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Bjarne Melkevik
Docteur ès droit
INTRODUCTION
LA NAISSANCE D’UNE
PROBLÉMATIQUE
« Elle veut tout savoir, la justice… mais elle peut pas,
la pôvre!
elle a un bandeau sur les yeux, alors elle voit rien…
C’est pour ça qu’il faut l’aider, faut tout lui dire.
Et y en a à dire…
[…]
La justice a beau suivre son cours…
…elle n’est pas plus instruite! »
Georges PEREC
L’espace
Le présent ouvrage rassemble des réflexions sur les
rapports que peuvent entretenir les domaines du droit et
de la communication. Il explore ipso facto différents lieux
de rencontre entre les deux disciplines. Il analyse, sous
divers angles théoriques, leur relation d’implication
mutuelle et de solidarité qui est liée fondamentalement au
caractère social qui les anime. L’essai proposé est présenté
sous une forme intertextuelle qui vient mettre en lien des
lectures, des interprétations de textes ainsi que des
entretiens, toujours de façon à pouvoir mieux
problématiser la question de la relation entre le droit et la
communication. Certains titres et sous-titres de l’ouvrage
témoignent d’ailleurs de ces diverses rencontres livresques
et expérientielles qui ont su guider et nourrir les quelques
réflexions proposées. Nous avons tenu à marquer le sentier
que nous avons emprunté pour que dans un second élan,
nous puissions nous concentrer à ouvrir de nouvelles pistes
et avenues.
Cet essai touche-à-tout est scindé en trois parties dont
chacune est séparée en deux chapitres. La première partie
s’intitule Deux visions et un seul être humain. Le premier
chapitre détermine l’environnement théorique dans lequel
l’excursion se poursuivra. Il aborde particulièrement deux
auteurs qui ont su développer respectivement deux visions
complémentaires de la communication. Dans le deuxième
chapitre, il est question des multiples facettes de l’être
humain. À la fois individu, sujet et personne, l’être humain
est complexe à l’image de la société qui l’accueille. Cette
deuxième portion aborde aussi l’humain dans un contexte
communicationnel; sous l’angle du récepteur. Nous y
traitons d’autonomie du sujet et de la personnalisation des
messages.
La deuxième partie est intitulée La société
juridicommunicationnelle. Elle s’intéresse au caractère
social du droit et de la communication. Le premier chapitre
traite de la société moderne ainsi que des principes
juridiques et communicationnels sur lesquels elle est
fondée et qui font d’elle une société pleinement
« juridicommunicationnelle ». Dans le second chapitre,
nous abordons l’institution qui parvient, par le moyen de la
codification, à assurer la liaison entre le droit et la
communication. Le travail de codification au sein de
l’institution permet le passage d’un « sens pratique » à une
règle écrite sans pour autant faire de la seconde,
l’équivalente du premier. Ce transit est essentiel au
maintien de la paix et de l’ordre social, car il rend possible
la discussion légitime qui permet l’élaboration des lois.
L’institution est probablement le lieu de rencontre le plus
intime entre le droit et la communication; elle conserve
toutefois plusieurs secrets d’alcôve.
L’interprétation ou la méthode du juriste est le titre de la
troisième et dernière partie de l’ouvrage. Le premier
chapitre se consacre aux principes généraux de
l’interprétation en herméneutique générale tandis que le
second chapitre tente la transposition de ces principes à la
sphère juridique avec tous les ajustements et précautions
que cela implique. Il existe trois grands lieux
d’interprétations dans le domaine du droit; trois grands
lieux d’élaborations des discours juridiques : la doctrine,
l’activité législative et le tribunal. C’est dans ce dernier lieu
que le juge, figure la plus représentative de l’institution
judiciaire, est appelé à rendre justice. Son travail consiste
en une recherche d’équilibre entre la rigidité des lois et le
caractère flou des faits; il est constamment en quête du
juste.
Finalement, à titre de conclusion et à la lumière du
chemin parcouru, nous proposons cinq regards différents et
originaux sur cette relation unique entre le droit et la
communication; cette liaison inévitable, voire nécessaire,
que nous avons constatée d’une multitude de façons.
AU DÉPART, LE DROIT
D’un point de vue extérieur au monde juridique, le droit
est à peu près tout ce qu’on ne veut pas entendre; c’est la
règle, l’interdit, la manière de faire ou autrement dit, la
procédure. À l’avenant, c’est aussi la peur du gendarme, la
sanction possible, la condamnation et le jugement. Toutes
ces facettes du droit se heurtent à nos réalités
quotidiennes. Elles sont présentes et très préoccupantes,
mais tout aussi nécessaires. Les lois et les innombrables
règlements peuvent parfois donner l’impression d’être
traqués, obligés ou contraints. Or, ces éléments que nous
jugeons légitimement contrôlants sont essentiels à
l’exercice de notre liberté. Pour mieux saisir cette idée,
prenons l’exemple d’un autre grand système reconnu pour
ses nombreuses règles et contraintes d’utilisation : la
langue. Parler ou bien comprendre une langue signifie être
en mesure d’utiliser ses constituants de manière à faire
surgir un sens de leurs agencements. La connaissance ou la
maîtrise d’une langue « suppose que tous se soumettent
aux limites qui donnent sens aux mots qu’elle contient »1,
une soumission nécessaire à l’exercice d’une pleine liberté
d’expression.
Une société qui accueille un nouveau membre doit
procéder dans le meilleur délai à son identification. Cette
dernière se fait par le biais de ses institutions. Le nouveau-
né a-t-il à peine vu le jour qu’il est déjà lié. L’institution
assure l’ordre en attribuant à chacun une place précise et
en instaurant un cadre commun à tous. Elle nous inscrit
dans une filiation générationnelle en plus de nous
reconnaître la personnalité juridique et les droits qui s’y
rattachent2. C’est parce que nous sommes liés et
circonscrits au cadre, tels les mots aux règles du langage,
que nous sommes en mesure d’être libres dans la société
qui nous a vus naître. Ce sont « les liens du Droit et les
liens de la parole [qui] se mêlent ainsi pour faire accéder
chaque nouveau-né à l’humanité, c’est-à-dire pour attribuer
à sa vie une signification »3. L’humain est probablement le
seul être vivant à s’interroger aussi ardemment sur la
détermination d’un sens à la vie. La quête est difficile et
longue et le résultat est bien souvent empreint d’absurdité,
mais « c’est parce que la vie devrait en avoir un que l’on
peut parler d’une vie qui n’a pas de sens »4. La tâche de
trouver ce juste sens pèse sur les épaules de tout un
chacun. En effet, depuis la modernité, « l’ordre social et
humain n’est plus donné par la volonté divine, mais par
l’action humaine »5. Dès lors, les sociétés modernes ne
dépendent plus que de leur aptitude à s’organiser
(systèmes juridique et politique) et de leur capacité à
communiquer avec elles-mêmes (communication sociale).
Elles sont tributaires du droit et de la communication
qu’elles mettent elles-mêmes en action.
Définir
Trouver une signification ou une définition à un mot d’une
langue qui nomme un objet semble a priori aisément
réalisable si cet objet à définir est clairement identifié. Par
exemple, la définition est facilement envisageable s’il s’agit
d’un objet concret, visible et tangible, comme la table de
travail sur laquelle nous sommes en train d’écrire. Il faut
tout de même la définir en prenant bien soin de rendre
compte le mieux possible de ses caractéristiques propres. Il
ne faut pas chercher à généraliser. Les traits énoncés dans
la définition de la table de travail pourraient s’apparenter
grandement à celles d’une table de chevet ou d’une table
de cuisine. Pourtant, leurs fonctions et leurs dimensions ne
sont pas les mêmes. Tous les mots du langage désignent
quelque chose, mais nous ne dirons absolument rien « à
moins que nous n’expliquions exactement quelles
distinctions nous désirons faire »6. Il est donc essentiel de
préciser la fonction, l’emplacement, les dimensions, les
traits et les couleurs de la table de travail afin de ne pas la
confondre avec d’autres tables. La prudence est de mise,
mais la difficulté est surmontable. Le degré de difficulté se
relève ensuite lorsque nous souhaitons définir une
collection d’objets comme l’eau, le fer ou encore l’homme.
Pour ces derniers, nous ne possédons que des échantillons.
La définition n’est alors possible que d’après le modèle des
échantillons produits. Elle ne peut que consister qu’à
l’ensemble des caractéristiques intrinsèques communes de
ces échantillons.
Le niveau de complexité explose lorsqu’il s’agit de
trouver une définition à un mot dont le sens n’est pas ou ne
peut pas être unique. « [I]l est différent de caractériser un
objet individuel ou un type repéré sans contestation ou de
caractériser un objet individuel ou un type désigné par un
mot dont le sens est discuté. »7 Ces objets et ces types
contestés sont des « construits humains ». Ils doivent être
interprétés, mais comme pour les questions de goût, une
discussion ne peut permettre de conclure à une seule
vérité. « Plusieurs analyses différentes peuvent être
correctes. [Les construits humains peuvent] être
interprété[s] simultanément de diverses façons à des
niveaux différents de l’esprit. »8 Plus il y a d’humains, plus
il y a de sens à discourir et plus il faut en parler. L’amour, le
sublime, la vérité, le droit et la communication sont ces
genres de construits difficiles à cerner et pour lesquels il
demeure toujours un brin de mystère; « tout ce que l’on a
écrit ou dit de plus n’est pas la solution mais seulement
l’énoncé de problèmes qui ne sont toujours pas résolus.
L’explication qui semblerait convenir dans un cas ne vaut
rien dans dix autres »9. Nous pouvons alors nous demander
si ces constructions ne trouveraient pas leur sens dans leur
polysémie. Cette multiplicité des possibilités nous
rapprocherait de la solution sans pour autant nous spécifier
quelle serait la bonne. Il se pourrait alors que nous fassions
erreur, mais au lieu de concevoir une seule solution, nous
en imaginons beaucoup, ainsi nous ne deviendrons
l’esclave d’aucune10.
Les construits humains sont des constructions mentales
qui « permettent de lier les uns aux autres des actes qui
forment des séries, et prêtent ainsi une certaine
prévisibilité à la vie sociale »11. Leurs définitions prennent
souvent la forme d’un modèle ou d’une métaphore. C’est
toujours d’un type-idéal dont il est question, « la
représentation la plus épurée d’une réalité »12. Depuis
Weber, le type-idéal nous aide « à rendre le réel plus
intelligible. […] Il indique un horizon, une perspective, une
tendance. Il n’est pas, en lui-même, vrai; il peut seulement
être plus ou moins utile, suggestif, éclairant. »13 Les types-
idéaux sont introuvables dans la réalité. Ils ne représentent
pas la vérité. Ils proposent plutôt la validité d’un
« ensemble conceptuel construit à partir de matériaux
observés dans diverses situations concrètes, mais qui sont
agencés de la manière la plus rationnelle possible pour
composer un tout cohérent et unifié. »14 Les chercheurs et
les auteurs traitent souvent de mêmes sujets et abordent
précisément les mêmes problèmes. Cependant, l’un choisit
de porter une plus grande attention à ceci plutôt qu’à cela.
Les nuances deviennent l’objet central des discussions
parce que le choix et les possibilités d’agencement des
mots sont pratiquement infinis. La définition d’un construit
humain tel que le droit tient essentiellement à des
arguments et qui dit « argument », dit aussi oppositions et
divergences d’opinions.
Dualisme juridique
Le droit n’a pas d’équivalent dans la société. Il est
insaisissable dans son entier et sa définition fait l’objet de
débats incessants. Nous distinguons deux grandes
familles15 qui soutiennent chacune une conception du droit
diamétralement opposée. « Il fallait bien, comme le dit
Villey, que le dualisme métaphysique de Descartes
engendre un dualisme juridique. »16 Alors d’un côté, il y a
les positivistes légalistes pour qui le droit n’est souvent
qu’un ensemble de règles ou de normes; les partisans de la
matière. De l’autre, il y a les défenseurs d’un certain droit
naturel, aussi appelé le droit commun; ils se disent
jusnaturalistes. Pour eux, le droit tend davantage du côté
du Cogito et de l’intuition; c’est le monde des âmes et des
valeurs, mais aussi un monde flou qui aboutit souvent à
l’illogisme et l’irrationalité de la pensée.
Il ne doit pas être question de valeurs dans la définition
du droit des positivistes les plus pures. Pour eux, le droit
s’inscrit dans la pratique, mais « une pratique de totale
dépendance par rapport aux textes des lois »17. Aborder le
droit dans une perspective positiviste, c’est avoir en tête
l’image du juge aveugle, celui qui ne fait pas de distinction
pour un cas particulier et qui ne voit pas les conséquences
de ses décisions : « dura lex, sed lex »18. Cette logique
s’apparente à celle nécessaire à la résolution d’une
équation mathématique. Cette méthode rassurante pour le
justiciable est « la condition de la sécurité juridique »19.
Elle a vu le jour dans le dessein de protéger le citoyen
contre les abus d’anciens régimes corrompus. De cette
façon, les juges sont les outils du Législateur; « les bouches
qui prononcent les paroles de la loi » pour reprendre la
célèbre formule de Montesquieu dans De l’esprit des lois.
Pour être en mesure de procéder à la manière d’un calcul
syllogistique, il doit cependant exister une règle de droit,
une seule, applicable à tous les cas et dépouillée de toute
ambiguïté. Cette règle (la majeure de l’équation) doit
ensuite être complétée par les conditions sine qua non qui
l’entourent (les mineures de l’équation). La décision
judiciaire devient alors la solution du syllogisme et
l’expression de la justice. Si un système de justice était
pourvu d’une telle règle, le travail du juge ne se résumerait
qu’à faire ressortir et déterminer les faits, puis à les
transposer dans les termes de la loi, comme l’application de
valeurs à des variables. Le but recherché par l’utilisation
d’un système syllogistique est d’en arriver à un dispositif
qui n’émanerait pas du raisonnement du juge, mais du
simple agencement de données. Le juge ne devrait pas se
soucier des conséquences de sa décision parce que la loi
est dure, mais c’est la loi. Malheureusement pour les
partisans d’une telle idéologie, le juge est humain. Ses
jugements seront à tous les coups imprégnés de subtilités
et de nuances, de sorte qu’une décision judiciaire sera
toujours différente de la précédente. La rigidité de la
mathématique ne parvient pas à contenir toutes les
possibilités de l’humanité.
Plus qu’un syllogisme
Tenter d’exposer le raisonnement juridique sous la forme
d’un syllogisme n’est pas en soi une mauvaise idée, car il
est vrai que le processus décisionnel nécessite la mise en
place d’une certaine logique. Cependant, la forme
syllogistique n’est pas en mesure de garantir la valeur de la
conclusion. La logique juridique est une logique spécifique,
elle « est liée à l’idée que l’on se fait du droit et s’adapte à
celle-ci »20. De la même façon, « nous concevons le droit
selon que nous concevons d’abord le monde »21. Autrement
dit, la logique juridique doit tenir compte d’abord et avant
tout de la conception que nous avons du monde.
En pratique, lorsque la loi est claire et sans ambiguïté, il
suffit de la suivre et de l’appliquer. N’étant pas d’origine
divine, les lois ont nécessairement des formes imparfaites.
Devant les défauts et les imprécisions des règles, les juges
doivent aller au-delà du texte et porter un regard sur les
usages. De plus, ils sont tenus de rendre une décision juste
et équitable. « L’équité est le retour à la loi naturelle, dans
le silence, l’opposition ou l’obscurité des lois positives. »22
Cette loi naturelle dont nous parle Perelman est au cœur de
la deuxième grande conception du droit. Elle n’a pas un
contour défini; elle ne se trouve pas dans les livres. Les
jusnaturalistes ont un rapport à la loi qui est très différent
des positivistes, voire diamétralement opposé. Ils refusent
la toute-puissance des lois et des décisions des détenteurs
du pouvoir. Pour eux, c’est la nature des choses, un ordre
naturel ou vital qui est la première source du droit. « La
complexité de la société, due en grande partie à l’essor des
techniques, a en effet révélé, depuis plus d’un siècle, la
difficulté à expliquer le droit par la seule application des
lois de l’État. »23 Pour les jusnaturalistes, le droit ne peut
pas se définir sans faire référence aux valeurs. Il suffit
d’ailleurs de retourner aux conceptions juridiques romaines
pour comprendre que les lois ne sont pas le droit. Il y a
toujours quelque chose d’un autre ordre au-dessus d’elles :
les valeurs. En somme, la connaissance du droit positif ne
permet pas de saisir l’ensemble des éléments qui
construisent le droit. « Ce n’est point “l’homme”, c’est le
monde social qui est la matière de cette science. »24
L’analyse du droit nécessite de tenir compte d’une panoplie
d’éléments qui relèvent de la complexité même du droit25.
Un juriste ne peut pas se limiter à connaître les textes des
lois, mais il doit les aborder dans une perspective
interdisciplinaire. « Sauf à prétendre que le droit s’explique
par lui-même, ce qui ne saurait manquer de conduire à des
spéculations pseudo-scientifiques, les hypothèses
théoriques mobilisées en vue d’expliquer les phénomènes
juridiques doivent nécessairement être empruntées à
d’autres champs du savoir : l’histoire, l’économie, la
psychologie ou la sociologie, par exemple. »26 Et pourquoi
pas la communication !
VERS LA COMMUNICATION
« Si un médecin ne sait que la médecine, il ne saura
même pas la médecine. »27
Abel Salazar
Si nous tentions une transposition juridique de cette
maxime du célèbre professeur portugais qui était à la fois
médecin, scientifique, artiste et philosophe, nous
arriverions à quelque chose du genre : « Si un juriste ne
sait que les lois, il ne saura même pas le droit. » L’étude du
droit ne doit pas se limiter à la connaissance des lois. Elle
doit s’ouvrir à d’autres champs d’expertise et domaines du
savoir. La science juridique a souvent fait l’objet d’analyse
dans le cadre de recherches en sciences sociales
(sociologie, histoire, politique, géographie, etc.). Ces
recherches ont permis de réfléchir sur les significations et
les directions que nous souhaitons donner au projet
juridique moderne. Elles ont contribué considérablement à
notre connaissance générale du droit et du phénomène
juridique en général.
La science juridique aussi a été proactive. Elle a fait des
percées étonnantes. Elle a touché entre autres choses, aux
sciences dites exactes, à la médecine par exemple,
apportant à cette dernière de nombreuses considérations
d’ordre éthique en plus de relever pour elle diverses
contraintes légales. L’échange droit-médecine fut
cependant réciproque. En effet, la médecine a apporté au
droit ses connaissances au gré de ses recherches et de ses
découvertes. Elle a contraint le droit à changer et à
s’adapter aux nouvelles réalités qu’elle a imposées. La
détermination du statut juridique du fœtus, la
décriminalisation (ou non) de l’euthanasie assistée et
l’encadrement de l’utilisation des cellules souches sont
quelques exemples d’apports ou d’aménagements que le
droit a dû faire à l’égard du domaine biomédical.
La médecine n’est pas le seul domaine à avoir heurté la
science juridique de plein fouet. « L’explosion de la
communication a produit une onde de choc profonde et
pénétrante sur le droit. Aujourd’hui l’impact [de la
communication] sur le droit est à la mesure des
bouleversements politiques, technologiques et
économiques. » La communication a envahi toutes les
28
Dualisme communicationnel
Le niveau de difficulté pour définir la communication est
aussi élevé que pour le droit. Une définition trop étroite
risquerait d’en restreindre toute la portée. Une définition
de la communication doit tenir dans la nuance. La
communication est difficile à cerner. Elle fait l’objet
d’aucun consensus général. Elle « s’offre à nous sous une
myriade de formes. Ainsi donc, la communication peut être
personnelle, inégalitaire ou médiatisée. »33 Elle est parfois
le contenant, parfois le contenu. Elle peut prendre les
allures d’un appareil technologique comme le téléphone
cellulaire ou le modem, mais elle peut aussi revêtir l’aspect
plus romantique d’un regard ou d’un sourire. Elle peut
passer à la fois par le verbal, par l’écrit ou par le geste.
Pour Attallah, la communication met en situation des traits
psychologiques, sociologiques et économiques. Nous
ajoutons des traits juridiques. « [L]es techniques ne sont
que la pointe visible de cet immense iceberg [puisque] la
communication existe depuis que les hommes vivent en
société, c’est-à-dire depuis toujours. Depuis toujours, ils
produisent, échangent, rêvent, combattent,
s’organisent. »34 L’omniprésence de la communication
amène à penser que c’est aussi un peu la vie. En effet, la
communication lato sensu, c’est vivre, c’est être, c’est-à-
dire se définir, c’est aussi faire et agir. Comme « personne
n’est une île »35 et qu’il y a les autres et le monde, la
communication pose la question du rapport entre soi et les
autres ainsi qu’entre soi et l’environnement qui nous
englobe.
Nous constatons ici, comme dans le domaine juridique,
que deux grandes conceptions de la communication
s’opposent. La première met l’accent sur la pratique et les
techniques. Elle se fonde habituellement sur le modèle
traditionnel de la communication, c’est-à-dire celui d’un
canal reliant un émetteur à un récepteur. Quant à la
deuxième conception de la communication, elle prend le
sens d’échange et de relation, renvoyant ainsi à ce que
plusieurs appellent l’idéal de la communication : le partage,
la communion et la compréhension mutuelle, voire pour
Wolton, la cohabitation. Cette deuxième approche n’offre
pas de contour précis; c’est le flou et c’est l’indicible,
l’imprécision et parfois le mystère.
Finalement, le dualisme cartésien n’a pas non plus
épargné la sphère de la communication. La pensée de
Descartes « est l’ancêtre d’autres dualismes, celui du
“sujet” et de “l’objet”, d’une séparation radicale entre les
hommes et la nature, entre les connaissances morales et
les sciences dites objectives, entre la valeur et le fait, le
devoir être et l’être »36, entre le vrai et le vraisemblable,
entre la représentation et l’expression, et
hypothétiquement, entre le droit dans sa positivité et la
communication sociale. Il faut garder en tête qu’un
dualisme est toujours une question d’équilibre. Il ne s’agit
pas de choisir une conception au détriment de l’autre, car
ce qui fonde un dualisme, c’est justement la dualité et
l’opposition. En d’autres mots, ce n’est que lorsque les
conceptions dualistes sont traitées en parallèle, en
reconnaissant leurs besoins et leurs apports mutuels, que
nous sommes en mesure de dégager un sens utile à leurs
analyses.
È
PREMIÈRE PARTIE –
DEUX VISIONS ET UN SEUL ÊTRE
HUMAIN
Albert CAMUS
L’été
« HOLLY : “Too many misunderstanding.
Whoever invented the telephone never had a
conversation.” »
Rodrigo GARCÍA
Nine Lives
Bill WATTERSON
The Calvin and Hobbes Tenth Anniversary Book
LUCIEN SFEZ – DE LA REPRÉSENTATION ET
DE L’EXPRESSION
Pourfendeur d’une pensée critique que l’étude des
communications ne peut ignorer37, Sfez explore autant les
théories de la communication que celles qui entourent la
prise de décision. Outre ses deux conceptions de la
communication38, représentative et expressive, ce qui nous
a particulièrement intéressés chez Sfez est son traitement
de la décision judiciaire ainsi que sa théorie du « surcode »
sur laquelle nous aurons l’occasion de revenir. Nous avons
eu le privilège de rencontrer Sfez et de le questionner
concernant notre objectif de cerner la relation entre le
droit et la communication39. Vous trouverez des passages
de cette rencontre dans la présente section et tout au fil de
l’ouvrage.
Représentation – Une machine
Abordons dans un premier temps la conception
représentative de la communication chez Sfez : la
représentation. Cette dernière revêt un caractère
fonctionnel. Elle met en lumière la réalité des sociétés
modernes et le grand bagage d’informations qu’elles ont à
gérer. Conception linéaire par surcroît, la représentation
renvoie à l’idée de transmission et de diffusion. Elle
identifie les acteurs : l’émetteur et le récepteur. Elle
distingue l’un de l’autre en attribuant à chacun des qualités
distinctives, en d’autres mots, en créant des divisions; un
écart. Elle vient faire la différence entre le tien et le mien,
entre toi et moi. Elle discerne l’émetteur du récepteur et
introduit un canal entre les deux. La conception
représentative de la communication élaborée par Sfez est
souvent représentée dans les théories de la communication
par le modèle télégraphique, ou celui de la boule de billard.
Dans ce dernier modèle, un sujet émet une boule de billard
dans un circuit. La boule contient le message et trouve son
chemin jusqu’à un second sujet qui le réceptionne
immanquablement. Cette vision est la manière classique de
traiter et de parler de la communication.
Adhérer aux principes de la conception représentative de
la communication amène à percevoir la communication
comme une machine, c'est-à-dire comme un assemblage
complexe qui permet d’effectuer une tâche par la
transformation d’énergie. Dans le cas de la communication,
l’énergie c’est l’information. Concevoir la communication
comme une machine, c’est la concevoir comme un objet, un
appareil ou un instrument; un outil de communication
comme un ordinateur ou un téléphone cellulaire. Le sujet
est situé à l’extérieur de la communication; il est toujours
séparé de son objet qu’il utilise et maîtrise.
Linéarité et inaltérabilité
Le principe premier du modèle de la représentation tient
dans la linéarité de la trajectoire ainsi que dans
l’inaltérabilité du message. Ce dernier passe par un canal
sans avoir la possibilité d’être modifié. Cependant, pour
qu’il soit en mesure de circuler librement, le message doit
être préalablement traité. C’est ce qu’on appelle le codage
et c’est à l’émetteur que revient cette tâche. Le codage est
aussi la liberté qu’on reconnaît à l’émetteur de choisir les
mots qu’il désire. Au bout du canal, il y a le récepteur. Le
message agit comme le représentant de l’émetteur auprès
du récepteur qui ne fait que le recevoir. Il est toujours
passif. Le seul élément essentiel de cette dernière étape est
que le récepteur ait un minimum de stock lexical et
syntaxique en commun avec l’émetteur afin d’être en
mesure de décoder le message; décodage ou décryptage
stricto sensu. Le but poursuivi est la découverte d’un
message donné. Il n’est nullement question d’interprétation
dans la conception représentative de la communication.
L’objectif est une « simple intériorisation sans création, seul
l’émetteur est créatif »40 dans la représentation. Par
surcroît, si le message n’atteint pas son but ou n’est pas
bien compris, c’est à l’émetteur que revient la faute. C’est
lui qui détient le pouvoir et c’est à lui de faire en sorte que
son message soit acceptable et compréhensible. Le
récepteur est passif et entièrement influençable. Il est à la
merci d’une campagne de propagande.
Séquence et atomisation
Le deuxième principe de la représentation est que chaque
opération est considérée distinctement. C’est d’une
communication séquentielle et structurale dont il est
question ici. L’opération débute chez l’émetteur et le
mouvement s’arrête lorsqu’il atteint le récepteur. La
communication trouve une finalité à tous les coups. Les
messages échangés n’entrent pas en relation entre eux.
Chaque acte est isolé. Les réponses constituent de
nouveaux messages, à chaque fois un nouveau départ et
jamais la suite de la première émission.
Ce constat nous amène au troisième principe que sous-
tend une analyse représentative de la communication :
l’atomisation des éléments. L’émetteur, le message et le
récepteur sont analysés isolément dans le modèle de la
machine. Prenons l’exemple de l’ordinateur et d’un
échange de courriels entre deux individus. Le sujet-
émetteur fait le choix des mots et des ponctuations qu’il
désire. Il construit son message qui devra par la suite être
codé. Le clavier et les logiciels permettent de coder son
message en langage informatique. Une fois construit et
envoyé, le message est inaltérable et indépendant. Il fait
cavalier seul lorsqu’il se détache de l’émetteur et prend le
chemin du canal qui le mènera jusqu’à la boîte de réception
de courriels du sujet-récepteur. Ce dernier n’a pas d’autre
alternative que de le réceptionner. Plusieurs messages
peuvent se trouver dans le canal en même temps. Ils
circuleront sans jamais se cogner. Chaque message est un
nouvel envoi. L’émetteur n’a pas besoin d’attendre une
réponse du récepteur pour envoyer un nouveau message. Il
est libre d’envoyer au récepteur ce qu’il veut.
Le sort du message repose uniquement sur les épaules de
l’émetteur dans la conception représentative de la
communication. C’est lui qui choisit les mots et construit
son message. Il doit s’efforcer de limiter un tant soit peu
les obstacles possibles, les bruits qui pourraient venir
altérer son message initial. L’utilisation de la répétition et
l’emploi de synonymes augmentent la redondance et
diminuent les possibilités de décodage fautif par le
récepteur. Cependant, il y a une limite à la redondance; on
ne parle jamais pour ne rien dire. Le modèle de la boule de
billard est téléonomique, nous dit Sfez, la communication
est orientée vers un but; l’émetteur utilise le message pour
se faire comprendre. Il ne peut se soustraire, ni soustraire
le récepteur à son statut d’être humain, or nous le savons,
« le blanc et le noir, il y en a marre. Le gris, il n’y a que ça
d’humain. »41 Alors, si tout est dans la nuance, le modèle de
la représentation ne sera pas en mesure d’assurer sa
finalité à tous les coups, notant ici une imperfection. Sans
pour autant le rejeter du revers de la main, le modèle de la
représentation ne peut totalement embrasser la réalité
humaine. Trop divisé, séparé, isolé, atomisé, voire
déconnecté, le modèle représentatif ne permet pas
d’assurer le succès de la communication. Le comportement
du récepteur est totalement imprévisible face à un
message. Il peut ne pas être là; il peut l’accepter
aveuglément; il peut être absolument contre ou il peut ne
pas en tenir compte du tout. Son comportement est
impossible à prévoir, mais le récepteur demeure néanmoins
absolument essentiel à la réalisation d’une communication
réussie. Accepter cet échec de la communication et penser
l’incommunication42, c’est déjà travailler à sa
reconstruction et à son succès.
Expression – Un organisme
La deuxième conception de la communication chez Sfez
est expressive; c’est l’expression. Dans cette optique, il
n’est plus question d’éléments pris isolément. On y trouve
« des hiérarchies peut-être, mais enchevêtrées les unes
dans les autres, si bien qu’on ne sait plus distinguer ce qui
est base et ce qui est sommet ».43 La relation tripartite
(émetteur-canal/message-récepteur) avec une finalité du
premier modèle n’est plus. L’image de la boule de billard
qui trouve sa fin lorsqu’elle s’empoche dans le récepteur ne
tient plus. Dorénavant, c’est l’image d’un organisme
complexe qui permet à Sfez de cerner ce qu’est la
communication. Cette dernière a maintenant la forme
d’une relation sujet/monde où les deux partenaires
pratiquent des échanges incessants. Une vision expressive
de la communication requiert un regard plus large. Elle
implique que nous ayons une perspective englobante, voire
systémique.
Changement de préposition
Tout est dorénavant inter relié dans le modèle de
l’organisme. Sujets et objets ne font pas exception. Il faut
comprendre la communication comme un seul et grand
ensemble. Il n’est pas question de séparer les éléments
comme dans le premier modèle. Autrement dit, un sujet ne
fait pas qu’utiliser les outils de communication, il les
influence et se laisse influencer par eux. Il ne fait pas que
vivre avec les objets du monde, il vit dans le monde et dans
la communication. Un changement de préposition s’impose
selon qu’on parle d’une vision représentative ou expressive
de la communication.
De la linéarité dans le premier modèle, nous passons à la
circularité du mouvement dans le second. Tous les
éléments entrent désormais en relation les uns avec les
autres dans un système ouvert et dynamique ; ils
influencent autant qu’ils sont influencés. Si dans la
première conception (la représentation), ce sont les
éléments et leur finalité qui comptent, « dans le système
[ouvert de l’expression] ce sont les relations qui importent
et non le nombre des éléments »44. La communication
devient l’environnement politique, social, économique,
biologique et idéologique de l’homme dans la conception
expressive. « Le domaine des affaires humaines
proprement dit consiste dans le réseau des relations
humaines, qui existe partout où des hommes vivent
ensemble. »45 C’est dans les limites de son environnement
social que l’homme est en mesure de s’accomplir.
Autrement dit, « toute communication nécessite un
contexte, que sans contexte, il n’y a pas de sens et que les
contextes n’ont de sens que parce qu’ils s’insèrent eux-
mêmes dans une classification des contextes, formant de
nouveaux contextes »46. Voir la communication comme un
écosystème cohérent, dans lequel l’homme influence le
système autant qu’il est influencé par lui, n’empêche pas la
représentation d’exister comme objet. « Le avec n’est pas
exactement chassé. Nous vivons avec et dans un monde
plein de machines, et c’est là, pour nous, comme une
nature. »47
L’orchestre
Contrairement à la communication représentative,
l’expression ne trouve pas sa finalité lorsque le message est
reçu. Il y a continuité et interaction. Le récepteur passe de
la passivité à l’activité. Il n’est plus « propagandé »48 tel
qu’il était dans la première conception. Il peut accepter,
mais il peut refuser, négocier ou répondre au message qu’il
reçoit. « [L’émetteur] peut tenter de “faire prévaloir”, mais
ne peut prescrire ou garantir le [récepteur] qui possède ses
propres conditions d’existence. »49 Le récepteur ou
« l’observateur a une influence déterminante sur ce qu’il
prétend observer. [De plus,] il se sait observé autant qu’il
observe lui-même. On peut nommer cette position
“intersubjective”. »50 En d’autres mots, tout ce que nous
faisons peut avoir une influence autour de nous. D’un autre
côté, tout ce qui est fait autour de nous peut aussi avoir
une influence sur nous. Toute la vie sociale devient
intersubjective, de sorte que « l’intersubjectivité s’impose
comme un cadre normatif à la question de l’agir politique
et social »51. Il est impossible de lui échapper. Il s’agit d’un
système interrelié, continu et sans fin. L’intersubjectivité
est à la base de la vie sociale et en même temps, le cadre
de toute communication.
Dorénavant, l’information ne vient plus de l’extérieur,
mais de l’intérieur. « La communication est insertion d’un
sujet complexe dans un environnement lui-même complexe.
Le sujet fait partie de l’environnement, et l’environnement
fait partie du sujet. »52 Il n’est pas du tout question d’une
réalité objective. Il s’agit plutôt d’une science du sujet qui
joue dans un grand ensemble, « mais dans ce vaste
orchestre culturel, il n’y a ni chef ni partition. Chacun joue
en s’accordant sur l’autre. »53 L’image de l’orchestre
permet de démontrer que la communication est l’affaire de
tous les individus. Il n’est plus question d’être au début ou
à la fin du processus, mais d’être partout à la fois. Pour
Scheflen, membre du Collège invisible de Palo Alto, « la
“partition” de la communication n’a pas été formulée par
écrit et, dans une certaine mesure [elle] a été apprise
inconsciemment »54. Cette partition invisible, en tant que
grammaire du comportement, est utilisée par chacun sans
le savoir.
L’expression, comme deuxième définition de la
communication, prend si bien les allures du social que nous
pouvons aisément parler de communication organisée
socialement en opposition à « un processus plus ou moins
sophistiqué de messagerie : communiquer, c’est aussi
l’expression d’un monde, sa coconstruction. À partir de là,
une équation plus ou moins explicite, selon les auteurs, se
met en place : organisation égale communication »55. Le
monde organisé s’exprime par le biais de nos paroles. De
cette façon, nos paroles deviennent l’expression du monde
organisé, donc, de la vie sociale. Nous exprimons toujours
un monde qui s’exprime en nous et au travers de nous56.
En opposition au modèle télégraphique de la machine
(représentation), le modèle orchestral de l’organisme
(expression) « revient à voir dans la communication le
phénomène social que le tout premier sens du mot rendait
très bien, tant en français qu’en anglais : la mise en
commun, la participation, la communion »57. Cette
communion sociale à laquelle la communication expressive
nous invite n’est pas sans trouver des similitudes avec le
concept de droit commun58 dans le domaine juridique.
À
CHAPITRE 2 – DE LA PERSONNE À
LA PERSONNALISATION
« Cé quand tête coupé, ou pas mété chapeau. »
Proverbe haïtien
(Tant qu’on n’a pas encore la tête tranchée,
on peut garder espoir de porter un jour un chapeau.)
Dany LAFERRIÈRE
Pays sans chapeau
Bill WATTERSON
Calvin and Hobbes : Weirdos from another planet!
STAMATIOS TZITZIS – D’UN INDIVIDU, D’UN
SUJET, D’UNE PERSONNE
La communication, c’est comme une grande parade que
nous regardons passer, mais qui à la suite de son passage,
nous entraîne avec elle. Non seulement nous la suivons,
mais nous faisons partie intégrante du défilé. Ainsi, nous
saluons la foule qui nous salue en retour et qui sera à son
tour à nos côtés pour saluer la foule, dont nous ferons alors
de nouveau partie. Nous changeons constamment de rôle.
Nous participons à une grande valse où le meneur mène et
est mené ; multiplicité des rôles, mais toujours un seul et
même être, l’humain.
La pluralité est la condition de l’homme moderne ; le
contexte dans lequel s’engage toute l’action humaine, nous
dit Arendt. Elle possède le double caractère de l’égalité et
de la distinction, autrement dit, « nous sommes tous
pareils, c’est-à-dire humains, sans que jamais personne ne
soit identique à aucun autre homme ayant vécu, vivant ou
encore à naître »89. Chaque individu est identifié à la
naissance. En plus de lui trouver un nom, on l’insère dans
une filiation en lui reconnaissant une mère et un père, un
lieu et une heure de naissance. Cette identité lui est propre
et unique. Une fois qu’il est identifié et reconnu, l’individu
est en mesure d’acquérir des droits ; il devient sujet.
L’individu et le sujet sont deux facettes du même être. « La
grandeur de la condition humaine réside justement dans
cette tension maintenue entre l’un et l’autre, dans cet
entre-deux problématique qui n’est jamais “pure identité ni
pure différence”. »90 Puis, c’est la conjugaison de l’individu
et du sujet qui permet enfin l’édification ou l’avènement de
la « personne », la troisième facette de l’homme moderne,
celle qui lui permet d’entrer en relation.
En résumé, c’est l’« individu » qui définit l’être humain
par sa simple existence. Une fois qu’il est identifié, l’être
humain devient un « sujet » dans l’organisation sociale.
Conjugués ensemble, ces deux premiers aspects de l’être
humain permettent l’avènement de la « personne ».
Individu, sujet et personne désignent tous les trois le même
être humain. Le vocabulaire varie, mais chaque terme est
porteur de significations particulières. Nous tenterons ici
de démystifier celles-ci.
L’individu
La figure de l’Homme universel a fini par remplacer
complètement celle de Dieu au sein des institutions
modernes. Paradoxalement, c’est toujours à l’image de
Dieu que cet Homme raisonnable est construit. La raison
de cette immuabilité est que l’être humain ne peut pas
percevoir Dieu ou le monde autrement que par lui-même. Il
n’a pas les moyens de concevoir les choses autrement qu’à
son image. Dans cette logique, l’Homme moderne qui
prend les nouveaux traits de l’imago Dei est constitué,
comme son prédécesseur, sur des principes d’unicité et
d’indivision. Il fait « un », il est « individu » : « Être
indivisible, il est la particule élémentaire de toute société
humaine, particule stable et dénombrable, douée de
propriétés juridiques constantes et uniformes. Être unique,
il est incomparable à tout autre et constitue à lui-même sa
propre fin. »91 Tous les êtres humains sont des individus.
Nous sommes tous frères et sœurs dans la grande famille
de l’Humanité parce que l’« individu » nous rend tous
égaux. Nier cette individualité revient à nier le statut d’être
humain et « aucune idéologie ne peut justifier la négation
de l’être de l’homme »92. Malheureusement, l’histoire nous
l’enseigne et l’actualité nous le répète, lorsque des volontés
politiques tentent de nier cette individualité sur la base de
critères scientifiques ou des fondements historiques et
culturels, des désastres surviennent inévitablement93. Les
génocides sont de tristes exemples modernes de ces
déroutes majeures de l’Humanité.
Identité
Un État qui fait une distinction94 entre les individus sur la
base d’un critère objectif, culturel ou scientifique vient nier
son principe d’égalité. Il s’inscrit en opposition à l’idée
générale des Droits de l’Homme. « L’existence humaine
renvoie à l’homme comme étant d’une espèce; à l’individu,
comme unité anonyme appartenant à cette espèce, mais
encore – et surtout – à la personne impliquant la noblesse
onto-existentielle de l’homme. »95 Le mot « personne »
s’entend dans un sens hobbesien de l’existence; il est
homme-sujet, soumis à la volonté du Léviathan qui
détermine le mien du tien et instaure un système de justice
fondé sur l’idée de propriété. La société dans laquelle
l’homme vient au monde le reconnaît selon une attribution
particulière. L’humain naissant se voit sortir de l’anonymat
à jamais en se faisant octroyer la propriété de son identité.
La société qui l’accueille le greffe d’un nom, d’un lieu de
naissance et d’une filiation générationnelle. Elle fixe le
nouvel arrivant dans le temps. Elle vient attribuer une juste
part à chacun. Il s’agit vraiment d’une attribution et non
d’un choix. Ce juste partage est fait par les institutions qui
« ont la charge de produire les humains et de les
acheminer vers la mort »96. Le lien qui unit l’humain à une
institution est essentiel. « Coupé de tout lien […], l’être
humain est voué à l’idiotie, au sens étymologique du terme
(grec idios : “qui est restreint à soi-même”). »97 L’octroi
d’une identité est un principe qui relève de la
représentation, c’est à dire qui vient s’appliquer à une
réalité. La reconnaissance de l’être humain permet de lui
donner des formes afin que nous puissions le voir. C’est une
identification pour représenter et non pas pour distinguer.
L’identité est la forme donnée à un individu pour le
reconnaître parmi les autres. Cette identité demeurera le
propre du sujet même « après sa disparition, intacte
comme singularité irrépétable dans la mémoire »98. La
différence entre le concept d’individu et celui de sujet se
trouve dans l’identité, mais il n’est pas question ici de faire
correspondre une clé avec une serrure. Le sujet n’est pas
un simple complément de l’individu.
Le sujet
Ce qui caractérise le sujet réside en grande partie dans
sa capacité. Cette dernière constitue « le référent ultime du
respect moral et de la reconnaissance de l’homme comme
sujet de droit »99. La capacité est étroitement reliée à la
notion d’identité. Reconnaître un sujet, c’est être en
mesure de répondre à la question « qui »; c’est pouvoir
relier une action ou une parole à son auteur. « L’action qui
n’a point de nom, point de “qui” attaché à elle, n’a aucun
sens, alors qu’une œuvre d’art garde sa signification même
si nous ignorons le nom de son auteur. »100 La capacité d’un
sujet à se désigner comme étant l’auteur de ses propres
actes est au cœur de ce qu’est vraiment la capacité, le
pouvoir-faire. Comme dans une vision représentative de la
communication où l’émetteur est responsable de son
message, le sujet est le maître de ses actions et de ses
paroles. Cette possibilité de faire, de dire et d’agir nous
permet de déduire le concept éthico-juridique de
l’imputation. Nous voulons le faire parce que nous pouvons
le faire. « Le vouloir ici est identique au pouvoir. »101
Contrairement au pouvoir de faire de Descartes qui tenait
de sa propre volonté — quand on veut, on peut — c’est
plutôt une démarche de nature spinoziste qui cerne le
mieux la réalité du sujet. En ce sens, le vouloir vient parce
que nous pouvons : quand on peut, on veut. Autrement dit,
nous pouvons parce que nous sommes sujets ; parce que
nous sommes imputables. « En place et lieu d’un sujet qui
peut parce qu’il veut, nous avons un [sujet] qui est supposé
vouloir uniquement parce qu’il peut. »102 Ricœur reprend
l’expression aristotélicienne et consacrée d’« agent » pour
désigner celui qui est le « père de ses actions ».
L’imputabilité d’une action à un agent nous permet
d’affirmer que le sujet est porteur de droits et de devoirs et
non le contraire. Ce n’est point l’obligation qui impute la
responsabilité à l’agent, mais c’est parce qu’il a la capacité
et qu’il peut le faire qu’on lui reconnaît le droit ou le devoir
de le faire. Ainsi, « le sujet annonce le renvoi au soi comme
porteur d’obligation du droit positif »103. En règle générale,
il est plus souvent débiteur que créancier, précise Tzitzis.
Imputabilité
Le concept éthique et juridique duquel découle la notion
d’imputabilité comporte deux volets. Il renvoie à l’idée de
bien et celle d’obligation, nous dit Ricœur. Ces deux
prédicats nous permettent de juger comme étant bonnes ou
mauvaises, permises ou défendues, les différentes actions.
Or, les actions ne tiennent pas « en l’air » de façon
autonome. Nous pouvons les imputer à des agents. Lorsque
nous disons « qu’une personne s’exprime rationnellement ;
nous disons qu’elle ne se comporte pas seulement de façon
rationnelle, mais qu’elle est elle-même rationnelle »104.
C’est ainsi que le jugement s’applique de manière réflexive
aux pères des actions eux-mêmes, les agents. Juger les
actions d’autrui, c’est porter un jugement sur autrui. C’est
en somme « l’estime de soi et le respect de soi qui
définissent la dimension éthique et morale du soi, dans la
mesure où ils caractérisent l’homme comme sujet
d’imputation éthico-juridique »105, mais si « parler des
défauts des autres, disait Proust, demeure une manière de
parler de soi »106, juger les autres, c’est donc aussi une
façon de se juger soi-même. Tous pourvus des mêmes
attributs du sujet, nous sommes des agents dignes de
respect et d’estime. Nous sommes tous capables de juger
les actions des autres. Or, si cette capacité nous donne la
possibilité de juger comme étant bonnes ou mauvaises,
permises ou défendues, les actions des agents dignes de
respect et d’estime, cette capacité nous donne aussi la
possibilité de juger de la même façon nos propres actions
et du coup, de nous juger nous-mêmes. Finalement, ce qui
distingue le sujet tient dans sa capacité à estimer ses
propres actions selon les prédicats « bon » et
« obligatoire ».
La personne
L’individu et le sujet sont deux aspects qui caractérisent
l’homme, mais ce dernier n’est pas seul au monde. « La
philosophie du [XVIIIe siècle] n’a vu que l’homme et
l’univers et jamais la société. »107 L’homme n’est rien, ou
encore si peu, s’il ne peut pas entrer en relation. L’individu
et le sujet ne permettent pas d’affirmer toute sa réalité
ontologique. Il faut y distinguer également la « personne »
qui naît de la conjugaison de l’individu et du sujet. Elle
« est une manifestation de l’être qui se substantialise,
jouissant d’une liberté de choix créatrice »108. Elle est à la
fois la volonté, l’instinct et la créativité. En fait, elle est
prosôpon109, c’est-à-dire « le principe fondamental de la vie
personnifiée qui proteste contre le scientisme de la
raison »110. La personne se fonde sur les valeurs du monde.
Il est impossible de la cerner complètement. Elle est à la
fois l’irrationnel et le flou, la volonté et l’instinct, le regard
et le geste. La personne transporte l’être humain à un
autre niveau. Sa propre quête de connaissances l’oblige à
s’ouvrir aux autres et l’empêche de se refermer sur elle-
même. La personne nous mène à l’Autre ; elle inaugure
l’altérité.
Reconnaissance
Le sujet impose un espace de différenciation. Il nous
différencie de nos semblables en déterminant une identité
unique à chacun. Si tout était fusionné, nous n’aurions
aucun intérêt à chercher. Pour passer du sujet à la
personne, il faut la relation au tiers. « Hier l’homme était
défini par son identité, aujourd’hui, il est aussi défini par
les relations. Hier, l’identité était l’obstacle à la
communication, aujourd’hui, elle en est la condition. »111 Le
sujet permet une relation entre « toi » et « moi » : une
reconnaissance mutuelle; en te reconnaissant toi, je me
reconnais moi. Cependant, « dans ce rapport du moi à
l’autre, le moi surgit non pas comme un “être-en-soi” et
“pour-soi”, mais comme un être en-relation-à-autrui »112. Il
manque ainsi à toi et à moi, la relation au tiers. Ce dernier
se conjugue à la troisième personne (il/elle), c’est
l’institution, le cadre commun reconnu à la fois par toi et
moi. « Si le cadre est commun, le message à communiquer
est nouveau et ne s’épuise pas dans ce cadre commun. »113
Le fait que toi et moi parlions français (institution de la
langue) ne met pas fin à la relation, au contraire, le cadre
commun de la langue ne constitue que le point de départ
des échanges. Toi et moi confirmons simplement que nous
communiquerons en français et par la suite, tout est
possible.
Chaque agent (moi/toi) est relié à un autre agent (toi/moi)
par le biais de systèmes sociaux organisés (tiers), les
ordres de reconnaissance114. Celui qui parle ou agit
reconnaît être l’auteur de son acte et entre du même coup
dans une grande interaction avec le tiers. Le sujet amène
l’imputabilité tandis que la personne apporte la
reconnaissance et la confiance avec son rapport au tiers.
Prenons l’exemple d’un contrat. Par définition, le contrat
est un « écrit qui constate la convention par laquelle deux
ou plusieurs personnes font naître, entre elles, des
obligations ou transfèrent un droit réel »115. Il constitue la
preuve des intentions des deux parties cocontractantes. Les
engagements pris dans le contrat doivent être honorés par
les deux parties (Pacta sunt servanda). À moins qu’elle
contrevienne à des règles d’Ordre public, la commune
intention des parties détermine les règles d’application du
contrat qui doivent impérativement être observées116. Elles
font la loi des parties : pacta dant legem contractui. Le
contrat donne une structure juridique aux intentions des
parties. Il assure la liaison entre les cocontractants. De la
même façon, l’institution assure les liaisons entre les
membres d’une communauté; c’est un contrat à échelle
sociale. Les liaisons entre les personnes sont possibles
parce qu’elles passent par le tiers institué. La
reconnaissance n’est pas uniquement l’affaire de « toi » ou
de « moi », mais de tout le monde qui se trouve dans le
même ordre de reconnaissance. « Le vis-à-vis n’est plus toi,
mais le tiers que désigne de façon remarquable le pronom
chacun, pronom impersonnel, mais non anonyme. »117
Vivre sans lien – la question de l’apatridie
Il est difficile de croire que des êtres humains dans les
sociétés d’aujourd’hui naissent encore dépourvus de liens,
sans papier et sans nationalité. Malgré l’omniprésence de
l’État dans les affaires des citoyens, il arrive pourtant
fréquemment que des gens vivent détacher de tout, libres
comme personne d’autre. Ils sont tellement libres qu’ils
n’existent pratiquement pas. Sans identité, sans lien, ils
vivent littéralement hors du système. Ces « électrons
libres » sont des apatrides118. Ils sont laissés entièrement à
eux-mêmes. Ils n’existent pas aux yeux des fonctionnaires
bien qu’ils se tiennent debout en chair et en os devant les
institutions gouvernementales. Ils sont isolés et non
reconnus. La société ne leurs connaît pas de traces et « la
police ne s’occupe que de ceux qui ont une existence »119.
Ils ne sont pas dans le système; ils ne sont pas et pourtant
ils sont bel et bien là. Cette situation est intenable. Il faut
mettre fin au désordre et à la folie. Il faut les reconnaître et
les rattacher. Il faut les identifier et les faire naître au sein
des institutions étatiques.
La naissance des sans-papiers
La Déclaration universelle des droits de l’Homme est
claire : « Tout individu a droit à une nationalité [et] à la
reconnaissance en tous lieux de sa personnalité
juridique. »120 L’apatridie ne devrait tout simplement pas
exister. Elle sourd pourtant parce que la mise en œuvre de
ces « vœux pieux » est laissée entre les mains des états
souverains. En effet, la plupart du temps, la situation
d’apatridie est causée par la divergence entre les
législations nationales.
« L’enfant étranger qui naît sur le territoire d’un État
qui adhère strictement au système de jus sanguinis sera
techniquement un apatride de droit si l’État national de
ses parents adhère au système de jus soli; en vertu de la
législation de son pays, une femme peut perdre sa
nationalité si elle se marie avec un étranger et
deviendra apatride si la loi de l’État national de son
mari ne lui attribue pas automatiquement une
nationalité. »121
Une sanction juridique ou politique à l’égard d’un
particulier peut mener à une situation d’apatridie. Une
décision de l’État national suite à un séjour trop prolongé à
l’étranger est aussi à même de priver un ressortissant de sa
nationalité, précise Arbour. L’apatridie n’est pas toujours
l’affaire d’une seule personne. Elle est susceptible de
toucher un groupe d’individus lorsqu’elle est occasionnée
par des changements politiques ou territoriaux122. Enfin, le
trafic d’humains et l’immigration clandestine sont
responsables de la naissance de nombreux cas de sans-
papiers. Par choix ou par contraintes, des individus se
soumettent à des gens trop peu scrupuleux qui les
détroussent de leur identité et ainsi, les rendent invisibles
aux yeux du pays hôte. Il s’agit d’un mal nécessaire, diront
certains, dans le cas de l’immigration, car s’ils procédaient
par le chemin de la légalité, les clandestins seraient
probablement repoussés aux frontières.
Des pistes de solutions
Les politiques en matière de régularisation des sans-
papiers sont d’ores et déjà des sujets de débats très chauds
dans les grandes terres d’accueil comme la France et les
États-Unis. C’est que le malaise ne saurait persister
toujours. En pratique, l’apatridie place des êtres humains
et des États dans l’embarras et soulève des questions
existentielles : « Qui sont les apatrides? », « Que font-ils »,
« Quoi faire d’eux? », « Comment les aider? ». Deux
orientations différentes et complémentaires ont vu le jour
en droit international public. Les États ont débuté par
reconnaître un statut juridique minimal aux apatrides et se
sont ensuite penchés sur les causes de l’apatridie.
C’est dans un premier temps « la Convention relative au
statut des apatrides du 28 septembre 1954 qui [est venu
fixer] le régime juridique minimum qu’un État doit
accorder aux apatrides qui vivent à l’intérieur de ses
frontières »123. La première étape en vue d’enrayer
l’apatridie a été d’abord de reconnaître un statut aux
apatrides; une reconnaissance minimale. Les États n’iront
pas jusqu’à reconnaître l’apatridie de facto, mais ils
s’invitent dès lors à une plus grande ouverture lorsque les
raisons qui ont mené à la situation de heimatlosat sont
valables.
Le deuxième volet des efforts internationaux sur la lutte
aux situations d’apatridie a pris forme dans la Convention
des Nations Unies sur la réduction de l’apatridie et dans la
Convention sur la nationalité de la femme mariée de 1957.
« L’État contractant s’engage à accorder sa nationalité à
toute personne née sur son territoire et qui serait
autrement apatride; qui plus est, toute personne née en
dehors du territoire d’un État contractant, mais dont
l’un des parents avait la nationalité de cet État au
moment de la naissance de cette personne a le droit de
recevoir la nationalité dudit État si, sans cela, elle
devait rester sans nationalité aucune. »124
Ce qui se dégage essentiellement de ces trois conventions
est qu’un État ne doit pas être responsable de la naissance
d’une situation d’apatridie. Les décisions étatiques ne
doivent en aucun cas priver quiconque de sa nationalité. De
plus, si l’État a la possibilité de remédier à une situation
d’apatridie, il a le devoir de le faire. Ces efforts sont
louables, mais les nombreuses réserves apportées par les
États à cette triade de conventions leur offrent
malheureusement une portée bien limitée.
Le triomphe du récepteur
Les recherches dans le domaine de la communication
portent encore couramment sur les effets des produits
communicationnels. Elles négligent trop souvent de traiter
du sens véritablement perçu par les destinataires de ces
produits128. Ravault explique partiellement cette tendance
par « la popularité dont jouissent encore les théories du
contrôle de la société et de la culture par les médias »129.
Ces théories développées dans l’entre-deux-guerres
consistent à croire que le récepteur exposé à une
propagande médiatique est automatiquement converti et
contrôlé. L’idée d’un récepteur passif a fait son chemin et a
focalisé les recherches sur l’analyse de ce qui se passe du
côté de la production et de la diffusion.
Or, l’homme arrive dans un monde qui est déjà là. Il est
récepteur d’abord et avant tout. La communication est une
science du sujet. Elle ne peut pas se limiter à la production
et à la distribution d’informations. Elle doit aussi
impérativement porter sur les conditions de la réception et
c’est pourquoi, graduellement, le récepteur est venu
détrôner l’émetteur dans le schéma traditionnel de la
communication. La réception est dorénavant active et le
récepteur est actif. La position occupée par le récepteur est
la plus intéressante parce qu’elle permet de relativiser la
communication; elle permet un choix. Le récepteur a su
trouver sa place comme véritable détenteur du pouvoir de
détermination du sens d’une communication, et ce, bien
qu’il complique tout, qu’il est là où on ne l’attend pas et
qu’il ne comprend pas toujours ce qu’on voudrait qu’il
comprenne. Le récepteur est, pour Thayer, la seule source
créatrice de tous les messages130. Le succès de la
communication réside dans le triomphe du récepteur.
Brève histoire de la réception active
C’est à Schramm131 que nous devons la démonstration de
la désuétude des théories du contrôle social et culturel
nous dit Ravault. L’Américain se refusait à considérer la
communication comme étant l’effet d’un projectile
magique. Il a fait passer le récepteur de la passivité à
l’activité en séparant la communication en deux actes :
l’émission et la réception. Puis, c’est en se penchant sur
l’échec des méthodes propagandistes des Alliés sur les
soldats allemands lors de la seconde Grande Guerre que
Shils et Janowitz132 ont contribué à l’avancement des
théories de la réception active. Ils ont pu démontrer que les
dirigeants nazis avaient su utiliser la propagande des Alliés
à leur avantage en s’attardant à bien identifier les tracts
comme étant de provenances américaines. L’effet désiré par
les Alliés ne fut pas celui escompté. Au contraire, il a
renforcé le moral des troupes allemandes. Les deux
chercheurs américains en sont venus à la conclusion que
c’est l’attribution d’un caractère d’étrangeté aux tracts qui
a contribué à la réussite de la contre-propagande.
Autrement dit, en les taxant du sceau américain, les tracts
se sont heurtés aux valeurs allemandes. Ils n’ont pas su
trouver la finalité espérée. Le destinataire ne s’est pas
avéré être le propagandé escompté ni celui souhaité
d’ailleurs. C’est ensuite par le biais d’analyses en
marketing et en comportement organisationnelle que
l’autonomie du récepteur prendra du galon. Thayer
distinguera des facteurs qui vont au-delà du simple contenu
informationnel, nous dit Ravault, tandis que « Dunn rejoint
Klapper pour affirmer que la plupart des communications
entre émetteurs et récepteurs sont influencées par une
infinité de variables. »133 En somme, le récepteur actif
détermine le sens du message en fonction de sa perception,
de ses propres intentions et besoins. Il prend aussi en
considération ce qu’il croit être l’intention de l’émetteur et
ce qu’il peut en faire. Le récepteur actif se distingue par sa
capacité qu’il a de personnaliser les messages qu’il reçoit.
Il a toujours l’avantage, une longueur d’avance sur
l’émetteur, car il a la possibilité d’agir deux fois : il reçoit et
il répond.
Deux réseaux
La flexibilité de la tige d’un jeune arbre permet de
l’orienter et de fixer sa position pour le reste de sa vie134.
Son écorce se développera ensuite et il sera alors
pratiquement impossible de changer son allure ou la
direction de ses branches sans l’abîmer. L’environnement
qui accueille l’arbre se charge de lui donner les moyens et
une orientation adaptée qui lui assurera la survie. Comme
l’arbre qui naît dans la forêt, nous naissons dans une
société qui se charge de nous enseigner les rudiments de la
vie en société. Les parents, l’État, l’école, l’Église ; tous
s’affairent à nous inculquer les fondements de notre
culture. L’apprentissage de la langue, des croyances et des
valeurs constitue la pratique de toutes les sociétés. C’est en
bas âge que nous sont transmis et appris ces valeurs et
référents psychosocioculturels. « Il faut admettre que l’on
voit mal comment on pourrait attendre que les enfants
soient adultes pour qu’ils puissent délibérément choisir
leur langue et leur culture. »135 Ravault emploie
l’expression « coerséduction »136 pour parler de l’action de
ces réseaux traditionnels de coercition socioculturelle. Il
est difficile de saisir la véritable portée de ces réseaux
puisqu’ils sont fondés sur la base de valeurs et de
croyances, mais il est clair qu’ils sont bien présents en
chacun de nous. Les réseaux traditionnels de coerséduction
sont confrontés quotidiennement aux réseaux globalisés
d’information et de communication qui ont vu le jour grâce
au fulgurant développement des technologies d’information
et de communication (TIC). Les deux réseaux influencent le
récepteur. Seulement, une trop grande importance est
souvent accordée aux nouvelles technologies, sous-
estimant du même coup l’impact du milieu d’où nous
provenons.
L’effet boomerang
L’idée d’une « gouvernance rationnelle universelle »137 fait
tranquillement son chemin depuis la fin de la deuxième
Grande Guerre et la naissance de l’Organisation des
Nations Unies. Cependant, nous sommes encore bien loin
de voir la réalisation d’un véritable gouvernement global.
Les difficultés liées à la construction de l’Europe révèlent
au grand jour la hardiesse de la tâche de rassembler dans
un même groupe et dans l’unité, des pays et des cultures
diversifiés. Malgré tout, « compte tenu de l’effondrement
des tentatives de Mondialisation communiste, cet attirail
peut être considéré, au premier regard, comme simple
instrument de l’occidentalisation du monde. »138 Prenons
l’exemple de la grande présence médiatique des États-Unis
à travers le monde. Les médias américains possèdent un
savoir-faire indéniable. Ils ont les moyens, l’expertise et
l’expérience. Ils constituent une référence. L’Amérique
médiatique sait faire, mais elle ne tient pas uniquement à
être la meilleure, ni à développer les techniques les plus
innovatrices. Elle cherche littéralement à imposer ses
méthodes et ses valeurs comme l’unique façon de faire les
choses et de voir le monde. Or, « l’expansion mondiale des
communications américaines ou l’impérialisme culturel
américain n’équivaut pas à conquérir les esprits, ni à
imposer une idéologie ou une façon de voir et de vivre »139.
Le paysage actuel semble présumer que « les sociétés non
alignées sur l’Occident n’ont d’autre perspective que de
s’auto-annuler en tant que culture (sauf à survivre
folklorisées) »140. Le suicide n’est pourtant pas la seule
solution. La survie est possible; c’est l’effet boomerang. Ce
dernier a été observé maintes fois dans les rapports avec
les communications de masse américaines : la révolution
iranienne, le développement économique de la République
fédérale Allemande et celui du Japon et plus récemment,
les attentats du 11 septembre141. Le monde entier a pu
constater dans ces occasions que l’exhibitionnisme
occidental, voire l’arrogance américaine142, peut parfois lui
jouer des tours.
Personnalisation et surcodage
L’idée d’une personnalisation des messages chez Thayer
trouve un penchant européen dans les théories de Sfez et
son concept du surcode143. Il y a le code et il y a les
surcodes. Par code, il faut voir une structure contraignante.
La langue et le droit en sont deux brillants exemples, mais
il ne faut pas se limiter à ces structures connues. Il y a par
exemple l’habitus « qui s’affirme dans la confrontation
improvisée avec des situations sans cesse renouvelées, il
obéit à une logique pratique, celle du flou, de l’à peu près,
qui définit le rapport ordinaire au monde »144. À la
rencontre de ces codes, c’est-à-dire, « quand les
contraintes spécifiques d’un code s’ajoutent aux
contraintes spécifiques d’un autre code, l’effet est
imprévisible et, sur l’instant invisible. C’est cela le
surcode. »145 En d’autres termes, c’est comme si la touche
personnelle, le style individuel, personnel et libre, qui régit
une œuvre, une action voire une décision, est le résultat de
contraintes additionnées. Cette addition de code ne
s’entend cependant pas comme un simple cumul avec une
somme fixe. « L’effet de surcodage est un effet de sens,
c’est-à-dire qu’il dépasse largement les prévisions des
codes. Cette addition est aussi une division, une
soustraction, une annulation, une torsion. Effet
imprévisible. »146
Le récepteur crée un sens unique et
imprédictible au message parce qu’il est dans le monde et
que le monde se trouve en lui.
« Le “message” pour Thayer, comme le “surcode” pour
Sfez sont “individués” ou incarnés par l’acteur
communiquant et non portés par une structure
contraignante que serait la langue ou un autre média.
Pour Thayer, les médias ne véhiculent que des propos,
des produits communicationnels, et pour Sfez, ce qui est
inscrit dans la structure contraignante de la langue
relève de la forme, du sens commun, de la grammaire,
etc., et non de la parole, du symbolique ou de la
signification “individués”. »147
La communication passe dorénavant par le récepteur qui
est social. Du coup, la communication devient elle-même
sociale. « Le média est dans le monde, au même titre que le
récepteur, de même que le monde est dans le média et le
récepteur. Chacun est subjectivement objectif dans sa
grande activité de mariage avec le monde. »148 D’autres
auteurs ont traité de cette « individuation par effet de
surcodage » ou de cette « personnalisation des messages »
comme des influences psychologiques et sociologiques des
actions humaines. Ces influences, peut-être moins
contraignantes que le concept de surcode, ont été
davantage reconnues et réemployées dans d’autres sphères
d’étude.
L’exemple du livre
Tel un précurseur aux théories de la réception active,
Sartre a écrit en 1948 que « l'opération d'écrire implique
celle de lire comme son corrélatif dialectique et [que] ces
deux actes connexes nécessitent deux agents distincts. »149
Cependant, les processus d’écriture et de lecture d’un livre
ne sont pas symétriques ; ils sont concurrents. Ils ne sont
pas simultanés, « le livre sépare plutôt en deux versants
l’acte d’écrire et l’acte de lire qui ne communiquent pas; le
lecteur est absent à l’écriture; l’écrivain absent à la
lecture »150. Pour la personne qui lit, le moment et le lieu du
décodage sauront apporter des influences. Une bonne
écriture ne mène pas nécessairement à une bonne lecture.
Cette dernière est toujours laissée à la discrétion du
lecteur151. Une lecture sera différente à tous les coups
parce que le lecteur a son propre vécu et qu’il change avec
le temps et ses expériences. Pareillement, des lecteurs
différents mèneront à différents résultats. La lecture est un
acte intransitif qui engendre une pluralité de sens152. Cette
polysémie est indéterminée et évolutive, voire totalement
imprévisible, car elle est sous l’effet d’un surcodage. Un
livre peut se vendre à des milliers d’exemplaires, le sens
qui lui sera donné sera unique à chaque lecture tant et si
bien que « [c]’est toujours et jamais dans le même fleuve
que l’on se baigne. »153
L’exemple du suffrage
Quittons maintenant le monde de la littérature pour une
brève incursion dans celui de la politique. Prenons une
élection au suffrage universel qui vise à élire les députés
qui siègeront à l’Assemblée législative d’un état
démocratique, par exemple, les élections législatives en
France ou les élections générales québécoises. En période
électorale, les candidats aux postes de députés proposent
des orientations, prononcent des discours ou promettent
des actions. Malgré tous leurs efforts et dévouements, le
choix des électeurs se fait plutôt à partir d’autres
motivations. L’image projetée par les chefs des partis a
beaucoup à voir avec les résultats finaux. En effet,
l’adhésion à un clan plutôt qu’à un autre tient davantage de
l’attachement aux leaders qui les guident qu’aux enjeux
véritablement exposés. Les raisons qui motivent les
électeurs peuvent n’avoir rien à voir avec les débats qui ont
eu lieu en campagne électorale. Un électeur peut baser son
choix politique sur la base d’une idéologie ou de valeurs
qu’il juge beaucoup plus fondamentales. Ainsi, il ne faut
pas demander à un souverainiste québécois de voter pour
un parti politique qui défend une idéologie fédéraliste, de
même, à un communiste français de voter à droite.
L’électeur n’est lié à personne; ni à son conjoint, ni à son
patron. Il peut fonder son choix sur les facteurs qui
l’enchantent. Son vote peut être contestataire, absolument
cynique ou profondément partisan de sorte qu’« en allant
voter, les électeurs répondent en fait à une autre question
qui ne leur est pas posée, et dont ils supposent qu’elle est
plus importante »154. Lors d’un référendum, on demande
simplement au peuple de s’exprimer par « oui » ou par
« non » à une question précise et pourtant, c’est tout un
débat de société qui s’installe et qui entre en ligne de
compte dans le résultat.
È
DEUXIÈME PARTIE –
LA SOCIÉTÉ
JURIDICOMMUNICATIONNELLE
Jacques PRÉVERT
La brouette ou les grandes inventions
« PETE : The preacher said it absolved us.
EVERETT : For him, not for the law! I’m surprised at you
Pete.
Hell, I gave you credit for more brains than Delmar.
SOCIÉTÉ DE COMMUNICATION
Tönnies, Marx et Weber usent de moyens différents et
choisissent des angles d’approches dissemblables afin
d’expliquer le passage de la société traditionnelle à la
société moderne. Quoique Tönnies décrive plus qu’il
n’explique, les études des trois auteurs reconnaissent « la
disparition de la transcendance divine propre à la société
ancienne et son remplacement par le débat public propre à
la société moderne »191. La religion implique une
soumission à tout ce qui est divin. Elle est déterminante et
teinte tous les aspects de la société traditionnelle. La
religion offre une réponse à tout et contient toutes les
justifications. « [Elle] est l’ombre portée sur le réel. »192
C’est la religion qui est derrière le concept de Roi de droit
divin et qui a assuré le pouvoir des grandes familles
pendant des générations. Le Roi siège sur un trône parce
qu’il est l’élu de Dieu ; l’ordre social est tel parce que Dieu
l’a souhaité ainsi. Il est inutile de chercher à comprendre la
volonté divine dans un système fondé principalement sur
une rationalité religieuse et divine, il ne suffit même pas de
l’accepter ou d’y croire, mais simplement de s’y conformer.
La transcendance divine s’éclipse
Les liaisons sociales, jusque-là fondées sur la religion,
tombent avec l’avènement de la société moderne. Elles sont
dorénavant construites sur la base d’une intersubjectivité
discursive, car la « religion ne fournit plus le cadre
obligatoire, structurant tant la société dans son ensemble
que l’expérience des individus »193. Les divinités, le
mystique et la magie ne sont plus acceptés aveuglément.
En positionnant le moteur de l’histoire dans la lutte des
classes, Marx découvre que « l’ordre social et humain n’est
plus donné par la volonté divine, mais par l’action humaine.
C’est également ce que souligne Weber avec le concept de
rationalité. »194 La religion n’est pas reléguée aux
oubliettes, mais elle est à tout le moins relativisée et ses
implications sont atténuées. Les théories wébériennes font
de la rationalité religieuse une manière parmi d’autres
d’organiser l’ordre social. La transcendance divine
s’éclipse dans la société moderne. Le monde est
désenchanté et la croyance ancienne fortement
hiérarchisée, fixée et rigide, qui assurait l’ordre social et
humain, est mise au rancart au profit d’une raison humaine
négociée.
L’importance croissante accordée à la voix du peuple (vox
populi) au détriment de la voix de Dieu (vox Dei) dans les
affaires de la société constitue un des éléments majeurs de
la transformation engendrée par les Lumières. Ce passage
du coq à l’âne195 impose un changement drastique de
perspective, car la voix de Dieu provient d’un lieu qui se
situe au-delà des hommes alors que la voix du peuple prend
naissance en chacun de nous. Le rapport des hommes à
l’ordre social et à l’autorité subit un renversement. C’est
pourquoi le passage de la société traditionnelle à la société
moderne ne s’effectue pas dans la continuité ni dans
l’évolution naturelle des choses, mais bel et bien dans la
révolution. Il faut dorénavant aborder les choses
autrement. Il faut consulter tout le monde.
Le débat public s’installe
La religion a réponse à tout dans la société traditionnelle.
Elle semble avoir tout compris et tout prévu. Elle a ses
droits et ses devoirs, ses lois et ses interdits. En mettant la
religion à l’index, l’homme ne peut désormais compter que
sur lui-même dans la société moderne. Tout doit passer par
la discussion et le consensus. De plus, il doit lui-même
mettre en place les structures qui permettront d’engendrer
le débat. Les lois doivent recevoir l’assentiment de tous
pour trouver la légitimité nécessaire pour s’appliquer et
s’imposer. Guidés par leur raison individuelle, les membres
de la société doivent parvenir à une entente ; à une forme
de grand contrat social. Le moyen qu’ils ont de s’entendre
réside dans leur capacité individuelle de discourir et
d’argumenter, c’est-à-dire de communiquer, « comme si la
communication devenait la condition normative de
fonctionnement, ou plutôt de cohabitation des sociétés »196.
Un grand débat public s’installe et prend la place de la
transcendance divine. « Les sociétés modernes dépendent
pour leur organisation, leur fonctionnement et leur survie
des modalités, conditions et possibilités de
communication. » 197
Les sociétés modernes sont des
sociétés de communication.
SOCIÉTÉ DE DROIT
Inversement, pour que la communication puisse s’imposer
comme une valeur inéluctable dans tous les rapports
sociaux, « il faut une société mobile, ouverte, tournée vers
le changement, qui privilégie l’initiative, sépare le religieux
du politique et du militaire, reconnaisse la singularité et
l’égalité des sujets, le droit à s’exprimer, la liberté
d’opinion, et finalement le pluralisme politique »198. Cette
société ouverte et mobile, voire démocratique, doit être
fondée sur des principes dialectiques et juridiques. Il s’agit
de la « situation d’une société dont le comportement des
membres est soumis à un ensemble de règles
juridiques »199. Les sociétés modernes sont aussi des
sociétés de droit.
Nul ne peut prétendre être au-dessus des lois dans une
société de droit moderne. Nous sommes bien loin du
concept de Roi de droit divin qui prête au détenteur du
pouvoir la possibilité de se soustraire aux lois en se
prétendant être l’élu de Dieu. Si des immunités sont encore
reconnues, elles ne le sont que partiellement et
spécifiquement. Elles ne sont jamais absolues. Elles ont
simplement comme objectif de rendre plus efficace le
travail des représentants des peuples (élus et diplomates).
Le droit n’est pas une invention de la modernité. Les
sociétés de droit modernes se distinguent cependant par
l’adhésion à un principe nouveau, celui de la primauté du
droit.
La primauté du droit – l’exemple canadien
Le Québec et le Canada sont des sociétés de droit, c’est-à-
dire, des états « dont le système de gouvernement est
soumis à la primauté du droit »200. Cela signifie que tous les
organes des gouvernements, leurs membres, y compris les
dirigeants, sont soumis au droit positif québécois et/ou
canadien. Non seulement ils y sont soumis, mais c’est tous
leurs pouvoirs qui en découlent. En d’autres mots,
l’autorité et les pouvoirs reconnus aux administrations
publiques québécoises et canadiennes viennent du droit (de
la Constitution canadienne), et non de leur propre force. Au
Canada, la fonction exécutive est hiérarchiquement
inférieure aux fonctions législatives et judiciaires. Ce
principe de la primauté du droit peut être désigné
également sous le nom de « principe de légalité » ou
encore par l’expression « État de droit »201.
Le Parlement canadien rassemble tous les députés élus
après une élection. Ces derniers sont les représentants du
peuple. Reconnaître la suprématie du Parlement permet de
s’assurer que rien ni personne n’est au-dessus du peuple et
par voie de conséquence, que le peuple ne peut être soumis
qu’à lui-même. « Le seul gouvernement légitime d’un pays
est celui qui a été choisi par la libre volonté du peuple de
ce pays; c’est la fameuse volonté générale »202 qu’on
retrouve chez Rousseau et Locke. La volonté générale
reconnaît un pouvoir aux dirigeants de contraindre le
peuple qui demeure néanmoins maître de sa destinée. Ce
principe a reçu l’appellation de « Rule of Law » en anglais
et se veut l’antithèse du pouvoir personnel ou de
l’arbitraire. Il ne faut pas confondre l’arbitraire et le
discrétionnaire. « Alors que l’arbitraire permet d’agir à sa
guise, le discrétionnaire laisse une marge de jeu tout en
faisant l’objet de limites. »203 Le pouvoir est balisé. Le
gouvernement dirige dans les limites et avec la latitude qui
lui est expressément reconnue. Ses actions sont encadrées
et peuvent être sanctionnées.
La plus haute instance judiciaire du Canada reconnaît
quatre grands principes corollaires à la primauté de la
légalité. Le premier de ces principes consiste à reconnaître,
avant toute chose, l’existence d’un droit. Nous reviendrons
sur cet élément un peu plus loin. Le deuxième principe est
celui de la clarté, c’est-à-dire que l’attribution du pouvoir
doit être claire et identifiable. Les textes législatifs doivent,
de manière expresse, spécifier le pouvoir et ses limites.
Troisièmement, l’utilisation du pouvoir doit se faire sans
discrimination. La Charte canadienne des droits et libertés
est d’ailleurs enchâssée dans la Constitution canadienne.
Tous les tribunaux ont la capacité de sanctionner un
comportement qui serait fautif ou contraire à l’esprit de la
Charte. Cette possibilité de sanction constitue le quatrième
et dernier principe corollaire à la primauté de la légalité au
Canada. Reprenons maintenant le premier de ces principes,
celui qui évoque, au préalable, la nécessaire
reconnaissance de l’existence d’un droit.
« La Cour suprême a eu l’occasion de rappeler ce sens
premier de la primauté du droit en 1985, après avoir été
amenée à juger inconstitutionnelles à peu près toutes
les lois de la province du Manitoba. En raison du
principe constitutionnel de la primauté du droit, elle a
alors décidé que toutes ces lois, malgré leur invalidité,
allaient devoir continuer de recevoir pleine application
sur le territoire. À défaut de quoi une situation plutôt
anarchique eut risqué d’être engendrée. Aux yeux de la
Cour, l’ordre minimal que requiert la primauté du droit
peut donc parfois nécessiter, paradoxalement, la mise
en œuvre de normes n’ayant aucune valeur
juridique. »204
Ce que dit essentiellement la Cour Suprême du Canada
est « simplement que l’anarchie est tout le contraire du
règne du droit. […] Avant d’être une limite ou une
contrainte à l’État, la primauté du droit postule l’existence
de l’État. »205 Si nous voulons être en mesure de parler de
la primauté du droit, il faut qu’il y ait d’abord un minimum
d’ordre, voire un minimum d’État206.
Alessandro BARICCO
Novecento : pianiste
Pascal ÉLIE
Aux marches du palais
Journal du Barreau du Québec (2006)
È
TROISIÈME PARTIE –
L’INTERPRÉTATION OU
LA MÉTHODE DU JURISTE
CHAPITRE 1 – INTERPRÉTATION
« Ce sont les mots qui existent, ce qui n’a pas de nom
n’existe pas.
Le mot lumière existe, la lumière n’existe pas. »
Francis PICABIA
Jésus-Christ Rastaquouère
« Quand je lis un livre, aujourd’hui, j’en oublie le début
avant d’être arrivé à la fin.
Parfois, ma mémoire n’est même plus de taille à retenir la
lecture d’une seule page.
Et je suis là en train de dégringoler, comme si je me tenais
par les mains,
d’un alinéa au suivant, d’une phrase à l’autre,
et bientôt j’en serai au point de ne plus pouvoir retenir que
des mots isolés, chaque fois inconnu,
et jetant la brève lueur d’étoiles filantes le temps que je les
lise,
pour aussitôt sombrer de nouveau dans les flots noirs du
fleuve Léthé
et dans l’oubli total. »
Patrick SÜSKIND
Amnésie littéraire
« Les années passent,
et j’ai si souvent raconté cette histoire
que je ne sais plus très bien si c’est d’elle que je me
souviens
ou seulement des paroles avec lesquelles je la raconte. »
DE L’ARGUMENTATION À LA DÉCISION
La technique juridique ne doit pas reposer sur l’idée
d’appliquer le droit positif à une réalité ; « les juristes
n’ayant pas la prétention de penser, mais seulement la
fonction de tenir les emblèmes de la Loi. »416 Il faut plutôt
penser le contraire, c’est-à-dire, d’appliquer les faits de la
réalité au droit positif. Bauzon s’inspire et réaffirme les
enseignements de Villey lorsqu’il soutient que « les lois ne
s’appliquent pas aux faits, c’est l’inverse qui se produit, ne
serait-ce que pour dépasser leur antinomie »417. Comme la
réalité de l’expérience de la vie est dans son ensemble
insaisissable, il est impossible de prétendre avoir tout
prévu. Tous les codes civils du monde ne viendront pas à
bout de l’expérience du monde vécu. Rappelons-nous ce
que Sfez nous a dit, lorsque les « codes » s’entrechoquent,
le résultat demeure à tous les coups imprévisibles. Partant
de cette idée sfezienne qu’il est impossible de tout prévoir,
il devient alors facile de concevoir que les juges sont
régulièrement confrontés à des vides juridiques, des cas
difficiles ou selon l’expression consacrée en anglais par
Dworkin, des « hard cases ». C’est d’ailleurs à partir de
ceux-ci que Dworkin élabora une théorie de l’interprétation
en réfutant d’abord ce qu’il considère être les trois axiomes
du positivisme juridique :
« (1) Les lois sont réputées édictées par quelqu’un, en
position de commandement, elles sont donc identifiées
par leur pedigree.
(2) Elles sont réputées régir des dispositions non
équivoques.
(3) Si aucune réponse à la question posée ne paraît
contenue dans le droit en vigueur, alors le jugement de
l’affaire est remis au pouvoir discrétionnaire du
juge. »418
D’emblée, nous pouvons affirmer que ce n’est pas le
pedigree d’une loi qui permet de déterminer son sens, mais
bien l’interprétation. Une loi est d’abord un texte, rien
d’autre qu’une série d’énoncés linguistiques. Il ne peut
découler de ce texte aucune norme ni intention. « Un texte
de norme a besoin d’une interprétation avant toute chose
parce qu’il doit être appliqué à un cas concret. »419 Le texte
de norme n’est pas la norme, précise Müller. Il peut, au
mieux, constituer un point de départ dans le processus de
concrétisation de la norme ou de décision, mais il ne
saurait en rien contenir sa finalité. En somme, ce n’est
définitivement pas une quête de l’intention de l’auteur ou
du pedigree d’une loi qui mène à la découverte du sens
d’une loi. Quant au deuxième axiome positiviste, il se
déconstruit de lui-même, nous dit Dworkin. En effet, des
auteurs qui se réclament du positivisme juridique
reconnaissent que les lois, même les plus explicites,
conservent une structure ouverte qui pourrait mener à des
interprétations non prévues. L’idée même d’une structure
ouverte s’inscrit en opposition avec l’idéologie positiviste
traditionnelle, précise Ricœur.
Enfin, pour ce qui est du pouvoir discrétionnaire reconnu
au juge devant une obscurité de la loi, il mérite que nous
précisions certains éléments. Nous savons qu’
« [i]nterpréter c’est recréer »420
au sens où créer, c’est
d’abord « planifier et organiser afin de mettre en rapport et
maîtriser. C’est, en deux mots, mettre en œuvre tous les
moyens s’opposant au désordre et à l’accidentel. »421 De
cette façon, le juge n’est pas « un démiurge qui crée ex
nihilo, mais un artisan qui s’applique à donner des formes
plus parfaites aux formes caduques de la loi »422. Le pouvoir
discrétionnaire n’est pas un pouvoir arbitraire. Le juge
n’est pas le Législateur. C’est à partir des lois en vigueur
que le juge fonde son raisonnement et prend une décision.
Le juge est un interprète devant la loi en ce sens que
« l’interprétation fait de façon visible appel, dans la
reconstruction du sens du texte, à des rapports de
convenance, de justesse ou d’ajustement, entre
l’interprétation proposée d’un passage difficile et
l’interprétation de l’ensemble de l’œuvre. »423 Dworkin a
démontré comment la règle de la bonne correspondance
est transposable à la sphère juridique en utilisant le modèle
du texte narratif; en faisant des juristes des romanciers.
L’interprétation juridique applique ce que nous avons
appelé plus haut la règle herméneutique du « fit » qui
assure la cohérence de l’ensemble par le fait que la partie
s’interprète mutuellement avec le tout et vice versa.
Dworkin donne l’exemple d’un ouvrage où des narrateurs
doivent ajouter un chapitre à tour de rôle. Dans cette
chaîne, aucun des auteurs ne détermine seul le sens global
de l’ouvrage. Bien qu’aucune règle ne le précise, chacun
des auteurs présume ce sens dans l’optique de demeurer
cohérent. Cette idée de « fit » s’accomplit dans la
conjugaison entre les précédents d’une part et les
présumés en élaboration d’autre part. « Autrement dit,
d’un côté, le déjà jugé, de l’autre, le profil anticipé de
l’entreprise juridique considérée dans son historicité. »424
L’image du roman apportée et appliquée au monde
juridique par Dworkin est bonne, mais elle doit
impérativement se refuser à penser que la seule contrainte
d’un juriste réside dans ce qui a été écrit avant. Le juriste
doit être contraint par les récits historiques, mais en plus, il
doit considérer qu’il fait lui-même partie de l’histoire. « Le
devoir d’un juge est d’interpréter l’histoire juridique et non
pas d’en inventer une meilleure. »425 Le critère de la
cohérence constitue l’élément clé de toute argumentation
juridique.
La rectitude
Outre le critère de la cohérence, l’argumentation
juridique doit aussi prétendre à la rectitude afin de
parvenir au bout de la chaîne d’opérations de
l’interprétation. Comme la cohérence et la rectitude sont
impliquées dans la décision, elles y sont présumées,
l’argumentation à partir de laquelle la décision découle doit
nécessairement y prétendre. « [L]a rectitude est la
prétention qu’élève toute argumentation, dès lors qu’elle
admet le critère de la communicabilité universalisable. Un
bon argument est celui qui idéalement serait non
seulement compris, tenu pour plausible, mais acceptable
par toutes les parties concernées. »426 L’argument peut être
de différentes natures.
« Il peut s’agir d’un argument d’autorité : "J’ai raison
parce que je suis ton professeur et tu es mon élève
donc, taie toi." Il peut aussi s’agir d’un argument
purement subjectif et émotif : "Ça me plaît et ça ne se
discute pas." L’argument peut aussi tenir à la capacité à
argumenter et de raisonner de la personne en face de
moi, c'est-à-dire finalement, à une dimension
d’universalité qui nous est commune. Bien sûr, il s’agit
d’une universalité imparfaite et incomplète. Ce n’est pas
parfait, mais nous ne confondons pas les genres
d’arguments, nous faisons toujours une différence entre
l’argument d’autorité et l’argument rationnel. »427
Un argument rationnel n’implique pas une vérité, mais
exige toujours une validité ou une adhésion.
« L’argumentation ne vise pas exclusivement l’adhésion à
une thèse parce qu’elle est vraie. On peut préférer une
thèse à une autre parce qu’elle semble plus équitable, plus
opportune, plus utile, plus raisonnable, mieux adaptée à la
situation. »428 Une thèse peut être appropriée à une
occasion et ne plus convenir du tout à un autre moment.429
De la même façon, « une clé convient si elle ouvre la
serrure qu’elle est supposée ouvrir. »430 Cette convenance
dénote une capacité, celle de la clé à « fiter » et non pas
celle de la serrure.
Le juge a le pouvoir et le devoir de trancher des litiges. Il
doit appliquer la loi coûte que coûte. Il a des contraintes de
temps en plus d’avoir l’obligation de rendre un jugement,
peu importe les dispositions des lois. Un juge ne peut pas
s’abstenir de décider d’un litige. Il peut se récuser à
l’occasion, mais il sera alors simplement remplacé par un
autre juge portant la même robe. Une décision judiciaire ne
porte jamais sur une situation fictive. « Seul le cas concret
peut être décidé. »431 La décision doit trouver une
application dans le quotidien des parties impliquées. Elle
ne peut pas se contenter d’être l’expression de grands
principes ou de vœux pieux. Une décision judiciaire est
sollicitée par la situation concrète d’un différend. Il est bien
normal que son dénouement trouve une application tout
aussi tangible. Au final, la décision du juge doit reposer sur
des arguments. La prétention à la rectitude est sous-
entendue dans toutes les décisions judiciaires. Elle est
reconnue par toutes les parties impliquées; même la partie
perdante d’un procès admet cette prétention implicite.
« [S]i l’argumentation juridique n’avait pas pour horizon le
discours normatif général visant à la rectitude, aucun sens
ne pourrait être donné à l’idée d’argumenter
rationnellement. » 432
Il doit avoir une cohérence logique
entre les prémisses de départ et la conclusion finale. C’est
ce qu’Alexy a nommé la « justification interne ». Dès lors, il
est impensable de considérer le processus judiciaire
comme pouvant se réduire à imaginer un cas découlant
d’une règle, car ce sont les faits qui s’appliquent aux lois et
non le contraire. « Le juge doit toujours interpréter la loi
parce qu’il passe du général au particulier. »433 Il doit à la
fois reconnaître le caractère de la norme et le cas
particulier afin de les relier. Une décision judiciaire ne peut
donc pas naître d’une simple équation syllogistique, car
l’application d’une règle implique une opération complexe
nécessitant une interprétation de la norme et des faits, et
ce dans un ajustement mutuel. Cette dynamique
d’interdépendance est la même qui anime le débat
expliquer-comprendre que nous retrouvons dans l’étude
des textes généraux. Si nous transposons alors cette idée
au domaine juridique, nous constatons avec Ricœur que
« l’argumentation constitue la trame logique et
l’interprétation la trame inventive du processus aboutissant
à la prise de décision »434. Ceci laisse croire que la
dialectique explication-compréhension en herméneutique
générale trouve effectivement sa symétrie dans
l’enchevêtrement entre argumentation et interprétation en
herméneutique juridique.
Le juste
L’interprétation de la norme et l’interprétation des faits se
conditionnent mutuellement dans le cadre d’un procès.
« Ce rapport est une fusion entre la nature des choses (to
dikaion phusikon) et le droit positif (to dikaion nomikon) qui
fut dénommée « droit politique » (to dikaion politikon) par
Aristote. »435 La décision judiciaire est l’expression de ce
« droit politique », mais c’est aussi l’expression de la
justice. Cette dernière « fait partie intégrante du souhait de
vivre bien. […] Le souhait de vivre dans des institutions
justes ne signifie pas autre chose »436 et comme le souligne
Aristote, « dans ce qui est juste entre concitoyens, il y a,
d’un côté, ce qui est naturel et, de l’autre, ce qui est
légitime (ou selon les traductions, conventionnel). »437
Autrement dit, la décision judiciaire se veut une quête du
juste, un équilibre ou un rapport balancé entre les faits et
les lois, entre la communication sociale et le droit positif.
Cette relation d’implication mutuelle ne peut pas ne pas
être. Le juste naît de la dialectique sur la nature des choses
disputées. Il est davantage une recherche qu’une solution.
CONCLUSION
Andreï MAKINE
La musique d’une vie
À titre de conclusion, nous proposons une variation sur
les thèmes du droit et de la communication. Nous vous
présentons cinq façons différentes d’aborder la relation,
cinq regards possibles du même rapport, cinq angles ou
encore, cinq approches qui prouvent bien que dans cette
relation entre le droit et la communication, aucune des
parties n’est la cause de l’autre et aucune ne peut faire
l’économie de son « semblable ». Cette relation en est une
d’implication mutuelle et de solidarité qui est liée
fondamentalement au caractère social de la communication
et du droit. Cette relation est nécessaire, elle ne peut pas
ne pas être. C’est la magie de la vie sociale, car qu’importe
le lieu, la forme ou la manière dont cela va se passer,
l’essentiel c’est que quelque chose va se passer entre le
droit et la communication.
La communication pour le droit
Un gouvernement qui est légitime est celui qui représente
la volonté du peuple. Or, le peuple, c’est la communauté,
mais c’est d’abord et avant tout des personnes qui ont
ressenti le besoin et qui ont communiqué le désir de vivre
ensemble. Pour y arriver, elles ont discuté et se sont mises
d’accord afin d’ériger des institutions qui ont comme tâche
unique et complexe, la gestion de leurs pouvoirs joints. Ces
institutions ont eu la lourde corvée d’élaborer un système
afin d’ordonner la vie sociale. Ce sont les institutions qui se
sont faites créatrices de droit et non les individus eux-
mêmes. Cependant, afin d’être légitime aux yeux de tous, le
reflet de l’harmonie ou de l’entente originelle doit se
maintenir en permanence au sein des institutions qui ont
vocation de s’imposer aux membres du groupe. Comme la
société évolue et les temps changent, les institutions
doivent s’ajuster perpétuellement afin de demeurer en tout
temps une concrétisation de la volonté générale sans cesse
renouvelée. Cela constitue le gage de leur légitimité.
Une institution est légitime lorsqu’elle résulte
concrètement de la bonne entente entre les membres de la
communauté qui l’institue. Autrement dit, c’est le
fondement même de l’institution qui doit faire l’objet d’un
consensus et d’une négociation, et non seulement ce qui
émane de l’institution. Cette nécessité d’impliquer tout le
monde dans la négociation ne fait pas en sorte que le
système est parfait, mais il sera à tout le moins légitime.
L’opposition entre perfection et légitimation est du même
ordre que le rapport entre vérité et validité. Par
conséquent, le système démocratique et juridique qui
organise un État de droit ne prétend pas à la perfection. Il
est simplement le système le plus adéquat pour un groupe
dans un lieu donné. Il n’offre la promesse d’aucun salut. Il
s’affaire uniquement à représenter bon an mal an la volonté
du peuple le plus justement possible. Comme celle-ci
change au fil du temps, les institutions en place dans un
État de droit changent aussi. Elles nécessitent d’être
réajustées et ravisées constamment.
L’ordre social est construit par les institutions installées
au sein du groupe. Il n’est plus donné ni imposé par une
force extérieure. La transcendance divine issue des
sociétés anciennes s’est éclipsée et a laissé la place au
débat public et à une raison humaine négociée dans nos
sociétés modernes. L’ordre social est assuré par un
méticuleux système juridique. Ce dernier ne constitue pas
un élément fixe comme la majeure d’une équation
syllogistique. Il est altérable et malléable. Il fut à l’origine
le fruit d’une négociation, il demeure pour toujours
renégociable, voire continuellement renégocié. En somme,
nous ne risquons pas trop de nous tromper en affirmant
que c’est la communication entre les membres d’une
communauté qui permet la mise en place d’institutions
légitimes qui rendent possible une vie en société ordonnée
et paisible, comme si quelque part, c’était la
communication qui permettait le droit.
Le droit pour la communication
À la lumière de ce que nous avons évoqué dans notre
ouvrage, nous pouvons affirmer, en nous épargnant
quelques nuances et de manière non restrictive, mais sans
pour autant s’y méprendre, que le droit a essentiellement
une fonction d’ordonnancement dans la société. Aménagé
systématiquement, il structure et organise la vie des
membres d’une communauté. Enfin, c’est lui qui assure le
maintien de l’ordre et de la paix sociale. Sous ces allures, le
droit est un système juridique, un système de
représentation et d’organisation sociale. Sa structure
particulière permet une détermination et une séparation
des éléments. Il faut séparer les choses, car si tout est
fusionné et lié, rien n’est possible. L’absolu nous confronte
au néant et à la mort. Il faut créer un écart pour permettre
à la vie d’exister. Le droit insère un sujet dans une société
déjà ordonnée. Il identifie les sujets et marque les
différences. L’identification faite par le droit permet de
distinguer le mien du tien et inaugure l’altérité qui rend
possible les échanges et la communication.
Le droit permet le classement, l’identification et
l’ordonnancement, mais il institue aussi un cadre commun
à tous. Il s’érige en tiers ; il se fait institution. Le droit
permet d’entrer en relation en se présentant à la manière
d’un langage. Comme une langue constitue un cadre
commun à partir duquel toute communication est possible,
le droit n’achève pas les relations sociales, il pave plutôt la
voie à un monde de possibilités. Ce n’est que lorsque deux
personnes se mettent d’accord sur le sens des mots qu’ils
peuvent être utilisés sans restriction. De la même façon, ce
n’est que lorsque deux personnes partagent le même
souhait de vivre bien et en paix ; lorsqu’elles sont en
accord sur le sens des valeurs; lorsqu’elles se
reconnaissent mutuellement comme étant en mesure de
vivre ensemble; alors, c’est à ce moment-là que tout
devient possible, que la vie sociale peut s’accomplir. À quoi
bon vivre ensemble ou se parler, si on n’est pas fait pour
s’entendre. En somme, nous ne risquons pas trop de nous
tromper en affirmant que le droit met en place une
structure qui rend possible une grande communication
sociale, comme si quelque part, c’était le droit qui
permettait la communication.
Le droit des communications
Les libertés d’expression, de parole et de presse heurtent
sans cesse les structures rigides des États modernes qui ne
parviennent pas à s’adapter adéquatement aux réalités
contemporaines des technologies d’information et de
communication que sont la rapidité et l’accessibilité
globalisées. Les outils de communication d’aujourd’hui
permettent les échanges du sud au nord et de l’est à
l’ouest. Ils transforment l’échiquier mondial en un véritable
plancher de danse communicationnel où les informations
semblent de plus en plus circuler au rythme du baladi et de
la salsa qu’à celui de la valse. Les médias et l’internet font
voyager l’information d’un bout à l’autre de la planète. Or,
ce qui est acceptable à un endroit dans le monde ne l’est
pas nécessairement partout. Les chocs culturels sont très
nombreux. Le risque de conflits est présent et le besoin de
réguler les échanges l’est encore davantage. Les règles de
droit positif qui régissent les technologies d’information et
de communication sont souvent bafouées. Elles ne sont pas
respectées parce que la plupart du temps, elles sont
inadaptées. Plutôt que de favoriser les échanges, elles
nuisent et engendrent des malaises et des défaillances. Le
droit en vigueur dans un domaine à caractère hautement
innovateur comme celui des technologies d’information et
de communication prend trop de temps à changer. Il ne
parvient pas à suivre le rythme qui lui est imposé à tel
point que les règles sont pratiquement obsolètes au
moment où elles entrent en vigueur. La règle de droit
étatique ne s’avère plus être l’outil le plus adéquat pour
encadrer le domaine performant des technologies
d’information et de communication, car dans ce dernier,
c’est la pratique qui mène le bal.
La désuétude de la règle de droit et l’incapacité du
système qui l’a fait naître à suivre la cadence forcent les
acteurs du milieu des technologies d’information et de
communication à trouver des moyens alternatifs pour
assurer l’ordre. Plutôt que d’attendre l’aboutissement d’un
processus législatif lendore, ils s’autorégulent par des
conventions et des contrats qui naissent de la volonté des
parties et qui constituent en tout point, la loi des parties.
Ils vont même jusqu’à prévoir des méthodes de résolution
de conflits. Ces nouveaux modes de régulation et de
résolution de conflits entrent directement en compétition
avec les institutions étatiques traditionnelles. Les
institutions législatives et judiciaires doivent revoir et
redéfinir leur rôle dans nos sociétés parce que c’est
l’ensemble des rapports entre les citoyens qui a
concrètement changé. Elles ne sont pas vouées à
disparaître pour autant, mais leurs fonctions et leurs
utilités ont besoin d’être révisées et réaffirmées.
Les sociétés occidentales sont des sociétés de droit qui
mettent de l’avant le principe de la légalité. Qui trop
embrasse mal étreint, les lois ont été adulées, clamées,
voire élevées au-dessus de tout. Elles ont été déifiées, si
bien qu’il nous est désormais difficile de concevoir la vie en
société autrement que régulée par des lois et des
règlements. Les réalités technologiques du secteur des
communications imposent une vision qui va à l’encontre de
l’idéologie positiviste-légaliste voulant que l’ordre social ne
puisse être assuré que par les règles et les organes de
l’État. Le lien contractuel devient peu à peu le nouveau lien
social et ce constat nous force à devoir repenser le
juridisme en vigueur dans nos sociétés. Il faut adopter une
perspective plus large du droit et cesser de le voir
uniquement comme un ensemble de règles ou de lois. Les
effets des technologies d’information et de communication
sur le droit ne peuvent pas se régler en quelques
élaborations ou modifications de libellés législatifs. Ils
imposent l’adoption d’un nouveau cadre d’analyse.
L’avancement rapide des technologies d’information et de
communication a changé les rapports humains et a mis en
lumière la nécessaire implication de la communication dans
une analyse du droit et de la société. C’est là la preuve que
le droit est d’abord une affaire humaine et sociale, mais
aussi, et surtout, toujours une question de communication.
La communication du droit
Le droit fait partie de nos vies et pourtant, nous n’avons
pas toujours le loisir ni le plaisir de le comprendre. Il est là,
sous différentes formes ; il nous lie, il se vit et il se lit. En
effet, le droit s’offre à nous abondamment sous la forme de
textes, ce sont les lois et les règlements ; c’est le droit
positif. Ce dernier occupe une grande place et a la
tendance malicieuse de se prétendre être tout le droit. Or,
les lois est les règlements ne constituent que des mots sur
du papier, de la poésie étatique ou encore, un exercice de
style gouvernemental. Ils auront un sens juridique
uniquement lorsqu’ils auront été interprétés. Cependant, la
compréhension et l’interprétation d’un texte de loi ne sont
pas à la portée de tous. L’usage singulier de certains mots
communs, des tournures de phrase austères, des concepts
juridiques sous-entendus qui renvoient à d’autres ainsi que
la présence d’expressions et de locutions latines rendent la
lecture d’un texte juridique pénible et laborieuse pour un
non-initié. La première étape consiste à déchiffrer tout ce
charabia hermétique. Le décryptage est parfois impossible
pour certaines personnes. Quant aux lecteurs plus aguerris
pour qui la lecture du texte est possible, cette dernière ne
leur assure pas pour autant une bonne compréhension.
Pour bien saisir un texte de loi, il faut le confronter à un
cas concret. La meilleure façon de comprendre le droit est
encore de le vivre. En effet, il n’y a pas une meilleure
compréhension du droit que celle qui est faite par celui aux
prises avec une situation réelle de conflit. En peu de temps,
il deviendra maître de la situation. Le droit se situe dans la
réalité et dans l’action. Il doit se faire connaître sous son
vrai jour, celui de la pratique. Les règles et les procédures
sont les outils des juristes et non l’affaire des citoyens. Ce
qu’il faut à ces derniers, c’est le sentiment d’agir
conformément à la norme ; c’est une bonne pratique dans
la méconnaissance. Autrement dit, ce qui importe au
citoyen est la marche à suivre et non le positionnement de
la virgule dans un texte de loi. La règle demeure
néanmoins un proche parent de la pratique, mais la
pratique n’est pas la règle. Ce qui compte c’est le message
de la Loi et non celui des lois.
Ce qui paraissait loin hier se trouve aujourd’hui à nos
portes. Le développement et la démocratisation des moyens
de transport et des techniques d’information et de
communication sont responsables de l’avènement de
sociétés de plus en plus hétérogènes. La fin des distances
physiques nous a imposé de revoir notre approche des
distances culturelles. Le système juridique québécois est le
reflet de la société québécoise. Si cette dernière change,
son système juridique doit aussi changer. Autrement dit,
comme le visage de nos sociétés a changé, les systèmes
juridiques qui les organisent ont dû, eux aussi, s’adapter à
la réalité multiculturelle d’aujourd’hui. La vie dans nos
sociétés ne peut pas faire l’économie du droit. Cependant,
pour s’imposer, il doit être légitime aux yeux de ceux à qui
il s’impose. Cela comprend les citoyens de longue date et
les nouveaux arrivants. La paix sociale n’est possible que
dans la mesure où le système juridique l’assurant, l’assure
adéquatement. Chaque citoyen a le droit de savoir la
marche à suivre. Les institutions étatiques doivent
apprendre à faire passer le message du droit. C’est là la
preuve que la communication est d’abord une affaire
humaine et sociale, mais aussi, et surtout, souvent une
question de droit.
Le droit et la communication
Tous les jeux se ressemblent un peu. En effet, sans
exception, ils convient tous des joueurs, des objectifs, des
points, des gagnants et des perdants, un début et une fin.
Avant de jouer à un jeu, peu importe le jeu, il faut se mettre
d’accord sur la façon de jouer. Il est impératif d’établir au
préalable le cadre dans lequel le jeu sera possible. La
différence entre les jeux réside dans les règlements. Ce
sont eux qui déterminent l’identité du jeu et qui expliquent
comment y jouer. Les règlements varient selon le niveau,
l’expérience ou le nombre de joueurs, le lieu où le jeu va se
jouer et le temps dont disposent les joueurs. Bien qu’il y ait
des instructions, il n’existe pas une seule et unique manière
de jouer à un jeu. En effet, il y a plusieurs modes d’emploi
et de multiples façons de jouer à un même jeu. En somme,
les joueurs qui souhaitent jouer ensemble discutent et
s’entendent sur les règles du jeu dans lequel ils évolueront.
Cependant, les règles du jeu ne font pas tout le jeu. Ce
dernier n’est rien tant qu’il n’est pas joué. Les règlements
d’un jeu contiennent la marche à suivre et les principes
généraux du jeu. Ils ne peuvent pas prévoir tous les coups,
car toutes les situations d’un jeu ne sont pas prévisibles. Il
faut constamment réinterpréter les règlements à la lumière
d’une situation réelle de jeu. À l’instar de la vie en société,
le jeu est à la fois la structure et ce qu’il structure,
contenant et contenu ; à la fois les règles et la pratique,
rigide et flexible ; à la fois réglée et imprévisible, ordonnée
et floue. À la différence par contre, il n’y a pas de fin dans
ce grand jeu social, il n’y a que des changements de
joueurs. Chaque naissance s’inscrit au cœur d’une mêlée
perpétuelle. Les joueurs se suivent et se ressemblent.
La société moderne est nuancée à l’image de l’homme qui
la constitue et qui la détermine. Elle se fonde
simultanément sur l’impondérabilité de la communication
sociale et la rigueur du droit. Elle constitue une société
juridicommunicationnelle fondée sur le modèle du tribunal.
À la manière d’un juge, elle en quête d’un juste équilibre.
Le droit et la communication sont indissociables. Le droit,
c’est beaucoup plus qu’une loi. Il s’agit d’un cadre normatif
qui rend public ce qui ne doit pas rester privé ; c’est
pratiquement de la communication. En même temps, les
outils de communication, c’est de la représentation, des
systèmes qui rendent possible la discussion ; c’est
pratiquement comme le droit. Nous ne nous tromperions
probablement pas complètement si nous osions affirmer
rapidement que le droit, c’est de la communication et que
la communication, c’est du droit. Évidemment, nous ne le
ferons pas, car nous ne serions pas en mesure de prouver
l’équivalence hors de tout doute raisonnable et une telle
affirmation ne saurait pas se satisfaire d’une appréciation
fondée sur la base d’une prépondérance des probabilités.
Cependant, nous pouvons affirmer la nécessité de l’un pour
l’autre. Fusion ou confusion, et pourquoi pas tout
simplement institution. Cette dernière constitue le lieu de
rencontre privilégié entre le droit et la communication.
C’est là qu’ils pratiquent des échanges incessants, répétés
et constants dans une mise en scène savamment
orchestrée. Le droit et la communication s’appuient l’un
sur l’autre en alternance et en permanence. Ils se rendent
mutuellement nécessaires sans pour autant pouvoir
prétendre affirmer une prédominance de l’un sur l’autre.
Le droit et la communication sont toujours en quête d’un
juste équilibre.
in fine
Les programmes de formation juridique et d’accession à
la profession d’avocat mettent énormément d’emphase sur
l’apprentissage du droit positif. Il est vrai que ce qui fait un
bon juriste est la connaissance de la règle et de la
procédure, mais ce qui en ferait un meilleur, c’est la
connaissance et la prise en compte du contexte social du
droit. Il ne s’agit pas de changer l’un pour l’autre, mais de
trouver un juste équilibre. Le métier d’avocat ne consiste-t-
il pas après tout dans la pratique du droit ?
BIBLIOGRAPHIE
« D’où philosophes-tu? »
Entretiens personnels
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2010
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––––––––, The Calvin and Hobbes Tenth Anniversary Book, Kansas City, Andrews
McMeel Publishing, 1995, 208 pages.
1
Alain SUPIOT, Homo juridicus – Essai sur la fonction anthropologique du Droit
(Homo juridicus…), Paris, Seuil, 2005, p. 8.
2
L’attribution de la personnalité juridique et les droits de la personnalité sont
prévus aux articles 1 et 3 du Code civil du Québec : « Tout être humain possède
la personnalité juridique ; il a la pleine jouissance des droits civils. [art. 1] –
Toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tels le droit à la vie, à
l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, au respect et au nom, de sa
réputation et de sa vie privée. [art. 3] » dans C.c.Q., L.Q., 1991, c-64.
3
SUPIOT, Homo juridicus…, op. cit., p. 8.
4
Jean GRONDIN, Du sens de la vie – Essai philosophique (Du sens…), Montréal,
Bellarmin, 2003, p. 17.
5
Paul ATTALLAH, Théories de la communication – Histoire, contexte, pouvoir
(Théories…), 2e édition, Québec, Télé-Université-PUQ, 2000, p. 27.
6
Ludwig WITTGENSTEIN, Investigations philosophiques (Investigations…), dans L.
WITTGENSTEIN, Tractatus logico-philosophicus suivi de Investigations
philosophiques, Paris, Gallimard, 1986, p. 115 et ss., à la page 120. Une
nouvelle traduction de cet opus le plus déterminant de la deuxième manière
wittgensteinienne est disponible depuis quelques années sous le titre et la
référence suivante : Recherches philosophiques (Recherches…), Paris,
Gallimard, 2004, 369 pages, à la page 33.
7
Lucien FRANÇOIS, Le problème de la définition du droit – Introduction à un cours
d’évolution de la philosophie du droit à l’époque contemporaine (Le
problème…), Liège (Be), FDÉSSL, 1978, p. 71.
8
Yves WINKIN (dir. publ.), La Nouvelle communication (Nouvelle…), Paris, Seuil,
2000, p. 125.
9
Anton TCHEKHOV, « De l’amour », dans A. TCHEKHOV, Un royaume de femmes
suivi de De l’amour, Paris, Gallimard, 2009, p. 83, à la page 86.
10
Inspiré d’un dialogue entre les personnages de Guillaume et Alinardo dans
Umberto ECO, Le Nom de la rose (Rose…), Paris, Grasset, 1982, p. 327 à 330, à
la page 330.
11
Philippe CORCUFF, Les nouvelles sociologies – Constructions de la réalité
sociale, Paris, Nathan, 2002, p. 94.
12
Guy ROCHER, « Pour une sociologie des ordres juridiques » (Des ordres…),
dans Les Cahiers de Droit, Vol. 29, No 1, 1988, p. 91 à 120, à la page 97.
13
Tzvetan TODOROV, Mémoire du mal, Tentation du bien – Enquête sur le siècle
(Mémoire…), Paris, Robert Laffont, 2000, p. 18.
14
ROCHER, Des ordres…, loc. cit., p. 97.
15
La dichotomie naïve que nous proposons vise à ne pas perdre de vue notre
objectif principal qui est de problématiser la relation entre le droit et la
communication. Nous ne souhaitons pas ici, relancer un débat qui « peut en
effet laisser croire que l’on traite de deux conceptions [du droit] dont les
significations seraient absolument opposées, entre lesquelles on devrait
choisir : il faudrait se dire ou bien jusnaturaliste, ou bien positiviste [alors]
que : a) les expressions "jusnaturalisme" et "positivisme juridique" ont été
employées avec des significations si diverses que les rapports entre les deux
courants se placent sur des plans différents selon que l’une ou l’autre de ces
significations est en cause; b) ce n’est que dans un de leurs sens que ces
expressions constituent une véritable alternative. Ignorer ces divers plans
produit une curieuse conséquence : bien souvent, les arguments des deux
adversaires ne font que se croiser et, à la suite d’un duel mortel, ils sont tous
deux plus vivants qu’auparavant. » dans Norberto BOBBIO, Essais de théorie du
droit, Bruxelles/Paris, Bruylant/LGDJ, 1998, p. 39. Notre démarche vise plutôt à
susciter un intérêt pour un nouveau dualisme original (droit/communication) et
une nouvelle forme de discussions sur la société.
16
Michel VILLEY, La formation de la pensée juridique moderne : Cours d’histoire
de la philosophie du droit (La formation…), Paris, PUF, 2003, p. 508. L’ouvrage
didactique fut originalement publié en 1968 chez Montchrestien.
17
Paulo FERREIRA DA CUNHA, Droit et récit (Récit…), Québec, PUL, 2003, p. 13.
18
La loi (est) dure, mais (c’est) la loi. Cette maxime latine est très connue chez
les juristes, mais nous en trouvons d’autres variantes. Ainsi, nous aurions pu
opter pour Durum est, sed ita lex scripta est (Ceci est dur, mais telle est la loi
écrite) pour souligner, de la même façon, le caractère impératif de la loi dans
sa forme textuelle. Voir Albert MAYRAND, Dictionnaire de maximes et locutions
latines utilisées en droit (Maximes…), 3e édition, Cowansville (Qc), Yvon Blais,
1994, p. 119.
19
Charles PERELMAN, Logique juridique – Nouvelle rhétorique (Logique…), 2e
édition, Paris, Dalloz, 1999, p. 15. La 1ère édition qui date de 1979 a été publiée
sous le nom de Chaïm Perelman.
20
PERELMAN, Logique…, op. cit., p. 5.
21
VILLEY, La formation…, op. cit., p. 509.
22
PERELMAN, Logique…, op. cit., p. 17.
23
Stéphane BAUZON, Le métier de juriste – Du droit politique selon Michel Villey
(Métier…), Québec, PUL, 2003, p. 48.
24
VILLEY, La formation…, op. cit., p. 429.
25
« naturel et positif, norme-fait-valeur, normativiste-"judiciariste",
systématique-topique, branches du droit, sources du droit, etc. » dans FERREIRA
DA CUNHA, Récit…, op. cit., p. 24
26
François OST et Michel van de KERCHOVE, « De la scène au balcon. D’où vient
la science du droit ? », dans François CHAZEL et Jacques COMMAILLE (dir. publ.),
Normes juridiques et régulation sociale, Paris, LGDJ, 1991, p. 67 à 80, à la page
77.
27
Cité et traduit dans FERREIRA DA CUNHA, Récit…, op. cit., p. 23. Il n’est pas
complètement faux d’associer Salazar à cette maxime puisqu’il en a fait sa
ligne de conduite personnelle et l’a réemployée à plusieurs occasions. Elle
constitue même la devise de l’Institut des sciences biomédical (ICBAS) qui
porte son nom au Portugal. Ce centre de recherche est reconnu pour favoriser
l’interdisciplinarité auprès de ses chercheurs. Cela étant dit, la maxime
portuguaise « O Médico que só sabe Medicina nem Medicina sabe » est
habituellement attribuée à José de Letamendi (1828-1897), un prédécesseur de
Salazar.
28
Jean MARTIN, « La communication en quête d’un droit », dans Lucien SFEZ
(dir. publ.), Dictionnaire critique de la communication (Dictionnaire…), Tome 2,
Paris, PUF, 1993, p. 1213 à 1218, à la page 1213.
29
C’est pourquoi « Ellul veut le retour du sujet, de l’intention, du sens, de la
transmission (communication) au-delà de tous ces objets ou opérations » dans
Lucien SFEZ, Critique de la communication (Critique…), Paris, Seuil, 1992, p.
164. Voir aussi Jacques ELLUL, L’Empire du non-sens – L’art et la société
technicienne, Paris, PUF, 1980, p. 196.
30
Lucien SFEZ, Critique…, op. cit., p. 164.
31
Lucien SFEZ, La communication (La communication…), 8e édition, Paris, PUF-
Que sais-je ?, 2010, p. 5.
32
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 6.
33
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 9.
34
Dominique WOLTON, Il faut sauver la communication (Sauver…), Paris,
Flammarion, 2005, p. 25.
35
« No man is an Island », John DONNE, cité et traduit dans Yvon RIVARD,
Personne n’est une île, Montréal, Boréal, 2006, p. 7 et couverture.
36
VILLEY, La formation…, op. cit., p. 507.
37
Un « Mélanges » lui a d’ailleurs été dédié il y a quelques années. Ce dernier
a permis de constater le large éventail des influences sfeziennes dans l’étude
de la communication et des sciences politiques. « Sa Critique de la décision a
marqué la science politique en transformant l’analyse du processus de décision.
Son analyse de la Politique symbolique distingue les notions d’image et
d’opérations symboliques. Sa Critique de la communication débouche sur le
concept de "tautisme" pour marquer la confusion et la clôture technico-
médiatiques. Sa critique du Rêve biotechnologique et de l’utopie de La Santé
parfaite ouvre une réflexion sur les rapports qu’entretiennent Technique et
Idéologie et démonte les fictions techniciennes contemporaines. » dans Alain
GRAS et Pierre MUSSO (dir. publ.), Politique, Communication et technologies :
Mélanges en hommage à Lucien Sfez (Mélanges…), Paris, PUF, 2006,
couverture.
38
Il existe en vérité trois conceptions sfeziennes de la communication :
représentative, expressive et confondante. Cette dernière relève cependant de
la confusion des deux premières ; c’est la menace Frankenstein. « Ici, la
communication n’est plus que la répétition imperturbable du même (tautologie)
dans le silence d’un sujet mort, ou sourd-muet, enfermé dans sa forteresse
intérieure (autisme) [ ; tautisme] » dans SFEZ, La communication…, op. cit., p.
88 à 120, à la page 119. Nous ne tiendrons pas compte de cette troisième
conception aux fins de notre analyse. Nous explorerons uniquement les
conceptions expressive et représentative.
39
La rencontre avec Sfez a eu lieu à son bureau de l’Université Paris 1
Panthéon-Sorbonne au mois de juin 2005. Nous avions convenu d’un entretien
dans le cadre d’un stage de recherche alors que nous poursuivions nos études
de Maîtrise en Communication (M.A.) à l’Université du Québec à Montréal
(2004-2007). L’entretien avait pour objectif d’enrichir nos connaissances
livresques sur la communication et amorcer un travail de problématisation de
la relation entre le droit et la communication.
40
Sfez, La communication…, op. cit., p. 48.
41
Romain GARY, Les cerfs-volants, Paris, Gallimard, 1983, p. 332 ; repris dans
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p. 234. Au surplus, « rien n’est blanc ou noir et
[…] le blanc, c’est souvent le noir qui se cache et le noir, c’est parfois le blanc
qui s’est fait avoir » dans Romain GARY (Émile AJAR), La vie devant soi (La vie…),
Paris, Mercure de France-Folio, 1975, p. 84.
42
L’échec répété des communications amène à penser l’incommunication
comme l’obligation de « respecter l’autre, comprendre sur quoi repose l’altérité
[…] admettre la liberté de l’autre, avec ses différences et ses identités. » dans
Dominique WOLTON, « Penser l’incommunication », dans D. WOLTON, Sauver…,
op. cit., p. 139 à 173, à la page 139.
43
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 53.
44
Lucien SFEZ, Critique de la décision (Décision…), Paris, PFNSP, 1992, p.86.
45
Hannah ARENDT, Condition de l’homme moderne (Condition…), Paris,
Calmann-Lévy, 1983, p. 241.
46
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 57.
47
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 45.
48
Expression utilisée par Jacques ELLUL dans Propagandes, Paris, A. Colin,
1963; reprise et citée dans Sfez, Critique…, op. cit., p. 161. L’ouvrage d’Ellul fut
repris intégralement en 1990 aux Éditions Économica.
49
Stuart HALL, « Codage/décodage » (Codage…), dans Réseaux, No 68, CNET,
1994, p. 27 à 39, à la page 36.
50
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 61.
51
Bjarne MELKEVIK, « À propos de Marx et sa conception du droit :
intersubjectivité, matérialité et normativité » dans Cahiers de critique du droit,
No 2, 1989, p. 3 à 16, tel que repris dans B. MELKEVIK, Réflexions sur la
philosophie du droit (Réflexions…), Québec/Paris, PUL/L’Harmattan, 2000, p.
152 à 169, à la page 164. Ce dernier ouvrage fut intégralement repris en 2010
dans un assemblage original. Voir B. MELKEVIK, Philosophie du droit – Volume 1
(Volume 1…), Québec, PUL, 2010, p. 239 à 450.
52
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 87.
53
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 236. Sur le modèle orchestral de la
communication, voir WINKIN, Nouvelle…, op. cit., p. 25 et 26.
54
Albert E. SCHEFLEN, Communication Structure : Analysis of a Psychotherapy
Transaction, 2e édition, Bloomington/London, Indiana University Press, 1973, p.
181 ; tel que traduit et cité dans WINKIN, Nouvelle…, op. cit., p. 25.
55
Gilles COUTLÉE, « Tautisme et communication organisationnelle », dans GRAS
et MUSSO (dir. publ.), Mélanges…, op. cit., p. 269 à 275, à la page 272.
56
« [J]’exprime le monde qui m’exprime » dans SFEZ, La communication…, op.
cit., p. 87.
57
WINKIN, Nouvelle…, op. cit., p. 26. Voir également à la page 14 pour un bref
survol de l’évolution des sens donnés au mot « communication ».
58
La symétrie n’existe pas, mais il faut tout au moins admettre que la
ressemblance est séduisante. Le parallélisme étymologique entre les
expressions « communion », « communication sociale », « communauté » et
« droit commun » a encouragé notre démarche et nos efforts de rapprochement
entre le droit et la communication.
59
Supra, note 39.
60
Entretien personnel avec Lucien SFEZ (Entretien…), Paris, Université Paris 1-
Panthéon-Sorbonne, le 15 juin 2005.
61
Notre analyse sur Descartes et Spinoza trouve sa source dans les propos de
Sfez tenus lors de notre entretien ainsi que dans ses ouvrages. Il ne s’agit pas
d’une étude exhaustive de l’un ou de l’autre des auteurs. Le portrait que nous
en dressons glisse volontairement sur les détails et nous aide simplement à
comprendre plus efficacement les modèles de la représentation et de
l’expression chez Sfez.
62
SFEZ, Entretien…, op cit.
63
SFEZ, Entretien…, op cit.
64
SFEZ, Entretien…, op cit.
65
SFEZ, Entretien…, op cit.
66
SFEZ, Entretien…, op cit.
67
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 73.
68
Stamatios TZITZIS, La personne – Criminel et victime (La personne…), Québec,
PUL, 2004, p. 160.
69
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 56.
70
SFEZ, Entretien…, op. cit.
71
SFEZ, Entretien…, op. cit.
72
Tzvetan TODOROV, Le jardin imparfait – La pensée humaniste en France (Le
jardin…), Paris, Grasset, 1998, p. 81.
73
Bjarne MELKEVIK, « Le modèle communicationnel en science juridique :
Habermas et le droit », dans Les Cahiers de Droit, Vol. 31, No 3, 1990, p. 901 à
915, tel que repris dans Horizons de la philosophie du droit (Horizons…),
Québec/Paris, PUL/L’Harmattan, 1998, 93 à 106, à la page 95; repris dans la
Collection Dikè au PUL en 2004 et plus récemment, dans MELKEVIK, Volume 1…,
op. cit., p. 1 à 237.
74
MELKEVIK, Horizons…, op. cit., p. 95.
75
Bjarne MELKEVIK, Rawls ou Habermas – Une question de philosophie du droit
(Rawls…), Québec/Bruxelles, PUL/Bruylant, 2001, p. 15 ; repris intégralement
dans MELKEVIK, Volume 1…, op. cit., p. 451 à 649.
76
MELKEVIK, Horizons…, op. cit., p. 96.
77
Jürgen HABERMAS, Vérité et justification (Vérité…), Paris, Gallimard, 2001,
p. 52.
78
MELKEVIK, Horizons…, op. cit., p. 96.
79
HABERMAS, Vérité…, op. cit., p. 52.
80
« L’anglais aime dire qu’une chose "fait du sens" (it makes sense). En
français, on dit plus délicatement qu’elle en a, qu’elle y a part, au sens partitif
du terme, qui présuppose que l’ordre du sens ne relève pas de la simple
fabrication. » dans GRONDIN, Du sens…, op. cit., p. 49, note 2.
81
Gabriel GARCÍA MÁRQUEZ, Cent ans de solitude, Paris, Seuil, 1968, p. 94.
82
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 154.
83
Le Traité de Westphalie a mis fin à la Guerre de Trente ans (1618-1648),
dans Jean-Maurice ARBOUR et Geneviève PARENT, Droit international public
(D.i.p.…), 5e édition, Cowansville (Qc), Yvon Blais, 2006, p. 20. Une 6e édition
est à paraître à l’automne 2012.
84
« Coutume n.f. » dans Hubert REID, Dictionnaire de droit québécois et
canadien (Dictionnaire…), 4e édition, Montréal, Wilson & Lafleur, 2010, p.164.
85
Herbert L. Adolphus HART, Le concept de droit (Concept…), 2e édition,
Bruxelles, FUSL, 2005, p. 109.
86
HART, Concept…, op. cit., p. 109.
87
Pierre BOURDIEU, Choses dites (Choses…), Paris, Minuit, 1987, p. 81.
88
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 157.
89
ARENDT, Condition…, op. cit., p. 42-43
90
Jean-Claude GUILLEBAUD, Le goût de l’avenir, Paris, Seuil, 2003, p. 235.
91
SUPIOT, op. cit., p. 279
92
Stamatios TZITZIS, La Personne, l’humanisme, le droit (Humanisme…),
Québec, PUL, 2001, p. 36.
93
« Première étape dans la mise en application en France de la solution finale,
le port de l’étoile jaune est instauré dès le mois de juin 1942, par la 8e
ordonnance du commandement militaire allemand. Outre l’humiliation et la
peur, cette mesure constitue une mise à l’épreuve des rapports des Juifs avec la
société française : le port de la "Yellow Star" revient à annoncer aux voisins,
aux commerçants, aux passants que l’on croise dans la rue, qu’on est juif, qu’on
est un paria. Obligatoire pour tous les Juifs âgés de plus de six ans, l’étoile doit
être en tissu jaune solide et porter en caractères noirs l’inscription "Juif"; elle
doit avoir la dimension de la paume d’une main et les contours noirs; enfin, elle
doit être portée, solidement cousue, bien visiblement sur le côté gauche de la
poitrine à partir du 7 juin 1942. » dans Gilles VERLANT, Gainsbourg, Paris, Albin
Michel, 2000, p. 53. Alors qu’il s’appelait encore Lucien Ginzburg, Serge
Gainsbourg a porté son étoile jaune. Cet épisode lui inspirera plus tard la
chanson Yellow Star qui paraît sur l’album Rock Around the Bunker en 1975 sur
étiquette Philips. La chanson souligne la difficulté de vivre en société lorsqu’on
est frappé d’ostracisme : « J’ai gagné la Yellow Star/Je porte la Yellow
Star/Difficile pour un Juif/La loi du Struggle for life/ Quand il a la Yellow
Star/Yellow Star/Oh yeah ! » dans Serge GAINSBOURG, Dernières nouvelles des
étoiles – L’intégrale, Paris, Librairie Plon, 1994, p. 247.
94
L’organisation de la justice se fait souvent taxer d’offrir un système à deux
vitesses : une pour les riches et l’autre pour les pauvres. Si cette distinction a
parfois effectivement lieu, elle ne constitue pas une différenciation fondée à la
base entre les individus. Dans une société de droit, les riches et les pauvres
demeurent égaux devant la Loi. Certes, le système n’est pas parfait, mais ceci
relève d’un autre niveau d’analyse qui pourrait davantage être liée à la façon
de définir les sujets et à penser les droits de chacun en dehors des multiples
forces externes qui animent les rapports entre les individus.
95
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 15.
96
Pierre LEGENDRE, L’empire de la vérité – Introduction aux espaces
dogmatiques industriels – Leçons II (L’empire…), 2e édition, Paris, Fayard, 2001,
p. 51.
97
SUPIOT, Homo juridicus…, op. cit., p. 8.
98
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 9
99
Paul RICŒUR, Le Juste (Le Juste…), Volume 1, Paris, Esprit, 1995, p. 30.
100
ARENDT, Condition…, op. cit., p. 238.
101
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 55.
102
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 73.
103
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 40.
104
HABERMAS, Vérité…, op. cit., p. 46.
105
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 33.
106
Fernand MORIN, Pourquoi juge-t-on comme on juge? – Bref essai sur le
jugement (Jugement…), Montréal, Liber, 2005, p. 10, faisant probablement
référence à ce célèbre passage de Proust : « Et à la mauvaise habitude de
parler de soi et de ses défauts il faut ajouter, comme faisant bloc avec elle,
cette autre de dénoncer chez les autres des défauts précisément analogues à
ceux qu’on a. Or, c’est toujours de ces défauts-là qu’on parle, comme si c’était
une manière de parler de soi, détournée, et qui joint au plaisir de s’absoudre
celui d’avouer. D’ailleurs il semble que notre attention, toujours attirée sur ce
qui nous caractérise, le remarque plus que toute autre chose chez les autres.
Un myope dit d’un autre : "Mais il peut à peine ouvrir les yeux"; un poitrinaire
a des doutes sur l’intégrité pulmonaire du plus solide; un malpropre ne parle
que des bains que les autres ne prennent pas; un malodorant prétend qu’on
sent mauvais; un mari trompé voit partout des maris trompés; une femme
légère, des femmes légères; le snob, des snobs. » dans Marcel PROUST, « À
l’ombre des jeunes filles en fleurs – Deuxième partie/Noms de pays : le pays »,
dans M. PROUST, À la recherche du temps perdu, Tome 1 – « Du côté de chez
Swann et À l’ombre des jeunes filles en fleurs », Paris, France Loisirs, 1999,
p. 699 et ss., à la page 809.
107
TODOROV, Le jardin…, op. cit., p. 25.
108
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 40
109
Il ne faut pas confondre la « personne » et la personnalité juridique. Celui
qui a la personnalité juridique est porteur d’obligation, c’est un sujet de droit.
La personne morale par exemple a la personnalité juridique, mais elle ne
constitue pas une personne au sens d’un prosôpon.
110
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 40
111
WOLTON, Sauver…, op. cit., p. 20.
112
TZITZIS, La personne…, op. cit., p. 42
113
Entretien personnel avec Tzvetan TODOROV (Entretien…), Paris, École des
Hautes Études en Sciences Sociales, le 16 juin 2005.
114
Nous nous joignons à Ricœur qui se joint lui-même à Jean-Marc Ferry pour
« désigner du terme d’"ordres de reconnaissance" les grandes organisations
qui structurent l’interaction : systèmes techniques, systèmes monétaires et
fiscaux, systèmes juridiques, systèmes bureaucratiques, systèmes
pédagogiques, systèmes scientifiques, systèmes médiatiques, etc. », dans
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 35-36; Jean-Marc FERRY, Les puissances de
l’expérience, Volume 2 – « Les ordres de la reconnaissance », Paris, Cerf, 1991,
470 pages, p. 7 à 115.
115
« Contrat n.m. » dans REID, Dictionnaire…, op. cit., p. 142.
116
Les articles 1434 et 1458 du Code civil du Québec veillent à assurer le
respect des engagement et la stabilité des contrats : « Le contrat valablement
formé oblige ceux qui l’ont conclu non seulement pour ce qu’ils y ont exprimé,
mais aussi pour tout ce qui en découle d’après sa nature et suivant les usages,
l’équité ou la loi. » [art. 1434] Au surplus, « Toute personne a le devoir
d’honorer les engagements qu’elle a contractés. » [art. 1458] dans C.c.Q., L.Q.,
1991, c-64.
117
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 37.
118
L’apatridie (heimatlosat) souligne l’état d’une personne dépourvue d’une
personnalité juridique attribuée par un État. L’apatride (heimatlos) est sans
attache, il n’a pas de nationalité. Il est le ressortissant d’aucun État à la
différence d’un réfugié par exemple, qui conserve toujours sa nationalité peu
importe où il se trouve.
119
GARY, La vie…, op. cit., p. 49.
120
Respectivement les articles 15 et 6 de la Déclaration Universelle de droits de
l’Homme adoptée et proclamée par l’Assemblée générale dans sa résolution
217 A (III) du 10 décembre 1948.
121
ARBOUR et PARENT, D.i.p.…, op. cit., p. 477. Jus ou jure sanguinis signifie « par
le droit du sang »; c’est la règle selon laquelle la nationalité est déterminée par
celle des parents. Jus soli veut dire « par le droit du sol ou du territoire »; c’est
la règle selon laquelle la nationalité découle du lieu de naissance; dans
MAYRAND, Maximes…, op. cit., p. 258-259.
122
Ce sont des changements politiques qui ont obligé Viktor Navorski, le
personnage interprété par Tom Hanks dans le film The Terminal réalisé par
Steven SPIELBERG en 2004, à devoir rester dans la zone internationale de
l’aéroport new yorkais où il est arrivé. Navorski est empêché d’entrer sur le
territoire américain du fait que son pays, suite à un conflit pendant son transit,
n’existe plus sur la scène internationale. Ayant la nationalité d’un pays qui n’est
plus reconnu et n’étant pas davantage reconnu par le pays hôte, le voyageur
désormais sans patrie se trouve trappé dans un univers flou qui est tout
simplement intenable. Cette comédie romantique est inspirée de l’histoire vraie
de Mehran Karimi Nasseri (Sir Alfred Mehran) qui a demeuré près de deux
décennies dans le terminal Roissy de l’Aéroport Charles-De-Gaulle de Paris;
dans Alfred MEHRAN et Andrew DONKIN, The Terminal Man, Londres, Corgi, 2004,
253 pages. Son récit a également trouvé une autre interprétation
cinématographique, cette fois-ci en France et dix ans plus tôt, dans le film
Tombés du ciel de Philippe LIORET.
123
ARBOUR et PARENT, D.i.p.…, op. cit., p. 477; Convention relative au statut des
apatrides, 6 juin 1960, R.T.N.U., vol. 360, p. 131.
124
ARBOUR et PARENT, D.i.p.…, op. cit., p. 478. À titre d’exemple, conformément
à la Convention des Nations Unies sur la réduction de l’apatridie, 13 décembre
1975, R.T.N.U., vol. 989, p. 175; et la Convention sur la nationalité de la femme
mariée de 1957, 11 août 1958, R.T.N.U., vol. 309, p. 67.
125
Ravault fut notre interlocuteur privilégié pendant près de trois ans. En plus
de nous avoir enseigné, il a codirigé, avec Charles Perraton, la rédaction du
mémoire que nous avons déposé dans le cadre de notre Maîtrise en
communication à l’UQAM. Ses nombreux commentaires et analyses ont
largement contribué à nos efforts de problématisation de la relation entre le
droit et la communication.
126
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 78. C’est le modèle de la
communication de Barnlund dont il est question ici. Ce dernier accorde une
très grande importance aux conditions de la réception des messages. De cette
façon, le sens n’est pas reçu par les destinataires en toute impunité. Au
contraire, il est pleinement inventé par eux. Le récepteur est responsable du
sens. Barnlund et son modèle s’inscrivent ainsi en opposition à une vision
représentative de la communication. Voir Dean C. BARNLUND, « A Transactional
Model of Communication », dans Kenneth K. SERENO et C. David MORTENSEN (dir.
publ.), Foundations of Communication Theory, New York, Harper & Row, 1970,
p. 83 à 102.
127
Hall distingue trois positions à partir desquelles peut s’effectuer un
décodage : 1. La position dominante-hégémonique – Elle implique une
compréhension et une acception sans restriction par le récepteur. Cette
position est fréquente lorsque l’émetteur et le récepteur sont issus d’un même
milieu, qu’ils partagent les mêmes codes de référence ou, dans un langage
bourdieusien, qu’ils ont des habitus semblables. 2. La position négociée – Elle
signifie elle aussi que le récepteur comprend et accepte, mais cette fois-ci, il
évoque des raisons différentes ou bien il conserve une certaine méfiance. 3. La
position contraire – Celle-ci s’inscrit globalement à l’opposé de ce que
l’émetteur voulait dire. Cette position peut amener l’émetteur à devoir revoir
sa production en totalité ou en partie. Évidemment, ces trois positions ne
peuvent constituer que des types idéaux, car il y autant de possibilités de
décoder un message qu’il y a de messages et de récepteurs. dans HALL,
Codage…, loc. cit., p. 37-38.
128
La communication a le dos large. Les études qui se réclament d’elle traitent
d’une variété de sujets allant des médias, au cinéma, à la télévision, à
l’information, aux organisations et réseaux sociaux, à internet et aux jeux
vidéo; elles se confondent parfois dans les Lettres, les langues et le
journalisme; elles font dans la production et la diffusion de produits
communicationnels; elles proposent aussi des analyses à caractère
sociologique, sémiologique ou philosophique. Toutes ces perspectives de
recherche sont valables. Elles sont complémentaires dans notre quête de
connaissances sur la communication. Cependant, il ne faudrait pas privilégier
des approches (plus lucratives) au détriment des autres. Une discussion
épistémologique sur l’étude de la communication s’impose dans nos
universités. La Faculté de communication de l’Université du Québec à Montréal
s’est faite proactive. Après s’être détachée des Lettres au milieu des années
2000, la Faculté a scindé ses horizons de recherche et a créé en son sein, le
Département de communication sociale et publique, l’École des médias et
l’École de langues. Sur le questionnement épistémologique dans les études en
communication, voir entre autres : René-Jean RAVAULT, « "Étudier la
communication" ou pratiquer "les sciences de l’information et de la
communication" ? » ; Gaby HSAB, « Une épistémologie de la communication,
pour quoi faire ? » ; Serge PROULX, « Penser la conception et l’usage des objets
communicationnels », dans Johanne SAINT-CHARLES et Pierre MONGEAU (dir.
publ.), Communication : horizons de pratiques et de recherche, Montréal, PUQ,
2005, p. 7 à 28; p. 53 à 70; p. 297 à 318.
129
René-Jean RAVAULT, « Défense de l’identité culturelle par les réseaux
traditionnels de "coerséduction". » (Défense…), dans International Political
Science Review, Vol 7, No 3, juillet 1986, p. 251 à 280, à la page 252.
130
Lee THAYER, Communication and Communication Systems in Organization,
Management and Interpersonal Relations (Systems…), Homewood (Ill.), R. D.
Irwin, 1971, p. 123. [Notre traduction]
131
Voir Wilbur SCHRAMM, Men, Messages and Media : A Look at Human
Communication, New York, Harper & Row, 1973, 341 pages. La deuxième
édition de cet ouvrage est disponible sous W. SCHRAMM et William E. PORTER,
Men, Women, Messages, and Media : Understanding Human Communication, 2e
édition, New York, Harper & Row, 1982, 278 pages.
132
Voir Edward A. SHILS et Morris JANOWITZ, « Cohesion and disintegration in
the Wehrmacht in World War II », dans Bernard BERELSON et M. JANOWITZ (dir.
publ.), Reader in Public Opinion and Communication, New York, Free Press,
1966, p. 407-420. La 3e édition des travaux de Shils et Janowitz sont publiés
sous « Impact of Allied Propaganda on Wehrmacht Solidarity in World War II »
dans M. JANOWITZ et Paul. M. HIRSCH, Reader in Public Opinion and Mass
Communication, 3e édition, New York, The Free Press, 1981, p. 341 à 347.
133
Ravault, Défense…, loc. cit., p. 258; voir THAYER, Systems…, op. cit. ; Watson
DUNN, Advertising, Its Role in Modern Marketing, New York, Holt, Rinehart and
Winston, 1969, 629 pages. ; Joseph T. KLAPPER, The Effects of Mass
Communication, New York, Free Press, 1960, 302 pages.
134
Inspiré du proverbe camerounais : « You can bend a tree or orient its course
only when it is very young. » dans Tokunbom ADELEKAN , African Wisdom, Valley
Forge (PA), Judson Press, 2004, p. 76. Dans le même esprit : « Donne de bonnes
habitudes au jeune homme en début de carrière; même devenu vieux, il ne s’en
départira pas. » dans « Les Proverbes 22, 6 », dans COLLECTIF, La Bible –
Traduction œcuménique (La Bible…), 10e édition, Paris, S.B.F./Cerf, 2004, p.
1604.
135
René-Jean RAVAULT, « La réception des communications organisationnelles
dans le contexte de la mondialisation. » (Réception…), dans Contributions
introductives au Colloque du C.E.R.C.O.R. : Les recherches sur la communication
organisationnelle en débat, Université de Rennes 2, 29-30 novembre et 1er
décembre 2001, p. 74 Bis à 79, à la page 75 Bis.
136
Le néologisme employé par Ravault tient à l’assemblage des mots
« coercition » et « séduction ». Avec cet oxymore, il tente de « concilier deux
thèses par lesquelles la sociologie s’est efforcée d’expliquer le processus de
socialisation des individus ou de reproduction culturelle de la société. La notion
de coercition est effectivement empruntée à la sociologie durkheimienne qui
insiste sur les rapports de force et d’autorité contraignant l’enfant à adopter
les normes, valeurs et croyances de la communauté qui l’a vue naître. Tandis
que la notion de séduction se rapproche plus des thèses de Tarde sur la
socialisation par imitation et amour des parents, thèses qui sont aussi
compatibles avec les positions freudiennes sur ce sujet. » dans RAVAULT,
Réception…, loc. cit., p. 78 (note 3b). Voir également : RAVAULT, Défense…, loc.
cit., p. 259.
137
La gouvernance rationnelle universelle implique une culture étatique, une
expansion planétaire des méthodes managériales et un culte de la démocratie,
dans Pierre LEGENDRE, « Préface à la deuxième édition » (Préface…), dans P.
LEGENDRE, Le désir politique de Dieu – Étude sur les montages de l’État et du
Droit – Leçons VII (Le désir…), 2e édition, Paris, Fayard, 2005, p. I à IX, à la page
II. L’ouvrage original est paru en 1988, mais pour reprendre les mots de
Legendre, la deuxième édition n’a pas subi de retouches de fond. Ce faisant,
nous avons tenu à distinguer la préface de l’œuvre original afin de marquer la
différence entre les deux époques de rédactions.
138
LEGENDRE, Préface…, op. cit., p. II.
139
René-Jean RAVAULT, « Incommunicable américanité », dans Cahiers de
recherche sociologique, No 15, automne 1990, p. 53 à 90, à la page 53.
140
LEGENDRE, Préface…, op. cit., p. II.
141
René-Jean RAVAULT, «Is there a Bin Laden in the Audience?, Considering the
Events of September 11 as a possible Boomerang Effect of the Globalization of
US Mass Communication. », dans Prometheus, Vol. 20, No 3, 2002, page 295 à
300.
142
Pour le plaisir et pour mieux comprendre l’idée d’arrogance que nous
évoquons, voici une retranscription « non officielle » d’une communication
radio entre les autorités maritimes canadiennes et un navire américain en
1995 : « Américains : Veuillez dévier votre route de 15° nord pour éviter une
collision. À vous. Canadiens : Veuillez plutôt dévier votre route de 15° sud pour
éviter une collision. À vous. Américains : Ici le capitaine d’un navire des forces
navales américaines. Je répète : veuillez modifier votre course. À vous.
Canadiens : Non, veuillez, vous, déviez votre course, je vous prie. À vous.
Américains : Ici c’est le porte-avions USS Lincoln, le second navire en
importance de la flotte navale des Etats-Unis d’Amérique. Nous sommes
accompagnés par trois destroyers, trois croiseurs et un nombre important de
navires d’escorte. Je vous demande de dévier votre route de 15° nord ou des
mesures contraignantes vont être prises pour assurer la sécurité de notre
navire. À vous. Canadiens : Ici c’est un phare. À vous. Américains : Silence. »
dans Jean-Paul DUBOIS, Une vie française, Paris, Seuil/l’Olivier, 2004, p. 379-380.
Cette histoire circule depuis plusieurs années déjà, mais l’événement n’a
jamais été confirmé par les autorités américaines. En fait, il nous importe peu
de savoir si la conversation a bel et bien eu lieu. Le récit a tellement été repris
qu’il fait désormais partie de la culture générale (nous tirons d’ailleurs le récit
d’un roman). Il se veut le reflet de la perception que beaucoup avait de
l’Amérique à une époque où nous pouvions encore lui reprocher ses tentatives
impérialistes.
143
Le surcode de Sfez ne doit pas du tout être confondu avec le surcode
deleuzien qui évoque, quant à lui, la perspective d’une domination d’un super-
code sur les autres codes; d’un surcodage despotique. « Tous les flux codés de
la machine primitive sont maintenant poussés jusqu’à une embouchure, où la
machine despotique les surcode. Le surcodage, telle est l’opération qui
constitue l’essence de l’État […] Les castes sont inséparables du surcodage, et
impliquent des “classes” dominantes qui ne se manifestent pas encore comme
classes, mais se confondent avec un appareil d’État. […] C’est le surcodage qui
destitue la terre au profit du corps plein déterritorialisé, et qui, sur ce corps
plein, rend le mouvement de la dette infini. » dans Gilles DELEUZE et Félix
GUATTARI, Capitalisme et schizophrénie, Tome 1 – « L’Anti Œdipe », Paris, Minuit,
1972, p. 236 ; Voir aussi p. 227 à 236 et p. 285 à 312.
144
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p.96.
145
SFEZ, Décision…, op. cit., p. 358.
146
SFEZ, Décision…, op. cit., p. 431.
147
René-Jean RAVAULT, « Penser la décision et critiquer la communication »
(Penser…), dans GRAS et MUSSO (dir., publ.), Mélanges…, op cit., p. 255 à 267, à
la page 257.
148
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 45.
149
Il poursuit en soulignant que « [c]’est l’effort conjugué de l’auteur et du
lecteur qui fera surgir cet objet concret et imaginaire qu’est l’ouvrage de
l’esprit. » dans Jean-Paul SARTRE, Qu’est-ce que la littérature ?, Paris, Gallimard,
1988, p. 50.
150
Paul RICŒUR, Du texte à l’action – Essais d’herméneutique II (Du texte…),
Paris, Seuil, 1986, p. 155.
151
Les dix droits imprescriptibles du lecteur sont : « le droit de ne pas lire, de
sauter des pages, de ne pas finir un livre, de relire, de lire n’importe quoi, au
bovarysme, de lire n’importe où, de grappiller, de lire à haute voix, de nous
taire. » dans Daniel PENNAC, Comme un roman, Paris, Gallimard, 1992, p. 147 et
ss.
152
RAVAULT, Défense…, loc. cit., p. 260. Ravault relève et résume ici les
observations de Todorov et de Barthes sur la lecture. Voir Tzvetan TODOROV,
Critique de la critique – Un roman d’apprentissage, Paris, Seuil, 1984, aux pages
74 et 75 ; Roland BARTHES, Essais critiques, Paris, Seuil, 1981, aux pages 140 et
149.
153
Gilles THÉRIEN, « Pour une sémiotique de la lecture. » (Lecture…), dans
Protée, Vol. 18, No 2, 1990, p. 67 à 80, à la page 76; voir aussi Gérard VINCENT,
L’histoire de l’Homme racontée par un chat (Chat…), Paris, Quai Voltaire, 1992,
p. 12.
154
WOLTON, Sauver…, op. cit., p. 33-34.
155
LEGENDRE, Préface…, op. cit., p. III.
156
Nous sommes habitués aux récits européens et américains sur la modernité.
Pour un regard différent sur la Révolution française et les changements
idéologiques apportés par les Lumières, voir Alejo CARPENTIER, Le Siècle des
Lumières (Siècle…), Paris, Gallimard, 1962, 464 pages. Dans ce roman,
Carpentier nous fait découvrir « la Révolution sous un aspect peu connu, celui
qu’elle prit aux Antilles, à Cuba, à la Guadeloupe et dans les Guyanes. Certes
les événements politiques déterminants se passaient à des milliers de lieues de
là, mais aucun de ceux qui marquèrent en France les étapes et les tourmentes
de l’Histoire entre 1789 et 1808 ne resta là-bas sans conséquences. » dans Jean
BLANZAT, « Préface », dans CARPENTIER, Siècle…, op. cit., p. 9 à 16, à la page 12.
157
Nous risquons peu de nous tromper si nous limitons notre définition de
l’Auflärung comme étant le moment où l’humanité fait un nouvel usage de sa
raison et modifie le rapport traditionnel entre la volonté, l’autorité et l’usage de
la raison. Pour davantage de précisions et de nuances, voir le célèbre « Was ist
Auflärung ? » de Kant dans Emmanuel KANT, Qu’est-ce que les Lumières ?, Paris,
Hatier, 1999, ainsi que le traitement qu’en fait Foucault dans Michel FOUCAULT,
« What is Enlightment ? » (« Qu’est-ce que les Lumières ? ») (Lumières…), dans
P. RABINOW (dir. publ.), The Foucault Reader, New York, Pantheon Books, 1984,
p. 32 à 50, tel que repris dans M. FOUCAULT, Dits et écrits – 1954-1988, Tome IV
– « 1980-1988 », Paris, Gallimard, 1994, p. 562 à 578.
158
Renato TREVES, Sociologie du droit (Sociologie…), Paris, PUF, 1995, p. 43.
159
Norbert ELIAS, Mozart – Sociologie d’un génie (Mozart…), Paris, Seuil, 1991,
p. 18-19.
160
TREVES, Sociologie…, op cit., p. 43.
161
FOUCAULT, Lumières…, op. cit., p. 562.
162
LEGENDRE, Préface…, op. cit., p. III.
163
Ferdinand TÖNNIES, Communauté et société – Catégories fondamentales de
la sociologie pure, Paris, PUF, 2010, 276 pages.
164
Andréas BUSS, « Les rationalités du droit et l’économie dans la sociologie du
droit de Max Weber » (Rationalités…), dans Revue Juridique Thémis (R.J.T.), No
39, 2005, p. 111 à 150, à la page 117.
165
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 21.
166
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 12.
167
Le commerce sert traditionnellement à pallier aux manques. Il prend très
souvent la forme de troc. Le profit n’est pas nécessairement recherché et les
échanges de biens entre paysans sont très fréquents. L’esprit de communauté
règne dans les campagnes de l’époque. Tout le travail du paysan est orienté
dans le but de faire vivre, voire faire survivre, sa famille et subséquemment sa
communauté. Les surplus qui n’auraient pas eu le malheur d’être saisis par les
autorités sont conservés et employés à pallier d’éventuels cas de forces
majeures.
168
…« Il s’alimente dans l’innovation technologique et dans les profits réalisés
par la vente de son produit. Il tire son dynamisme de la division rationnelle du
travail et de la combinaison travail/technique/capital sans cesse réajustée. »
dans Jacques B. GÉLINAS, La globalisation du monde – Laisser faire ou faire?
(Globalisation…), Montréal, Écosociété, 2000, p. 25, dans les notes en bas de
page.
169
ATTALLAH, Théories, op. cit., p. 12
170
ARENDT, Condition…, op. cit., p. 173.
171
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 14.
172
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 15.
173
SFEZ, Entretien…, op. cit.
174
SUPIOT, Homo juridicus…, op. cit., p. 136.
175
SUPIOT, Homo juridicus…, op. cit., p. 142.
176
SUPIOT, Homo juridicus…, op. cit., p. 137.
177
Les engagements prénuptiaux (prenuptial agreement ou tout simplement
prenup) sont monnaie courante dans le milieu des affaires et chez les artistes.
Les tabloïds font souvent l’étalage de ces ententes prénégociées de séparation
ou de divorce lorsqu’elles concernent des couples célèbres. Le « prenup » est
désormais attaché à la célébrité hollywoodienne. Il a été consacré dans
plusieurs chansons dont Sign the Prenup de KRS-ONE et GREENIE sur l’album It’s
all good sortie en 2010 sur l’étiquette indépendante de KRS-One : « Hey baby,
welcome back home to my crib…only 3 more weeks till dis is where u gonna
live…Now don’t get suspicious, but I’ve done all the dishes…and laid out this
trail of chocolate kisses…So hey future misses, before we get in trouble fast […]
We can talk about the wedding – we can plan all of ‘dat stuff…but one thing
first…You gonna sign this prenup ! Put your name on the X before I call you my
"ex". » Voir également la chanson Gold Digger de Kanye WEST et Jamie FOXX sur
l’album Late Registration paru chez Def Jam en 2005 et finalement, dans un
autre registre musical, la chanson P.R.E.N.U.P. de Paula COLE sur son album
Ithaca paru en 2010 sur étiquette Decca.
178
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 16.
179
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 23.
180
MELKEVIK, Réflexions…, op. cit., p. 167.
181
MELKEVIK, Réflexions…, op. cit., p. 164.
182
MELKEVIK, Réflexions…, op. cit., p. 167.
183
Paul Q. HIRST, « Postface », dans Bernard EDELMAN, Le droit saisi par la
photographie, Paris, Bourgois, 1980, p. 191 à 217, à la page 203. Publié une
première fois en 1973 chez Maspero, puis chez Bourgois en 1980 avec la
postface de Hirst, l’ouvrage d’Edelman a fait l’objet d’un nouvel assemblage en
2001. La postface n’y est plus, mais le livre fut enrichi de trois autres textes :
« Le personnage et son double », « La rue et le droit d’auteur » et « L’œil du
droit : Nature et droit d’auteur », dans B. EDELMAN, Le droit saisi par la
photographie – Éléments pour une théorie marxiste du droit, Paris, Flammarion,
2001, 200 pages.
184
Evgeny B. PASUKANIS, La Théorie générale du droit et le marxisme, Paris, EDI,
1970, p. 160. Pour un approfondissement sur la relation entre Pasukanis et le
marxisme, voir Bjarne MELKEVIK, Marxisme et philosophie du droit – Le cas
Pasukanis, Paris, Buenos Books, 2010, 128 pages ; Pasukanis et la théorie
marxiste du droit, Lille, l’Atelier National de reproduction des thèses,
Université de Lille III, 1988. Quant à cette dernière, prenez note que nous
travaillons présentement à l’élaboration d’une nouvelle mouture. L’ouvrage est
à paraître dans la Collection Dikè au PUL au courant l’année 2013.
185
Jacques LENOBLE, Droit et communication – La transformation du droit
contemporain, Paris, Cerf, 1994, p. 60, dans la note 1.
186
« Ce qui touche (concerne) tous doit être approuvé par tous » dans
MAYRAND, Maximes…, op. cit., p. 438
187
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 24.
188
BUSS, Rationalités…, loc. cit., p. 118.
189
BUSS, Rationalités…, loc. cit., p. 119.
190
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 315.
191
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 38.
192
Jean Louis SCHEFER, « La mort d’Adam – Texte d’introduction », dans
Giambattista VICO, Origine de la poésie et du droit – De Constantia jurisprudentis
(Poésie…), Paris, Cafe Clima Éditeur, 1983, p. 7 à 22, à la page 20.
193
Tzvetan TODOROV, Les Aventuriers de l’absolu (Les Aventuriers…), Paris,
Robert Laffont, 2006, p. 10.
194
ATTALLAH, Théories, op. cit., p. 27.
195
Ce sera toujours un âne qui porte des reliques : « Un baudet chargé de
reliques, s’imagina qu’on l’adorait : Dans ce penser il se carrait, recevant
comme siens l’encens et les cantiques. Quelqu’un vit l’erreur, et lui dit : "Maître
Baudet, ôtez-vous de l’esprit une vanité si folle. Ce n’est pas vous, c’est l’idole à
qui cet honneur se rend, et que la gloire est due." D’un magistrat ignorant c’est
la robe qu’on salue. » dans Jean de LA FONTAINE (1621-1695), « L’Âne portant
des reliques », tel que repris dans Antoine GARAPON, Bien juger – Essai sur le
rituel judiciaire (Bien juger…), Paris, Odile-Jacob, 2010, p. 11. La première
édition de l’ouvrage de Garapon portait le titre de la fable : L’Âne portant des
reliques – Essai sur le rituel judiciaire, Paris, Centurion, 1985, 211 pages.
196
WOLTON, Sauver…, op. cit., p. 32.
197
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 314.
198
WOLTON, Sauver…, op. cit., p. 26.
199
« État de droit » dans REID, Dictionnaire…, op. cit., p. 245.
200
Donald POIRIER et Anne-Françoise DEBRUCHE, Introduction générale à la
Common Law (Common Law…), 3e édition, Bruxelles/Cowansville (Qc),
Bruylant/Yvon Blais, 2005, p. 29.
201
Henri BRUN, Guy TREMBLAY et Eugénie BROUILLET, Droit Constitutionnel
(Constitutionnel…), 5e éd., Cowansville (Qc), Yvon Blais, 2008, p. 685. Voir
également POIRIER et DEBRUCHE, Common Law…, op. cit., p. 29.
202
TODOROV, Le jardin…, op. cit., p. 102.
203
BRUN, TREMBLAY et BROUILLET, Constitutionnel…, op. cit., p. 692.
204
Renvoi sur le droit linguistique au Manitoba, [1985] 1 R.C.S. 721. Voir
également Bilodeau c. P.G. Manitoba, [1986] 1 R.C.S. 449, 458, dans BRUN,
TREMBLAY et BROUILLET, Constitutionnel, op. cit., p. 694-695.
205
BRUN, TREMBLAY et BROUILLET, Constitutionnel, op. cit, p. 694.
206
La Cour suprême aura l’occasion une nouvelle fois de rappeler, dans le
Renvoi sur la sécession du Québec, [1998] 2 R.C.S. 217, 257, que le principe de
la primauté du droit est ce qui assure aux citoyens la stabilité, la prévisibilité et
l’ordre nécessaire à l’exercice de leurs activités. Autrement dit, que « [l]a
primauté du droit évoque donc la loi et l’ordre avant de suggérer la notion de
liberté. » dans BRUN, TREMBLAY et BROUILLET, Constitutionnel, op. cit., p. 695.
207
La rencontre avec Todorov a eu lieu à l’École des Hautes Études en
Sciences Sociales (EHESS) au mois de juin 2005. L’entretien s’est tenu dans le
cadre du même stage de recherche qui nous a mené à rencontrer Sfez. Todorov
est un historien des idées. Il ne revendique aucune théorie. Il observe, scrute
puis partage en toute humilité le fruit de ses constatations avec un regard qui
lui est bien particulier. Ses observations sont justes, cohérentes et rigoureuses.
Elles ont stimulé nos propres réflexions en plus de contribuer
considérablement à la réalisation de notre objectif de problématisation de la
relation entre le droit et la communication.
208
« Par cela il est manifeste que pendant ce temps où les humains vivent sans
qu’une puissance commune ne leur impose à tous un respect mêlé d’effroi, leur
condition est ce qu’on appelle la guerre; et celle-ci est telle qu’elle est une
guerre de chacun contre chacun. » dans Thomas HOBBES, Léviathan ou Matière,
forme et puissance de l’État chrétien et civil (Léviathan…), Paris, Gallimard,
2000, p. 224.
209
TODOROV, Entretien…, op. cit.
210
TODOROV, Entretien…, op. cit.
211
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 315.
212
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p. 22.
213
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p. 25.
214
Éric DESMONS, Mourir pour la patrie ?, Paris, PUF, 2001, p. 77.
215
Gina STOICIU, L’aveuglement de Janus – Mythes, mythologie politique et
reconstruction identitaire collective (Janus…), Montréal/Bucarest,
Humanitas/Libra, 1997, p. 29.
216
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p. 28.
217
Évangile selon Saint Jean, 18, 36 dans COLLECTIF, La Bible…, op. cit., p.
2617.
218
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p. 41.
219
Jean-Jacques SUEUR, Pour un droit politique – Contribution à un débat,
Québec, PUL, 2011, p. 42.
220
Pierre LEGENDRE, « Communication dogmatique », dans SFEZ, Dictionnaire…,
op. cit., Tome 1, p. 25 à 47, à la page 25.
221
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 24.
222
Maurice HAURIOU, Aux sources du droit – Le pouvoir, l’ordre et la liberté (Aux
sources…), Caen, Centre de Philosophie politique et juridique – Université de
Caen, 1986, p. 98. (texte original publié en 1933)
223
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 25.
224
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 36.
225
TODOROV, Le jardin…, op. cit., p.73.
226
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 36.
227
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 37.
228
HOBBES, Léviathan…, op. cit., p. 174.
229
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 38.
230
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 63.
231
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 39.
232
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 38.
233
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 25.
234
SUPIOT, Homo juridicus…, op. cit., p. 18.
235
LEGENDRE, L’empire…, op. cit.,p. 26.
236
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 27.
237
CARPENTIER, Siècle…, op. cit., p. 461.
238
Albert CAMUS, Le mythe de Sisyphe – Essai sur l’absurde, Paris, Gallimard,
1942, p. 168.
239
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 29.
240
HAURIOU, Aux sources…, op. cit., p. 111.
241
TZITZIS, La personne…, op. cit., p. 159-160.
242
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 247.
243
LEGENDRE, Le désir…, op. cit., p. 20.
244
HAURIOU, Aux sources…, op. cit., p. 96
245
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 24.
246
HAURIOU, Aux sources…, op. cit., p. 75
247
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 9-10.
248
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 11.
249
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 204.
250
ATTALLAH, Théories…, op. cit., p. 48.
251
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 241.
252
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 242
253
Ferdinand de SAUSSURE, Cours de linguistique générale (Cours…), Paris,
Payot & Rivages, 1995, p. 97.
254
SAUSSURE, Cours…, op. cit., p. 28.
255
« En effet puisque l’âme humaine est le berceau, la patrie et l’habitat de la
langue, toutes les propriétés de la langue passent en elle subrepticement. »
dans Wilhelm von (Guillaume de) HUMBOLDT, Sur le caractère national des
langues et autres écrits sur le langage, Paris, Seuil, 2000, p. 127-129.
256
SAUSSURE, Cours…, op. cit., p. 98.
257
LEGENDRE, Le désir…, op. cit., p. 34.
258
SUPIOT, Homo juridicus…, op. cit., p. 40.
259
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 31.
260
Un nom peut ne pas être unique. L’homonymie est possible, mais la filiation
d’un sujet sera singulière et originale. Autrement dit, même si des individus
portent le même nom, les situations généalogiques de chacun seront toujours
différentes. Des Guillaume Provencher, il y en a eu, il y en a, il y a en aura
encore, mais jamais aucun d’eux ne pourra prétendre être le même que moi.
261
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 32.
262
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 198.
263
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 33.
264
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 198.
265
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 33.
266
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 34.
267
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 170.
268
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 170-171.
269
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 99.
270
SFEZ, Entretien…, op. cit.
271
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 171.
272
Alain FINKIELKRAUT, La défaite de la pensée (Défaite…), Paris, Gallimard,
1987, p. 25.
273
FINKIELKRAUT, Défaite…, op. cit., p. 30.
274
Umberto ECO, Le signe – Histoire et analyse d’un concept (Le signe…), Paris,
LGF, 1992, p. 17.
275
« Selon la conception traditionnelle du langage, les signes font toujours
signe vers quelque chose, vers une "présence réelle" de la chose (le mot
"pomme" renverrait, par exemple, à la "chose" pomme, ici présente, que je
peux pointer du doigt et dans laquelle je peux croquer). [Quant au sens chez
Derrida, il] est censé être "différent" du signe, se trouver "hors" de lui, mais
cette différence ne peut toujours être pointée que par le langage. » dans
GRONDIN, op. cit., p. 49. Chez Derrida, le sens se trouve dans la différ(a)nce,
c’est-à-dire, dans une différence différée; dans une dynamique qui met à l’écart
(qui diffère) la différence. Voir Jacques DERRIDA, « La différance » dans J.
DERRIDA, Marges de la philosophie, Paris, Minuit, 1972, aux pages 1 à 29.
276
Cette phrase est prononcée par le personnage de Patrick Agira (David La
Haye) lorsqu’il répond à une journaliste qui le questionne sur son célèbre père
dans les derniers moments du film de Sébastien ROSE, La vie avec mon père,
Québec, Christal Films, 2005. Rose est devenu cinéaste après avoir obtenu un
Baccalauréat en philosophie à l’Université de Montréal et une Maîtrise en
Sciences Humaines à l’Université de Strasbourg. Il dispense d’ailleurs à
l’occasion des cours à l’Université du Québec à Montréal dans le programme
d’études littéraires. Son film La vie avec mon père a remporté, l’année de sa
sortie, le Prix du public au Festival international du film Karlovy Vary en
République Tchèque. Il aborde de manière originale, avec humour et
philosophie, la relation entre frères et celle entre un père et ses fils.
277
SUPIOT, Homo juridicus, op. cit., p. 8.
278
Paul RICŒUR, De l’interprétation – Essai sur Freud, Paris, Seuil, 1965, p. 33.
279
Lewis CARROLL, « Through the Looking-Glass and What Alice Found There »,
dans L. Carroll, Alice’s Adventures in Wonderland and Through the Looking-
Glass, Londres, Wordsworth, 1993, p. 125 à 264, à la page 205.
280
SUPIOT, Homo juridicus…, op. cit., p. 8.
281
TODOROV, Le jardin…, op. cit., couverture.
282
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 39.
283
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 252.
284
Citation de l’artiste Josef ALBERS telle que traduite et citée dans T. G.
ROSENTHAL, Josef Albers – Articulation : Formulation (Albers…), 2e édition, Paris,
Thames & Hudson, 2006, deuxième de couverture. La formulation anglaise et
originale fut reprise dans LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 40 : « In science, one
plus one is always two, in art it can also be three, or more. »
285
George ORWELL, 1984, Paris, Gallimard, 1972, p. 119.
286
FINKIELKRAUT, Défaite…, op. cit., p. 26.
287
STOICIU, Janus…, op. cit., p. 9.
288
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 81.
289
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 77.
290
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 79.
291
La définition est de Bourdieu, mais la troncature et l’assemblage est de De
Gantès. Ce dernier porte à l’attention la ressemblance entre le concept de
l’habitus et celui de l’inconscient systémique chez Laborit qui soutient aussi la
présence de règles dominantes en chacun de nous et qui, comme chez
Bourdieu, « structureront les motivations de l’action au long de l’existence
individuelle. » dans Alain DE GANTES, « Praxéologie de la dominance dans la
société informationnelle. Reconfiguration de la question hiérarchique dans le
capitalisme cognitif : le détour par Henri Laborit », Texte revu après
communication faite lors de la Journée d’études Axes et Cibles Analytiques,
Paris, 24 mai 2003, p. 12.
292
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 80.
293
TODOROV, Entretien…, op. cit.
294
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 94.
295
Gérard CORNU, Linguistique juridique (Linguistique…), 3e édition, Paris,
Montchrestien, 2005, p. 384.
296
CORNU, Linguistique…, op. cit., p. 376.
297
HART, Concept…, op. cit., p. 109
298
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 96.
299
ARBOUR et PARENT, D.i.p.…, op. cit., p. 22.
300
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 96.
301
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 97-98.
302
Bien que l’expression « melting-pot » est reconnue et acceptée dans la
langue française, nous préférons employer le terme non emprunté de
« creuset » pour parler de ce grand lieu de rencontre culturel.
303
WOLTON, Sauver…, op. cit., p. 19
304
« Publication n.f. » dans REID, Dictionnaire…, op. cit., p. 493.
305
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 100.
306
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 38.
307
BOURDIEU, Choses…, op cit., p. 101.
308
SAUSSURE, Cours…, op. cit., p. 100.
309
Frédéric GROS, Marcher, une philosophie, Paris, Flammarion, 2011, p. 89.
310
Le Schmilblic (sans « k ») était une émission française créée et animée par
Guy Lux à la fin des années 1960. Ce jeu a connu un succès impressionnant
surtout après la sortie d’un sketch de Coluche du même nom (avec un « k »). Le
but était de trouver le schmilblick, un mot quelconque, à partir d’une série de
définitions possibles. Chaque participant tentait à sa façon de faire avancer le
schmilblick. Le résultat était en fin de compte un cafouillis total où plus rien,
aucun mot, ne semblait trouver de correspondance de sens avec les définitions
usuelles. Schmilblick est aussi utilisé pour désigner un objet quelconque, un
truc ou encore une patente en québécois. Pour le sketch de Coluche, voir
COLUCHE, L’intégrale des sketches, Paris, Le Cherche midi, 2011, p. 71 à 76.
311
Arnaud LUCIEN et Pascal RICHARD, « Le langage comme représentation du
Monde, l’exemple de l’hébreu », dans Actes du Colloque international – La
représentation dans tous ses états, Toulon, 8 et 9 novembre 2007, p. 2.
312
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 103.
313
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 103.
314
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 40.
315
Lukas K. SOSOE, « Préface à l’édition française », dans Niklas LUHMANN, La
légitimation par la procédure, Québec, PUL/Cerf, 2001, p. XIII à XLII, à la page
XXX.
316
Humains, nous n’avons pas les moyens de savoir ce que pense le chat, mais
nous pouvons l’imaginer. C’est ce à quoi s’est risqué Gérard Vincent dans son
Histoire de l’homme racontée par un chat. Cet ouvrage singulier dans lequel
Vincent ne prétend être qu’un traducteur (une traduction du siamois),
Akhénaton, un chat, raconte l’histoire de l’homme depuis les pharaons. C’est
son état de chat avec ses multiples vies qui lui ont permis d’être un témoin
privilégié de l’évolution de notre espèce. L’exercice est intéressant et mérite le
détour. Voir VINCENT, op. cit.
317
GRONDIN, Du sens…, op. cit., p. 7.
318
Paul RICŒUR, « Préface » dans Arendt, Condition…, op. cit., p. 5 à 32, à la
page 21.
319
PERELMAN, Logique…, op. cit., p. 109.
320
WITTGENSTEIN, Recherches…, op. cit., p. 43.
321
« On veut pas l’sawoère qu’osse qu’est arrivé : ON VEUT LE WOÈRE ! On s’est
pas acheté une télévision pour rien ! » dans le célèbre monologue « Cable TV »
de l’humoriste québécois Yvon Deschamps qui date du début des années 1970.
Ce passage fait sans contredit partie des annales de l’humour au Québec au
même titre que « L’union, qu’osse ça donne ? », dans Yvon DESCHAMPS, Tout
Deschamps, Montréal, Lanctôt, 1998, p. 79, à la page 82.
322
Jean-Louis BEAUDOIN, « L’illisible : la lecture contemporaine de la loi et du
jugement » (L’illisible…), dans Résumé de conférence prononcée au Centre de
Recherche en Droit Public de l’Université de Montréal, Montréal, 25 janvier
2001, p. 4.
323
Lucie LAUZIÈRE, « Le sens ordinaire des termes de droit », dans Jean-Claude
GÉMAR (dir. publ.), Langage du droit et traduction – Essai de jurilinguistique,
Montréal, Linguatech/Conseil de la langue française, 1982, p. 39 à 47, à la
page 44.
324
BEAUDOIN, L’illisible…, loc. cit., p. 5.
325
Ludwig WITTGENSTEIN, Tractatus logico-philosophicus, Paris, Gallimard, 1993,
125 pages.
326
Jean-Paul BRODEUR, « La pensée postmoderne et la criminologie », dans
Revue de criminologie, Vol. 26, No 1, Montréal, 1993, p. 73 à 121, aux pages 91
et 92.
327
ECO, Le signe…, op. cit., p. 11 à 30.
328
ECO, Le signe…, op. cit., p. 18.
329
GRONDIN, Du sens…, op. cit., p. 51.
330
Umberto ECO, La structure absente (La structure…), Paris, Mercure de
France, 1972, p. 53.
331
GRONDIN, Du sens…, op. cit., p. 52; La poésie permet au poète de toucher
aux bornes du réel et de l’absolu. En fait, elle est le réel véritablement absolu,
précise NOVALIS, tel que repris dans TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 211.
La poésie est née de la nécessité. Elle constitue la langue des premiers
peuples; c’est la religion et les lois. Le premier à avoir parlé la langue poétique
fut probablement Moïse; le premier des poètes dans VICO, Poésie…, op. cit.,
p. 121, 135 à 138.
332
En avant de leur temps (1857), « les poèmes des Fleurs du mal constituent
en quelque sorte les vidéoclips de l’époque ! En effet, chacun des textes n’est-il
pas un récit condensé au maximum ? Une succession d’images éblouissantes ?
Avec des surprises, des musiques et des rythmes divers ? Quiconque prend la
peine de s’y attarder connaîtra un plaisir redoublé : celui de découvrir que
d’autres ont pensé comme nous et que nous ne sommes donc pas seuls; et celui
de goûter un texte bien ciselé, qui nous transporte comme le fait l’écoute d’une
chanson que nous aimons. “Les fleurs du mal sont le livre de la condition
humaine”, affirmait Blaise Allan, un spécialiste de Baudelaire. » dans Serge
PROVENCHER, « Présentation », dans Charles BAUDELAIRE, Les fleurs du mal,
Montréal, ERPI, 2007, p. XI, à la page XII ; Blaise ALLAN, « Introduction » dans,
C. BEAUDELAIRE, Les fleurs du mal suivi du Spleen de Paris, Paris et Lausanne,
Clairefontaine, 1947, p. 8.
333
TODOROV, Les Aventuriers…, op. cit., p. 223.
334
Pierre LEGENDRE, Paroles poétiques échappées du texte – Leçons sur la
communication industrielle (Paroles…), Paris, Seuil, 1982, p. 12.
335
GRONDIN, Du sens…, op. cit., p. 52. Les poèmes contiennent une histoire. Ce
sont des expressions quintessenciées d’une vie humaine vécue. « Pour écrire un
seul vers, il faut avoir vu beaucoup de villes, d’hommes et de choses, il faut
connaître les animaux, il faut sentir comment volent les oiseaux et savoir quel
mouvement font les petites fleurs en s’ouvrant le matin. Il faut pouvoir
repenser à des chemins dans des régions inconnues, à des rencontres
inattendues, à des départs que l’on voyait longtemps approcher, à des jours
d’enfance dont le mystère ne s’est pas encore éclairci, à ses parents qu’il fallait
qu’on froissât lorsqu’ils vous apportaient une joie qu’on ne la comprenait pas
(c’était une joie faite pour un autre), à des maladies d’enfance qui
commençaient si singulièrement par tant de profondes et graves
transformations, à des jours passés dans des chambres calmes et contenues, à
des matins au bord de la mer, à la mer elle-même, à des mers, à des nuits de
voyages qui frémissaient très haut et volaient avec toutes les étoiles – et il ne
suffit même pas de savoir penser à tout cela. Il faut avoir des souvenirs de
beaucoup de nuits d’amour dont aucune ne ressemblait à l’autre, de cris de
femmes hurlant en mal d’enfant, et de légères, de blanches, de dormantes
accouchées qui se refermaient. Il faut encore avoir été auprès de mourants,
être resté assis auprès de morts, dans la chambre, avec la fenêtre ouverte et
les bruits qui venaient par à-coups. Et il ne suffit même pas d’avoir des
souvenirs. Il faut savoir les oublier quand ils sont nombreux, et il faut avoir la
grande patience d’attendre qu’ils reviennent. Car les souvenirs eux-mêmes ne
sont pas encore cela. Ce n’est que lorsqu’ils deviennent en nous sang, regard,
geste, lorsqu’ils n’ont plus de nom et ne se distinguent plus de nous, ce n’est
qu’alors qu’il peut arriver qu’en une heure très rare, du milieu d’eux, se lève le
premier mot d’un vers. » dans Rainer Maria RILKE, Les cahiers de Malte Laurids
Brigge, Paris, Seuil, 1966, p. 25
336
SFEZ, Critique…, op. cit., p. 174 reprenant LEGENDRE, Paroles…, op. cit., p. 12.
337
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 99-100.
338
Paul RICŒUR, « Le problème de la liberté de l’interprète en herméneutique
générale et en herméneutique juridique » (Le problème…), dans Paul AMSELEK
(dir. publ.), Interprétation et droit, Bruxelles/Aix-en-Provence, Bruylant/PUAM,
1995, p. 177 à 188, à la page 177.
339
RICŒUR, Du texte…, op. cit., p. 154.
340
ELIAS, Mozart…, op. cit., p. 101.
341
HAURIOU, Aux Sources…, op. cit., p. 101
342
RICŒUR, Du texte…, op. cit., p. 157-158.
343
Franz KAFKA, « Prague, début avril 1922 », dans F. KAFKA, Lettres à Milena,
Paris, Gallimard, 1988, p. 266 à 269, à la page 267.
344
Michel VILLEY, Réflexions sur la philosophie et le droit – Les Carnets de Michel
Villey, Paris, PUF, 1995, I, 59, p. 18. ; repris dans BAUZON, Métier…, op. cit.,
p. 173.
345
Hans-Georg Gadamer, La philosophie herméneutique (Philosophie ), Paris,
PUF, 1996, p. 74.
346
La compréhension implique de pouvoir voler de ses propres ailes. L’image
de l’oiseau nous aide à mieux saisir la nécessaire implication des versants
objectif et subjectif. Chez l’oiseau, c’est le travail combiné, conjoint et
simultané des plumes tectrices (les ailes) et des plumes rectrices (la queue) qui
lui offrent la possibilité de décoller, de voler, de planer et de se poser. Les
tectrices sont des plumes qui assurent la portance de l’oiseau alors que la
queue lui sert de gouvernail. C’est sur la queue que nous retrouvons
habituellement les plumes les plus longues, les plus fortes et les plus solides.
La queue est rigide. Elle est construite sur une charpente qui ne s’en laisse pas
imposer. C’est grâce à sa queue et à sa structure que l’oiseau est en mesure de
se diriger dans le ciel. Les caractéristiques particulières de la queue sont
déterminées en fonction du climat et des intempéries que l’oiseau aura à
surmonter, si bien qu’on ne sait plus trop si c’est l’oiseau qui s’est adapté au
milieu, ou si c’est le milieu qui a su constituer un oiseau à son image. La queue
est essentielle à l’oiseau, mais seule, elle ne lui permet pas de s’envoler. Il a
besoin de ses ailes. Ces dernières sont flexibles et souples. Elles battent au
vent et elles s’adaptent. Elles sont toujours aux premières loges. Ce sont des
plumes de couvertures qui témoignent de l’histoire de l’oiseau par leurs
blessures et leurs égratignures. Si l’oiseau n’avait qu’une queue, il ne serait
pas en mesure de décoller. Comme un avion, il aurait besoin d’un réacteur,
d’une puissance extérieure pour lui permettre de s’élever. Il ne serait donc pas
en mesure de se mettre seul en position plus avantageuse et avoir une
meilleure perspective sur le monde. Si notre oiseau avait seulement des ailes, il
pourrait certainement décoller, mais il ne serait pas en mesure de garder son
équilibre. Il n’aurait pas d’autre choix que de monter et de descendre en
catastrophe une fois épuisé. C’est parce qu’il est doté de deux membres
différents et complémentaires que notre oiseau est en mesure de décoller, de
voler, de planer et de se poser. La queue et les ailes travaillent ensemble. Les
faiblesses de l’une servent de faire-valoir aux forces de l’autre. Ce n’est qu’en
s’ajustant l’une sur l’autre, en trouvant un point d’équilibre que l’oiseau est en
mesure de prendre son envol et de poursuivre son chemin et sa migration. De
la même manière, celui qui cherche à comprendre un texte doit faire reposer sa
compréhension et son interprétation sur la base de critères objectifs (les mots,
les phrases, les règles, etc.) et subjectifs (l’esprit créatif, l’imagination, etc.). Ce
n’est qu’avec le concours des deux qu’il parviendra à s’élever.
347
GADAMER, Philosophie…, op. cit., p. 73.
348
VINCENT, Chat…, op. cit., p. 12.
349
GADAMER, Philosophie…, op. cit., p. 74.
350
SFEZ, La communication…, op. cit., p. 9.
351
GADAMER, Philosophie…, op. cit., p. 75-76.
352
RICŒUR, Du texte…, op. cit., p. 155.
353
Umberto ECO, Les Limites de l’interprétation (Les Limites…), Paris, Grasset,
1992, p.35.
354
WITTGENSTEIN, Recherches…, op. cit., p. 68. L’ancienne traduction parle quant
à elle d’ « un concept de l’expliqué dans l’esprit, c’est-à-dire un modèle » dans
WITTGENSTEIN, Investigations…, op. cit., p. 151.
355
THÉRIEN, Lecture…, loc. cit., p. 74.
356
GADAMER, Philosophie…, op. cit., p. 77.
357
Pascal RICHARD, Le jeu de la différence – « Réflexions sur l’épistémologie du
droit comparé », Québec, PUL, 2007, p. 20.
358
GADAMER, Philosophie…, op. cit., p. 80.
359
GADAMER, Philosophie…, op. cit., p. 78.
360
GADAMER, Philosophie…, op. cit., p. 81.
361
Citation de Josef ALBERS dans Eugen GOMRINGER (dir. publ.), Josef Albers : His
Work as Contribution to Visual Articulation in the Twentieth Century (Albers…),
New York, George Wittenborn, 1968, telle que traduite et reprise dans
ROSENTHAL, Albers…, op. cit., p. 21.
362
On peut lire l’exemple dans SFEZ, Décision…, op. cit., p. 358.
363
RAVAULT, Penser…, op. cit., p. 258.
364
ECO, Rose…, op. cit., p. 330. Ce pastiche inspiré de la « méthode pour
arriver à une vérité probable à travers une série d’erreurs certaines » (p. 327)
a déjà été utilisé dans notre introduction, lorsque nous parlions de la difficulté,
voire de l’impossibilité de parvenir à une seule et unique définition du droit.
Supra, p. 24.
365
GARY, La vie…, op. cit., p. 11.
366
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p 140.
367
THÉMISTOCLE d’après CICÉRON dans Tzvetan TODOROV, Mémoire…, op. cit.,
p. 133.
368
Bjarne MELKEVIK, « La part à Léthé : sur droit et mémoire » dans Stamatios
TZITZIS, La mémoire, entre silence et oubli, Québec, PUL, 2006, p. 487 à 504, tel
que repris dans B. MELKEVIK, Droit, mémoire et littérature (Mémoire…), Québec,
PUL, 2010, p. 59 à 76, à la page 66.
369
Ce qui n’a pas empêcher Perec de tenter sa chance de deux et de belles
façons dans Georges PEREC, Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, Paris,
Christian Bourgois, 1975, 50 pages et dans G. PEREC, La vie mode d’emploi,
Paris, Fayard, 2010, 640 pages.
370
TODOROV, Entretien…, op. cit.
371
RICŒUR, Le problème…, op. cit., p. 177.
372
… « Quand ce dernier mot du juge est un mot de condamnation, le juge se
rappelle à nous comme porteur non seulement de la balance mais du glaive. »
dans Paul RICŒUR, Amour et justice, Paris, Points, 2008, p. 28.
373
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p 137.
374
SFEZ, Décision…, op. cit., p. 364.
375
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p. 137.
376
Oui, répond Melkevik, « car si le mal vient de nous, nous n’avons rien
d’autre à faire qu’à apprendre le mal comme étant notre histoire et chercher à
éviter de commettre, dans les limites de la possibilité humaine, la même bêtise
deux ou mille fois de suite ! » dans Bjarne MELKEVIK, « Le Liseur de Bernhard
Schlink : la question de droit et de mémoire » dans MELKEVIK, Mémoire…, op.
cit., p. 15 à 49, à la page 49. Schlink est l’auteur du célèbre roman Le liseur qui
a fait l’objet d’une adaptation cinématographique en 2008 avec en tête
d’affiche, Kate Winslet (gagnante de l’Oscar de la « meilleure actrice » pour
son rôle) et Ralph Fiennes. Dans cet œuvre romanesque, Schlink propose en
fait une analyse philosophique sur le devoir de mémoire dans une Allemagne
qui panse ses plaies et règle ses comptes après la guerre. Lui même juriste et
philosophe du droit, Schlink s’offre, par la romance, la possibilité de dire des
choses qu’un cadre académique ou juridique ne saurait lui permettre. Voir
Bernhard SCHLINK, Le liseur, Paris, Gallimard, 1996, 243 pages. Melkevik
propose également, dans un deuxième élan, un retour sur Le liseur de Schlink à
la lumière de la sortie du film The Reader de Stephen DALDRY en 2008, dans B.
MELKEVIK, « Un film, un holocauste et un passé qui hante la conscience
moderne. Épilogue sur Le liseur de Schlink » toujours dans MELKEVIK,
Mémoire…, op. cit., p. 51 à 58.
377
TODOROV, Mémoire…, op. cit., p. 139.
378
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 60.
379
MORIN, Jugement…, op. cit., p.37.
380
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 62.
381
Georges FORESTIER, Introduction à l’analyse des textes classiques – Éléments
de rhétorique et de poétique du XVIIe siècle (Classiques…), Paris, Nathan, 1993,
p. 14.
382
PERELMAN, Logique…, op. cit., p. 106.
383
L’art de persuader et de maîtriser la discussion, c’est aussi l’art d’avoir
toujours raison et l’art de la guerre. « Schopenhauer sait que les mots et les
arguments sont des poignards dont la pointe peut tuer; il sait aussi que la seule
réalité qui vaille est notre propre victoire, même si le vrai maître du jeu reste
finalement le langage et ses ressources infinies. » dans Didier RAYMOND, « Le
langage en état de guerre – Postface », dans Arthur SCHOPENHAUER, L’art d’avoir
toujours raison, Paris, Mille et une nuits, 2000, p. 79 à 85, à la page 85 et
couverture.
384
PERELMAN, Logique…, op. cit., p. 107.
385
FORESTIER, Classiques…, op. cit., p. 19.
386
PERELMAN, Logique…, op. cit., p. 110.
387
Il ne s’agit ici bel et bien que d’un rappel qui nous fait se souvenir. Il ne
faudrait pas voir là une tentative de notre part d’établir une équivalence ou une
quelconque symétrie entre les deux auteurs. Il s’agit simplement de constater
une ressemblance dans la manière de trier et d’établir les regroupements.
388
MELKEVIK, Horizons…, op. cit., p. 97.
389
RICOEUR, Le problème…, op. cit., p. 180.
390
« Doctrine n.f. » dans REID, Dictionnaire…, op. cit., p. 209-210.
391
FERREIRA DA CUNHA, Récit…, op. cit., p. 19.
392
L’histoire a démontré à plusieurs reprises qu’un texte constitutionnel peut
s’avérer contraire à l’esprit du peuple qu’il encadre. Lorsque c’est le cas, c'est-
à-dire quand le texte constitutionnel s’éloigne trop du cadre partagé par les
membres de la communauté, le texte constitutionnel peut être contesté, voire
complètement changé. C’est dans ces moments, où la correspondance n’existe
plus entre les valeurs du groupe et les textes supposés les encadrer, que nous
assistons à des cas d’insoumission civique et des révoltes. Le « Printemps
arabe » est un bel exemple de la conséquence possible d’une disharmonie entre
le peuple et sa constitution. À un autre niveau évidemment, au Québec cette
fois-ci, où « il y a déjà longtemps que nous avons renoncé à défier les lois » (p.
60), une politique gouvernementale sur la hausse des frais de scolarité a
soulevé un mouvement contestataire dans la communauté estudiantine
québécoise en 2012, les « carrés rouges ». Devant l’ampleur des
manifestations, le gouvernement en poste adopte une « loi matraque » pour
faire régner l’ordre et la paix : la loi 78. S’ensuit un mouvement populaire qui
dépassera largement le cadre du conflit étudiant. Dans le cas du Québec, ce
n’était pas le texte constitutionnel qui jurait avec les valeurs du groupe, mais
bien un texte législatif. La grève étudiante québécoise de 2012 a d’ailleurs été
surnommée le « Printemps érable ». Voir le premier roman inspiré de ce
« Printemps québécois », dans Patrick NICOL, Terre des cons, Montréal, La
Mèche, 2012, 98 pages.
393
Jean-Baptiste PROUDHON, Cours de droit français, Dijon, 1810; tel que repris
dans François GÉNY, Méthode d’interprétation et sources en droit privé positif, 2e
édition, Tome 1, Paris, LGDJ, 1954, p. 39, dans la note 6 ; repris également
dans Paul DUBOUCHET, Sémiotique juridique, Paris, PUF, 1990, p. 135.
394
BAUZON, Métier…, op. cit., p. 25. Au surplus, « [l]e législateur est un juriste,
il dit ce qui revient comme biens et charges aux citoyens. Le juge est un juriste,
il rectifie les déséquilibres de cette attribution. Et de manière générale, les
juristes sont ceux, tels les avocats ou les conseillers juridiques, qui adaptent les
lois pour tenter d’assurer la survie ou le bien-vivre dans la Cité. », à la page 64.
395
TODOROV, Entretien…, op. cit.
396
Les styles architecturaux néoclassique ou néogothique présents dans les
bâtiments dédiés à la justice dans les vieux pays contribuèrent à une
représentation de la justice comme une autorité transcendante verticale et
sacrée. Le bâtiment participait à sa façon à assurer la liaison entre Dieu et le
juge. Pour David Marrani, les constructions d’aujourd’hui sont « en train de
“brouiller” la clarté du message transmis par le bâtiment. Ainsi, plutôt que de
retrouver la transcendance verticale de l’autorité, [elles] illustrent maintenant
une “vision contemporaine inspirée d’une forme de transcendance horizontale
destinée à représenter l’immanence de la démocratie. Pourtant, en modifiant
cette configuration verticale pour la remplacer par une plutôt horizontale, nous
sommes sortis du sacré pour entrer dans le marché”. » Ces propos ont été
tenus lors d’une contribution de Marrani au projet Vers une cyberjustice du
Centre de recherche en droit public (CRDP) de l’Université de Montréal au
mois de mai 2012. Ils ont été relevés et publiés dans Philippe SAMSON,
« L’architecture juridique en changement », dans Le journal du Barreau du
Québec, Vol. 44, No 8, Août 2012, p. 12. Dans la même veine architecturale,
voir aussi Josiane BOULAD-AYOUB, « Les Palais de justice de Montréal : Du temple
à la tour » et François CHALIFOUR, « L’œil ambulant, le Palais de justice et la
représentation – Élaboration d’un modèle d’analyse sémiotique » dans Nycole
PAQUIN (dir. publ.), Les signes de la justice et de la loi dans les arts, Québec,
PUL, 2008, p. 51 à 74 et p. 75 à 104.
397
« Courthouse is the lawyer’s playground ». La version anglaise de notre
affirmation souligne mieux le caractère ludique (qui concerne le jeu) du lieu de
travail des avocats que nous souhaitons évoqués. En effet, le mot « court » en
anglais peut aussi bien désigner le Palais de justice que l’aire de jeu au tennis
et dans divers sports de raquette. L’avocat joue, mais il ne s’amuse pas pour
autant. Il est sérieux, car le sort de son client en dépend. L’avocat s’occupe de
ce qui est inéluctable dans la société. Il est un spécialiste de l’inévitabilité pour
reprendre l’expression du philosophe italien Vallauri que nous rappelle Da
Cunha. Ainsi, à la manière d’un médecin qui s’occupe des pathologies, l’avocat
s’occupe des dysfonctions de la vie sociale. Il possède deux visages, l’un admiré
et l’autre détesté. Il « est aussi bien l’austère et banal technicien des normes et
des textes, un fonctionnaire du pouvoir, que le bon vivant flatteur des jurys,
magicien au verbe facile, sans morale et sans âme. » dans FERREIRA DA CUNHA,
Récit…, op. cit., p. 43-44. L’avocat revêt l’uniforme beaucoup plus noble de
sauveur lorsque celui-ci travaille à notre cause dans la résolution de nos
conflits; sauvetage coûteux s’il en est parfois, mais sauvetage tout de même.
398
Pour une analyse rigoureuse et originale du droit par le biais de la
psychanalyse ainsi qu’un regard sur le procès et le « trial » comme événement
juridique ritualisé, voir David MARRANI, Rituel(s) de justice – Essai
anthropologique sur la relation du temps et de l’espace dans le procès,
Bruxelles, E.M.E & InterCommunications, 2011, 84 pages ; p. 21-24. Voir
également GARAPON, Bien juger…, op. cit.
399
Le spectacle Ionesco qui regroupe les pièces La cantatrice chauve et La
leçon d’Eugène Ionesco tient l’affiche plusieurs soirs par semaine sans relâche
depuis 1957 au Théâtre de la Huchette à Paris. Depuis ses débuts, le spectacle
a été joué plus de 17000 fois. C’est un record de longévité, un véritable succès
qui continue d’attirer et de faire revenir les touristes, les amateurs de théâtre
et les curieux. Peu importe le nombre de fois qu’elles auront été jouées, ces
pièces auront constitué un nouveau spectacle chaque soir parce les acteurs
offrent à tous les coups des performances qui sont uniques. De la même façon,
un procès aura beau s’organiser des centaines de fois par jour dans un palais
de justice, ce ne sera jamais deux fois la même chose : non bis in idem.
Concernant Le spectacle Ionesco, voir http://www.theatre-
huchette.com/le_spectacle_ionesco et pour le plaisir de l’œuvre, voir Eugène
IONESCO, La cantatrice chauve suivi de La leçon, Paris, Gallimard, 1954, 151
pages ou encore, rendez vous à Paris, à la Huchette.
400
Arnaud LUCIEN, La justice mise en scène – Approche communicationnelle de
l’institution judiciaire (Mise en scène…), Paris, L’Harmattan, 2008, p. 15.
401
MORIN, Jugement…, op. cit., p. 38.
402
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p.15.
403
Albert CAMUS, Les justes, Paris, Gallimard, 1950, p. 107.
404
TODOROV, Entretien…, op. cit.
405
Honoré de BALZAC, Le Père Goriot, Paris, LGF-Poche, 1995, p. 172.
406
MORIN, Jugement…, op cit., p.9.
407
BOURDIEU, Choses…, op. cit., p. 79.
408
BAUZON, Métier…, op. cit., p. 25.
409
Daniel WEINSTOCK, « Introduction aux fondements de l’éthique et de la
déontologie », dans Collection de droit 2011-2012, École du Barreau du
Québec, Éthique, déontologie et pratique professionnelle, Barreau du
Québec/Yvon Blais, Montréal/Cowansville (Qc), 2011, p. 7. L’auteur renvoie à
Marvin FRANKEL, « The Search for Truth : An Umpireal View », (1975) 123
University of Pennsylvania Law Review, 1031.
410
FERREIRA DA CUNHA, Récit…, op. cit., p. 27.
411
La vérité judiciaire n’a plus l’autorité pour s’imposer devant toutes les
autres. Il n’est désormais plus question d’une seule vérité, mais bien d’une
multitude de vérités qui entre en relation. Cette conjugaison des discours des
vérités se produit dans l’espace public. Voir LUCIEN, Mise en scène…, op. cit.,
p. 77 à 99.
412
MORIN, Jugement…, op. cit., p. 9-10.
413
MORIN, Jugement…, op. cit., p. 12.
414
FERREIRA DA CUNHA, Récit…, op. cit., p. 28.
415
BAUZON, Métier…, op. cit., p. 185.
416
LEGENDRE, L’empire…, op. cit., p. 32.
417
BAUZON, Métier…, op. cit., p. 24.
418
Voici les trois axiomes du positivisme juridique selon Dworkin tels que
repris et reformulés dans RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 166; Voir Ronald
DWORKIN, « Le positivisme », traduit de l’anglais par Michel Troper, dans Droit
et Société, Vol. 1, 1985, p. 35 à 60, aux pages 35 et 36.
419
Friedrich MÜLLER, Discours de la méthode juridique (Méthode…), Paris, PUF,
1996, p. 208.
420
Michel TROPER, « La motivation des décisions constitutionnelles » dans
Chaïm PERELMAN et Paul FORIERS (dir. publ.), La motivation des décisions de
justice, Bruxelles, Bruylant, 1978, p. 287 à 302, à la page 288.
421
Citation de Josef ALBERS dans GOMRINGER, Albers…, op. cit., telle que reprise
et traduite dans ROSENTHAL, Albers…, op. cit., p. 9. Pour le paraphraser, nous
pourrions dire que recréer, c’est replanifier et réorganiser afin de remettre en
rapport et remaîtriser. C’est, en deux mots, remettre en œuvre tous les moyens
s’opposant au désordre et à l’accidentel. « C’est pourquoi cela correspond à un
besoin humain et caractérise la pensée et l’action de l’homme », poursuit
Albers.
422
TZITZIS, Humanisme…, op. cit., p. 147.
423
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 167-168.
424
RICŒUR, Le problème…, op. cit., p. 183.
425
Patrick NERHOT, « L’interprétation en sciences juridiques. La notion de
cohérence narrative », Revue de synthèse, 1990, Vol. 111, No 3, p. 299 à 329, à
la page 320.
426
… « On reconnaît là la thèse habermassienne de l’accord potentiel au
niveau d’une communauté sans limites ni contraintes. C’est sur cet horizon de
consensus universel que se placent les règles formelles de toute discussion
prétendant à la rectitude. » RICŒUR, Le problème…, op. cit., p. 184. Ce sont ces
règles qui sont à la base de la pragmatique universelle du discours chez
Habermas. Tout un chacun se voit reconnaître un droit égal d’intervention et
nul n’est interdit de parole. Ces règles régissent l’entrée en discours, mais elles
ne sont pas seules. Il y a aussi les règles présentes pendant le déroulement de
la discussion. Un interlocuteur doit accepter la substance des propositions
faites au fil de la discussion afin de la faire avancer. Dans un cas de refus, le
dissident doit justifier du mieux qu’il peut sa décision par le biais d’arguments.
À la fin de l’argumentation, il doit avoir satisfait son besoin d’argumenter, mais
il doit aussi accepter les conséquences de la décision. L’argument qui est
acceptable par toutes les parties, c’est aussi celui qui est accepté par eux.
427
TODOROV, Entretien…, op. cit.
428
PERELMAN, Logique…, op. cit., p. 116.
429
« LE DIRECTEUR : “Les responsables doivent parfois savoir être impopulaires.
Le temps finit toujours par leur donner raison, tu verras.” – ÉRIC : “Mais
comment peux-tu prétendre à l’avance avoir raison ? Toujours raison ? Il n’y a
pas qu’une vérité, et même s’il n’y en avait qu’une, elle présenterait
nécessairement des facettes différentes. Quand te soucies-tu de la face cachée
des choses ? Et puis la réalité évolue : ce matin il se pouvait que tu aies eu
raison, et puis quelque chose arrive, et voilà que tu as tort. N’est-ce pas alors le
moment de revoir son point de vue ?” » dans la pièce de théâtre de François
OST, Antigone voilée, Bruxelles, De Boeck, 2009, p. 69.
430
Ernst Von GLASERSFELD, « Introduction à un constructivisme radical », dans
Paul WATZLAWICK (dir. publ.), L’invention de la réalité – Contributions au
constructivisme, Paris, Seuil, 1996, p. 19 à 43, à la page 23.
431
MÜLLER, Méthode…, op. cit., p. 211.
432
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 178. Voir Robert ALEXY, A Theory of Legal
Argumentation, Oxford, Clarendon Press, 1989, 323 pages.
433
TODOROV, Entretien…, op. cit.
434
RICŒUR, Le Juste…, op. cit., p. 218.
435
BAUZON, Métier…, op. cit., p. 10-11. Voir ARISTOTE, Éthique à Nicomaque
(Nicomaque…), Paris, Flammarion, 2004, [1134, b 18], p. 260.
436
RICOEUR, Le Juste…, op. cit., p. 17.
437
ARISTOTE, Nicomaque…, op. cit., [1134, b 18], p. 260.
Dans la collection « De Lege
Ferenda »
MARRANI David, Rituel(s) de justice, Essais anthropologique
sur la relation du Temps et de l’Espace dans le Procès,
2011. ISBN : 978-2-8066-0103-2. 14,00 €. 2011.
ID EME E1045895
T. Freixes, J.C Remotti, D. Marrani, J. Bombin, L. Vanin, La
gouvernance multi-level : penser l’enchevêtrement, 2012
ISBN : 978-2-8066-0307-4. 28.00 €. ID EME E1045946
PROVENCHER Guillaume, Droit et communication : liaisons
constatées, 2013. ISBN : 978-2-8066-1035-5 23,00 € ID
EME E1046020
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