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Thème 

: Efficacité des aides au Bénin

Revue de littérature

Introduction

Pour comprendre les enjeux de l’APD, il semble important de revenir sur les objectifs de cette
coopération internationale qui date d’après la seconde guerre mondiale (Jacquet, 2006). Cette
coopération s’est poursuivie au lendemain de la décolonisation entre les pays occidentaux et
leurs anciennes colonies. L’objectif absolu était de favoriser le développement économique
essentiellement des Pays les Moins Avancés (PMA), à travers un accroissement des
financements de certains secteurs considérés comme étant d’intérêt général tels que
l’éducation, la santé, les infrastructures, mais également dans certains cas, des guerres civiles
(à travers l’armement), et ainsi parvenir à une amélioration du niveau de vie. Autrement dit, il
s’agissait d’un transfert financier d’un Etat considéré comme étant « développé » vers un Etat
dit alors « en développement » pour en théorie favoriser son développement à long terme.
Mais cela ne peut se réaliser que si l’APD influe positivement la croissance économique.
Cette croissance doit être bénéfique pour la réduction de la pauvreté. La lutte contre la
pauvreté est, et demeure l’objectif principal de l’APD. Cette dernière doit viser l’amélioration
du niveau de vie des populations. Ainsi, pour atteindre un tel objectif, l’APD doit servir à
promouvoir la croissance économique dans les PED, notamment par le financement des
investissements. Dans ce chapitre, il conviendra de définir d’abord les concepts liés aux
fondements de l’APD ensuite, entamer une discussion sur l’efficacité de l’APD.

Clarification conceptuelle

 L’aide publique au développement (APD)

Le Comité d'aide au développement (CAD, instance de l'OCDE chargée des questions


relatives à la coopération avec les pays en développement) définit l'APD comme l'ensemble
des ressources qui sont fournies aux pays en développement par les organismes publics, et qui
sont dispensées dans le but essentiel de favoriser le développement économique et d'améliorer
le niveau de vie des pays en développement. Pour être comptabilisées dans l'aide, ces
ressources doivent également revêtir un caractère de faveur et comporter un élément de
libéralité d'au moins 25%. L'aide publique comprend donc les dons, mais également les prêts
dont l'élément don est supérieur à 25% de la valeur totale. L'intégralité de la valeur du prêt est
alors comptabilisée dans l'APD. En décembre 2014, la réunion de haut niveau du Comité
d'aide au développement (CAD) de l'OCDE a entériné une importante réforme des règles de
l'Aide publique au développement (APD). Les règles de comptabilisation des prêts n'avaient
pas changé depuis plus de 40 ans. Cela a constitué une contribution importante de l'OCDE, à
la veille des conférences internationales qui se sont tenues en 2015. Auparavant, tout prêt dont
l'élément-don était supérieur à 25 % était entièrement déclarable en APD, indépendamment de
ses conditions financières. Pour mesurer cet « équivalent-don » des prêts dans le nouveau
système, la référence retenue (soit le « taux d'actualisation ») dépendra du niveau de revenu
du pays bénéficiaire et ne sera plus uniforme. Actuellement, l’élément don est de 25% pour
les pays à revenu intermédiaire et de 35% pour les PMA et/ou les pays dont la capacité est
faible et vulnérable. L'A.P.D. est allouée d'État à État, dans le cadre de relations bilatérales,
ou par l'intermédiaire d'organisations multilatérales. Les principaux bailleurs de fonds
multilatéraux sont la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (F.M.I.), l'Union
européenne, les différentes agences des Nations unies, et les banques régionales de
développement. Elle connait des évolutions, notamment à travers de nouveaux types de
financements dits « financements innovants », intégrant le secteur privé, le partenariat public-
privé…

L'importance théorique de l'APD pour une économie en besoin de financement remonte aux
travaux sur le « big push » de Rosenstein-Rodan. Cet auteur souligne en substance que des
apports massifs en capitaux extérieurs doivent permettre aux pays pauvres de financer leurs
investissements et brûler des étapes préalables au décollage. L'idée clé est qu'il faut réaliser,
de façon simultanée, un grand nombre d'industries qui se tiennent mutuellement par leurs
clientèles, de telle sorte que la demande existe et soit suffisante. L'Etat y assure non seulement
la promotion des industries, mais doit aussi faire en sorte que l'économie dans son ensemble
profite des effets externes. Toutefois, Nurske (1953) nuance en soulignant le risque de voir
l'aide détournée vers la consommation au lieu de la production. Plus tard, Hirschman (1964)
émet des doutes sur la possibilité de développer une économie au moyen d'investissements
massifs et simultanés étrangers dans tous les secteurs, sans améliorer les qualifications des
populations. Il soulève à ce niveau le faible impact des capitaux étrangers sur la croissance
économique, si le nombre de personnes qualifiées du pays aidé est insuffisant. Il met l'accent
sur la croissance déséquilibrée, car pour lui, l'aide extérieure accroît les investissements et la
capacité de production. Si l'économie se développe pour employer suffisamment cette
capacité, le revenu supplémentaire créé par la hausse de cette capacité va entraîner une
augmentation de l'épargne, et par conséquent de nouveaux investissements. Par ailleurs, un
autre apport théorique a été celui de Harrod (1939, 1942) et Domar (1946). Pour ces deux
auteurs, l'APD accroît l'investissement et par la suite la croissance économique. Dans leur
analyse, lorsque l'épargne intérieure est insuffisante, on est en mesure de déduire le montant
d'épargne étrangère nécessaire pour atteindre un taux d'investissement compatible avec le taux
de croissance désiré. Le retard d'un pays s'explique par une insuffisance de capital et le
rattrapage est bien possible. Ces premiers travaux considéraient la possibilité de rattrapage et
acceptaient les hypothèses d'analyse néoclassique, notamment l'hypothèse de rendements
décroissants du capital et un progrès technique exogène. En définitive, l'objectif assigné à
l'APD est d'accompagner les pays en voie de développement dans le financement des
investissements publics en l'occurrence les infrastructures. De ce point de vu, l'APD complète
une épargne locale qui du reste est insuffisante pour soutenir l'effort d'équipement, base de la
promotion du développement.

Il est à rappeler que l'APD a été conçue comme un apport en ressources extérieures
permettant de combler le déficit en épargne des pays en développement. C’est pourquoi les
premières études des années 1970 et 1980 se sont employées à identifier l’impact de l’aide sur
différents agrégats macro-économiques tels que l’épargne et la croissance. Les principaux
travaux de cette époque, dont les principales figures sont Griffin, Papanek ou encore Mosley
et leurs co-auteurs, ont cependant abouti à des résultats différents et souvent contradictoires,
soulignant bien le manque de consensus sur la question de l’efficacité macroéconomique de
l’APD.

Aide non liée : Aide sans l’obligation d’obtenir des biens ou services auprès d’entreprises du
pays accordant l’aide. Selon les règles de l’OCDE, l’aide non liée doit comporter un élément
don d’au moins 35%.

Prêt lié : Dans le cas d’un prêt lié, il y a la certitude que le marché (contrat) sera attribué aux
entreprises du pays prêteur.

Prêt bonifié : Prêt gouvernemental ou multilatéral d’une banque de développement qui ne


porte pas d’intérêt (ou bien au-dessous du taux de marché).
Prêt garanti : Prêt accordé en contrepartie de la mise en gage de titre.

Prêt monétaire croisé : Prêt accordé par une banque d’un pays A à un emprunteur d’un pays
B, dont la monnaie de dénomination est celle d’un pays C.

Prêt parallèle (prêt back to back) : Pour réduire le risque de change, deux sociétés dans
deux pays différents empruntent chacune dans la devise de l’autre.

Prêt en souffrance : Prêt dont le montant en principal et /ou les intérêts n’ont pas été payés
pendant 90 jours.

Prêt subventionnés (prêts bonifiés) : Prêts pour lesquels le taux est inférieur à ceux pratiqués
par le marché.

Prêt rétrocédé : Prêt subsidiaire.

Garantie autonome : Sûreté personnelle. Cette garantie oblige la personne qui se porte
garant à payer, dès qu’elle est sollicitée. C’est un engagement inconditionnel. La garantie
autonome à première demande est à garantir indépendamment de la première demande
(indépendamment du débiteur) ; elle est différente de la garantie accessoire ou liée.

Elément de libéralité : Elément don.

Profil de remboursement : Caractéristique de remboursement du prêt à savoir le montage


financier (principal, annuité, paiement unique du principal).

Valeur facial : Montant nominal qui doit être remboursé au créancier.

Don : Montant qui ne sera pas remboursé au créancier.

Elément de libéralité (en %) : Il mesure le degré de concessionnalité d’un prêt. Il s’agit de la


différence entre la valeur nominale (valeur faciale) de ce prêt et la somme des paiements
futurs actualisés (valeur actuelle nette) au titre du service de la dette que devra effectuer
l’emprunteur. Calcul de l’élément don : (Valeur nominale-Valeur actuelle)/valeur nominal
*100. Des calculateurs de concessionnalité sont disponibles sur le site du FMI et de l’OCDE.

 Origine de l’APD

Il est généralement admis dans la littérature économique que l’APD trouve ses origines dans
la reconstruction au lendemain de la seconde guerre mondiale (Brasseul, 2010). Telle qu’elle
est conçue au lendemain de la fin de la seconde guerre, l’APD peut être considérée comme
une initiative américaine de l’après-guerre (Gillis et al, 1998). Les Etats-Unis ont octroyé, en
1945, un prêt de 5 milliards de dollars USD à la Grande-Bretagne. Durant la période 1945-
1947, l’Europe a reçu 3 milliards de dollars USD d’aide au développement de la part des
Américains. Le plan Marshall de 1947 s’inscrit dans ce cadre d’aide au développement
(Brasseul, 2010). Au total sur une période de quatre (4) ans, 17 milliards de dollars USD ont
été transférés pour la reconstruction de l’Europe de l’après-guerre par les Etats-Unis soit 1,5%
du PNB des Etats-Unis (Gillis et al, 1998). Cependant, il faut souligner qu’à son origine,
l’APD n’était pas uniquement guidée par le seul objectif d’aider les pays ayant été détruits par
la guerre. Elle était aussi, et l’est toujours encore, influencée par des raisons géostratégiques
(Severino et Ray, 2011). « L’aide économique est d’abord, historiquement, un vecteur
d’intérêts politiques et stratégiques étroitement lié à la reconstruction de l’après-guerre, à la
guerre froide et à la décolonisation » (Jacquet, 2006). Tout au long de la guerre froide, l’APD
était essentiellement chargée « d’acheter de l’influence » dans les pays du Sud. Les PED
étaient le théâtre d’une lutte idéologique entre l’économie de marché, incarnée par les pays
occidentaux, et le communisme prôné par le bloc soviétique. Ainsi, l’APD fournie à leurs
anciennes colonies permettait aux pays occidentaux de garder une certaine mainmise sur ces
dernières (Severino et Ray, 2011). La répartition géographique de l’APD des anciens pays
colonisateurs en témoigne. Sur la période 1970-1994, 99,6% de l’aide du Portugal a été
consacrée à ses anciennes colonies. Le Royaume-Uni a fourni 78% de son aide à ses anciens
territoires coloniaux contre 50 à 60% pour la France, la Belgique et l’Australie (Perkins et al,
2008). D’ailleurs, les premiers actes d’APD (l’aide des Etats-Unis à la reconstruction de
l’Europe) n’étaient pas guidés que par l’altruisme. Cette aide a considérablement profité à
l’économie américaine dans la mesure où elle a permis le redressement de la balance
commerciale des Etats-Unis au cours des années de l’après-guerre. L’aide américaine a été
utilisée pour l’achat de matériels, principalement, en provenance des Etats-Unis. Avant la
guerre, la balance commerciale des Etats-Unis était déficitaire d’environ 3 milliards de dollars
USD. Après, celle-ci affichait un solde excédentaire compris entre 4,5 et 6,8 milliards de
dollars USD (Beitone et al, 2002). C’est dans cet environnement d’après-guerre que la
coopération internationale en matière d’APD débuta réellement. L’OCDE, qui abrite le CAD,
en est l’une des institutions de coopérations multilatérales de l’après-guerre. Crée en 1960, le
CAD est chargé de coordonner les actions des membres de l’organisation en vue de rendre
l’aide plus efficace (Jacquet et Comolet, 2009)

 Les objectifs de l’APD


Le survol de l’histoire de l’aide a montré que les objectifs des donneurs qui n’étaient pas
toujours faciles à démêler de leurs motivations, ont évolué. Cependant, les enjeux auxquels
sont aujourd’hui confrontés les PED comme les pays développés ne sont plus les mêmes que
dans les années 60. Si les approches ont dû évoluer, c’est notamment parce que les défis ont
eux-mêmes changé. De plus, les PED et les pays développés ont essayé de tirer les leçons de
leurs erreurs passées, d’où des changements de stratégie. En gros, les objectifs de l’essentiel
de l’aide peuvent entrer dans quatre (4) grandes catégories :

 stimuler la croissance économique Cet objectif, l’un des premiers de l’aide au


développement, reste important même si de nouvelles priorités ont vu le jour depuis.
On l’atteint principalement en investissant dans les infrastructures, comme les routes
et les ponts, dans des secteurs tels que l’agriculture, l’industrie manufacturière et les
mines, et en encourageant l’innovation et le transfert de technologies ;
 soutenir la santé, l’éducation et le système politique Si l’aide vise souvent à améliorer
les soins de santé et l’éducation ou à atteindre des objectifs environnementaux tels que
l’agriculture durable, elle peut aussi soutenir les systèmes politiques, notamment dans
les pays où la gouvernance est faible ;
 fournir des secours d’urgence Qu’elles soient naturelles ou dues à l’homme, les
catastrophes peuvent frapper sans avertissement et mettre hors d’état d’y répondre
même des pays développés. Les secours d’urgence peuvent consister en nourriture, en
vêtements, en abris et en services d’urgence tels que les opérations de recherche et de
sauvetage, et l’assistance médicale. ;
 stabiliser l’économie à la suite d’un choc économique Les PED peuvent être
particulièrement exposés aux « chocs externes » comme les événements inattendus qui
affectent l’activité économique (crise financière de 2008). Si l’aide peut en théorie
contribuer à amortir de tels effets, c’est moins tranché dans la réalité. Dans une
certaine mesure, les apports d’aide peuvent jouer un rôle « procyclique » : ils ont
tendance à augmenter quand les économies se renforcent et à chuter lorsqu’elles
s’affaiblissent.

 Le concept d'efficacité de l'aide au développement: évolution et sophistication

Quelques enjeux nous obligent à questionner ce qu'est une aide «efficace » pour la
«communauté du développement». Le manque de transparence des motivations et des
finalités; le flou entourant l'obj et - le développement - et la composition de l'aide publique au
développement; le caractère douteux de certaines données statistiques d'APD déclarées par les
bailleurs de fonds et de la méthodologie évaluative ? Explorons à présent ce qu'on entend par
une aide «efficace» dans l'évolution de la pensée de l'économie du développement et des
stratégies de développement. Pour ce faire, nous nous inspirerons- sans nous y limiter - d'une
catégorisation décennale couramment effectuée dans la littérature générale sur l’APD
(Thorbecke 2000) pour retracer les grands traits de l'évolution des stratégies de
développement. L'angle de ces stratégies porte sur leur implication, la nature, le rôle, les
fonctions et les effets attendus de l'APD. En effet, puisque la« qualité » de l'APD est
tributaire, en partie, du « modèle» d'aide au développement en vigueur, aborder le thème de
l'efficacité de l' aide questionne par le fait même l'évolution de la compréhension d'une aide
dite « efficace » dans la pensée de l' économie du développement et la pratique du
développement. Charnoz et Severino rappellent toute la complexité de l'enjeu de l'efficacité :
[...] l'efficacité de l'aide constitue en elle-même une notion singulièrement complexe; même
les processus d'évaluation les plus récents ne permettent pas de classer de façon dichotomique
les flux d'aide entre ceux qui seraient efficaces et ceux qui ne le seraient pas, ni même de
calculer un « pourcentage d'efficacité » des dépenses. (Charnoz et Severino 2007: JO)

 Les différents types d’aides

L’APD est classée en trois grandes catégories selon l’objectif poursuivis par le financement
En effet, le Système de Notification des Pays Créanciers (SNPC), qui recense entre autres les
données sur l’APD ainsi que les autres prêts aux pays en développement depuis 1967, la
catégorie « types d’aide » ne possède que trois postes qui peuvent être agrégés entre eux:

 L’aide aux projets d’investissement destinés à accroitre principalement le capital


physique des pays bénéficiaires et du coup à faciliter les investissements
 L’aide programme comprenant le soutien budgétaire et l’aide à la balance des
paiements (dans le but de corriger et rééquilibrer les déficits et excédents de la balance
globale d’une économie), ainsi que les contributions permettant de financer des plans
de développement.
 La coopération technique incluant les activités financées par un pays donneur ayant
pour but d’améliorer le stock de capital intellectuel des pays bénéficiaires ou leur
aptitude à utiliser plus efficacement leur dotation de facteurs, autrement dit contribuer
à l’amélioration de la productivité des investissements.
 Quels besoins ?

Le modèle de croissance keynésien d’Harrod et Domar (1939-1946), ont permis de déterminer


le niveau d’aide nécessaire pour atteindre un objectif de croissance équilibrée. En effet, l’aide
est évaluer de manière à combler un déficit externe (Importations – Exportations) et un
également un déficit interne (Investissements – Epargne). Afin d’accélérer le développement,
il conviendrait de stimuler la croissance et la consommation dans les pays pauvres, et y faire
émerger des marchés potentiellement rentables pour leurs entreprises. C’est dans cette
logique, que le modèle suggère que pour accroître son taux de croissance, il est nécessaire
d’augmenter le taux d’épargne, en supposant que la productivité du capital soit constante.
Cette interprétation est modélisée sous la forme suivante dans le modèle :

n = s/v - δ = g

Avec,

n: Taux de croissance de la population démographique

g : Taux de croissance de la demande globale

s : Taux d’épargne domestique et étrangère

v : Quantité de capitale nécessaire pour avoir une croissance équilibrée

δ : Taux de dépréciation de capital

Force est de constater que l'épargne privée est insuffisante dans les pays pauvres, et que celle-
ci a un rôle fondamental dans l’équation du modèle d’Harrod et Domar, puisque l’épargne
est une variable importante de la croissance et donc du développement, c’est pourquoi, les
pays pauvres font appel à l’épargne étrangère et donc à l’aide publique au développement
pour permettre la hausse du taux d’épargne, finançant de ce fait un taux d’investissement et de
croissance relativement plus élevés. Dès lors, à partir de ce modèle, les économistes ont
estimés que les besoins d’épargne des PED étaient PED étaient à 1% du PIB des pays riches,
d’où la norme des 0,7% du revenu à verser en APD. Puisqu’à partir des années 50, les flux
Nord-Sud se composent à 70% de fonds publics et à 30% de fonds privés. Toutefois, cette
thèse se révèle obsolète, car le modèle repose sur l’hypothèse d’une propension à épargner qui
serait stable. En somme, d’après la chronique de Jacquet en 2008, le modèle considère « la
qualité de l’allocation des ressources comme étant une donnée », elle ne prend donc pas en
compte les facteurs exogènes ou endogènes tels que la qualité des institutions, ainsi que
l’insuffisante capacité d’absorption de capital dans la croissance tels que le manque
d’infrastructures. Ces restrictions ne devraient en aucun cas limiter les efforts des donateurs,
voire baisser leurs investissements dans les pays en développement. Cette limite, nous
permettrait plus de revisiter fondamentalement l’enjeu de l’APD.

 Evolution global de l’APD au Bénin

Au Bénin comme dans d'autres pays en développement, l'APD est fournie sous forme d'aide
alimentaire, d'aide financière ou d'assistance technique. Les statistiques publiées par les
rapports sur la "Coopération pour le Développement" font ressortir une évolution irrégulière
de l'APD. Au cours de la période 1990-2000, le Bénin a bénéficié d'environ 1420,7 milliards
FCFA au titre de l'APD provenant aussi bien de partenaires multilatéraux, que bilatéraux.
L'aide sous forme de "Don" reste la principale composante, représentant 65,3% de l'APD en
moyenne au cours de la période contre 34,7% pour les "Prêts". En termes de provenance,
l'analyse des données révèle que les partenaires au développement bilatéraux constituent les
plus importants pourvoyeurs de l'APD, représentant une moyenne de 49% du flux global des
financements mobilisés sur la décennie. Toutefois, les décaissements effectués par les
bailleurs de fonds ont connu une quasi-stagnation jusqu'en 1997 pour ensuite entamer un
déclin atteignant 13,3% en 1998 et 17,1% en 2000. Les partenaires multilatéraux occupent
pour leur part, le deuxième rang avec 48% de l'APD, dont 25% pour le Système des Nations
Unies. Leurs déboursements ont enregistré une croissance rapide ces dernières années surtout
au titre des dons. Enfin, les ONG n'apportent qu'une faible contribution, environ 3% au cours
de la période. Le financement du développement par l'APD, analysé à travers l'évolution
globale des décaissements ou selon la répartition par partenaire ou par type d'intervention,
montre la forte dépendance du Bénin vis-à-vis de l'aide pour l'orientation de ses choix.

 Résultats et contribution de l’APD au Bénin

L'Aide Publique au Développement demeure une source de financement essentielle pour


réaliser les buts et objectifs du Programme d'Action des gouvernements successifs qui ont
dirigé le Bénin. Aussi importe-t-il d'examiner avec attention ses retombées sur le
développement socioéconomique de notre pays, le Bénin. L'APD dont le Bénin a bénéficié au
cours de la période 1990-2000 est importante ; mais son impact sur le développement humain
reste limité. Cette situation découle fondamentalement des conditions d'allocation de l'APD.
En premier lieu, il convient d'observer la répartition sectorielle de l'APD. Il est apparu que sur
la période 1990-2000, près de 24% du montant cumulé de l'Aide a été absorbé par le secteur
dit "Gestion de l'économie". Ce secteur, il faut le rappeler, désigne toutes les administrations
chargées de la gestion des politiques et planification économique et financière. L'éducation et
la santé n'ont bénéficié que d'environ 18% du montant cumulé de l'APD de 1990 à 2001. Ceci
montre la faible importance qui leur a été accordée, alors que le Bénin connaît de lourds
déficits en matière de santé et d'instruction comme le montrent les indicateurs du
développement.

Par ailleurs, l'affectation des ressources accordées aux secteurs vitaux ne semblent pas avoir
privilégié l'amélioration de la disponibilité et de la qualité des services essentiels. En effet,
une partie non négligeable de ces ressources a souvent servi à financer des dépenses
improductives tels que les achats de véhicules coûteux aux fonctionnaires gestionnaires des
projets, le paiement de primes et commissions sur les marchés, etc. Deuxièmement, il importe
de constater qu'une grande partie de l'aide porte sur l'assistance technique. En effet, il ressort
de l'analyse cette période que 30% des ressources APD ont été octroyées sous forme de
"Coopération technique" contre 25% seulement pour l'acquisition de biens et services liés à la
réalisation des projets de développement. Le choix du recours à l'assistance technique
extérieure échappe souvent à la partie béninoise, et apparaît plutôt pour certains partenaires
comme une condition non négociable à la mise en place de l'aide. Ainsi, avec de telles
conditions d'utilisation, l'efficacité de l'Aide "liée" ou "conditionnée" demeure réduite et son
impact sur le développement humain reste négligeable. L'affectation irrationnelle par le pays
bénéficiaire et le poids de l'assistance technique réduisent les opportunités des populations à
tirer profit de l'APD qui comporte de ce fait une part d'iniquité et d'instabilité. Enfin, l'APD ne
s'inscrit pas dans la durée tant du point de vue de sa gestion que des conditions d'octroi. Les
partenaires au développement ne se soucient pas toujours des priorités du Bénin. Cette
situation est illustrée par les arrangements auxquels se livrent les gestionnaires des ressources
APD des pays partenaires et bénéficiaires ; de tels arrangements se font au détriment des
intérêts préalablement visés des populations bénéficiaires. C'est ainsi que la lassitude de plus
en plus exprimée par les populations des pays donateurs, les crises sociales provoquées par
des situations de misère dans les pays en développement paraissent justifier les faibles
retombées de l'APD sur les secteurs clés que nous verrons.
 APD et éducation

Le secteur de l'éducation est l'un des piliers du développement dans la mesure où l'ignorance
est la pire maladie à l'origine de l'aggravation de la pauvreté humaine. L'APD au Bénin a
pratiquement négligé le financement de l'éducation jusque dans les années 90. Ce n'est qu'à
partir de 1994 que certains partenaires se sont intéressés au financement de l'Education en
faisant passer les concours d'un montant de 2,8 milliards FCFA en 1992 à 5 milliards F CFA
en 1995, 14,2 milliards en 1996, 24,6 milliards en 1997. Ces concours ont baissé par la suite
pour se stabiliser autour de 20 milliards depuis 1999. Le financement de l'éducation de base
qui était évalué à 43% de l'APD accordée à l'ensemble du secteur de l'éducation entre 1992 et
1997, a atteint son point culminant en 1994 avec 70,2%. A partir de 1997, la part de "l'APD
Education de base" a diminué revenant à 44% en 2000. Rapportée à l'APD total, l'aide en
faveur de l'Education de base se situe en moyenne annuelle à 3,1% entre 1990 et 1995, et à
4,8% entre 1996 et 2000. L’Education des Adulte est le parent pauvre de ce secteur. Or nous
savons tous que l’éducation aujourd’hui doit être une « éducation tout au long de la vie ». Le
Bénin a reçu une aide importante ces dernières années pour la réforme de son système
éducatif. Ainsi, les experts ont conçu les Nouveaux Programmes d’Etudes (NPE). Ces
nouveaux programmes d’enseignement sont actuellement décriés par les acteurs du système
d’enseignement : les enseignants, les parents d’élèves et les élèves eux-mêmes. Mais étant
donné que c’est sur financement extérieur, les autorités ont des difficultés pour y renoncer.
Tout comme si on préférait sacrifier des générations des enfants béninois à une éducation à la
baisse. Dans ces conditions, il est préférable que les bailleurs gardent leur financement, disent
la plupart de mes concitoyens.

 APD et santé

Le secteur de la santé n'a pas toujours bénéficié d'une grande priorité dans l'APD. En effet, de
1990 à 1995, l'APD à la santé n'atteignait même pas 10 milliards FCFA (4,3 milliards F CFA
en 1990). C'est seulement à partir de 1996 que certains partenaires ont commencé à prêter une
attention particulière à ce secteur pourtant vital. Le niveau de l'APD est passé à 22,9 milliards
F CFA en 1996 (12,9% du total de l'aide) pour retomber néanmoins autour de 10 milliards F
CFA en 1997, soit 7,6% de l'aide totale. Il a amorcé de nouveau une hausse en 1999 pour se
stabiliser autour de 20 milliards F CFA, soit près de 12% de l'aide totale. 6 L'APD allouée aux
soins de santé primaire représente une plus grande part du montant global du secteur de la
Santé ; ce qui traduit l'intérêt que les partenaires au développement accordent à ce secteur. En
effet, la part de l'APD à la santé allouée aux soins de santé primaires se situe en moyenne à
68,2% au cours de la période sous revue, les efforts les plus importants étant consentis en
1990 et en 1996, avec des parts respectives de 83% et 87,4%.

 APD et le développement social

L'APD au développement social qui englobe l'aide aux travaux relatifs à l'approvisionnement
en eau potable, à l'hygiène et à l'assainissement du milieu de vie des populations est demeurée
modeste contrairement aux deux autres secteurs de la santé et de l'éducation qui ont suscité
plus d'intérêt les dernières années. L'aide accordée à ce secteur a évolué en dents de scie de
1996 à 2000 : en 1996, les déboursements ont représenté 8,4% du total de l'aide avant de
retomber à 6,5% en 1997 pour remonter ensuite à 7,3%. Ils ont de nouveau chuté en 1999 à
5,8% pour revenir à 7,9% en 2000. Le sous-secteur de l'« eau potable et assainissement » a
absorbé près de 58% de l'aide au développement social au cours des dix dernières années.

 APD et agriculture

L'APD accordée à l'agriculture (y compris l'élevage, les forêts et la pêche) est loin de refléter
l'importance de ce secteur dans l'économie qui occupe plus de 80% de la population. En effet,
l'aide consacrée à ce secteur se situe autour de 8% de l'aide totale depuis 1996. Les
interventions des partenaires au développement dans le secteur agricole se sont concentrées
prioritairement dans le domaine des cultures vivrières et de l'élevage. De 46,3% en 1990, la
part de l'APD consacrée à ces activités dans l'APD pour l'agriculture a atteint 79,3% en 1999
pour ensuite baisser à 63,6% en 2000, situant au total le niveau de la part moyenne à 62%.
L'évolution du ratio APD par tête d'habitant accordé au sous-secteur des cultures vivrières et
de l'élevage montre qu'il n'a pratiquement pas bénéficié de l'attention des partenaires
extérieurs avant 1994. Après 1994, il a connu une évolution en dents de scie avec une rapide
augmentation en 1995 et 1998 (27,2% et 33,6% respectivement) alors qu'il a fortement baissé
en 1996 et 1997 (31,4% et 17,4% respectivement), une hausse de 4% en 1999 et une baisse de
1,6% en 2000.
Références bibliographiques

*Charnoz, O. et J-M Severino. 2007. L'aide publique au développement. Paris: La


Découverte, coll. Repères.

*Thorbecke, E. 2000. "The Evolution of the Development Doctrine and The Role of Foreign
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Economie, 9 déc. 2008

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Paris [En ligne]. Rapport OCDE, 1 p. Disponible sur
https://www.oecd.org/fr/cad/15249681.pdf
*Huguette Akplogan-Dossa (2006). « Bilan de la coopération pour le développement : cas de
la République du Bénin »

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