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Chapitre trois : la littérature bâtarde

I- L’écriture bâtarde
1- L’idiome mixte
2- La langue mutilée
3- Langage du silence ou du bruit ?

II- L’écriture inachevée


1- Le personnage incomplet
2- Le genre indéfini
3- La thématique harcelée

III- L’écrivain bâtard


1- Deux langues
2- Deux pays
3- Deux temps
Chapitre trois : la littérature bâtarde

La littérature d’expression française, en vogue aujourd’hui, est


nécessairement une littérature qui cache dans ses plis deux langues, ou plus
généralement, deux cultures : la française et celle qui renvoie à la culture
maternelle de l’écrivain1. Du coup, étudier la littérature en langue étrangère
serait faire une recherche sur la présence simultanée des deux idiomes qui
puissent y figurer.
Le bilinguisme au sein du roman d’expression française serait un
phénomène commun à la totalité2 des œuvres francophones. La littérature
beur, par exemple, est témoin de la présence de certains termes en langue
maternelle ou certaines expressions ou tournures syntaxiques puisées dans la
langue arabe3. Dans d’autres littératures, la diglossie imprègne le roman
d’une « couleur locale » et va, parfois, jusqu’à la création d’une nouvelle
langue, d’un « nouveau français4» qui serait l’identité littéraire de l’écrivain.
Makine, écrivain russe francophone ne déroge pas au bilinguisme
littéraire. Ses romans exhibent, implicitement ou explicitement, sa langue
1
« La pratique littéraire en langue étrangère est sans contredit un phénomène marquant de la
contemporanéité, même si elle a une profonde dimension historique. Elle n’a pas seulement modifié la
configuration des champs littéraires nationaux […], elle a également transformé l’esthétique et la langue
littéraire, et, au-delà, les contextes culturels. Ecrire en langue étrangère, c’est donc, aujourd’hui,
provoquer sciemment ou non, des interférences de langues et de cultures.» Ecrire en langue étrangère,
Robert Dion, Hans-Jürgen Lüsebrink et János Riesz (ss la direct. de), Nota Bene, Montréal, 2002, pp. 5, 6.
2
« La tentation est grande pour l’écrivain de se servir simultanément dans un même texte des idiomes qu’il
a à sa disposition. Beaucoup ne se privent pas des richesses stylistiques et des revendications identitaires
qu’autorise l’écriture multilingue. », Les exilés du langage, Op.cit., p.71.
3
« La mixité dans la littérature française s’exprime aussi dans les productions des écrivains beurs qui
mêlent de manière savoureuse les différents registres du français avec des expressions en arabe en berbère
ou en anglais. Le métissage linguistique est d’ailleurs une ressource littéraire importante de cette
littérature que les critiques avaient du mal à classer avant qu’Alec G. Hargreaves, dans le premier numéro
de French Cultural studies, ne recoure à l’expression « littérature beur ». », Les exilés du langage, Ibid,
pp. 72, 73.
4
« Le lecteur francophone est donc sans cesse renvoyé à l’étrangeté référentielle du texte francophone,
quel que soit le procédé d’écriture utilisé. Tous les écrivains concourraient à la « couleur locale », à
l’enracinement dans un terroir par l’emploi d’un « substrat culturel judicieusement utilisé pour donner
naissance à un style personnel » qui devient alors « une autre langue », un « nouveau français. », La
francophonie littéraire, essai pour une théorie, Michel Beniamino, L’Harmattan, Paris, 1999, p.301.
maternelle russe. Sa littérature serait tiraillée entre deux langues et deux
cultures ce qui la rend une littérature bâtarde.

I- L’écriture bâtarde

La lecture d’un écrivain étranger d’expression française révèle une


présence presque hégémonique de sa langue maternelle surtout lorsque son
œuvre évoque des thématiques en rapport avec son pays natal et les réalités
qui lui renvoient. Ce métissage linguistique au sein des écritures
francophones serait le sceau de la littérature d’expression française ou de
toute littérature en langue étrangère.
Comme la plupart des écrivains étrangers d’expression française,
Andreï Makine laisse entrevoir au sein de son œuvre sa langue maternelle
russe. Là, on pourrait se demander sur la fonction de cette diglossie dans
l’écriture de Makine. L’auteur a-t-il besoin de la coexistence des deux
langues pour mieux exprimer ses intentions ? La langue de Molière ne
s’avère-t-elle incapable de traduire les réalités de la profonde Russie ?
Devant la langue invalide, quel serait alors le choix de l’écrivain ?

1- Le bilinguisme

Le recours à la langue maternelle dans certaines expressions serait, au


premier abord, comme un moyen de combler une lacune concernant la
langue étrangère. Il s’agit souvent, de l’absence d’un équivalent du terme en
passant d’une langue à une autre. Pour cela, beaucoup d’écrivains, dont
Makine, utilisent le même mot en langue étrangère et l’écrivent en lettres
françaises tout en l’accompagnant d’une note infra-paginale. Cette
technique, Makine l’a utilisée dans son premier roman, La Fille d’un héros
de l’Union Soviétique. On y trouve des termes qui renvoient à la nature et au
folklore russes, ou au mode de vie communiste et à sa politique. Citons par
exemple les termes suivants : « léjanka » (p.18), « Gorko » (p.38),
« chmon » (p.52), « komsomol » (p.67), « Beriozka » (p.91), « propiska1 »
(p.107). L’abondance des termes russes dans le premier roman makinien
renvoie peut- être à un fort ancrage du roman dans les réalités russes ou bien
c’est une astuce utilisée de la part de l’auteur qui a voulu convaincre ses
auditeurs à une traduction illusoire du roman du russe au français.
L’insertion des termes étrangers dans l’œuvre francophone est une
tradition très fréquente chez les écrivains d’expression française. Les
écrivains de la littérature beur, comme Azouz Begag, Farida Belgoul ou
Tahar Ben Jelloun révèlent une présence flagrante des mots arabes. La
littérature francophone libanaise mêle le français à la langue arabe ou même
libanaise. Andrée Chédid, Farjallah Haïk, Alexandre Najjar, Charif
Majdalani, Amin Maalouf et d’autres éprouvent la nécessite de l’emploi de
certains mots concernant surtout la cuisine, le folklore et les traditions
libanais. Un écrivain, comme Amin Maalouf évoque l’interférence des deux
langues chez lui et va jusqu’à attribuer à chaque langue un genre d’écriture :

Schématiquement, quand j’écris en français, la


dimension arabe est présente et donne ce je–ne-sais-quoi de
diffèrent. Quand j’écris en arabe, la dimension occidentale
apparaît. Je crois que j’ai en arabe une écriture plus cartésienne,
1
On donne les explications des mots selon les notes infra-paginales citées dans La Fille d’un héros de
l’Union Soviétique : « léjanka » (p.18) : « large rebord du poele russe sur lequel on peut s’allonger »,
« Gorko » (p.38) : « cri joyeux invitant les mariees à s’embrasser » , « chmon »(p.52) : « Fouille (argot des
camps), « komsomol » (p.67) : « organisation de la jeunesse communiste », « Beriozka » (p.91) : « magasin
réservé aux étrangers qui payent en devises » , « propiska? » (p.107) : « autorisation de résidence
nécessaire pour habiter une ville. On l’obtient très difficilement à Moscou ».
rationnelle, rationnelle, fonctionnelle, rigoureuse, adéquate pour
des textes de non-fiction. Si j’écrivais mes romans en arabe, on
n’y trouverait pas la fantaisie, pourtant orientale, qui s’insinue
dans mon style en français1.

La langue mixte n’est pas loin des écrivains européens : Les romans
de l’italien, André Pasquali, sont « émaillés de mots et de citations en
italien.2 »
Cependant Anne Rosine Delbart affirme que « l’écriture bilingue est
rarissime chez les sédentaires nés sur un sol unilingue français. 3 » En retour
à Makine, on remarque que l’intertexte russe devient rare dans les romans
qui suivent. Il figure au sein du texte, souvent en italique, sans aucune note
en bas de page à laquelle l’auteur substitue une explication dans le corps
même du texte. Voici le terme, technar qui figure avec son propre sens et
son acception socio-culturelle dans Le Testament français : « Il y avait, en
outre, un noyau de forts en mathématiques, futurs « technars » qui, autrefois
mélangés aux prolétaires et dominés par eux, s’en démarquaient de plus en
plus en occupant le devant de la scène scolaire. » (p.223) Pourrait-on dire
que son ancrage sur le territoire français et son éloignement de sa langue et
de son pays maternels l’imprègnent du sceau de la francité et expliquent en
quelque sorte la rareté du lexique russe au fur et à mesure qu’il avance dans
sa création littéraire ?
A mentionner ici que Wszelaki, dans Andreï Makine, l’identité
problématique, consacre deux sous-chapitres pour l’emploi de la langue
russe dans l’œuvre de Makine. Sous le titre, traduction et autotraduction,
elle analyse les termes russes cités au sein du texte et elle en sort par les

1
Cité in Écrire en langue étrangère, Op. cit., p. 74.
2
Les exilés du langage, Op.cit., p.72.
3
Ibid., p.74.
conclusions suivantes : 1- L’auteur met en relief la distance entre la réalité
russe et la réalité française et il empêche leur fusion (au niveau du texte). 2-
« [ce] contact avec l’étranger implique plutôt une négociation, une
rencontre interculturelle qui contribue à son tour à la construction de
l’identité » dans le second sous-chapitre, stylisation et hybridation de la
parole, l’auteur évoque les termes français transférés au russe (comme
Charlota) et elle conclut que cette hybridation des termes « [crée] un univers
où le russe et le français ne soient pas en situation antagoniste ». De plus,
elle souligne qu’ « une voix d’autrui attachée aux paroles françaises
s’incruste dans la réalité russe de façon qu’un espace interculturel
imprévisible surgit de leur union.1 »
Signalons ici que la recherche de Wszelaki s’arrête à l’analyse d’un
lexique hybride qui mêle le russe et le français en un seul mot et des termes
purement russes (qu’ils soient écrits en lettres françaises ou en lettres
russes2) figurant dans le texte et laisse de côté certains déviations lexicaux,
et même grammaticaux de la part de l’auteur qui sortent des normes de la
langue française. En effet, une lecture attentive du texte nous révèle la
présence d’un lexique français qui fait partie de la pure invention de l’auteur.
Prenons le terme engivré que Makine utilise dans plus d’un lieu et qui, en
réalité ne fait pas partie du lexique français : givrer

L’île est blanche. L’église, engivrée, semble translucide,


aérienne. La terre qui entoure la croix plantée est la seule tache
sombre dans cet univers de blanc. (FA, P. 210)

Le verbe, engivrer, et par la suite le participe passé qui en dérive,


engivré, n’existent pas dans le dictionnaire français. On peut trouver le
1
Andreï Makine, l’identité problématique, Op.cit., pp.60-69.
2
On désigne par-là la seule phrase écrite en russe et qui figure dans Le Crime d’Olga Arbélina, p. 52.
verbe, givrer, le participe, givré et le substantif, givre, qui font partie du
champ lexicale de la froideur et du gel.

Tisser lui-même sa propre littérature. Cherchant à la parfaire,


l’écrivain réutilise des éléments d’un récit ancien pour en former un
nouveau. Dans ce passage de l’hpotexte à l’hypertexte se dessine l’écriture
de Makine.

1- L’apport du russe1
A ajouter l’interview où il parle du russe nouveau et du français
porteur d’un héritage culturel. Dans le chapitre 1
Naître et vivre en Russie présuppose que la langue maternelle soit
russe. Bien que le narrateur de Makine (et Makine lui-même), apprenne,
souvent, le français de sa mère ou de sa grand-mère dès son plus bas âge, le
russe de son entourage, en dehors de la maison familiale, reste considéré
comme langue maternelle2. Du coup, le narrateur russe n’est pas lié à sa
langue par la relation de consanguinité, ni par le lait maternel selon le mot

1
Dans son livre, Andreï Makine, l’identité problématique, Agata Sylwestrazk-Wszelaki consacre le premier
chapitre à l’étude de la langue et ses représentations dans l’œuvre de Makine. Op. cit., pp.19…68.
2
Cependant certains écrivains francophones jouent sur l’adjectif « maternelle » en le prenant dans son sens
initial. Charif Majdalani, écrivain libanais d’expression française affirme, non sans humour dans L’Orient
le jour, que sa langue « maternelle » est le français puisque sa mère est française tandis que l’arabe est,
pour lui, sa langue « paternelle » se référant par là, à son père libanais.
du poète roumain Ion Caraion1. Cette absence du cordon ombilical entre le
narrateur et sa langue faussement dite maternelle provoquerait une insécurité
linguistique ou une rupture entre sa pensée et ses sentiments d’une part et ce
que la langue pourrait lui donner comme outil pour qu’il puisse s’exprimer
d’autre part. En effet, cette langue ne possède pas l’héritage maternel pour
qu’elle puisse prendre sa forme complète. Une langue, mutilée, voire
hybride, incapable de porter en elle, dans l’esprit du narrateur, les signifiants
correspondants aux signifiés adéquats : lorsque le narrateur du Testament
essaye de faire une version russe de l’histoire du président français mort
entre les bras de sa maîtresse, il trouve que la traduction est impossible :

Je me mis à traduire inconsciemment cette scène en


russe. C’est-à-dire à remplacer les protagonistes français par
leurs équivalents nationaux. Une série de fantômes engoncés
dans des complets noirs se présentèrent à mes yeux. […] Il
était bien plus facile pour nous d’imaginer Staline en
compagnie d’un Churchill à Ialta ou d’un Mao à Moscou que
de le supposer avec la mère de ses enfants…
« Le président est mort à l’Elysée, dans les bras de sa
maîtresse, Marguerite Steinheil… » Cette phrase avait l’air
d’un message codé provenant d’un autre système stellaire.
(TF, p.112)

Le passage du français au russe échoue. Tout d’abord, l’incompatibilité


entre la culture française et celle russe entraîne une absence de relation entre
l’ensemble des signifiants de la phrase française (citée dans le passage) et le

1
Caraion exprime le conflit de son appartenance aux deux langues, maternelle et étrangère en disant : « La
langue implique des souvenirs prénataux, le lait maternel, la semence de la source et le sang des
précurseurs. C’est le sang du sang de la gent, les racines et les origines qu’on ne peut pas confondre, en
même temps l’enfant et l’aïeul. Elle n’a pas d’âge. Les parents n’ont pas d’âge. Ils existent depuis toujours.
Lorsque tu as passé la frontière de la langue ou qu’on t’impose de quitter son aire, il se produit une
rupture irréparable. Et c’est alors que commencent l’éloignement, la solitude, le déséquilibre, l’incertitude,
etc ». Les mots en exil, in Marges et exils. L’Europe des littératures déplacées, Bruxelles, Labor, 1987,
p.43-52, citation, p.49.
code de signifiés que représente la culture russe. Le mot président 1 en
français n’est pas l’équivalent du terme président en russe. De plus, il s’agit
chez Aliocha d’un décalage temporel au niveau du moment de
l’apprentissage, entre sa culture initiale franco-russe d’une part et sa langue
maternelle russe d’autre part. Les deux ne vont pas en parallèle. Par
conséquent, il se crée chez lui une sorte de perturbation et le narrateur se
trouve face à une langue russe maternelle, impotente, qui ne pourrait pas
représenter matériellement sa pensée chargée d’une autre culture.
Lorsqu’Aliocha essaye de raconter à ses amis russes les histoires de
Charlotte, la langue (russe) ne l’aide pas :

Et moi, interdit, je me disais qu’aucun de mes styles […]


non, aucun de mes langages ne pouvait recréer le charme
mystérieux de cette matinée neigeuse au bord de l’abîme des
temps. Sa lumière, son silence… Du reste, personne parmi
mes collègues ne se serait intéressé à cet instant ! (TF, p. 228)

La langue russe semble impuissante. Elle est incapable d’exprimer


correctement une pensée. De plus, bien que le narrateur fasse tout son
possible pour pouvoir représenter en mots, un paysage passé, sa langue le
trahit. Cette trahison ne s’arrête pas seulement sur la question du rapport
entre signifiant et signifié, voire une langue et une culture, comme on l’a

1
Dans son livre, Andreï Makine, l’identité problématique, Wszelaki fait l’analyse d’autres termes en
français et leurs équivalents en russe et arrive à la conclusion du décalage entre une langue territorialisée
et une autre déterritorialisée. (C’est moi qui souligne) Par exemple, lorsque le narrateur essaye d’imaginer
le village Neuilly, ce sont des villages russes qui lui viennent à la tête : « le sens du mot français « village »
est ici déterritorialisé par le contexte russe. Les enfants qui ne connaissent pas de villages français,
imaginent Neuilly comme un village russe avec ses maisons en bois. Ils transposent immédiatement le mot
« village » utilisé par Charlotte en russe. Et quand ils pensent au mot dérevina, ou encore dérévo, l’image
d’un typique village russe leur vient à l’esprit ; avec ce mot censé être l’équivalent du « village » en
français, le sens primitif de « village » change de référent. […] le mot en question évoque des signifiés (et
des référents culturels) différents en fonction de la langue nationale, ce qui produit la déterritorialisation
de son sens premier. Ainsi, la déterritorialisation du sens et sa « reterritorialisation » consécutive,
renvoyant à l’identité culturelle russe, s’opèrent par le remplacement de signifiés liés à un même signifiant
dans les deux langues nationales respectives. » Op. cit., p.55.
déjà dit. En effet, la langue, ses représentations et ses styles modernes
semblent incapables de représenter ou d’exprimer les images renvoyant à un
passé lointain. À cela s’ajoute l’incohérence entre une culture ancienne et le
temps moderne : « Personne […] ne se serait intéressé à cet instant ».

III-L’intratexte ou de l’ancien au nouveau

Des éléments intratextuels1 relient certaines œuvres de Makine. Des


personnages, des situations, des comportements ou des attitudes se répètent
parfois d’un roman à un autre. Cette occurrence au sein de l’œuvre de
l’auteur s’effectue avec des modifications qui, d’un récit à un autre,
établissent la trame de l’évolution du lien intratextuel.
Dans la présente étude, on ne s’intéressera pas à l’analyse des points
de divergence ou de convergence entre les différents intratextes au sein de
l’œuvre makinien. Il s’agit de mettre l’accent sur la progression dans la
récurrence des textes analogues pour en tirer des conclusions sur l’écriture
makinien en passant d’un texte ancien (l’hypotexte) à un texte nouveau
(l’hypertexte).
De plus, il est impossible de cerner la totalité des relations
intratextuelles. Pour cela on s’occupera des éléments les plus saillants en
rapport avec notre étude. De ce fait, on se penchera sur l’analyse de

1
Murielle Lucie Clément a déjà étudié, dans un de ses articles, les liens intertextuels entre l’œuvre de
Makine et celle de Gabriel Osmonde. Mais après que ce dernier a dévoilé son identité et a déclaré qu’il était
lui-même Andreï Makine, l’article serait ipso facto, une analyse des intratextes et non des intertextes. Voir
le site internet de Murielle Lucie Clément.
l’intratextualité progressive de certains motifs féminins et on finira par
consacrer une analyse spécifique de l’intratextualité dans l’œuvre, Le Livre
des brèves amours éternelles, premier recueil de nouvelles de Makine.

1- Le personnel mal défini

La réapparition de certains personnages d’un roman à un autre est déjà


détectée chez certains écrivains. Dans les Rougon-Macquart de Zola, par
exemple, le personnage apparaît dans plus qu’une œuvre selon un ordre
d’importance romanesque qui fait de lui l’objet de tel ou tel roman.
Cependant aucun changement ne s’effectue dans le profil de ce personnage.
Son caractère, ses attitudes, ses comportements et même sa nomination
restent les mêmes.

Textes de Michel Biniamino


Littératures écrites en français, les littératures francophones subissent
à la fois le poids de la pérennité des représentations de l’idiome qu’elles
utilisent et une sorte de soupçon entretenu par le fait qu’elles sont
directement mises en relation avec la situation sociolinguistique de cet
idiome dans les différents lieux où elles prennent naissance. Ces littératures
sont donc dans une sorte de statut ambigu puisque, dans le temps où elles
montrent que le français littéraire est soumis à des processus de variation,
elles sont contestées parce qu’elles ne se referaient en fait qu’à un usage
écrit du français dans des couches sociales restreintes. P. 141

Une des constantes dans les représentations de la (les) langue(s) chez


les écrivains francophones est la question des « valeurs » auxquelles une
langue serait reliée ou qu’elle incarnerait […] p.231
Pour J. M. Klinkenberg, rappelons-le, l’insécurité linguistique est
l’une des conditions de la production des littératures francophone. (p.235)
j.m.k, le problème de la langue d’écriture dans la littérature de
Belgique…. » in L’identité culturelle dans les littératures des langue
française, 1989, op.cit., p.70

Une langue, écrit Jean-pierre Makouta-M’boukou, « n’est faite que


pour exprimer une seule et même culture, [et] lorsqu’une langue se mêle de
rendre compte d’une langue étrangère, elle devient forcement impropre à cet
usage » (p.250)

« Dans une langue il ne reste aucun mot, aucune forme neutre,


n’appartenant à personne : toute langue s’avère être éparpillée, transpercée
d’intentions, accentuée. Pour la conscience qui vit dans la langue, celle-ci
n’est pas un système abstrait de formes normatives, mais une opinion
hétérologique concrète sur le monde. Chaque mot sent la profession, le
genre, le courant, le parti, l’œuvre particulière, l’homme particulier, la
génération, l'âge, le jour et l’heure. Chaque mot sent le contexte et les
contextes dans lesquels il a vécu sa vie sociale intense ; tous les mots et
toutes les formes sont habités par des intentions. Dans le mot, les
harmoniques contextuelles (du genre, du courant, de l’individu) sont
inévitables. (pp.280-281) Mikhaïl Bakhtine, in Tzvetan Todorov, Mikhaïl
Bakhtine le principe dialogique suivi de Ecrits du cercle de Bakhtine, Seuil,
1981, p.89

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