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Audit Committee News

Numéro 53 / T2 2016 / Gestion des risques et conformité

Transformation
de la fonction
fiscale
La stratégie fiscale relève de la
responsabilité du Conseil d’administration

Ces dernières années, les conditions-cadres s’ap-


pliquant au département fiscal et à la gestion de la
charge fiscale en tant que telle ont considérablement
évolué. Par le passé, les activités fiscales étaient gé-
néralement séparées des opérations commerciales
et le département fiscal était considéré comme
une entité solitaire. Aujourd’hui, la perception des
questions fiscales par le public, de même que par les
parties prenantes internes et externes, a beaucoup
changé. La transparence, les exigences accrues en
matière de conformité légale ainsi que les risques
de réputation constituent désormais des probléma-
tiques importantes que les entreprises et leur mana-
gement, mais aussi leurs Conseils d’administration,
ne doivent pas négliger.

Audit Committee News / Numéro 53 / T2 2016


Nouvelles exigences réglementaires au niveau mondial Etude suisse sur les changements au sein du
Les conséquences de la crise financière et de la crise de la département fiscal
dette, mais aussi quelques cas largement débattus d’optimi- Face aux développements susmentionnés, les grandes en-
sation fiscale agressive pratiquée par certaines multinatio- treprises suisses sont aujourd’hui en train de revoir leur
nales, ont donné naissance à des projets tels que le BEPS stratégie fiscale. En collaboration avec l’Université de St-Gall
(«Base Erosion and Profit Shifting») et la RIE III (troisième (HSG), KPMG Suisse a examiné les aspects qui favorisent le
réforme de l’imposition des entreprises). changement au sein du département fiscal des grandes en-
treprises suisses. Parmi ces dernières, 54 ont participé à
Le BEPS est un projet commun de l’OCDE et des Etats du l’enquête, les personnes interrogées étant les CFO et les
G20. Il vise à lutter contre l’érosion de la base d’imposition responsables des départements fiscaux. L’enquête était
et le transfert de bénéfices dans des juridictions à fiscalité axée sur la centralisation et la standardisation du départe-
faible ou nulle. En particulier, l’action conjointe des législa- ment fiscal, sur l’utilisation des technologies de pointe et
tions fiscales nationales ne doit plus permettre la double leurs conséquences sur le modèle d’affaires fiscal actuel
non-imposition des contribuables. ainsi que sur la documentation et l’analyse des prix de trans-
fert. L’enquête a également montré que les sondés souhai-
Depuis 2005, la Suisse subit par ailleurs des pressions de taient que le Conseil d’administration assume plus de res-
l’Union européenne (UE), qui exige que diverses règles ponsabilités dans le domaine fiscal.
suisses en matière d’imposition des entreprises soient
mises en conformité avec les normes européennes. Les cri- Seulement 33% des entreprises ayant pris part à l’enquête
tiques portent principalement sur le fait que, d’une part, la disposent d’une documentation formelle de leur politique
Suisse impose les bénéfices de source étrangère plus faible- de gouvernance fiscale (plan directeur, stratégie et plan de
ment que les bénéfices de source suisse et que, d’autre mise en œuvre), tandis que 44% d’entre elles n’avaient pas
part, elle n’impose pas entièrement certains bénéfices. La encore prévu de consigner celle-ci par écrit. Plus de 20%
RIE III vise à éliminer ces critiques, c’est-à-dire à accroître des entreprises interrogées prévoient toutefois de docu-
l’acceptation internationale tout en maintenant l’attractivité menter formellement leur orientation stratégique en matière
de la place fiscale suisse. Elle prévoit donc un changement fiscale au cours des six prochains mois.
fondamental au niveau de l’imposition des entreprises, ce
qui peut aboutir à un réexamen de la stratégie globale de ces Les sondés considèrent que le Conseil d’administration doit
dernières, et notamment de la stratégie fiscale. jouer un rôle actif dans la détermination de la stratégie fis-
cale. En effet, celui-ci assume en définitive la responsabilité
Les questions fiscales sont rarement à l’agenda du pour toutes les décisions stratégiques, alors que le manage-
Conseil d’administration ment doit se concentrer sur la mise en œuvre. L’art. 716a CO
Jusqu’à présent, les questions fiscales étaient examinées stipule que le Conseil d’administration doit, comme première
de manière irrégulière par les Conseils d’administration ou attribution intransmissible et inaliénable, exercer la haute di-
uniquement si des problématiques concrètes se posaient, rection de la société et établir les instructions nécessaires.
par exemple en cas de fusions et d’acquisitions (M&A), de Par «haute direction», on entend les trois activités suivantes:
problèmes spécifiques liés à l’entreprise ou en cas de chan- • élaboration des objectifs stratégiques de l’entreprise;
gements importants dans la législation fiscale. Aujourd’hui, • détermination des moyens nécessaires pour atteindre ces
la fiscalité ne constitue toujours pas un élément fixe de objectifs;
l’agenda du Conseil d’administration. Pourtant, les impôts • contrôle des organes d’exécution en ce qui concerne la
constituent souvent un important facteur de coût au sein de poursuite des objectifs.
l’entreprise et toute négligence peut entraîner des procé-
dures coûteuses. S’agissant de la politique fiscale, le L’orientation stratégique fiscale de l’entreprise doit par ail-
Conseil d’administration doit indiquer où il se situe, entre leurs être prise en compte lors de l’élaboration des objectifs
des économies d’impôts maximales et la minimisation maxi- stratégiques de cette dernière.
male des risques fiscaux, afin de garantir une planification
fiscale ciblée. Outre le souhait de voir le Conseil d’administration participer
plus activement à l’élaboration de la stratégie fiscale, envi-
ron les trois quarts (75%) des responsables de départe-
ments fiscaux qui ont été interrogés ont indiqué qu’ils
n’avaient jamais rencontré le Conseil d’administration dans
son ensemble. Un échange régulier sur les questions fis-
cales est cependant indispensable afin de tenir suffisam-
ment compte des développements réglementaires actuels
et des discussions relatives à la fiscalité.

Mais quels conseils donner aux Conseils d’administration afin


qu’ils se familiarisent avec les nouvelles conditions-cadres?

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Le Conseil d’administration doit encourager et suivre L’orientation fiscale de l’entreprise va devenir une
le comportement suivant: question stratégique pour le Conseil d’administration
Détermination d’un «tone at the top» clair concernant la po- L’orientation fiscale d’une entreprise représentera l’un des
litique fiscale: défis les plus importants à l’avenir. Une stratégie fiscale ap-
Le Conseil d’administration doit communiquer des principes propriée doit, dans la mesure du possible, assurer l’équilibre
clairs concernant la philosophie de l’entreprise et l’éthique. entre les principes de gestion d’entreprise liés à la création
Ceux-ci doivent être surveillés grâce à la mise en place d’un de valeur – laquelle est également exigée par les action-
système de contrôle solide et bien documenté. naires – et la nouvelle compréhension morale et éthique du
public quant à ce qui constitue une charge fiscale appro-
Surveillance active de la stratégie fiscale, y compris des priée.
risques correspondants:
Le Conseil d’administration doit élaborer une stratégie fis- Dans un environnement économique où les questions fis-
cale appropriée, qui découle de la stratégie de l’entreprise, cales gagnent en complexité, où les exigences réglemen-
et ainsi garantir que les risques fiscaux encourus soient en taires des autorités fiscales ne cessent de se renforcer et
adéquation avec la politique fiscale. où le public réclame de la transparence, le département fis-
cal fait face à des défis de plus en plus nombreux et, sur-
Adoption d’une position claire en cas de divergences: tout, nouveaux. La mise en place de processus fiscaux effi-
Il appartient au Conseil d’administration de définir la ma- caces, grâce à l’utilisation des technologies les plus
nière dont les divergences par rapport aux règles et procé- modernes, et l’établissement d’une structure organisation-
dures établies doivent être traitées. Il doit en outre s’assurer nelle claire, avec des responsabilités bien définies, ne sont
que le système de contrôle fonctionne correctement. que certains des thèmes qui occuperont le département fis-
cal à l’avenir et favoriseront le changement. A cet égard, le
Capacité à remettre en question la gestion fiscale: département fiscal doit pouvoir s’appuyer sur une stratégie
Le Conseil d’administration est l’initiateur de la politique fis- fiscale clairement formulée et soutenue par le Conseil d’ad-
cale et des directives correspondantes et il détermine la ministration. Cette stratégie fiscale doit découler de la stra-
stratégie fiscale. A ce titre, il doit être suffisamment informé tégie globale de l’entreprise et définir le cadre relatif à la
des questions fiscales afin d’être sur un pied d’égalité avec gestion des risques et à la planification fiscale.
les managers du département fiscal.

Mise en place de contrôles appropriés au sein du départe- Pour de plus amples informations:
ment fiscal: www.kpmg.ch/tft
Les entreprises doivent s’assurer du respect des processus
de «compliance» au niveau du groupe et au sein des filiales.
Par ailleurs, des rapports précis doivent être émis en temps
opportun et les relations avec les autorités fiscales doivent
être maintenues de manière proactive.
Hartwig Hoffmann
Contrôle indépendant du département fiscal: Tax Management Consulting
Il est recommandé au Conseil d’administration de faire hartwighoffmann@kpmg.com
contrôler les processus fiscaux à intervalles réguliers par le
service de révision interne ou par un cabinet d’audit indé-
pendant et compétent.
Christoph Funke
Tax Management Consulting
christophfunke@kpmg.com

L’information contenue ici est de nature générale et ne prétend en aucun cas s’appliquer à la situation d’une personne physique ou morale quelconque. Même si nous mettons tout en œuvre pour fournir une information
précise en temps opportun, nous ne pouvons pas garantir que cette information est fidèle à la réalité au moment où elle est reçue ou qu’elle continuera de l’être à l’avenir. Cette information ne saurait être exploitée sans un
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