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Economie Industrielle 2023- 2024
PLAN DU COURS
Références bibliographiques
Carlton D. et Perloff J. (1998), Economie industrielle, Edition Deboeck.
Tirole J. (1995), Théorie de l’organisation industrielle, Economica, Tomes 1 et 2.
Lecaillon J. (1988), Eléments d’économie industrielle, Edition Montchrestien.
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Economie Industrielle 2023- 2024
INTRODUCTION A L’ECONOMIE INDUSTRIELLE
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éviter les conséquences négatives auxquelles peut conduire le pouvoir de
marché.
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Cette école se développe pour essayer de fournir des lignes directrices
à la politique de la concurrence. Elle cherche à déterminer si on peut inférer
qu’un comportement est illégal à partir de certaines caractéristiques comme
la taille des entreprises. C’est pourquoi elle utilise le paradigme SCP :
structure – comportements – performance. Autrement dit, la structure du
marché (nombre de vendeurs, différenciation, coûts…) influence le
comportement des entreprises (prix, investissements, …) ce qui détermine la
performance du marché (efficacité, variété, …)
La seconde vague du développement de l’économie industrielle se situe
dans les années 70, grâce à l’école de Chicago. Le paradigme SCP est remis
en cause, en raison d’une absence de confirmation empirique concluante.
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objet une théorie pure de l’économie industrielle, permettant d’analyser les
marchés réels, mais sans liens avec les faits particuliers. Elle analyse les
conflits stratégiques entre les entreprises à l’aide de la théorie des jeux non
coopératifs. Comportements, structure et performance s’influencent
mutuellement. Elle a donc recours à la modélisation, sur la base des
propositions théoriques et des tests empiriques.
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Prise en compte des "contraintes de capacités" (espaces
limités) ?
Effet de la suppression de la publicité sur l’audience du service
public ?
Conclusion : l’économie industrielle fournit des outils qui permettent
d’analyser ce type de question : modèles de concurrence, de réaction
stratégique, etc.
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Chapitre 1 : INTRODUCTION A LA THEORIE DES JEUX
NON COOPERATIFS
Les décisions simultanées sont en général représentées sous la forme d’un tableau (jeux en
forme normale) et les décisions séquentielles, sous la forme d’un arbre de jeu (jeux en forme
extensive).
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πi : A = X Ai → R
i∈ I
a ≡ (a1 , a2 , … , aN ) → πi (a).
Exemple 1 : Le dilemme du prisonnier
Deux individus (Jacques et Pauline) sont arrêtés par la police pour complicité dans un
vol à main armée et ils sont enfermés dans deux cellules séparées sans possibilité de
communication.
Chaque individu est interrogé séparément et il a le choix entre nier d’avoir commis le vol ou
avouer l’avoir commis avec son complice.
Nous avons donc un jeu non - coopératif avec :
N = 2 joueurs, I = {1, 2} = { Jacques, Pauline}.
L’ensemble de stratégies de chaque joueur est A1 = A2 = {nier, avouer}.
Les gains des individus représentent leur situation qui résulte des années de prisons
auxquelles ils sont condamnés en fonction de leurs aveux et ils sont négativement liés avec
ces années.
Si jacques et pauline avouent tous les deux leur crime ils sont condamnés à 8 ans de
prison.
S’ils le nient tous les deux, ils auront 1 année de prison du fait d’absence de preuves
accablantes.
Si l’un seul avoue, il est relâché en récompense de sa coopération et l’autre est
condamné à 10 ans de prison.
Nous avons donc les gains (symétriques) suivants :
π1 (nier, nier) = π2 (nier, nier) = −1,
π1 (nier, avouer) = π2 (avouer, nier) = −10,
π1 (avouer, nier) = π2 (nier, avouer) = 0,
π1 (avouer, avouer) = π2 (avouer, avouer) = −8.
Nous pouvons alors représenter ce jeu sous forme normale, sous la forme d’un tableau :
Pauline
Nier Avouer
Nier (−1, −1) (−10, 0)
Jacques
Avouer (0, −10) (−8, −8)
Dilemme du prisonnier
Remarques :
1. Il ne faut pas confondre la stratégie d’un joueur individuel a i et le résultat a qui est une
combinaison particulière des stratégies de tous les joueurs.
2. Dans notre définition d’ensemble de stratégies, il y a un nombre fini k i de stratégies pour
chaque agent mais en économie, les ensembles de stratégies sont en général continus et
contiennent une infinité de stratégies possibles (choix de quantités, de prix, etc…)
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3. Les gains représentent en général des utilités ordinales et non des sommes monétaires. En
économie industrielle, néanmoins, les gains des firmes correspondent souvent à des profits.
La formulation sous la forme d’un jeu permet de clarifier une situation conflictuelle.
Il nous faut en plus comprendre à quel type de solution ce jeu peut nous conduire.
Pour déterminer cette solution, nous devons étudier l’équilibre du jeu.
⇒ a = (ai , a−i ).
Nous pouvons maintenant introduire les concepts d’équilibre que nous allons utiliser.
Définition 2 :
Une stratégie particulière. (â i ∈ Ai ) d’un joueur est une stratégie dominante du joueur i
si, quelles que soient les stratégies choisies par les autres joueurs, â i maximise le gain de i :
πi ( â i, a−i) ≥ πi(a i, a−i), ∀ai ∈ A−i , a−i ∈ A−i .
Pauline
Nier Avouer
Nier (−1, −1) (−10, 0)
Jacques
Avouer (0, −10) (−8, −8)
Définition 3 :
Un résultat ( â1, â2,…,âN ) (âi ∈ Ai ,i = 1..N) est un équilibre en stratégies dominantes si âi
est la stratégie dominante de chaque joueur i.
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Dans notre exemple (avouer, avouer) est un équilibre en stratégies dominantes car avouer
est la stratégie dominante de chaque joueur.
Quand il existe et il est unique, ce type d’équilibre nous fournit une prédiction très claire
et intuitive sur le résultat d’un jeu.
En fait il est assez proche de la manière dont les acteurs économiques interagissent dans
le monde réel.
Malheureusement, ce type d’équilibre n’existe que pour très peu de jeu.
Jacqueline
C F
C (2,1) (0, 0)
Paul
F (0,0) (1,2)
Pour tester si un résultat a est un équilibre de Nash, nous devons vérifier si un des joueurs
au moins n’a pas intérêt à choisir une autre stratégie. Si ce n’est pas le cas alors a et un EN.
Reprenons l’exemple du dilemme du prisonnier :
Pauline
Nier Avouer
Nier (−1, −1) (−10, 0)
Jacques
Avouer (0, −10) (−8, −8)
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(nier, nier) n’est pas un équilibre de Nash car
π1 (nier, nier) = −1 < 0 = π1 (avouer, nier)
Nous savons que (avouer, avouer) est un équilibre en stratégies dominantes. C’est aussi un
EN :
π1 (avouer, avouer)=−8 10 = π1 ( nier, avouer)
π2 (avouer, avouer)=−8 10 = π2 (avouer, nier)
Proposition 1 :
Tout équilibre en stratégies dominantes est aussi un EN mais chaque EN n’est pas
nécessairement un équilibre en stratégies dominantes.
Multiplicité de l’EN
L’équilibre de Nash n’est pas nécessairement unique.
Reprenons l’exemple de la bataille des sexes.
Jacqueline
C F
C (2,1) (0, 0)
Paul
F (0,0) (1,2)
Non-existence de l’EN
Il n’existe pas nécessairement un équilibre de Nash pour les jeux où les stratégies sont
des actions directes des joueurs.
Si l’on reprend la bataille des sexes mais après 30 ans de mariage.
Jacqueline
C F
C (2,0) (0, 2)
Paul
F (0,1) (1,0)
Dans ce cas, le désir de Jacqueline de passer ses soirées avec Paul a disparu avec le temps,
tandis que Paul a gardé son amour romantique et il préfère toujours être avec Jacqueline à être
seul. Dans ce jeu il n’existe pas d’EN.
Il est possible de déterminer l’équilibre de Nash d’un jeu en utilisant les fonctions de
meilleures réponses des joueurs.
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πi (R(a−i ), a−i ≥ πi (ai , a−i ), ∀ ai ∈ Ai , a−i ∈ A−I .
Jacqueline
C F
C (2,1) (0, 0)
Paul
F (0,0) (1,2)
2
Pour Paul : R1 (a2 ) = { 0 si a2 = 0
F si a = F
1
Pour Jacqueline : R2 (a1 ) = { C si a1 = C
F si a = F
Proposition 2
si a∗ et un EN, a∗i = Ri (a∗ −i ), ∀i = 1 … N.
Dans un duopole de Cournot, les fonctions de réactions sont les fonctions de meilleures
réponses des firmes dans un jeu où les stratégies sont des quantités produites.
L’équilibre de Cournot (et de Nash) correspond à l’intersection des courbes de réaction
où chaque firme produit de manière à maximiser son profit étant donnée la quantité de son
concurrent.
La recherche de l’équilibre de Nash est donc équivalente à la recherche d’un point
d’intersection entre les fonctions de meilleures réponses de tous les joueurs.
Dans l’exemple précédent, nous avons
a∗1 = C = R1 (C), a∗2 = C = R2 (C),
a∗1 = F = R1 (F), a∗2 = F = R2 (F).
Par conséquent (C, C) et (F, F) sont des EN de ce jeu.
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2. Un résultat a* est un optimum de Pareto s’il n’existe pas un autre résultat qui le
Pareto-domine.
3. Les résultats 𝑎̂ et 𝑎 ne sont pas Pareto-comparable si
∃𝑖, 𝜋 𝑖 (𝑎̂) > 𝜋 𝑖 (𝑎) et ∃𝑗 ≠ 𝑖, 𝜋 𝑗 (𝑎̂) < 𝜋 𝑗 (𝑎).
Dans le dilemme du prisonnier (avouer, avouer) et un EN mais le résultat (nier, nier)
Pareto-domine cet équilibre.
Un EN n’est pas nécessairement un optimum de Pareto.
Dans la bataille de sexes, les résultats (C, C) et (F, F) ne sont pas Pareto-comparables.
IID IIP Le
nntterrorist
e
πP = −1 πp = 1 πP = −1 πP = 2
πT = −1 πT = 1 πT = −1 πT = 0
Définition 7
Un jeu en forme extensive est donné par :
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1. Un arbre de jeu contenant un nœud initial, des nœuds de décisions, des nœuds terminaux et
des branches reliant chaque nœud à ceux qui lui succèdent.
2. Un ensemble de N ≥ 1 joueurs, indicés par i = 1,2 … N.
3. Pour chaque nœud de décision, le nom du joueur qui a le droit de choisir une stratégie à ce
nœud.
4. Pour chaque joueur i, la spécification de l’ensemble des stratégies permises à chaque nœud
où il a le droit de prendre une décision.
5. La spécification des gains de chaque jeu à chaque nœud terminal.
1.2.1 Définition des stratégies et des résultats dans les jeux en forme extensive
Comme chaque peut être amené à prendre de décisions plusieurs fois (donc à des nœuds
différents) nous devons préciser le concept de stratégie pour en tenir compte.
Une stratégie du joueur i (notée s i ) est un plan d’action complet qui spécifie une action
pour chaque nœud où le joueur doit adopter une décision.
Retour à l’exemple
Le pilote n’a qu’un seul nœud de décision.
Ses stratégies contiennent alors une action unique :
s P = {D, P}.
Le terroriste a deux nœuds de décisions : un après le choix de Dames par le pilote (IID ) et un
après Paris(IIP ) .
Ses stratégies doivent donc préciser une action à chacun de ces nœuds :
Un résultat du jeu est la combinaison des stratégies des différents joueurs de manière à nous
permettre de faire dérouler totalement le jeu :
S = {(D, BB), (D, BN), (D, NB), (D, NN),
(P, BB), (P, BN), (P, NB), (P, NN)}
Nous pouvons alors associer un nœud terminal et les gains correspondants pour chaque
résultat.
πP (D, BB) = 1, πT = (D, BB) = 1,
πP (P, NN) = 2, πT = (P, NN)= 0.
Terroriste (T)
(BB) (BN) (NB) (NN)
Pilote (P) D (1, 1 ) (1, 1 ) (1, 1 ) (1, 1 )
P (1, 1 ) (2,0 ) (1, 1 ) (2,0 )
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C’est aussi un équilibre de Nash
Malheureusement ce n’est pas le seul.
(P, BN) et (D, NB) sont aussi des équilibres de Nash
Nous ne pouvons donc pas prédire précisément l’issue du jeu. Nous devons trouver un
moyen de discriminer parmi ces équilibres de Nash et d’affiner nos prédictions, en
nous concentrant sur l’issue la plus probable.
Un nouveau concept d’équilibre va permettre ce résultat.
πP = 1 πP = 2 πP = −1 πP = 1
πT = −1 πP = 0 πT = −1 πT = 1
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Naturellement, chaque équilibre de Nash du jeu original n’est pas nécessairement un
EPSJ comme l’a montré notre exemple. Le seul EPSJ est (P, NN).
Pour chercher les EPSJ d’un jeu on utilise l’induction vers l’amont (backward induction).
On commence par chercher les équilibres de Nash des sous-jeux les plus proches des
nœuds terminaux et on remplace ces sous-jeux par les résultats d’équilibre correspondant.
On remonte alors vers les sous-jeux qui contiennent ces sous-jeux terminaux et on
recommence l’opération jusqu’à ce que l’on atteint l’équilibre de Nash du sous-jeu qui
découle du nœud initial.
Dans l’exemple, nous devons remplacer chaque sous-jeu par le résultat correspond au
choix d’abandonner par le terroriste car cela correspond à son action optimale.
πP = 1 πP = 2
πT = 1 πT = 0
Le pilote choisit alors de continuer vers Paris et nous avons l’équilibre (P, NN)
Parfois un joueur qui doit prendre une décision ne connait pas les choix effectués par
les joueurs qui ont joué avant lui.
Dans ce cas, il ne connaît pas parfaitement le nœud auquel il se situe.
Si dans le jeu de notre exemple le terroriste n’est pas capable de déterminer la direction prise
par le pilote, il n’est pas capable de distinguer le nœud II D du nœud IIP.
Nous dirons alors que ces deux nœuds appartiennent au même ensemble
d’information.
Un ensemble d’information d’un joueur est la collection de tous les nœuds pour
lesquels il doit choisir une action. Quand le joueur atteint un de ces ensembles d’information,
il connaît parfaitement à quel ensemble il se situe. Mais si cet ensemble contient plus d’un
nœud, il n’est pas capable de distinguer entre ces nœuds.
On représente un ensemble d’information en reliant par une courbe en pointillée les nœuds
qui appartiennent à cet ensemble.
Dans le cas de notre exemple :
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πP = 1 πP = 1 πP = 1 πP = 2
πT = 1 πT = 1 πT = 1 πT = 0
Définition 8
Un jeu en forme extensive est :
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B, C, E et F ne sont pas des nœuds initiaux de sous-jeux car l’ensemble d’information qui
contient E contient aussi F et F ne découle pas de B et E ne peut découler de C.
Dans le jeu en information imparfaite du pilote et du terroriste, les stratégies du pilote
contiennent de nouveau une seule action
S P = {D, P}.
Pour le terroriste, chaque stratégie doit spécifier une action pour chaque ensemble
d’information.
Mais maintenant, il n’a plus qu’un seul ensemble d’information et donc chaque stratégie doit
spécifier une seule action pour IID et IIP
S T = {B, N}.
L’ensemble de stratégies du jeu ne contient plus que quatre éléments.
S = {(D,(II B
), (D, N), (P, B), (P, N)}.
D +IIp )
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Chapitre 2 : COMPORTEMENTS STRATEGIQUES
ET PERFORMANCE DES MARCHES
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J.A. SCHUMPETER et la vision dynamique de la concurrence
Il part de la logique selon laquelle le capitalisme est un jeu permanent de mort et de
naissance c'est-à-dire de supprimer ce qui est vieux et peu rentable, en vue de créer
continuellement du neuf productif, d’où son expression de « destruction créatrice ». Il justifie
ainsi la création de situation monopolistique temporaire.
Paragraphe 1 : Le monopole
Un monopoleur est un producteur ou une entreprise qui est le seul offreur d’un produit
sur le marché.
La principale caractéristique d’une entreprise en situation de monopole est qu’elle est
seule sur un marché en un lieu donné et en temps donné pour offrir un produit ou un service.
La conséquence principale portera sur l’existence d’un équilibre qui sera la plupart du temps
différent de celui de la CPP.
2) La gestion du monopole
Un monopole peut être géré de plusieurs manières. Chaque méthode a un impact sur la
structure du marché.
La maximisation du profit
De même qu’une entreprise concurrentielle, un monopole choisit le niveau de
production qui maximise son profit. Contrairement à l’entreprise en CPP, le monopole est
price-maker et non price-taker. Il décide du prix de vente. Cette caractéristique est
fondamentale dans la mesure où le prix n’est plus une constante mais une fonction des
quantités produites par le monopole.
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Il en résulte une fonction de 𝜋 telle que :
π = RT − CT = P (y) × y − CT (y).
R m = Cm
Paragraphe 3 : L’oligopole
Un oligopole est une structure de marché constituée d’un nombre limité d’entreprise.
Ce nombre limité de firmes peut s’expliquer par les coûts d’entrée énormes : on
parlera alors de barrières à l’entrée. Celles-ci permettent aux oligopoleurs de gagner des
bénéfices importants à long terme, en empêchant d’autres producteurs de s’introduire sur le
marché. On a l’exemple de Coca – cola et Pepsico dans le monde, les industries d’automobile,
le duopole MTN et Orange au Cameroun.
Tous les modèles d’oligopole peuvent être vus comme des exemples d’application de
la théorie des jeux. Les joueurs sont des entreprises qui développent des stratégies et attendent
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des paiements positifs, c’est-à-dire des profits. Ces derniers dépendent fortement des
stratégies jouées par les entreprises.
Formalisation mathématique
Max π1 (q1 , q2 ) = P(q1 , q2 ). q1 - C1 (q1 ).
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⇒ q2 = R 2 (q1 ) ⇒ fonction de réaction de la firme 2
Dans le modèle de Cournot, la quantité, le prix et les profits à l’équilibre auront des
valeurs intermédiaires entre celles qui interviennent sur un marché monopolistique et celles
qui interviennent sur un marché de CPP. Et la théorie des jeux amène à la conclusion que
l’équilibre de Cournot n’est pas seulement réaliste, il est le seul envisageable dans un jeu à
une seule période (Friedman, 1983), éliminant les discussions sur la convergence de
l’équilibre de Cournot.
La description du modèle
Comme chez Cournot, considérons deux firmes (i = 1, 2) qui produisent des quantités
𝑞1 et 𝑞2 avec Q = q1 + q2 et des fonctions de coût identiques : Ci (qi ).
Les hypothèses
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(H1) La demande est de type concurrentiel pure et parfaite (atomicité des
demandeurs). La fonction de demande globale est supposée monotone décroissante et connue
à l’avance, 𝑄 = 𝑄 (𝑃). Par conséquent, la distribution des prix que sont prêts à payer les
demandeurs est connue pour chaque quantité totale offerte sur le marché. La fonction de
demande inverse est 𝑃 = 𝑃(𝑄).
(H2) Par conséquent, la variable stratégique de chacune des firmes sur le marché est la
quantité d’output produite.
(H3) Le bien produit dans la branche est parfaitement homogène (parfaitement
substituable).
(H4) Chaque firme a pour objectif la maximisation de son profit.
(H5) La firme « leader » a une information complète sur la courbe de réaction de
l’autre firme. La firme « follower » cherchera à maximiser son profit compte tenu de la
situation qui a été créée par la firme « leader ».
Le modèle se Stackelberg suppose qu’une firme joue un rôle actif sur le marché (le
« meneur » ou « leader ») et l’autre firme joue un rôle passif (le « suiveur » ou « follower »).
Le « leader » choisira en premier son niveau de production. Il fixera une quantité qui
maximise le profit en prenant en considération la quantité qu’il escompte que le « follower »
fixera en réaction à son propre choix. Le « leader » suppose que le « follower » voudra aussi
maximiser son profit mais qu’il acceptera le choix de production du « leader » comme une
donnée. Cette supposition permet au « leader » de prévoir le choix de production du
« follower » et de le prendre en compte quand il choisira son propre niveau de production.
L’objectif de chaque firme est de maximiser son profit en fonction de la quantité
qu’elle choisit de mettre sur le marché. Les deux firmes choisissent leurs quantités vendues de
façon non coopérative. Les programmes de maximisation sont donc :
Calcul de l’équilibre
Pour déterminer l’équilibre, on doit calculer la fonction de réaction de la firme
« follower » et maximiser le profit de la firme « leader » sachant comment la firme
« follower » va réagir.
Fonction de réaction de la firme « follower » :
δ π2 (q1 , q2 )
=0
δ q2
D’où il vient :
δP(q1 + q2 ) δ C2(q2 )
. q2 + P (q1 + q2 ) − =0
δ q2 δ q2
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δP(q1 + q2 ) δ C2 (q2)
. q2 + P (q1 + q2 ) =
δ q2 δ q2
Remarque
Nous pouvons utiliser cette expression pour tracer les courbes d’isoprofit. Il s’agit de
courbes représentant les combinaisons de q1 et de q2 qui engendrent un niveau constant de
profit pour l’entreprise 2. En d’autres termes, ces courbes d’isoprofit sont constituées de tous
les points (q1 , q2 ) qui donnent le même niveau de profit.
D’où :
δP (q1+ R2 (q1 )) δR2 (q1 ) δC1 (q1)
( ). (1 + ) . q1 + P (q1 + R 2 (q1 )) =
δ q1 δ q1 δ q1
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Dans le modèle de Cournot, on a supposé que les firmes se concurrencent sur un
marché en choisissant les quantités d’un bien qu’elles produiront. Mais le modèle de Cournot
n’est pas le seul modèle possible de comportement d’un oligopole. Notre perception
habituelle est que les firmes rivalisent à travers les prix qu’elles font payer pour leur bien.
Dans le modèle de Bertrand, la variable stratégique est le prix, le comportement des
firmes est symétrique et les firmes ont une capacité de production suffisante pour couvrir la
totalité du marché. Si cette dernière hypothèse ne semble pas réaliste concernant certains
marchés, le modèle d’Edgeworth va prendre en compte les contraintes de capacité des
firmes.
a) Description du modèle
On considère deux entreprises qui proposent respectivement les prix p1 et p2 .
Les hypothèses
La firme 𝑖 fixe son prix de vente à Pi . La fonction de demande totale est D (P). Quelle
est la demande de l’entreprise 𝑗 ?
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Supposons que les deux entreprises vendent le bien à un prix supérieur au coût
marginal. Elles font donc les profits. Si la firme 1 diminue son prix d’un petit montant, et que
l’autre firme maintient son prix inchangé, tous les consommateurs préféreront acheter au prix
de la firme 1 : elle peut donc récupérer tous les clients de la firme 2. La firme 1 aura donc
toujours intérêt à pratiquer un prix légèrement inférieur au prix de la firme 2. Mais celle-ci
peut raisonner de la même façon. Dès lors, un prix supérieur au coût marginal ne peut pas
constituer un équilibre, et le seul équilibre est l’équilibre concurrentiel : prix = coût
marginal où les profits sont nuls.
Théorème de Bertrand (1883) : Sous les hypothèses 1 à 5, il n’existe qu’un seul
équilibre de prix : P1∗ = P2∗ = Cm.
L’équilibre
Il en résulte que l’équilibre est celui de la concurrence pure et parfaite. Le profit de
chaque firme est représenté par : πi = Pi × (Di (Pi )) − Ci (Di (Pi )) avec i = 1,2.
Supposons que les deux prix soient supérieurs ou égaux au coût marginal (noté Cm),
alors :
− si 𝐏𝟏 > 𝐏𝟐 > 𝐶𝑚, la firme 1 ne vendra pas de bien et fera donc un profit nul. Or en
fixant un prix P1 = P2 − 𝜀, la firme 1 peut s’emparer de la totalité du marché et faire un
profit positif. C’est la même chose pour la firme 2 qui répondra en fixant un prix encore plus
bas. Par conséquent, une telle situation ne peut pas être un équilibre car les deux firmes
continueront simplement à pratiquer les réductions de prix jusqu’à ce que le prix atteigne le
coût marginal Cm.
− si 𝐏𝟏 = 𝐏𝟐 > 𝐶𝑚, les deux firmes vont se partager le marché, cependant un tel
arrangement n’est pas stable car si l’une des deux réduit son prix, elle s’emparera de la totalité
du marché et donc des profits encore plus élevés. Ce n’est donc pas non plus un équilibre :
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La stratégie « trahison » est une stratégie dominante pour les deux firmes : l’équilibre
est (T,T) qui amène des profits nuls. En changeant simplement la base de la concurrence de la
quantité au prix, le modèle de Bertrand produit un résultat fondamentalement différent pour
les marchés duopolistiques par rapport au modèle de Cournot et de Stackelberg. A l’équilibre
de Bertrand, les prix sur de tels marchés sont rabaissés vers le coût marginal, à un niveau
largement inférieur aux deux modèles énoncés. L’équilibre de Bertrand est un équilibre de
Nash (Grossman, 1981)1. Ce résultat s’appuie sur la menace représentée par les entrants
potentiels. Toutefois, il apparaît difficile de croire que les firmes ne vont pas essayer
d’influencer le prix en s’entendant (collusions en prix). Un autre paradoxe du modèle
concerne l’entrée sur le marché : on se demande pourquoi les firmes prendraient la peine
d’entrer sur le marché pour ne faire aucun profit. Avec un tel équilibre, le bien-être dans
l’économie est maximal : les deux producteurs ont un surplus maximal (= recette totale –
coûts variables) ainsi que les consommateurs (car le prix est au maximum).
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- IHH diminue avec le nombre de firmes sur le marché ;
- IHH augmente lorsque le marché devient plus asymétrique.
Le comportement des acteurs et son impact sur les performances peuvent être
appréhendés à travers deux facteurs principalement : les barrières à l’entrée et la
syndicalisation.
L’un des facteurs essentiels des performances d’une industrie est sans doute la liberté
d’entrée sur le marché. Là où les barrières à l’entrée à long terme sont élevés, les prix peuvent
rester durablement supérieurs à leurs niveaux concurrentiels.
Les indicateurs les plus fréquemment utilisés pour mesurer les barrières à l’entrée sont
la taille minimale optimale d’une entreprise, les dépenses de publicité, l’intensité
capitalistique et divers informations subjectives sur la difficulté d’entrer dans une industrie.
2) La syndicalisation
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III- Relation entre structures de marché et performances
La théorie économique distingue trois mesures de performance : le taux de rendement,
la marge prix-coût et le 𝑞 de Tobin.
Cette relation est due à Joe BAIN en 1951. Les travaux de cet auteur reposent sur
l’hypothèse suivant laquelle le profit devrait être plus élevé dans les industries très
concentrées et protégées par d’importantes barrières à l’entrée.
Les preuves empiriques rassemblées par Bain vont d’ailleurs confirmer cette
hypothèse.
Des travaux d’autres auteurs à l’instar de Weiss (1974) vont également établir qu’il
existe une relation significative entre les profits, la concentration et les barrières à l’entrée.
𝑝−𝑣 𝑝𝑘 𝐾
= 0,16
⏟ + 0,10
⏟ 𝐶𝑅4 + 0,08
⏟ + 𝑎𝑢𝑡𝑟𝑒𝑠 𝑣𝑎𝑟𝑖𝑎𝑏𝑙𝑒𝑠
𝑝 (0,01) (0,02) (0,02)
𝑝𝑄
Où :
𝑝−𝑣
est la marge prix-coût moyen variable,
𝑝
𝑣 un indicateur du coût moyen variable,
𝐶𝑅4 le ratio de concentration des quatre premières entreprises ;
𝑝𝑘 𝐾
le ratio de la valeur (comptable) du capital à la valeur de la production.
𝑝𝑄
Ainsi, 𝑝 = 1,3𝑣.
Autrement dit, le prix est supérieur de 30% au coût moyen variable.
Si le CR4 double, passant de 50% à 100%, l’augmentation de la marge prix-coût moyen
variable sera de :
𝑝−𝑣
= 0,16 + (0,10 ∗ 1) + (0,08 ∗ 0,4) = 0,29
𝑝
C'est-à-dire 𝑝 = 1,4𝑣.
Autrement dit, le prix augmente approximativement de 1,4 fois le coût moyen variable,
ce qui représente une augmentation de prix d’environ 7%.
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Economie Industrielle 2023- 2024
Même si la concentration s’élève fortement, le prix augmente assez peu.
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Economie Industrielle 2023- 2024
exemple, on peut économiser sur les frais de gestion en n’utilisant qu’une seule équipe de
cadre pour diriger les deux entreprises.
Les synergies : Les entreprises ayant des activités différentes mais
complémentaires peuvent fusionner pour bénéficier d’économie de multi-production. Il est
moins couteux pour une entreprise de développer deux activités que pour deux entreprises de
développer chacune une activité.
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Economie Industrielle 2023- 2024
Chapitre 3 : COMPORTEMENT STRATEGIQUE ET
DIFFERENCIATION DES BIENS
Pour Chamberlin, dans les années 1930, les firmes vendent sur la plupart des
marchés des produits relativement substituables sans pour autant être homogènes, comme
le suggérait le modèle de CPP. L’idée sous jacente est que chaque entreprise va chercher à
recréer une situation de monopole dans un environnement concurrentiel. L’entreprise va
chercher à établir une niche et à exploiter le pouvoir de monopole sur cette niche.
Si Cournot et Bertrand ont posé les premiers jalons d’une analyse des marchés
oligopolistiques, cette dernière concerne toujours des marchés pour un bien identique où la
rivalité entre les marchands s’exerce à propos de la vente d’un produit parfaitement
homogène. Il revient à Hotelling (1929), Chamberlin (1933 ; 1951) et Lancaster (1966) d’avoir
attiré l’attention des économistes sur les conséquences de la violation de la troisième
hypothèse clé de la CPP : l’hypothèse d’homogénéité des produits.
Les caractéristiques d’un bien peuvent permettre de le différencier par rapport aux
autres biens proposés par les concurrents. Même si les produits ont le même usage, leurs
caractéristiques peuvent être différentes. Il peut s’agir de différences intrinsèques (qualité,
couleur proposée, …), de différences dans les services liés à la vente (service après vente,
livraison, …), de différences de localisation géographique ou de différences subjectives
créées dans l’esprit des clients (emballage, publicité, …).
On distingue classiquement deux grands types de modèle de différenciation : la
différenciation horizontale, qui renvoie à des différences de goût subjectives entre les
consommateurs (il n’y a pas de caractéristiques objectives du produit) ; et la différenciation
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Economie Industrielle 2023- 2024
verticales, où tous les consommateurs sont d’accord pour classer les produits de la même
façon.
Les produits différenciés sont perçus par le consommateur comme des substituts plus
ou moins proches (substituts imparfaits) en fonction de leur degré de différenciation.
A titre d’exemple, une automobile Clio et une Toyota 100 sont des substituts
proches, alors que la Clio et la Mercedez 200 sont deux substituts plus éloignés.
La demande d’un produit spécifique, dans un éventail de produits différenciés, va
donc dépendre des préférences des consommateurs, le prix n’étant plus le seul critère de
choix. Comme les consommateurs reconnaissent généralement qu’il existe des différences
réelles entre les produits différenciés, ils optent souvent pour une fidélité à un produit en
particulier.
La différenciation des produits est utilisée par les entreprises comme stratégie pour
avoir un pouvoir de marché. Pour ce faire, elles fidélisent une partie de la demande en lui
vendant des produits répondant spécifiquement à ses besoins. La segmentation du marché
et la réponse à certaines niches sont parfois une clé du succès.
Ainsi, l’entreprise qui réussit à différencier ses produits et donc qui fait de la
différenciation maximale, aura un pouvoir de marché, et pourra augmenter ses prix ou
s’écarter de la concurrence en prix à laquelle se livrent ses concurrents.
Mais la différenciation n’a pas toujours pour objectif de s’éloigner des produits des
concurrents. Il peut être parfois intéressant au contraire de créer des similitudes soit réelles,
soit dans l’esprit des consommateurs. On parlera alors de différenciation minimale.
Il est donc essentiel de rechercher les conditions pouvant pousser soit dans le sens de
la différenciation maximale, soit dans celui de la différenciation minimale.
La question que se posent toutes les entreprises est de savoir s’il faut proposer un
nouveau produit proche de celui de ses concurrents pour profiter peut-être d’une
sensibilisation plus grande des consommateurs, ou alors lancer un produit innovant, pour
surprendre, intéresser une clientèle captive. Autrement dit, doit-on choisir la différenciation
maximale ou minimale ? L a réponse à cette question dépend du modèle de différenciation.
Les modèles que nous allons développer sont souvent présentés comme des modèles
de localisation. On parle alors de différenciation spatiale et la différenciation correspond à
une distance physique : la distance qui sépare les consommateurs de chacune des
entreprises. Les consommateurs sont localisés en des points différents et payent des coûts
de transport qui dépendent de la distance qu’ils doivent parcourir lorsqu’ils vont acheter un
produit.
Toutefois, la distance peut être une distance psychologique, car quand chaque
entreprise, en se positionnant en un point de la ville, choisit de fournir un produit qui plaira
davantage aux consommateurs proches d’elle, la différenciation mesure alors la distance
entre cette entreprise et une autre concurrente.
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2-1- Le modèle de différenciation horizontal : la ville linéaire
(Hotelling, 1929)
Les consommateurs sont placés de façon uniforme le long d’un axe de circulation
d’une ville linéaire (segment de longueur ℓ). Pour acquérir le bien, les consommateurs
doivent payer d’une part, le prix du bien P et d’autre part, un coût de transport T qui dépend
de la distance ℓ à parcourir. Le coût étant proportionnel à la distance (T=t. ℓ), plus le bien
sera proche du consommateur et plus il sera satisfait. Les entreprises vont donc chercher la
localisation optimale, c'est-à-dire la localisation qui leur permettra d’avoir une demande
maximale.
Entreprise A Entreprise B
0 a b 1
Fig. : modèle de la ville linéaire
L’entreprise A va obtenir tous les clients entre 0 et a ; l’entreprise B ceux situés entre
b et ℓ. Elles vont se partager les clients entre a et b.
Entreprise A Entreprise B
0 a b 1
Part de marché de A Part de marché de B
Fig. : Détermination des parts de marché dans le modèle de la ville linéaire
Pour déterminer le choix de l’emplacement sur le segment [0, 1], les entreprises vont
étudier la demande correspondante. Le consommateur X situé en x est indifférent entre
l’entreprise A et l’entreprise B si ce qu’il devra payer (prix du bien + coût de transport) est le
même pour les deux entreprises.
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Consommateur
Indifférent x
Entreprise A Entreprise B
0 a b 1
x
Part de marché de A Part de marché de B
𝑎+𝑏
𝑃 + 𝑡 (𝑥 − 𝑎 ) = 𝑃 + 𝑡 (𝑏 − 𝑥 ) ⇔ 𝑥 =
2
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b) Duopole et stratégies de prix : Gabszewicz et Thisse (1979)
On suppose maintenant que les entreprises choisissent aussi le prix du bien (il y a
également concurrence en prix). On suppose alors que plus les entreprises sont proches,
plus les prix diminueront. Le consommateur choisit une entreprise si le fait de s’y rendre
et de payer le prix proposé est plus avantageux.
Considérons la variante du modèle dans lequel les coûts de transport sont quadratiques :
T(ℓ) = t. ℓ2 .
Consommateur
Indifférent x
Entreprise A Entreprise B
0 a
x b 1
Pa Pb
Fig. : Différenciation et politiques de prix
𝐷𝑎 (𝑃𝑎 , 𝑃𝑏 ) = 𝑥 𝑒𝑡 𝐷𝑏 (𝑃𝑎 , 𝑃𝑏 ) = 1 − 𝑥
2ième étape : Equilibre en prix lorsque les localisations sont fixées en (a, b)
𝜋𝐵 = 𝑃𝑏 . 𝐷𝑏 (𝑃𝑎 , 𝑃𝑏 ) = 𝑃𝑏 . (1 − 𝑥)
Maximisation du profit :
𝜕𝜋𝐴 𝑎+𝑏+2
=0 ∗
𝜕𝑃𝑎 𝑃𝑎 = 𝑡(𝑏 − 𝑎)
⟺ (𝑃𝑎 ∗ , 𝑃𝑏 ∗ )𝑎𝑣𝑒𝑐 { 3
𝜕𝜋𝐵 4 − 𝑎−𝑏
=0 𝑃𝑏 ∗ = 𝑡(𝑏 − 𝑎)
𝜕𝑃𝑏 } 3
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L’équilibre en prix (𝑷𝒂 ∗ , 𝑷𝒃 ∗ ) est constitué d’une paire de prix qui ne laisse
inexploitée aucune possibilité d’accroitre la recette des deux entreprises par le choix
unilatéral d’un autre prix, étant donné le prix choisi par le concurrent.
- Soit elles choisissent une faible différenciation et elles augmentent leurs parts
de marché, mais l’impact de la concurrence est pus fort. Elles gagnent sur les volumes de
vente mais perdent sur les prix.
Dans le cas où les coûts de transport sont quadratiques, l’effet centrifuge est
supérieur à l’effet centripète : les deux entreprises choisissent les localisations 𝑎 =
0 𝑒𝑡 𝑏 = 1.
Elles répondent au principe de différenciation maximale. Les entreprises s’éloignent
l’une de l’autre en vue de constituer des monopoles locaux qui atténuent la concurrence en
prix qu’elles se livrent.
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Les consommateurs sont situés sur un cercle de circonférence égale à 1, de façon
uniforme. Dans ce cas, l’espace produit est totalement homogène (aucune localisation n’est
a priori meilleure qu’une autre). Tous les déplacements se font le long du cercle (imaginons
des supermarchés dans une banlieue circulaire, la ville étant coûteuse à traverser).
Les consommateurs souhaitent acheter une unité du bien ; ils ont tous un coût de
transport. Chaque entreprise ne peut retenir qu’une seule localisation. Quel que soit le
nombre n d’entreprises, l’équilibre s’obtient lorsqu’elles sont placées de façon équidistante
sur le cercle. Le principe de différenciation maximale s’applique donc. Pour illustrer cette
idée, supposons trois entreprises placées sur le cercle. Si elles se placent de façon
équidistante, elles ont chacune un tiers de la demande.
B C
Supposons que l’entreprise A se déplace, elle continuera à avoir un tiers. Elle n’a
donc pas intérêt à se déplacer.
Néanmoins, si A se déplace vers C, B va y gagner mais C va perdre. C va donc se
déplacer. Mais si C se déplace B va se déplacer. Elles ont donc intérêt à se déplacer de façon
équidistante. C’est la seule solution d’équilibre.
b) Stratégies de prix
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Economie Industrielle 2023- 2024
plus le prix d’équilibre va diminuer : en l’absence de coût d’entrée (coûts fixes d’installation),
l’entrée sur un marché différencié n’est jamais impossible.
Les produits de bonne qualité sont toujours plus chers que ceux de moins bonne
qualité. C’est une évidence dont les raisons tiennent à des considérations techniques
(longévité), ergonomiques (confort), etc.
Mais d’après les tenants de ce modèle [Gabszewicz, Thisse (1979), Shaked et Sutton
(1982)], c’est parce que les produits de mauvaise qualité sont plus éloignés que ceux de
bonne qualité dans la perception psychologique que les agents seront prêts à payer moins
chers ces produits. En fait, l’existence simultanée de produits de bonne qualité et de
mauvaise qualité peut favoriser la vente des produits de mauvaise qualité.
En effet, l’existence d’un étalon de valeur qui aide à prendre conscience qu’un
produit est de bonne qualité permet d’en augmenter un peu plus son prix. A l’inverse, les
agents n’ayant pas un usage important de ce produit, achèteront celui de mauvaise qualité
en raison du prix de celui de bonne qualité. De plus, le gain tiré de la consommation de ce
bien n’est pas compensé par les coûts supplémentaires liés à l’achat du bien de bonne
qualité.
La résolution de ce modèle montre que les firmes préfèrent une différenciation aussi
grande que possible. Les entreprises choisissent les qualités qu’elles veulent offrir en
fonction des prix, qui maximisent leurs profits. Elles vont essayer d’atténuer la concurrence
en prix : la différenciation maximale s’appliquera.
Dans ce cadre d’analyse, les agents vont supporter un coût supérieur en choisissant
le produit de mauvaise qualité. L’entreprise qui pratique la différenciation verticale devra
vendre moins cher les produits de mauvaise qualité. Les coûts de transport ou
d’éloignement psychologique pour les produits de bonne qualité n’étant pas élevés,
l’entreprise pourra les vendre à des prix élevés et faire des marges importantes.
Deux critiques peuvent être formulées. La 1ère repose évidemment sur la perception
de la qualité qui est parfois subjective. La différence doit être faite entre les biens
d’expérience, dont la qualité apparaît à l’usage, et les biens dont la qualité est
immédiatement perceptible. Mais quel que soit le bien, deux personnes donneront une
évaluation sur la qualité du produit souvent différente, cela dépend de leur propre vécu, de
leurs habitudes de consommation, des groupes sociaux auxquels ils appartiennent.
La seconde critique porte sur la notion de qualité/prix. Les échelles de grandeur sont
elles aussi, fortement subjectives.
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Economie Industrielle 2023- 2024
2-4- La publicité et la demande des consommateurs
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Chapitre 4 : COMPORTEMENTS STRATEGIQUES ET
COLLUSION SUR LES MARCHES
La presse économique et financière relate chaque jour les prises de contrôle et les
accords de coopération et livre fréquemment au public les tumultueuses relations inter-
firmes ; Acquisitions géantes, accords entre firmes « foncièrement » concurrentes ou ruptures
d’alliances sont autant d’occasions d’offrir à la théorie de très intéressantes illustrations et au
chercheur une mine d’informations. La littérature concernant les stratégies de croissance
externe et d’alliance s’est largement développée ces dernières années. Une des premières
contributions concernant les accords de coopération fut celle de P.Mariti et R. Smiley. Ils
mirent en évidence les formes structurelles et les motivations des accords. De même, les
chercheurs s’intéressèrent davantage à la croissance externe et particulièrement aux stratégies
de fusions-acquisitions.
La littérature concernant la coopération inter-firmes a pris forme très tôt, dès le début
de vingtième siècle. À travers un plaidoyer pour les trusts fédérés, C. Gide indique déjà dans
les années 1910 que de telles structures présentent des avantages car elles préservent
l’indépendance des entreprises. Trusts et cartels seront aussi défendus en 1924 par R.
Liefman, lequel insistera sur le caractère informel de ces coopérations, suggérant déjà que les
contrats signés sont beaucoup plus souples que les structures juridiques classiques.
Cependant, la plupart des contributions théoriques assimileront pendant de longues années
alliances et ententes. Il est vrai que de nombreuses situations correspondent alors à une
coopération sur le prix ou sur les quantités ; le cas u marché pétrolier est à ce titre
emblématique. Bien avant que ne naisse l’OPEP, le marché international du pétrole fut en
effet régi par les accords d’Achnacarry (1928) qui instituaient une association entre les sept
plus grandes compagnies pétroliers, appelées les « Majors ». Cette association se transforma
très vite en cartel. Aujourd’hui, la nature des alliances est différente ; les variables qui
intéressent les entreprises ne sont plus uniquement les prix ou les quantités.
Ainsi, les fusions-acquisitions ou les accords de coopération concernent la mise en
commun de la recherche-développement, de la production, de la commercialisation ou de
l’ensemble de ces services. Il n’est cependant pas exclu qu’au travers d’alliances, se forment
des ententes au sens classique du terme. Mais c’est finalement assez rare. La richesse du tissu
économique s’exprime aussi par l’importance des relations de sous-traitance. Aucune
entreprise, aussi puissante soit-elle, n’est vraiment autonome ; beaucoup s’emploient donc à
tisser de véritables réseaux autour d’elles, afin de bénéficier d’externalités ou dans le but de
transformer son produit en un standard du marché.
Objectifs du chapitre : Les relations qui peuvent se nouer entre les firmes,
concurrentes ou non, ainsi que leurs caractéristiques, sont nombreuses et d’une grande
complexité. Outre la compréhension du fonctionnement d’un cartel et de sa stabilité, nous
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Economie Industrielle 2023- 2024
tenterons de faire le point sur les différentes modalités des relations inter-firmes. Le paysage
économique européen se transforme depuis plusieurs décennies sous l’effet des grandes
alliances et des opérations de fusions-acquisitions, mais aussi à cause de l’évolution
favorable de la sous-traitance. À l’aide de nombreux exemples d’actualité, de recherches
empiriques personnelles et de théories économiques, nous nous proposons de mieux
comprendre ces différentes stratégies.
I- Le cartel, l’entente parfaite ?
Sur un marché, des entreprises peu nombreuses peuvent avoir intérêt à conclure une
entente, autrement dit, à former un cartel. On aborde alors les stratégies dites coopératives,
par opposition aux modèles précédents appelés non coopératifs (cf. chapitres 2 et 4). Un cartel
peut naître d’un accord formel ou d’un accord tacite, chaque firme réduisant sa production
avec l’idée que les concurrents adopteront la même stratégie ; on parle alors de collusion
tacite ou encore de parallélisme de comportement.
A- La solution algébrique
Or, comme le cartel fixe un prix de vente unique, chaque unité supplémentaire
fabriquée rapportera la même recette marginale, quelle que soit la firme qui produit cette
unité. Cela nous permet d’écrire l’égalité des recettes marginales :
∂RT ∂RT ∂RT
= =
∂qA ∂qB ∂qC
Cette égalité permet de résoudre le système (1) ; il vient alors :
CmA = C mB = CmC
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Economie Industrielle 2023- 2024
Ainsi, les quantités qA , qB et qC qui maximisent les profits joints sont elles que les
coûts marginaux des membres du cartel sont tous égaux entre eux. Ce résultat se généralise
lorsque le cartel est composé de n firmes. Sur les marchés où règnent des cartels, on observera
en règle générale un prix élevé et des quantités faibles.
Dans la plupart des cas, la solution à laquelle on aboutit doit donner lieu à des
transferts de profits, d’une entreprise à l’autre, afin de respecter les sacrifices que certaines
entreprises ont consentis en respectant les quotas imposés par le cartel.
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Economie Industrielle 2023- 2024
L’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole a été créée le 14 septembre 1960, à
Bagdad, entre l’IRAK, l’IRAN, le Koweit, l’Arabie Saoudite et le Venezuela. Comme nous le
disions en introduction, son objectif initial était de réagir à l’agressivité croissante de grandes
compagnies pétrolières. C’est-à-dire lutter contre l’érosion continue des cours du brut,
imposée par les « 7 sœurs ». Au début, l’OPEP demande donc une simple stabilisation des
cours. Très vite, les membres du cartel sont incités à durcir leur position face au changement
de structure de la consommation d’énergie : du « tout charbon » jusqu’à la fin des années 50,
les pays industrialisés passent progressivement au « tout pétrole » dans les années 60.
D’autres pays rejoignent le cartel de l’OPEP : en 1961, le Qatar ; en 1962, l’Indonésie et la
Libye ; en 1969, l’Algérie ; en 1971, le Nigeria et en 1973, l’Equateur et le Gabon. Un
ressentiment contre les anciens pays colonisateurs et plus globalement contre les pays
occidentaux, ainsi que les guerres des Six jours (1967) et du Kippour (1973) expliquent les
nationalisations des avoirs étrangers par certains pays de l’OPEP et les continuelles hausses
du prix du brut : le baril passe de 3 dollars en octobre 1972 à 12 dollars en 1973, puis à 35
dollars en 1980.
Pourtant, dès 1975, certains pays tels que la Libye, le Nigéria, ou l’Équateur,
commencent à accorder d’importantes remises sur les prix. En septembre 1985, pour faire
pression sur ces pays qui ont pris l’habitude de vendre moins cher que le prix officiel,
l’Arabie Saoudite menace de déclencher une guerre des prix, en vendant un supplément de
1 million de barils par jour à un prix largement inférieur au prix officiel. En mars 1986,
l’OPEP se réunit à Genève afin de mieux définir les quotas et de réfléchir sur les méthodes
pour stopper la baisse du prix. Cette réunion n’atteint pas vraiment ses objectifs.
On remarque ainsi que les premiers comportements de free riders sont apparus dès
que le cartel est devenu puissant, c’est-à-dire, dès qu’il est devenu intéressant pour certains
pays de profiter des prix officiels élevés pour vendre à des prix légèrement moins élevés, mais
cependant bien plus élevés que si le cartel n’existait pas. Ce comportement peut cependant
s’expliquer par des motivations autres qu’opportunistes. En effet, l’effritement de la
puissance de l’OPEP est lié à plusieurs facteurs. Tout d’abord, à la forte concurrence des
pays non OPEP, tant sur le plan même du pétrole que sur le développement d’importants
programmes nucléaires et d’économies d’énergie. Ensuite, du fait des caractéristiques en
opposition des pays membres : certains sont peu peuplés et peuvent accepter des réductions
de leurs livraisons alors que d’autres, à la démographie galopante, ne le peuvent pas ; certains
doivent financier des guerres (Iran, Irak) ou compenser le coût d’une industrialisation
indispensable.
En mars 2000, à l’occasion d’une réunion de l’OPEP, le cartel avait adopté un
mécanisme d’intervention, qui devait être en théorie automatique : dès que le cours du baril
dépassait 28 dollars en moyenne sur 20 jours, la production du cartel devait augmenter de
500 000 barils par jour. Ce seuil a été franchi en juin 2000 sans que l’OPEP ne modifie sa
production. Le 21 juin 2000, à Vienne, l’OPEP a décidé de modifier ses quotas, afin de faire
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Economie Industrielle 2023- 2024
baisser le prix, jugé trop élevé par les pays membres qui craignent de trop freiner la
consommation des pays riches.
Selon P. Chalmin, « au cours de ses 40 années d’existence officielle, l’OPEP n’aura connu
que 12 années de ‘’vraie vie’’, entre 1973 et 1985. Pendant cette période, l’OPEP a fixé le
prix du pétrole. Depuis 1985, elle n’est parvenue qu’à de très rares moments à influer le
marché. Elle a passé l’essentiel de son temps à courir après son unité, en tentant d’assurer un
minimum de discipline entre des membres aux intérêts opposés, regroupés autour de deux
sensibilités : les faucons, soucieux de la seule défense des pays producteurs, et les colombes,
sensibles aux intérêts des pays occidentaux. Et a se prémunir de la concurrence, de plus en
plus forte des pays non OPEP.
- Tout d’abord, certains cartels internationaux où les membres sont des pays,
fonctionnent légalement ;
- Certains cartels illégaux fonctionnent en pensant qu’ils ne seront pas détectés et/ou
que la punition sera de toute façon bien plus faible que des bénéfices tiers de
l’entente ;
- Certaines entreprises sont enfin capables de coordonner leurs activités sans créer de
structure, ou sans qu’il y ait collusion explicite.
De nos jours, l’entente sur les prix et les quantités est loin d’être la « formule »
coopérative la plus fréquemment utilisée par les entreprises, essentiellement pour trois
raisons. Tout d’abord, elle est interdite et légalement risquée ; ensuite, elle n’est envisageable
que dans les secteurs oligopolistiques ; enfin ; les éventuels participants sont conscients de sa
fragilité organisationnelle. Aussi, il n’est pas étonnant de voir exister d’autres types de
« relations » inter-firmes, aux caractéristiques bien différentes de celles u cartel.
A- De la sous-traitance à la quasi-intégration
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Economie Industrielle 2023- 2024
Le Conseil économique et social, dans son avis n°7 du 21 mars 1973 avait définit la
sous-traitance comme « l’opération par laquelle une entreprise confie à une autre le soin
d’exécuter pour elle et selon un cahier des charges préalable une partie des actes de
production ou de services dont elle conservé la responsabilité économique finale ». L’Afnor
limite la définition précédente en indiquant « qu’un preneur d’ordre qui assume la
responsabilité technique d’un produit spécifique est considéré comme un fournisseur et non
plus comme un sous-traitant, même si certaines performances et/ou contraintes lui ont été
fixées par le donneur d’ordres ». Aujourd’hui, faisant référence à la sous-traitance, on parle
volontiers d’externalisation (outsourcing), ou encore d’infogérance lorsqu’il s’agit de sous-
traiter tout ou partie d’un service informatique. En France, le premier prestataire
d’infogérance est IBM Global Services, avec près de trois milliards de francs de chiffres
d’affaires en 1999.
Outre ces définitions, il est classique de distinguer deux formes de sous-traitance. La
sous-traitance de capacité correspond au cas où le donneur d’ordres, équipé pour effectuer
une production donnée, fait appel à une autre entreprise soit de façon occasionnelle pour faire
face à une pointe de charge ou à des difficultés techniques, soit de façon plus ou moins
habituelle afin de conserver une capacité propre dans une production donnée.
La sous-traitance de spécialité apparaît lorsque le donneur d’ordres utilise les
compétences et ses équipements d’une entreprise spécialisée. Les motivations de la firme
principale peuvent être nombreuses : elle n’est pas équipée, ou ne souhaite pas investir dans
de nouvelles installations ou encore espère bénéficier des économies liées à la spécialisation
du sous-traitant. La sous-traitance de spécialité correspond davantage à une décision
stratégique, résultant d’un calcul économique de long terme. Elle est qualifiée de
« structurelle » et domine dans la plupart des secteurs où elle représente en moyenne 70% du
total.
Pour marquer la volonté de créer une certaine égalité dans une relation d’échange, de
nouveaux termes sont apparus tels que la quasi-intégration, ou l’impartition. Ils désignent des
situations où les rapports de force se veulent plus équilibrés, où la confiance prend le pas sur
la surveillance, l’interdépendance sur la dépendance.
S’inspirant des travaux de François Perroux, Jacques Houssiaux a développé le
concept de quasi-intégration, qu’il définit ainsi : « Relation suivie des marchés conclus par
des entreprises indépendantes situées à des stades de production différents. » La quasi-
intégration se situe entre l’intégration et le marché. Proche de l’intégration du fait de la
stabilité des liens, elle n’emprunte pas moins certains éléments au marché : indépendance
juridique, négociations périodiques, etc. M. Aoki indique, au sujet de la stabilité, qu’entre
1973 et 1984, seulement trois firmes ont quitté l’association des fournisseurs de premier rang
de Toyota. Un peu plus loin, il rejoint Houssiaux lorsqu’il dit que la quasi-intégration est une
relation de sous-traitance, présentant à la fois des caractères d’intégration et d’autonomie. Au
début des années 90, avant que la crise asiatique ne vienne perturber certains équilibres, une
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Economie Industrielle 2023- 2024
autre étude a montré qu’au Japon, 60% des PMI sous-traitantes disent n’avoir jamais changé
de donneur d’ordres depuis le début de leurs relations de sous-traitance. Il est donc indéniable
que la quasi-intégration présente des avantages sur la sous-traitance pure ; s’appuyant sur la
confiance, elle permet de bénéficier des atouts de l’intégration sans subir ses inconvénients.
Malgré cela, la dépendance ne s’efface pas totalement ; paradoxalement, la durée qui
caractérise une relation quasi intégrée, peut conduire à un renforcement de la dépendance,
pour toutes les parties en présence.
Il est en effet plus aisé pour une firme de s’extraire d’une relation brève que d‘une
relation de longue durée où des habitudes ont été prises, et où il est probable que les liens avec
des sous-traitants de substitution n’ont pas été maintenus. Comme on peut le constater, la
dépendance est réciproque, mieux maîtrisée, mais toujours présente.
Selon C. Altersohn, « le terme d’impartition fut conçu pour jouer un rôle de concept
unificateur entre les différentes formes de coopération fondées sur la confiance ». C’est à P-
Y. Barreyre que l’on doit ce terme, associé par l’auteur aux notions de partage, de délégation
et de confiance. Plus large que la sous-traitance, qui est un choix économique (faire ou faire-
faire), l’impartition est aussi et surtout un état d’esprit : l’entreprise ne doit pas considérer
seulement son intérêt à court terme mais, en se plaçant dans une perspective stratégique, doit
considérer l’autre comme un partenaire avec lequel il faut s’attacher à développer une
collaboration susceptible de produire des effets de synergie où chacun trouve son avantage ».
Barreyre et Bouche donnent à l’impartition un sens encore plus englobant que celui
donné à la quasi-intégration, puisqu’elle rassemble la sous-traitance, la fourniture spéciale, le
mandat, la concession, la licence, le franchisage, la coproduction ou co-traitance (pour
laquelle « les partenaires se partagent la responsabilité d’une réalisation »). Nous avons tenu à
terminer cette énumération par la coproduction parce qu’il s’agit du type d’impartition qui se
rapproche le plus de la coopération. Selon les termes mêmes de l’auteur, il y aurait dans ce
cas un partage des responsabilités, absent des autres formes d’impartition. Malgré cette
proximité et parce que l’impartition inclut aussi la sous-traitance classique, la franchise etc., il
n’est pas possible e l’assimiler stricto sensu à la coopération ou à la stratégie d’alliance.
B- Accords de coopération, alliances stratégiques et entreprises communes
Contrairement ç certains abus de langage, et à l’usage qu’en fait souvent la presse
économique et financière, ces termes ne devraient pas être totalement considérés comme des
synonymes.
Un accord de coopération est un mode de croissance réfléchi et limité dans le temps,
qui crée des liens d’interdépendance entre deux ou plusieurs entreprises, concurrentes ou non,
sans généralement aboutir à des situations de contrôle juridique fort et direct. Ainsi, un accord
de partenariat entre une entreprise et son fournisseur, ou une alliance stratégique pourront être
qualifiés d’accord de coopération, ce qui ne sera pas le cas d’une fusion ou d’une acquisition.
Le terme d’alliance stratégique est généralement admis pour désigner des accords de
coopération entre firmes concurrentes. Nous retiendrons la définition de P. Dussauge :
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Economie Industrielle 2023- 2024
« Une coopération ou une alliance stratégique est un accord conclu et géré
conjointement par plusieurs entreprises concurrentes, ou potentiellement concurrentes, qui
choisissent de mener à bien un projet, un programme ou une activité spécifique en
coordonnant les compétences, les moyens et les ressources nécessaires plutôt que :
De mettre en œuvre ce projet ou cette activité sur une base autonome, en affrontant
seule la concurrence des autres firmes engagées dans la même activité ;
De mettre en commun de manière définitive et sur l’ensemble de leurs activités, la
totalité des ressources dont elles disposent (en fusionnant ou en procédant à
l’absorption de l’une par l’autre) ;
De transférer entièrement l’activité concernée d’une firme à une autre ».
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Economie Industrielle 2023- 2024
buts ou les modalités de l’échange des droits sociaux. L’importance des changements
provoqués dans la répartition des droits de propriété ne doit cependant pas dissimuler un
second élément, essentiel à la réussite d’une opération de croissance externe : les
restructurations et les « recompositions » organisationnelles.
Les fusions permettent e restructurer les secteurs au niveau mondial. Le nombre
d’opérations ainsi que les montants moyens en jeu sont globalement en augmentation depuis
une vingtaine d’années. Voici une liste non exhaustive des opérations majeures de ces
dernières années (cf. tableaux 6.2 et 6.3)
Pour des raisons de place et parce que cela ne nous semble pas indispensable par
rapport aux objectifs fixés, nous n’aborderons pas les caractéristiques des différentes types de
fusions (fusion pure, fusion absorption, fusion scission, etc.), ni les aspects techniques ou
financiers associés à ces opérations aux montages souvent complexes.
III- Les motivations des stratégies de fusions-acquisitions et d’alliances
À la suite d’une étude statistique portant sur la période 1985-1992, achevée en 1994 et
recensant 6 112 opérations, nous avons pu mettre en évidence les principales motivations des
stratégies de fusions-acquisitions et d’alliances. La plupart des résultats « classiques » relatifs
aux motivations communes se sont confirmés au fil des années ( § A) ; certains résultats plus
« originaux » en ce début de décennie 90 sont aujourd’hui parfaitement admis et ont fait
l’objet de nombreux développements théoriques ( § B).
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du profit alors qu’aujourd’hui, elle est nécessaire à la survie de l’entreprise. Il existe une
multitude d’exemples de fusions-acquisitions et d’alliances entre firmes concurrentes,
réalisées dans le but d’accroître la taille et de profiter d’économies d’échelle. Le récent
accord de coopération entre les constructeurs automobiles européens Fiat et PSA concernant
la production d’un monospace au sein d’une société commune est l’exemple même d’une
alliance ponctuelle entre firmes concurrentes, réalisée dans le but de profiter d’économies
d’échelle dans la production.
Cependant, les deux modalités de regroupement ne doivent pas s’interpréter de la
même façon sur le plan industriel. La fusion réunit la totalité des fonctions des firmes
concernées. Il s’agit donc d’une opération lourde qui affecte toute la structure d’ l’entreprise,
qui est de plus susceptible d’être bloquée par les autorités antitrust (cf. encadré ci-après).
L’accord de coopération permet les mêmes économies d’échelle techniques ou commerciales
en ne regroupant que ce qui est vraiment nécessaire. Seule la fonction que l’on souhaite
élargir fait l’objet de l’alliance. Cela s’explique par le fait que toutes les fonctions ne
connaissent pas la même dimension optimale et que différents niveaux d’indivisibilité
coexistent à l’intérieur de la firme recherche, production, commercialisation).
Concernant les alliances stratégiques, P. Dussauge et B. Garrette, s’appuyant pour
partie sur la distinction scale joint venture/link joint venture proposée par J.-F. Hennart,
constatent l’existence de trois configurations possibles. Leur typologie est construite sur la
base d’une double distinction : d’une part les éléments mis en commun à l’occasion de
l’alliance sont identiques ou complémentaires ; d’autre part les résultats sont communs aux
firmes ou propres à chaque firme.
Alliance de complémentarité
Alliance additive Alliance conjointe
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Economie Industrielle 2023- 2024
Figure 6.2 La typologie de Dussauge et Garrette
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La stratégie globale est onc une solution efficace pour réduire au maximum les coûts
de production. Seule la hausse des coûts de transport et de coordination des activités semble
pouvoir freiner la mondialisation. Cependant, les coûts unitaires de transport baissent avec
l’accroissement des quantités et la coordination des activités s’améliore avec les progrès
réalisés dans les technologies de l’information et des télécommunications. De ce fait, afin de
profiter des avantages dus à la grande dimension, mais sans compromettre l’identité nationale,
les firmes utilisent fréquemment les accords de coopération. De nombreuses motivations sont
donc communes aux accords de coopération et aux fusions-acquisitions. Néanmoins, une
analyse plus fine met en évidence des différences et des motivations spécifiques.
B- Les motivations spécifiques des fusions –acquisitions
Si l’on se réfère aux statistiques, les motivations purement financières représentent
en moyenne 23% des explications des fusions et 48% de celles des acquisitions majoritaires.
Bien sûr, l’aspect financière est loin d’être absent de la logique industrielle présentée plus
haut, dans la mesure où la baisse du coût unitaire grâce aux possibles synergies est un élément
essentiel. Cependant, il existe de nombreux cas où seuls des motifs financiers guident
l’opération de fusion-acquisition. C’est le cas lorsqu’une firme acquiert la majorité des titres
d’une autre firme, simplement dans le but de s’approprier les bénéfices réalisés.
De nombreuses opérations n’aboutissent pas au rapprochement industriel et ne sont
réalisées que dans le but de réaliser « une bonne affaire » ou d’éliminer un concurrent gênant.
Dans certains cas, l’achat purement spéculatif, par rapport aux cours boursiers, est susceptible
de conduire au démantèlement de la firme. Ces dernières années, les stratégies de
diversification étant moins présentes, au profit des stratégies dites de recentrage sur le métier
de base, nous pouvons noter que cette pratique se fait plus rare.
La théorie managériale précise que les fonctions d’utilité des propriétaires et des
gestionnaires sont différentes. Ces derniers peuvent donc être tentés de privilégier les
acquisitions ou les fusions qui procurent une croissance rapide, afin de satisfaire leur goût
pour le pouvoir. Bien des dirigeants ont développé des stratégies d’acquisitions qui se sont
révélées par la suite très coûteuses et peu rentables. Ceci est d’autant plus vrai que le métier
des cibles était éloigné des compétences et l’acquéreur.
Les fusions-acquisitions se produisent aussi à cause de dirigeants incompétents qui
réduisent la valeur boursière de la firme à tel point qu’il devient profitable pour des firmes
concurrentes d’en prendre le contrôle. Après l’opération, les nouveaux managers espèrent
gérer la firme plus efficacement. Le corollaire de cette hypothèse est l’existence d’un marché
financier inefficient. Les informations concernant la cible ne sont pas complètes et parfaites.
De plus, les acquéreurs potentiels ne disposent pas tous du même niveau d’information.
C- Les motivations spécifiques des alliances
Nos recherches statistiques de 1985 à 1992, corroborées aujourd’hui par de nombreux
spécialistes, nous permettent de conclure à la spécificité industrielle et stratégique des accords
de coopération et des alliances stratégiques. C’est le cas des nombreuses alliances visant à
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Economie Industrielle 2023- 2024
promouvoir la recherche-développement, la flexibilité et la réversibilité, ainsi que la
« normalisation privée ».
1) Alliances stratégiques et R&D
Les résultats de nos enquêtes montrent que la R &D occupe une place croissante dans
les motivations de la coopération. Selon nous, l’importance de la R & D coopérative est due à
un double phénomène : le poids des coûts fixes et l’appropriabilité (possible ou non) des
résultats de la recherche.
La R & D implique des coûts fixes de plus en plus élevés
Devant les difficultés et les coûts élevés des projets de R&D, nous savons que les
autorités antitrust ont assoupli les contraintes pesant sur les accords de coopération en R&D.
En effet, ces dernières se trouvaient devant un dilemme. Soit elles interdisaient l’exploitation
commune des résultats de la R&D coopérative, étant conscientes que les firmes ne
trouveraient alors guère d’avantages à la coopération (car les bénéfices tirés de la R&D en
commun seraient vite amoindris par la concurrence intense au niveau de la
commercialisation). Soit les autorités concurrentielles permettaient l’extension de la
coopération aux stades avals, ce qui favorisait les firmes mais contribuait à la création de
pratiques anti-concurrentielles dommageables (fixation conjointe des prix de vente, paiements
multilatéraux compensatoires, exclusion d’entrants potentiels…). Le règlement n° 418/85 de
la Commission tente d’assurer un compris en rendant inapplicable aux accords e coopération
l’article 85 § 1 du traité de Rome, sous certaines conditions (le travail est accompli dans le
cadre d’un programme défini, toutes les parties ont accès aux résultats, le savoir-faire et les
brevets résultant de la recherche contribuent de manière substantielle au progrès technique et
économique, etc.). Cependant, afin de limiter l’usage abusif de ce règlement, la commission
impose des conditions restrictives quant à la durée de l’accord et aux parts de marché (cf.
chapitre 3).
Ainsi, l’importance croissante des frais de recherche et l’assouplissement de la
législation sur les accords concernant la R&D et ses résultats, se conjuguent pour rendre les
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Economie Industrielle 2023- 2024
coopérations dans le domaine de la R&D de plus en plus intéressantes et expliquent le trend
ascendant constaté lors de l’étude des motivations.
2) Les alliances stratégiques : des relations industrielles souples et réversibles
La recherche d’un certain niveau de flexibilité et de réversibilité est aujourd’hui une
des principales motivations spécifiques des alliances stratégiques. La réflexion autour de la
flexibilité est pourtant ancienne puisque déjà en 1978, J. Pfeffer et G. Salancik remarquaient
que, « la coopération à l’avantage d’être plus flexible que la gestion de la dépendance passant
par la propriété. Les relations issues de la coopération peuvent être établies, renégociées et ré-
établies avec beaucoup plus de facilité que ne le permet l’intégration par la fusion ».
Le degré de flexibilité d’un programme est une fonction croissante du nombre de
possibilités offertes après accroissement e l’information. Cela implique que la flexibilité a un
coût. K. Arrow, A. Fisher et C. Henry se sont intéressés à la valeur qu’un décideur est prêt à
payer pour maintenir dans le futur sa liberté de choix. Ce prix à payer, appelé « valeur
d’option », trouve sa source dans l’obtention d’informations ; il entre dans le processus de
décision des agents chaque fois que le futur est incertain et que ces derniers anticipent une
meilleure information. Selon cette définition, la flexibilité associée à un mode de croissance
(fusion ou accord) dépend des opportunités laissées libres à l’issue de l’opération. Or un
accord de coopération n’empêche pas la formation d’autres alliances, même dans un délai très
bref. Il est cependant nécessaire de prévoir l’élargissement éventuel lors de l’élaboration du
contrat. Ainsi, la flexibilité dynamique d’un mode de croissance réside essentiellement
dans la nature du contrat liant les entreprises ; plus ce dernier est précis, plus les possibilités
futures sont réduites. Lors de l’accord initial entre Renault et Volvo, il était stipulé que les
accords avec des tiers seraient limités à ceux déjà en cours ou bien devraient recevoir
l’approbation du partenaire. Cette clause visait à protéger chaque constructeur d’une tentative
de comportement déloyal, pour chacune des firmes, cela représentait une diminution la
flexibilité.
Sur le plan de la réversibilité, plus les relations entre deux firmes concernent un
domaine précis et limité, plus il sera aisé de rompre sans grands changements par rapport à
l’état de départ. Les accords de coopération sont donc par définition plus réversibles que les
fusions-acquisitions. Le principal problème d’un dirigeant n’est pas de choisir entre un acte
irréversible et davantage d’informations, mais de choisir entre deux actes à degrés
d’irréversibilité différents. Lorsque le retour à la situation antérieure s’impose, le choix « le
moins mauvais » sera le choix le plus réversible.
Le cas de l’échec de la fusion BMW-Rover montre qu’il est souvent très coûteux de
revenir en arrière. Selon H. Panke, directeur financier de BMW, « Rover nous aura coûté 9
milliards marks ». Cette valeur n’inclut d’ailleurs par la somme de 500 millions de livres que
BMW a accepté de verser au consortium anglais Phoenix à titre d’avances remboursables,
pour que ce dernier accepte d’acheter Rover au prix symbolique de 10 livres. D’après le
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Economie Industrielle 2023- 2024
président du directoire de BMW, « nous avons surestimé la valeur de la marque Rover ; nous
avons appris que les fusions peuvent être paralysantes ».
Ainsi, dans des situations d’incertitude et de complexité (technologique, par
exemple) l’entreprise devrait plus volontiers se tourner vers des modes d’organisation
flexibles et réversibles, afin d’être à même de se réorienter plus facilement vers des domaines
porteurs dans la mesure où ses choix antérieurs se sont révélés infructueux
3) Les alliances stratégiques : structure organisationnelle privilégiée dans la création de
standard
La volonté de participer à la création d’une norme (d’un « standard »), de préférence
acceptée au niveau européen ou mondial, est une motivation spécifique qui prend aujourd’hui
une place croissante dans les stratégies des firmes. Lorsque ces stratégies réussissent, elles
peuvent engendrer de durables effets d’irréversibilité, en condamnant l’émergence et la
diffusion de nouveaux produits ou même de standards alternatifs.
Ainsi, la plupart des projets technologiques relatifs à des infrastructures et qui
impliquent une compatibilité avec d’autres techniques ou entre différents utilisateurs,
présentent des phénomènes d’enfermement sur des orientations technologiques particulières,
autrement dit, donnent naissance à des irréversibilités. Lorsque la valeur d’un produit est
fonction du nombre d’utilisateurs, on dit qu’il bénéfice d’externalités de réseau.
Aujourd’hui, un nombre croissant de produits, notamment ceux liés aux technologies de
l’information et de la communication, bénéficient de ce type d’externalités.
Les entreprises sont donc contraintes de développer des stratégies adaptées à ce nouvel
environnement : nouer des alliances en vue de promouvoir une norme semble être le meilleur
moyen. Le système d’exploitation Windows de Microsoft est devenu un standard, notamment
parce que Microsoft a su convaincre la plupart des fabricants de micro-ordinateurs de
l’utiliser. Une fois que la majorité des utilisateurs sont convaincus, l’inertie devient si grande
qu’un produit concurrent a forcément beaucoup de mal à trouver sa place. Même lorsque son
prix est faible, les coûts de changement (temps de formation sur le nouveau produit,
investissement dans des équipements complémentaires, problèmes d’incompatibilité, tec.)
sont tels qu’entreprises et utilisateurs sont réticents. On dit que le marché est verrouillé.
Mais heureusement, le verrouillage n’est pas éternel et une nouvelle technologie ou un
nouveau produit peut changer la donne, à la condition que de nombreuses entreprises
« alliées » dans ce combat s’opposent au standard de façon ferme.
C. Shapiro et H. Varian développent largement cette question dans un ouvrage très
intéressant consacré à l’économie de l’information. Ils illustrent leurs propos par l’étude de la
téléphonie mobile. Dans ce secteur en forte croissance, trois standards se partagent jusqu’à
présent le marché : le système GSM, le système TDMA et le système CDMA. Le premier
s’est imposé en Europe (150 millions d’abonnés) ; il est aussi dominant au plan mondial
(280 millions d’abonnés). En revanche, les États-Unis ont connu une « guerre de
standards » dans la mesure où les trois systèmes sont présents, et obligent l’utilisateur à
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Economie Industrielle 2023- 2024
acheter un nouveau téléphone lorsqu’il souhaite passer d’un système à l’autre
(l’incompatibilité s’arrête là car il est cependant possible de téléphoner entre systèmes).
Complétons cette illustration par l’actuelle migration vers le nouveau standard UMTS
(Universal Mobile Télécommunication System). Il s’agit de la troisième génération de la
téléphonie mobile, permettant un accès à haut débit à Internet.
4) Les alliances stratégiques : unique structure organisationnelle permettant de fédérer
un nombre important d’entreprises
Les alliances, indépendamment ou non de la création d’une norme, permettent aussi à
un grand nombre d’entreprises, concurrentes ou non, de se réunir dans le cadre d’un projet
commun. Cela ne serait pas envisageable par le biais de fusions-acquisitions. De plus, les
entreprises ne souhaitent coopérer que sur des aspects très précis de leurs activités, et non sur
la totalité.
Ainsi, environ 60% du trafic aérien mondial est logé sous la bannière d’une grande
alliance, dite globale, qui coiffe les pavillons traditionnels de chaque compagnie. Dans ce
secteur, pour des raisons réglementaires, les fusions sont assez difficiles, c’est pourquoi
presque toutes les compagnies ont développé des partenaires stratégiques. Ainsi, Star
Alliance regroupe une quinzaine de compagnies, dispose de 1 858 appareils et offre plus de
9 000 vols par jour à 750 000 passagers par jour. La plupart des alliances se construisent
autour d’un élément fondamental : le hub (plate-forme de correspondance). Les connexions
entre hubs permettent de démultiplier le nombre des correspondances. Ainsi, les compagnies
peuvent offrir un très grand choix de destinations à leurs adhérents.
A l’heure actuelle, on note une forte croissance des alliances de « grand nombre »
suite au développement rapide du commerce électronique, d’entreprises à particuliers (B-to-
C, Business to Cosummer), mais surtout d’entreprises à entreprises (B-to-B, Business to
Business).
Remarque
Certaines plates-formes ne sont pas encore opérationnelles à l’heure où nous écrivons
cet ouvrage, mais nous ne doutons pas que très rapidement, elles le deviennent, avec un taux
d’échec très faible. C’est le cas de CPGmarket.com, première place de marché électronique
européenne dite de e-procurement créée par Danone et Nestlé, deux entreprises concurrentes
dans les produits de grande consommation. CPGmarket.com permettra d’améliorer l’efficacité
de la chaîne logistique tout en réduisant les coûts d’approvisionnements des entreprises qui
fabriquent, distribuent et vendent des produits. Le site sera opérationnel en juillet 2000 et
d’autres entreprises sont déjà invitées à rejoindre les fondateurs, ce qu’à fait Henkel.
Normalement, ces plates-formes ne doivent pas permettre aux industriels
partenaires de regrouper leurs commandes, comme le ferait une super-centrale d’achat,
respectant ainsi le droit de la concurrence. Elles n’ont pour seul objectif que de simplifier les
procédures de passation de commande. L’acheteur met « en ligne » les spécificités techniques,
le volume et la date de livraison des produits ou composants qu’il recherche ; les fournisseurs
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intéressés transmettent leurs propositions. Ainsi, les acheteurs peuvent sélectionner la
meilleure offre. Le développement de ces plates-formes pose cependant quelques problèmes
aux autorités antitrust américaines et européennes. Ainsi, une enquête vient récemment d’être
ouverte par la Federal Trade Commission sur l’entreprise commune Covisint. La question
majeure que se posent les spécialistes de la FTC et de la Commission européenne, à laquelle il
semble assez difficile de répondre dans la mesure où cette activité est toute récente, est la
suivante : ces plates-formes sont-elles des concentrations ou des coopérations ?:
Dans les deux cas, les risques sont d’une part, de voir naître des abus de position
dominante, liés à une puissance d’achat considérable, et d’autre part, qu’une trop grande
transparence conduise à des collusions tacites ou à des coordinations plus ou moins
explicites des stratégies commerciales et des stratégies de prix. Enfin, ces plates-formes
peuvent constituer des sortes de barrières à l’entrée, lorsque les initiateurs n’acceptent pas
qu’un nouvel entrant les rejoigne.
Conclusion
Aujourd’hui, bien que des comportements collusifs soient toujours à craindre, les
alliances ne sont généralement pas créées pour augmenter les prix et fixer des quotas. En
revanche, elles permettent aux entreprises de réduire leurs coûts d production, de mener à
bien de lourds programmes de recherche, dans un cadre plus souple et plus adaptatif que
celui permis par des opérations de fusion-acquisition. Certes, les alliances stratégiques n’ont
pas que des avantages ; ainsi, la coordination des activités est souvent difficile, notamment
lorsque le nombre de participants est élevé. Les principales difficultés rencontrées par Airbus
Industries furent effectivement (et sont encore) liées à la répartition et à la coordination des
tâches de production et d’assemblage au sein du consortium. Cependant, le développement
rapide des nouvelles technologies de l’information et de la communication, notamment à
travers la création de standards, contribue d’une part à faciliter la coordination des activités et
d’autre part à renforcer le rôle des alliances stratégiques.
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Chapitre 5 : COMPORTEMENTS STRATEGIQUES ET
INFORMATION IMPARFAITE SUR LES
MARCHES
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