de reporter les élections , au motif
qu'un retard peut surgir dans l'achat et la distribution de matériels électoraux
sensibles, notamment les machines à voter, pour le déroulement des élections.

Mentions notamment, la procédure d'enrôlement des électeurs a connu un grand


retard, en 201150, par rapport au délai initialement prévu, alors que les considérations
techniques exigent un recensement préalable de la population, primauté dans le
partage des sièges au parlement, dont l'administration publique n'a pu procéder dans
ce sens.

Il en va de même, en 2018, où la CENI a été amenée à abondonner l'identification de


la diaspora congolaise, pour ne se limiter qu'aux opérations d'identification et
enrôlement des nationaux, ne pouvant être exécutées grâce aux moyens disponibles 51,
et ce, dans les conditions les plus déplorables. C'est ainsi on a assisté à des cas
d'inscription multiples sur la liste électorale que la CENI n'a pu techniquement détecté
ces cas de violations.

Notons, en outre, l'utilisation de la machine à voter pendant les procédés de votation


en 2018 a techniquement constitué un handicap majeur, tel que plusieurs ruptures de
charges ont été enregistrées dans certains BV, et pour certains électeurs incapables, ne
sachant les utiliser, se sont vus obligés de bénéficier d'une aide de la part d'une tierce
personne, procédé qui n'a pas permis à préserver le principe sacro-saint du vote, celui
du secret de vote.

A en croire, ceci ne serait-ce que la résultante d'une faible campagne de sensibilisation


des électeurs, notamment pour l'appropriation et l'utilisation de ces machines à voter
que la CENI n'a fait preuve au cours dudit processus électoral.

La MOE SYMOCEL, pour sa part, a constaté dans 60 % l'ouverture tardive des


différents BV, pour insuffisance des kits électoraux, ayant entraîné des désordres et
énervement des électeurs impatients; dans 81 % les électeurs retardataires après
l'heure de clôture ont été autorisés à voter, tandis que dans 19 % des BV, ils ne l'ont
pas été; des électeurs sans carte d'électeurs et n'ayant pas leurs noms sur la liste ont
été autorisés à voter; etc. 52

Ces contraintes logistiques et techniques ont pu, à différents niveaux, affecter


l'intégrité des scrutins, et ont beaucoup pesé sur le travail de la CENI. Et le
gouvernement qui est censé financer les activités électorales en particulier la
logistique, ne le fait tel que voulu et au moment opportun, et par ricochet cet organe

par la MONUSCO vers les échelons inferieurs. Voir également Http :.// journal. Open Ed.
org/échogeo/1 /3/19 : les élections de 2011 en RDC entre cafouillage et tripatouillage. Consulté le 10
sept. 2020.
50
MOE EU, op.cit., p.39
51
Art.8 de la loi n°04 /028 du 24 déc. 2004 portant identification et enrôlement des électeurs en RDC
modifiée et complétée par la loi n°16/007 du 29 juin 2016 et la loi n°18/007 du 27 juin 2018. Lire
également the carter center : les élections présidentielle, parlementaires et provinciales harmonisées de
2018 en RDC, mission d’experts électoraux. P.37.
52
La MOE SYMOCEL, op.cit. p.100.
[28]

doit tout attendre de ces partenaires extérieurs, étant entendu qu'une bonne
planification matérielle rime avec son financement.

1.1.2. Obstacles d'ordre financier

Le budget de la CENI, loin d'en être ignorant, est progressivement financé par le
gouvernement, dès lors ses actions sur le terrain ne peuvent que dépendre du rythme
de financement dont elle bénéficie de la part de celui-ci et éventuellement à travers
une sollicitation de la CENI au gouvernement d'un appui de ses partenaires extérieurs.

En effet, au cours du processus électoral de 2011, les fonds alloués à la CENI à


compte goût par le gouvernement, ont entraîné le non respect du chronogramme
d'exécution des activités électorales influant négativement ( lacunes en terme de
préparation et des nombreuses irrégularités) sur ledit processus. C'est dans ce sens que
nous avons constaté un nouveau report des élections locales (attendues depuis 2006),
ainsi que le report des élections provinciales, aux calendes grecques pour manque de
financement.53

Et d'ailleurs, comme l'avait affirmé Lambert Mende, porte-parole du gouvernement, à


l'époque du président Kabila, dans une conférence de presse à Kinshasa : ‹‹ Les
élections provinciales ne pourront avoir lieu cette année que si les partenaires
internationaux de la République démocratique du Congo acceptent d’apporter à temps
leur financement ››.54

Et dans ces conditions comment éviter l'implication des forces extérieures dans le
choix des dirigeants congolais ?

Ce constat semble se confirmer avec le processus électoral de 2016-2017, à partir du


moment où l'incapacité du gouvernement congolais à mobiliser les fonds pour
l'organisation des scrutins fut une défaillance lourde de conséquences du report des
élections générales dans l'ensemble du territoire, pour l'année électorale 2018. Suite à
ce report, lequel engendra le choas dans le pays, débouchant par des accords
politiques, notamment celui de la Saint Sylvestre, dont sa mise en œuvre a attisé le feu
au sein de la classe politique.

Évoquant cette question du financement de la Ceni lors d’une rencontre avec les
médias en février 2017, Corneille Nangaa déclarait : ‹‹ Tout dépend de leur volonté
(volonté des politiques) à mettre en œuvre l’accord de la Saint-Sylvestre. ››55 pour
l'organisation des élections.

Ceci dit, si le gouvernement ne finance pas les élections, la CENI ne peut être en
mesure d'organiser les scrutins.

53
YANGOZELA D., note polycopiée, op.cit. Voir également la revue congolaise d’analyse politique et
pratique électorale : « alternative citoyenne pour la gouvernance démocratique », hors – sérié, 2017.
p.35 : le parlement s’est acquitté de son devoir en allouant à la CENI depuis 2012 250 millions USD
pour chaque exercice budgétaire. Ce qui totaliserait 1 milliards USD à la fin de l’année 2015. Mais le
gouvernement n’a su mobilisé cet argent pendant le 4 ans précédents. Ce qui semble inconcevable.
54
www.radiookapi.net/actualité/20/2/02/21/Lambert MENDE, organisation des élections provinciales
dépend de l’appui des partenaires extérieur. Consulté le 10 juillet 2020, 07 h34’.
55
https:// revue habari RDC net/CENI-une-institution-pas–totalement-indépendante. Consulté le 04 mai
2020, 15h46’.
[29]

Prenant s'en compte, la communauté internationale, en l'occurrence l'UE, réduisit


et/ou conditionne le gouvernement congolais à mettre en application ledit accord,
avant tout soutien de nature que ce soit. 56 En réaction, le gouvernement congolais a
annoncé qu'il organiserait seul les élections de 2018 sans aucun soutien international,
dénonçant ‹‹ un nuage de conditionnalité et d'ultimatums surannés ››, 57 précisant que
l'organisation des élections en RDC est une question de souveraineté nationale.
Décision qui semble pour l'opinion congolaise que d'une politique de trompe l'oeil.

L'Observatoire de la Depense Pubique (ODEP, en sigle), quant à lui, a fait falloir que
le gouvernement ne sera en mesure de financer seul les élections en 2018, pour des
éléments ci-après : faible paiement des dépenses des opérations électorales avec les
autres rubriques budgétaires de la CENI ; le décaissement des fonds alloués au
processus électoral dépend de l’éligibilité du candidat ; l’inadéquation entre les fonds
sollicités par la CENI et ceux reçus du Gouvernement.58 et donc elle doit recourir à
ces différents partenaires extérieurs notamment la MONUSCO, la SADC, l’union
européenne, l’USAUD, National Endowment For Democracy (NED), National
Democratic Institute (NDI), International Foundation For Eletoral Systems (IFES),
etc.

A cet égard, disons que dans les deux cas, le financement des élections en RDC fait
toujours intervenir, à différentes échelles, des partenaires extérieurs.
i limite certaines de ses attributions, résultant d'une certaine lenteur due au manque de
volonté politique dans le décaissement de fonds en vue d'une organisation efficiente
des élections libres, transparentes et inclusives telles que l'exigent les lois de la
république en vigueur.

56
https://www.euractiv.fr/section/aide au développement / news/UE condition le financement des
élections en RDC au respecter de liberté/.consulté le 04 juin 2020.
57
www.jeuneafrique.com/politique/exclusif/ les détails du budget électoral en RDC/2018. Consulté le
10 juillet 2020.
58
https://www.odepRDC.org/la RDC est - elle capable de financer seule le processus électoral 2018 ?
[30]

1.2. Obstacles d'ordre politique

La CENI, en tant que pouvoir organisateur des élections, en RDC, doit logiquement
bénéficier d'un climat politique serein marqué par la volonté des acteurs politiques
d'aller aux urnes dans le respect des délais constitutionnels. Or, une observation même
lugubre de faits depuis la réélection du président Kabila, en 2011, au sommet de l'Etat
prouve à suffisance le contraire jusqu'à ce jour. Il s'est avéré qu'après cette réélection
du président Kabila, les principales préoccupations des congolais se concentrent
maintenant sur le prochain cycle électoral, prévu pour 2016.

Il semble plus que probable que ce cycle ne pourra être complété dans les délais
constitutionnels. Les multiples inquiétudes et tentions qu'entoure l'avènement du
processus rendent désormais cette issue irréalisable, devant conduire à l'organisation
d'ici fin 2016 des élections générales.59

Cependant, au vu des développements émaillant entre 2016-2017, il semble


malheureusement être le manque de volonté du régime et/ou la stratégie adoptée par
l'ancien président Joseph Kabila de se maintenir sine die au pouvoir après 2016. C'est
ce qui fut qualifié de ‹‹ glissement ››, par la population congolaise ainsi que par
diverses sources concordantes, jugeant à corps défendant d'une attitude
marginalement contraire à la constitution (Cfr. l'art. 70 de la constitution).

Dans ce climat d'incertitude quant au processus électoral de 2016 et aux intentions du


président de vouloir briquer un troisième mandat, et après être saisie par différentes
parties prenantes dudit processus, la Cour Constitutionnelle a rendu un arrêt 60
autorisant le président Kabila de se maintenir au pouvoir, au cas où l'élection
présidentielle ne pourrait se tenir dans les délais constitutionnels, décision qui n'a
rencontré l'assentiment de la population congolaise.

L'impasse politique actuelle alimente clairement de tensions qui traversent le pays,


constituant des éléments déclencheurs faciles à utiliser, et on ne peut plus exclure
aujourd'hui que les citoyens, les opposants politiques, la société civile redescendent
massivement dans la rue, soulèvements concomitants à des manifestations qui ont
causé des conséquences potentiellement importantes61, qui se sont scrutés dans le
sang, occasionnant plusieurs morts d'hommes.

De l'autre côté, il y a l'attitude de la CENI usant, tour à tour, des contraintes relatives
au fichier électoral, à l'insécurité à l'est du pays, et surtout au manque de moyens
budgétaires disponibles, ne pouvant lui permettre d'organiser en toute quiétude les
élections en 2016. Dès lors, la perception de la population du climat dans lequel
devrait normalement se dérouler le processus en cours a profondément altérée,
l'accusant de vouloir retarder, au profit du régime en place, la tenue des élections au
delà de 2016. Il en découle vraisemblablement à des crises généralisées dans le pays.

59
Elections en péril et crises politiques en RDC : l’union européenne à la hauteur des défis
démocratiques et sécuritaires ? EUAC, open society foundations 2016, p.5.
60
Lire CC, 11 mai 2016, R. const. 262-journal officiel de la RDC, 57eme années, numéro spécial du 15
juillet 2016.
61
Elections en péril et crises politiques en RDC , op.cit. , P.8.
[31]

Les raisons évoquées aujourd'hui pour justifier la non-organisation régulières des


élections, sont à l'origine des crises constitutionnelle et politiques actuelles et noeud
des discussions menées à la cité de l'UA sous la médiation d' Edem kodjo et se
poursuit jusqu'au 31 décembre 2016 où un accord de la Saint Sylvestre est finalement
trouvé, sous les bons offices de la CENCO62, qui prévoit le retrait du président Kabila
avant la tenue d'une élection présidentielle en fin 2017, issue tout compte fait
irréalisable. Dans l'entre temps, il y a toujours l'attitude du président Kabila qui n'a
jamais fait preuve de son intention de vouloir quitter le pouvoir.

C'est avec raison que nous relayons la pertinence idée de Jean-Louis Esambo lorsqu'il
reconnaît en substance ‹‹ le pouvoir politique a, en raison des avantages et privilèges
qu'il procure, été souvent l'objet dans son exercice des convoitises et de conflits. ››63

Au lendemain du report des élections prévues fin 2017, des hauts responsables
politiques, notamment Jean Pierre Bemba et Moïse katumbi , y compris Adolphe
Muzito, ont tenté de s'inscrire comme candidats à la présidence et ont été exclus de la
course, par la cour constitutionnelle, 64 ainsi que par la suite l'exclusion des électeurs
de Béni, Butembo et Yumbi par la CENI à participer à l'élection présidentielle, ont été
largement perçues comme une preuve de la promixité trop grande de la CENI avec le
pouvoir, d'empêcher non seulement ces électeurs, mais surtout des opposants
éminents de se présenter aux élections de 2018.

Au cours de la même période, l'introduction des machines à voter par la CENI, qui
d'ailleurs proscrit l'article 237 ter de la loi électorale , n'a inspiré confiance des
citoyens Congolais face au processus électoral en cours, et pourrait être même à
l'origine de la compromission de la crédibilité des résultats.

Enfin, le 10 janvier 2019, outre les résultats législatifs et provinciaux, la CENI a


publié, les résultats provisoires, proclamant Félix Antoine TSHISEKEDI, président
élu de la RDC, sur les ondes de la RTNC. Arrivé en seconde position, l'opposant
Martin FAYULU, conteste ces résultats, et donc n'a reconnu sa défaite. Il saisit la
cour constitutionnelle et en a appelé à la CENCO et à la communauté internationale
de faire reconnaître ‹‹ la vérité des urnes ››. Subséquemment, cette contestation s'est
fait également ressentir au sein de la classe politique d'opposition et une bonne partie
de la population.

En conséquence de quoi, la perception des citoyens congolais, des observateurs tant


nationaux qu' internationaux reste ainsi marquée par l'idée que les résultats de ces
élections, entachées des vicissitudes, n'ont pas reflété fidèlement le choix du peuple ;
l'indépendance, l'impartialité et la neutralité de cette commission électorale sont (re-)
mises en doute dans l'imaginaire collectif.

1.3. Obstacles d'ordre de sa composition paritaire

La composition paritaire de la CENI, loin d'être un facteur qui puisse garantir la


représentativité et la neutralité de cet organe, constitue plutôt un facteur de paralysie
62
La revue congolaise d’analyses politiques et pratiques électorales, op.cit., p.87.
63
ESAMBO J.L., droit const., op.cit., p.125.
64
http//www.congoindependznt.com/affaire bemba vs ceni la cour const. a assassiné et le droit pénal et
la justice en RDC. Consulté le 1 sept 2020, 15h44’. Dans le même sens the carter center op.cit., p.30. la
C.C. a jugé que la ceni a eu raison d’exclure bemba comme candidat à la présidence en vertu de l’art.10
de la L.E.
[32]

de ce dernier. Ce modèle de composition, dont on tente de camoufler le risque de


partialité par une logique de représentativité équilibrée de forces politiques en
présence, accentue sans nul doute la politisation de cet organe de gestion électoral.

Aux termes de l'art 10 de la loi-organique examiné ci-dessus, il apparaît, en effet, dans


cet art. la notion imprécise de ‹‹ délégués ››, qu'on pourrait alors comprendre ,
exceptés les trois délégués de la société civile, que les dix autres membres sont des
délégués respectifs des familles politiques de la majorité et de l'opposition. Face à ce
mode de désignation politisé, la société civile ne peut faire un contre-poids à cette
politisation, et qui souvent elle bascule dans le camp le plus offrant.

Et c'est par ce que l'on qualifierait d'une ‹‹ surreprésentation politique dans


l'administration électorale ››, censée d'être apolitique et/ou c'est quand ‹‹ le politique
tient le juridique en état ››.

Dans leur intéressante étude déjà citée, P. Ngoma-Binda et S. Otemikongo ont décrit
cette politisation en des termes si appropriés : ‹‹ il apparaît ainsi clairement de la
composition que la CENI n'était pas à proprement parler Indépendante. Elle était
placée sous contrôle politique, même si ce contrôle était censé être équilibré. (...)Cette
nouvelle loi sur la CENI aggrave cette politisation et rompt radicalement avec le
compromis de l'AGI (...)››.65

Surencherit Jean Louis Esambo : ‹‹ Il est dès lors visiblement clair que la CENI, dans
la pratique, ne peut non seulement atteindre ses objectifs suite aux contraintes
produites par l'environnement socio-politiques, mais également en raison de
l'hétérogénéité des origines des membres qui la composent ››66.

En outre, il faut relever l'insuffisance et la non qualification des agents électoraux,


recrutés sans garantie d'expertise électorale suspectible de promouvoir l'indépendance
de cet organe. Voilà pourquoi, au cours de chaque processus électoral, ce dernier se
voit obliger de recourir à la communauté internationale pour son appui en terme de
renforcement des capacités ( expertise et formation ), la MONUSCO, en particulier.

En réalité, comme le souligne fort opportunément BUANALI ILUNGA ‹‹ beaucoup


de ses agents n'ont aucune expérience dans l'organisation des élections, certains sont
des stagiaires et la plupart d'informaticiens qui apprennent l'informatique sur place
(...) ››.67 Dans le même sens, précise Pascal KAMBALE ‹‹ (...) les agents de la CENI
n'ont pas reçu le statut de fonctionnaires de l'Etat et travaillent sur une base
contractuelle et périodique, d'où les gâchis à chaque processus électoral. ››68

Alors que l'idéal serait qu'un organe essentiellement technique au professionnalisme


et à la neutralité irréprochable gère le processus électoral en RDC.

1.3. Obstacles d'ordre juridique et judiciaire

65
P. Ngoma-Binda et S. Otemikongo, op.cit, p.4
66
Esambo J.L., note polycopiée. op.cit. p.250.
67
BUANALI ILUNGA D ; le rôle des institutions d’appui à la démocratie pendant la
période de transition en RDC : (mémoire), UNIKIN, dépt.spa, 2003-2004, p.61
68
KAMBALE P., « contribution des organes de gestion électorale à l’organisions des élections
crédibles en Afrique de l’ouest », cité par la revue d’analyse politique et pratique électorale, op.cit.,
p.54.
[33]

D'un point de vue strictement juridique, on pourrait affirmer que l'indépendance


structurelle et celle d'action de la CENI sont garenties en RDC. Et pourtant, il existe
d'autres dispositions légales qui limitent assez largement la portée pratique de cette
indépendance ;et, qui trahissent la volonté et la détermination même des acteurs
politiques en général et du législateur en particulier, de garder un contrôle sur cette
OGE. Pour ce faire, quelques articles y afférents seront examinés.

En effet, partant même de l’art. 10 de la loi organique actuellement en vigueur qui


indique si bien : la CENI est composée de 13 membres désignés par les forces
politiques de l’assemblée nationale , à raison des six délégués dont deux femmes par
la Majorité et de quatre dont une femme par l’Opposition politique. La Société civile
y est représentée par trois délégués... ››.
Il ressort de cette analyse, que dès lors cette commission électorale sera composée
selon cette logique de représentativité, où tous les membres désignés par les forces
politiques de l'Assemblée nationale, rêvent d'une CENI sous sa coupe comme garantie
des victoires répétées restant ainsi redevables vis-à-vis de leurs partis qui les ont
hissés, en violation de l'article 22 de la présente loi-organique, ses membres ne
sauraient être réellement indépendants. A cet effet, la CENI, si bien que réformée en
2010 et 2013, n'a fait progresser le pays dans le sens de son indépendance d'action.

Au cours de l'année électorale en 2016, il y a également un autre élément non


négligeable. Il s'agit notamment de l'arrêt R.Const. 262 de la cour constitutionnelle 69
qui, après être saisie par différentes parties prenantes alignés au processus pour
interpréter l'art 70 al. 2, a rendu le 11 mai 2016, ledit arrêt autorisant l'ancien
président Kabila à se maintenir au pouvoir jusqu'a l'élection du nouveau président de
la république et à son installation effective.

Cet arrêt fait donc clairement primer l'art 70 sur l'art. 75 de la constitution qui dispose
que le président du sénat assure l'intérim dans le cas où les élections ne seraient
organisées dans le temps. En effet, il sied de clarifier que la constitution congolaise
est , dans son ensemble, cohérente et sans équivoque au sujet de la durée et du nombre
de mandats présidentiels autorisés. Interpréter l'art 70 de manière isolée, comme l'a
fait la Cour, met en mal cette cohérence. Car, c'est une décision illégale, qui viole la
constitution.

Outre les différentes modifications ayant intervenu dans la loi électorale en 2017,
celles de l'introduction du seuil légal de représentativité ( cfr l'art. 118 de la loi
électorale), étant un pourcentage légal de voix à réaliser sur l'étendue du territoire
national, pour être considéré le ‹‹ mieux élu ›› et d'avoir d'office ‹‹ un siège ››, semble
être non démocratique, en ce sens qu'elle constitue cette mesure d'exclusion de
l'espace démocratique pour les candidats Indépendants de se présenter à une élection

Poursuivant la même logique, le recours à des machines à voter pour les élections de
2018, semble être juridiquement douteux. En effet, la CENI, autorité administrative
dotée d'un pouvoir réglementaire, en contredisant l'art. 237 ter de la loi électorale,
impose un procédé électronique de vote prohibé. Ce non-respect des domaines de la
loi et du règlement est donc une violation de la constitution (art. 62 Al. 2 et 122.2).

Il se fut, ipso facto, constater que ce procédé de votation électronique a également


proscrit l'art. 5 al. 3 de la constitution qui préconise le respect du caractère secret du
69
Idem.
[34]

vote. Considérant les difficultés techniques, pour lesquelles nombreux électeurs,


vivant dans des milieux reculés, ont eu d'ailleurs à faire recours à une tierce personne,
lesquelles difficultés ont eu un impact non négligeable sur le plan de la hiérarchie des
normes dans la mesure où l'article 58 al. 1 et 2 de la loi électorale préconise ce
secours, alors que l'art. 5 al.3 de la constitution sus-évoqué en interdit.

Bien que la loi électorale ait prescrit,70 la CENI en est passée outre à publier les
résultats des élections de 30 décembre 2018 sans détails de chaque BV, ce qui a
alimenté des spéculations selon lesquelles elle aurait modifié les totaux des votes, et
contribué ainsi au manque de légitimité et d'intégrité du processus électoral. Elle a
donc violé la loi électorale.

Sur le plan judiciaire, un cas peut être mis en exergue, celui de l'art 33 de la loi-
organique qui permet les rapports entre la CENI et la cour constitutionnelle, en
l'occurrence, devant connaître du contentieux des élections. Il s'est avéré que ce
rapport légalement étroit, dans l'histoire des élections en RDC, a sans nul doute
plongé le pays dans le chaos, résultante de toute crise de légitimité et légalité des
institutions du pays.

La cour constitutionnelle qui devrait être le rempart de l'indépendance de la CENI, par


ricochet de l'intégralité du processus électoral dans l'examen objectif des recours qui
lui sont soumis par elle ou contre elle, n'a demeuré jusque-là la bouche de la CENI
pour confirmer les résultats provisoires qu'elle lui soumet. Et c'est dans ce sens qu'on
a assisté, lors de la proclamation officielle des élections du 30 décembre 2018 à des
révélations telles que " il y a eu plus de nommés que des élus ". A en croire, la cour
constitutionnelle, la haute cour, aurait, elle aussi, perdu son indépendance ? La
question reste pendante.

70
Les art. 67 et 68 de la loi electorale
[35]

SECTION 2. MÉCANISMES DE RECONQUÊTE EN VUE DE LA


CONSOLIDATION DE L'INDÉPENDANCE DE LA CENI

A la lumière des obstacles auxquels la CENI fait face, dans la pratique, aux fins de
l'organisation des élections inclusives, nous relevons, pour ce faire, un certain
nombres de remèdes pouvant permettre à cet organe de gestion électorale de bien
mener ses activités, pour ainsi espérer consolider son indépendance.

Cela étant, ces remèdes seront circonscrits en fonction des obstacles sus-évoqués les
uns servant de support aux autres, et vice versa, à savoir :

 les remèdes d'ordre matériel et financier ;


 les remèdes d'ordre politique ;
 les remèdes d'ordre de sa composition paritaire ;
 les remèdes d'ordre juridique et judiciaire.

2.1. les remèdes d'ordre matériel et financier

2.1.1. les remèdes matériels

Hormis toutes les considérations favorisant la bonne organisation des élections,


l'issu d'une élection, voulues inclusives, est avant tout technique. Ceci suppose que
soit mis en place un système administratif efficace pour enfin palier à tout
désagrément de nature que ce soit.

En effet, au vu des contraintes logistiques et techniques telles que mises à nu


précédemment et en vue d'y remédier, il sied de recommander à l'État congolais de :

 Prévoir toute une infrastructure électorale dont le volume doit être de manière
précise et fiable mais également l'allocation dans les conditions les plus
optimales du point de vue temps, quantité et qualité ;

 Procéder à la création des entrepôts au niveau de tout le territoire, qui doivent


être suffisamment outillés en matériel électoral, aux fins du déploiement des
kits électoraux pendant les procédures de votation ;

 Adopter des plans d'urgence et de sécurité efficaces pour renforcer la capacité


de la CENI à réagir efficacement aux incidents imprévus, tels que le
déploiement et la récupération de matériels électoraux avant, pendant et après
les élections ;

 Élaborer une version précise et à jour du recensement de la population, afin de


produire un fichier électoral fiable.
[36]

A la CENI de :

 Créer un calendrier électoral plus détaillé et axé sur les éventualités, par le
renforcement d'un plan national d'information et de sensibilisation avec toutes
les parties prenantes du processus électoral ;

 Si le vote électronique est le type de vote adopté pour les prochaines


échéances électorales, les problèmes techniques liés aux machines à voter
doivent pris en compte par la CENI ;

 Introduire à cet effet périodiquement des certifications publiques pour vérifier


l'intégrité de ces machines, afin de renforcer la confiance du public dans leur
utilisation.

Ce qui suppose bien évidemment la disponibilité des moyens financiers en temps


voulu.

2.1.2. Les remèdes d'ordre financier

L'indépendance financière est l'un des facteurs importants qui permet à


l'administration électorale dite Indépendante de travailler sans ingérence politique et
de toute attache à des groupes d'intérêts particuliers. Ce qui revient à dire qu'une
gestion financière axée sur des politiques efficaces telles que une prévision bubgetaire
anticipative pourrait contribuer à préserver l'intégrité d'une telle administration.

En effet, nous avons constaté que la CENI n'a pas la maîtrise de son budget. Nous
recommandons ainsi aux pouvoirs publics de mettre à sa disposition des moyens
financiers au moment opportun en vue de lui faciliter la tâche d'obtenir tout ce dont
elle a besoin pour mener à bien ses activités.71

Ceci dit, étant donné que le financement des élections en RDC est reconnu à l'État
congolais, tel que le prévoit la loi, et à la lumière des écueils survenus à chaque cycle
électoral dans ce sens, il est impérieux pour l'État de se servir du passé ainsi pour
prévenir et minimiser les risques à l'horizon 2023.

In aliis verbis, ne pas attendre l'année électorale pour financer : l'Etat doit mettre en
place un mécanisme d'autofinancement anticipatif de la CENI, lequel épargnerait cette
institution de dépendre des humeurs des politiciens et, éventuellement, des partenaires
extérieurs. Ceci suppose une bonne volonté politique dans le chef des autorités
exécutives.

Ceci étant, l'idéal serait de financer à l'interne pour éviter les ingérances à caractère
international qui limitent assez souvent la souveraineté de l'État congolais, et parfois
remet en cause la neutralité de l'organe chargé des élections, en RDC, étant donné la
main qui donne est toujours au dessus de celle qui reçoit, confirme un adage
populaire.

71
NDJOLI ESENGEKELI J., les constitutionalisme africain en la gestion des héritages et l’invention
du futur exemple congolais, thème de doctorat en droit public, université de paris I, Sorbonne, 2003,
p.53 - 54
[37]

Par ailleurs, les partenaires extérieurs peuvent toujours continuer à apporter leurs
contributions financières, pour la consolidation de la démocratie. Mais, il sied de
préciser que pour cette option, l'État doit prouver la nécessité d'en bénéficier et/ou
mieux son incapacité d'organiser les élections en toute crédibilité. Le passé aidant,
cette option a fait preuve des épineux problèmes.

D'ailleurs, l'activiste Antoine N'SAMBA KALAMBAY, pour sa part, recommande la


création d'un fonds national pour les élections auxquelles tout citoyen congolais en
âge de voter devrait contribuer avec un minimum de mille francs congolais. Ce fond
servira à autonomiser financièrement la CENI et permettra l'appropriation par la
population du processus électoral.72

2.2. les remèdes d'ordre politique

En tant qu'organisme de droit public et une institution d'appui à la démocratie, la


CENI à ce titre entretient des rapports avec d'autres institutions politiques, étant
entendu que son indépendance n'est synonyme de son autarcie. convient-il de
souligner que le fait pour la CENI d'organiser par elle-même des élections, jugées
pacifiques, serait hasardeux d'ériger en dogme.

A cet effet, les comportements des animateurs des institutions politiques, telles que
président de la république, le gouvernement et le parlement, des partis et
regroupements politiques, de la société civile, des médias, la police et l'armée, la
communauté internationale, tout en œuvrant sur base des principes démocratiques et
de liberté de l'individu, pour cette fin, sont décisifs pour la paix, en RDC, afin d'éviter
les écueils qui débouchent sur des crises post-électorales, se scrutant souvent par le
sang.

Pour ce faire, la démocratisation du régime demeure la pierre angulaire pour une


réelle assise de son indépendance. Au contraire, à l'absence d'une démocratie, la CENI
est transformée en ‹‹ une institution d'appui à la dictature ››. D'ailleurs, la vitalité de la
démocratie en matière électorale réside entre autres dans le fait qu'il s'agit d'un
système qui assure la participation des citoyens aux affaires politiques, et non de la
réduction de l'espace démocratique: répression et violations des droits humains. Sinon
on n'est plus avancé qu'à l'époque des partis uniques et/ou régime dictatorial
Et donc vouloir la paix sans une démocratie, enracinée par les institutions politiques,
serait illusoire. Car c'est la démocratie qui mène à la paix, pas l'inverse. Promouvoir la
démocratie au sein de nos institutions serait très salutaire pour le progrès de la RDC, à
l'horizon 2023.

2.3. les remèdes d'ordre de sa composition paritaire

Il s'est avéré que le mode actuel de désignation de la CENI n'a fait preuve
d'efficacité de cette institution. Cependant, tant que ce mode restera numeriquement et
éminemment politique, il sera difficile de garantir pleinement son indépendance. Car
clamer et réclamer l'indépendance de la CENI ne signifie pas nécessairement qu'elle
l'est en fait.

72
N'SAMBA KALAMBAY A., la ceni jouit-elle de son indépendance organique et
fonctionnelle ?, par la rédaction Africa news du 16 déc. 2016. Consulté le 20 janvier
2020.
[38]

Comme mécanisme de reconquête, il est impérieux de se méfier du schéma politique


par le choix des animateurs de la CENI, pour éviter sa politisation. In aliis verbis,
nous préconisons que les politiciens ne fassent plus parties de cette institution, pour la
simple raison leurs partis concourent aux élections et qu'on ne peut être juge et partie.
Et donc, que l'administration électorale soit dans sa totalité animée par la Société
civile.

A cet égard, la société civile, servant de courroie de transmission des intérêts


communautaires, doit demeurer apolitique, neutre, ne pas se livrer à des pots de vins
des politiciens, afin de promouvoir la perception de sa neutralité et pour la solidarité
nationale.

Et même si l'on serait dans l'hypothèse, de conserver ce même mode de désignation,


l'on aurait voulu que la CENI soit composée de trois (3) membres de la majorité, trois
(3) membres de l'opposition et sept (7) de la société civile. Prenant en compte cette
position, il convient d'exiger aux politiciens de respecter l'indépendance de la CENI,
de ne pas chercher à influencer ses activités à travers leurs délégués, qui sont, quant à
eux, tenus à respecter leur serment.

Enfin, nous recommandons, en outre, à la CENI de former ses agents tant au niveau
local que provincial, pour ainsi garantir le professionnalisme de son système
d'organisation et fonctionnement tout en tenant compte dans le chef de ces agents d'
une expertise électorale avérée, et ce, justement sur base de critères de compétences,
d'intégrité physique et morale, etc.

2.4. les remèdes d'ordre juridique et judiciaire

Autant le climat politique est favorable pour l'organisation des élections libres,
autant un cadre juridique approprié est propice pour tous. Cependant, se référant aux
différentes contraintes d'ordre juridique qu'a subi la CENI, nous recommandons ce qui
suit :

 Dans l'impossibilité d'organiser les élections dans les délais constitutionnels, le


recours aux art. 75 et 76 de la constitution sont la voie régulateur pour sortie
de l'impasse ;

 Reviser le mode de désignation des animateurs de la CENI, tout en modifiant


l'art. 10 de sa loi organique qui le prévoit ;

 Harmoniser l'art. 58 de la loi électorale73 d'avec l'art. 5. al. 3 de la constitution,


qui dispose : ‹‹ le suffrage est secret ››, alors que l'art précité n'en garantit
point dès lors qu'il est à craindre que le secret ne soit pas absolu pour
nombreux électeurs ;

 Reviser la loi électorale dans le cadre d'un processus inclusif, afin d'assurer
que les seuils électoraux conformément à l'art. 118 de la loi électorale,
n'imposent pas des contraintes déraisonnables au droit de se porter candidat,
en particulier pour les candidats Indépendants ;
73
L’art.58 al. 1 de la L.E dispose que l’électeur qui se trouve dans l’impossibilité de voté seul a le droit
de se faire assister par une personne de son choix. Le second al. dispose que tout électeur ne peut
communiquer de celui-ci.
[39]

 Si les prochaines élections continuent d'inclure le système de vote


électronique, le législateur et la CENI devront revoir et réviser les lois et
réglementations en vigueur et procéder aux ajustements nécessaires pour
harmoniser son utilisation avec le cadre juridique ;

 Le législateur devra, considérant la taille géographique du pays, prolonger les


délais prescrits ( deux jours ) par la loi, pour permettre aux requérants de
rassembler des preuves à l'appui pour la résolution des litiges électoraux ;

 intégrer dans la législation un mécanisme de débat démocratique sur les


propositions des différents candidats, une manière de récaler les candidats
jugés incompétents. Ce débat pourrait, avant leur entérinement, se dérouler à
l'Assemblée nationale ou au congrès.

Sur le plan judiciaire, la CENI ne pourra jamais travailler de manière satisfaisante,


tant que le système judiciaire congolais demeure déliquescent. Elle dépend pour cela
d'un système qui ne fonctionne pas ou mieux fonctionne mais à l'opposé de ce qui est
attendu de lui.

Ainsi, il est nécessaire que pour les forces vives de la société, pris dans son ensemble,
si ils veulent consolider les acquis démocratiques, en matière électorale, de mener un
combat démocratique pour une réforme efficace et durable du système judiciaire, qui
devrait être en mesure d'examiner de manière impartiale et objectif tous les
contentieux électoraux.

Notons enfin que le pouvoir judiciaire doit d'abord assurer sa propre indépendance
avant de garantir celle de la CENI. Ceci permettrait d'éviter des crises de légitimité et
de légalité, pour lesquelles les institutions politiques en souffrent, depuis la nuit de
temps.
[40]

Conclusion

Force nous est, somme toute, d'affirmer que ce travail consacré à ‹‹ la problématique
de l'indépendance de la CENI dans la gestion du processus électoral en RDC ››,
convient-il de préciser, est parti d'un simple constat que l'institution d'une commission
électorale indépendante, en RDC est actuellement indispensable pour un déroulement
harmonieux du processus électoral.

Cette situation, qui remonte aux années 90, crée une certaine effervescence
démocratique dont la finalité ultime demeure l'organisation des élections libres,
transparentes et inclusives. Toujours est-il que tous les évènements y compris les
guerres qu'à connues le pays ces dernières décennies, suivies d'ailleurs des
négociations entre acteurs politiques locaux, sur fond d'une forte implication de la
communauté internationale, ont pour justification principale aujourd'hui l'organisation
d'un scrutin démocratique, afin de légitimer le pouvoir, par le truchement d'une
institution électorale " indépendante ", une conquête passée dans la législation
congolaise.74

Considérant cette donnée majeure, nous nous sommes particulièrement intéressé aux
actions entreprises par la CENI au cours de la période électorale 2011-2018. Ainsi
donc, nous avons cherché à savoir non seulement l'origine et la mission de la CENI,
mais aussi et surtout à déterminer les obstacles auxquels cette institution fait face,
dans la pratique, aux fins de l'accomplissement de sa mission et de ses attributions,
qui entravent par conséquent la perception de son indépendance.

A cet égard, nous sommes parti de l'hypothèse selon laquelle la CENI, quoique
jouissant théoriquement de son indépendance organique et fonctionnelle sur le plan du
droit, des textes qui l'organise, elle demeure, dans la pratique, inféodée aux politiques,
résultant de sa promixité trop grande avec le pouvoir , source de tout facteur érosif de
son indépendance.

A la lumière de ces analyses , nous avons traité ce sujet en deux chapitres : le premier
s'est axé sur une vision panoramique de la CENI. Ce qui nous a permis de retenir
entre autres que la CENI est une institution d'appui à la démocratie, aux termes de
l'article 211 de la constitution du 18 février 2006.

Le second s'est érigé à démontrer les principaux obstacles ayant porté atteinte à
l'indépendance de la CENI, notamment de l'influence du climat socio-politique, de
l'hétérogénéité des origines de ses animateurs, du retard dans le financement, des
problèmes matériels, de violations des textes légaux en vigueur, ainsi que le
dysfonctionnement du pouvoir judiciaire...

A l'issue de nos investigations, il est clairement apparu que la CENI n'est proprement
à parler Indépendante, suite aux restrictions qui lui sont formulées par ses détracteurs,
qui rêvent d'une CENI comme garantie de victoires répétées aux élections.

Cependant, pour conserver les acquis en matière électorale passés dans la législation
congolaise, résultant de la rupture du tissu d'avec le régime dictatorial, convient-il de

74
Aux termes de l’art.211 de la constitution en vigueur institue la ceni
[41]

préciser, la démocratisation du régime à l'heure actuelle est la pierre angulaire pour


une réelle assise de l'indépendance de la CENI.

A l'en croire, l'indépendance de la CENI est une garantie de paix et de sécurité pour
tous. Car garantir l'indépendance de la CENI, par ricochet des élections inclusives,
partant consolider la paix dans un pays post-conflit comme la RDC, est a fortiori
bénéfique aux acteurs politiques, pour gouverner légitimement et légalement, afin
d'éviter les crises institutionnelles récurrentes post-électorales. Car , il ne sert à rien de
passer un mandat à revendiquer une légitimité contestée. A en croire, DJOLI
ESENGEKELI, les gouvernements sont légimes que si elles émanent de l’élection,
pourvu qu'elle soit crédible 75. En d'autres termes, nul gouvernement n'est légitime que
si ses fonctions ne découlent du consentement du peuple. Sinon on n'est pas plus
avancé qu'à l'époque des partis uniques et/ou régime dictatorial.

Et donc, il convient de rappeler à tous les acteurs, sus-mentionnés ci-dessus,


intervenant dans le processus électoral en RDC qu'il est grand temps de respecter non
seulement la vox pupoli, mais aussi et surtout l'indépendance de la CENI, pour ainsi
espérer matérialiser une volonté commune de bâtir au cœur du pays, un État de droit
et une nation puissante, fondée sur une véritable démocratie. C'est donc là la voie de
la paix et du développement durable pour la RDC, à l'horizon 2030.

DJOLI ESENGEKELI, droit constitutionnel, principes structuraux, tome 1, ed.


75

Université africaine, RDC, p.87.


[42]

BIBLIOGRAPHIE

A. LES SOURCES INTERNATIONALES DU DROIT ELECTORAL

1. Les conventions à caractère universel et régional

 La charte africaine des droits de l'homme et des peuples (DAHP) adoptée par
l'organisation de l'unité africaine le 27 juin 1981.

 La déclaration de l'OUA sur les principes régissant les élections


démocratiques en Afrique, adoptée 8 juillet 2002.

 Les principes et les lignes directrices régissant les élections démocratiques


adoptés par la SADC le 20 juillet 2015.

 La charte Africaine de démocratie, élections et de bonne gouvernance


(CADEG), signée le 29 Juin 2008.

B. LES SOURCES NATIONALES DU DROIT ELECTORAL

1. Cadre constitutionnel

· La constitution du 18 février 2006 telle que modifiée et complétée par celle


n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision des certains articles de la
République Démocratique du Congo.

2. Cadre législatif

· La loi-organique n°13/ 012 du 19 Avril 2013 modifiant et complétant la loi-


organique n°10/ du 28 juillet 2010 portant organisation et fonctionnement de
la Commission Électorale Nationale Indépendante.

· La loi n°06/ 006 du 9 Mars 2006 portant organisation des élections


presidentielle, législatives, Provinciales, municipales, urbaines et locales telle
que modifiée par la loi n°11/ 003 du 25 juin 2011, la loi n°15/ 001 du 12
février 2015 et la loi n° 17/ 013 du 24 décembre 2017.

· La loi n° 04/ 028 du 24 décembre 2004 portant identification et enrôlement


des électeurs en RDC modifiée et complétée par la loi n° 16/ 007 du 29 Juin
2016 et la loi n° 18/007 du 27 juin 2018.

· La loi n°004/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise.

· La loi n° 18/005 du 8 mai 2018 portant adoption de la répartition des sièges


par circonscription électorale pour les élections législatives, provinciales,
municipales et locales.

3. Cadre réglementaire

· La résolution n°04/CAB/P/AN/AM/2013 du 7 juin 2013 portant entérinement


de la désignation des membres de la Commission électorale nationale
[43]

indépendante « CENI ».

· L’ordonnance n°13/058 du 12 juin 2013 portant investiture des membres de la


CENI.

· L'arrêt R. Const. 262 - journal officiel de la RDC, 57é année. Numéro spécial
du 5 juillet 2016.

· Le règlement intérieur de la CENI tel que déclaré conforme à la Constitution


par la Cour suprême de justice faisant office de Cour constitutionnelle en son
Arrêt n°R. CONST.267/TSR du 06 décembre 2013.

C. DOCTRINE

1. Ouvrages

 ESAMBO KANGASHE J.-L., La constitution congolaise du 18 février 2006 à


l'épreuve du constitutionnalisme : contraintes, pratiques et perspectives,
Louvain-la-Neuve, Academia bruyllant, bibliothèque de droit africain 2010.

 ESAMBO KANGASHE J.-L., le droit constitutionnel, Louvain-la-Neuve,


Academia, L'Harmattan, 2013.

 ESAMBO KANGASHE J.-L., le droit électoral congolais, Louvain-la-Neuve,


Academia, L'Harmattan, 2014.

 DJOLI ESENGEKELI J., DROIT CONSTITUTIONNEL, principes


structuraux, tome 1, éditions universitaires Africaines,

 NGOMA- BINDA P., OTEMIKONGO Y., et MANDELU Y., Démocratie et


participation à la vie politique : une évaluation des premiers pas dans la III è
République, une étude d'Afr. Map et de l'Open society initiative for southern
Africa, RDC, 2010.

D. MÉMOIRES

 BUANALI ILUNGA D., le rôle des institutions d'appui à la démocratie


pendant la période de transition en RDC : Cas de la CEI ( Mémoire),
UNIKIN- Dépt. SPA, 2003-2004.

 MAKENGO NDUNDU N., l'apport des commissions électorales au


renforcement de la démocratie en Afrique, contraintes pratiques et
sperspectives , ( Mémoire) UNIKIN, 2014.
[44]

E. NOTES DE COURS

 ESAMBO KANGASHE J.-L., Droit constitutionnel général, UCC, kinshasa,


faculté de Droit, 2017-2018.

 ESAMBO KANGASHE J.-L., Droit constitutionnel 2, UCC, kinshasa, faculté


de Droit, 2018-2019.

 DOBO KUMA j., Cours d'initiation à la recherche scientifique, UCC,


kinshasa, faculté de Droit, 2017 -2018.

 YANGONZELA D., les institutions politiques d'Afrique contemporaines,


UCC, kinshasa, faculté de Droit, 2019-2020.

F. RAPPORTS ET AUTRES DOCUMENTS

 SYMOCEL : ‹‹ rapport final d'observation des élections directes et indirectes


de 2018 et 2019, Kinshasa, Mai 2019.

 CARTER CENTER : ‹‹ les élections présidentielles, parlementaires et


provinciales harmonisées de 2018 en RDC, mission d'experts électoraux.

 MOE EU : ‹‹ rapport final des élections présidentielle et législatives de 28


novembre 2011 ››, RDC, 2012.

 LUMU MBAYA S., Revue congolaise d'analyse des politiques et pratiques


électorales : ‹‹ alternatives citoyennes pour la gouvernance démocratique ››,
hors-série, 2017.

 N'SAMBA KALAMBA A., la CENI jouit-t-elle de son indépendance


organique et fonctionnelle ? par la rédaction Africa news du 16 décembre
2016.

G. WEBOGRAPHIES

 Http : // www. ceni. rdc. org. Consulté le 11 juin 2020, à 16h 10'

 Http//wwwCongo-Independent-com/affaire-Bemba-vs-ceni-la-cour-
constitutionnelle-a-assassiné-et-le-droit-pénal-et-la-justice-en-
RDC.Consultéle1 septembre 2020, à 15h 44'

 https://www.radiookapi.net/actualite/2012/02/21/lambert-mende-
lorganisation-des-elections-provinciales-depend-de-lappui-financier-des-
partenaires-exterieurs. Consulté le 10 juillet 2020, 7h 34'

 ttps://habarirdc.net/ceni-institution-totalement-independante/ consulté le 4 Mai


2020, 15h 46'

 ttps://www.memoireonline.com/04/15/9109/Lapport-des-commissions-
[45]

electorales-au-renforcement-de-la-democratie-en-Afrique-contraintes-pr.html.
consulté le 30 Mai 2020, 15h.

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