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LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

AVANT-PROPOS DE L’AUTEUR
« Cherchez et vous trouverez », telles sont les déclarations des saintes
écritures. Cependant, vous n’aurez plus besoin de chercher car vous l’aurez déjà
à votre portée « la boussole en droit administratif II ». Ce droit qui est souvent
taxé précocement par bon nombre d’étudiants, chercheurs et candidats aux
différents concours administratifs de complexe, de véritable os. On entend dans
ce document lever le cache sexe du droit administratif II afin de le rendre
facilement digestif pour les affamés juridiques qui le consommeront avec
appétit.

Bonne lecture à vous !

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Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

INTRODUCTION
D’emblée, il faut préciser qu’il n’existe pas une cloison entre le droit
administratif I et le droit administratif II. Tous deux constituent la crème du
Droit Administratif Général. C’est pour des raisons pédagogiques et
académiques qu’on fait cette distinction. Cela dit, le Droit Administratif Général
II, objet de cette réflexion constitue un continium du Droit Administratif I. Il
s’intéresse à l’action ou l’activité de l’administration (action juridique et
action matérielle). Seulement, l’exercice des activités administratives se
trouvent conditionner par sa soumission au droit qui se décline en le respect du
principe de juridicité (légalité) dont le non-respect a pour corolaire : la
responsabilité administrative.
Dans l’objectif de rendre le cours accessible à l’étudiant, on tentera dans
la logique « d’une pierre deux coups » de faire un étalage simpliste de cette
matière au combien important.

Aperçu panoramique du Droit Administratif General II


Comme on l’a dit plus haut, l’étude du Droit Administratif II s’articule sur
l’étude de l’action de l’administration (I) et à la soumission de cette action au
droit (II).
I/ présentation brève de l’action de l’administration
En tant que sujet de droit, l’administration participe à la vie et au
commerce juridique dans l’Etat. C’est un acteur juridique dont le rôle est la
construction de l’ordre social et partant la cohésion dans la société.
L’action que mène l’administration est duale. Elle est d’une part juridique
(A) et d’autre part (B).
A. L’action juridique de l’administration
L’action juridique de l’administration est double. Elle consiste d’une part
à édicter les actes administratifs décisoires dits unilatéraux (AAU) qui sont la
manifestation de sa seule volonté à travers son fondement qui est le pouvoir
règlementaire. D’autre part, la conclusion des contrats administratifs. Lesquels
constituent la rencontre de deux ou plusieurs volontés dont celle de
l’administration publique et avec soit autre une personne publique soit une
personne privée.

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B. L’activité matérielle de l’administration


L’administration est en principe, le seul acteur juridique dont la mission
est de faire en sorte que la collectivité nationale vive ensemble sans anicroche.
C’est à travers ses missions de police administratives dont la finalité
principielle est l’ordre public (tranquillité publique, salubrité publique et
sécurité publique) et ses actions de service publics que l’administration concourt
à remplir ses attributions. Quid sur la soumission de l’administration au droit ?
II/ La soumission de l’administration au droit
La soumission de l’administration au droit est selon le Professeur Joseph
OWONA « le critère far de l’Etat de droit ». Ce dernier postule que dans un
Etat démocratique et moderne, les institutions étatiques (Président de la
République, Premier Ministre, etc.) doivent respecter les règles juridiques dont
le principe de la légalité (A) à titre préventif. La transgression de ce principe
entraine généralement des conséquences multiples au rang desquelles la
responsabilité administrative (B) à titre curatif.
A. Le principe de légalité ou de juridicité administrative
La légalité administrative traduit larto sensus que, les actes posés par
l’administration doivent être conformes à la « pyramide » des normes telle
qu’élaborée par le maitre de Vienne Hans KELSEN. Stricto sensus, la légalité
administrative expose l’idée selon laquelle l’administration est tenue de
respecter ses propres règlements (jugement MESSOMO ATENEN Pierre,
CFJ/CAY, 30 septembre 1969). De ce fait, la légalité administrative implique
certains principes, parmi lesquels : la conformité, l’habilitation et la
compatibilité (CS/CA, Société « Assureurs-Conseils Africains » (ACFRA)).
Toutefois, certains actes échappent partiellement ou totalement à cette
soumission. Il s’agit des actes de gouvernement, des actes pris en période de
crise et des actes à faibles normativité.
B. La responsabilité administrative
Dans l’exercice de son action, l’administration peut causer des rixes aux
personnes. Préjudice dont la réparation peut être faite à la victime du dommage.
C’est d’ailleurs ce qu’a entrepris le sieur Blanco dans la célèbre décision
« Blanco » du 8 février 1873. C’est dans cette perspective que peut être mis en
jeu la responsabilité administrative. Cette dernière étant toutefois conditionnée
par l’existence d’un fait générateur, d’un dommage et d’un lien de causalité.

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Sujets les plus « suspects » corrigés et commentés

NB : La correction de ses sujets a été faite en fonction de la chronologie et de


logique du cours.

Sujet 1 : le pouvoir règlementaire au Cameroun


Définition : Le pouvoir règlementaire est le pouvoir reconnu aux autorités
administratives ou non de faire des règlements c’est-à-dire des actes exécutoires
ayant un caractère général et impersonnel.
PROBLEMATIQUE : Quelles sont les règles qui encadrent le pouvoir
règlementaire au Cameroun ?
I/ Les règles relatives aux fondements juridiques du pouvoir règlementaire
A/ La base juridique originaire du pouvoir règlementaire
Il est dit originaire parce qu’il est consacré par la constitution, norme
originaire. Cette dernière consacre le pouvoir règlementaire d’application des
lois (1) et le pouvoir règlementaire autonome (2)
1/ Le pouvoir règlementaire d’application de la loi
a/ Les lois concernées (voir l’article 26 de la constitution)
b/ L’étendue les actes d’application de lois : décret, arrêté, etc.
2/ Le pouvoir règlementaire autonome
Il s’agit des règlements dont la prise ne nécessite nullement une
habilitation législative (article 27 de la constitution)
a/ La présentation du règlement autonome
b/ L’infériorité du règlement autonome à la loi (CE, 28/01/1959, syndicat
général des ingénieurs conseils)
B- Les bases juridiques dérivées
Elles sont qualifiées de base dérivée car elles tirent leurs légitimités non
pas de la constitution mais plutôt des normes en dérivent. Au rang des bases
dérivées du pouvoir règlementaire, se trouve en bonne place la base législative
(1) et la base règlementaire (2).
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1/ Le fondement législatif du pouvoir règlementaire


a/ L’habilitation législative du pouvoir règlementaire
Il s’agit en d’autres termes des règlements qui sont pris en application de
la loi.
b/ La conformité du règlement à la loi d’habilitation
2/ Le fondement règlementaire du pouvoir règlementaire
Il s’agit de l’hypothèse dans laquelle un règlement est pris en application
d’un autre qui lui est supérieur. A titre d’illustration, les statuts particuliers de la
fonction publique sont des règlements qui tirent leurs légitimités juridiques du
Statut général de la fonction publique de l’Etat.
II/ Les règles relatives aux autorités investies du pouvoir règlementaire
Les autorités investies du pouvoir règlementaire sont nombreuses. La
dispersion d’autorités investies du pouvoir règlementaire connait des garde-fous
que sont le contrôle de tutelle et le contrôle hiérarchique.
Ainsi, on distingue les autorités investis du pouvoir règlementaire originaire (A)
des autorités investies du pouvoir règlementaire délégué ou dérivé (B).
A- Les autorités investis du pouvoir règlementaire originaire
Il s’agit du Président de la République (1) et du Premier Ministre (2).
1- Le pouvoir règlementaire du Président de la République
Il exerce un pouvoir règlementaire en période de crise (a) et en période
normale (b).
a- En période de crise : Article 9 de la constitution
b- En période normale : Article 8 et 10 de la constitution
2- Le pouvoir règlementaire du premier ministre
a- La subordination du pouvoir règlementaire du Premier Ministre à celui du
Président de la République
b- L’édulcoration du pouvoir règlementaire du Premier Ministre
C’est le Président de la République qui nomme le Premier Ministre et fixe
ses attributions. Cette nomination est concrétisée par un décret présidentiel. Il
faut dire sur la base de ce qui précède que le Premier Ministre n’exerce plus son
pouvoir règlementaire sur le fondement de la constitution mais sur celui d’un
règlement. Il s’agit à l’occurrence du décret N° 92/089 du 4 Mai 1992,
modifier et complété par le décret N°95/145 bis du 4 Août 1995.

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B- Les autorités investies du pouvoir règlementaire dérivé


Le pouvoir règlementaire dont sont investis ces autorités est dit dérivé ou
délégué parce que son fondement n’est pas directement constitutionnel. Il est
soit législatif soit règlementaire.
1- Les autorités investies du pouvoir règlementaires au niveau de
l’administration centrale
Les articles 10.2 et 12.5 de la constitution disposent tour à tour que : « Le
Président de la République peut déléguer certain de ses pouvoirs (…) aux
autres membres du gouvernement et à certains hauts responsables de
l’administration de l’Etat dans le cadre de leur attribution » et que le Premier
Ministre « peut déléguer certains de ses pouvoirs aux membres du
gouvernement et a des hauts responsables de l’administration de l’Etat »
a/ Le pouvoir règlementaire des membres du gouvernement
Selon la nature des départements ministériels, on peut distinguer les
ministres en charge des départements ministériels de souveraineté, les ministres
en charge des départements ministériels techniques. Le pouvoir règlementaire du
ministre est spécial quant à son objet
b/ Les hauts responsables de l’Etat
Il s’agit des secrétaires généraux de la Présidence de la République, du
secrétaire général au Premier Ministère et des secrétaires généraux ministériels
2/ Les autorités investies du pouvoir règlementaire au niveau local
Comme l’a affirmé Napoléon « Si on peut gouverner de loin, on ne peut
administrer que de près ». C’est pour cette raison qu’il existe au sein de
l’administration de l’Etat, des autorités investies du pouvoir règlementaire au
niveau de l’administration déconcentrée et celles de l’administration
décentralisée
a/ Les autorités investies du pouvoir règlementaire au niveau de l’administration
déconcentrée
Il existe des autorités issues de l’administration déconcentrée soit
technique soit géographique.
Le pouvoir règlementaire exercé par l’administration technique
déconcentrée dépend des textes qui organisent les ministères dont elle dépend.
Quant à l’administration géographiquement déconcentrée, elle est
incarnée par les gouverneurs de régions, les préfets des départements et les sous-

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préfets dans les arrondissements. Leur pouvoir règlementaire est contenu dans le
décret N°2008/377 du 12 novembre 2008.
Au demeurant, ses autorités exécutent par leurs décisions la volonté des
autorités hiérarchiques, mettant de ce fait en application de la pensée du
publiciste français Odilon BARROT « C’est le même marteau qui frappe, on a
fait que raccourcir le manche »
b/ Au niveau de l’administration décentralisée
Il s’agit des autorités (Maires, Président du conseil régional et Délégués
du gouvernement) qui sont à la tête des collectivités territoriales décentralisées
prévu à l’article 55 de la constitution. Mais aussi, parmi celles-ci, on peut ajouter
les organes (Directeurs généraux, Recteurs, etc.) dirigeant des établissements
publics car ils exercent le pouvoir règlementaire (voir la loi N°2017/010 du 12
juillet 2017 portant statut général des établissements publics).

Sujet 2 : Existe-t-il un critère de définition de l’acte administratif


décisoire (ou acte administratif unilatéral) ?
En l’absence d’une définition textuelle de la notion, c’est à la
jurisprudence qu’est revenue la lourde tâche de construire, de déconstruire et de
reconstruire les contours de l’acte administratif unilatéral au fil du temps. Il
serait inique de dire qu’il existe un critère unique de définition de l’acte
administratif unilatéral. En effet, l’examen minutieux de la jurisprudence, en la
matière, incline à penser à une pluralité de critères qui sont à la fois organique et
matériel. Le critère organique renvoie à l’auteur de l’acte. Le critère matériel
renvoie au contenu, à la capacité de l’acte à modifier l’ordonnancement
juridique, à faire grief, bref à créer des droits et obligations à l’endroit des
administrés.
I / Le critère organique de l’acte administratif unilatéral
Si on réfère à l’arrêt NGONGANG NJANKE Martin du 20 mars 1968,
le critère organique postule que l’autorité administrative est l’auteur exclusif de
l’AAU (A). Mais à l’aune de la jurisprudence postérieure, on assiste à la crise de
ce critère organique au regard de la pénétration des autorités non administratives
dans la sphère d’édiction des décisions administratives (B).
A/ La signification du critère organique : l’autorité administrative, auteur
exclusif de l’AAU
1) La notion d’autorité administrative

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a) Une autorité publique organiquement rattachée au pouvoir exclusif :


d’où l’exclusion des autorités judiciaires et législatives de la
catégorie des autorités administratives. Elles participent plutôt des
« autorités publiques non administratives »
b) Une autorité publique investie des pouvoirs administratifs : ces
pouvoirs sont exercés dans le cadre de l’action juridique et matérielle
de l’administration.
2) Les types d’autorités administratives
a) Les autorités de l’administration d’Etat (au niveau central et au niveau
déconcentré)
b) Les autorités administratives décentralisées (que ce soit la
décentralisation territoriale ou technique)
B/ La crise du critère organique : les autorités non administratives, auteurs
de l’AAU
1) Le cas des autorités publiques non administratives
a) Les autorités judiciaires dans le cadre de l’organisation de la justice.
Ex : acte portant création d’une juridiction, acte portant gestion de la
carrière d’un magistrat (CS/CA, Jugement ADD, 28 janvier 1982, TATSINGA
Maurice ; jugement n°52 du 20 mai 1982, ATANGANA MBARGA Adalbert)
b) Les autorités législatives dans le cadre des actes se détachant de la
procédure législative
Ex : actes d’organisation et fonctionnement de la fonction publique de
l’Assemblée Nationale (CS/CA Jugement n°85 du 31 juillet 1997, Dame
NGUEMA Marie c/ Assemblée Nationale)
2) L’immixtion conditionnelle des personnes privées
a) Les conditions d’édictions de l’AAU par une personne privée :
L’exercice d’une mission de service public et / ou la jouissance des
prérogatives de puissance publique
b) Les personnes privées concernées :
Les fédérations sportives (jugement n°48 du 25 mai 1989 ? Aigle royale
de Dschang contre FECAFOOT) ; les ordres professionnels (CFJ/CAY, arrêt
n°50 du 27 juin 1968, Bernard AUTEROCHE c/ ordre national des
médecins)
NB : la personne privée peut aussi intervenir dans le cadre de la théorie du
« fonctionnaire de fait » qui en période normale repose sur l’idée d’apparence

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(CCA, arrêt n°24 du 27 mars 1953, Dame CIVRA) et sur l’idée de nécessité du
service public en période de crise (CFJ/AP, Arrêt n°4 du 4 novembre 1965,
Dame KIEFFER Marguerite)
II/ Le critère matériel de l’acte administrative unilatéral
A. L’articulation du critère : l’affectation de l’ordonnancement juridique
par l’acte
1) L’AAU doit faire grief ; il doit être décisoire ou normateur
2) L’AAU doit produire des droits et obligations à l’endroit des usagers
sans leur consentement
B. La portée du critère : l’exclusion des actes administratifs non
décisoires
1) L’exclusion des mesures d’ordre intérieur et des circulaires
interprétatives (NB : les circulaires réglementaires impératives sont
normateurs ou décisoires)
2) L’exclusion des directives en tant qu’actes pris par une autorité
hiérarchique pour diriger, encadrer l’exercice du pouvoir
discrétionnaire de son subordonné

Sujet 3 : L’auteur de l’acte administratif unilatéral (AAU)

PROBLEMATIQUE : Qui est l’auteur de l’acte administratif unilatéral ?


I- Les autorités administratives
A- Les autorités centrales (voir sujet supra)
B- Les autorités décongestionnées (voir sujet précèdent)
II- Les autorités non administratives
A- Les personnes privées
Les actes unilatéraux que prennent les personnes privées peuvent avoir un
caractère administratif sous réserve de certaines conditions
1) L’identification des personnes privées concernées
Il s’agit des personnes privées physiques (a) et des personnes morales
privées (b)
a) Les personnes physiques privées : la théorie du fonctionnaire
de fait

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Pour André De LAUBADERE, le fonctionnaire de fait est un agent


incompétent, souvent même simple citoyen qui s’est substitué aux autorités
défaillantes, voit ses actes déclarés valides1. La théorie du fonctionnaire repose
sur deux fondements selon qu’on est en période normale ou en période de
circonstances exceptionnelles.
-En période normale, elle est fondée sur l’idée de l’apparence (CCA,
arrêt n° 224 du 27 mars 1953, Dame Civra c/ Administration du territoire)
-En période de circonstances exceptionnelles. Cette théorie se fonde sur le
besoin ou la nécessité d’assurer le fonctionnement régulier du service public
(CFJ/AP, 4 novembre 1965, Dame KIEFFER Marguerite c/ Etat du
Cameroun)
b) Les personnes morales privées
Les personnes morales privées peuvent également prendre des actes à
caractères administratifs. Au rang de ces personnes, on peut citer les
organisation professionnelles (CFJ/CAY, 27 janvier 1968 Bernard
AUTOROCHE c/ Ordre National des Médecins) ; les fédérations sportives
(Dutchon Jean c/ Etat du Cameroun, jugement n°27/91/92 du 27 février
1992, CS/CA)
2- Les conditions d’administratisation d’un acte pris par une personne privé
Pour qu’un acte privé ait le caractère d’un acte administratif, il doit remplir
certaines conditions parmi lesquelles :
- La poursuite d’un service public (TC, 15 janvier 1968,
Compagnie Air France c/ Epoux Barbier)
- La possession des prérogatives de puissances publiques
(FEUMI NJANTOU Jacques c/ Etat du Cameroun)
B) Les autorités publiques non administratives
1) Les autorités judiciaires dans le cadre de l’organisation de la justice.
Ex : acte portant création d’une juridiction, acte portant gestion de la
carrière d’un magistrat (CS/CA, Jugement ADD, 28 janvier 1982, TATSINGA
Maurice ; jugement n°52 du 20 mai 1982, ATANGANA MBARGA Adalbert)
2) Les autorités législatives dans le cadre des actes se détachant de la
procédure législative

1
De LAUBADERE (André), Traité élémentaire de droit administratif, LGDJ, Paris, 1984
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Ex : actes d’organisation et fonctionnement de la fonction publique de


l’Assemblée Nationale (CS/CA Jugement n°85 du 31 juillet 1997, Dame
NGUEMA Marie c/ Assemblée Nationale)

Sujet 4 : L’acte administratif discrétionnaire et l’acte de


gouvernement au Cameroun
L’acte administratif discrétionnaire est un acte administratif unilatéral pris
par une autorité exerçant un pouvoir discrétionnaire. Pour Jacqueline Morand
DEVILLER « il y a pouvoir discrétionnaire lorsque l’administration dispose
d’une certaine liberté d’action- agir ou ne pas agir, et de décision-choix entre
plusieurs solutions légales »2 autrement dit, « il y a pouvoir discrétionnaire
toutes les fois qu’une autorité agit librement, sans que la conduite à tenir lui
soit dictée à l’avance par une règle de droit »3 . Ainsi défini, le pouvoir
discrétionnaire s’oppose à la compétence liée, l’hypothèse où « l’administration
est, d’une part tenue d’agir, d’autre part d’agir dans un sens déterminé sans
possibilité d’appréciation ou de choix »4
Quant à l’acte de gouvernement, il s’agit d’un acte pris par une autorité
exécutive exerçant un pouvoir non administratif. Au Cameroun, l’acte de
gouvernement est une notion importée de la France. L’on se souvient que la
notion émerge dans l’affaire Laffite du 1 er mai 1822 et est définie par le Conseil
d’Etat à partir du mobile politique. Le critère du mobile politique va être réitéré
dans l’affaire Duc D’AUMALE (CE 9 mai 1867). Mais le 19 février 1875, le
conseil d’Etat va abandonner le critère du mobile politique dans l’affaire
Napoléon. Contre toute attente, le juge administratif va ressusciter le mobile
politique dans le jugement ESSOUGOU Benoit en 1980.
PROBLEMATIQUE : quel parallèle peut-on établir entre l’acte
administratif discrétionnaire (AAD) et l’acte de gouvernement (AG) ?
Idée directive : il s’agit de deux actes distincts tant au niveau de leur
nature et de leur étendue (I) qu’au niveau de leur régime en matière
administrative contentieuse (II).
I/ Deux actes distincts de part leur nature et de leur étendue.
A. La distinction quant à leur nature

2
MORAND-DEVILLER (J), Cours de droit administratif, 11e édition, Montchretien, 2009,
p.320 et s.
3
Ibidem.
4
ibid.
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1) La nature administrative de l’AAD


L’AAD a une nature administrative dans la mesure où il est pris par une
autorité administrative exerçant un pouvoir administratif
2) La nature non administrative de l’AG
Il s’agit d’un acte édicté par une autorité exerçant un pouvoir non
administratif
B. La distinction quant à leur étendu ou domaine
1) Le domaine de l’AAG
- Toutes les fois qu’une autorité agit librement, sans que la conduite à
tenir lui soit édictée à l’avance par une règle de droit, Ex :
l’avancement au choix du fonctionnaire, notation des jurys
d’examen ou de concours
2) Le domaine de l’AG
- Le domaine classique : les actes concernant les rapports de
l’exécutif avec le parlement d’une part et d’autre part, les actes
mettant en cause les rapports du gouvernement avec un Etat ou un
organisme étranger
- Le domaine étendu par le juge camerounais : les actes portant
convocation du corps électoral, les actes teintés de mobile politique
(Affaire ESSOUGOU Benoit)
Transition : la distinction entre le AAG et AG atteint son point
d’orgue au niveau de leur justiciabilité
II- Deux actes distincts quant à leur régime en matière administrative
contentieuse
A. L’AAD, une entorse relative au contrôle juridictionnel
1) La soumission de l’AAD au respect de la légalité administrative et
partant au contrôle du juge notamment administratif
2) Le constat d’un contrôle juridictionnel cependant relâché sur les
AAD
Le juge se borne à contrôler les éléments externes à l’acte (compétence,
vices de forme et procédure) mais, il effectue un contrôle dit « minimum » sur
les éléments internes. Ainsi peut-il contrôler le but, la qualification juridique des
faits, l’exactitude matérielle des faits. Par contre, il ne peut contrôler
l’opportunité
B. L’AG, une entorse absolue au contrôle juridictionnel
1) L’AG, un acte jouissant d’une immunité juridictionnelle totale

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2) L’AG, source d’infléchissement de la légalité administrative

Sujet 5 : Acte discrétionnaire et acte à compétence liée


PROBLEMATIQUE : quel parallèle peut-on établir entre l’acte administratif
discrétionnaire (AAD) et l’acte à compétence liée ?
Idée directive : il s’agit de deux actes administratifs distincts aussi bien au
niveau du pouvoir d’appréciation de leur auteur (I) qu’au niveau de l’étendue de
leur contrôle juridictionnel (II)

I- Deux actes distincts de par l’étendue des pouvoirs de l’autorité


administrative qui les édicte
A. Une autorité aux pouvoirs élargis dans le cadre de l’édiction de
l’acte discrétionnaire
1) L’auteur de l’acte discrétionnaire
Il dispose d’une certaine liberté d’action agir ou de ne pas agir, de
décision, de choix entre plusieurs solutions légales
2) L’autorité agit librement, sans que la conduite à tenir lui soit
dictée à l’avance par une règle de droit
Exemple : L’acte par lequel le Recteur de l’université de Yaoundé II
autorise l’installation d’un Kiosque commercial dans l’enceinte du campus
B) Une autorité au pouvoir d’appréciation amoindri dans le cadre de
l’édiction de l’acte à compétence liée
1) la conformité de la décision administrative au sens déterminé
par les textes
2) l’impossibilité pour l’auteur de l’acte à compétence liée
d’apprécier ou de choisir librement
II- Deux actes distincts au regard de l’étendue des pouvoirs de contrôle du
juge administratif
A. Un juge un pouvoir de contrôle réduits sur le contrôle de l’acte
discrétionnaire
1) Le juge contrôle certes la légalité externe de l’acte discrétionnaire
(compétence et vices de forme et de procédure)

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2) Mais, il exerce un contrôle relâché et minimum sur les éléments


internes (but, opportunité et proportionnalité)
B. Un juge aux pouvoirs de contrôle élargis sur l’acte à compétence
liée
1- Un contrôle rigoureux sur les éléments externes
2- Un contrôle plus audacieux sur les éléments internes :
Ici, le juge « pousse le bouchon loin » en vérifiant l’opportunité, la
proportionnalité, l’intention de l’auteur qui ne doit pas avoir détourné son
pouvoir pour un but autre que celui pour lequel ce pouvoir lui a été donné.

Sujet 6 : l’étendue du pouvoir réglementaire du Président


de la République au Cameroun
Les actes administratifs décisoires sont susceptibles de plusieurs
classifications. Mais, si on s’en tient au critère de la généralité et de
l’impersonnalité, on distingue les actes réglementaires des actes non
réglementaires. L’acte réglementaire est un acte pris par une autorité
administrative qui a un caractère général et impersonnel. A l’opposé, l’acte non
réglementaire ne jouit pas des caractères de généralité et d’impersonnalité : il
peut être individuel ou collectif.
Il se dégage de cette distinction que le pouvoir réglementaire est le
pouvoir reconnu aux autorités administratives de prendre des règlements c’est-à-
dire des actes administratifs à caractère général et impersonnel. Le pouvoir
règlementaire ne s’exerce pas ex nihilo : il repose sur des bases juridiques
déterminées ; ces bases pouvant être constitutionnelles, législatives,
règlementaires et même jurisprudentielles.
Les autorités investies du pouvoir règlementaires se trouvent aussi bien au
niveau central avec le Président de la République (PR), en tant qu’autorité
administrative faitière, occupe une place de choix à côté du Premier ministre et
des ministres.
PROBLEMATIQUE : Quelle est l’étendue du pouvoir règlementaire du PR ?
Idée directrice : montrer que les pouvoirs du PR dépendent selon qu’on se
trouve en période d’exception(II) ou en période normale(I)
I- Un pouvoir relativement étendu en période normale
A. La délimitation du pouvoir règlementaire du PR
1) La délimitation par rapport au domaine de la loi

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a) L’exercice par le PR d’un pouvoir règlementaire autonome sur


des matières ne relevant pas du domaine de la loi (article 27 de
la constitution)
b) La possible extension du pouvoir règlementaire du PR dans le
domaine de la loi : les ordonnances (cf. article 28 de la
constitution)
2) La délimitation par rapport aux prérogatives du premier ministre
a) Le principe : le pouvoir règlementaire d’exécution des lois
ressortit au premier ministre en vertu de l’article 12 (2) de la
constitution
b) L’exception : le constat d’un investissement en la matière par
le PR
B) La rigoureuse limitation opérée par le contrôle normal du juge
administratif
1) le contrôle de légalité des actes règlementaires du PR
a) le contrôle du respect des formes et des procédures
b) le contrôle du respect de la répartition des matières entre la loi et
le règlement : la censure des empiétements
2) le contrôle de conformité aux PGD
II) Un pouvoir singulièrement accru en période de crise
A) L’extension des prérogatives du pouvoir règlementaire du PR
1) L’empiétement du domaine de la loi en cas d’état d’urgence
a) L’inobservation des règles de forme et de procédure
b) La modification du régime des libertés publiques
2) L’envahissement du domaine de la loi en cas d’état d’exception
(article 9.2 de la constitution)
a) La dilution de la distinction domaine de la loi- domaine
règlementaire
b) Le double statut des règlements pris par le PR
- Les règlements pris dans le domaine de la loi sont assimilés aux
textes juridiques à valeurs législatives et ne peuvent guère être
déférés pour annulation devant le juge administratif.
- A contrario, les règlements pris dans le domaine des règlements
demeurent des actes administratifs attaquables devant le juge
administratif
B) La timide ou relative limitation opérée par le contrôle minimum du
juge administratif
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LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

1) Le contrôle inégale du juge sur les règlements proclamant la situation de


crise
a) Le possible contrôle de légalité du décret instaurant l’état d’urgence
b) L’immunité juridictionnelle du décret instaurant l’état d’exception
2) Le contrôle minimum exercé par le juge sur les règlements subséquents
a) Le fondement du contrôle minimum : la théorie des circonstances
exceptionnelles (les arrêts HEYRIES, Dame DOL et Laurent du
conseils d’Etat français)
b) Les manifestations du contrôle minimum : le contrôle de la régularité
des actes d’applications des décrets de crise

Sujets de réflexions :
1- En tant qu’autorité règlementaire, le PR peut-il tout
faire « sauf transformer un homme en femme » ?5
2- Constitution et pouvoir règlementaire6

Sujet 7 : La publicité de l’acte administratif unilatérale


La publicité consiste à porter l’acte à la connaissance de son destinataire.
Cette définition a été apportée par le juge administratif Camerounais.
PROBLEMATIQUE : quelles sont le contenu et la portée de la publicité de
l’acte administratif ?
I- Le contenu de la publicité
La publicité revêt des formes différentes selon la nature de l’acte
A- La publicité des actes règlementaires : la publication
Elle peut être faite dans les conditions normales (1) ou en urgence (2).
1- Dans les conditions normales
5
Il faudrait répondre à cette question par la négative car s’il est vrai que le PR exerce un
pouvoir règlementaire très étendu (I), le pouvoir règlementaire n’étant pas un pouvoir
arbitraire, son exercice même par le PR connait un encadrement quelle que soit la période (II)
6
A la question de savoir quelle place la constitution actuellement en vigueur au Cameroun
accorde-t-elle au pouvoir règlementaire, on pourrait répondre : la constitution fixe à la fois le
domaine ratione personae c’est-à-dire les autorités (I) et le domaine ratione materiae c’est-à-
dire le champ matériel d’intervention desdites autorités (II) dans l’exercice du pouvoir
règlementaire
16
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

a) Les moyens normaux


Insertion au journal officiel de l’Etat
b) Effet
L’acte publié entre en vigueur le jour même de la publication dans la
capitale et le lendemain au niveau des chefs -lieux des autres circonscriptions
administrative.
2- En cas d’urgence
a) Mécanisme publicité
- Affichage
- Annonces publicitaires
- Lecture radio etc.
b) Effet
c) En urgence, l’acte administratif publié est exécutoire ou s’étend
son champ d’action
B- La publicité des actes individuels : la notification
1- La notion de notification
La notion de notification a été définie dans l’arrêt du CCA du 10 Août
1957 NJOCK Jean comme étant « la remise à l’intéressé de la copie intenso de
la pièce à notifier ou tout au moins d’un écrit contenant tous les éléments
nécessaires pour lui permettre de se faire un compte exact de la mesure prise à
son égard ainsi que les motifs pour lesquels elle a été prise »
2- Les conditions de la notification
a) La remise intuitu personae de l’acte
b) La remise au domicile à l’intéressé
Que dire de la portée ?
II- La portée de la publicité
Une fois l’acte administratif publié celui-ci fait naitre certains effets.
Toutefois, il faut préciser que la publicité n’est pas la condition sinéquanon de
naissance desdites effets car la publicité connait des inflexions
A- Les effets de la publicité
Il s’agit de l’opposabilité et de l’enclenchement des délais de recours
1- L’opposabilité de l’acte
Une fois l’acte publié, celui-ci devient opposable non seulement aux tiers
mais également à l’administration en vertu du principe « patere legem suam ipse

17
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

fecisti » (arrêt CFJ SCAY, 30/09/1969, MESSOMO ATENEN Pierre C/Etat


du Cameroun)
2- L’enclenchement des délais de recours
C’est à partir du jour où l’acte a été publié que s’ouvre les délais
administratifs et les recours contentieux
B- Les inflexions à la règle de la publicité
1- La théorie de la connaissance acquise
2- Les actes-conditions
Ces actes placent généralement leur destinataire dans une situation juridique
entièrement préétablie par le droit. A titre d’exemple, on peut dire que la
publicité n’est pas une condition d’opposabilité de la décision de mise en
retraite.

Sujet de réflexion : Doit-on dresser l’acte de décès de l’arrêt


NGONGANG NJANKE Martin ?7

Sujet 8 : les formes d’expression juridique unilatérale d’une


autorité administrative

L’autorité administrative s’exprime juridiquement et unilatéralement par


l’édiction, la prise des décisions administratives
PROBLEMATIQUE : Quelles sont les formes que peuvent revêtir une
décision administrative ?

I- La forme explicite de la décision administrative


A- La forme explicite classique : l’écrit ou l’instrumentum
1- Les mentions obligatoires : la signature, le contre seing dans
certains cas
2- Les mentions facultatives : les visas, la date, la motivation
B) les autres modalités de la forme explicite
7
Ici, l’étudiant doit être capable de dire que : certes l’arrêt NGONGANG est une
jurisprudence de référence en matière de définition de l’AAU qui subsiste (I). Mais, cette
définition s’avère aujourd’hui insuffisante au regard de l’évolution de la jurisprudence
actuelle (II).
18
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

1) l’oral et la gestuelle
L’acte administratif peut être verbal ou découler d’un geste d’une autorité
administrative
2)la mécanique : cas des feux de signalisation
II- La forme implicite : le silence de l’administration
A- Les conditions de survenance de la décision implicite
1- L’introduction d’une demande régulière8 à l’administration
2- L’épuisement d’un délai de réponse
B) la signification ambivalente du silence
1) Le silence-refus
Silence gardé par l’administration équivaut au rejet de la demande, Ex :
En matière contentieuse, le requérant doit, avant de saisir le juge administratif
saisir l’administration auteur de l’acte qui lui fait grief à l’aide d’un recours
gracieux préalable (RGP). Le silence gardé par l’autorité adressataire du RGP
pendant un délai de 03 mois vaut rejet de la demande
2)Le silence-acceptation
Le silence gardé par l’administration équivaut à l’acceptation de la
demande. Ex : En matière de communication sociale, l’existence juridique d’un
organe de presse écrite nécessite une déclaration préalable auprès du préfet
territorialement compétent. Le silence gardé par l’autorité préfectoral pendant un
délai de 15 jours vaut acceptation de création de l’organe de presse.

Sujet de réflexion : le silence de l’administration en droit


administratif9

Sujet 8 : Règles obligatoires et règles facultatives en matière


d’élaboration des décisions administratives

8
L’administré doit apporter la preuve de la demande.
9
Qu’est ce qui caractérise le silence de l’Administration en DA ? Je propose : Un mutisme de
l’Administration destinataire d’une requête introduite régulièrement (I). Un mutisme
administratif constitutif de décision administratif implicite (II).
19
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

L’élaboration des AAU s’articule autour d’un nombre de règles qui ont
trait à la forme et à la procédure suivie. Parmi ces règles, il y en a qui participent
des formalités obligatoires ou substantielles. Tandis que d’autres par contre,
constituent des règles facultatives
PROBLEMATIQUE : En quoi les règles obligatoires se distinguent-elles des
règles facultatives ?
I- Distinction quant à leurs caractères et leurs étendues
A) Impérativité contre faculté
1) Les règles obligatoires doivent être respectées
2) Les règles facultatives peuvent être observées ou non
B) Prolifération des règles facultatives contre réduction des règles
obligatoires
1) L’importance numérique des règles facultatives
- Dans la procédure d’élaboration : le cas des délais indicatifs et des avis
facultatifs
- Dans la forme de l’acte : la nature écrite est relative ainsi qu’il ressort
des espèces TONKAM Pierre et DEUDIE Joseph ; les visas ainsi qu’il
ressort des espèces EMINI TINA Etienne, EVINA ADA Christophe ; la
motivation dans l’affaire NGONGANG Alexandre) ; la date
2) La faible valeur numérique des règles obligatoires
- Au niveau de la procédure : les délais impératifs, les avis conformes ; le
respect des droits de la défense ou du principe du contradictoire en
matière disciplinaire comme imposé par la jurisprudence dans l’affaire
SITAMZE Urbain
- Au niveau de la forme : l’exigence de l’écrit est limitée ; l’exigence de la
signature ou du contreseing
- Au niveau de l’auteur : l’exigence de la compétence personnelle
temporelle, matérielle et territoriale
II- Distinction quant aux effets de leurs inobservations sur le plan
contentieux
A) Les effets de l’inobservation des règles obligatoires : l’annulation
1) Le moyen de contestation de l’acte pris en violation des règles
obligatoires : le recours pour excès de pouvoir
2) L’argument pouvant être invoqué au soutien de la demande

20
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

Le vice de forme et procédure si les formalités substantielles sont liées à la


forme et la procédure ; l’incompétence si l’auteur de l’acte n’avait pas une
aptitude légale à agir sous réserve des dérogations liées aux délégations de
pouvoir et à la théorie du fonctionnaire de fait.
B) Les effets de l’inobservation des règles facultatives : validité de l’acte
1) Le caractère inopérant du recours pour excès de pouvoir
2) L’argument pouvant être invoqué au soutien de l’inopérationnalité de
l’annulation :
Le caractère non substantiel des règles inobservées, la validité de la
décision administrative n’est pas affectée.

SUJET 9 : Compétence et élaboration des décisions


administratives

L’élaboration des AAU s’articule autour d’un nombre de règles qui ont
trait à la forme, à la procédure suivie et surtout à l’auteur c’est-à-dire à l’organe
habilité à prendre l’acte. L’auteur de l’acte administratif doit jouir de la
compétence c’est-à-dire de l’aptitude légale à agir, à prendre la décision
administrative
Problématique : Quelle est la place de la compétence dans l’élaboration
des AAU ?
Idée directrice : s’il est vrai que la compétence est une règle substantielle
dans l’élaboration d’une décision administrative (I), elle admet toutefois des
inflexions (II)

I / La compétence, règle substantielle dans l’élaboration des décisions


administratives
A) La typologie de la compétence
1) La compétence rationae temporis et la compétence rationae loci
2) La compétence rationae materiae et la compétence rationae personae
B) La sanction en cas d’inobservation de la règle de compétence :
l’annulation de l’acte
1) Le moyen de contestation de l’acte pris en violation des règles
obligatoires : le recours pour excès de pouvoir

21
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

2) L’argument invoqué au soutien de la demande contentieuse :


l’incompétence
II) La compétence, une règle substantielle sujette à de nombreuses
dérogations
A) Les dérogations inhérentes à la volonté de l’administration
1) Les délégations de compétences
a) La typologie des délégations de compétences : délégation de pouvoir
et délégation de signature
b) Les conditions des délégations de compétences
- Les conditions communes aux deux délégations : elles doivent être prévues dans
un texte, expresse et partielles
- Les conditions spécifiques : la délégation est ex qualité (c’est-à-dire est fonction
de la qualité ou de la fonction du délégataire) ; la délégation de signature est
intuitu personae c’est-à dire qu’elle est fonction de confiance que le délégant a
envers le délégataire.
c) Les effets distincts des délégations de compétence
2) Les suppléances
a) L’intérim
b) Les suppléances stricto sensus
B) Les dérogations inhérentes à l’absence de volonté de l’administration
1) Le fonctionnaire de fait
a) L’idée d’apparence en période normale
b) L’idée de nécessité en période de crise
2) Le collaborateur occasionnel ou bénévole

Sujet de réflexion : délégation de pouvoir et délégation de


signature10

SUJET 10 : les actes administratifs non décisoires

Définir l’acte administratif non décisoire ou non normateur comme un


acte qui ne fait pas grief, qui n’affecte pas l’ordonnancement juridique, qui ne
crée pas de droits et obligations à l’endroit de l’administration
10
En comparant les 2 notions, on pourrait dire : deux inflexions à l’exercice personnel des
compétences (I) ayant certaines conditions communes (A) et d’autres spécifiques (B). Deux
types de délégations distincts quant à leurs effets juridiques (II)
22
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

PROBLEMATIQUE : Quel est le régime juridique des actes administratifs


non décisoires ? Mieux, quels sont ces actes et que dire de leurs portées ?
I) La consistance ou l’étendue des actes administratifs non décisoires
A) Les actes préparatoires et les mesures d’ordre intérieur
1) Les actes préparatoires
Ce sont les actes pris pour préparer l’édiction d’un acte administratif. Ex :
les déclarations d’intention prises en conseil ministériel
2) Les mesures d’ordre intérieur
Ce sont les mesures internes organisant un service ou de maintien de la
discipline dans le service. Ex : le règlement intérieur d’un établissement
B) Les autres actes non normateurs
1) Les circulaires interprétatives
Actes pris par une autorité hiérarchique pour interpréter (donner le sens) à
l’endroit de ses subordonnés un texte législatif ou règlementaire
2) Les directives
Actes pris par une autorité hiérarchique pour diriger, encadrer l’exercice du
pouvoir discrétionnaire de son subordonné
II- La portée ambivalente des actes administratif non décisoires
A- Le credo (principe) : la non affectation de l’ordonnancement
1-Les actes administratifs non décisoires ne créent pas des droits à
l’endroit des tiers
2-les actes administratifs non décisoires ne créent pas d’obligations
à l’endroit des tiers
B) Le bémol : l’affectation de l’ordonnancement juridique non décisoire
1) Le cas des circulaires règlementaires ou impératives
Ici, la circulaire, au lieu juste d’interpréter un texte, ajoute des
dispositions impératives à caractère général et impersonnel, elle fait grief et est
appelée circulaire règlementaire (CE, 29 janvier 1954, arrêt institution Notre
Dame du Kreisker)
2)Le cas des mesures d’ordre intérieur faisant grief
Lorsqu’une mesure d’ordre intérieur comme l’exclusion d’un élève d’une
école (CE 06 juillet 1949, Andrade) ou l’expulsion fondée sur un règlement

23
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

intérieur interdisant le port du foulard islamique (CE 10 mars 1995, Aoukil)


porte atteinte aux droits des intéressés, elle fait grief.

Sujet de réflexion :
1)Tous les actes administratifs affectent-ils l’ordonnancement
juridique ?11
2)L’abrogation et le retrait12

Sujet 11 : La temporalité de l’acte administratif unilatéral


L’acte administratif unilatéral est comme un être vivant. En effet, il
s’inscrit dans une perspective eschatologique. Cela dans la mesure où, il nait, il
vit et meurt. La vie ou la temporalité de l’acte administratif connait trois
moments : l’entrée en vigueur, son exécution et sa sortie de vigueur.
PROBLEMATIQUE : Quels sont les grands moments marquants de la vie de
l’acte administratif unilatéral ?

I- La naissance et l’application de l’AAU : l’entrée en vigueur et


l’exécution de la décision administrative
A- L’entrée en vigueur de l’AAU
1- Le publicité (voir sujet supra)
2- La théorie de la connaissance acquise (voir sujet supra)
B) L’exécution de l’AAU
Deux principes commandent l’exécution de l’AAU. Il s’agit du principe du
privilège du préalable (1) et celui de l’exécution d’office (2)
1- Le privilège du préalable
Ce principe postule que lorsqu’un AAU est émis et publié, il est présumé
légal et conforme au droit en vigueur et par conséquent, il doit appliquer par les

11
Il faudrait répondre à cette question par la négative en présentant les actes tels les circulaires
interprétatives, les directives qui, bien qu’ayant une nature administrative quant à leur auteur
(I) n’affectent pas en principe l’ordonnancement juridique (II)
12
Leur dénomination commune est qu’ils sont tous le fait non pas du juge mais de
l’Administration elle-même (I). Mais leur distinction se situe au niveau du régime de leur
conditions et de leurs effets sur la sortie de vigueur de l’AAU (II)
24
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

tiers avant toutes contestations (CS/CA, jugement n° 33 du 28 septembre 1978,


OWOUNDI Jean Louis c/ Etat du Cameroun)
Toutefois, ce principe connait des inflexions, Exemples : le sursis
inexécution prononcée par le juge administratif, le sursis de paiement ordonné
par l’autorité fiscale, etc.
2- L’exécution d’office
II- La mort de l’AAU : la sortie de vigueur
A- La sortie administrative de l’AAU
1- L’abrogation
Il s’agit de l’opération qui consiste au moyen d’un autre acte à sortir de
l’ordonnancement juridique l’acte existant pour l’avenir. Cette sortie doit
respecter les règles de compétences, de forme et de procédure.
a) L’abrogation de l’acte règlementaire
b) La difficile abrogation de l’acte non décisoire
2)Le retrait
C’est l’opération qui consiste au moyen d’un autre acte à sortir l’acte de
l’ordonnancement juridique à compter du jour où il a été édicté (effet ad initio).
Aussi, cette sortie de vigueur doit se faire dans le respect de certaines
conditions13
B- La sortie juridictionnelle de l’AAU
La sortie de vigueur de l’acte par le juge s’opère dans deux cas de figure
1) L’illégalité de l’acte
2) L’inadéquation de l’acte
L’inadéquation l’acte est liée au changement de circonstances qui ont
commandé l’édiction de l’acte. Ce travestissement va amener le juge saisi à
constater la caducité de l’acte litigieux (Affaire Société Renault Cameroun c/
Etat du Cameroun)

13
Il faut que l’acte querellé soit entaché d’irrégularité ou d’illégalité ; l’acte ne doit pas encore
être devenu définitif, il faut que le retrait intervienne dans les délais du recours contentieux.
25
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

Sujet 12 : Les critères de l’acte contractuel de l’administration

Les critères des contrats administratifs permettent de définir le contrat


administratif. Ils permettent de distinguer le contrat administratif du contrat civil
PROBLEMATIQUE : Quels sont les critères d’identification du contrat
administratif ?
I- Les critères légaux
La loi identifie quatre principales catégories de contrats administratifs
A- Les marchés soumis au code des marchés publics
1- Définition
Selon le décret n°2018/366 du 29 juin 2018 portant Code des marchés
publics, le marché publics est un « contrat écrit, passé conformément aux
dispositions règlementaires, par lequel un entrepreneur, un fournisseur ou
prestataire de service s’engage envers l’Etat, une collectivité territoriale
décentralisée, un établissement public ou une entreprise du secteur public ou
parapublic, soit à réaliser des travaux, soit à fournir des biens ou des services,
dans un délais déterminé moyennant un prix »
2- Les types de marchés publics
- Les marchés de travaux publics
- Les marchés de fournitures des biens
- Les marchés de prestations intellectuelles
B- Les autres contrats administratifs
1- Le contrat de partenariat
2- Le contrat relatif à l’occupation du domaine public et les contrats de
délégation des services publics
II- Les critères jurisprudentiels
La jurisprudence administration pose certains critères de déterminer du
contrat administratif. Il s’agit du critère organique (A) et des critères de
moyens et de finalité (B).
A- Le critère organique : la présence d’une personne publique
1- Le credo
La présence d’une personne publique est nécessaire pour qualifier un
contrat d’administratif.
2- L’exception : la possibilité pour les personnes privées de passer les
contrats administratif (Tc, 8 juillet 1963, Société entreprise Peyrot)

26
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

B- Les critères cumulatifs : les critères des moyens et le critère de finalité


1- Le critère des moyens : l’existence des clauses exorbitantes de droit
commun (CE, 31 juillet 1912 « Société des Granits porphyroïde des
Vosges »)
2- Le critère de finalité : la participation au service public (CE, 4 mars
1910, arrêt Thérond)

Sujet 12 : Que pensez-vous de cette affirmation de Léon DUGUIT


« Il n’y a pas de différence quant au fond entre le contrat civil et
un contrat administratif car dans ses éléments intrinsèques un
contrat a toujours les mêmes caractères et les mêmes effets »14
PROBLEMATIQUE : l’identité proclamée entre contrat civil et contrat
administratif incline-t-elle à penser à une absence de spécificité du second par
rapport au premier ?
Idée directrice : A la vérité si la nature de l’institution est identique (I), les
régimes juridiques ne sont pas nécessairement les mêmes (II)
I- La réalité de l’identité de nature entre contrat civil et contrat
administratif
A) Au niveau de leurs caractères
1) Le caractère consensuel
Que ce soit le contrat civil ou administratif, il faut une manifestation de la
volonté à être lié par les clauses de la convention. C’est le consentement
2) Le caractère bilatéral
Tout contrat nécessite l’accord entre au moins deux parties. La bilatéralité
permet donc de distinguer les conventions des actes juridiques unilatéraux
B) Au niveau de leurs effets
1) La naissance des droits et obligations chez les parties
L’article 1134 du code civil parle de la force obligatoire du contrat puisque
l’administration et son cocontractant doivent exécuter réciproquement leurs
prestations
2) La possible mise en jeu de la responsabilité du cocontractant défaillant

14
Ce sujet a été proposé au concours de l’ENAM (magistrature section administrative 2012)
27
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

Dans l’affaire AMSECOM AMSECON COM, le juge administratif a


admis la responsabilité contractuelle de l’administration défaillante. En droit
civil, on parle dans cette hypothèse de « responsabilité civile contractuelle »
II- La persistance des spécificités du contrat administratif au regard
au contrat civil
A- Le particularisme du contrat administratif au regard des
prérogatives exorbitantes de l’administration
1) Au niveau de la conclusion : l’inégalité des parties contre le principe de
l’égalité dans le contrat civil
- L’administration fixe unilatéralement les clauses du contrat de sorte
que le contrat administration est un contrat d’adhésion
- Sous réserve des règles liées à la passation du contrat,
l’administration choisit librement son cocontractant or en matière
civile, on assiste parfois à des contrats imposés
2) Au niveau de l’exécution : la remise en cause des principes connus en
droit civil
- L’Administration a le pouvoir de direction et contrôle
- Elle peut modifier unilatéralement le contrat à l’exception du prix,
or en droit civil, le principe est celui de l’immutabilité du contrat
- L’Administration a des pouvoirs de sanction pécuniaires en cas de
défaillances du cocontractant, des sanctions coercitives par
lesquelles le cocontractant défaillant est remplacé par un autre
prestataire et ceci à la charge du défaillant
- L’Administration a le pouvoir de résiliation unilatérale
B) Le particularisme du contrat administratif au regard de la
protection du cocontractant
1) Le droit aux indemnités pour aléa administratif ou fait du prince
Lorsque l’administration contractante a fait subir à son cocontractant des
charges supplémentaires, elle doit lui verser des indemnités compensatrices
2)La théorie de l’imprévision, un point de rupture entre contrat civil et
contrat administratif
Alors que le juge civil demeure réfractaire à l’idée de révision du contrat
pour imprévision (Civ. 6 mars 1876, arrêt « Canal de Craponne »), stabilité
étant privilégié, son homologue administratif se montre favorable à cause de
l’imprévision et condamne l’administration à verser à son cocontractant des
indemnités.

28
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

Sujet 13 : Le contrat public est-il un contrat de dupe ?


Il est question dans ce sujet de faire ressortir l’inégalité des clauses
contractuelles qui existe entre l’administration contractuelle et son cocontractant
PROBLEMATIQUE : les inégalités contractuelles observées dans le contrat
administratif sont – elles absolues ?
I- L’affirmation éclatante des inégalités contractuelles dans le
contrat administratif (CS/CA, jugement n°72 du 29/07/1989,
FOUDA Etama c/ Etat du Cameroun)
A- Les prérogatives de gestion
1- Le pouvoir de modification unilatérale du contrat
2- Le pouvoir de direction et de contrôle
B- Les prérogatives de punition
1- Le pouvoir de sanction
- Sanction pécuniaire
- Sanction coercitive
2- Le pouvoir de résiliation
a) Les hypothèses de résiliation
- Pour des raisons du service public (CS/CA, 30 mars 1995, Nyemb
Jean Calvin c/ Etat du Cameroun)
- Pour sanction
b) Conséquence : l’indemnisation du cocontractant (CE, 1952, distillerie de
Magnac-Laval)
II- Toutefois, le maintien des droits du cocontractant de
l’administration
Il s’agit :
A) Des droits au prix et à la protection juridictionnelle
1- Le droit au paiement du prix consenti dans le contrat
2- Le droit à la protection juridictionnelle
Le cocontractant peut demander au juge administratif soit la résiliation du
contrat, soit la réparation du préjudice subi du fait de la défaillance de
l’administration contractante
B) Des droits aux indemnités éventuelles
1- L’hypothèse de l’aléa économique : l’imprévue (voir supra)
2- Les autres hypothèses
- L’aléa technique
- L’aléa administratif ou fait du prince

29
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

Sujet 13 : Police administrative et police judiciaire


PROBLEMATIQUE : la police administrative se distingue-t-elle
fondamentalement de la police judiciaire ?
I- Les points de démarcation entre les 2 types de police
A- Du point de vue de leurs buts
1) Le but de la police administrative : maintenir l’ordre public
2) La police judiciaire : la répression des infractions et le déferrement
des délinquants devant les tribunaux
B) Du point de vue de leur contentieux et régime
1) Le régime
-La compétence du juge administratif en matière de police administrative
que ce soit l’annulation de la mesure de police ou de l’indemnisation
-La compétence du juge judiciaire sauf pour la réparation des dommages
subis à l’occasion de leur participation au service par le personnel de la police
(elle ressortit au juge administratif)
2) Les régimes spécifiques des deux polices
- La police administrative est exercée, selon les cas, au nom de l’Etat ou
de ses démembrements de sorte que la responsabilité peut incomber à chacune
de ces entités
- La responsabilité, en matière de la police judiciaire n’incombe qu’a
l’Etat (au seul nom duquel elle est exercée)
II- Les points de rapprochement entre police administrative et police
judiciaire
A) Au plan organique
1) Le dédoublement fonctionnel
Certaines autorités sont à la fois autorités de police administrative et
judiciaire. Ex : le préfet
2) La mutation de l’autorité de police administrative en organe de police
judiciaire
Ex : le policier agit en tant qu’autorité de police administrative lorsqu’il règle
la circulation. Mais s’il lui arrive de verbaliser un automobiliser qui viole le
Code de la route, il se meut en agent de police judiciaire

30
Edition : KALATA 2023
LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

B) La substitution des activités des deux polices


1) La police administrative peut se transformer en police judiciaire
2) Réversiblement, la police judiciaire peut se muer en police
administrative

Sujet 14 : Les pouvoirs des autorités de police administrative sont-


ils absolus ?
Le but de la police administrative est de maintenir l’ordre public. L’ordre
public est un concept générique qui regroupe quatre éléments : la tranquillité, la
sécurité et salubrité publiques auxquelles s’est ajouté récemment le respect de la
dignité humaine (voir l’affaire du lancer des nains, CE 27 octobre 1995,
Commune de Morsang-sur-Orge). La mise en œuvre des pouvoirs de police pose
de façon latente le problème du respect des libertés publiques. En effet, il est
possible voire plausible de constater des abus dans la règlementation en matière
de police administrative qui amenuisent l’épanouissement des libertés. Il y a un
perpétuel tiraillement entre l’autorité et la liberté. De la sorte, la thématique
portant sur les libertés publiques et l’ordre public est toujours débattue avec pour
finalité de concilier la nécessité de sauvegarder l’ordre public avec les exigences
liées au respect des libertés des administrés.
A la question de savoir si les pouvoirs des autorités de police administratives
sont absolus, il sied de répondre sans ambages par la négative. Car, ces pouvoirs
sont limités en amont par le principe de légalité (I) et en aval par l’intervention
du juge pour les contrôler (II).
I- La limitation des pouvoirs de police administrative par la
juridicité (légalité)
A) L’exigence de compatibilité des mesures de police avec la légalité
ordinaire
1) La notion de légalité ordinaire (les règles propres à
l’administration
2) La soumission stricte des autorités de police aux autres règles
juridiques
B) L’exigence de compatibilité des mesures de police avec la légalité
d’exception
1) La notion de légalité d’exception
2) Le relâchement et non l’absence du respect de la légalité en temps
d’exception

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LA BOUSSOLE EN DROIT ADMINISTRATIF II

II- La limitation des pouvoirs de police par le contrôle juridictionnel


A- L’intervention du juge administratif
1) L’étendue du contrôle
- Contrôle d’opportunité : les circonstances de l’espèce justifiaient-
elles la mesure de police ?
- Contrôle de légalité ou juridicité : la mesure de police est-elle
compatible avec les règles juridiques en vigueur ?
- Contrôle de proportionnalité : les moyens utilisés pour garantir
l’ordre public étaient-ils proportionnels à la menace endiguée quand
on sait que « on ne tue pas une mouche avec un marteau pilon »
2-Les recours intentés devant le juge administratif pour contrôler les
mesures de police
- Le recours pour excès de pouvoir si la mesure de police est
entachée d’irrégularité ou d’illégalité
- Le recours en indemnités si la mesure de police à causer un
préjudice à un administré
B- L’office du juge judiciaire
1) Le contentieux de la saisie des journaux (voir affaire Mutations
c/ Etat du Cameroun)
2) Le contentieux relatif à l’interdiction des manifestations
publiques (voir la loi n°90-055 du 15 décembre 1990 portant
régime des réunions et manifestations publiques)
Sujet 15 : La gestion du service public
D’après une conception classique du service public, celui-ci correspond à
la fois à une activité d’intérêt général et à l’intervention d’un organisme public
auquel est confiée cette activité. Mais aujourd’hui, la coïncidence entre ces deux
aspects du service public n’existe plus. La distinction opérée depuis l’affaire
Bac d’ELOKA (1921) entre le SPA (service public administratif) et le SPIC
(service public industriel et commercial) permet de se rendre que les personnes
privées satisfont aussi les besoins d’intérêt général. Quoi qu’il en soit le service
public(SP) est appréhendé aujourd’hui à travers trois critères : le critère finaliste,
organique et matériel.
D’après le critère organique, le SP est géré par une personne publique ou
privée.
Selon le critère matériel, le régime juridique du SP est irrigué par une part
importante du droit public.

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PROBLEMATIQUE : Quels sont les principes et les modes de gestion du


service public ?
I- Les principes de gestion du service public
Le publiciste français Louis Rolland a développé ces principes au point où
on parle aujourd’hui des « lois de Rolland »
A- Les principes d’égalité et de gratuité
1) Le principe d’égalité
Devenu aujourd’hui un principe général de droit (PDG), du moins depuis
le fameux arrêt BAREL (28 mai 1954) du Conseil d’Etat français, d’égalité qui
dans le contexte camerounais est consacrée par le préambule de la constitution
au point de jouir d’une dignité constitutionnelle, postule ici l’interdiction de
discrimination injustifiée des usagers du service public, l’absence de préférence
juridique d’un usager par rapport à un autre. Il se dégage de ceci que l’égalité
n’est pas arithmétique mais géométrique. Elle ne concerne que les personnes se
trouvant dans une même situation car comme le dit l’adage « A situation
semblable, traitement semblable, à traitement dissemblable, traitement
dissemblable »
2) Le principe de gratuité
Ce principe signifie que les usagers du service public ne doivent pas payer,
rémunérer les prestations qui leurs sont dues. Mais ce principe n’est pas
irrétractable. Cela dans la mesure ou pour bénéficier du service, l’usager peut
être amené à verser une petite contrepartie financière quoique cette exigence
financière ne corresponde pas au cout réel du service
B) Les principes de mutabilité et de continuité
1) le principe de mutabilité
Ce principe signifie que le service public doit pouvoir fonctionner selon
l’air du temps ; il n’est pas figé. Par conséquent l’administration a la possibilité
de modifier les règles d’organisation et de fonctionnement du service public en
vue de l’ajuster ou de l’adapter à un environnement mouvant. Simplement dit, il
faut dire que l’usagers du service public ne saurait se prévaloir des droits
acquis et ne peut juridiquement s’opposer aux modifications résultant d’une
réorganisation ou d’une suppression du service.
La jurisprudence camerounaise épouse cette idée en posant que les agents
et les usagers, au regard du caractère non statique mais dynamique du service
public, doivent adhérer aux réformes administratives. C’est du moins ce qui

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ressort du jugement du 28 avril 1983 NGON A RIKONG. En l’espèce, le


recourant s’était plaint de ce que l’Etat camerounais avait décidé de recruter les
administrateurs civils principaux (ACP) sans passer par la voie de recrutement
usuelle qu’est le concours administratif. Une telle démarche constituait d’après
lui, une violation du principe d’égal accès au service public, ceux qui n’étant pas
comme lui discrétionnairement choisis, étant d’office écarter. Sieur NGON sera
débouté des exigences liées à l’adaptabilité ou mutabilité du service public
2)Le principe de continuité du service public
Le service public (SP) doit fonctionner de façon ininterrompue ou continue.
Comment concilier alors la continuité du service public avec le droit de
grève ? Dans l’affaire Dehaene, le commissaire du gouvernement Gazier opine
que « Admette sans restriction la grève des fonctionnaires, ce serait ouvrir des
parenthèses dans la vie constitutionnelle et, on l’a dit, consacrer officiellement
la notion d’Etat à éclipses ». Suivant ce point de vue, le Conseil d’Etat à décider
que l’exercice de la grève, sans être nécessairement illicite, peut être limité si
elle est de nature à porter une « atteinte grave à l’ordre public »
II- Les modes de gestion du service public
Le Service public peut être géré par les organismes publics eux-mêmes
(A) tout comme il peut être confié à une ou des personnes privées (B).
A- La gestion du service public par les organismes de droit public
1) La régie
Il s’agit de l’exploitation directe du service par l’administration centrale
ou locale dont il dépend avec ses biens et son personnel
2) L’établissement public
B- La gestion du service public par des organismes de droit privé
1) La gestion par habilitation conventionnelle : les délégations de service
public
Le concept de délégation de service public désigne le procédé par lequel
une activité gérée par un organisme public est confiée conventionnellement à
une personne privée. Parmi les formes de délégations de SP existantes, on
distingue la concession et l’affermage
2) La gestion du service public par habilitation unilatérale
La puissance publique, sans passer par un contrat peut confier la gestion
d’un SP à un privé. C’est le cas de la charte des sports qui confie la gestion du
sport aux fédérations sportives.

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Sujet 16 : La soumission de l’action administrative à la juridicité


Il sera un truisme que si on laissait l’action administrative s’exerce sans
garde-fous, ce serait ravaler aux oubliettes la consolidation de l’Etat de droit et
partant la protection des droits et libertés des administrés. Le respect de la règle
de droit s’impose donc à l’administration. Pour éviter toute équivoque sur le
concept de légalité, Charles Eisenmann a esquissé le concept de juridicité
comme plus englobant. Mais si on considère la notion de légalité au sens large,
elle est interchangeable avec celle de juridicité. La juridicité ou légalité désigne
l’ensemble des règles juridiques, quelle que soit leur nature ou origine, en
vigueur dans un Etat qui s’imposent à l’administration. Ces règles juridiques
sont hiérarchisées à l’image de la pyramide du maitre de Vienne, Hans Kelsen.
PROBLEMATIQUE : La soumission de l’action administrative à la juridicité
est-elle absolue ? Dit autrement, n’existe-t-il pas des mesures administratives
qui échappent à l’exigence de juridicité ?
I- Une soumission consacrée et garantie
A) La nomenclature des règles s’imposant à l’administration
1) Les règles internes à l’administration : actes administratives
décisoires et contrat administratif
2) Les règles externes à l’administration :
Il s’agit de la constitution, les traités dument ratifiés, les lois
parlementaires, les règles jurisprudentielles dont le fleuron constitue les PDG
B-Les modalités de contrôle de la légalité de l’action administrative
1) Les recours administratifs : recours gracieux, recours hiérarchique,
recours de tutelle
2) Les recours juridictionnels : le recours pour excès de pouvoirs devant
le juge administratif, l’exception d’illégalité devant le juge judiciaire
répressif
II- Une soumission flexible dans sa mise en œuvre
A- L’assouplissement de la soumission
1- La théorie des circonstances exceptionnelles
2- Le cas du pouvoir discrétionnaire
B) La limitation de la soumission
1- Le décret de proclamant l’état d’exception
2- L’acte de gouvernement

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Sujet 17 : le fait dommageable en matière de responsabilité


administrative / pourquoi dit-on que le fait dommageable est
dual ?
Si le DA est né en France, alors la plupart des règles qui constituent son
ossature y sont aussi nées. Et parmi ces règles, il est celles qui concernent la
responsabilité administrative ou, mieux, la responsabilité extracontractuelle de la
puissance publique.
De façon diachronique, il convient de dire qu’au départ, le principe était
celui de l’irresponsabilité de la puissance publique. L’on estimait, en effet, que
l’administration ne pouvait mal faire parce qu’elle ne pouvait rien faire. Si à la
période de l’Etat gendarme, cette considération pouvait prospérer, l’avènement
de l’Etat providence allait changer la donne surtout au lendemain de la
Révolution française de 1789.
Comme en matière de responsabilité civile délictuelle (article 1382 du
code civil), la mise en œuvre de la responsabilité administrative
extracontractuelle s’articule autour de l’exigence de trois conditions :
-Il faut apporter la preuve d’un dommage c’est-à-dire d’un préjudice
direct , personnel, moral ou matériel
15

-Il faut apporter la preuve d’un fait dommageable c’est-à-dire du fait qui
est à l’origine du dommage
-Enfin, il faut apporter la preuve d’un lien de causalité c’est-à-dire un lien
de cause à effet entre le fait dommage et le préjudice. L’absence ou la relativité
de ce lien aboutit le plus souvent à l’exonération totale ou partielle de
l’administration
PROBLEMATIQUE : Quelle est la nature du fait dommageable en matière de
responsabilité administrative ?
Idée directrice : le fait dommageable peut avoir une nature fautive (I) ou même
une nature non fautive (II).
I- Le fait dommageable, un fait fautif
A- La typologie de faute opératoire en DA français (voir arrêt Pelletier
du 30 juillet 1873 avec les conclusions du commissaire du
gouvernement David, GAJA n°2)
1- La faute de service

15
Mais la jurisprudence admet aussi le dommage indirect ou par ricochet : c’est l’hypothèse
d’un préjudice subi du fait de la perte d’un être cher.
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2- La faute personnelle
B- La typologie de faute opératoire en DA camerounais
1- La faute du service ou faute anonyme
2- La faute de service ou faute d’un agent public identifié
II- Le fait dommageable, un fait non fautif
A- Le fait dommageable fondé sur le risque ou le danger
1) L’utilisation des choses dangereuses
Lorsque l’utilisation par les forces de police d’armes à feu fait courir aux
tiers étrangers à l’opération de police, des risques, la responsabilité de l’Etat
peut être engagée même sans faute (voir arrêts « Consorts Lecomte »16 et
« Daramy »17, CE 24 juin 1949, GAJA, n° 63.
2) Le risque de voisinage ou le voisinage des choses dangereuse
(Voir jugement n° 12, CS/CA du 26 décembre 1991, ONDOUA
ATANGANA Paul c/ Etat du Cameroun, jugement confirmé en appel par
l’arrêt n° 28/A du 27 juin 1996 : en l’espèce l’écoulement d’un pan du mur
clôturant les bâtiments d’un édifice public ayant occasionné la détérioration des
biens du voisin limitrophe, le juge administratif admet implicitement la
responsabilité de l’Etat pour le risque causé par le travail public à savoir la
construction de l’ouvrage public source du dommage.
3) Le risque professionnel18 ou dans la collaboration occasionnelle au
service public19
B- Le fait dommageable fondé sur l’absence de risque ou le danger : la
rupture de l’égalité devant les charges publiques
1- Les conditions de la rupture
Le dommage doit être anormal et spécial
2- L’illustration : voir affaire Dame NGUE Andrée contre Commune
de plein exercice de MBALMAYO20
16
Dans cette affaire, une balle tirée par un policier à la poursuite d’un véhicule suspect avait
atteint le patron d’un café, tranquillement assis devant son établissement.
17
A la suite d’une altercation entre un chauffeur et trois individus, un gardien de la paix
poursuivant les agresseurs, tua une passante.
18
Le juge français décide que l’infirmière qui, contaminée dans l’exercice de ses fonctions,
transmet à son mari le virus du SIDA a droit à la réparation pour risque professionnel (TA,
¨Paris, 20 décembre 1990)
19
Les collaborateurs occasionnels sont indemnisés du fait des dommages subis à l’occasion de
leurs activités occasionnelles au profit de l’administration (voir arrêt n°354, CCA, 06
septembre 1995 KPWANG ESSIANE c/ Administration du territoire du Cameroun.
20
En espèce, la recourant estimait qu’une route urbaine est passée sur sa propriété, lui
détruisant une plantation de maïs et une fosse septique, préjudice dont elle demande au juge
administratif réparation. Le juge administratif admet le principe de la réparation mais
l’assortit d’une condition, à savoir que le préjudice soit exceptionnel c’est-à-dire qu’il revête
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Sujet de réflexion :
La responsabilité administrative est-elle générale et absolue ?

SUJETS TERMINAUX :

1) Le principe de la légalité administrative : austérité ou


flexibilité ?21
2) Le droit administratif est-il un droit des privilèges de
l’administration ou, à l’opposé, un rempart contre l’arbitraire de
l’administration ?22
3) Les prérogatives de l’Administration dénaturent- elles le contrat
administratif ?23
4) Publicité et opposabilité des décisions administratives24

une gravité particulière. Cette condition manquante, en l’espèce, la recourante sera déboutée
(CFJ/CAY n°51, (mars 1969)
21
Un principe rigide ou austère dans son contenu (I). Un principe flexible dans sa mise en
œuvre (II)
22
Le DA, un corpus normatif fortement imprégné des privilèges de l’administration (I). Le
DA, un corpus normatif traditionnellement irrigué par la sève libérale neutralisation de
l’arbitraire administratif (II)
23
Une apparente dénaturation du contrat administratif à l’analyse des pouvoirs exorbitants de
l’administration (I). Une dénaturation tempérée par les droits reconnus au cocontractant (II).
24
Problématique : l’opposabilité d’un acte administratif passe-t-elle nécessairement par la
formalité de publicité ? A cette question on dira que : La publicité, fondement de
l’opposabilité des AAU (I). L’exception à la publicité comme fondement de l’opposabilité de
l’acte administratif : la connaissance acquise (II).
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