Revue française de sociologie

Desrosières Alain, Thévenot Laurent, Les catégories socio-

professionnelles.
Louis-André Vallet

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Vallet Louis-André. Desrosières Alain, Thévenot Laurent, Les catégories socio-professionnelles.. In: Revue française de
sociologie, 1990, 31-3. pp. 505-507;

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Suède, elles sont exploitées comme
travailleuses mais elles sont
relativement mieux logées et elles se
considèrent mieux protégées en tant que
femmes. L'Allemagne fédérale est en
position intermédiaire : les conditions de
travail sont aussi mauvaises qu'en
France mais les conditions de logement
meilleures, et les femmes yougoslaves se
plaignent surtout de leur isolement..
Pour l'auteur, ces différences
s'expliquent par « l'interaction entre des
facteurs de l'ancien et du nouvel
environnement » (p. 203). Or
l'interaction entre le pays d'origine et le pays
d'accueil est ignorée, et même niée, par
la plupart des chercheurs français. Pour
Noiriel par exemple, « on doit voir
(l'immigration) comme un problème
interne à la société française » (1), et il
démontre que la « distance culturelle »
est une fausse explication du racisme
antimaghrébin. Morokvasic a raison de
souligner que cette attitude risque
d'aboutir à nier la diversité culturelle
des immigrés et à négliger la culture du
pays d'origine. Ces deux
problématiques ne sont peut-être pas
inconciliables mais un approfondissement
théorique est nécessaire. Une édition
française du livre de Mirjana Morokvasic
faciliterait beaucoup un débat
scientifique nécessaire.
Maurice Blanc
LASTES, Université de Nancy II
(1) G. Noiriel, Le Creuset français, p. 10
Cf. le compte rendu de cet ouvrage supra.
Les livres
Desrosières (Alain), Thévenot
(Laurent). — Les catégories
socio-professionnelles. Paris, Editions La
Découverte, 1988, 127 p.
(Repères).
Dans cet ouvrage court mais dense,
on ne trouvera pas une présentation
complète et détaillée de la
nomenclature des catégories
socio-profes ion el es telle qu'elle figure par exemple dans
le Guide des catégories
socio-professionnelles publié par Pinsee en 1983. Certes,
les auteurs consacrent un chapitre à la
description de la nomenclature des pcs
et à la présentation des raisons ayant
poussé à modifier l'ancienne
nomenclature (dite des csp) (1), mais leur objectif
est à la fois plus large et plus ambitieux ;
il s'agit d'une part de mieux faire
comprendre l'aspect composite de la
nomenclature française, d'autre part de
faire entrevoir les liens qui unissent la
représentation statistique du monde
social à deux autres formes de
représentation : la représentation dite politique
(au sens large) par laquelle les groupes
professionnels définissent et renforcent
leur identité collective pour accroître
leur visibilité dans le monde social, la
représentation cognitive des catégories
impliquée dans la mise en œuvre et
l'interprétation quotidienne des
catégories socio-professionnelles. En liant
représentations statistique, politique et
(1) Rappelons que les auteurs ont été au
cœur du dispositif d'étude qui a conduit
I'insee à adopter une nouvelle nomenclature
socio-professionnelle en 1982; voir
notamment : A. Desrosières, L. Thévenot, « Les
mots et les chiffres : les nomenclatures
socio-professionnelles », Economie et
statistique, 110, 1979, pp. 49-65; A. Desrosières,
A. Goy, L. Thévenot, « L'identité sociale
dans le travail statistique. La nouvelle
nomenclature des professions et catégories
socio-professionnelles », Economie et
statistique, 152, 1983, pp. 55-81.
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cognitive, les auteurs veulent ainsi ne
pas séparer l'utilisation de la
nomenclature des catégories
socio-profes ion el es de sa genèse historique et des
conditions d'enregistrement, de codage
et d'interprétation qui ont conduit à
l'élaboration et à la compréhension des
tableaux de données.
Un premier aspect du caractère
composite de la nomenclature des
catégories socio-professionnelles réside
dans le fait qu'à la différence de bien
des nomenclatures étrangères elle n'est
ni totalement hiérarchisée, ni unidimen-
sionnelle, mêlant en particulier des
distinctions selon le métier, le statut et
la qualification. Les auteurs font ici
référence à l'histoire des découpages
socio-professionnels (chap. 1) : à la
logique du classement selon le métier
qui prévalait au début du xix« siècle se
sont ajoutées, à la suite de
l'industrialisation, la distinction entre patrons ou
indépendants et salariés puis, entre 1936
et 1950, au sein du salariat, la
distinction hiérarchique liée à l'apparition des
grilles de qualification, tant au sein de
la fonction publique que dans le secteur
privé, par l'intermédiaire des
conventions collectives. C'est donc
l'accumulation de ces trois strates historiques de
même que la garantie souvent apportée
par l'Etat à ces découpages qui
expliquent que, dans la nomenclature de
1982 comme dans celle de 1954,
coexistent des aspects de métier, de statut et
de qualification.
A côté de l'héritage historique,
l'organisation collective et la représentation
politique des groupes professionnels
contribuent à façonner la nomenclature
socio-professionnelle et son utilisation
(chap. 2). Les auteurs font ici
amplement référence aux travaux de L. Bol-
tanski sur les cadres (2) : l'apparition
(2) L. Boltanski, Les cadres. La formation
d'un groupe social, Paris, Editions de Minuit,
1982.
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des catégories de cadres dans la
nomenclature de 1954 fait suite à
l'organisation collective d'ingénieurs au sein de
syndicats professionnels et à la
revendication d'un système de retraite
spécifique. Ils mentionnent également la
consultation, par domaines d'emploi,
des représentants professionnels au
cours de l'élaboration de la nouvelle
nomenclature : l'exemple des
professions de la santé montre clairement
combien l'appellation d'une profession
et son classement dans tel ou tel poste
de la nomenclature sont des enjeux
importants pour les organes
représentatifs des professions. Or ces aspects ne
sont pas sans lien avec l'utilisation de
la nomenclature car des travaux
empiriques montrent par ailleurs que les
variations de déclaration et de
chiffrement d'une profession sont d'autant
plus grandes que l'image sociale de
celle-ci est plus faiblement constituée.
Après l'étude de la genèse et de la
fabrication de la nomenclature
socioprofessionnelle, le lecteur est invité à se
pencher sur la pratique de classement et
l'interprétation des catégories sociales
(chap. 3). Cette dernière est en effet le
lot quotidien d'une chiffreuse de I'insee
confrontée au codage d'un cas
particulier non prévu mais aussi celui d'un
lecteur de tableaux qui personnifie,
dans des images typiques, les diverses
rubriques de la nomenclature. Les
auteurs font ici appel à des observations
réalisées au sein d'ateliers de
chiffrement de même qu'à des travaux
expérimentaux originaux où des
non-spécialistes étaient invités à construire
concrètement des catégories sociales. Deux
conclusions émergent : contrairement à
ce que suppose la définition formelle
d'une nomenclature, l'activité pratique
de classement ne fait pas référence, le
plus souvent, à des critères, mais
procède plutôt par rapprochement et
assimilation à des cas considérés comme
typiques; l'émergence de ces cas
typiques ou bons exemples ayant pour
fonction de représenter la catégorie est

liée au travail de représentation
politique du groupe professionnel. Aussi la
connaissance des noms des catégories et
des découpages majeurs ne suffit-elle
pas pour expliquer l'utilisation de la
nomenclature socio-professionnelle, et
une conséquence en a été tirée qui
donne naissance à un deuxième aspect
composite de la nomenclature des pcs :
dans sa présentation des catégories, elle
mêle des définitions au moyen de
critères à une enumeration de cas typiques
qu'entourent des cas assimilés, des cas
limites inclus et des cas limites exclus.
Après une présentation de la
nomenclature des pcs et des grands groupes
qui la constituent, le chapitre 5 esquisse
une synthèse des résultats accumulés
par l'usage de ces catégories. Un
troisième aspect composite apparaît : la
nomenclature est utilisée pour classer
des individus d'après leur position dans
la production mais aussi des ménages
selon leur milieu social. Or ces deux
usages conduisent à une même
représentation, stable et régulière, de l'espace
social sous une forme bidimension-
nelle : le premier axe, qui constitue
l'échelle sociale, est complété par un
second axe opposant les indépendants
aux salariés, mais aussi le monde des
entreprises privées à celui de la fonction
publique, et la robustesse de cette
représentation a pour effet de conférer à
la nomenclature un remarquable
pouvoir de cumul des connaissances.
D'une lecture aisée, Les catégories
socio-professionnelles constitue donc un
ouvrage utile, car il permet de mieux
comprendre la logique d'un instrument
de classement fort employé par les
sociologues en en situant la genèse, la
fabrication et l'utilisation. Les auteurs
ont eu la bonne idée de placer en
annexe la description de la
nomenclature par professions détaillée (455
postes). Enfin, une bibliographie complète
l'ensemble, où figurent nombre de
travaux ayant utilisé la nomenclature des
catégories socio-professionnelles, mais
Les livres
on peut s'étonner de n'y trouver ni ceux
de R. Boudon relatifs à la mobilité
sociale, ni ceux de M. Cherkaoui
relatifs à la sociologie de l'éducation.
Louis-André Vallet
IPSA, Angers
Topalov (Christian). — Le logement
en France. Histoire d'une
marchandise impossible. Paris, Presses
de la Fondation Nationale des
Sciences Politiques, 1987, 437 p.,
graph., cartes, bibliogr.
D'une manière générale, les
sociologues travaillant sur le logement
prennent ce dernier comme variable
explicative des faits sociaux qu'ils se proposent
d'analyser. Sont ainsi classiquement
étudiés la vie dans les grands
ensembles, la structure des budgets familiaux
ou les impacts de la rénovation des
quartiers anciens. Toutes ces
thématiques, attachées aux usages différenciés
de l'habitat, se situent en aval de la
production du cadre bâti.
L'approche de C. Topalov est à
l'exact opposé puisqu'il nous propose,
avec cet ouvrage issu de sa thèse d'Etat,
une étude principalement centrée sur
l'amont de la construction. Son projet
est manifestement ambitieux : faire
l'histoire et expliquer « les changements qui
affectent les formes et la distribution de
la propriété du logement » (p. 14). Il
souhaite retracer la diversité des «
systèmes d'agents » ayant concouru à la
possession de ce bien, délimiter les
principales étapes, retrouver les
moments charnières, restituer les causes de
ces lentes transformations. Les
conséquences du changement ne sont donc
pas abordées; l'habitat en tant
qu'espace concret de pratiques sociales
n'apparaît pas dans l'ouvrage.
L'évolution des formes de propriété
peut évidemment être analysée en rap-
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