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Collection

CCMP
G1940
La Foodtech en
France : quelles
stratégies de
croissance pour
Foodora, Deliveroo et
Uber Eats ?

Auteurs :
Guillaume CARTON, Marie JOACHIM

Etablissements créateurs :
ISG BUSINESS SCHOOL PARIS, UNIVERSITE
PARIS DAUPHINE

Licence d'utilisation accordée à : UNIVERSITE PANTHEON SORBONNE PARIS UFR 06

- L'établissement acquéreur est autorisé à diffuser le produit pédagogique à l'ensemble de son corps professoral dans le cadre de ses enseignements.
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La Foodtech en France

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Etat des nouveaux modèles d'affaires qui dévorent le marché de la
livraison de repas 1
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Image Creative Commons - via gratisography.com


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© CCMP 2018 - G1940

Auteur(s) : Guillaume CARTON, Marie JOACHIM


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Etablissement(s) créateur(s) : Institut Supérieur de Gestion (ISG), PSL Université


Paris Dauphine
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Les auteurs souhaitent remercier Boris Mittermüller, Camille Hadjeri, Benjamin Okra ainsi que les étudiants de
Telecom ParisTech ayant suivi l'option "Digital management" en 2016/2017 pour leur aide apportée durant la
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rédaction de ce cas.
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Sommaire

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I. Un marché en plein essor : une nouvelle offre en réponse à de nouveaux

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besoins ......................................................................................................... 3

A. Une demande en pleine transformation .............................................................. 3

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B. Le marché de la livraison de repas en pleine expansion ..................................... 3
C. Un écosystème d’acteurs complexe .................................................................... 4
D. Les plateformes : agrégateurs et Foodtech......................................................... 4

NE
E. Les consommateurs ............................................................................................ 7
F. Les restaurateurs ............................................................................................... 8

ON
G. Les coursiers ...................................................................................................... 8
H. Les fonds d’investissement................................................................................. 9
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© CCMP 2018 - G1940 - La Foodtech en France – Guillaume CARTON, Marie JOACHIM – ISG,
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La Foodtech en France

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Etat des nouveaux modèles d'affaires qui dévorent le marché de la
livraison de repas

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RI
Quels sont les facteurs clés de succès du marché de la Foodtech ?
Quelles stratégies de croissance les acteurs de la Foodtech doivent-ils mettre en

PA
place pour se positionner sur le secteur ?

NE
I. Un marché en plein essor : une nouvelle offre en réponse à
de nouveaux besoins

ON
A. Une demande en pleine transformation
Entre 2009 et 2016, on observe en France une augmentation de 70 % (en volume) de la livraison
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de repas. Ce phénomène peut s’expliquer notamment par le profond changement des logiques de
consommation. 2 D’une part, la crise a modifié les habitudes de prise de repas (i.e., baisse des
sorties au restaurant, économies sur les boissons et les desserts). 3 D’autre part, le temps consacré
à la préparation des repas a diminué. Il est estimé que parmi 10 consommateurs qui sortent du
SO

bureau, 7 ne savent pas ce qu’ils vont manger en rentrant chez eux. 4 Il s’est ainsi développé,
principalement auprès de la tranche des 15-35 ans, ce que l’on appelle le « home snacking », à
savoir le fait de manger à domicile en faisant autre chose (i.e., regarder la télévision). Ceci
nécessite l’achat de produits prêts à consommer, ou à réchauffer rapidement, ce qui passe
notamment par la livraison de repas à domicile. 5
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La livraison à domicile gagne majoritairement les grandes villes qui disposent d’un maillage dense
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de restaurants, ainsi que d’un fort bassin de potentiels consommateurs. Elle évolue également avec
le développement des smartphones et des tablettes. Actuellement, en France, 70 % des
commandes sont encore réalisées par téléphone alors que dans un pays plus mature comme le
Royaume-Uni, ce chiffre tombe à 55 %. 6
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B. Le marché de la livraison de repas en pleine expansion


C’est ainsi majoritairement à domicile que s’effectue la livraison de repas (82 % des commandes). 7
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Ce marché représente au niveau mondial 83 milliards d’euros, soit environ 1 % du marché total de
la vente de nourriture. C’est un marché mature dans la majorité des pays – le taux de croissance
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sur 5 ans est estimé à 3,5 %. Un français sur deux s’est fait livrer un repas à domicile ces
6 derniers mois. 8 Ce marché en plein développement s’adapte à de nouvelles habitudes de
consommation, comme la livraison sur le lieu de travail, qui représente aujourd’hui 16 % des
TE

2
Colomb Sara et Alegria Cathy, « La Restauration Rapide », Xerfi, Octobre 2016
3
Salmon, David G. et Journo, Laurent J., « Food Service – Hotel restaurant Institutional – France », Gain
Report, USDA Foreign Agricultural Service, 31/12/2015
SI

4
« Livraison : l’essor avant le tri », Neorestauration.com, 7 Novembre 2016
5
« Les Français se mettent au home-snacking », Points de Vente, Février 2011
6
« Livraison : l’essor avant le tri », Neorestauration.com, 7 Novembre 2016
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7
Carsten Hirschberg, Alexander Rajko, Thomas Schumacher et Martin Wrulich, “The changing market for food
delivery”, McKinsey, Novembre 2016
8
« #congressnacking : François BLOUIN, Food Service Vision : le snackeur 2016, de plus en plus connecté »,
Snacking.fr, 8 juin 2016
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commandes. Ces opportunités sont aujourd’hui exploitées à 90 % par les acteurs de la livraison
traditionnelle (pizzeria, restaurations chinoises et japonaises) qui gèrent directement la livraison. 9

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En observant les mutations qui ont lieu sur le secteur de la livraison de repas à travers
16 pays, le cabinet de conseil en stratégie McKinsey estime que d’ici à 2020, ce ne sont plus les
acteurs traditionnels qui vont dominer le marché, mais de nouveaux acteurs de la Foodtech qui
vont réinventer la chaîne de valeur de la livraison de repas en suivant une croissance de plus de

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15 % par an. 10

RI
C. Un écosystème d’acteurs complexe
L’écosystème de la Foodtech est composé de cinq types d’acteurs. En premier lieu, un certain

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nombre d’entreprises jouent le rôle de plateforme, en proposant des offres d’agrégation ou de
livraison de plats préparés. En deuxième lieu, les restaurateurs sont les fournisseurs de ces
prestations, tandis que les consommateurs en sont les clients finaux. En troisième lieu, ce service
ne pourrait avoir lieu sans la présence de coursiers qui permettent à ce service d’exister, tandis

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que les fonds d’investissement financent cette industrie dont la rentabilité des modèles
économiques reste encore à prouver.

D. Les plateformes : agrégateurs et Foodtech

ON
On peut distinguer sur le marché de la livraison de repas deux types d’acteurs : les agrégateurs qui
sont apparus il y a une quinzaine d’années, et les nouvelles plateformes de la Foodtech dont les
premières datent de 2013. 11 Tandis que dans le monde ce sont Delivery Hero, Foodpanda
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(récemment racheté par Delivery Hero), GrubHub et Just Eat qui dominent le marché, en France,
c’est Allo Resto, la filiale française du Britannique Just Eat, qui représente les agrégateurs
(voir encadré 1). L’entreprise propose aux restaurants qui possèdent déjà leur service de livraison
de les mettre en relation avec un bassin de consommateurs. Ils proposent ainsi une offre
centralisée permettant aux consommateurs de choisir, via un portail unique, le restaurant à partir
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duquel ils souhaitent se faire livrer. Sur certains sites, le consommateur a la possibilité de
comparer les menus, ainsi que de lire les avis des autres utilisateurs.

C’est ce service d’agrégation de la demande et de l’offre qui constitue la principale proposition de


valeur. Le modèle d’affaires repose sur les frais d’adhésion que paient les restaurants qui veulent
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intégrer la plateforme, et sur les publicités générées par le site. Du côté du consommateur, une
commission fixe est également prélevée sur le montant des commandes qui passent par les
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restaurants du site. Elle s’élève en moyenne à 2,7 euros. 12 Ce modèle permet aux agrégateurs
d’avoir un taux de marge compris entre 40 % et 50 %.
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9
Ibid.
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10
Carsten Hirschberg, Alexander Rajko, Thomas Schumacher et Martin Wrulich, “The changing market for food
delivery”, McKinsey, Novembre 2016
11
Ibid.
12
Hass, H. “Allo resto. Cliquez, c’est livré !”, Blog Culture Entrepreneur, 11/02/2014
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Encadré 1 : Allo Resto fait face à l’avènement des Foodtechs

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Face à l’arrivée des Foodtechs, Allo Resto qui était précurseur sur le marché français de la livraison
de repas, voit sa part de marché diminuer. Pour le PDG de l’entreprise Sébastien Forest, le
phénomène Foodtech surfe sur l’évolution de la livraison des repas, mais également sur l’utilisation
de nouveaux supports de commande notamment le mobile. 13 Pour y faire face, l’entreprise a pris
les devants. Tout d’abord, elle consolide sa base de clientèle en rachetant le fichier des 200 000

S
clients de Take Eat Easy, qui a déposé le bilan en juillet 2016 (cf. encadré 2). Elle mène également
une importante campagne de communication basée sur son changement de marque « Allo Resto »,

RI
connotée appel téléphonique, en Just Eat, le nom de sa maison mère britannique, l’un des leaders
mondiaux de la livraison de repas. 14 Ensuite, elle renforce son cœur de métier en rachetant les
activités technologiques (l’algorithme de répartition des commandes en fonction des différents

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livreurs) de la société Tok Tok Tok qui a fermé en septembre 2016. Dans un souci de compétitivité,
elle change également son mode de rémunération en passant à un taux de commission sur
commandes, à l’instar des start-ups de la Foodtech, inférieur à ceux de ces dernières. 15 Enfin,
l’entreprise se diversifie. Fin octobre 2016, Allo Resto annonçait ainsi un partenariat inédit avec le
réseau de magasins de proximité Franprix pour livrer des repas sur le pouce.

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De leur côté, les acteurs de la Foodtech représentés en France par Foodora, Deliveroo ou encore
Uber Eats permettent, tout comme les agrégateurs au consommateur, de choisir parmi des offres
de différents restaurants. Leur proposition de valeur réside cependant dans l’apport d’une

ON
logistique pour les restaurants qui ne livrent pas à domicile. Ils proposent ainsi une gamme
potentiellement plus large de restaurants à leurs clients (les agrégateurs se focalisant sur les
restaurants disposant de leur propre système de livraison).RB
S’il y a peu d’agrégateurs sur le marché français, les acteurs de la Foodtech sont quant à eux de
plus en plus nombreux. Ils peuvent se répartir en trois catégories : ceux qui dominent le marché
(i.e., Foodora, Deliveroo), ceux qui se positionnent sur des marchés de niche (i.e., Frichti,
Food Chéri) et enfin ceux dont l’activité Foodtech ne constitue pas leur cœur de métier (i.e.,
SO

Uber Eats, ChronoFresh, GoCater).

Trois acteurs se sont rapidement positionnés sur le marché de la Foodtech : Deliveroo, Foodora et
Take Eat Easy. Le premier, Deliveroo, est une start-up anglaise, créée en 2013, qui a su attirer de
nombreux fonds d’investissement en faisant 5 levées de fonds consécutives, ce qui lui permet
aujourd’hui d’être implanté dans 12 pays avec une présence en France dans 20 villes 16. Le
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deuxième, Foodora, a été fondé en 2014. Il a été incubé par Rocket Internet, qui a également
lancé des pépites comme Zalando, eDarling ou encore Helpling et appartient maintenant à l’un des
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leaders mondiaux de la livraison de repas, l’allemand Delivery Hero qui vient de réussir fin
juin 2017 sa rentrée en bourse après avoir levé 387 millions auprès du fonds sud-africain
Napsers. 17 Foodora est présent dans plus de 10 pays et 8 villes en France. Si ces deux start-ups se
sont largement développées et dominent aujourd’hui à la fois le marché international et le marché
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français, c’est que Take Eat Easy a déposé le bilan en juillet 2016 faute de financements (voir
encadré 2).

Par ailleurs, constatant la croissance de la demande sur le marché français de la livraison de repas,
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de nombreuses entreprises ont cherché à y entrer en se différenciant des trois leaders. Une
première stratégie concerne l’intégration dans la chaîne de valeur en n’assurant pas seulement la
PA

livraison, mais aussi la confection des plats. 18 Frichti par exemple, fondé en juin 2015, propose des
plats faits maison par des chefs ou des formules pour le midi à moins de 10 euros, livrés à domicile
ou sur le lieu de travail en moins de 30 minutes. Frichti connaît un succès grandissant comme
TE

13
Raison, Gilles, « Comment ALLO RESTO voit évoluer le marché de la livraison de repas », Challenges,
29/07/2016
14
Visseyrias, Mathilde, « Le menu d’Allo Resto pour résister à l’offensive de Deliveroo », Le Figaro, 21/01/2017
SI

15
Raison, Gilles, « Comment ALLO RESTO voit évoluer le marché de la livraison de repas », Challenges,
29/07/2016
16
Rioux, Alain « Deliveroo couvre 20 villes en France pour la livraison de repas », Larevuedudigital.com,
ER

1/06/2017
17
"We can be heroes", The Economist, 08/07/2017
18
Weiss, Marcel, “How the Food Delivery Space Evolved From 2011 To 2017”, Early Moves, the Future Retail
Blog, 31/05/2017
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témoigne sa levée de fonds de 12 millions d’euros en 2016. Le positionnement de Food Chéri
défend le « manger mieux » et « manger bien », également adopté par Frichti. Cependant, à la
différence de ce dernier, Food Chéri n’internalise pas seulement la production des repas, mais aussi

UF
la gestion de la livraison. Cela répond aux problèmes causés par le recours à des livreurs pour
assurer le service de livraison, liés à leur statut de travailleur indépendant. L’entreprise semble
également rencontrer un certain succès si on en croit sa levée de 6 millions d’euros de fonds à
l’automne 2016. 19

S
Une deuxième stratégie concerne les villes d’implantation. La start-up lorraine Fetch a par exemple

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pris le pari de se concentrer sur les villes de moins de 200 000 habitants qui sont souvent
délaissées par les acteurs dominants de la livraison de repas. Enfin, une troisième stratégie vise à
tirer bénéfice des synergies que l’entreprise peut créer avec ses autres métiers. Par exemple, Uber

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a lancé en 2014 sa filiale Uber Eats présente aujourd’hui dans plus de 100 villes dans le monde,
dont 11 en France. L’entreprise peut compter sur sa réputation, la présence de son application sur
les smartphones de nombreux clients potentiels et son réseau de chauffeurs pour proposer une
livraison rapide et dans un champ géographique étendu. Des acteurs de la logistique, par exemple
La Poste, investissent également dans la livraison de nourriture. À ce titre, l’opérateur postal a

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acquis 80 % du capital de Resto-In qui livre des repas plutôt haut de gamme. Il propose également
via sa filiale Chronopost une offre Chronofresh qui livre des produits frais à destination des
entreprises du secteur agroalimentaire. 20 Enfin, des acteurs de la restauration comme la
Belle Assiette, proposant un service de réservation d’un chef à domicile, se sont également

ON
positionnés sur le marché. L’entreprise a lancé le service GoCater qui propose des livraisons de
plats de traiteurs, à un jour et une date prédéfinie, plutôt à destination des professionnels ou à
l’organisation d’événements sur le lieu de travail.

L’évolution rapide du marché, par l’arrivée de nouveaux entrants, la création de multiples niches ou
RB
la disparition de certains acteurs, laisse penser que ces catégories d’acteurs vont rapidement
évoluer afin de mieux satisfaire les besoins des consommateurs.

Encadré 2 : la faillite de Take Eat Easy


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Fondée en 2013, Take Eat Easy annonce en juillet 2016 son redressement judiciaire, après 2 levées
de fonds successives effectuées auprès de Rocket Internet, l’embauche de 160 salariés, une
présence dans 20 pays, des partenariats avec 3200 restaurants à travers le monde, une base de
quelques centaines de milliers de clients et… un million de commandes effectuées. 21 Le modèle
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d’affaires de l’entreprise était simple : un taux de commission par repas facturé au restaurateur
entre 25 % et 30 %, des frais de port de 2,5 euros payés par le client, le tout servant à rémunérer
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les coursiers et à faire fonctionner la plateforme. Les coursiers étaient payés à un taux horaire
d’environ 15 euros. L’objectif de la plateforme est donc de gérer l’offre et la demande afin qu’il y
ait suffisamment de commandes par coursier et par heure pour que l’entreprise soit rentable. La
plateforme doit donc être conçue pour optimiser la distribution des commandes aux coursiers et
TH

aux restaurants en fonction de la position et de la vitesse moyenne du coursier. Elle doit également
planifier le bon nombre de coursiers à chaque horaire en fonction de facteurs à la fois internes et
externes à l’organisation. Enfin, elle doit réussir à bien intégrer les opérations du restaurateur via
une application dédiée.
N

Mais en juillet 2016, les commissions et les frais de port ne compensaient pas les 15 euros de
l’heure (ainsi que les frais de structure) : l’entreprise n’était par conséquent pas rentable. 22 Tandis
PA

que l’entreprise était en train de négocier un nouveau « tour de table » lui permettant de combler
ses pertes, le « grand groupe industriel public français » avec lequel elle était en discussion pour
une troisième levée de fonds a finalement retiré son offre, tout comme les 114 fonds
d’investissement auxquels elle avait déjà fait appel !
TE
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19
Russel, Géraldine, « 2016, année charnière pour le marché de la foodtech », Le Figaro, 30/12/2016
20
http://www.chronopost.fr/fr/chronopostfood
21
Roose, Adrien, « From 0 to 1,000,000 to? », Medium, 26/07/016
22
Russel, Géraldine, « 2016, année charnière pour le marché de la foodtech », Le Figaro, 30/12/2016
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E. Les consommateurs
Dans la mesure où les consommateurs utilisent les services de livraison à domicile plutôt le soir,

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c’est sur cet espace de marché que se concentre la majorité de l’offre. Mais le segment du déjeuner
reste une niche intéressante comme le montre l’exemple de la start-up Nestor, qui a levé
900 000 euros en 2016 et qui cuisine et livre une proposition de repas unique sur ce créneau. 23 En
rentrant sur cette niche, les acteurs de la Foodtech rentrent en concurrence indirecte avec les
acteurs de la distribution collective ce qui peut laisser entrevoir non plus seulement des prestations

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en Business-to-Consumer, mais aussi en Business-to-Business. 24 Certains acteurs à l’instar de
Foodora et Deliveroo s’en sont emparés en développant une plateforme dédiée à laquelle les

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employés d’une entreprise qui ont signé un partenariat avec Foodora ou Deliveroo ont accès sur la
base d’un budget alloué directement par l’employeur. D’autres acteurs comme Allo Resto ou
Food Chéri se positionnent sur ce segment de marché en acceptant le financement des repas par

PA
les entreprises par l’intermédiaire des tickets restaurants.

Le consommateur cherche un prix abordable, une livraison rapide, un large choix et un service
facilité. Tout d’abord concernant le prix de livraison, il gravite pour l’ensemble des acteurs autour

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de 2,50 €. Pour preuve que le prix est important sur le marché de la Foodtech, des acteurs comme
Foodora font le pari que des clients vont venir récupérer leur commande directement au restaurant
afin d’économiser ces frais de livraison, en proposant une offre « Click & Collect ». 25

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Par ailleurs, pour satisfaire le désir d’un large choix de restaurants et d’une livraison en moins de
30 minutes, le choix des villes dans lesquelles sont situés les acteurs de la Foodtech est un enjeu
clé. Elles doivent être assez denses afin que la rencontre entre l’offre en restaurants et la demande
de plats livrés puisse se faire sans que les déplacements des livreurs ne soient trop importants,
ceci afin que l’entreprise reste rentable (voir encadré 2). Les majors du secteur ont ainsi tendance
RB
à délaisser les villes de moins de 200 000 habitants. Pour optimiser la rencontre entre offre et
demande, une initiative récente est à mentionner. Pour fournir des quartiers où la demande excède
l’offre, Deliveroo a lancé en avril en France le service Deliveroo Editions, un réseau de cuisines en
marque blanche permettant aux restaurateurs d’atteindre une clientèle éloignée de leurs
SO

restaurants sans avoir à ouvrir un nouvel établissement. Deliveroo prend en charge l’apport en
capital, mais prélève une commission plus importante et demande l’exclusivité de la distribution. 26

Enfin, les consommateurs veulent effectuer leur commande de façon simple. L’accent est ainsi mis
sur l’ergonomie de l’interface de commande afin de générer de la confiance avec ce dernier, et de
N

créer une habitude d’utilisation (i.e., connexion avec un compte Facebook, codes de carte bleue
préenregistrés). On voit notamment émerger sur les applications des chats en direct pour résoudre
EO

le plus efficacement possible d’éventuels problèmes rencontrés lors de la livraison.

Pour attirer cette clientèle, on observe une véritable bataille marketing. L’utilisation d’une large
palette de supports de communication et de stratégies marketing est au cœur du déploiement de
Deliveroo et Foodora dans de nouvelles villes : « la concurrence acharnée à laquelle se livrent les
TH

entreprises du secteur renchérit les coûts marketing, et chaque ouverture de ville donne lieu à une
coûteuse guérilla publicitaire pour ferrer le client » rapporte une journaliste. 27 Par exemple, lors de
son arrivée à Lyon, Foodora a mené d’importantes opérations de communication dans la ville à la
fois par achat d’espaces publicitaires et par distribution de flyers. De plus, afin de s’adresser à la
N

génération (et future génération) la plus encline à recourir à ses services, Foodora réalise
annuellement un événement avec les bloggeuses les plus influentes de la région pour leur faire
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découvrir un nouveau restaurant partenaire. La complémentarité des stratégies online et offline


pousse les acteurs à être présents aussi bien à la télévision, sur les arrêts de bus ou sur les bus
eux-mêmes, que sur les réseaux sociaux ou de la publicité ciblée en ligne. En réponse, Deliveroo a
proposé, sur un court laps de temps, un menu réalisé par un chef étoilé pour un tarif préférentiel
TE
SI

23
Russel, Géraldine, « Les villes moyennes, clé de la rentabilité pour la foodtech ? », Le Figaro, 19/11/2016
24
Perriot, Pascal, « #FoodTech : restauration livrée en entreprise, en route vers la digitalisation ? »,
Snacking.fr, 09/09/2016
ER

25
« Foodora se lance dans le click&collect », Neorestauration.com
26
Beuth, Marie-Christine, « Deliveroo ouvre un réseau de cuisines pour permettre aux restaurants de servir
leurs plats à des clients trop loin d’eux », Business Insider, 06/04/2017
27
Russel, Géraldine, « 2016, année charnière pour le marché de la foodtech », Le Figaro, 30/12/2016
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de 35 euros. 28 Pour d’autres acteurs comme Uber Eats, le développement peut sembler plus simple
dans la mesure où l’entreprise s’appuie sur son réseau de chauffeurs et sur son application mobile
existants. Cela n’empêche cependant pas l’entreprise d’avoir eu recours pour la première fois à une

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campagne nationale dans le courant de l’année 2017.

F. Les restaurateurs

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En travaillant avec les acteurs de la Footechs, les restaurants se voient offrir un service logistique
structuré de livraison reposant sur des moyens de conditionnement, de gestion des commandes

RI
(tablettes), de mise en relation avec les coursiers et de livraison de plats préparés dans les
restaurants. En contrepartie, ils versent une commission variant entre 12 % et 30 % du prix de la
commande. Les stratégies de fixation des prix diffèrent suivant les acteurs. Deliveroo par exemple

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choisit de nouer des contrats d’exclusivité, ceci accompagné d’une stratégie visant à rogner sur ses
marges afin de verrouiller le marché. Foodora, au contraire, cherche plutôt à ponctionner des
commissions plus élevées, ce qui lui assure une rentabilité supérieure, mais rend l’entreprise de
facto moins attirante pour les restaurateurs. 29 Dans tous les cas, l’objectif est le même : proposer

NE
les plats au même prix que si le client était attablé au restaurant. Les restaurateurs sont ainsi
obligés de rogner sur leur marge afin de payer le service rendu par l’entreprise. Si l’on en croit le
PDG de Foodora France, cela s’avère payant pour les restaurateurs, car en 2016, ceux travaillant
avec Foodora ont en moyenne constaté une augmentation de 30 % de leur chiffre d’affaires. 30
Cependant, au-delà du gain potentiel, il peut parfois être difficile pour les restaurateurs d’ouvrir

ON
une « nouvelle salle de restauration » aux contraintes importantes en termes de rapidité de
préparation et d’heure de livraison qui tombe durant les pics de la restauration. Les entreprises du
secteur ont donc un véritable rôle d’accompagnement et de formation des restaurants.
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Le choix des restaurants est également clé dans le développement de l’offre des acteurs de la
Foodtech. Les principaux critères de choix sont la notoriété, le prix, la diversité des offres sur la
zone de chalandise et le caractère adaptable des plats cuisinés pour pouvoir être livrés. En effet, la
qualité de la livraison et notamment le conditionnement est un des points importants de l’atteinte
SO

de l’excellence opérationnelle chez les start-ups. Les accords noués entre les entreprises de
livraison et les restaurants sont clés pour faire évoluer l’offre des différents acteurs. Dans certaines
villes des contrats d’exclusivités sont par exemple noués, afin de s’assurer un flux de commandes
important assurant la rentabilité aussi bien pour le restaurateur que pour la plateforme. Le choix de
s’associer à de grandes enseignes de restauration est ainsi stratégique pour les Foodtechs. C’est
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par exemple le cas d’Uber Eats avec la livraison de plats McDonald (déjà testé aux États-Unis et en
Allemagne, l’offre a été lancée en France fin juin 2017 31).
EO

G. Les coursiers
Les coursiers sont des acteurs clés dans la réalisation de la proposition de valeur des Foodtechs. Ils
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sont souvent locaux et connaissent la ville, ce qui assure une rapidité de la livraison. Foodora,
comme d’autres acteurs de la Foodtech, cherche à mettre en valeur ses coursiers. Elle le fait par la
visibilité notamment de leur équipement. Cette visibilité permet à l’entreprise de se faire connaître,
voire de recruter de nouveaux livreurs. 32 L’entreprise convie également ses coursiers à des
N

événements internes afin de les intégrer aux équipes. L’entreprise insiste ainsi sur l’aspect
communautaire autour de ses livreurs, et montre une volonté de créer du collectif au sein de ses
équipes. 33
PA
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28
Boche, Justine, « Christian Têtedoie s’associe à Deliveroo et propose un menu à 35 euros », Lyon Capitale,
07/02/2017
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29
Colomb Sara et Alegria Cathy, « La Restauration Rapide », Xerfi, Octobre 2016
30
Motey, Florent, « Boris Mittermüller, PDG de Foodora France – « La Fin de Take Eat Easy ? », Forbes,
16/11/2016
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31
Mercante, Agathe « Avec Uber McDonald’s livre à domicile » lesechos.fr 23/06/2017
32
Delmotte, Natacha, « Yann, coursier à vélo : "Tu bosses quand tu veux, pour qui tu veux, tu es un peu ton
propre patron" », WE Demain, 04/05/2016
33
https://www.foodora.fr/contents/drivers-and-restaurants.htm
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Les coursiers sont des acteurs centraux dans la réalisation de l’excellence opérationnelle de
l’entreprise avec notamment une optimisation de la livraison de commandes 34. Avec la possibilité
de travailler pour plusieurs prestataires, les Foodtechs cherchent également à fidéliser leurs

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coursiers, et notamment les meilleurs. Chez Foodora par exemple un petit nombre de coursiers,
présents dès la création de la filiale française, sont employés en CDI et ont des responsabilités
supplémentaires comme celle de la formation des nouvelles recrues.

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Pour autant, les livreurs sont rarement salariés des entreprises Foodtechs. Si être travailleur
indépendant offre autonomie et liberté à un coursier ponctuel (organisations des tournées à leur

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convenance, possibilité de travailler pour plusieurs Foodtech en parallèle, etc.), cette situation
reste relativement précaire pour un coursier qui en fait son activité récurrente. 35 Les coursiers
pointent du doigt les aspects liés à la couverture santé, à la sécurité du travail, à leur emploi du

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temps fluctuant, ainsi que la volonté de certains acteurs de ne plus garantir un salaire fixe, mais
uniquement à la livraison. 36 L’arrivée de nouveaux modes de livraisons (scooters, voiture) 37 ainsi
que la possibilité offerte aux clients de Foodora de retirer eux-mêmes leur commande en magasin
sont aussi de futures menaces potentielles pour leur activité. Les tensions pouvant émaner de ces
relations complexes entre employeur et coursiers sont aujourd’hui un réel enjeu aussi bien

NE
économique, que de réputation pour les entreprises de la Foodtech, qui voient surgir de toute
l’Europe des actions collectives à leur encontre. Ce phénomène fait resurgir le souvenir de la faillite
de Take Eat Easy qui a laissé de nombreux coursiers sur le carreau 38.

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H. Les fonds d’investissement
Enfin, les fonds d’investissement ont un rôle important sur le marché de la livraison de repas. Ils
jouent le rôle de financeur. Plus de 800 millions d’euros ont par exemple été investis par des
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acteurs privés sur le marché américain entre 2012 et 2014. 39 Ce sont également General Catalyst
et Bridgepoint qui, en finançant Deliveroo en août 2016 à hauteur de 275 millions de dollars, lui
ont permis d’acquérir le statut de « licorne », entreprise dont la valorisation s’élève à plus d’un
milliard de dollars. 40 Ces financements permettent aux acteurs de la Foodtech de rapidement
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constituer leur écosystème au sein de chaque nouvelle ville dans laquelle ils s’installent, afin de
s’assurer l’avantage du premier entrant, indispensable pour espérer être ensuite rentable ! Les
fonds d’investissement peuvent également jouer un rôle plus managérial. L’exemple de Rocket
Internet illustre bien ce phénomène. Cette « startup studio » qui a incubé et financé de
nombreuses start-ups dans différents domaines d’activité a un véritable savoir-faire dans le
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domaine de l’incubation. Comme pour la majorité de ses start-ups, elle a par exemple mis à la tête
de Foodora, un MBA-McKinsey. 41
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L’enjeu du financement des Foodtechs est au cœur de la stratégie des acteurs sur le marché. Le
modèle d’affaire de ces nouvelles start-ups, voire licornes, séduisent de plus en plus les marchés
financiers. C’est face à cet engouement que la maison mère de Foodora, Delivery Hero, (dont
Rocket Internet est actionnaire majoritaire) a programmé son entrée en bourse la nuit du 29 au
TH

30 juin 2017. Cette opération a permis à l’organisation de récolter 996 millions d’euros, une
valorisation plus qu’espérée par l’entreprise. 42 Elle semble faire bien des jaloux à en croire la
réaction d’un des membres du conseil d’administration de Deliveroo pour qui une entrée en bourse
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34
On parle notamment de stacking pour désigner le fait d’optimiser au maximum le nombre de commandes
dans le sac d’un livreur afin de faire le plus de courses en un temps réduit
35
Euzen, Philippe « pédale ou crève, dans la peau d’un livreur Foodora » Lemonde.fr, 05/06/2017
TE

36
Aizicovici, Francine, « Deliveroo veut imposer le paiement à la course à tous ses livreurs », Le Monde,
04/08/2017, p. 12
37
Leurquin, Sébastien, « Deliveroo, Foodora... La promesse d’un livreur écolo à vélo, bientôt du pipeau ? »,
L’Express, 02/10/2016
SI

38
Cant, Callum, "Precarious couriers are leading the struggle against platform capitalism", Politicalcritique.org,
03/08/2017
39
Torre, Marina, « Qui gagnera la bataille des “FoodTech” ? », La Tribune, 27/02/2016
ER

40
Garnier, Juliette, « Deliveroo lève 275 millions de dollars pour distancer Uber Eats et Foodora », Le Monde,
09/08/2016
41
https://www.rocket-internet.com/
42
Boutelet, Cécile, « Delivery Hero récolte un milliard d’euros en bourse » Lemonde.fr, 29/06/2017
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permettrait à la firme britannique d’augmenter ses marges et pourquoi pas même améliorer les
conditions de vie des livreurs. 43

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EO
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43
Ghosh, Shona, "A Deliveroo board member has defended the food delivery startup's low margins and said it
could eventually IPO", Business Insider, 27/09/2017
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