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Mme Avetyan

LA NÉGATION

La négation est souvent définie comme l’acte de rejeter l’existence de quelqu'un ou de


quelque chose. Le traitement de la négation se réalise, en français, sous diverses formes (adverbes,
déterminants, pronoms, noms, mot-phrase.

I. La négation est exprimée par un adverbe.

1. Les adverbes de négation totale : ne… pas / ne… point


le premier élément (ne) est appelé discordantiel)
le deuxième élément (pas, point, guère, etc.) est appelé forclusif
Négation totale : elle porte globalement sur la proposition entière. Elle s’exprime au moyen
de pas et point. La négation totale s’oppose à la phrase positive qui répond positivement à la même
question.
Alors que pas subsiste seul dans la négation totale du français moderne, pas et point restent
en concurrence en français classique, après la quasi-disparition des autres noms de la quantification
positive minimale (mie, goutte, mot).

En ce qui concerne la place de la négation :


quand l’infinitif régit un pronom personnel atone (non accentué), deux possibilités :
 Discordantiel et forclusif peuvent encadrer le/les pronom(s) :
Ex : Pour ne s’en point vanter.
 Ou bien ils se situent de part et d’autre du syntagme complet :
Ex : Pour ne s’en vanter point.

Attention ! Pas et point se trouvent parfois employés sans ne : ils concurrencent alors non.
Point peut être employé seul, mais pas doit être complété par un verbe de renforcement
(absolument pas, pas du tout…), par un adverbe de quantité (pas beaucoup) ou par un terme
renvoyant à la situation spatio-temporelle (pas ici).

2. Les adverbes de négation partielle.

Négation partielle : elle porte sur une partie seulement de la proposition. Elle s’exprime au
moyen de mots négatifs associés à ne, qui identifient explicitement le constituant visé par la
négation.

Guère
Il indique une quantité très minime. La proposition n’est pas totalement niée, mais
l’orientation argumentative de guère conduit vers la négation totale. Guère est ainsi apte à la litote.
Il peut indiquer une fréquence temporelle faible.
Ex : Je n’aime guère ces machins. Il ne sort guère.

Plus
Il indique la rupture d’une continuité temporelle, en distinguant un avant et un après.
Ex. Je n’y vois plus clair.
Il s’emploie sans ne dans une phrase nominale pour nier l’existence du référent, avérée
antérieurement.
Ex. Plus de munitions !

L’adverbe de négation dans le domaine temporel : ne… jamais.


Ne… jamais réalise la négation temporelle et marque la fréquence zéro ou la quantité nulle
dans l’ordre temporel. La particularité du forclusif jamais est sa mobilité.
Ex. Cette fausse douceur… ne vaudra jamais que je néglige un roi : la portée sémantique de
ne… jamais s’exerce sur l’ensemble formé par le pivot verbal et son COD, c'est-à-dire sur le
syntagme verbal.

L’adverbe de négation dans le domaine spatial : ne… nulle part.


Il est le contraire de partout.
Ex. Je ne trouve ce livre nulle part.

L’adverbe de négation exceptive (ou restrictive) : ne… que.


En corrélation avec ne, que forme le signifiant discontinu de la négation dite exceptive, qui
consiste à soustraire de la négativité l’élément sur lequel elle porte, et équivaut à restrictivement,
exclusivement. Ne… que, formellement négatif, aboutit à l’effet de sens d’un positif restreint.

Non en emploi adverbial


Ex. C’est une grandeur d’âme, et non une faiblesse.
Je veux toujours le voir, cet ingrat qui me tue, / Non pour le triste bien
de jouir de sa vue.
Non fonctionne comme un adverbe portant sur un seul élément de la phrase.
II. La négation est exprimée par des indéfinis.

1. La négation est exprimée par un pronom indéfini.

Personne, nul.
Il servent à l’expression de la quantité nulle pour les animés.

Rien.
Étymologiquement positif (issu du latin rem, « chose »), rien sert à l’expression de la
quantité nulle pour les inanimés.

2. La négation est exprimée par une locution pronominale


Grand-chose, grand-monde, âme qui vive, qui que ce soit, quoi que ce soit.
Ces locutions suppléent personne ou rien, dont elles constituent des variantes analytiques (=
plusieurs termes), et, pour certaines, figurées (plus ou moins imagées).

3. La négation est exprimée par un déterminant indéfini.


Aucun et nul peuvent être employés en tant que forclusifs. Mais ils s’emploient également
devant le substantif qu’ils déterminent. Nulle des nymphes, nulle amie ne m’attire.

III. La négation exprimée par ne employé seul.

1. Adverbe de négation.
Ne est un mot atone, toujours adossé au verbe qu’il précède : c’est un mot clitique. La
négation s’exprimant en français le plus souvent sous la forme d’une structure corrélative, les
emplois de ne seul sont limités à des cas précis, constituant une survivance historique.
- après certains verbes d’aspect ou de modalité suivis d’un infinitif : savoir, oser, pouvoir,
savoir.
- après un si hypothétique Je ne m'engagerais à rien si tu ne promettais de garder le secret.
- après qui ou quel dans une interrogation rhétorique. Qui n’en conviendrait ? et après le
que interrogatif ou exclamatif employé au sens de pourquoi. Que ne l’ont-ils dit plus tôt ?
- dans une proposition subordonnée relative ou consécutive, après une principale
interrogative ou négative. Y a-t-il quelqu'un dont il ne médise ?
- expression de temps indiquant le temps écoulé, introduite par voilà ou il y a associés à que,
ou dans une subordonnée introduite par depuis que. Il y a trois mois que je ne l’ai vu.
- dans les locutions ou expressions proverbiales. Qu’à cela ne tienne. Je n’ai que faire.
2. Ne explétif.
Sa présence n’est pas indispensable. Le ne manifeste la valeur négative implicitement
contenue dans le verbe recteur, par exemple.
On le trouve dans les propositions subordonnées :
- après un terme recteur marquant le désir négatif (crainte, précaution, empêchement)
Ex. J'ai peur qu'il ne puisse venir ce soir.
- après les locutions conjonctives de peur que, crainte que, à moins que (hypothèse d’une
exception contraire à l’hypothèse que soutient l’énonciateur), avant que (le procès subordonné n’est
pas encore arrivé).
Ex. Les amis pourront l'aider à moins que cela ne leur soit défendu.
- en structure comparative posant l’inégalité ou la différence.
Ex. Il est plus rapide que ne l’est son frère.

IV. La conjonction ni.


Ni est une conjonction de coordination qui permet d’unir deux structures négatives (mots ou
propositions). Elle s’emploie normalement en corrélation avec ne
Ex. Il n’est ni aimable ni symbathique.
Mais ni peu avoir un semi-négatif :
- dans des énoncés sans verbe, il assume seul la valeur négative : Ni fleurs ni couronnes.
- il peut commuter avec et ou bien avec ou, et perdre alors sa valeur négative, dans des
phrases interrogatives :
Ex. Avez-vous jamais vu un acteur plus doué ni plus polyvalent ?)
ou en structure comparative :
Ex. Patience et longueur de temps / Font plus que force ni que rage.
Ni ne peut se combiner avec les forclusifs pleinement négatifs pas ou point, mais il le peut
avec tous les autres – rien, personne, jamais.

V. La négation est exprimée par un mot-phrase.


Non
Dans ce cas, l’adverbe non fonctionne comme l’équivalent d’une phrase : il forme à lui seul
un énoncé. Il reprend globalement un contenu propositionnel antérieur qu’il nie pleinement.
Le cas échéant, il apporte une réponse globale négative à une question.
En l’absence de question, il peut servir à affirmer une position dans une argumentation
opposée à celle que tenait l’interlocuteur.
VI. La négation est exprimée par un préfixe.

La négation est une opération complexe ; elle peut aussi se porter sur les constituants de la
phrase pour désigner divers aspects de la quantité nulle. Ce qui peut se réaliser autrement que par
les adverbes de négation. La langue française dispose d’affixes qui permettent d’inverser la valeur
des éléments lexicaux.
Ainsi des adjectifs comme inconsolé, infidèle, inconnu : le préfixe in-, toujours négatif, sert
à créer un dérivé endocentrique = de même classe que sa base. ! D’autres adjectifs, comme ingrat,
inquiet, sont en latin des dérivés à préfixe négatif ; mais en français, ils ne sauraient être considérés
comme construits, puisqu’il n’existe plus de base, c’est-à-dire d’élément susceptible d’être employé
seul.

VII.Autre moyen de négation lexicale :


Par opposition des antonymes. Unités lexicales sans rapport morphologique
(savoir/ignorer), ou relation de dérivation, comme pour possible/impossible.

VIII. La préposition sans.

L’utilisation de la préposition sans, dont le sémantisme est toujours négatif, exprime la


quantité nulle. Cette préposition introduit un syntagme nominal dont elle nie le référent.

IX. Négation cumulée.


Le cumul des négations peut correspondre à une affirmation, atténuée (Je ne dis pas non) ou
renforcée (Je n’ai pas manqué de protester), les deux négations s’atténuant.
Il n’est plus possible aujourd’hui, comme dans la langue classique, d’employer avec pas les
pronoms négatifs personne et rien ou la conjonction ni. L’expression ce n’est pas rien a un sens
positif.
Mais on peut mettre ensemble deux (voire trois) termes de la négation partielle, comme
personne, rien, plus, jamais tout en faisant conserver à la phrase un sens négatif. Les deux termes
négatif ayant un champ différent se renforcent mutuellement en combinant leurs sens spécifiques.
Ex. Rien n’a jamais égalé la fermeté de mon âme.
Ces termes peuvent également être associés à ni.
Ex. On ne voyait plus ni le lac, ni la montagne.

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