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16/10/2022 10:36 Les résidents secondaires, des acteurs essentiels des systèmes touristiques littoraux français ?

Territoire en mouvement
Revue de géographie et
aménagement
Territory in movement Journal of geography and planning

30 | 2016 :
Varia
Articles

Les résidents secondaires, des


acteurs essentiels des systèmes
touristiques littoraux français ?
L’exemple de la Charente-Maritime
Second Homes Owners as Key Stakeholders of Tourism Coastal Systems in France? The Case of the Charente-
Maritime

Caroline Blondy, Luc Vacher et Didier Vye


https://doi.org/10.4000/tem.3344

Résumés
Français English
Les littoraux sont pour la plupart caractérisés par une forte attractivité. Parmi les populations qui
alimentent cette attractivité, les résidents secondaires occupent une place remarquable
notamment par leur nombre, leur rôle dans l’hébergement touristique et leur contribution à
l’économie locale. Ils forment une population à la fois résidente et touriste, expression des
nouveaux modes d’habiter et font l’objet de nombreux débats. Nous posons alors comme
hypothèse que, loin d’être « secondaire », cette catégorie d’acteurs participe pleinement aux
dynamiques des territoires, notamment littoraux et touristiques. Toutefois, les usages, les
représentations et les attentes des résidents secondaires restent encore mal connus,
particulièrement sur le littoral. C’est pourquoi une étude sur les usages des résidences
secondaires en Charente-Maritime, destination majeure du tourisme littoral en France a été
lancée en 2013. Tout d’abord, nous montrerons l’intérêt mais aussi la difficulté d’étudier les
résidents secondaires dans le cadre d’une analyse sur le fonctionnement des territoires
touristiques littoraux. Puis, nous présenterons et détaillerons la méthodologie de l’étude menée
en Charente-Maritime. Enfin, à partir de premiers résultats, nous évaluerons dans quelle mesure
les résidents secondaires sont effectivement des acteurs à part entière des territoires touristiques
littoraux.

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Coastal zones are generally concerned with an important attractiveness. Second homes play a
major part in this coastal pressure, first of all because of their number, but they also represent
numerous touristic accommodations and contribute to the local economy. Second homes owners
are somewhere between inhabitants and tourists, they are an example of new arts of dwelling and
they are also a very controversial issue. We assume that, far from being “secondary”, this
population takes a full part in their territories dynamics, especially in coastal and tourist zones.
Nevertheless, owners’ habits, representations and expectations are not very known, especially in
coastal and tourist zones. That’s why our research group has conducted in 2013 a study about
second homes owners’ habits in Charente-Maritime main destination of coastal tourism in
France. To begin with, we propose to show the interest but also the difficulty to study second
home owners within the framework of tourism coastal territories. Secondly, we detail the survey
protocol we made in the case of Charente-Maritime. Thirdly, we will analyze some of the results
collected in 2013 in order to assess to which extent second home owners really are stakeholders
of tourism coastal territories.

Entrées d’index
Mots-clés : littoral, habiter, tourisme, France, Charente-Maritime, acteur, résidence secondaire
Keywords : tourism, France, coastal zone, dwelling, Charente Maritime, stakeholder, second
home

Texte intégral

Introduction
1 Les espaces littoraux, particulièrement en France, sont marqués par une double
attractivité, touristique et résidentielle (Vye, 2011 ; Sacareau, Vacher, Vye, 2010) et par
une économie présentielle en plein développement (Davezies, 2009). Interroger
l’articulation entre ces espaces littoraux et les systèmes touristiques implique une
attention particulière aux acteurs du tourisme qui comme le définit l’équipe MIT
(Mobilités, Itinéraires, Tourismes) est un « système d’acteurs, de pratiques et de lieux
qui a pour objectif de permettre aux individus de se déplacer pour leur recréation hors
de leur lieu de vie habituel, en allant habiter temporairement d’autres lieux. » (Équipe
MIT, 2002 : 287). Ces acteurs, c’est-à-dire, des individus, des groupes ou des
institutions dotés d’une « personnalité et d’une ou plusieurs compétences
territoriales » (Gumuchian et al., 2003 : 33), d’une « intentionnalité et d’une capacité
stratégique autonome » (Lussault, 2003 : 39) sont multiples et s’inscrivent dans des
échelles et des interactions mettant en œuvre des jeux de pouvoirs.
2 La catégorisation de ces acteurs varie en fonction des problématiques envisagées, des
types de territoires à étudier et des interactions à privilégier dans l’analyse. Dans le cas
d’un espace abordé sous l’angle de l’attractivité touristique, on peut distinguer deux
grands types d’acteurs (Blondy, 2010) : les acteurs utilisateurs du lieu touristique qu’ils
agissent à titre individuel (le campeur et sa famille) ou collectif (une association de
plaisanciers) ; les acteurs organisationnels réunissant les acteurs professionnels vivant
directement ou indirectement du tourisme et les acteurs institutionnels comme les
acteurs publics en charge des politiques d’aménagement et de développement. Les
touristes sont les plus emblématiques des acteurs utilisateurs mais d’autres, tels que les
excursionnistes, les résidents secondaires ou les résidents permanents sont parfois très
présents dans les lieux de pratiques de tourisme et de loisir du littoral, y compris en
pleine saison estivale (Blondy et al., 2013). De plus, l’opposition classique entre
« touristes » et non « touristes » n’est pas forcément pertinente au regard des
interactions pouvant exister comme le prouve la part importante de touristes hébergés
durant leur séjour chez des parents ou amis résidents principaux et secondaires.
L’approche par le statut « résidentiel », c’est-à-dire une analyse des acteurs selon leur
rapport au logement, à l’hébergement dans le lieu (Vacher, Vye, 2012) est donc
particulièrement intéressante pour appréhender la place des acteurs utilisateurs dans le
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système touristique. Il permet notamment de traiter des modes d’habiter, c’est-à-dire,


le rapport à l’espace exprimé par les pratiques des individus (Stock, 2004). Le statut
résidentiel permet également de nous interroger sur le degré d’autonomie dans le choix
des lieux touristiques, sur la fidélisation des individus à ceux-ci, et donc sur
l’attractivité des territoires touristiques.
3 Parmi ces acteurs utilisateurs du territoire touristique, les résidents secondaires
tiennent une place particulière. S’ils participent pleinement à l’attractivité résidentielle
et touristique des systèmes littoraux (plus d’un million de résidences secondaires sur le
littoral français1), ils sont aussi l’objet de nombreux débats et controverses. Souvent
associée à une image péjorative de « volets fermés » ou de « lits froids », coupable de
concurrencer de manière déloyale l’hébergement commercial, c’est une population à la
fois résidente et touriste, expression des modes d’habiter de nos sociétés
contemporaines à individus mobiles (Stock, 2006). Par son statut de propriétaire, le
résident secondaire « habite, réside, est ancré dans un lieu » (Dubost, 1998 : 12) mais
c’est aussi un « passant qui reste et un habitant qui passe » (Urbain, 2002 : 516)
définie par sa mobilité spatiale entre l’ici et l’ailleurs.
4 Toutefois, est-il moins ancré dans le lieu qu’un résident principal alors qu’il est par
définition propriétaire, ce qui est loin d’être le cas de tous les résidents à l’année ? Cet
ancrage particulier se traduit-il par un investissement spécifique dans la commune de
résidence secondaire ? À quelle échelle cet investissement se manifeste-t-il ? Est-il
confiné à l’échelle de sa propriété selon une logique d’entre-soi, ou à la commune
touristique tout entière, notamment par la participation à la vie publique et
associative ? Le résident secondaire, en hébergeant son entourage, ne joue-t-il pas
également un rôle dans l’attractivité et la valorisation de la destination touristique ?
Nous posons donc comme hypothèse que, loin d’être « secondaire », cette catégorie
d’acteurs participe pleinement aux dynamiques des territoires littoraux et touristiques.
5 Néanmoins, cette catégorie d’acteurs reste mal connue, notamment en raison de la
difficulté de collecter des données sur les usages, les perceptions et les attentes de cette
population mobile. Partageant le constat d’un décalage entre cette méconnaissance et
l’ampleur du phénomène en Charente-Maritime, un des principaux départements
touristiques de France, un laboratoire de recherche (UMR Littoral, Environnement,
Sociétés - LIENSs – CNRS/Université de La Rochelle), un acteur du développement
touristique (Charente-Maritime Tourisme) et les deux Chambres de Commerce et
d’Industrie du département se sont associés pour lancer en 2012 une étude de grande
envergure. Les analyses présentées ici s’appuient en partie sur les résultats de cette
enquête2. Tout d’abord, nous montrerons l’intérêt mais aussi la difficulté d’étudier les
résidents secondaires dans le cadre d’une analyse sur le fonctionnement des territoires
touristiques littoraux. Puis, nous présenterons et détaillerons la méthodologie déployée
dans le cadre de l’étude menée en Charente-Maritime. Enfin, à partir de premiers
résultats nous verrons dans quelle mesure les résidents secondaires sont des acteurs
réellement « investis » au sein des territoires touristiques littoraux.

1. L’intérêt d’étudier les résidents


secondaires pour comprendre les
systèmes touristiques littoraux
6 L’importance quantitative des résidences secondaires (RS) sur le littoral français est
évidente. Cependant, il existe un décalage entre l’ampleur de ce phénomène au sein des
territoires touristiques littoraux et la difficulté à cerner les usages de ce bien, en
particulier par des propriétaires à la fois résidents et touristes et faisant l’objet de
nombreuses controverses.

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1.1. L’importance quantitative des résidences


secondaires dans les territoires touristiques
littoraux français
7 Appréhender l’importance du phénomène des résidences secondaires nécessite tout
d’abord de s’interroger sur les statistiques à notre disposition et donc sur la définition
même de la résidence secondaire. La première difficulté est qu’en France, la résidence
secondaire n’a ni de véritable définition légale, ni de statut juridique précis alors même
qu’elle recouvre une grande diversité d’usages et de types de logement, du pied-à-terre
à la luxueuse propriété en bord de mer. Toutefois, à la différence de certaines
définitions étrangères (Duchêne-Lacroix, 2013) qui incluent également des
hébergements semi-mobiles (tentes, caravanes et mobiles homes) ou mobiles (bateaux
de plaisance ou camping-cars), la résidence secondaire à la française reste un logement
fixe, défini statistiquement par l’INSEE et fiscalement par la DGFIP. Toutefois, ces deux
définitions ne se recoupent pas. Selon l’INSEE, la résidence secondaire est « un
logement utilisé pour les week-ends, les loisirs et les vacances. Les logements meublés
loués (ou à louer) pour des séjours touristiques sont également classés en résidence
secondaire »3. De plus l’INSEE opère une distinction entre « résidences secondaires »
(utilisées à des fins touristiques) et « logements occasionnels » (utilisés dans le cadre
d’une activité professionnelle). Au sens des services fiscaux, il s’agit d’un « local
meublé, affecté à l’habitation et non occupé en permanence » et soumis à la taxe
d’habitation. Ainsi, la définition INSEE inclut les meublés de tourisme c’est-à-dire les
villas et appartements proposés à la location de vacances, mais aussi les logements en
résidence de tourisme. Or, ces derniers sont exclus de la définition fiscale car ils ne sont
pas soumis à la taxe d’habitation (Atout France, 2010). Ainsi, si la définition fiscale ne
fait pas référence à la dimension touristique des usages de la résidence secondaire, elle
permet toutefois de comptabiliser les résidences occupées effectivement par le
propriétaire à la différence de la définition INSEE.
8 Ces deux définitions alimentent deux sources d’information distinctes aux rythmes
d’actualisation différents : le Recensement de la population pour la définition INSEE,
fichier réactualisé tous les ans mais non exhaustif et le FIchier des LOgements à la
COMmune (FILOCOM), pour la définition fiscale, réactualisé tous les deux ans mais a
priori plus exhaustif car construit à partir du fichier de la taxe d’habitation.
9 C’est pour toutes ces raisons que ces deux sources donnent des résultats différents.
Particulièrement dans les territoires les plus touristiques, le nombre de résidences
secondaires selon le Recensement est largement supérieur à celui calculé selon le fichier
FILOCOM. Ainsi, pour l’Île de Ré, le nombre de résidences secondaires comptabilisées
par l’INSEE équivaut à 13 536 logements en 2008 alors que selon la définition fiscale
FILOCOM (2007), il n’y aurait « que » 10 103 résidences secondaires sur l’Île de Ré soit
25 % de moins !
10 Ces précautions méthodologiques rappelées, l’INSEE estime à environ 3 millions le
nombre de résidences secondaires ou de logements occasionnels en France en 2011,
chiffre relativement stable depuis le début des années 2000 auquel il faudrait
théoriquement retrancher environ 5 % (150 000 unités d’habitations) de logements
classés en résidence de tourisme (Atout France, 2010 : 27). Les résidences secondaires
sont très inégalement réparties sur le territoire, avec une localisation préférentielle au
sein des espaces touristiques et plus particulièrement sur le littoral. Ce dernier
regroupe en effet environ le tiers des résidences secondaires (Atout France, 2010 : 21),
soit plus d’un million de logements. Sur les 15 départements concentrant plus de la
moitié du parc de RS, seuls trois départements n’ont pas de façade maritime ; les deux
Savoie et Paris intramuros (carte 1).

Carte 1 : Répartition et évolution du nombre de résidences secondaires en France entre


1990 et 2008

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Source : INSEE – Recensements de population. Conception : Blondy, Vye, Vacher. Réalisation P. Brunello,
2014.

11 De plus, ce sont trois départements du littoral atlantique qui ont connu la plus forte
augmentation du nombre de résidences secondaires depuis 1990 : Morbihan (+37,8 %),
Vendée (+43 %) et surtout Charente-Maritime (+57 %). L’augmentation du parc de
résidences secondaires s’inscrit d’ailleurs dans une dynamique d’attractivité
résidentielle de l’ensemble de la façade atlantique devenue plus attractive que la façade
méditerranéenne depuis les années 1990 tant pour les résidents secondaires que pour
les résidents permanents (Vye, 2011).
12 De plus, si la croissance est mieux répartie entre littoral et arrière-pays sur la façade
méditerranéenne, la littoralisation de ce processus est très nette dans l’Ouest français
(carte 2) : ainsi sur les 700 000 résidences secondaires que comptent le Grand Ouest
(Bretagne, Pays-de-la-Loire, Poitou-Charentes, Basse-Normandie), 500 000 sont
situées dans des intercommunalités littorales (Vye, 2014) dont elles constituent souvent
une part non négligeable des logements.

Carte 2 : Des résidences secondaires particulièrement nombreuses sur le littoral du Grand


Ouest

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Source : INSEE -Recensement de population. Conception : Blondy, Vacher, Vye. Réalisation : P. Brunello,
2014.

13 En effet, si, à peine 10 % des logements en France sont des résidences secondaires
(INSEE 2011), cette proportion atteint 25 % sur l’ensemble des communes du littoral
français (Atout France, 2010) et dépasse parfois les 50 % dans certaines îles
touristiques (carte 2). De plus, avec 72 % des lits touristiques en France, les résidences
secondaires contribuent pour une large part à la capacité d’hébergement touristique de
la première destination mondiale. Enfin, les résidences secondaires constituent une
source de revenus directs pour les collectivités locales littorales : elles sont
comptabilisées dans le calcul de la Dotation Globale de Fonctionnement (DGF) versée
par l’État à hauteur d’un habitant fictif par résidence secondaire et leur propriétaire
s’acquitte évidemment des impôts locaux tels que la taxe d’habitation, la taxe foncière
ou la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

1.2. Les résidents secondaires : des


multirésidents difficiles à cerner et faisant l’objet
de controverses
14 Les résidents secondaires appartiennent à une catégorie de plus en plus
incontournable dans l’analyse des modes d’habiter : les multirésidents (McIntyre et al.,
2006). Ce qualificatif possède l’avantage de ne pas induire de hiérarchisation a priori
entre les deux lieux de résidence au contraire de l’expression « résident secondaire ». Si
l’on en croit la typologie réalisée par Markus Hesse et Joachim Scheiner (Hesse,

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Scheiner, 2007, cité par Duchêne-Lacroix, 2013 : 156), les résidents secondaires se
distinguent des autres multirésidents par le fait que la multirésidentialité est
essentiellement liée au temps libre et aux loisirs alors qu’elle est surtout liée au travail
(les « navetteurs hebdomadaires ») ou à la famille (« couples non-cohabitants » ou
LATs « Living Apart Together ») pour les autres types.
15 Il s’agit d’une catégorie d’acteurs à la fois inscrite dans la sphère résidentielle par leur
statut de propriétaire et dans la sphère touristique parce que les résidents secondaires
utilisent leur bien immobilier pour des pratiques de tourisme et de loisirs (Sacareau et
al., 2013). De ce fait, ils intéressent tout autant les chercheurs spécialistes du tourisme
que les spécialistes de planification urbaine et régionale, de géographie rurale ou de
géographie des populations (Müller, Hoogendoorn, 2013).
16 Son statut de multirésident fait que le résident secondaire s’inscrit dans des modes
d’habiter complexes marqués par des relations plus ou moins intenses entre plusieurs
lieux de vie et notamment entre la résidence principale et la résidence secondaire.
L’articulation entre ces lieux de résidence est liée aux différentes fonctions que le
résident secondaire attribue à ceux-ci, ce qu’Hilti appelle des « configurations
multirésidentielles idéaltypiques » dont certaines peuvent concerner les résidences
secondaires (Hilti, 2012 cité par Duchêne-Lacroix, 2013). Les fonctions attribuées à ces
différents lieux de vie font que le résident secondaire est caractérisé par un mode
d’habiter particulier, tantôt qualifié dans la littérature de « multilocal4 » (Duchêne-
Lacroix et al., 2013) ou de « poly-topique » (Stock, 2006). L’inscription dans le
territoire touristique littoral du résident secondaire est donc à analyser au regard de ce
mode d’habiter oscillant entre l’ici et l’ailleurs, entre l’ancrage spatial et la discontinuité
temporelle : le résident secondaire est en effet un propriétaire d’un logement où il ne
réside pas toute l’année.
17 Or, ce mode d’habiter spécifique est générateur de controverses sur le rôle joué par le
résident secondaire au sein du territoire dans lequel il possède son bien. Le titre du
premier véritable ouvrage scientifique de référence sur ce sujet résume bien ce débat :
les résidences secondaires sont-elles une « bénédiction ou une malédiction » ?
(Coppock, 1977). Paru à la fin des années 1970 dans un contexte de développement
important de ce phénomène dans les pays développés, cet ouvrage pose la question
toujours d’actualité des impacts socio-spatiaux et environnementaux des résidences
secondaires sur les territoires touristiques. Toujours à la fin des années 1970, des
travaux similaires sur les espaces ruraux français portent sur ce phénomène un
jugement très négatif (Dubost, 1998). L’augmentation du nombre de résidences
secondaires serait ainsi un changement non souhaité (Müller, Hoogendoorn, 2013)
responsable de plusieurs effets pervers allant de la flambée des prix de l’immobilier
entraînant le départ des populations permanentes et un processus de gentrification
(Paris, 2009) aux tensions avec les populations « locales » (Brida et al., 2011), pouvant
dans certains cas se traduire par des « émeutes anti-résidences secondaires » comme
celles qui embrasèrent la campagne galloise au début des années 1970 (Gallent et al.,
2005). Ces tensions avec les populations locales seraient également nourries par deux
visions opposées du développement territorial, l’une propre aux habitants permanents
plus favorables au développement économique, l’autre propre aux résidents
secondaires, plus favorables à un statu quo et privilégiant la préservation d’un
environnement idéalisé (Overvåg, Berg, 2011).
18 Cette stigmatisation est parfois alimentée par l’idée que la résidence secondaire est
un signe distinctif des élites, notamment de la haute bourgeoisie (Pinçon, Pinçon-
Charlot, 1989). Les propriétaires de résidence secondaire feraient alors partie d’une
classe privilégiée socialement et économiquement, par nature auto-centrée. Enfin, le
résident secondaire est accusé d’être un « intermittent territorial ». En effet, en France,
la fréquentation moyenne d’une résidence secondaire a été estimée à 42 jours par an
dont 30 jours par le propriétaire et 12 jours par son entourage (Atout France, 2010). Le
taux d’occupation (12 %) est ainsi beaucoup moins élevé que pour d’autres formes
d’hébergement touristique comme les hôtels (61 %) ou les campings classés (33 %) d’où

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l’expression de « lits froids » illustrant la perception chez certains acteurs locaux d’un
manque à gagner pour le territoire touristique.
19 Nomades résidentiels, intermittents territoriaux, tout en faisant a priori partie d’une
élite sociale, les résidents secondaires sortent des représentations et des cadres
habituels de gestion des territoires de nos sociétés sédentaires qui, d’une part proposent
des découpages administratifs (commune, intercommunalité, collectivité territoriale,
Union Européenne) de moins en moins compatibles avec nos modes de vie poly-
topiques (Stock, 2006) et, d’autre part, assignent administrativement chaque habitant à
un domicile unique. En ce sens, le résident secondaire dérangerait.
20 Néanmoins, une vision revisitée et plus nuancée de la relation entre le propriétaire de
résidence secondaire et son territoire d’accueil apparait désormais dans la littérature
(Müller, Hoogendoorn, 2013). En effet, la fréquentation du territoire touristique par le
résident secondaire est « toujours temporaire mais sans cesse recommencée » (Urbain,
2002 : 515), ce qui permet d’insister sur la fidélisation progressive de celui-ci vis-à-vis
de son lieu de villégiature et donc de s’interroger sur la profondeur de son ancrage
territorial qui ne peut pas simplement se mesurer en nombre de jours de présence.
Ainsi, la résidence secondaire n’est pas qu’un signe extérieur de richesse, il peut aussi
être un « refuge des générations » (Dubost, 1998), un lieu de retrouvailles familiales
qui peut créer un lien particulier avec le territoire d’accueil parfois plus fort que celui
créé avec son lieu de vie à l’année.
21 Par ailleurs, les différentiels de représentations en matière de développement
territorial entre « populations locales » et « résidents secondaires » sont à nuancer,
l’une comme l’autre de ces catégories étant affectées par le syndrome NIMBY (Farstad,
Rye, 2013). De plus, bien que les propriétaires de résidence secondaire possèdent un
patrimoine et un niveau de revenus supérieur à la moyenne nationale (Atout France,
2010), cette catégorie est loin d’être homogène socialement : l’acquisition s’est
progressivement popularisée, notamment dans les campagnes françaises (Boyer, 2007).
22 Enfin, notamment en France, la majorité des études analysant l’inscription dans le
lieu du résident secondaire concerne les espaces ruraux (entre autres : Perrot, De la
Soudière, 1998 ; Urbain, 2002) dont l’attractivité résidentielle et touristique est moins
marquée que sur les côtes. De ce fait, même si certains enjeux sont communs
(préservation des aménités environnementales, NIMBY, entre-soi), le processus de
gentrification du littoral est autant lié à l’augmentation de résidents permanents
(Marjavaara, 2007) qu’à l’arrivée des résidents secondaires. De plus, en milieu littoral,
beaucoup de résidents secondaires sont eux-mêmes de futurs résidents permanents
(Duhamel, 2000) notamment à l’âge de la retraite (Cribier, 1994). Enfin, concernant les
retombées économiques, les résidents secondaires sont considérés comme des
populations contribuant de manière notable à l’économie présentielle des territoires
(Davezies, 2009).
23 Objet de controverses, la relation entre le résident secondaire et son territoire
d’accueil reste complexe, en particulier au sein des espaces littoraux et ce, d’autant plus
qu’il est un acteur dont les usages, les attentes et les représentations sont encore assez
largement méconnus. C’est tout l’enjeu de l’étude lancée en Charente-Maritime en
2012.

2. L’étude sur les usages des résidences


secondaires en Charente-Maritime :
quand la parole est donnée aux
propriétaires
24 Malgré un net regain d’intérêt depuis la fin des années 1990 en particulier dans la
littérature anglophone (McIntyre et al., 2006), la relation entre le propriétaire de

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résidence secondaire et son territoire d’accueil reste mal cernée (Duchêne-Lacroix,


2013). C’est particulièrement vrai pour la relation à l’environnement, étrangement peu
étudiée (Müller, Hoogendoorn, 2013). De plus, peu d’études traitent spécifiquement des
territoires touristiques littoraux. Les rares études francophones ont surtout été
conduites dans un contexte de mobilités touristiques internationales (Duhamel, 2000)
ou sur une catégorie de population en particulier comme les retraités (Cribier, 1994).
Les quelques études récentes sur le littoral français focalisent plutôt sur le bien
immobilier (Aguer, Vergeau, 2009) ou sur l’analyse des disparités régionales de ce
phénomène (Zaninetti in Roca, 2013). Il en est de même pour la littérature grise dont
l’approche reste plutôt quantitative (Atout France, 2010). Certes, quelques enquêtes
traitant de la multirésidentialité, sont en cours comme l’enquête Famille et Logement
menée par l’INSEE et l’INED en 2011 mais elles ne sont centrées ni sur les résidents
secondaires ni sur les espaces littoraux. Or, seules des enquêtes auprès des
propriétaires peuvent proposer une lecture fine et nuancée de leurs usages et de leurs
représentations. Cependant, ces enquêtes ou entretiens sont parfois difficiles à réaliser
du fait des particularités de cette population, présente de manière intermittente sur le
territoire, ce qui limite souvent la taille de l’échantillon (Brida et al., 2011). L’étude
lancée en Charente-Maritime en 2012/2013 a tenté de relever le défi.

2.1. Contexte de l’étude : un partenariat entre


universitaires, institutionnels et collectivités
territoriales
25 Cette étude s’appuie sur des travaux antérieurs réalisés à l’échelle du département.
En 2008, une exploitation des données FILOCOM a ainsi été initiée par Charente-
Maritime Tourisme (CMT) en partenariat avec l’INSEE et la Région Poitou-Charentes.
Elle a abouti à la publication en 2009 de fiches présentant la situation des résidences
secondaires dans le département et dans la région. Cette étude a essentiellement porté
sur la résidence secondaire en tant que bien immobilier et sur ses caractéristiques
(localisation, nombre, évolution, profil des résidents secondaires). Elle montre que le
parc de résidences secondaires dans le département a connu un développement
supérieur à la moyenne nationale soulignant ainsi l’attractivité de certains territoires
comme le Royannais où la part des résidences secondaires dans l’habitat total est égal à
40 %, ou l’île de Ré ou d’Oléron où elle dépasse les 50 % (FILOCOM). Cette progression
est toujours visible entre 2007 et 2013. En effet, on passe de 73 000 résidences
secondaires dans le département en 2007 à 79 405 résidences secondaires en 2013 soit
19 % de l’habitat total (FILOCOM).
Carte 3 : Les résidences secondaires dans les EPCI de Charente-Maritime en 2013

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Conception : Blondy, Vacher, Vye.


Réalisation : P.Brunello, 2015UMR 7266 LIENSs CNRS - Université de La Rochelle.
Sources : Filocom, 2013.

26 Cette étude préalable justifiait donc le choix de notre terrain. En revanche, si ces
travaux soulignaient l’importance des résidences secondaires dans l’offre
d’hébergement touristique, elle ne permettait pas de mettre en évidence le poids de
cette pratique dans le système touristique local. En effet, elle ne détaillait pas le profil
des propriétaires et les usages qu’ils font de leur bien (fréquentation, prêt, location,
pratiques touristiques, etc.).
27 L’étude est donc née d’une convergence d’intérêts entre acteurs institutionnels,
collectivités territoriales et chercheurs de l’UMR LIENSs (CNRS/Université de La
Rochelle). Connaître les usages des résidences secondaires permet de comprendre les
systèmes touristiques, en particulier leur attractivité et les jeux d’acteurs qui les
animent, d’évaluer le rôle des résidents secondaires dans l’économie présentielle et
d’ajuster au mieux les politiques ou actions de développement territorial et ainsi mieux
répondre aux attentes de cette population notamment en termes de services, d’activités,
etc. En 2012, l’UMR LIENSs s’est donc associée avec Charente-Maritime Tourisme
(CMT), la Chambre de Commerce et d’Industrie de La Rochelle (CCILR) et celle de
Rochefort-Saintonge (CCIRS) pour mener une réflexion focalisant sur les propriétaires
des résidences secondaires et les usages de leur bien dans dix communes tests avant un
déploiement de l’étude à l’échelle départementale en 20145. L’originalité de notre
démarche a été de remettre au centre de l’analyse l’acteur résident secondaire.

2.2. Donner la parole aux résidents secondaires :


un défi méthodologique à relever
28 Le choix d’interroger les propriétaires a l’avantage de s’adresser à la personne qui a
théoriquement la meilleure connaissance de l’usage de son bien par lui-même mais
aussi par les autres usagers (prêt ou location). Néanmoins, cela pose une véritable
difficulté méthodologique. Comment contacter cette population flottante entre deux
lieux et assurer un taux de retour intéressant ? Est-elle plus facilement saisissable sur
son lieu de résidence principale ou plus disponible sur son lieu de résidence
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secondaire ? Le choix de la résidence principale paraissait plus pertinent dans la


mesure où l’étude d’Atout France annonçait 30 nuits en moyenne d’occupation par le
propriétaire.
29 L’étude a focalisé pour des raisons pratiques sur les propriétaires dont la résidence
principale est située en France. Ceux vivant à l’étranger sont cependant minoritaires :
en 2007, 95 % du parc de résidences secondaires en Charente-Maritime appartient à
des propriétaires résidant en France (Observatoire des clientèles CMT, 2008).
30 Pour accéder à l’adresse de résidence principale des propriétaires, deux méthodes ont
été utilisées en fonction des données disponibles selon les communes. La première a été
de constituer un fichier « adresses » en croisant les fichiers du cadastre numérique
MAJIC III avec celui de la taxe d’habitation. Ce croisement nécessite de nettoyer la base
de données car un propriétaire peut y figurer plusieurs fois quand il possède plusieurs
résidences secondaires. De même une résidence secondaire peut être mentionnée
plusieurs fois quand elle compte des propriétaires multiples. La seconde méthode a été
d’utiliser le fichier de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères. Il répertorie toutes
les résidences secondaires pour lesquelles un seul propriétaire est identifié. La
représentativité de l’échantillon a été établie en partenariat avec la DREAL Poitou-
Charentes selon deux critères : la région de résidence principale (découpage
administratif de 2015) et le territoire de localisation de la résidence secondaire en
Charente-Maritime.
31 À l’issue de cette enquête menée par courrier, une enquête téléphonique a été
organisée à raison d’un entretien d’une dizaine de minutes confié à un prestataire. À la
fin du questionnaire envoyé au domicile des propriétaires résidents secondaires par
courrier, nous avons proposé aux répondants de donner leurs coordonnées
téléphoniques s’ils souhaitaient poursuivre l’échange, en abordant des questions plus
sensibles ou plus complexes nécessitant l’accompagnement d’un enquêteur pour
répondre (perception des risques liés à la mer, dépenses effectuées etc.).
32 Parallèlement, des focus groups ont été organisés à Châtelaillon-Plage, station
balnéaire de l’agglomération de La Rochelle. Deux groupes d’une dizaine de résidents
secondaires ont été réunis en juillet 2013 pendant plus de deux heures pour les laisser
s’exprimer.
33 Nous avons donc conjugué démarche quantitative et qualitative pour mieux cerner
les profils, les usages et les représentations. Néanmoins, il faut également s’interroger
sur le système touristique littoral et délimiter des terrains d’enquête.

2.3. La réussite de l’étude : des propriétaires de


résidences secondaires heureux d’avoir la
parole ?
34 L’envoi des questionnaires a été réalisé sur dix communes-tests choisies pour leur
représentativité des différents contextes territoriaux du littoral charentais : littoral
continental ou insulaire, stations touristiques intégrées ou pas dans une agglomération
(carte 3).
35 Donner la parole aux propriétaires a été une réussite : les résidents secondaires ont
montré une volonté de s’exprimer à travers un taux de retour important (34 %) mais
aussi à travers l’ajout de verbatim voire de courriers accompagnant le questionnaire
lors de son retour. Sur les 12 919 questionnaires envoyés, ce sont 4 662 questionnaires
qui ont été recueillis dont 4 648 étaient exploitables et ont été traités. 1 487 enquêtés
ont souhaité être contactés par téléphone pour poursuivre l’échange. Plus de 700
d’entre eux ont ainsi pu être contactés et ont continué à s’exprimer. Les focus groups
ont également connu un réel succès. Force est de remarquer que les résidents
secondaires ont été réactifs face à cette étude. Cette population dont on dit qu’elle brille
plus par son absence que par sa présence dans les territoires semble démentir ces
stéréotypes. Faut-il en conclure qu’ils ne sont pas des acteurs si « secondaires », et

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qu’ils se sentent investis dans le lieu où se situe leur bien ? Nous allons essayer de
porter des éléments de réponse à cette question.

3. Entre ancrage local et valorisation de


la destination : les résidents
secondaires, des acteurs « investis » au
6
sein du territoire touristique littoral ?
36 Afin de vérifier que les résidents secondaires sont des acteurs à part entière du
fonctionnement du territoire touristique littoral, il s’agira de s’interroger sur leurs
différentes formes d’investissement au sein de celui-ci. La notion d’investissement qui,
au sens large, désigne « tout ce qui est dépensé en vue d’un profit » (Brunet et al.,
1992 : 283) est d’abord économique : le fait d’acquérir un bien immobilier est
évidemment le premier investissement qu’il effectue au sein du territoire touristique
même s’il investit pour lui-même (et sa famille) plus que pour le territoire en question.
Une fois acquis, il va entretenir sa propriété, s’y rendre régulièrement, consommer des
biens et des services alimentant alors l’économie présentielle du territoire touristique.
Cette dimension économique ne sera pas étudiée ici. Nous avons en effet fait le choix
d’insister sur l’investissement affectif du résident secondaire, ce qui passera par
l’analyse du lien sensible que celui-ci entretient avec le lieu touristique.
L’investissement peut également être social : il s’agira alors d’analyser les différentes
formes de participation des résidents secondaires à la vie locale notamment à travers la
question de leur implication dans le monde associatif. Nous faisons donc l’hypothèse
que ces différentes formes d’investissement façonnent différents modes d’habiter
contribuant à alimenter l’attractivité du territoire touristique, d’une part en renforçant
l’ancrage du résident secondaire dans le lieu et d’autre part en participant à la
valorisation de la destination.

3.1. Le lien affectif entre le résident secondaire et


le lieu touristique
37 La notion d’ancrage exprime à la fois la sédentarisation, mais aussi la mobilité, le
déplacement, à l’image du navigateur qui jette l’ancre entre deux escales avant de
poursuivre son voyage. C’est une notion moins rigide que celle d’enracinement et mieux
appropriée au résident secondaire qui, en tant que multirésident, « navigue » entre
plusieurs lieux de vie. Or, plutôt que d’affirmer que le résident secondaire est partout et
nulle part, et donc a priori peu investi dans son lieu de villégiature, il est possible dans
la lignée d’auteurs comme M. Stock (2006) ou de C. Duchêne-Lacroix (2013) de
formuler l’hypothèse inverse : c’est son mode d’habiter poly-topique qui nourrit son
ancrage. « Si l’homme moderne est tellement mobile, c’est qu’il s’emploie à atteindre
des lieux fonctionnellement ou/et identitairement importants et à établir et consolider
des ancrages géographiquement éclatés ; son expérience et son appréciation des lieux
sont nourris par sa multilocalité » (Duchêne-Lacroix, 2013 : 153).
38 Être ancré dans un lieu signifie d’abord une forme d’attachement à celui-ci, une
topophilie (Tuan, 1961), c’est-à-dire le lien affectif qui existe entre un individu et un
lieu. C’est un lieu dans lequel l’individu se sent bien, une sorte de « chez-soi » où il a
envie de revenir, où il a ses habitudes, où il s’investit émotionnellement. C’est pour lui
un lieu signifiant qui façonne son identité individuelle. Toutefois, comment mesurer
l’attachement au lieu d’un individu tel que le résident secondaire ? Il convient d’emblée
de rappeler une évidence : le lieu de la résidence secondaire est un lieu associé aux
vacances, aux loisirs. Ainsi, avant d’être propriétaire, le résident secondaire a très

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souvent été touriste dans le lieu. Dans huit communes sur dix de notre étude, c’est le
premier motif cité concernant leur connaissance du lieu au moment de l’acquisition de
leur bien. Ce chiffre, systématiquement supérieur à 40 % est particulièrement élevé
dans les communes très touristiques du Royannais (Saint-Palais-sur-Mer et Saint-
Georges-de-Didonne). De ce fait, l’expérience touristique préalable a pu être un
déterminant fort dans l’acquisition de leur deuxième résidence. Aujourd’hui encore,
dans chacune de nos communes enquêtées, plus de 88 % des personnes interrogées
considèrent leur résidence secondaire comme un lieu de détente. De plus, comme tout
lieu touristique, c’est un lieu de rupture avec les contraintes du quotidien, un lieu de
« recréation » individuelle ou collective (Équipe MIT, 2002). Le discours sur la rupture
avec le cadre de vie de la résidence principale est en effet très présent dans les focus
groups organisés : la venue en résidence secondaire permet de « changer d’air, de
rythme de vie, d’aller faire le marché à pied, tranquillement, revenir le long de la
mer »7.
39 C’est également, pour une très large majorité des propriétaires (entre 61 % et 84 %
selon les communes), un lieu de retrouvailles, notamment familiales. Dans un contexte
d’éclatement géographique croissant des familles, la résidence secondaire apparait ainsi
comme le « centre de la vie familiale, permettant de resserrer les liens familiaux, mais
aussi comme le marqueur de l’identité familiale et de son histoire » (Clément, Lelièvre,
2005 : 95), d’où le qualificatif de « maison de famille » qu’on lui attribue souvent. De
surcroît, de nombreux propriétaires possèdent des attaches familiales. Quelle que soit
la commune testée, au moins un résident secondaire sur cinq se déclare enfant ou petit-
enfant de résident (secondaire ou permanent). C’est, en règle générale, le second motif
concernant la connaissance préalable du lieu après l’expérience touristique. Cet
attachement par filiation est également renforcé par le fait d’hériter de sa résidence
secondaire. Bien que le mode d’acquisition le plus fréquent soit l’achat d’un bien déjà
construit (plus de la moitié des répondants quelle que soit la commune), l’acquisition
par héritage n’est toutefois pas négligeable, concernant un propriétaire sur quatre
environ8 dans trois communes de notre échantillon (Ars-en Ré, Châtelaillon et Fouras).
40 De plus, les propriétaires, majoritairement âgés (environ la moitié d’entre eux ont
entre 60 et 74 ans) accueillent régulièrement enfants et petits-enfants. La topophilie
peut ainsi se transmettre de génération en génération, ce que certaines pratiques très
symboliques viennent confirmer : les enfants décident parfois de choisir la commune de
résidence secondaire de leurs parents pour se marier, c’est le cas d’au moins 3 ménages
participant aux focus groups de Châtelaillon-Plage. Cette pratique peut représenter un
marqueur fort d’ancrage dans le lieu. De plus, dans une station perçue comme familiale,
ce sont souvent, au dire des propriétaires participant aux focus groups, les enfants ou
les petits-enfants qui justifient la présence de la résidence secondaire ou le maintien de
celle-ci dans le giron familial.
41 Un autre critère peut permettre de mesurer l’ancrage dans le lieu : les rythmes et les
temporalités de la fréquentation. Si le temps de présence à l’échelle d’une année est par
définition discontinu, il n’est toutefois pas satisfaisant pour mesurer l’ancrage dans le
lieu. C’est surtout le fait d’y revenir depuis plusieurs années qui peut montrer un signe
d’attachement fort. Notre enquête posait la question de l’année d’acquisition de la
résidence, critère nécessaire bien que non suffisant pour mesurer l’ancienneté de la
présence dans le lieu, en particulier pour les propriétaires, descendants de résidents
secondaires ou permanents qui peuvent fréquenter le lieu depuis bien plus longtemps.
Cependant, les résidents secondaires enquêtés ont tendance à être plus anciennement
propriétaires que la moyenne nationale. En effet, l’enquête Atout France réalisé en 2010
annonce une ancienneté moyenne de 15 ans. Or, ce chiffre est dépassé dans huit
communes sur dix de notre échantillon allant jusqu’à 19 ans d’ancienneté moyenne
pour Ars-en-Ré et 23 ans pour l’île d’Aix. Mais cette moyenne cache une opposition
entre deux grandes catégories de résidents secondaires. D’une part, les « nouveaux
propriétaires », c’est-à-dire les résidents secondaires ayant acquis leur bien depuis 2001
soit une dizaine d’années environ. Ils illustrent la dynamique récente de l’attractivité
résidentielle de la façade atlantique en général et du département de Charente-
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Maritime en particulier et sont logiquement la catégorie la plus représentée dans neuf


de nos dix communes-tests allant même jusqu’à constituer la moitié des propriétaires
interrogés dans trois communes : Châtelaillon-Plage, La Tremblade et Saint-Denis
d’Oléron. Cette catégorie majoritaire ne doit pas masquer la présence de la catégorie
des « enracinés », qui possèdent leur résidence secondaire depuis au moins une
génération (avant 1991 soit 22 ans minimum). Ces derniers représentent jusqu’à un
tiers des résidents secondaires à Ars-en-Ré (34 %), Fouras (30 %) ou Saint-Georges-De-
Didonne (32 %).

3.2. La participation à la vie locale


42 Faire l’hypothèse que l’investissement dans la vie locale des résidents secondaires
n’est pas négligeable implique certaines précautions. En effet, la collecte d’informations
par l’enquête sur une telle question peut être suspectée de ne pas être complètement
représentative, les personnes faisant la démarche de renvoyer un questionnaire dans le
cadre d’une enquête pouvant être plus investies dans l’action collective que la moyenne
de la population. Cependant, le taux de retour élevé de l’enquête plaide pour une
mobilisation d’ensemble révélant un désir d’être entendu.
43 L’adhésion et la participation à la vie d’une association est un bon indicateur de
l’investissement local des résidents secondaires. Ce niveau d’investissement est tout à
fait intéressant avec un résident secondaire sur quatre participant à une association
dans sa commune de résidence secondaire dans la majorité des communes enquêtées. Il
a été démontré que la propension à être membre d’une association augmente très
sensiblement avec l’âge et le niveau de formation (Prouteau, Wolff, 2013). Or, dans le
cadre de notre enquête, les PRS sont plus âgés que la moyenne nationale (70 % des
répondants ont plus de 60 ans) et sont majoritairement issus des catégories socio-
professionnelles supérieures. Ainsi, une part non négligeable des résidents secondaires
enquêtés compensent la présence intermittente dans le lieu par un investissement
marqué dans les associations locales.
44 Si l’implication dans les associations locales est importante, les motifs d’adhésion
sont parfois très intéressés. Ainsi, dans la majorité des communes enquêtées, plus de
40 % des adhérents à une association locale participe à une association de
propriétaires, un type de structure de défense de droits et d’intérêts qui représente une
proportion beaucoup plus faible au niveau national (12,5 % pour Prouteau, Wolff,
2013). L’importance chez les résidents secondaires de cette catégorie d’association est
d’autant plus forte qu’elle comprend aussi les organisations de protection de
l’environnement et du patrimoine qui représentent environ 20 % des adhésions des
résidents secondaires de l’enquête que nous avons menée. Il est aussi intéressant de
noter que la proportion d’adhésions aux associations de propriétaires est souvent
inversement proportionnelle à la part des adhésions aux associations de protection de
l’environnement. Ainsi, dans les communes enquêtées sur l’Île d’Oléron où 50 % des
adhésions aux associations concernent la défense des intérêts des propriétaires, les
associations de défense de l’environnement représentent moins de 20 % des adhésions ;
en revanche, dans les deux communes de l’Île de Ré où les associations « vertes » sont
mieux représentées (25 à 36 % des adhésions) les associations de propriétaires sont
moins prisées (moins de 20 % des adhésions). Pourtant, les résidents secondaires
enquêtés à Oléron semblent plus inquiets que ceux de l’Île de Ré concernant la défense
de l’environnement de leur commune de résidence secondaires : ils sont 17 à 19 % à ne
pas être du tout satisfaits par la défense de l’environnement dans les communes
d’Oléron alors que ce chiffre est de 8 % dans les deux communes rétaises et la part des
« très satisfaits » qui atteint 13 % sur Ré n’atteint pas les 5 % sur Oléron. De manière
étrange, l’adhésion aux associations environnementalistes semble se développer quand
la situation de la protection des patrimoines se stabilise, alors que, quand celle-ci est
problématique, c’est à travers la question plus générale de la défense des intérêts du
propriétaire qu’elle s’exprime.
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45 Comme l’indiquaient déjà les très bons taux de réponse à cette enquête, si
l’implication dans les associations locales est importante, l’affirmation d’une
implication dans la vie de la commune de résidence secondaire l’est encore plus. Sur
l’ensemble des communes enquêtées, les personnes se déclarant autant ou plus
investies dans leur commune de résidence secondaire par rapport à leur commune de
résidence principale représentent entre 25 et 55 % des répondants9. Sur les communes
enquêtées des îles de Ré et d’Oléron la proportion est toujours supérieure à 50 %. Ces
valeurs démontrent pour beaucoup de propriétaires la volonté d’être considérés comme
de véritables acteurs du territoire.

3.3. Des résidents secondaires, acteurs d’une


attractivité choisie du territoire touristique littoral
et donc de sa valorisation
46 Les résidents secondaires ont une importance dans le fonctionnement du système
touristique littoral qui va bien au-delà de leur simple présence ou absence dans les lieux
ou de leur implication dans la vie locale. Ils ont en effet un rôle capital dans les
dynamiques qu’ils permettent pour d’autres populations. L’hébergement non marchand
représente en France la première forme d’accueil touristique et pèse pour 66,7 % des
nuitées en 2013. Si, dans cette valeur, les nuitées dans les résidences secondaires du
foyer compte pour 16,8 %, l’accueil chez des parents et amis représente en France en
2013 47,8 % des nuitées selon la Direction Générale de la Compétitivité, de l’Industrie
et des Services soit presque une nuitée touristique sur deux. Une part de ces nuitées
concerne les habitations principales de la famille et des amis mais une part importante
profite aussi de leur résidence secondaire en particulier dans les espaces touristiques.
47 Sur le littoral charentais, seuls 2 % des résidents secondaires déclarent ne jamais
« recevoir » dans leur bien et, un sur deux déclare héberger régulièrement des amis ou
de la famille. La résidence secondaire fait donc bien office de lieu de sociabilité où l’on
reçoit ses proches. Parfois, elle peut devenir une véritable maison de famille permettant
l’accueil de différentes générations dans un cadre agréable. Les jeunes générations
profitent souvent de l’accueil par des seniors qui composent l’essentiel des propriétaires
sur le littoral.
48 Il faut dire que la résidence secondaire avec environ 6 à 7 couchages par logement
pour l’ensemble des communes enquêtées est bien équipée pour accueillir les visiteurs.
D’ailleurs la résidence secondaire est aussi considérée comme un lieu de retrouvailles
pour la grande majorité des résidents secondaires (70 % dans la majorité des
communes avec des taux dépassant les 80 % dans l’île de Ré). Cet accueil participe à
l’attractivité des lieux, car convaincre des amis et la famille de passer vous voir se fait
bien souvent en vantant la qualité des lieux. Et inversement, l’attractivité du lieu
touristique joue sur la venue de parents ou amis, comparativement au lieu de résidence
principale, même lorsque celui-ci est situé à proximité : « Quand on est à Niort, on ne
voit personne, quand on est à Châtelaillon, comme par hasard tout le monde vient »10.
Ces lieux ainsi découverts pourront être fréquentés à nouveau dans le cadre d’un
hébergement marchand, voire susciter des projets d’acquisition d’un bien pour profiter
des lieux de manière plus régulière et plus autonome.
49 Les propriétaires de résidences secondaires du littoral charentais déclarent utiliser
leur bien durant un quart à un tiers de l’année avec des valeurs variant entre 87 et 106
jours selon les communes enquêtées (figure 1). Les mois de juillet et d’août dont
l’occupation est comprise entre 19 et 24 jours en moyenne sont les moments forts de
l’occupation du logement : entre 80 et 90 % des résidents secondaires séjournent dans
leur bien durant cette période. Certes, entre décembre et février, se trouvent les mois
creux pour ces logements souvent mal ou pas équipés en chauffage, mais ce sont tout de
même entre 20 à 30 % des propriétaires selon les communes qui se rendent dans leur
résidence. Quand les logements sont bien équipés, comme on peut le supposer dans l’île

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de Ré où le prix du foncier est élevé, le taux de passage des propriétaires durant les
mois d’hiver peut atteindre les 40 % sur des week-ends ou pour les fêtes de fin d’année.
La saisonnalité de la fréquentation est donc réelle mais à nuancer, d’autant plus que les
rares données disponibles sur le taux d’occupation des résidences secondaires
annonçaient à l’échelle nationale des valeurs beaucoup plus faibles : 30 jours par le
propriétaire (Atout France, 2010). Sur le littoral charentais, notre enquête montre en
2013 que les valeurs sont a minima11 trois fois plus forte et atteignent ou dépassent les
100 jours d’occupation notamment sur l’Île de Ré.

Figure1

A - Source : Enquête Résidences secondaires Charente-Maritime 2013, UMR LIENSs CNRS Université de
La Rochelle, Charente-Maritime Tourisme, CCI La Rochelle, CCI Rochefort et Saintonge, Conception :
Blondy, Vacher, Vye, 2014.
B - Conception : Blondy, Vacher, Vye, 2014.

50 L’usage de la résidence secondaire dans l’accueil touristique est aussi complété par le
fait que c’est un bien généralement prêté à la famille ou à des amis. L’enquête 2013
nous indique qu’environ un tiers des résidents enquêtés dans chaque commune ont
prêté leur résidence secondaire en 2013. Le pic estival reste le moment privilégié pour
ce prêt et l’étude de la temporalité indique que, même si ces prêts renforcent l’usage de
la résidence tout au long de l’année, elle participe plus à son usage à temps plein en été
qu’à assurer une fréquentation soutenue hors saison (figure 1). Si une à deux résidences
secondaires sur dix sont prêtées entre les mois de juin et de septembre, la situation
devient beaucoup plus anecdotique en dehors de cette période. La résidence secondaire
en hiver est donc essentiellement utilisée par les propriétaires … quand elle est utilisée.

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51 Même sans évoquer la catégorie des meublés de tourisme déclarés résidences


secondaires avec l’INSEE, de nombreuses résidences sont louées durant une partie de
l’année. La raison classiquement avancée par les propriétaires est d’assurer les frais
d’entretien et de permettre de régler les impôts liés au bien. Cette période de location
est généralement estivale. Sur cette période, selon les communes, entre 4 et 13 % des
résidences secondaires enquêtées ont été déclarées louées au moins une fois dans le
mois. L’importance de la période estivale par rapport au reste de l’année est encore plus
forte pour les locations qu’elle ne l’était pour les prêts. La location entre octobre et mars
est vraiment marginale, même si elle n’est cependant jamais totalement absente sur
aucune des communes enquêtées et sur aucun des mois de l’année. Durant les vacances
de printemps ou en arrière-saison, quelques locations de résidences secondaires
participent modestement à l’étalement de la saison et au fonctionnement de ces espaces
littoraux. Toutefois, de nombreuses locations ne sont pas déclarées et échappent donc à
la fiscalité (Sacareau, Vacher, Vye, 2013). En conséquence, les propriétaires sont
discrets voire silencieux sur des opérations certainement sous-évaluées dans le cadre de
cette étude.

Conclusion
52 Bien qu’encore inachevée, l’étude menée sur les usages des résidences secondaires en
Charente-Maritime, en donnant la parole aux propriétaires, permet d’ors et déjà de
mieux cerner la relation complexe que ces acteurs entretiennent avec le territoire
touristique. Elle porte par ailleurs un regard inédit sur cet objet d’étude pour plusieurs
raisons. D’abord, son ampleur est un gage de fiabilité, avec plus de 4000 personnes
interrogées dans des communes littorales charentaises présentant des contextes
territoriaux représentatifs. Elle est également inédite car elle balaie des thématiques
peu investies par les études précédentes en s’intéressant aux usages, aux attentes et aux
représentations que ces acteurs ont de leur bien et de leur cadre de vie.
53 Il a ainsi été possible d’analyser trois formes d’investissement dans le lieu de ces
populations en particulier l’importance de l’investissement affectif que les résidents
secondaires portent au lieu touristique. Ce dernier se traduit par un attachement fort au
lieu et s’exprime par une topophilie s’expliquant par le rôle attribué au bien (lieu de
vacances et/ou de retrouvailles familiales). Il prend parfois racine dans le temps long, la
connaissance du lieu pouvant être ancienne quand le résident secondaire est un ancien
touriste dans le lieu ou un descendant de résident secondaire ou permanent. Ceci
expliquerait pourquoi la participation de ces résidents un peu particuliers à la vie locale
bien qu’inégale est tout à fait réelle. Il existe un vrai désir de reconnaissance en tant
qu’habitant à part entière au sein du territoire touristique qu’ils soient anciens ou
nouveaux propriétaires, héritiers ou acheteurs d’un bien récent. Dans le même temps,
cette participation reste complexe à cerner, entre la défense d’intérêts particuliers liés à
leur statut de propriétaire et un investissement pour la collectivité lorsque les enjeux
environnementaux sont forts.
54 Sur le littoral charentais, les résidents secondaires sont enfin des acteurs-clés de
l’attractivité du territoire touristique grâce à une présence sur le territoire
significative (autour de 100 jours avec une présence notable d’avril à septembre).
D’autre part, en recevant parents et amis, ils participent à la valorisation de la
destination bien qu’il s’agisse d’une attractivité choisie, car centrée sur leur cercle
d’amis ou familial et qui ne permet pas un réel étalement de la fréquentation sur
l’année.
55 Le déploiement de l’enquête « résidences secondaires » en 2014 à l’échelle de
l’ensemble du département de la Charente Maritime permettra de confronter les
observations faites sur les dix communes-tests avec des villes touristiques telles que La
Rochelle ou des zones rétrolittorales et intérieures12.

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Notes
1 Source : enquête Atout France, 2010.
2 Aux côtés des trois auteurs, cette étude est menée au quotidien par Christine Plumejeaud (UMR
LIENSs, CNRS-Université de la Rochelle), Stéphane Donnat, Caroline Bontet (Charente-
Maritime-Tourisme), Murielle Vermandé (Chambre de Commerce et d’Industrie de La Rochelle),
Olivier Bellanger et Jean-Philippe Riollet (Chambre de Commerce et d’Industrie de Rochefort-
Saintonge).
3 http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/residence-secondaire.htm
4 « Ensemble des pratiques habituelles formelles (par exemple résidence principale et
secondaire) et informelles (par exemple, chez un ami et chez ses parents) d’habitation en
plusieurs lieux distincts » (Duchêne-Lacroix, et al., 2013 : 97)
5 Seuls les résultats de cette première phase d’enquête sont présentés dans cet article.
6 Les résultats présentés en 3ème partie s’appuient essentiellement sur le questionnaire
« courrier », sauf mention particulière (entretiens téléphoniques ou focus groups)
7 Source : Focus Group n°1, 17 juillet 2013, Châtelaillon-Plage (Charente-Maritime).
8 Source : Entretiens téléphoniques (703 répondants). La commune de l’île d’Aix, au nombre de
répondants trop faible a été exclue de l’analyse de celle-ci.
9 Source : entretiens téléphoniques 2013.
10 Source : Focus Group n°2, 25 juillet 2013, Châtelaillon-Plage (Charente-Maritime).
11 Les premiers résultats de l’enquête 2013 ne nous ont pas permis de calculer pour chaque
commune un nombre total de jours d’occupation pour le prêt ou la location en raison de taux
élevés de non-réponses. Le déploiement de l’enquête à l’échelle départementale devrait rendre
cela possible.

https://journals.openedition.org/tem/3344 19/21
16/10/2022 10:36 Les résidents secondaires, des acteurs essentiels des systèmes touristiques littoraux français ?
12 Voir le site internet dédié aux résultats de l’étude départementale 2014. Un rapport final ainsi
que des publications scientifiques seront également disponibles à partir de 2016.

Table des illustrations

Titre Carte 1 : Répartition et évolution du nombre de résidences secondaires


en France entre 1990 et 2008

Crédits Source : INSEE – Recensements de population. Conception : Blondy,


Vye, Vacher. Réalisation P. Brunello, 2014.
URL http://journals.openedition.org/tem/docannexe/image/3344/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 1,1M

Titre Carte 2 : Des résidences secondaires particulièrement nombreuses sur le


littoral du Grand Ouest

Crédits Source : INSEE -Recensement de population. Conception : Blondy,


Vacher, Vye. Réalisation : P. Brunello, 2014.
URL http://journals.openedition.org/tem/docannexe/image/3344/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 1,1M

Crédits Conception : Blondy, Vacher, Vye.Réalisation : P.Brunello, 2015UMR


7266 LIENSs CNRS - Université de La Rochelle.Sources : Filocom, 2013.
URL http://journals.openedition.org/tem/docannexe/image/3344/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 464k
Titre Figure1
A - Source : Enquête Résidences secondaires Charente-Maritime 2013,
Crédits UMR LIENSs CNRS Université de La Rochelle, Charente-Maritime
Tourisme, CCI La Rochelle, CCI Rochefort et Saintonge, Conception :
Blondy, Vacher, Vye, 2014.B - Conception : Blondy, Vacher, Vye, 2014.
URL http://journals.openedition.org/tem/docannexe/image/3344/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 794k

Pour citer cet article


Référence électronique
Caroline Blondy, Luc Vacher et Didier Vye, « Les résidents secondaires, des acteurs essentiels
des systèmes touristiques littoraux français ? », Territoire en mouvement Revue de géographie
et aménagement [En ligne], 30 | 2016, mis en ligne le 20 avril 2016, consulté le 16 octobre 2022.
URL : http://journals.openedition.org/tem/3344 ; DOI : https://doi.org/10.4000/tem.3344

Auteurs
Caroline Blondy
UMR LIENSs CNRS-Université de La Rochelle
Institut du littoral et de l’environnement
2 rue Olympe de Gouges
17000 La Rochelle
cblondy@univ-lr.fr

Luc Vacher
UMR LIENSs CNRS-Université de La Rochelle
Institut du littoral et de l’environnement
2 rue Olympe de Gouges
17000 La Rochelle
lvacher@univ-lr.fr

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Définition d’un espace de pratique du système littoral touristique et sportif charentais :
le spot de surf [Texte intégral]
Paru dans Territoire en mouvement Revue de géographie et aménagement, 30 | 2016
Didier Vye
UMR LIENSs CNRS-Université de La Rochelle
Institut du littoral et de l’environnement

https://journals.openedition.org/tem/3344 20/21
16/10/2022 10:36 Les résidents secondaires, des acteurs essentiels des systèmes touristiques littoraux français ?
2 rue Olympe de Gouges
17000 La Rochelle
dvye@univ-lr.fr

Droits d’auteur

Territoire en mouvement est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons
Attribution 4.0 International.

https://journals.openedition.org/tem/3344 21/21

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