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2015/2016

A.

UNIVERSITE GASTON-BERGER

SAINT-LOUIS DU SENEGAL

M.M.M. AIDARA

CHAPITRE INTRODUCTIF

L’étude du droit administratif postule tout d’abord de situer ses origines, et de le


définir ; ensuite l’accent sera mis sur ses caractères pour enfin analyser la construction du
droit administratif au Sénégal.

I. LES ORIGINES DU DROIT ADMINISTRATIF.

Le droit administratif est né en France dans un contexte particulier. Au Moyen âge, sous
l’ancien régime, il s’est construit un ensemble de règles appelées règles administratives
destinées à gérer les affaires publiques. C’est à la révolution de 1789 que le droit administratif
s’est constitué en tant que discipline juridique.

A. L’ANCIEN REGIME ET LES REGLES ADMINISTRATIVES.

Sous l’ancien régime, le pouvoir était concentré entre les mains des seigneurs. Mais
avec la dislocation de l’empire, ceux-ci sont devenus des héritiers des anciens agents
royaumes ou grands propriétaires fonciers. Et plus tard, les municipalités vont s’émanciper
pour administrer les villes et les bourgs. Ces différents niveaux d’administration se
caractérisent par l’édiction de règles destinées à réglementer les activités des sujets.

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Des privilèges sont reconnus aux titulaires de la puissance publique qui peuvent :
Déposséder les sujets de leurs biens, Exercer des pouvoirs de police sur un territoire, définir
un régime d’accès ou d’utilisation des terres, percevoir des taxes et redevances etc.

En contrepartie, un certain nombre de garanties sont reconnus aux sujets. Il s’agit


notamment de certains dédommagements en cas de dépossession, d’un fonctionnement
correct des installations publiques, ou encore de l’interdiction de toute discrimination entre les
sujets. Il peut aussi arriver que les seigneurs confient, par contrat, la réalisation d’une tâche ou
l’exercice de certains pouvoirs à des fermiers en fixant des conditions par lesquelles ils
gardent une position privilégiée par rapport à ces derniers. L’utilité publique et la nécessité
publique sont invoquées pour justifier ces règles qui se distinguent de celles utilisées pour
régir les rapports entre les particuliers.

A cette période, s’est développée l’idée selon laquelle les problèmes liés à
l’administration sont spécifiques et qu’il fallait des organes et des juridictions spécialisées
pour connaître de ses problèmes. Par exemple, on considérait que juger l’administration, c’est
administrer. Donc il faut un administrateur pour juger l’administration. En conséquence, il ne
faut pas soumettre les problèmes liés à l’administration aux tribunaux appelés Parlement dont
le rôle est de trancher des litiges nés entre les sujets du roi.

Une telle approche a eu pour conséquence la création d’un Conseil du Roi qui était un
organe chargé de conseiller le souverain ou ses agents dans le règlement des litiges ou des
réclamations concernant l’administration. Cet épisode est important puisqu’il a forgé une
culture en France selon laquelle il faut un organe spécifique pour rendre le droit applicable à
l’administration. Avec la révolution une phase va s’ouvrir.

B. LA REVOLUTION ET L’AFFIRMATION DU DOIT ADMINISTRATIF

Avec la révolution, l’assemblée constituante abolit l’ancien régime et remplace les


structures traditionnelles par de nouvelles institutions mais elle ne remet pas en cause la
culture selon laquelle « juger l’administration c’est administrer ». Bien au contraire, cette idée
va s’affirmer et sera traduite en termes juridiques.

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D’abord l’Article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen va consacrer


la séparation des pouvoirs, reconnue comme étant une condition d’existence de l’Etat de droit.
Dès lors, une interprétation spécifique va pousser les révolutionnaires à opérer une distinction
entre les fonctionnaires administratifs et les fonctions judiciaires. Ainsi, les lois en dates du 16
et 24 Août 1790 affirment que « Les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront
toujours séparés des fonctions administratives ».

Un autre élément tout aussi important va aussi renforcer la séparation et l’utilité de


recourir à un organe distinct des organes de droit commun pour connaître des litiges de
l’administration : c’est la méfiance des révolutionnaires à l’égard du juge judiciaire.

Ce dernier était particulièrement partisan du pouvoir royal, soutenant son action,


développant une jurisprudence protectrice de la propriété royale et sauvegardant tous les biens
royaux.

En définitive, les révolutionnaires se méfiaient, et du roi, et du juge judiciaire qui


constituaient une menace dans certaines matières administratives. Cette méfiance est traduite
en droit par l’Article 13 de la loi du 16 et 24 Août 1790 qui interdit aux tribunaux judiciaires
d’exercer des fonctions administratives ou d’intervenir dans la marche de l’administration
sous forme de citation ou d’instruction faite aux administrateurs, sous peine de forfaiture.
Méfiance pour ne pas dire rejet du juge judiciaire et en même temps, défaut de création de
juridiction spécialisée et maintien de l’approche selon laquelle les litiges administratifs sont
spécifiques, il ne restait que l’administration pour connaître des litiges. L’administration
devient juge et partie. A la fin de la période révolutionnaire, l’examen de réclamations contre
l’administration par les particuliers était adressé directement à l’administration et non à un
juge indépendant. Ce sont les administrations qui jugent des réclamations, les ministres
étaient à la fois administrateurs et juges. C’est la théorie de l’administration-juge.

A l’an 8 de la Révolution, un organe dénommé conseil d’Etat est créé. Au départ il


n’était pas libre, car devant présenter au chef de l’Exécutif tous ses projets de décisions qu’il
validait ou pas : on parle de « justice retenue ». Mais avec la loi du 24 Mai 1872, le conseil
d’Etat devient une juridiction autonome et rend des décisions de façon souveraine. Un an plus
tard, il est rendu une décision célèbre dite Arrêt BLANCO rendu par le tribunal le 8 Février
1873. Cet Arrêt est considéré comme étant l’arrêt fondateur du droit administratif. Le juge

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reconnaît que le droit commun, c'est-à-dire le Code civil ne doit pas être appliqué à
l’administration. Il faut un droit dérogatoire, c’est le droit public ou droit administratif qui va
s’appliquer sans texte. Il revient au juge de le forger au fur et à mesure qu’il tranche les
litiges.

Avec l’Arrêt Cadot rendu le 13 Décembre 1889, le conseil d’Etat consacre l’abandon
définitif de la théorie du ministre-juge et se proclame juge de droit commun du contentieux
administratif. Il en résulte que le droit administratif est un droit jurisprudentiel. Reste à voir
comment le définir.

I.II. LA DEFINITION DU DROIT ADMINISTRATIF.

Le droit administratif est un droit difficile à définir en ce sens qu’il s’avère délicat de
formuler de manière brève et précise le contenu du droit administratif. La définition du droit
administratif oppose la doctrine qui a fait recours à des critères, c’est à dire des éléments
distinctifs pour identifier le droit administratif. Ces critères sont très liés aux éléments sur
lesquels s’est fondés le juge pour dire par exemple dans une affaire que c’est le droit
administratif et non le droit commun qui doit s’appliquer. On peut distinguer les critères
fondés sur le service public, sur la puissance publique, sur des bases institutionnelles ou
encore sur l’intérêt général.

A. LE DROIT ADMINISTRATIF : DROIT DU SERVICE PUBLIC

C’est ainsi que, se fondant sur la solution dégagée dans l’arrêt Blanco, le doyen Duguit,
qui est le chef de file de l’école de service public de Bordeaux, voit dans le service public la
pierre angulaire du droit administratif. En claire, le service public est l’élément qui permet de
délimiter le droit administratif par rapport au droit civil et le droit administratif est le droit qui
s’applique lorsqu’on est en présence d’un service public. Duguit affirme que : « Le droit
public actuel (le droit administratif) repose sur la notion d’une fonction sociale des
gouvernants ayant pour objet l’organisation et le fonctionnement des services publics ».

Le service public est une activité d’intérêt général géré par une personne publique. Il
faut dire que de 1873 à 1910, à la suite de plusieurs décisions, le Conseil d’Etat a invoqué le
service public pour justifier l’application du droit administratif.

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D’abord dans l’arrêt Blanco, le juge affirme que : « La responsabilité de l’Etat pour les
dommages causés par les personnes qu’il emploie dans le service public ne doit pas être régie
par le droit civil ».

Dans l’arrêt Terrier, 06 Février 1903, le juge va étendre les principes de l’arrêt Blanco à
la responsabilité contractuelle des collectivités locales. Il est soutenu que : « Toutes les
actions entre les personnes publiques et les tiers ou entre les personnes publiques elles-mêmes
et fondée sur l’exécution, l’inexécution ou la mauvaise exécution d’un service public sont de
la compétence administrative ».

Dans l’arrêt Feutry, tribunal des conflits 29 Février 1908 et Thérond, Conseil d’Etat 4
Mars 1910, le juge poursuit l’entreprise de soumission de l’Etat et des collectivités publiques
au droit administratif en se fondant sur le critère de service public.

Mais à partir de 1912, une fissure sera décelée dans la construction du doyen Léon
Duguit. D’où la remise en cause du critère de service public. Une partie de la doctrine va
alors considérer que le droit administratif a pour fondement la puissance publique.

B. LE DROIT ADMINISTRATIF : DROIT DE LA PUISSANCE PUBLIQUE

La thèse est défendue par le doyen Maurice Hauriou qui est le chef de file de l’école de
la puissance publique ou école de Toulouse. Selon Hauriou, le droit administratif est le droit
qui s’applique quand l’Etat utilise des actes de puissance publique. Hauriou se fonde sur une
série d’arrêt rendue par le Conseil d’Etat où le juge n’invoque pas la notion de service public
pour appliquer le droit administratif.

Dans l’arrêt Société des Granits Porphyroïdes des Vosges en date du 31 Juillet 1912,
pour déterminer la nature d’un contrat, le juge ne s’est pas fondé sur l’existence ou non d’un
service public, ni sur l’objet en vue duquel le contrat a été conclu. Au contraire il s’est fondé
sur la notion de : « clause exorbitante du droit commun ».

Une décennie plus tard en 1921, dans la décision du tribunal des conflits en date du 22
Janvier 1921, le juge a reconnu ce que la doctrine appelle le service public industriel et
commercial (SPIC). Cette décision renforce la distinction entre gestion publique et gestion
privée, entre acte de puissance publique et acte de gestion. Le juge affirme que

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l’administration peut, dans certaines de ses activités, agir comme le ferait un simple
particulier et ne pas user de prérogatives de puissances publiques. Les services publics
industriels et commerciaux qui résultent de cette activité sont soumis au droit privé, et les
litiges qui se rapportent à leur gestion sont du ressort du juge judiciaire.

A partir de ces décisions, l’école de Maurice Hauriou considère que le droit


administratif est le droit qui s’applique quand l’Etat utilise des actes de puissances publiques
et non un service public. Ce qu’il faut prendre en compte, ce n’est pas la finalité, mais les
moyens usés pour gérer les activités. S’il s’agit d’un moyen de puissance publique, le droit
administratif va s’appliquer. En revanche, s’il s’agit de moyens semblables à ceux utilisés par
les particuliers, c’est le droit civil qui s’applique.

A côté de ces thèses classiques, Georges Vedel à développer la théorie des bases
constitutionnelles du droit administratif.

C. THEORIE DES BASES CONSTITUTTIONNELLES DU DROIT ADMINISTRATIF

Elle est défendue par le doyen Vedel qui considère que pour définir le droit
administratif, il faut se référer à la constitution. Il a alors développé la théorie des bases
constitutionnelles du droit administratif. Selon cette théorie, la constitution distingue entre
plusieurs organes (gouvernement, parlement, autorité judiciaire). Il faut donc partir de
considération organique, et non de considération matérielle (service publique, puissance
publique) pour définir à la fois l’administration et le droit administratif. Comment ? Vedel
affirme qu’il faut procéder par étape de délimitation ; il faut distinguer trois phases.

La 1ère phase aboutit à exclure, de l’administration, tout ce qui relève du parlement et de


la juridiction. Et à rattacher l’administration au gouvernement.

La 2ème phase consiste à délimiter dans l’activité gouvernementale, ce qui n’a pas un
caractère administratif (Ex : l’activité diplomatique et l’activité du gouvernement dans ses
rapports avec les autres pouvoirs publics).

La 3ème phase consiste à appréhender l’administration en tenant compte des deux


premières exclusions comme étant : « L’ensemble des activités du gouvernement et des
autorités décentralisées, étrangères à la conduite des relations internationales et aux rapports

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entre pouvoirs publics et s’exerçant sous un régime de puissance publique ». Le droit


administratif est ce régime de puissance publique, sous lequel sont exercées les activités
délimitées. Quel que soit sa pertinence la théorie a été remise en cause par certains auteurs qui
considèrent que le droit administratif a pour fondement l’intérêt général.

D. LE DROIT ADMINISTRATIF : DROIT DE L’INTERET GENERAL

La thèse est défendue par Marcel Waline qui a recours à la notion d’intérêt général pour
définir le droit administratif. Selon lui, le droit administratif est le droit qui s’applique quand
on est en présence d’une activité d’intérêt général. Il soutient qu’il s’agit de : « L’ensemble
des règles qui précisent sous quelles conditions les personnes administratives acquièrent des
droits et imposent des obligations aux administrés, par l’organe de leurs agents dans l’intérêt
de la satisfaction des besoins publics ; c’est l’ensemble des règles qui gouvernent l’activité de
l’administration, des agents administratifs, précisant l’étendue et les limites de leurs pouvoirs,
soit à l’égard des administrés, soit à l’égard les uns des autres ». La notion d’administration se
met au centre de la définition du droit administratif. L’administration peut faire l’objet d’une
double approche : organique et matérielle. Au sens organique, l’administration désigne
l’ensemble des autorités, agents et organismes, chargés d’exécuter des activités d’intérêt
général. Au sens matériel, l’administration est une activité qui vise la satisfaction de l’intérêt
général.

Enfin, le droit administratif qui est applicable à l’administration est un droit qui
comporte des privilèges et des sujétions exorbitantes du droit commun ; c’est tout l’intérêt
d’analyser ces caractères.

II.III. LES CARACTERES DU DROIT ADMINISTRATIF

Le droit administratif présente plusieurs caractères. On peut en retenir au moins quatre


(04) Il s’agit : du caractère jurisprudentiel, du caractère autonome, du caractère d’équilibre
des relations entre administration et administrés et du caractère évolutif du droit administratif.

A. LE CARACTERE JURISPRUDENTIEL

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Il s’agit d’un caractère qui résulte d’un fait historique. A sa formation, quand il écartait
le code civil, le juge n’avait aucun code ou texte sur lequel il se fondait pour rendre le droit
administratif. C’est par une démarche casuelle (cas par cas) que le juge administratif va forger
des règles qui seront, malgré l’interdiction des arrêts de règlements, répéter pour constituer
une jurisprudence. C’est pourquoi le droit administratif est structurellement et
fondamentalement jurisprudentiel.

Aujourd’hui ce caractère a connu un fort infléchissement. Le droit administratif devient


en effet de plus en plus un droit écrit. Des pans entiers sont soumis à des lois et règlements.
Le statut de plusieurs administrations est défini par des textes législatifs ou réglementaires. Et
le juge administratif lui-même a tendance à appliquer dans de nombreuses décisions, non pas
des règles jurisprudentielles, mais des dispositions textuelles.

Toutefois, force est de reconnaitre que les principes fondamentaux du droit administratif
sont posés par la jurisprudence.

B. LE CARACTERE AUTONOME

L’autonomie du droit administratif est à considérer par rapport au droit privé. Dans le
schéma traditionnel français, différent du schéma sénégalais, le droit administratif a son
propre juge, sa propre juridiction et ses propres règles. On distingue entre l’ordre administratif
et l’ordre judiciaire. L’autonomie du droit administratif signifie que ce sont des règles
distinctes du droit privé qui sont applicables à l’administration. On dit que le droit
administratif est un droit exorbitant du droit commun.

En France, c’est l’existence de la jurisprudence administrative elle-même qui est


regardée comme étant la source essentielle de la spécificité du droit administratif. En 1980, le
Conseil constitutionnel français, se fondant sur un principe fondamental reconnu par les lois
de la République (la loi du 24 Mai 1872 relative au conseil d’Etat déjà évoqué), a reconnu
l’indépendance et la spécificité de la juridiction administrative qui sont garanties
constitutionnellement. Il en découle que tout le contentieux de l’annulation et de la
réformation des décisions prises par les autorités administratives dans l’exercice de leurs
prérogatives, relève de la compétence du juge administratif.

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Au Sénégal, l’autonomie du droit administratif ne se traduit pas par l’existence d’une


juridiction autonome parce que le législateur a opté pour une unité de juridiction. C'est-à-dire
que c’est le même juge qui rend, et le droit administratif, et le droit commun.

Toutefois, le droit administratif est distinct du contentieux des particuliers. En effet, des
pans importants de l’activité de l’administration ne sont pas soumis à un régime de droit
commun. Il s’agit notamment de la fonction publique, du domaine public, de la responsabilité
administrative, des contrats administratifs ou encore des actes administratifs unilatéraux.

Cependant, l’autonomie du droit administratif sénégalais est relative en ce sens qu’il


arrive que les règles applicables à l’administration ne soient pas radicalement différentes de
celles du droit privé. A ce caractère autonome s’ajoute un autre caractère d’équilibre.

C. LE CARACTERE D’EQUILIBRE

Le droit administratif est un droit qui régit des relations déséquilibrées. Il existe d’un
côté l’administration qui agit au nom de l’intérêt général et qui est impersonnelle et puissante.
Et d’un autre côté, les particuliers qui poursuivent leur intérêt propre. Si l’intérêt général doit
prendre dessus sur l’intérêt particulier, il ne doit pas toutefois le nier. Le droit administratif est
le droit qui recherche de l’équilibre entre deux intérêts contradictoires. C’est sans doute ce qui
explique aussi son caractère évolutif.

D. LE CARACTERE EVOLUTIF

Rappelons que dès ses débuts, avec l’arrêt Blanco, le juge a mis l’accent sur la nécessité
d’adapter les règles du droit administratif au contexte d’intervention de l’administration.
Depuis lors, le droit administratif n’a cessé d’évoluer. Aujourd’hui, il connait des mutations
importantes. L’accent sera mis sur les mutations les plus récentes qui affectent aussi bien les
décisions du juge que sa mission.

Les mutations des décisions du juge : le juge administratif adopte depuis de nombreuses
années un raisonnement qui le poussent à considérer le droit constitutionnel comme étant
l’une des sources essentielles du droit administratif en rendant des décisions dans lesquelles il
se fonde sur des principes contenus dans la Déclaration Universelle des droits de l’Homme et
du citoyen du Préambule de la constitution de 1946…

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Une autre dimension de la mutation est rendue compte par la prévalence du droit
communautaire, qu’il soit européen ou africain. En effet, la loi n’est plus la norme supérieure
à laquelle l’administration, dans tous les cas, doit se conformer, et sur laquelle elle peut
asseoir son action. Elle ne l’est que sous réserve de sa conformité à la constitution ou au droit
communautaire.

Les mutations de la mission du juge : l’action du juge a aussi connu une mutation.
D’abord par le développement de procédure conservatoire, le juge administratif adopte une
attitude qui permet la suspension des effets d’une décision administrative. Ensuite, par la
reconnaissance de compétence de réformation, le juge administratif va au-delà de son pouvoir
d’annulation de la décision contestée. Si le recours pour excès de pouvoir a été l’acquis
majeur du 20ème S., en ce 21ème, le juge administratif a vocation à exercer dorénavant, dans un
champ plus large un rôle de juge de pleine juridiction. Dans l’exercice de sa mission, le juge
administratif fait montre de pédagogie. Il en est de même dans le contenu des décisions qu’il
rend. C’est ce droit qui a été reçu et adapté au Sénégal depuis l’indépendance.

III.IV. LA CONSTRUCTION DU DROIT ADMINISTRATIF SENEGALAIS

Le droit administratif sénégalais est fortement inspiré du droit administratif français. Au


moment de la colonisation, l’organisation et le fonctionnement de l’appareil administratif de
la colonie du Sénégal étaient régis par des lois et règlements imprégnés de la législation de la
métropole.

A la proclamation de l’indépendance, le Sénégal n’a pas opté pour une rupture


définitive avec le système administratif français. Certains auteurs parlent de « mimétisme
juridique d’après indépendance ». Mais en tout état de cause, le droit administratif français
n’a pas été intégralement reconduit. Il a été adapté aux réalités nationales pour tenir compte
des spécificités de la société sénégalaise.

Deux éléments importants mettent en évidence les spécificités du droit administratif


sénégalais : D’abord, contrairement au droit administratif français, le droit administratif
sénégalais est un droit écrit et il s’agit d’un droit qui ne relève pas d’une juridiction spéciale
comme en France.

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A. UN DROIT ADMINISTRATIF SENENEGALAIS ECRIT

Dès les premières années de l’indépendance, le législateur sénégalais a adopté un Code


des obligations de l’administration (COA) par le vote de la loi N° 65-51 du 19 Juillet 1965.
Ce code reprend en grande partie les solutions importantes dégagées par le juge administratif
français dans les matières du droit administratif tel que le contrat, les travaux publics, le
service public, la responsabilité, mais en y apportant certaines modifications. On dit que le
Sénégal a opté pour une codification du droit administratif. Ce sont des raisons d’ordre
pratique et technique qui sont invoqués pour justifier une telle option.

B. UN DROIT SANS JURIDICTION SPECIALISEE

Le Sénégal a opté pour une unité de juridiction à dualité de contentieux. Dans un tel
schéma, ce sont les mêmes juges qui sont compétents aussi bien en matières administratives
qu’en matières judiciaires. En 1960, l’ordonnance n° 60-50 du 14 Novembre 1960 fixant
l’organisation judiciaire du Sénégal a consacré un système d’unité de juridiction dans lequel
le tribunal régional est juge en toute matière.

Avec la réforme judiciaire du 30 Mai 1992, le Sénégal a expérimenté une dualité de


juridiction au sommet par la suppression de la Cour Suprême et la création d’un Conseil
d’Etat spécialisé dans le contentieux administratif. Mais en 2008, avec la loi organique 2008-
35 du 07 Août 2008, portant création de la Cour Suprême, le législateur est revenu au schéma
initial marqué par une unité de juridiction à la base et au sommet.

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Ce cours sera structuré en deux parties. Dans la première partie, il sera envisagé
essentiellement l’action de l’administration et dans la seconde partie l’encadrement de cette
action.

(PLAN DU COURS)

PLAN DU COURS

1ère PARTIE : L’ACTION DE L’ADMINISTRATION

TITRE 1 : LES MODES D’ACTION

CHAP1 : LE SERVICE PUBLIQUE

CHAP2 : LA POLICE ADMINISTRATIVE

TITRE 2 : LES MOYENS D’ACTION

CHAP1 : L’ACTE ADMINISTRATIF UNILATERAL

CHAP2 : LE CONTRAT ADMINISTRATIF

2ème PARTIE : L’ENCADREMENT DE L’ACTION DE L’ADMINISTRATION

TITRE 1 : LE CONTROLE DE L’ADMINISTRATION

CHAP1 : LES ORGANES CHARGES DE CE CONTROLE

CHAP2 : LES RECOURS CONTENTIEUX

CHAP3 : LA PROCEDURE ADMINISTRATIVE CONTENTIEUSE

TITRE 2 : LA SOUMISSION DE L’ADMINISTRATION AU DROIT

CHAP1 : LA RESPONSABILITE ADMINISTRATIVE

CHAP2 : LE PRINCIPE DE LEGALITE

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PREMIERE PARTIE : L’ACTION DE L’ADMINISTRATION

TITRE 1 : LES MODES D’ACTION DE L’ADMINISTRATION

D’une manière globale, l’action de l’administration se caractérise soit par une fonction
de prestation par laquelle elle fournit des biens ou des services aux particuliers : c’est l’étude
des services publics (CHAPT1) ; soit par une fonction de réglementation qui se traduit par un
encadrement des activités ou des comportements des particuliers, c’est l’analyse de la police
administrative (CHAPT2).

CHAPITRE 1 : LE SERVICE PUBLIC

Le service public est une notion fondamentale du droit administratif. Rappelons qu’il a
été considéré par certains auteurs comme étant la pierre angulaire du droit administratif.

Après avoir analysé la notion de service public (S1), l’accent sera mis sur les principes
de fonctionnement des services publics (S2), avant d’envisager les différents modes de
gestion des services publics qui existent (S3).

Section 1 : La notion de service public

La notion de service public a la caractéristique d’être une notion en débat. Il existe des
approches différentes de la notion de service public (P1) et l’identification même de la notion
est faite à partir d’éléments appelés critères de reconnaissance (P2).

Paragraphe1 : Les différentes approches de la notion de service public :

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Le Sénégal a opté pour une définition législative du service public. Mais bien avant, la
doctrine s’est croisée et a dégagé des conceptions différentes du service public. Quant à la
jurisprudence, elle se détermine aussi à partir d’une conception.

A. L’approche doctrinale du service public

Plusieurs conceptions doctrinales de la notion de service public s’affrontent. On


distingue entre une conception objective et une conception subjective.

La conception objective est défendue par l’école de service public de Bordeaux avec
Léon Duguit qui considère que le service public est une fonction sociale du pouvoir. En clair,
il s’impose aux gouvernants. Selon cette théorie, l’Etat est l’ensemble des services publics
fonctionnant sous l’impulsion et le contrôle des gouvernants dans l’intérêt collectif. Léon
Duguit considère que le service public est le fondement et la limite du pouvoir
gouvernemental. Dans sa théorie, le service public se constate plus qu’il ne se crée et il
commande l’action de l’Etat et des autorités.

Selon la conception subjective, les services publics résultent de la volonté du législateur


et du pouvoir public qui dispose de la faculté de décider de l’opportunité de les créer ou pas.
Aucune contrainte extérieure ne s’oppose aux autorités. Ces deux conceptions doctrinales ne
sont pas remises en cause par la jurisprudence.

A.B. L’approche législative du service public

Elle s’est surtout affirmée au Sénégal où au terme de L’article 11 de la loi du 19 Juillet


1965 portant Code des obligations de l’Administration (C.O.A), modifiée par la loi 2006-16
du 30 Juin 2006 : « est considéré comme service public toute activité d’une personne morale
de droit public en vue de satisfaire un besoin d’intérêt général ».

Il s’agit ici d’une codification de la définition classique du service public qui a prévalu
en France au cours du 19ème siècle. Dans l’arrêt Feutry du Tribunal des conflits 29 Février
1908, le juge a considéré qu’il suffit qu’une activité soit prise en charge par une personne
publique et qu’elle soit d’intérêt général pour qu’on soit en présence d’un service public.

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Cette définition reprise par le législateur sénégalais a le mérite de la simplicité parce que
c’est la nature juridique de l’organe qui gère l’activité qu’il faut prendre en compte pour
détecter la présence ou non d’un service public. Mais l’évolution de l’administration a mis en
évidence les limites de la définition. En effet elle présente l’inconvénient de ne pas envisager
la gestion du service public par des personnes privées. Elle est devenue obsolète.

B.C. L’approche jurisprudentielle du service public

Le juge privilégie tantôt une conception objective, tantôt une conception subjective.
Ainsi le juge constitutionnel français considère dans une décision en date du 25 Juin 1986 (loi
de privatisation) qu’il existe des principes constitutionnels qui imposent au législateur de
créer des services publics dans des domaines précis.

Mais plus récemment, le juge administratif a tendance à privilégier l’approche


subjective. Dans l’arrêt rendu par le conseil d’Etat le 22 Février 2007 (APREI), le juge
recherche quelle est l’intention du législateur ; a-t-il voulu créer un service public ou pas ? Le
service public a la particularité d’être une notion qui s’identifie plus qu’il ne se définit.

Paragraphe 2 : L’identification du service public

Trois éléments essentiels sont en général utilisés pour identifier le service public. Ce
dernier est une activité qui porte sur une matière spécifique à savoir l’intérêt général.

L’activité d’intérêt générale est l’élément matériel du service public. Le service public
est une activité qui est exercée par des organes spécifiques, c'est-à-dire les personnes
morales ; C’est l’élément organique du service public. Enfin, le service public est un service
soumis à un régime exorbitant du droit commun ; C’est l’élément juridique du service public.

A. L’élément matériel du service public

Le service public est une activité d’intérêt générale. Mais l’intérêt général est difficile à
cerner. Deux approches ont été avancées pour le définir. On distingue entre une approche
utilitariste et une approche volontariste.

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Selon l’approche utilitariste, l’intérêt général n’est rien d’autre que l’ensemble des
besoins collectifs. C’est la satisfaction des besoins de la population.

Selon l’approche volontariste ou Rousseauiste, elle considère que l’intérêt général


transcende les intérêts particuliers. Quel que soit l’approche privilégiée, l’intérêt général a la
caractéristique d’être une notion contingente.

A l’époque classique, on considérait qu’il est d’intérêt général que l’Etat régule la
société civile. Mais qu’il est aussi d’intérêt général que son intervention ne le conduise à se
substituer aux acteurs de la société civile (voir Arrêt du CE, 29 Mars 1901 Casanova, ou
encore 30 Mai 1930 chambre syndicale du commerce en détail de Nevers).

Dans cette décision, le juge administratif affirme que les entreprises ayant un caractère
général restent en règle générale réservées à l’initiative privée et que les conseils municipaux
ne peuvent ériger des entreprises de cette nature en services publics communaux que si, « en
raison des circonstances particulières de temps et de lieu, un intérêt public justifie leur
intervention en cette matière ».

Aujourd’hui avec le développement de l’interventionnisme étatique, de même pour


celui des collectivités locales, il est compliqué d’identifier la notion d’intérêt général.

En France, à l’origine, le juge administratif refusait d’admettre la création ou la prise en


charge par les personnes publiques d’activités dans le domaine culturel. La raison invoquée
était que de telles activités seraient étrangères à l’intérêt général. Dans l’arrêt du 11 Mai 1959,
arrêt Dauphin, le juge administratif revient sur la décision et reconnait l’existence de service
public culturel. En définitive, la notion d’intérêt général est une notion élastique. Toute
activité d’intérêt général ne constitue pas par elle-même un service public, mais peut le
devenir. C’est tout l’intérêt d’analyser le critère organique du service public.

B. L’élément organique du service public

Rappelons qu’il s’agit d’une condition privilégiée par le législateur sénégalais dans le
COA. Jusqu’au début du 20ème siècle, le service public est une activité d’intérêt général gérée
par une personne publique à l’exclusion de toute autre personne. On considérait en effet les

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services publics comme des organes et cela s’expliquait par le fait qu’ils étaient entre les
mains des personnes publiques.

On évoque alors une conception organique du service public. Mais progressivement,


cette conception sera remise en cause. Dans une série d’arrêt, le juge administratif admet que
les services publics pouvaient être gérés par des personnes privées. Une distinction est opérée
entre le service public considéré comme une institution et le service public considéré comme
une mission (voir C E arrêt assemblée 13 MAI 1938, Caisse primaire « aide et protection »).
Dans cet arrêt le juge considère qu’un organisme privé peut être chargé d’un service public en
dehors d’un système contractuel.

Cette solution sera confirmée dans les arrêts rendus plus tard par le CE (voir CE 31
Juillet 1942, arrêt Monpeurt ; CE 02 Avril 1943, arrêt Bouguen ; CE 05 Mai 1944, arrêt
Compagnie maritime de l’Afrique Orientale ; ou encore CE 13 Janvier 1961, arrêt Magnier).

Dans toutes ces affaires, le juge reconnait que des organismes privés peuvent exercer
une mission de service public dont le contentieux relève de la compétence du juge
administratif, d’où l’application du droit administratif.

C. L’élément juridique du service public

Pendant longtemps, l’élément juridique était déterminant dans l’identification d’un


service public avant d’être relativisé. Il concerne la mise en œuvre de prérogative de
puissance publique. Il a été dégagé par le juge dans le cadre de l’utilisation de la méthode du
faisceau d’indice en vue d’identifier l’existence d’une mission de service public, poursuivie
par des organismes privés en dehors de tout contrat de délégation de service public conclu
avec l’administration. Cependant, il convient de distinguer entre plusieurs situations :

1ère Situation : Si c’est le législateur lui-même qui qualifie une activité de service
public, le juge est lié en ce sens que la qualification s’impose à lui.

2ème Situation : Si le législateur garde le silence, le juge se trouve dans une situation où
il est contraint de qualifier lui-même l’activité en cause.

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3ème Situation : Si c’est l’autorité administrative qui a qualifié une activité de service
public, le juge peut toujours requalifier le service.

Depuis l’arrêt Narcy, CE 28 Juin 1963, le juge avait considéré qu’une personne privée
qui assure une mission d’intérêt général sous le contrôle de l’administration et qui est doté à
cette fin de prérogatives de puissance publique, est chargé de l’exécution d’un service public.

La prérogative de puissance publique constitue un privilège conféré à l’administration


au nom de l’intérêt général qu’elle poursuit et a pour effet d’instaurer un rapport d’autorité
entre l’administration et les particuliers.

Elle peut consister à prendre des actes de portée générale et affectant le droit des tiers
sans leurs consentements. Elle peut aussi se manifester sous forme d’un monopole reconnu à
une structure dans un domaine précis (voir CE 13 Janvier 1961, Arrêt Magnier).

Aujourd’hui, l’importance de la prérogative dans l’identification d’un service public est


relative. En effet, dans l’Arrêt APREI précité, le juge considère que même en l’absence de
prérogative de puissance publique : « une personne privée doit également, être regardée dans
le silence de la loi comme assurant une mission de service public, lorsque, eu égard à l’intérêt
général de son activité, aux conditions de sa création de son organisation ou de son
fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées, ainsi qu’aux mesures prises pour
vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparait que l’administration a
entendu lui conféré une telle mission ». Il résulte de ce considérant que la prérogative de
puissance publique peut être indifférente pour identifier l’existence d’un service public.

Section 2 : Les principes de fonctionnement du service public

C’est Louis Rolland qui identifie dans les années 30, un certain nombre de principes
fondamentaux communs aux différents services publics. On les appelle les Lois Rolland.

Elles sont au nombre de trois : L’égalité, la continuité et la mutabilité.

Paragraphe1 : Le principe d’égalité :

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Il s’agit d’un principe fondamental en droit. Rappelons que la Déclaration Universelle


des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 considère que « les hommes naissent et
demeurent libres et égaux en droit ». Le préambule de la constitution sénégalaise de 2001
consacre l’égal accès de tous les citoyens aux services publics.

Le principe d’égalité est celui auquel tous les administrés font référence dans leurs
revendications face à l’administration elle-même, ou aux autres usagers du service public.

Dès 1951, le juge administratif a considéré que le principe d’égalité a une valeur
juridique. Dans l’arrêt du CE 19 Mars 1951, Société des concerts du conservatoire, le juge
reconnait que le principe d’égalité est un principe général de droit (valeur supra décrétale et
infra législative) et le Conseil constitutionnel français l’a érigé plus tard, en principe, à valeur
constitutionnelle, dans sa décision du 27 Décembre 1973 Taxation d’office.

Au regard de son contenu, le principe signifie « qu’à situation égale, traitement égale ».
Cela veut dire que des discriminations sont possibles et peuvent être justifiées sans porter
atteinte au principe d’égalité dès lors qu’il se fonde sur une différence appréciable de
situation ; Voir CE 10 Mai 1974 Dénoyez et Chorques.

Au regard de sa portée, le principe d’égalité garantit une égalité dans le traitement des
agents chargés des services publics (égalité dans l’accès, égalité dans la carrière…). Il garantit
également une égalité dans le traitement des usagers des services publics.

En effet, l’administration offre des prestations qui doivent être les mêmes pour tous les
usagers. Mais le principe d’égalité n’interdit pas la diversité. Il exclut seulement la partialité,
les privilèges, le subjectivisme. Les discriminations sont fondées sur des critères objectifs.

Paragraphe 2 : Le principe de continuité

C’est le but d’intérêt général qui justifie ce principe. Il signifie que le service public doit
fonctionner de manière régulière sans interruption, autres que celles qui sont prévues par la
loi. Avec ce principe, les moyens du service public sont protégés.

C’est ainsi qu’il a été consacré le principe d’inaliénabilité des biens des personnes publiques.

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De même, il est aussi considéré la permanence des agents publics. Pendant longtemps,
l’application du principe de continuité interdisait la reconnaissance d’un droit de grève dans
l’administration publique. Aujourd’hui, la grève est admise, mais le respect du principe donne
droit au supérieur hiérarchique de requérir certains agents pour assurer un minimum de
service. Le principe de continuité emporte de nombreuses conséquences :

- Les services publics sont dans l’obligation de fournir des prestations aux usagers ;

- Le co-contractant de l’administration est dans l’obligation d’assurer le service public


de façon régulière ;

- Le principe de continuité explique que les recours dirigés contre les décisions de
l’administration ne sont pas suspensifs ; il a été pendant longtemps un obstacle à la
reconnaissance au droit de grève aux agents publics.

Paragraphe 3 : Le principe de mutabilité ou d’adaptation :

L’intérêt général que poursuit l’administration est, comme il a été souligné, contingent.
Cela veut dire qu’il n’est pas immuable ou pérenne (de pérennité). Il varie en fonction des
époques et les moyens pour le poursuivre doivent aussi varier. En conséquence, le service doit
évoluer en fonction des besoins et s’adapter aux changements.

Le principe de mutabilité emporte des conséquences aussi bien à l’égard des usagers du
service public, qu’à l’égard des co-contractants de l’administration. C’est ainsi que les usagers
n’ont pas le droit au maintien des prestations fournies par le service public (CE 27 Janvier
1961, arrêt Vannier).

En clair l’administration peut modifier ou supprimer les dispositions qui accordent des
avantages aux usagers. Depuis l’Arrêt du CE 10 Juin 1902, Compagnie nouvelle du gaz de
Déville-Lès-Rouen, le juge reconnait que l’administration peut modifier unilatéralement un
contrat administratif pour l’adapter aux nouveaux besoins.

Section 3 : Les différents modes de gestion des services publics :

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C’est l’étude des modalités d’organisation du service public. Elle suppose de présenter
d’abord les différentes catégories de service public qui existent. Il s’agit de différencier entre
service public administratif (SPA) et service public industriel et commercial (SPIC) parce que
la classification détermine en partie les deux modes principaux de gestion du service public à
savoir la gestion par une personne publique et la gestion par une personne privée.

Paragraphe 1 : Distinction entre SPA et SPIC

Rappelons que pendant longtemps, les services publics étaient pris en charge par les
personnes publiques à l’exclusion des organismes privés, ce qui faisait qu’aucun qualificatif
du service public n’était nécessaire.

Avec le développement de l’interventionnisme étatique, le juge a opéré une distinction


fondamentale entre service public administratif et service public industriel et commercial
(voir S.O.A, Bac d’Eloka). Il a fait appel à la méthode du faisceau d’indice pour déterminer
les critères de distinctions entre les deux types de services, distinction qui a une portée
importante en droit.

A. Les critères de distinction entre SPA et SPIC.

Dans l’arrêt du C.E, Assemblée, 16 Novembre 1956, Union Syndicale des Industries
Aéronautiques, le juge administratif a considéré qu’il faut prendre en compte trois éléments
essentiels pour distinguer le service public administratif du service public industriel et
commercial. Il s’agit de l’objet du service (1), de l’origine de ses ressources (2) et des
modalités de son fonctionnement (3).

1. L’objet du service

Il s’agit ici de s’interroger sur la nature de l’activité poursuivi par le service.

Quand on est en face d’une activité qui peut être mené par une personne privée, le
service sera considéré comme étant industrielle et commercial. Une activité de type
économique sera aussi en général considérée comme étant un service public industriel et
commercial (SPIC) ; alors qu’une activité qui n’est pas de ce type sera qualifiée de service
public administratif (SPA). Mais ce critère relatif à l’objet n’est pas facile à manier ; des

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hésitations existent. C’est ainsi qu’une partie de la doctrine propose d’opérer une distinction
entre les activités de plus grand service et les activités de plus grand profit.

2. L’origine des ressources

En principe, les SPA sont financés essentiellement à partir de taxe fiscal ou de


subvention. En revanche pour les SPIC, les ressources proviennent de redevances perçues en
contrepartie de prestations fournies.

3. Les modalités de fonctionnement

Il s’agit d’un critère qui permet de déterminer si le service public est exploité ou non
selon les méthodes comparables à celles des entreprises publiques. C’est ainsi que le juge
administratif peut être amené à prendre en compte la comptabilité du service. Un service
soumis aux règles de la comptabilité publique sera qualifié de SPA tandis que l’absence de
soumission à la comptabilité publique et une gestion selon les usagers du commerce indique
qu’on est en face d’un SPIC. Cette distinction a une portée importante.

B. La portée de la distinction

La portée est à la fois juridique et pratique. Les SPA sont soumis à un régime de droit
public et les SPIC sont régis par un régime de droit privé.

La soumission du SPA à un régime de droit publique signifie que les actes de ces
catégories de service sont des actes administratifs (leurs décisions sont exécutoires, leurs
contrats sont des contrats administratifs, leurs agents sont des agents publics, leurs biens sont
protégés par des règles spécifiques). Les usagers du SPA disposent de droit qui résultent des
principes de fonctionnement des services publics déjà évoqués : égale accès aux services
publics, un fonctionnement correcte et continu etc…

Dans les années 50, le juge a rendu une décision qui pouvait laisser des considérations
qu’on est en présence de nouvelle catégorie de service publique (service publique sociaux).
Mais dans les années 80, il revient sur la décision TC, 4 juillet 1983, Gambini.

Paragraphe 2 : Les modes de gestion des services publique

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Le service public peut être géré dans des cadres juridiques différents. On distingue la
gestion par des personnes publiques et la gestion par des personnes privées.

A. La gestion par une personne publique

La gestion du service public par une personne publique peut se faire selon deux
modalités. La personne publique peut décider de prendre directement en charge l’activité : on
parle alors de Régie. Mais il faut distinguer entre diffèrent type de régie (1). La seconde
formule consiste à recourir à la formule de l’Etablissement public ; il y a lieu de distinguer
aussi deux types d’établissements publics (2).

1. La Régie

C’est un mode de gestion du service public qui permet à une collectivité de gérer elle-
même, c’est-à-dire directement, l’activité de service public en utilisant son propre personnel,
ses propres moyens matériels et financiers. Il convient de distinguer entre la régie directe et la
régie autonome.

La Régie directe : dans ce cadre, la gestion du service publique revient à la collectivité


elle-même. Le service n’a aucune autonomie financière, il ne dispose pas d’organe de gestion,
aucune personnalité juridique ne lui est reconnu. En cas de litige avec les tiers, c’est la
personnalité de la collectivité publique qui est engagé.

La Régie autonome : elle est créée par une collectivité territoriale et est doté de la seule
autonomie budgétaire ou financière. Les produits ainsi que les charges font l’objet d’un
budget spécial annexé au budget de la collectivité locale et voté par son organe délibérant.
L’agent comptable est celui de la collectivité.

2. L’Etablissement public

Avec la formule de l’établissement publique, le lien très serré entre l’élément matériels
(activité d’intérêt général) et l’élément organique (la prise en charge par la personne publique)
se desserre mais ne se rompt pas ; puisse que contrairement à la régie, avec l’établissement
publique, la collectivité publique créatrice confie à une personne morale distincte d’elle le
soin de gérer le service public.

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En définitive, c’est une personne morale de droit public spécial qui est mise en place,
elle est appelé établissement publique. Elle assure une mission spéciale et dispose en
conséquence d’une autonomie administrative et financière. La formule de l’établissement
publique permet de concilier entre indépendance organique qui facilite une souplesse de
gestion et le contrôle de la collectivité publique par l’exercice d’un pouvoir de tutelle.
Cependant, la qualification de personne morale de droit public ne signifie pas forcément
application d’un régime de droit public ; c’est pour quoi une distinction est établie entre
établissement publique administratif (EPA) et établissement publique industriel et commercial
(EPIC).

La distinction se fonde sur le service public géré. Un EPA est une personne morale de
droit public gérant un service public administratif. Il est soumis à un régime de droit public.
Un EPIC est une personne morale de droit public gérant un service public industriel et
commercial. Il s’agit d’une personne publique qui envisage de gérer une activité dans des
conditions comparables à celles d’une personne privée ; c’est ce qui justifie l’application du
droit privé.

Pour terminer il faut souligner qu’il existe des établissements publics qualifier de double
visage parce qu’ils gèrent deux types de services public, l’un est administratif et l’autre
industriel et commercial. Il existe aussi des établissements public a visage renversé ; c’est
quand le législateur crée un EPIC et que le juge décide qu’il est administratif ou bien
l’inverse.

B. La gestion par une personne privée

C’est quand une personne publique décide de confier la gestion du service public a une
personne privée ; on dit que le service public est délégué. On distingue plusieurs types de
délégation : la concession, l’affermage, la régie intéressé et le contrat de partenariat.

1. La concession

La concession de service public est un mode de gestion par lequel une collectivité
publique charge son cocontractant de réaliser des travaux ou d’exploiter à ses frais un service
publique pendant une durée déterminée en prélevant directement auprès des usagers du

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service public des redevances qui lui reste acquis. Voir CE, 30 Mars1916, compagnie
générale d’éclairage de Bordeaux.

Le contrat de concession comporte toujours un cahier de charge. Le concessionnaire


finance la construction du service public, construit le matériel et se rémunère par les
redevances qu’il reçoit sur les usagers. Mais à l’issu du contrat l’ensemble des biens et droit
devient la propriété de la collectivité.

2. L’affermage

Le contrat d’affermage est un contrat par lequel une personne publique délègue à une
personne privée appelé fermier la gestion d’un service public en lui permettant de se
rémunérer sur les usagers mais à charge pour le fermier de lui rétrocéder une partie de cette
rémunération.

La différence principale entre le contrat de concession et celui de l’affermage réside


dans le fait que les équipements nécessaires à l’exécution du service public sont fournis par la
personne publique au fermier alors que dans le contrat de concession, c’est le concessionnaire
qui les fabrique.

3. La régie intéressée

C’est un contrat par lequel une personne publique délègue la gestion d’un service public
a une personne privée appelé régisseur mais la rémunération dépendra des résultats de la
gestion. Il s’agit d’un mode de gestion mixte du service public qui s’appuie sur le concours
extérieur d’un professionnel privé contractuellement chargé de faire fonctionner le service
public. Le régisseur est rémunéré par la collectivité au moyen de rétribution qui comprend une
redevance fixe et une partie variable provenant notamment des résultats de l’exploitation.

Le juge administratif considère que la régie intéressée ne sera considérée comme une
convention de délégation de service public qu’à la condition que la rémunération du régisseur
soit substantiellement assuré par les résultats de l’exploitation. Voir CE, 30 Juin 1999,
syndicat mixte du traitement des ordures ménagères centre ouest.

4. Le contrat de partenariat

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C’est la loi 2006-16 modifiant le COA du Sénégal qui a introduit le contrat de


partenariat. L’article 10 nouveau du COA affirme : « constitue un contrat de partenariat le
contrat par lequel une personne publique confie à un tiers pour une période déterminé une
mission globale comprenant le financement et la réalisation y compris la construction, la
réhabilitation ou la transformation d’investissement matériels ou immatériels ainsi que leur
entretient , leur exploitation ou leur gestion et le cas échéant d’autres prestation qui concours
a l’exercice par la personne publique concernée de la mission de service public dont elle est
chargé ».

Le contrat de partenariat permet d’échelonner sous une longue période le paiement des
travaux effectués par le cocontractant de l’administration. Le législateur sénégalais considère
que la durée du partenariat est déterminée en fonction de la durée d’amortissement des
investissements ou des modalités de leurs financements. Le partenaire reçoit de la personne
publique une rémunération échelonné sur la durée du contrat qui peut être lié, selon l’article
10 nouveau du C.O.A, a des objectifs de performance qui lui sont assignés.

Le conseil constitutionnel français a considéré que le contrat de partenariat est un


contrat subsidiaire en ce sens que les personnes publiques ne peuvent y recourir que pour
l’exécution de projet complexe. Voir CC 26 juin 2003, simplification du droit.

Aujourd’hui les contrats de partenariat se développent malgré les restrictions.

CHAPITRE 2 : LA POLICE ADMINISTRATIVE

Depuis la fin du XVIIIème siècle, l’Etat est investi d’une fonction globale
d’organisation de la société. A ce titre, il doit assurer le respect des règles collectives exigées
par la vie sociale.

La police administrative évoque l’ensemble des interventions de l’administration qui


tendent à imposer à la libre administration des particuliers la discipline exigée par la vie en
société dans le cadre placé par la loi. L’accent sera mis sur la notion de police administrative
(section I) ensuite il sera envisagé les différentes autorités compétentes en matière
administrative (section II) avant de voir le régime juridique applicable à la police
administrative (section III).

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Section 1 : La notion de police administrative

La police administrative peut être définie par un objet (p1) mais pour mieux la
comprendre il convient de distinguer entre les différentes catégories de police qui existent.
Ainsi, il faut marquer la différence entre police administrative et police judiciaire (p2) mais
aussi entre police administrative générale et police administrative spéciale (p3).

Paragraphe1 : L’objet de la police administrative

La police administrative a pour objet l’ordre public. Il convient alors de dire ce que
signifie l’ordre public.

Selon une définition classique, l’ordre public renvoi à une trilogie classique mais la
notion connait aujourd’hui une extension limitée.

A. La définition classique de l’ordre public

Selon l’article 119 du code général des collectivités locales du Sénégal, la police
municipale a pour objet d’assurer « le bien ordre, la sureté, la tranquillité, la sécurité et la
salubrité publique ». Ce texte s’inspire de la loi française du 5 Avril 1884 ; repris par le code
général des collectivités territoriales français selon laquelle l’ordre public comprend trois
composantes : la tranquillité, la sécurité et la salubrité. Il s’agit d’une définition qui met
l’accent sur le contenu d’où son appellation de conception matérielle de l’ordre public.

Maurice Hauriou relate que l’ordre public est un ordre matériel et extérieur. L’accent
sera mis sur les trois composantes.

_ La sécurité publique consiste à prévenir ou à faire cesser les risques susceptibles de


causer des dommages aux personnes et aux biens.

_ La tranquillité publique est définie comme le bon ordre et elle évoque la lutte contre
les désordres ou troubles liés par exemple aux manifestations publiques.

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_ La salubrité publique consiste à protéger l’hygiène et la santé publique par exemple


en règlementant le ramassage des ordures ou en prenant des mesures visant la prévention des
épidémies et pollution de toute nature.

B. L’élargissement de la trilogie

La jurisprudence administrative a ajouté aux composantes classiques de l’ordre public


déjà évoqué d’autres éléments dans une décision célèbre CE, 18 Déc 1959, Société Les Films
Lutetia. Le juge admet qu’un maire pouvait légalement interdire dans sa commune la
projection d’un film dès lors que la représentation est « susceptible d’entrainer des troubles
sérieux ». Il faut remarquer que ce qui est en cause ce n’est pas l’immoralité du film mais
seulement le fait qu’il puisse causer des troubles sur la voie publique. Ensuite, le juge
administratif à considérer dans une décision rendue par l’Assemblée du C.E, 27 octobre 1995,
Commune de Morsang-Sur-Orge que « le respect de la dignité de la personne humaine est une
des composantes de l’ordre public »

Dans la décision rendue par le C.E. le 3 juin 1938, Société des Usines Renon, le juge
avait soutenu que l’esthétique faisait partie des composantes de l’ordre public mais il est
revenu sur cette décision en jugeant illégal un arrêté de police municipale réglementant
l’esthétique des monuments funèbres CE, 18 février 1972, Chambre Syndicale des Entreprises
Artisanales du Bâtiment de la Haute Garonne. Dans le même sens, le juge a annulé une
mesure prescrivant l’enlèvement de voiture délabré dans un entrepôt privé aux motifs que
celles-ci ne présentent aucun risque pour la « sécurité, la tranquillité ou la salubrité
publique », CE, 9 juillet 1975, Commune de Janvry.

En France, le législateur a adopté une loi en date du 11 octobre 2010 interdisant la


dissimulation du visage dans l’espace publique. Il ne s’est fondé sur aucun des composantes
connues jusqu’ici de l’ordre public bien au contraire il a invoqué les exigences du « vivre
ensemble » qui seront alors considérés comme des composantes de l’ordre public.

Cette finalité étendue de l’ordre public permet de distinguer la police administrative


générale de la police judiciaire.

Paragraphe2 : Distinction entre police adm générale et police judiciaire

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La distinction entre police administrative générale et police judiciaire est établie sur la
base d’un critère fondé sur l’objet ou le but (A) et la distinction a une portée importante au
plan juridique (B).

A. Le critère de la distinction

La distinction entre police administrative générale et police judiciaire ne peut être faite à
partir d’un critère organique parce que ce sont les mêmes autorités qui peuvent détenir à la
fois des pouvoirs de police administrative et des pouvoirs de police judiciaire. Dès lors le
critère de la distinction entre les deux types de police est fondé sur le but en vue du quel les
autorités de police ont agi. La police judiciaire tend à réprimer une infraction pénale et cette
tâche fait partie de la fonction judiciaire. La police administrative générale quant à elle tend à
prévenir les troubles, à préserver l’ordre public. Ce critère en apparence claire peut être
difficile à mettre en œuvre pour deux raisons au moins :

D’abord une opération de police administrative peut se transformer en police judiciaire


et dans ce cas le juge recherchera quelle est l’opération dominante. En effet, ce sont les
mêmes personnelles de gendarmerie et de police qui sont à la fois autorités de police
administrative et de police judiciaire. Ensuite si la police administrative est fondée sur la
prévention et la police judiciaire sur la répression, existe-t-il une opposition fondamentale
entre ses deux buts ?

En réprimant le comportement d’un délinquant, la police judiciaire contribue à la


prévention de l’ordre public qui pourrait résulter de l’absence de sanction pénale. De même,
l’interdiction de certaines manifestations par la police administrative générale pour prévenir
des troubles peut aussi revêtir un caractère répressif. C’est sans doute à cause de cette
connexité que le critère de distinction entre police administrative générale et police judiciaire
est donné par le juge en se fondant ou en privilégiant une approche casuistique. Dans l’arrêt
rendu par le conseil d’Etat 11 Mai 1951, arrêt Baud ; une personne a été mortellement blessé
au cours d’une opération de police mise en œuvre pour rechercher un malfaiteur, le juge
considère que les mesures prises par l’administration correspondent à des activités de police
judiciaire dès lors que les décisions ou opérations en causes sont en relation avec une
infraction pénale.

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Dans une seconde décision 7 Juin 1951, Noualek ; le juge adopte une démarche a
contrario en indiquant que les opérations qui ne sont pas en relation avec une infraction pénale
déterminée relèvent de la police administrative.

B. La portée de la distinction

C’est surtout au regard du juge compètent pour connaitre des litiges nés des opérations
de police administrative ou de police judiciaire que la distinction a son importance en droit.

Dans un système de dualité de juridiction, la police administrative relève en principe de


la compétence du juge administratif. Il revient à ce dernier d’annuler une décision de police
administrative (une autorisation ou un refus d’autorisation). C’est aussi le juge administratif
qui est compètent pour réparer les préjudices qui peuvent résulter des opérations de police
administrative. En revanche, les litiges nés des opérations de police judiciaire relèvent de la
compétence des tribunaux judiciaire devant lesquelles sont portés les actions en dommages et
intérêts exercés par les victimes d’opération de police judiciaire.

Il faut, en fin, souligner que la police judiciaire est une activité exclusivement prise en
charge par l’Etat tandis que la police administrative peut être exercée soit au nom de l’Etat
soit au nom d’une personne morale de droit publique.

Paragraphe 3 : Distinction entre PAG et police administrative spéciale

Rappelons que la police administrative générale consiste en un pouvoir de prendre toute


mesure applicable à l’ensemble des administrés sur un territoire déterminé destiné à préserver
l’ordre public. A l’inverse, les polices administratives spéciales n’existent qu’à partir du
moment où un texte les prévoit expressément. Les deux polices administratives (Générale et
Spéciale) ont en commun d’être des activités de surveillance visant le maintien de la paix
sociale mais alors que la police administrative générale a pour mission la protection de l’ordre
public, les polices administratives spéciales ne poursuivent que les buts qui leurs sont assignés
par les textes qui leur crées. Le caractère spécial résulte du fait que le domaine d’intervention
d’une police administrative spéciale est strictement délimité. En définitive, deux éléments
essentiels permettent de distinguer la police administrative générale de la police
administrative spéciale. Il s’agit du but poursuivi (A) et de l’autorité compétente (B).

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A. La distinction fondée sur le but

Les polices administratives spéciales ont la caractéristique de ne pas avoir pour objet les
composants de l’ordre public. Elle s’applique en effet à certain lieu, Ex : monuments
historiques, gars, aérodromes, édifices menaçant ruine. Elles s’appliquent aussi à certaines
activités telles que la chasse, la pèche, le cinéma, internet, affichage etc.

La police administrative spéciale s’applique enfin à certaines catégories d’individus tels


que les étrangers.

Le deuxième élément qui permet de distinguer la police administrative générale de la


police administrative spéciale est le recours à des autorités différentes.

B. La distinction fondée sur l’autorité compétente

Les autorités compétentes en matière de police administrative spéciale sont différentes


de celles qui sont chargés de l’activité de police administrative générale. Ce sont les textes qui
fondent les polices administratives spéciales qui reconnaissent souvent à des autorités qui ne
sont pas compétentes en matière de police administrative générales attributions pour exercer
des pouvoirs de police spéciale. C’est ainsi qu’en générale, le ministre chargé de l’intérieur
exerce la police des étrangers tandis que son homologue des transports exerce la police des
aéroports ou des chemins de fer.

Chacun des éléments de distinction (basé sur l’objet et basé sur l’organe) entre police
administrative générale et police administrative spéciale présente des limites. C‘est l’existence
d’un texte pour la police administrative spéciale qui est l’élément fondamentale de distinction
entre police administrative générale et police administrative spéciale (arrêt Labonne 1919).
Les règles applicables à la police administrative générale ne sont pas à même de prendre en
charge les activités des polices administratives spéciales. De même, les autorités en charge de
la police administrative générale sont différentes de celles en charge des polices
administratives spéciales, excepté le maire et le préfet qui sont en même temps autorités de
police administrative générale et autorités de police administrative spéciale.

Section 2 : Les autorités compétentes en matière de police administrative

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Rappelons que la police administrative a pour objet de régir le comportement des


particuliers en vue de poser des limites indispensables à la vie en société. Les autorités de
police administrative sont alors les autorités qui ont reçus compétence pour édicter les
mesures visant cet objet.

L’aménagement de la police administrative permet de distinguer entre les autorités de


police administrative générale (P1) et les autorités de police administrative spéciale (P2) ce
qui donne lieu à des concours de police (P3).

Paragraphe 1 : Les titulaires de police administrative générale

Il convient de distinguer entre les autorités au niveau national (A) et les autorités au
niveau local (B).

A. Les autorités nationales

Il s’agit principalement du président de la république et du premier ministre.

Le président de la république : au Sénégal le président de la république dispose d’un


pouvoir règlementaire autonome et à ce titre il est investi d’un pouvoir général en matière de
police administrative, voir article 42 et suivant de la constitution du 22 juin 2001.

En France c’est la jurisprudence Labonne du C.E 8 Aout 1919 qui dispose : « Il


appartient au chef de l’Etat en dehors de toute disposition législative et en vertu de ces
pouvoirs propres de déterminer les mesures de police applicable dans l’ensemble du
territoire ». En claire, le président de la république dispose de pouvoir de police générale.

Le premier ministre : au Sénégal, le constituant a opté pour un exécutif bicéphale. Au


terme de l’article 57 de la constitution : « le premier ministre dispose de l’administration et
nomme aux emplois civile déterminés par la loi. Il assure l’exécution des lois et dispose du
pouvoir réglementaire sous réserve du respect des prérogatives reconnus au président ». La
reconnaissance d’un pouvoir d’exécution des lois au premier ministre signifie l’attribution
d’une compétence réglementaire en matière de police administrative parce que le maintien de
l’ordre public crée les conditions favorables à l’exécution des lois.

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Pour ce qui concerne les ministres, en principe ils ne disposent pas de pouvoir
autonome pour prendre des mesures de police ayant une portée nationale. Toutefois, un
ministre peut recevoir délégation compétence pour exercer des pouvoirs de police, c’est ainsi
que le ministre de l’intérieur joue un rôle important en matière de police administrative, parce
qu’il est le supérieur hiérarchique des personnels de police et des autorités déconcentrés
compétentes en matière de police administrative générale. A ces autorités nationales s’ajoute
des autorités locales.

B. Les autorités locales

Il s’agit d’abord des autorités déconcentrées et ensuite des autorités décentralisées


particulièrement l’autorité municipale.

1. Les autorités déconcentrées :

Elles concernent le gouverneur de région, le préfet et le sous-préfet au Sénégal. Dans


leurs localités respectives, ces autorités disposent d’attributions plus ou moins étendues en
matière de police administrative. Elles exercent leurs pouvoirs au nom de l’Etat. Le personnel
de police en service est placé sous leur autorité.

_ Le sous-préfet assure le maintien de l’ordre dans les communes rurales.

_ Le préfet dispose en cas de carence divers d’un pouvoir de substitution, c’est-à-dire


qu’il peut en cas de défaillance du maire et après le mise en demeure resté infructueuse,
prendre les mesures nécessaires au rétablissement de l’ordre.

2. Les autorités décentralisées :

L’article 107 du code des collectivités locales nouveau reconnait que le maire est le
représentant du pouvoir exécutif auprès de la population. A ce titre il est chargé, sous
l’autorité du représentant, de l’exécution des mesures de suretés générales. Le maire est aussi
le représentant de la collectivité locale et à ce titre il est chargé de pouvoir, au mesure relative
à la voirie municipale : c’est pourquoi on parle de la double fonction du maire (représentant
de l’Etat et représentant de la localité).

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Paragraphe 2 : Les titulaires de la police administrative spéciale

Ce sont les textes instituant les polices spéciales qui désignent les autorités qui en sont
détentrices, c’est pourquoi il n’existe aucune difficulté pour les identifier. Les ministres qui ne
disposent pas de pouvoir de police administrative générale sont les principales autorités de
police administrative spéciale, mais il convient de remarquer que certaines autorités de police
administrative générale (maire et Préfet) sont aussi des autorités de police administrative
spéciale. C’est tout l’intérêt d’étudier le concours de police.

Paragraphe 3 : Le concours de police

L’existence de plusieurs polices et la reconnaissance de plusieurs autorités pour exercer


les pouvoirs de police oblige à fixer des règles visant à harmoniser les rapports entre les
autorités ou à concilier entre les différentes mesures de police. Il convient de distinguer entre
plusieurs situations.

D’abord il existe un concours entre deux polices administratives générales et un


concours entre police administrative générale et police administrative spéciale.

A. Concours entre deux polices administratives générales

Il résulte de la jurisprudence qu’une autorité locale investi du pouvoir de police générale


peut aggraver sur son territoire les mesures de police prises par l’autorité centrale, voir C.E,
18 Avril, 1902, Commune de Néris-Les-Bains où le juge administratif considère « qu’aucune
disposition n’interdise au maire d’une commune de prendre, sur le même objet et pour sa
commune, pour des motifs propres à cette localité, des mesures plus rigoureuse ».

Il faut préciser que l’autorité locale est habilitée à aggraver les mesures prises par
l’autorité supérieur mais ne peut pas les assouplir, c’est l’application de l’adage qui affirme
« qu’il n’existe pas de violation dans le sens de l’aggravation, il n’existe que dans le sens de
l’indulgence »

B. Concours entre police administrative générale et police administrative spéciale

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C’est le cas où un ministre a délivré un visa d’exploitation à un film ; le maire, investi


d’un pouvoir de police administrative générale, pourrait-il interdire la diffusion du film sur
son territoire ? Le juge administratif a répondu par l’affirmative.

Dans l’arrêt C.E, 18 Déc 1959, Société des Film Lutetia, le juge considère qu’un maire
responsable du maintien de l’ordre dans sa commune peut interdire sur le territoire de celle-ci
la représentation d’un film auquel le visa ministériel d’exploitation a été accordé mais dont la
projection est susceptible d’entrainer des troubles sérieux ou d’être en raison du caractère
immorale dudit film et de circonstance locale préjudiciable à l’ordre public. L’autorité de
police administrative générale peut aggraver la mesure de police prise par l’autorité spéciale
pour tenir en compte les situations locales mais il lui est interdit d’assouplir la mesure.

La jurisprudence récente en France a précisé les modalités de concours de compétence


entre le maire et l’autorité centrale. C’est ainsi que lorsqu’une règlementation confère un
pouvoir de police spéciale à l’autorité centrale le maire ne peut intervenir que dans deux
situations :

La première a déjà été invoqué, c’est pour prendre en compte les circonstances locales
que l’autorité centrale n’est pas censée connaitre.

La deuxième situation, c’est quand il existe un péril grave et imminent ; l’autorité est
fondée à agir parce qu’il existe un danger démontré, ce qui le différencie du principe de
précaution qui constitue un danger incertain. Quel est maintenant le régime juridique
applicable à la police administrative ?

Section 3 : Le régime juridique applicable à la police administrative

Parce que la police administrative a pour objet le maintien de l’ordre qui se caractérise
par l’édiction de mesure générale régissant les comportements individuels et collectifs,
l’exercice de la police administrative constitue à la fois une menace pour les libertés et une
condition de leur réalisation. La police administrative est alors entre autorité et liberté. Un
encadrement est nécessaire ; il vise à adapter les opérations de police aux différentes
circonstances. On distingue plusieurs régimes : le régime préventif (P1), le régime déclaratif
(P2) et les régimes d’exceptions (P3).

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Paragraphe 1 : Le régime préventif

Il s’agit d’un régime qui repose sur le principe selon lequel « seul ce qui est autorisé est
permis ». Il revêt deux formes essentielles : les interdictions (A) et les autorisations (B).

A. Les interdictions

L’interdiction fait obstacle à l’exercice d’une activité. Elle est limitative de la liberté
individuelle ou collective ; elle peut être permanente ou ponctuelle.

Le juge administratif a développé une jurisprudence par laquelle il contrôle l’étendue


des pouvoirs de police.

D’abord il a considéré que les interdictions générales et absolu ne sont pas en principe
admise, voir C.E, 22 Juin 1951, Daudignac. Ensuite si l’autorité administrative dispose de la
possibilité d’interdire l’exercice d’une liberté publique, la mesure qu’elle prononce doit être
justifiée. Elle doit être proportionnée à la menace que l’exercice de la liberté fait courir à
l’ordre public.

Dans l’arrêt du C.E, 18 Mai 1933, Benjamin, le juge considère que pour qu’un maire
interdise légalement une manifestation, il faut que la menace soit exceptionnellement grave et
qu’il ne dispose pas de force nécessaire pour permettre à la réunion de se tenir.

B. Les autorisations

L’autorisation impose que l’exercice d’une activité ou d’une liberté soit soumis à
l’obtention préalable d’un accord de la part de l’autorité administrative compétente.
L’exercice de l’activité ou de la liberté est suspendu à l’autorisation. Le principe n’est donc
pas la liberté.

L’autorisation peut prendre plusieurs formes : permis, visa, licence.

Dans le cadre de l’exercice du pouvoir de police, notamment en matière de police


spéciale il arrive souvent que l’autorité administrative délivre non pas une autorisation mais
donne une injonction de réaliser certaines opérations. Il en est ainsi de la police des édifices

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menaçant ruines ; ou encore en matière d’installation classées où une injonction de réaliser les
travaux peut être ordonnée par l’autorité de police.

A côté de ce régime il y a un autre appelé le régime déclaratif.

Paragraphe 2 : Le régime déclaratif

Il s’agit d’un régime dans lequel l’exercice d’une activité ne peut être poursuivi
qu’après sa déclaration à l’autorité administrative compétente. Il faut analyser d’abord la
déclaration avant de voir ses conséquences.

A. La déclaration

Elle est un procédé permettant d’informer l’administration d’une activité. L’autorité


administrative réceptionne la déclaration. Pour l’exercice de certaines libertés, les textes
prévoient des délais pour procéder à la déclaration. Ex : droit de grève (il faut un préavis d’un
moi).

Quand les conditions sont remplies ; l’autorité administrative délivre un récépissé. Reste
à voir les conséquences de la déclaration.

B. Les conséquences de la déclaration

La loi peut prévoir qu’une autorité de police saisie d’une déclaration oppose une
interdiction. En effet, en matière de manifestation publique le préfet informé peut interdire la
manifestation s’il estime que des risques existent.

Une autre conséquence de la déclaration est qu’elle peut aussi aboutir à l’édiction de
mesure à mettre en œuvre pour poursuivre une activité. Ex : des installations classées.

Enfin, le délai de la validité de la déclaration est limité dans le temps.

Pour la liberté de manifestation, l’autorisation n’est valable que pendant 15 jours à


défaut de quoi elle devient caduque.

Paragraphe 3 : Les régimes d’exception

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En période de crise ; les pouvoirs de l’autorité administrative sont accrus et ils dérogent
aux règles et principes qui encadre traditionnellement les activités de police. C’est
l’importance des atteintes à l’ordre public qui justifient le régime d’exception.

On peut distinguer entre l’état d’urgence (A) et l’état de siège (B).

A. L’état d’urgence

A la suite de violence grave ; l’état d’urgence peut être déclaré par l’autorité
administrative. Il a pour objet d’élargir très sensiblement les pouvoirs de police. En effet
l’autorité administrative est compétente pour procéder à des interdictions de séjours, les
assignations à résidence, l’interdiction de circulation pendant certaines heures, l’instauration
d’un couvre-feu, la fermeture de certains lieux publics, les interdictions de réunion, les
perquisitions de jour comme de nuit sans l’autorisation du juge, le contrôle de la presse etc.

Mais les pouvoirs de police restent entre les mains des autorités civiles. C’est la
différence principale avec l’état de siège.

B. L’état de siège

Il est prévu par la constitution contrairement à l’état d’urgence. L’article 52 de la


constitution sénégalaise du 22 Janvier 2001 affirme que « lorsque les institutions de la
république, l’indépendance de la nation, l’intégrité du territoire nationale ou l’exécution des
engagements internationaux sont menacés d’une manière grave et immédiate et que le
fonctionnement régulier des pouvoirs publics ou des institutions est interrompu, le président
de la république dispose de pouvoirs exceptionnel ». Il peut à cet effet prendre toute mesure
utile tendant à rétablir le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et des institutions.

La caractéristique principale de l’état de siège est qu’il transfert les pouvoirs des mains
de l’autorité civile à l’autorité militaire. Il permet la création de juridiction militaire.

Le président de la république ne peut réviser la constitution pendant l’exercice des


pouvoirs exceptionnels. Et le parlement se réuni de plein droit dans les 15 jours pour ratifier
les mesures de nature législative mise en vigueur par le président de la république.

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La lutte actuelle menée par certains Etats contre le terrorisme a mis en évidence les
limites des régimes d’exception qui s’avère peut adapter au contexte de ce qui est qualifié de
« terrorisme de guerre ». En effet les dispositions constitutionnelles contenues dans la
constitution française de 1958 reprise par la plupart des constitutions des Etats africains
francophones n’envisagent que l’hypothèse d’une menace grave et imminente qui pèse sur les
institutions, l’indépendance de la nation, l’intégrité du territoire national, l’exécution des
engagements internationaux. Il s’agit d’une réponse à une insurrection armée, une guerre ou
une crise grave. Aujourd’hui, la situation que rencontrent les Etats en cas d’attaque terroriste
ne correspond pas à ces hypothèses parce que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics
n’est pas interrompu et donc le transfert des pouvoirs aux mains des autorités militaires est
difficilement concevable. C’est pourquoi des modifications constitutionnelles sont envisagées
en vue d’aménager un état d’urgence en cas de péril imminente résultant d’atteinte grave à
l’ordre public.

TITRE 2 : LES MOYENS D’ACTION DE L’ADMINISTRATION

L’administration a en charge l’intérêt général, pour agir elle utilise des moyens
juridiques, financiers, humains et matériels.

Les moyens juridiques correspondent à des actes et il existe deux types d’acte
juridique : l’acte administratif unilatéral (chap1) et l’acte administratif bilatéral ou contrat
administratif (chap. 1)

CHAPITRE1 : L’ACTE ADMINISTRATIF UNILATERAL

L’acte administratif unilatéral se rattache à l’administration, il est porteur d’une norme


unilatérale, on parle d’acte normateur ; deux questions se posent : d’abord comment identifier
l’acte administratif unilatéral (section1) ensuite quel est son régime juridique (section2).

Section 1 : L’identification de l’acte administratif unilatéral

L’acte administratif unilatéral est un acte qui se rattache à l’administration et qui affecte
les droits et obligations des tiers sans leur consentement, plusieurs éléments peuvent alors être
utilisés pour définir l’acte administratif unilatéral, il existe un élément organique qui met

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l’accent sur la personne à laquelle se rattache l’acte, il existe aussi un élément matériel qui
renvoie à la substance de l’acte, on dira que l’acte administratif unilatéral est un acte
normateur c'est-à-dire qu’il crée des droits et obligations qui s’imposent.

En définitive, l’acte administratif unilatéral comporte deux caractères : il s’agit d’un


caractère administratif (P1) et un caractère matériel (P2).

Paragraphe 1 : Le caractère administratif

L’acte administratif unilatéral est une décision prise par une autorité administrative c’est
ce qui permet de le distinguer d’autres catégories d’acte qui existent.

A)A. L’auteur de l’acte administratif unilatéral

Pendant longtemps, il a été admis que l’acte administratif unilatéral ne peut émaner que
des personnes publiques à l’exclusion des personnes privées, l’évolution des modes de gestion
des services publics déjà étudiés (affermage et autres) a remis en cause la pertinence de cette
approche traditionnelle ; l’auteur de l’acte administratif unilatéral peut être soit une personne
publique (1) soit une personne privée (2)

1. Les personnes publiques

Il s’agit de l’état, des collectivités locales ou encore des établissements publics, les
autorités qui sont à la tête de ces structures ont la qualité d’autorité administrative ; mais il
n’est pas toujours aisé d’identifier l’autorité parce qu’il existe la technique du dédoublement
fonctionnel par laquelle une même autorité peut intervenir à plusieurs titres ex : le maire.

Tous les actes des personnes publiques ne sont pas des actes administratifs. Le juge
administratif a, cependant, distinguer entre les actes qui ont un objet de puissance publique,
qui mettent en œuvre des PPP et des actes de gestion privée qui ont un objet de droit privé. La
particularité des seconds est qu’ils ne concernent que les rapports de droit privé des
collectivités publiques. S’ils sont administratifs par leur auteur les actes de gestion privée ne
le sont pas par leur contenu ; il s’agit par exemple des décisions individuelles relatives à la
gestion privée du domaine des collectivités publiques. Tous ces actes sont soumis au droit
privé et leurs contentieux ne relèvent pas du juge administratif.

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2. Les personnes privées

Les personnes privées peuvent prendre des actes qui sont des actes administratifs
unilatéraux. Rappelons que l’administration peut confier la gestion d’un service public à une
personne privée qui va poursuivre l’activité d’intérêt général en lieu et place de
l’administration. Pour se faire, l’administration leur accorde des moyens de puissance
publique.

La jurisprudence en a tiré la conséquence selon laquelle un organisme privé peut


prendre un acte administratif en vue d’exécuter le service public qui lui est confié voir CE
ASS 31 JUILLET 1942 MONPEURT ou encore CE 2 AVRIL 1943 BOUGUEN

B)B. La distinction entre AAU et d’autre catégorie d’acte

L’acte administratif unilatéral est une décision prise par une autorité administrative c’est
ce qui permet d’exclure de la catégorie tous les actes juridictionnels (1) les actes législatifs (2)
et les actes de gouvernement (3).

1. Les actes juridictionnels

L’acte juridictionnel est un acte pris par un organisme juridictionnel chargé de trancher
un litige.

La justice est un service public qui remplit une fonction appeler fonction
juridictionnelle, elle consiste à trancher les litiges survenus entre les personnes. La
jurisprudence a opéré une distinction selon laquelle les actes qui se rapporte à la fonction
juridictionnelle sont insusceptible de contestation devant le juge administratif ; ce sont des
actes juridictionnels voir TRIBUNAL DES CONFLITS, 27 NOV 1952, PREFET DE LA
GUYANNE.

En revanche les actes qui se Rapportent à l’organisation et au fonctionnement des


juridictions sont des actes administratifs qui peuvent être déférés au juge administratif VOIR
CE, 17 AVRIL 1953, FALCO ET VIDAILLAC.

2. Les actes législatifs

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L’acte législatif désigne l’acte pris par le parlement, le CE a admis dans un arrêt célèbre
CE 6 NOV 1936 ARRIGHI que les actes émanant des organes législatifs ne sont pas des actes
administratifs et donc ne sont pas de la compétence du juge administratif, seuls les actes du
parlement concernant uniquement le personnel des assemblées sont des actes administratifs
mais quand le parlement habilite les autorités administratives à prendre des actes, le juge
considère que ces actes sont des actes administratifs donc susceptible de recours voir CE 6
DEC 1906 COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER ET AUTRES ou encore CE 24 NOV
1961 FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE POLICE .

3. Les actes de gouvernement

Il s’agit d’une catégorie d’acte qui concerne les rapports entre le gouvernement et le
parlement ou encore les actes qui se rapportent à la conduite des relations diplomatique soit
entre Etats soit entre Etat et organisation internationale, le juge a considéré que les actes de
gouvernement ne sont pas des actes justiciables, c'est-à-dire susceptible de contestation.

Si l’acte administratif peut être défini par son caractère administratif, il reste que c’est
son aspect normateur qui permet de compléter son identification.

Paragraphe 2 : Le caractère normateur

L’acte administratif unilatéral véhicule une norme unilatérale (et la norme est le contenu
de la règle de droit), la norme est le produit d’une manifestation de volonté par laquelle
l’autorité administrative régit unilatéralement les droits et obligations des administrés mais
tous les actes de l’administration ne présentent pas un caractère normateur. Il convient alors
de distinguer entre décision exécutoire et mesures d’ordre intérieur (A) et entre actes
réglementaires et actes non règlementaires (B).

1.A. Décision exécutoire et mesure d’ordre intérieur

Les décisions exécutoires sont des actes qui font grief ; c’est-à-dire qui modifient
l’ordre juridique. Ils affectent les droits et obligations des tiers sans leur consentement. Les
décisions exécutoires sont des actes obligatoires, ils comportent des droits et obligations pour
les administrés. Un élément important dans le régime de la décision exécutoire est la
contestation de l’acte. La décision exécutoire est la décision que tout administré qui y a un
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intérêt peut déférer devant le juge de l’excès de pouvoir ; ce n’est pas le cas des autres
mesures d’ordre intérieur.

Les mesures d’ordre intérieur désignent au sens large des catégories d’actes qui ne sont
pas destinés à modifier l’ordonnancement juridique ; en conséquence elles ne créent ni de
droit ni d’obligation. Il s’agit essentiellement des circulaires et des directives.

_ La circulaire : une circulaire est un acte pris par un chef de service adressé à ses
subordonnés par lequel, il assure le bon fonctionnement de l’administration (exemple d’un
acte demandant aux agents de faire des propositions de modification du règlement), ou il
précise l’interprétation qu’il convient de donner à un texte (loi, règlement, décision de justice
etc.) et la manière dont il conviendra d’appliquer le texte.

On distingue deux types de circulaire : les circulaires interprétatives et les circulaires


réglementaires.

Les circulaires interprétatives se limitent à rappeler, en le commentant, le droit en


vigueur.

Elle n’ajoute ni de retranche en un texte en vigueur, elles ne font pas grief (affecter les
droits et obligations des tiers sans leur consentement) et ne peuvent pas alors être contestées
devant le juge.

Les circulaires réglementaires, c’est quand à travers l’interprétation, l’autorité rajoute


des dispositions normatives. Dans ce cas, des normes juridiques générale et impersonnelle
sont posées ; l’autorité ne se limite plus à l’interprétation, elle pose de nouvelles règles : la
circulaire devient réglementaire. La jurisprudence considère que les circulaires réglementaires
sont admises en contestation devant le juge : voir CE ASS 29 JANVIER 1954 INSTITUTION
NOTRE -DAME DU KREISKER, plus récemment, la jurisprudence a évolué vers une
distinction entre circulaire impérative et circulaire non impérative CE 18 DEC 2002
MADAME DUVIGNIERES.

_Les directives : il arrive qu’un texte reconnait la compétence d’une autorité


administrative de prendre une décision sur la base de donnée concrète mais ce texte peut ne
pas lui dicter d’avance la conduite à tenir pour prendre la décision, il se contente de lui
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indiquer les orientations générales, des recommandations que l’autorité doit prendre en
considération pour prendre sa décision.

Le juge administratif reconnait l’existence des directives mais il considère qu’ils ne sont
pas des actes créateurs de droit. Cependant, les directives ne sont pas dépourvues d’effet
juridique, en effet elles ne sont pas admises en contestation devant le juge mais un administré
peut se prévaloir d’une directive et l’administration est fondé à motiver cette décision en se
référant à la directive sans commettre d’erreur de droit.

Pour terminer, l’administré peut attaquer une décision prise par l’administration en se
fondant sur une directive qui n’a pas été suivie voir CE 11 DEC 1970 CREDIT FONCIER DE
France.

Il convient de distinguer entre acte normateur et acte non normateur, il importe aussi de
souligner que les actes normateurs eux même comportent deux types d’actes : actes
réglementaires et actes non réglementaires.

A.B. Acte réglementaire et acte non réglementaire

Les actes réglementaires sont des décisions qui contiennent des normes générales et
impersonnelles et qui ont vocation à s’appliquer à des individus ex : un décret régissant les
règles statutaires d’un corps de fonctionnaire. Ces actes règlementaires ne s’adressent pas à
des personnes déterminées.

Les actes non règlementaires renvoient aux actes individuels, ils s’adressent à une
personne ou à un groupe de personne nommément désignés ex : arrêté portant nomination
d’un fonctionnaire, un permis accordant l’autorisation de construire.

Section 2 : Le régime juridique de l’acte administratif unilatéral

Etudier le régime juridique de l’acte administratif unilatéral revient à analyser son


élaboration (P1), son entrée en vigueur (P2) et son application dans le temps (P3).

Paragraphe 1 : L’élaboration de l’acte administratif unilatéral

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L’élaboration d’un acte administratif unilatéral est soumise à des règles, à des
conditions qui résultent du principe de légalité ou principe de juridicité. L’acte administratif
unilatéral doit respecter des règles de compétence.

A. Les règles de procédure LES REGLES DE COMPETENCE

Il convient d’insister sur les compétences en droit administratif, sur ses éléments
constitutifs, sur ses caractéristiques et enfin, sur les hypothèses de substitution de
compétences.

1. L’importance de la compétence

Les règles de compétences revêtent une importance particulière pour plusieurs raisons.
D’abord, elles exigent de l’autorité administrative une certaine attitude. Cela veut dire qu’une
autorité administrative ne peut s’approprier une compétence confiée à une autre autorité
(administrative), elle ne peut non plus modifier l’ordre des compétences en ce sens qu’une
autorité subordonnée ne peut empiéter sur la compétence d’une autorité supérieure et vice-
versa. Une autorité ne peut non plus se substituer à une autre autorité de rang égal. Ensuite,
l’autre raison est que les règles de compétences sont d’ordre public, c’est à dire qu’elles
peuvent être convoquées à tout moment de la procédure par les parties et le juge peut soulever
d’office la méconnaissance des règles de compétences (cf. CS, 27 mai 1981, Amadou lamine
BA). Enfin, l’intervention de l’autorité administrative, à postériori pour régulariser la
compétence, ne couvre pas sa méconnaissance.

2. Les éléments de la compétence

La compétence comprend trois (3) éléments : matériel, spatial et temporel.

_ L’élément matériel est appelé compétence ratione materie. Il signifie qu’une autorité
administrative n’est habilitée à intervenir que dans le domaine où sa compétence est prévue
par la loi. A tous les niveaux de l’administration, il est procédé à une délimitation des
compétences ; CS, 05 juillet 1979, Aminata SALL et autres.

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NB : voir Cours d’Institutions Administratives : délimitation de compétences entre


pouvoir central et pouvoir local ; cf. Constitution : délimitation des compétences du
gouvernement, du législateur, du pouvoir réglementaire, etc.

_ L’élément spatial, aussi appelé compétence ratione loci, il signifie qu’une autorité
administrative n’est habilitée à intervenir que dans le champ géographique délimité par la loi.
On distingue ainsi entre compétences nationales, locales, régionale etc. CS, 29 janvier 1975,
Séga Seck FALL.

_ L’élément temporel ou compétence ratione temporis, signifie qu’au moment de


prendre la décision, l’autorité administrative doit être compétente (cf. principe de continuité
du SP à l’exception du cas de circonstances exceptionnelles).

3. Les caractères de la compétence

La compétence présente plusieurs caractères. On peut retenir deux essentiellement : la


compétence est permanente et elle est impérative.

▪ La permanence de la compétence signifie que celle-ci peut être mise en œuvre autant
de fois que nécessaire par l’autorité à qui elle est confiée qui peut agir à tout instant. Dans
l’hypothèse où un délai est fixé à l’autorité administrative pour prendre une décision sauf si le
délai est déclaré impératif – le juge ne prononce ni nullité, ni forclusion ni déchéance. Il
considère que le délai vise seulement à accélérer la procédure et non à empêcher l’autorité
administrative d’user de son pouvoir règlementaire après l’expiration du délai.

▪ La compétence impérative signifie que le titulaire d’une compétence ne dispose


d’aucun droit sur la compétence. Il n’en est qu’un dépositaire. En conséquence, il ne peut ni
aliéner, ni transmettre, ni refuser d’exercer la compétence. Cette dernière est une charge qui
s’exerce et ne peut être ni abandonnée, ni confiée à une autre autorité. Une autorité
administrative ne peut pas refuser une compétence qui lui est reconnue sous prétexte de la
complexité, d’une difficulté de la question. L’adage dit : « devant l’administration active, il
n’y a jamais de place à la question préjudicielle ». Cette rigidité de la compétence connaît
toutefois des assouplissements.

4. La substitution de compétences
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Elle concerne les situations où la compétence n’est pas exercée par l’autorité qui en est
normalement investie mais par une autre qui vient se substituer à elle. On distingue plusieurs
hypothèses : la délégation, l’intérim et la suppléance.

La délégation est une pratique fréquente à tous les niveaux de l’administration.


Elle permet de mieux répartir le travail administratif. On distingue entre délégation de pouvoir
et délégation de signature. La première consiste en un transfert de compétences des mains
d’une autorité administrative investie de la compétence à une autre autorité administrative
généralement subordonnée appelée délégataire. L’autorité compétente délégant est dessaisie
de la compétence au profit du délégataire. La délégation de compétences pose trois conditions
:

1- Le délégataire doit être désigné es qualité.

2- Seule une révocation explicite peut mettre fin à la délégation.

3- Le délégataire est dessaisi de ses pouvoirs tant que dure la délégation. Quant à la
délégation de signature, elle est plus simple et plus usitée dans l’administration. Il s’agit d’un
procédé par lequel une autorité compétente se décharge sur une personne désignée
nommément pour prendre des décisions en son nom. Dans le cadre de cette délégation, le
délégant n’est pas dessaisi et il peut à tout moment évoquer sa signature. Les décisions prises
en vertu d’une délégation ont pour auteur le délégant et non le délégataire. Qu’il s’agisse de la
délégation de pouvoir ou de signature, il faut noter que la délégation doit être prévue par un
texte. La décision portant délégation doit être expresse, publiée et doit aussi fixer, avec
précision, l’objet et l’étendue des compétences déléguées. Une délégation ne peut, en effet,
porter sur l’ensemble des compétences.

L’intérim et la suppléance : C’est l’hypothèse où le titulaire de la compétence


est empêché, soit définitivement, soit temporairement. Il pourra alors être remplacé
provisoirement par un collaborateur. La suppléance est prévue par un texte. Lorsque le cas
d’empêchement intervient, elle joue automatiquement. L’intérim n’est pas nécessairement
prévu par un texte. Une autorité administrative peut choisir elle-même la personne chargée
d’assurer son intérim et fixer l’étendue et la durée de ses pouvoirs. L’intérim prend fin dès
que l’empêchement du titulaire cesse.

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remarque:Il arrive que la jurisprudence accepte que des actes administratifs unilatéraux pris par
des autorités qui ne sont pas investies de la compétence soient des actes valides. Il faut
distinguer deux situations : la théorie des fonctionnaires de fait et la théorie de l’apparence
(cf. CE, 28 juin 1918, Heyriès ; CE, 28 février 1919, Dames Dol et Laurent). Dans ces
décisions le juge considère qu’en cas de situations anormales mettant l’administration dans
l’impossibilité de respecter la légalité normale, la décision prise par une autorité
administrative qui n’est pas investie, en temps normal, de la compétence est légale (valide).
La théorie de l’apparence c’est la situation où l’autorité ayant pris la décision a l’apparence,
aux yeux des administrés, d’une autorité compétente (Exemple, le bureau d’un Conseil
municipal qui prend des décisions, confère des droits à des particuliers et que quelques temps
après, le juge annule les élections ayant mis en place ce bureau).

B. Le respect des règles de forme

Le droit administratif a la caractéristique d’être un droit pas très formaliste. Les


décisions administratives peuvent être écrites, orales, implicites (décision de refus lorsque, par
exemple, l’administration refuse de répondre à un recours d’un particulier durant un certain
temps (réponse négative vis-à-vis du particulier requérant). En France, depuis le début de
2015, le silence de l’administration dans ce cas de figure vaut désormais une réponse positive,
donc en faveur du particulier) ou explicites. Les contraintes formelles existantes concernent le
contreseing et la motivation.

1. Le contreseing

Au Sénégal, les règles relatives au contreseing sont proposées par la Constitution. Aux
certains
termes de l’article 43 de la constitution de 2001, les actes du Président sont contresignés par le
Premier Ministre. Certains actes ne sont pas soumis à la procédure. Le contreseing signifie
une signature apposée au bas d’un acte administratif et qui reflète que l’acte émane de deux
autorités signataires. Le contreseing est une règle de forme en ce sens qu’il doit être
matériellement apposé sur l’acte. Lorsqu’il est formellement exigé, son absence entraine la
nullité de l’acte pour vice de forme. le juge administratif considère que l'acte doit etre signer par l'autorité compétente et qu'un acte
non signé est un acte qui n'est pas authentifié.

2. La motivation

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Motiver un acte administratif, c’est donner les raisons de fait et de droit qui l’expliquent
et le justifient. Ces motifs doivent être réguliers. Il s’agit d’une condition de légalité de l’acte.
Enil effet,
convient de distinguer entre les motifs de droit et les motifs de fait. les motifs de droit renvoient
un acte administratif doit avoir une base légale et celle-ci correctement interprétée.
Si la base légale n’existe pas, le juge considère qu’on est en présence d’un défaut de base
légale. En revanche, si elle existe et est mal interprétée, le juge considère qu’il s’agit d’une
erreur de droit. Quant aux motifs de fait, il s’agit ici des éléments matériels qui fondent la
décision. Ils doivent aussi exister. Si les motifs de fait sont inexistants, le juge considère que
l’acte est illégal ; CS, 20 mars 1963, Amadou Alpha KANE. Il faut noter qu’en l’absence d’un
texte, le juge considère que la motivation n’est pas obligatoire. Elle est donc facultative.
Toutefois, c’est l’énoncé des motifs qui est facultatif, mais l’existence des motifs est
obligatoire. Le juge administratif ne considère pas qu’il existe un principe général de droit qui
imposerait aux autorités administratives de motiver toutes les décisions qu’elles prennent.
C’est le sens de la jurisprudence de la Bhave (CE, 19 avril 1954). Le juge admet qu’en
l’absence de dispositions législatives ou réglementaires contraires, les décisions
administratives n’ont pas à comporter d’indications des motifs sur lesquels elles sont fondées.
Le juge administratif sénégalais applique cette décision. Ainsi, les actes administratifs
favorables à leur destinataire et les règlements, n’ont pas à être motivés (CS 05 juillet 1961,
dans l'arret rendu
Doudou KANE). Mais le principe de non motivation supporte quelques exceptions. Le juge par le turbunal
départemental de
reconnaît que l’autorité administrative ne peut se fonder sur un acte illégal pour défaut de DAkar le 7 avril
motivation pour poursuivre pénalement un particulier. En matière de liberté, notamment dans 1981 CHEIKH
ANTA DIOP
le cadre de l’exercice des pouvoirs de police, le juge sénégalais exige qu’une mesure
défavorable soit motivée (CE, 27 octobre 1993, Seydou Mamadou DIARRA). Si l’autorité
administrative doit respecter des règles de forme, l’élaboration de l’acte administratif est aussi
soumise à des règles de procédure.

C. Les règles de procédure

Dans certaines hypothèses, le droit aménage des procédures dont le but est d’informer
ou de protéger les particuliers qui sont les destinataires de l’acte administratif unilatéral. C’est
ainsi que certaines décisions ne pourront être prises par l’autorité administrative qu’après
avoir respecté la contradiction ou après avoir consulté un organisme en vue de recueillir son
avis. On distingue entre la procédure contradictoire (1) et la procédure consultative (2).

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1. La procédure contradictoire

Lorsque l’administration prend une décision portant sanction, elle doit, au préalable,
respecter les droits de la défense. C’est la règle dite « Audi alteram partem ». Dans l’arrêt CE
05 mai 1944, Dame Veuve Trompier-Gravier, le juge administratif reconnaît que le respect
des droits de la défense constitue un principe général de droit (supérieur au décret et inférieur
à la loi) au profit des administrés. Plus tard, le juge constitutionnel français reconnaît qu’une
peine ne peut être infligée qu’à la condition que soit respecté le principe de « la légalité des
délits et des peines, le principe de non rétroactivité de la loi pénale d’incriminations plus
sévères ainsi que le respect du principe des droits de la défense ». Et ces exigences ne
concernent pas seulement les peines prononcées par les juridictions répressives, elles
s’étendent à toute sanction ayant un caractère d’une punition prononcée par une autorité de
nature judiciaire ou administrative (CS, 05 juillet 1961, Doudou KANE précité).
L’administration peut aussi être amenée à respecter une procédure consultative.

2. La procédure consultative

Il existe des hypothèses où, préalablement à la prise de décision, l’autorité


administrative consulte un organisme chargé de donner un avis. La consultation peut être soit
facultative, soit obligatoire.

- La consultation facultative, c’est lorsque l’autorité administrative saisit un organisme


sans y être juridiquement obligé. C’est aussi le cas lorsque la consultation est une simple
possibilité prévue par un texte. Dans ce cas, l’avis donné par l’organisme ne lie pas
l’administration qui garde intacte sa liberté de décision. Ainsi, elle pourra apporter à son acte
toutes les modifications qui lui semblent nécessaire.

- La consultation obligatoire, c’est l’hypothèse où l’autorité administrative est tenue


juridiquement de solliciter l’avis de l’organisme avant de prendre sa décision. L’avis peut être
obligatoire ou conforme. L’avis est obligatoire lorsque l’autorité administrative doit,
préalablement à la prise de décision, consulter impérativement l’organisme consultatif sans
être obligé de suivre l’avis donné. Ici, c’est la consultation qui est obligatoire. Si
l’administration prend la décision sans consulter l’organisme, celle-ci est entachée de vice de
procédure. L’avis conforme c’est lorsque l’administration doit consulter un organisme et

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suivre aussi l’avis donner par l’organisme. Dans ce cas, la décision administrative doit être
conforme à l’avis. Si l’avis de l’organisme est défavorable, il signifie une interdiction donnée
à l’administration de prendre la décision. L’acte administratif élaboré selon ce régime a
vocation à s’appliquer dans le temps.

Paragraphe 2 : L’application de l’acte administratif dans le temps

Rappelons que l’acte administratif unilatéral a un caractère impératif. L’administration


bénéficie, en effet, du privilège du préalable. L’analyse de l’application de l’acte administratif
unilatéral dans le temps soulève trois questions essentielles, il faut d’abord examiner le cadre
juridique dans lequel l’acte entre en vigueur (A), avant de voir le régime de son exécution (B)
pour enfin analyser les règles régissant sa disparition (C).

A. L’entrée en vigueur de l’AAU

Le privilège du préalable de l’administration rend opposables ses décisions (1) qui


doivent toutefois respecter le principe de non rétroactivité (2).

1. L’opposabilité

Il s’agit d’analyser la date à compter de laquelle les normes contenues dans un acte
administratif unilatéral produisent des effets à l’égard de leurs destinataires. C’est
l’opposabilité de l’acte. L’entrée en vigueur dépend de la nature de l’acte (voir classification
des actes administratifs). On distingue entre la publication et la notification.

- La publication est un mode de publicité qui consiste à porter à la connaissance des


administrés, de façon impersonnelle, l’existence et le contenu d’une décision administrative.
Les actes réglementaires font l’objet d’une publication au Journal Officiel. Le défaut de
publication entraine l’inopposabilité de l’acte aux administrés. Au Sénégal, c’est la loi du 06
février 1970 qui réglemente la publicité des actes administratifs réglementaires. Un acte
réglementaire est opposable à partir du jour où le Journal Officiel qui le contient a été diffusé
selon un délai variable suivant les localités.

La notification est un mode de publicité consistant à informer personnellement le


destinataire de l’acte de son existence et de son contenu. Dans la pratique, la notification est

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généralement faite par le moyen d’une lettre recommandée avec accusé de réception. La
notification est le mode normal de publicité des actes individuels. Le juge administratif admet
que les décisions favorables entrent en vigueur dès leur signature, CE, 19 décembre 1952,
Demoiselle MATTEI.

1.2. Le principe de non rétroactivité

Tout comme le législateur soumis au principe selon lequel « la loi ne dispose que pour
l’avenir. Elle n’a point d’effets rétroactifs » l’autorité administrative ne peut disposer que
pour l’avenir lorsqu’elle édicte des décisions, qu’elles soient réglementaires ou
juridictionnelles. Dans la décision CE, 25 juin 1948, Société le journal L’Aurore, le juge a
posé le principe selon lequel une décision administrative qui méconnaît le principe de non
rétroactivité est illégale. Des exceptions existent toutefois. Il en est ainsi lorsque le législateur
l’autorise (la rétroactivité) de manière expresse. C’est aussi le cas lorsque l’administration
décide de retirer un acte administratif ou encore lorsqu’elle tire les conséquences d’une
annulation contentieuse CE, 26 décembre 1925, Rodière. Dans certaines situations le juge
administratif impose à l’autorité administrative l’édiction de mesures transitoires CE, 24 mars
2006, Soc. KPMG. C’est pourquoi le retrait est soumis à des conditions.

B. Le régime d’extinction des AAU


1. Le retrait de l’AAU

Si un acte réglementaire entre en vigueur, et donc, produit des effets, alors qu’il est
illégal, il peut être retiré à la condition qu’il redevienne définitif. En clair, le retrait n’est
possible que dans le délai du recours contentieux. Et si un recours administratif ou
juridictionnel est intenté, le retrait ne peut se faire que tant que l’autorité saisie ne s’est pas
prononcé. L’acte ne peut être retiré que quand il devient définitif. Lorsqu’on s’adresse
directement à l’auteur de l’acte, c’est un recours gracieux, recours hiérarchique c’est
lorsqu’on s’adresse au supérieur hiérarchique donc nous avons deux types de recours. En
revanche si l’acte n’a pas encore produit d’effets, n’a pas un commencement d’application et
d’exécution, l’autorité administrative est compétente pour le retirer voir CE 21 décembre
1966 société gracier.

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- Pour les actes créateurs de droit si l’acte est régulier le retrait est impossible sauf si la
loi le prévoit ou le bénéficiaire lui-même en fait la demande. Si l’acte est irrégulier le retrait
est soumis à des conditions strictes la jurisprudence préserve le principe de sécurité. Les actes
ne peuvent être retirés que par deux conditions. D’abord l’acte doit être irrégulier ou illégal
ensuite dans le délai du recours contentieux. C’est le sens de l’arrêt du CE 3 janvier, Dame
Cachet. Cette jurisprudence est consacrée au Sénégal, CE 19 avril 1967 Samba Cor Sarr.
Cette jurisprudence fait coïncider le délai du retrait au délai du recours contentieux. Elle
soulève cependant des difficultés notamment pour ce qui concerne le retrait des actes
individuels intéressant les tiers. Dans l’arrêt CE 26 octobre 2001 Ternon, le juge a procédé à
une déconnexion des délais de recours et de retrait. En considérant que l’administration « ne
peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droit si elle est illégale que dans le
délai de 4mois suivant la décision ».

- Pour les décisions implicites elles concernent le silence gardé par l’administration
saisie d’une demande. Leur particularité est qu’elles ne peuvent pas être publiées. Dès lors,
elles sont susceptibles d’être retirées à tout moment. Ce qui peut entrainer une instabilité de la
sécurité juridique. C’est pourquoi le juge administratif encadre le régime de retrait des
décisions implicites en excluant la possibilité de retirer une autorisation tacite illégale au
motif que l’acte n’a pas été publié ; CE d’Etat 14 novembre 1969 Eve. La loi 13 novembre ne
vaut plus refus mais vaut accord en France.

2. L’abrogation de l’AAU

Abroger un acte consiste à mettre fin à son existence sans toucher aux effets qu’il a pu
produire depuis son entrée en vigueur. Il arrive que certains actes disparaissent de
l’ordonnancement juridique en dehors de toute intervention de l’autorité ad. En effet certains
actes ad comportent soit un terme extinctif ex un délai une date ou un évènement aléatoire
dont la survenance entraine la disparition de l’acte. Soit une condition extinctive ex permis de
construire délivré et considéré comme étant périmé si les travaux de construction n’ont pas
démarré dans les 2ans. Mais le plus souvent c’est l’autorité ad elle-même qui prononce
l’abrogation de l’acte parce que l’abrogation n’affecte que les effets à venir de l’acte et la
maintient intacte les effets produits dans le passé lad dispose d’une certaine marge de
manœuvre. Elle est libre en effet d’abroger à tout moment les actes ad unilatéraux créateurs

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decréateurs de droit. La seule condition posée concerne le respect des règles de compétences
de forme de de procédures. Les administrés n’ont pas de droit acquis au maintien d’un
règlement voire CE 6 décembre 1907 compagnie des chemins de fer de l’est. En revanche
pour les actes créateurs de droit l’abrogation n’est possible que si la décision est illégale voire
CE d’Etat 6mars 2009 Coulibaly ou cours suprême du Sénégal 27 janvier. Il faut souligner
que le principe d’intangibilité des effets individuels s’oppose à l’abrogation des actes
individuels légaux. Toutefois dans certaines situations l’autorité ad est compétente pour
prendre un acte contraire. S’agissant des actes réglementaires leur abrogation est en principe
possible l’autorité ad est tenue d’office ou à la demande d’une personne intéressée d’abroger
expressément tout règlement illégal sans objet voir CE 3fevrier 1989 Alitalia. Pour important
que soit le procédé de l’acte ad unilatéral il n’occulte l’autre moyen juridique que les
personnes publiques utilisent pour agir. Il s’agit du contrat administratif.

CHAPITRE 2 : LE CONTRAT ADMINISTRATIF

Tous les contrats passés pour l’administration ne sont pas des contrats administratifs.
Les contrats administratifs présentent certaines spécificités par rapport aux contrats de droit
privé. Le caractère administratif renvoie généralement à un ensemble d’intérêts reconnus à
l’administration la plaçant dans une situation prédominante par rapport au cocontractant.
Aujourd’hui, sous l’influence de la construction du droit communautaire européen ou africain,
le caractère exorbitant du contrat administratif s’atténue. Le contrat administratif se rapproche
de plus en plus du contrat privé même s’il garde certaines spécificités. L’étude du contrat
administratif postule d‘abord de l’identifier (S1) avant d’envisager son régime juridique (S2),
des moyens pour identifier l’acte administratif de manière législative ; c’est-à-dire les contrats
de marché publique, les contrats de partenariat, les contrats de délégation du service public.

Section sec1 : L’identification du contrat administratif

Rappelons que tous les contrats passés par l’administration ne sont pas administratifs.
Ce qui signifie que l’administration passe des contrats de droit privé. Se pose alors la question
de savoir comment identifier le contrat administratif du contrat privé. Il faut distinguer deux
hypothèses. Il existe des contrats déterminés par voie législative ou par voie règlementaire
(p1) et des contrats déterminés par voie jurisprudentielle (2), c’est ce qui pousse à procéder à
une classification des contrats administratif (p3).
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Paragraphe 1 : La déterminationion des contrats par voie législative ou


réglementaire

Au Sénégal la qualification textuelle (c.-à-d. lois et règlements) du contrat revêt une


importance capitale pour deux raisons au moins. D’abord l’article 7 du code des obligations
de l’administration affirme que seule une disposition expresse de la loi ou du règlement peut
accorder à un contrat le caractère administratif. Ensuite un texte législatif ou réglementaire
peut, à tout moment, attribuer la qualité de contrat administratif à une catégorie de convention
auquel une personne morale de droit public fait partie. Cela veut dire que l’autorité législative
ou réglementaire peut intervenir pour infirmer ou confirmer une qualification
jurisprudentielle. En appliquant ses dispositions, les contrats d’occupation du domaine de
l’Etat (domaine public) sont des contrats administratif et l’autorité réglementaire qualifie de
marché public les contrats administratifs à travers le code des marchés publics. Cette
intervention législative et réglementaire a pour objet d’éviter des contradictions
jurisprudentielles dans la qualification des contrats. Mais en même temps elle favorise un
développement des contrats administratifs parce qu’il arrive que le législateur ou le règlement
fait entrer dans la catégorie des contrats administratifs les conventions dont ni l’objet ni la
nature ne justifient une telle détermination. Il en résulte une certaine incohérence dans
l’identité du contrat administratif. Ce dernier est conçu à l’origine comme devant être distinct
du contrat de droit commun en raison de son objet qui est la participation à la satisfaction de
l’intérêt général justifiant alors la compétence d’un juge spécifique chargé d’appliquer un
droit spécifique. C’est d’ailleurs pourquoi les qualifications jurisprudentielles persistent
encore malgré l’affirmation de la place centrale de la loi ou du règlement.

Paragraphe 2 : la détermination du contrat par voie jurisprudentielle

La qualification jurisprudentielle est importante même si elle joue un rôle relativement


secondaire par rapport à la qualification législative. Le législateur ne peut pas tout prévoir à
l’avance. Il existe de nombreux contrats laissés sans qualification et l’intervention même du
législateur n’empêche pas les personnes publiques de créer des contrats dont il convient de
déterminer la nature. La tâche revient au juge de procéder à la qualification ; pour ce faire, il
utilise deux critères essentiels : un critère organique (A) et un critère matériel qui est alternatif
(B).

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A. leLe critère organique du contrat

Il s’agit d’un critère essentiel dans l’identification jurisprudentielle d’un contrat. La


doctrine évoque une condition nécessaire. Un contrat administratif suppose en effet la
présence directe ou indirecte d’une personne publique. S’il s’agit d’un contrat conclu entre
deux personnes publiques, le juge administratif admet qu’un tel contrat revêt en principe un
caractère administratif impliquant la compétence des juridictions administratives pour
connaitre des litiges portant sur les manquements aux obligations en découlant voir TC 21
mars 1983 UAP. L’article 8 du COA au Sénégal reprend cette jurisprudence en ses termes :
« seuls les conventions auxquelles une personne de droit public fait partie peuvent constituer
des contrats administratifs par nature ». Mais il existe des hypothèses où le contrat entre deux
personnes publiques n’est pas un contrat administratif. Lorsqu’un contrat fait naitre des
rapports de droit privé entre deux personnes publique le juge considère qu’il s’agit d’un
contrat privé ; voir tribunal des conflits 17 décembre1962 Dame Bertrand. A l’inverse, un
contrat conclu entre deux personnes privées est en principe un contrat de droit privé même si
l’une d’elle est chargée d’une mission de service public CE 13 décembre 1963 syndicats des
praticiens de l’art dentaire. Mais là aussi le principe connait des aménagements. Un contrat
conclu entre deux personnes privée est qualifié de contrat administratif si une personne
publique intervient dans l’opération. Cette intervention peut se faire selon plusieurs
modalités : d’abord la personne publique peut donner un mandat, au sens civil du terme, à une
personne privée d’agir à son nom et pour son compte. Ce contrat conclu par la personne
privée sera considéré comme étant un contrat administratif ; voir CE 30 janvier 1931 Société
Brosselte. Ensuite, en l’absence de tout mandat donné, le juge administratif peut être amené à
considérer certaines structures comme étant des organismes transparents par lesquels une
personne publique agit. Les contrats conclus par cette personne privée seront qualifiés
d’administratifs comme s’ils étaient conclus par la personne publique elle-même. Enfin le
juge peut considérer, dans certains cas, que certains contrats, en raison de leur objet, sont
conclus par des personne privées pour le compte d’une personne publique : il s’agit
notamment des contrats concernant les travaux routiers ou autoroutiers, voir TC 8 juillet 1963
Entreprise Peyrot. Si le critère organique est nécessaire, il n’est toutefois pas suffisant. Pour
être qualifié d’administratif le contrat doit, en plus de la présence d‘une personne publique,
répondre à un critère matériel qui est alternatif.

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A.B. Le critère alternatif

Un contrat conclu par une personne publique ou par une personne privée selon les
conditions évoquées, est administratif soit parce qu’il contient une clause exorbitante du droit
commun, soit parce qu’il participe à l’exécution d’un service public. Dans ce cas on dit que le
contrat à une relation avec le service public.

1. La relation du contrat avec le service public

Il s’agit ici de prendre en considération l’objet du contrat. Ainsi un contrat est


administratif soit parce qu’il permet de confier l’exécution même d’un service public à un
cocontractant de l’administration CE 20 avril 1956 Epoux Bertin, soit parce qu’il entraine une
participation de collaboration du cocontractant du service public ; c’est le sens de l’arrêt du
TC 25 novembre 1963 Dame Veuve Maze. La nouvelle formulation de l’article 10 du code
des obligations de l’administration issues de la loi 2006 – 16 du 30 juin 2006 postule que « la
participation d’un cocontractant à un service public est réalisé par voie de délégation du
service public sur la base d’un contrat de partenariat ». C’est dire que le législateur Sénégalais
adopte la démarche inverse du juge français. Il ne s’agit pas de déterminer le contrat
administratif à partir de la détermination du cocontractant mais de concevoir le contrat
administratif comme ayant pour objet de confier même l’exécution d’une mission de service
public au cocontractant. Le second critère alternatif concerne la clause exorbitante du droit
commun.

2. La clause exorbitante du droit commun

Ce critère est consacré par l’article 12 du COA : l’emploi des procédés de gestion des
services publics se manifeste par la présence, dans la convention, de clauses exorbitantes du
droit commun. Le législateur sénégalais codifie un critère dégagé en 1912 par l’arrêt du CE
31 juillet, Société des Granits porphyroïde des Vosges. Dans cet arrêt le juge considère que le
contrat avait pour objet unique des fournitures à livrer selon les règles et conditions des
contrats intervenus entre particuliers. Une clause est une disposition du contrat. En
considérant son objet la clause exorbitante du droit commun permet au juge de déterminer si
la personne, partie d’un contrat, se comporte comme une institution utilisant ses prérogatives
et ses sujétions ou comme un simple particulier. La clause exorbitante du doit commun est

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difficile à cerner. Le législateur sénégalais l’identifie plus qu’il ne le définie. Au terme de


l’article 15 du COA, la clause exorbitante du droit commun peut résulter derésulter de la
rupture de légalité contractuelle au profit de l’un des contractants, de l’octroi au
cocontractant de prérogatives à l’égard des tiers, de l’inclusion d’une règle spécifique du
régime juridique desjuridique des contrats administratifs ou encore du but d’intérêt général
ayant inspiré la conclusion du contrat.

La doctrine définit la cause exorbitante de droit commun d’une manière négative. Elle
est présentée comme étant une clause inusuelle, inhabituelle de droit privé. Georges Vedel
remarque que la clause exorbitante s’écarte du modèle idéal des relations entre particuliers.

Paragraphe 3 : La classification des contrats administratifs

Il existe une variété de contrats administratifs. Trois catégories retiennent l’attention :


les marchés publics (A) les conventions de délégation de service publics (B) et les contrats de
partenariat (C).

A. lesLes marchés publics

Au Sénégal le décret 2014 - 12 du 2 septembre 2014 portant code des marchés public
définie le marché public comme un contrat écrit, conclu à titre onéreux par une autorité
contractante pour répondre à ses besoins en matière de travaux, de fourniture ou de service, ou
à des besoins combinant ces différentes catégories. Les marchés publics sont des contrats
administratifs à l’exception de ceux passés par les sociétés nationales et les sociétés anonymes
à participation publique majoritaire qui demeurent des contrats de droit privé. Les marchés
publics occupent une place importante dans l’économie. Ils constituent une grande variété. La
doctrine à recours à des critères pour identifier une typologie des marchés publics. On
distingue deux critères : un critère matériel et un critère financier. En considérant le critère
matériel, il est possible de distinguer entre trois types de marchés publics. Les marchés de
travaux publics qui sont définis par leur objet : ils servent soit d’exécution, soit conjointement
la conception et l’exécution d’un ouvrage ou de travaux de bâtiment moyennant un prix. Les
marchés de fourniture : il s’agit de tous les marchés ayant pour objet l’achat, la prise en
crédit-bail, la location ou location-vente de produits ou de matériels. Les marchés de service :
il s’agit de tous les marchés ayant pour objet la prestation des services ; ex : la tenue de

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comptabilité, service financier, gardiennage. En privilégiant un critère financier, il est possible


de passer les marchés publics en plusieurs catégories basées sur leur montant. Ainsi on
distingue entre les très petits marchés, les petits marchés et les grands marchés.

A.B. Les conventions de délégation de service public

Elles ont déjà été étudiées dans le cadre de l’exercice du service public. L’article 10 du
COA affirme que les conventions de délégation de service public sont des contrats
administratifs. Rappelons que la convention de délégation de service public a pour objet de
confier la gestion d’un service public à un délégataire ; en lui permettant de se rémunérer sur
les résultats provenant des revenus de l’exploitation du service. La délégation de service
public peut prendre plusieurs formeplusieurs formes : la concession, l’affermage, la régie
intéressée.

B.C. Les contrats de partenariat

L’article 10 du COA qualifie les contrats de patenterait de contrats administratifs.


Rappelons que le contrats de partenariat est définie comme étant un contrats par lequel une
personne publique confie à un tiers, pour une période déterminée, une mission globale
comprenant le financement et la réalisation y compris la construction, la réhabilitation ou la
transformation d’investissement matériel ou immatériel ainsi que leur entretient, leur
exploitation ou leur gestion et, le cas échéant, d’autres prestations qui concourent par la
personne publique concernée de la mission de service public dont elle est chargé. L’un des
spécificités du contrat de partenariat est le mode de rémunération du cocontractant. Elle
s’échelonne sur la durée du contrat et peut êtrepeut être lié à des objectifs de performance qui
lui sont assignés.

Section 2 : Le régime juridique du contrat administratif

Les contrats administratifs sont soumis à des règles spécifiques au droit public et qui
sont donc différentes de celles applicables aux contrats entre particuliers. Cependant la
distinction n’est pas aussi branchée. Sur de nombreux points il n’existe pas de différence entre
les exigences du droit civil et celles du droit administratif. L’étude du régimedu régime

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juridique revient à analyser la formation du contrat administratif (P1), son exécution (P2) et
son régime d’extinction (P3).

Paragraphe 1 : La formation du contrat administratif

La formation du contrat administratif est un processus qui comporte plusieurs phases.


D’abord il faut un accordun accord de volonté des cocontractants (A) ; ensuite les clauses du
contrat seront élaborées (B) avant que le contrat ne soit conclu (C).

A. Accord de volonté des cocontractants

Le contrat administratif, à l’instar du contrat de droit civil, repose sur un accord de


volonté. Le consentement des parties doit exister et il doit être exempt de vice. Le juge
administratif français reconnait le principe de la liberté contractuelle que le législateur
sénégalais reprend en ces termes : « les personnes administratives choisissent librement les
modes de conclusionde conclusion de leurs contrats ». Mais si en droit commun la liberté
contractuelle signifie que les personnes contractantes choisissent librement leurs contrats,
s’engageant par leur propre volonté de déterminer librement le contenu du contrat, en droit
public la spécificité du contrat administratif impose un encadrement strict de la liberté
contractuelle. Il existe en effet des cas où l’administration ne dispose d’aucune marge pour
choisir son cocontractant. C’est le cas par exemple lorsqu’elle est tenue de contracter avec
toute personne qui remplitqui remplit les conditions pour recevoir en vertu du contrat la
prestation sollicitée. C’est le cas aussi de l’adjudication qui a été pendant longtemps usité
comme mode normal de passation des contrats administratifs. Elle consiste à offrir le marché
au soumissionnaire qui offre le prix le plus bas, le moins disant. Avec les progrès du droit
communautaire, la politique de lutte contre la corruption et les exigences de la transparence de
la vie économique, le législateur encadre la liberté de choix des personnes publiques. Ainsi
pour les marchés publics dépassant certains seuils. La règlementation des soins à des
modalités précises de publicité et au respect de procédure visant à sauvegarder les principes
de concurrence et d’aitéagité et à éviter le favoritisme et le détournement de deniers publics.
Depuis 2006 le code des obligations de l’administration retient essentiellement deux modes de
passation des contrats administratifs : il s’agit de l’appel d’offre qui constitue la procédure de
droit commun de passation des marchés publics et la procédure de marché de gré à gré.

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1. L’appel d’offre

Il est défini à l’article 60 du code des marchés publics qui reprend l’article 26 du COA :
c’est la procédure par laquelle une autorité contractante attribut le marché sans négociation,
après appel à la concurrence, au candidat qui remet l’offre conforme évalué, le moins disant
sur base de critères quantifiés en terme monétaire préalablement porté à la connaissance des
candidats, et qui réunit les critères de qualifications également mentionnés dans le dossier à la
candidature. L’appel d’offre peut être ouvert ou restreint. Il est ouvert quand tout opérateur
économique peut remettre une offre et restreint lorsque seules peuvent remettre une offre les
candidats qui y ont été directement invité par l’autorité contractante.

2. Les marchés de gré à gré

Ils sont dénommés aussi marché par l’entente directe. C’est lorsque l’autorité
contractante engage directement les discussions avec un ou plusieurs opérateurs économiques
et attribue le marché aux candidats qu’elle a retenu. Les opérateurs économiques doivent
accepter de se soumettre à un contrôle des prix spécifiques durant l’exécution des prestations.
Une fois le cocontractant choisi et la volonté exprimée, il reste à élaborer les clauses du
contrat.

B. L’élaboration des clauses du contrat

Dans les contrats de droit privé les parties élaborent les clauses du contrat qui
constituent par elles-mêmes la loi commune. Ce n’est pas le cas dans les contrats
administratifs où les clauses sont déterminées en général de manière unilatéral et le
cocontractant est placé devant une alternative : soit accepter lesaccepter les conditions posées
par l’administration dans leur intégralité, soit les rejeter en bloc. Les conditions du contrat
administratif sont préalablement établies par l’administration dans les cahiers de charge. 2
questions sont à posées : que contiennent les cahiers de charge d’un contrat administratif (1)?
Quels effets juridiques s’attachent à ces cahiers de charges (2) ?

1. Le contenu des cahiers de charge

C’est l’article 12 du COA qui définit le cahier de charge par leur objet : ils permettent
de déterminer les conditions dans lesquelles les marchés sont exécutés. Les cahiers de charge
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comprennecomprennent cinq (5) séries de documents ; il s’agit : des cahiers de clause


administrative générale, des cahiers des clauses techniques générales, des cahiers de
prescription spéciale, des cahiers de clause administrative particulière, et du cahier de clause
de technique particulière.

a. Les cahiers des clauses administratives générales

Ils fixent les dispositions administratives applicables à tous les marchés portant sur une
même nature (nature (travaux, fourniture de courant ou service). Ils sont établisétablis par
l’organe chargé de la régulation des marchés publics en relation avec les ministères intéressés
et sont approuvés par décret.

b. Les cahiers des clauses techniques générales

Ils fixent les conditions de spécification technique applicables aux prestations de même
nature. Ils sont élaborés par l’organe chargé de la régulation en relation avec le département
technique concerné et sont approuvés par arrêté du premier ministre intéressé.

c. Les cahiers de prescription spéciale

Ils fixent les clauses propres à chaque marché. Ils sont établis par l’autorité contractante.
Ils concernent les clauses administratives particulière et les clauses techniques particulières.
Ils doivent contenir notamment la définition précise de l’objet du marché et son mode de
passation. Les cahiers de prescription spéciale comportent obligatoirement les mutations des
articles des cahiers des clauses administratives générales et des cahiers des clauses techniques
général auxquelles ils peuvent déroger.

d. Les cahiers des clauses administratives particulières

Leur objet est de préciser le cahier des clauses administratives générales. Ils sont
établisétablis par l’autorité contractante en vue de préciser, de compléter ou de modifier le
cahier des clauses administratives générales.

e. Le cahier des clauses techniques particulières

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Il fixe les dispositions techniques nécessaires à l’exécution du marché. Ils sont


établisétablis par l’autorité contractante et rassemble les clauses techniques ou stipulations qui
donnent une prescription précises des prestations à réaliser. Ils permettent à la personne
responsable de suivre le déroulement et la bonne exécution du marché.

2. Les effets juridiques des cahiers de charge

Une fois le contrat conclu les règles contenues dans les cahiers de charge revêtent une
valeur contractuelle. Elles sont considérées comme étant élaborées conjointement par les
parties. Ainsi elles ne pourront plus être modifiées par voie générale. Ce qui ne veut pas dire
que l’autorité administrative ne pourra pas modifier les dispositions relatives aux cahiers de
clauses administratives générales. Les modifications n’affecteront pas les marchés déjà
conclus qui resteront régis par la disposition en vigueur au moment de la conclusion du
marché. Le juge administratif admet que le décret approuvant un cahier de clause
administrative générale peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.

C. La conclusion du contrat

L’article 47 du COA affirme que seule l’autorité administrative qui a qualité pour
engager la personne morale de droit commun peut conclure valablement le contrat
administratif. Le code des marchés publics du Sénégal précise qu’au jour de la phase de
préparation des marchés, l’autorité contractante doit évaluer le montant estimé des fournitures
ou travaux objettravaux objet du marché et s’assurer de l’existence de crédit budgétaire
suffisant. Elle doit aussi respecter les règles d’engagement des dépenses publiques ; c’est-à-
dire les règles de comptabilité publique. En général, pour l’administration centrale c’est le
ministre qui est habilité à signer le contrat. Pour les collectivités territoriales c’est le chef de
l’exécutif local. La conclusion du contrat constitue une règle de compétence qui est d’ordre
public. Sa méconnaissance entraine une nullité du contrat et le juge administratif considère
qu’un accord des parties ne saurait couvrir l’incompétence del’incompétence de l’agent.
L’article 9 du code des marchés publiquesdes marchés publics affirme que la conclusion du
contrat par l’agent compétent peut être subordonnée à une autorisation préalable. On peut
donner l’exemple des collectivités locales où il peut être exigé une délibération du conseil
pour autoriser l’autorité exécutive à signer une convention. Il peut aussi arriver qu’en plus de

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l’autorisation de contracter les textes exigent une approbation du contrat signé. Le contrat
signé engage les parties qui doivent s’exécuter.

Paragraphe 2 : L’exécution du contrat

L’exécution du contrat administratif met en évidence la spécificité de son régime qui est
original et dérogatoire au droit commun des contrats. En droit civil les conventions
légalement formées tiennent lieu de loi aux parties qui l’ont faite. Il en résulte trois
caractéristiques importantes. D’abord le contrat de droit commun à une force obligatoire en ce
sens qu’une partie ne peut s’en délier à son gré. Ensuite le contrat est immuable c.-à-d. qu’il
est interdit de modifier, selon une démarche unilatérale, les clauses du contrat. Enfin le contrat
de droit privé consacre l’égalité des parties et ne reconnait, dans le cadre de son exécution, de
privilèges ou de droits à une partie surpartie sur l’autre. Le droit public est le droit de
l’inégalité ; cela parce que la personne publique est une institution, une organisation humaine
dotée d’un statut et soumis àsoumis à une autorité commune. Le contrat administratif est un
contrat exorbitant. Le principe est consacré par le législateur et la jurisprudence. Il consiste à
écarter tous les éléments caractéristiques du contrat de droit privé. L’administration peut à
tout moment résilier le contratle contrat lorsque les besoins du service l’exigent. Il en résulte
que le contrat n’a pas de force obligatoire pour l’administration. Ensuite cette dernière peut
unilatéralement modifier le contrat il n’est donc pas immuable. Enfin quand elle s’engage
dans le contrat, l’administration continu d’exercer ses prérogatives et ne se trouve pas sur un
pied d’égalité avec son cocontractant. Mais en contrepartie, le droit administratif garantie un
certain nombre de droits aux cocontractants. L’administration dispose de droits qu’on ne
retrouve pas dans les contrats de droit commun. L’accent sera mis sur les prérogatives de
l’administration (A) et sur les droits du cocontractant (B).

A. Les prérogatives de l’administration

Elles sont nombreuses ; leur objet est de permettre à l’administration d’intervenir dans
l’exécution du contrat. L’administration dispose du pouvoir de direction et de contrôle (1), du
pouvoir de modification unilatérale (2), du pouvoir de résiliation unilatérale (3) et du pouvoir
de sanction (4).

1. Le pouvoir de direction et de contrôle

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Il est reconnu par le COA dans le chapitre intitulé de (l‘intervention de l’administration


dans l’exécution du contrat). Il faut rappeler que le principe d’autonomie, qui caractérise le
contrat de droit privé et qui signifie que le cocontractant est libre de choisir les moyens pour
exécuter ses obligations, existe aussi en droit public mais il est doublement limité. D’abord en
raison des nécessités du service public, l’administration doit intervenir dans l’exécution du
contrat pour exercer un contrôle sur son cocontractant. Ensuite le législateur, pour certaines
clauses, peut reconnaitrepeut reconnaitre à l’administration le choix des modalités
d’exécution des contrats. Le pouvoir de direction et de contrôle se traduit par la possibilité
reconnue à l’administration de donner des instructions que le cocontractant doit exécuter.
Toutefois si les ordres entrainent des charges nouvelles, l’entrepreneur ou le cocontractant a
droit à une indemnisation.

2. Le pouvoir de modification unilatérale

Ce pouvoir trouve son fondement dans les traités qui régissent le service public. Il a été
admis en 1910 par le conseil d’Etat dans son arrêt rendu le 21 mars Compagnie Générale des
GramwaysTramways. Le législateur sénégalais a consacré cette jurisprudence à l’article 109
du COA qui affirme que l’administration peut exceptionnellement modifier de façon
unilatérale certaines stipulationscertaines stipulations du contrat. La reconnaissance d’un
pouvoir de modification unilatérale à l’administration a suscité de vives controverses
doctrinales. Certains contestaient l’utilité d’un tel pouvoir tandis que d’autres s’interrogeaient
surs’interrogeaient sur la reconnaissance du pouvoir à l’administration en sa qualité de
contractante. L’exercice du pouvoir de modification unilatérale est strictement encadré ; il
doit être motivé par l’intérêt général. C’est la condition dégagée par la jurisprudence du
conseil d‘Etat 10 janvier 1902 compagnie nouvelle du gaz de Déville-lès-Rouen. Ensuite le
pouvoir de modification est règlementé. La modification qu’apporte l’administration n’est
régulière que dans la mesure où elle n’aboutit pas àpas à substituer un nouveau contrat à
l’ancien. Enfin la modification du contrat doit se limiter à une adaptation duadaptation du
contrat aux circonstances nouvelles et ne doit pas porter atteinte à l’équilibre financier du
contrat. En contrepartie le cocontractant a droit à une indemnité qui correspond à l’intégralité
de l’accroissement del’accroissement de ses charges.

3. Le pouvoir de résiliation unilatérale

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En dehors de toute faute commise par le cocontractant, l’administration peut


unilatéralement résilier le contrat par une décision à caractère réglementaire. Il s’agit d’une
prérogative générale reconnue à l’administration et qui est d’ordre public. On n’a pas besoin
de le mentionner dans le contrat. Elle existe même si aucune clause du contrat ne le prévoit ;
c’est consacré par la jurisprudence du conseil d’Etat assemblée 2 mars 1958 Distillerie- de-
Magniac- Laval. Le juge a deux compétences : compétence juridictionnelle et compétence
judiciaire. Le sénégalo-gambien pose le pouvoir de résiliation sur les du service. Au terme de
l’article 137 du COA, le pouvoir de résiliation permet d’adapter les contrats à l’intérêt général
et de supprimer ceux qui ne correspondent pas aux besoins de l’administration et du public.
La résiliation s’accompagne d’une indemnité qui couvre l’intégralité de la perte subie, du gain
manqué et éventuellement du préjudice moral causé au cocontractant de l’administration.

4. Le pouvoir de sanction

Le cocontractant de l’administration est tenu d’exécuter les obligations que lui incombe
le contrat. L’article 62 du COA précise que l’exécution doit être conforme aux modalités
prévues par le cahier des charges. Elle doit être correcte, de bonne foi, personnelle, et elle doit
intervenir dans les délais prévus. Par contre le cocontractant doit aussi exécuter les
instructions qu’il reçoit de l’administration dans le déroulement du contrat. Seule la force
majeure peut relever le cocontractant de ses obligationsses obligations. Et l’exception
d’inexécution ne peut être opposée par le cocontractant à l’administration. En d’autres terme
lorsque l’administration contractante n’exécute pas une de ses obligations, le cocontractant ne
peut se prévaloir du manquement de l’administration pour refuser d’exécuter ses obligations.
Le juge administratif vient d’apporter une dérogation à ce principe. Il reconnaitIl reconnait
que pour certains contrats de l’administration, il est possible de prévoir une clause
d’inexécution CE 8 octobre 2014 société Grenke location. Le juge affirme qu’il est toutefois
loisible aux parties de prévoir, dans un contrat qui n’a pas pour objet l’exécution même
dumême du service public, les conditions auxquelles le cocontractant de la personne publique
peut résilier le contrat en cas de méconnaissance par cette dernière de ses obligations
contractuelles. En revanche, quand le cocontractant méconnait ses obligations,
l’administration dispose du pouvoir de lui infliger unilatéralement des sanctions. Il s’agit d’un
pouvoir d’ordre public ; l’administration ne peut y renoncer à l’avance d’une manière
générale selon l’article 80 du COA. Les sanctions peuvent être pécuniaires ou coercitives.

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Enfin, les sanctions peuvent être résolutoires par laquelle l’administration résilie. Toutefois
certaines garanties sont accordées aux cocontractants. Avant l’exercice du pouvoir de
sanction, l’administration doit procéder à une mise en demeure préalable du cocontractant.
Ensuite, elle doit respecter les droits de la défense. Enfin, le cocontractant peut saisir le juge
qui vérifie la régularité de la procédure suivie par l’administration et le bien-fondé de la
sanction. L’exercice d’un pouvoir de sanction ne doit pas nuire aux droits du cocontractant.

B. Les droits du cocontractant

Le cocontractant de l’administration dispose de droits qui résultent de la théorie


générale des contrats. On peut citer l’exemple du droit au paiement des créances. Pour ce qui
concerne la théorie des contrats administratifs, le cocontractant a droit à l’équilibre financier
du contrat et à une juste rémunération compte tenue des aléas administratifs, économiques, ou
matériels qu’il pourra rencontrer dans l’exécution du contrat. Il s’agit principalement du fait
du prince (1), des sujétions imprévues (2) et de l’imprévision (3).

1. Le fait du prince

Le fait du prince est une formule du droit civil. Il désigne toute intervention de
l’administration ayant pour conséquence de rendre onéreux (coûteux) l’exécution du contrat.
Le fait du prince existe lorsque l’autorité administrative applique son pouvoir de modification
unilatéral du contrat. Il existe aussi lorsque la personne publique édicte des mesures générales
qui ont des répercussions directes et spéciales sur la situation du cocontractant. Le
cocontractant est tenu de poursuivre l’exécution du contrat. En contrepartie il a droit, au terme
de l’article 113 du COA, à une indemnité couvrant l’intégralité du préjudice subi lequel doit
être direct et certain.

2. Les sujétions imprévues

C’est l’article 118 du COA qui définit la notion de sujétion imprévue. Selon le
législateur sénégalais, constitue une sujétion imprévue, le fait matériel extérieur aux
cocontractants qui ne pouvait raisonnablement être envisagé au moment de la conclusion du
contrat et qui entraine une difficulté anormale d’exécution. Les sujétions imprévues
concernent surtout les marchés de travaux publics où des difficultés d’ordre matériel extérieur

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aux parties et imprévisibles à l’origine peuvent provoquer un surcroit anormal des charges. Ex
des intempéries revêtant un caractère exceptionnel ou encore un marché de travaux portant sur
le forage d’un tunnel où l’entrepreneur découvre une nappe d’eau insoupçonnée au départ etc.
En cas de sujétion imprévue le cocontractant est tenu de continuer l’exécution du contrat. La
sujétion imprévue ne le libère pas du contrat mais elle constitue un fait justificatif du retard
dans son exécution du contrat. En contrepartie le cocontractant a droit à la réparation du
préjudice qu’il a subi du fait de la sujétion imprévue. L’indemnité consiste, selon l’article 120
du COA de l’administration, soit dans un supplément de prix soit dans un prix tenant compte
des nouvelles conditions d’exécution du contrat.

3. L’imprévision

Les bases de la théorie de l‘imprévision ont été posées par le juge administratif dans le
célèbre arrêt du CE 30 mars 1916 compagnie générale d’éclairage de Bordeaux. Le
législateur sénégalais reprend la solution à l’article 121 du COA en ces termes : « lorsque des
circonstances extérieures à la volonté du cocontractant et imprévisibles au moment de la
conclusion de la convention bouleversent l’économie du contrat en entrainant un déficit pour
le cocontractant, ce dernier peut obtenir que l’administration contractante supporte une partie
de la perte qu’il a subi pour assurer la continuité du service ». Quatre conditions sont posées
par le COA : la première condition concerne un élément indépendant de la volonté des parties
(inondations, séisme, dévaluation de la monnaie, une nouvelle législation ou règlementation).
La deuxième condition est que l’évènement doit être imprévisible à la date de la conclusion
du contrat ; c.-à-d. que les parties ne pouvaient pas raisonnablement le prévoir ou mesurer
toutes ces conséquences. La troisième condition concerne l’effet de l’évènement : il doit en
effet entrainer un bouleversement de l’économie du contrat. Il ne s’agit pas d’un simple
déficit ni d’un manque à gagner mais d’une situation telle que le cocontractant ne peut plus
faire face à ces obligations. La quatrième condition : l’évènement perturbateur doit se
produire dans les délais d’exécution de la convention. Toutefois si l’évènement intervient au-
delà du terme fixé pour l’exécution d’un contrat qui a dû être retardé suite à un manquement
de l’administration, le cocontractant pourra l’évoquer. L’imprévision ne délie pas le
cocontractant de ses obligations ; en contrepartie il a droit à une indemnisation. Mais
l’indemnité d’imprévision a pour seul but de rétablir l’équilibre financier du contrat. C’est
pourquoi elle ne couvre qu’une seule partie du préjudice subi. L’article 129 du COA précise

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que le juge fixe la partie restante à la charge du cocontractant de l’administration. L’indemnité


est temporaire en ce sens qu’il est destiné à palier un déséquilibre momentané. Si le
rétablissement de l’équilibre du contrat est impossible, l’administration tout comme le
cocontractant peuvent demander au juge la résiliation du contrat ; voire article 130 du COA.

C’est tout l’intérêt d’étudier le régime d’extinction des contrats.

Paragraphe 3 :) Le régime d’extinction des contrats

Le contrat prend fin lorsque les obligations des partis ont été intégralement exécutés.
L’article 131 du COA affirme que le contrat est exécuté soit lorsque son objet est réalisé, soit
lorsque sa durée est expirée. Il s’agit en vérité d’un procédé commun à tous les contrats. Mais
le droit administratif aménage une voie spécifique d’exécution des contrats qui est la
résiliation. Elle peut résulter de plusieurs situations : d’abord la résiliation peut être prononcée
par les deux parties : le COA évoque la résiliation conventionnelle. En effet les partis peuvent
à tout moment convenir de mettre fin à un contrat en cours d’exécution. Ensuite la résiliation
peut être prononcée par l’administration qui dispose du pouvoir de mettre fin au contrat, soit à
titre de sanction pour faute grave du cocontractant, soit dans l’intérêt du service. Enfin la
résiliation peut être prononcée par le juge soit à la demande de l’un ou de l’autre des parties,
soit à la demande de l’administration qui ne peut utiliser son pouvoir de résiliation unilatéral,
soit à la demande du cocontractant en cas de faute grave commise par l’administration.

NB : quand il s’agit du contentieux contractuel, c’est le tribunal régional, devenu


tribunal de grande instance, qui est compétent et avant de saisir le juge le requérant doit
d’abord introduire une demande adressée à l’administration.

En France le silence de l’administration pendant deux mois équivaut à une réponse


positive. Au Sénégal le silence de l’administration pendant quatre mois équivaut à une
réponse négative.

Le fait du prince, la modification et la résiliation laissent intactes les effets passés et n’a
d’effet que pour l’avenir.

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Exception d’inexécution = Si l’une des parties ne s’exécute pas, l’autre a droit de ne pas
s’exécuté elle aussi. Mais cela est inaccepté en matière de contrat administratif ; le
cocontractant s’exécute même si l’administration ne s’exécute pas.

Sur un autre plan il est peut-être adressé au juge un recours tendant à déclarer nul le
contrat. La nullité du contrat revêt un caractère d’ordre public elle peut résulter de plusieurs
situations. Ex d’un contrat conclu dans un domaine prohibé par exemple le domaine régalien
qui appartient au souverain (On parle alors de nullité publique), d’un contrat contenant des
clauses contraires à l’ordre public, un contrat conclu selon une procédure irrégulière ou signé
par une personne incompétente. Les tiers, c’est à dire les personnes extérieures au contrat
peuvent aussi remettre en cause la légalité du contrat. Si le contrat échappe en principe au
recours pour excès de pouvoir, le droit public a aménagé la technique de la détachabilité pour
atténuer à l’égard des tiers l’obstacle de l’irrecevabilité du recours pour excès de pouvoir
contre le contrat. Ainsi les tiers, tout comme le cocontractant de l’administration peuvent
saisir le juge de l’excès de pouvoir des actes détachables du contrat. L’article 140 du COA
procède à une énumération des actes détachables du contrat. Il s’agit de l’autorisation de
contracter, de la décision de contracter ou de ne pas contracter, de l’opération d’attribution, de
l’approbation du contrat. Pour tous ces actes les tiers sont admis pour les contester devant le
juge de l’excès de pouvoir.

2ème PARTIE : L’ENCADREMENT DE L’ACTION DE L’ADMINISTRATION

Le droit administratif est un droit, affirme-t-on, qui relève du miracle. Cette assertion se
fonde sur un constat ; alors que l’administration régit les comportements individuels et
collectifs en règlementant la vie quotidienne, elle accepte volontairement, d’une part, que le
droit lui dicte certaines conduites et lui en interdit d’autres et, d’autre part, que ces décisions
soient soumises à la censure d’un juge indépendant. Dans un Etat de droit l’action de
l’administration est encadrée enencadrée en ce qui se traduit par son contrôle(Titre 1) et sa
soumission au droit (Titre 2).

TITRE 1 :) LE CONTROLE DE L’ACTION DE L’ADMINISTRATIONe contrôle de


l’administration

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L’accent, ici, sera mis sur le contrôle juridictionnel de l’administration qui soulève
plusieurs questions. D’abord, quelles sont les juridictions compétentes pour contrôler l’action
de l’administration (CH1) ; ensuite, quels sont les différents recours qui sont aménagés pour
les administrés devant ces juridictions (CH2) et enfin, qu’est ce qui caractérise la procédure
administrative contentieuse (CH3).

CHAPITRE Chap.1: LES JURIDICTIONS CONTROLANT L’ADMINISTRATION

La détermination des organes juridictionnels chargés de contrôler l’administration pose


des questions relativement complexes. Certains Etats, comme la France, ont opté pour une
dualité de juridiction tandis que d’autres, comme le Sénégal, ont choisi une unité de
juridiction. Mais dans le système sénégalais le contentieux concernant l’administration reste
différent du contentieux de droit commun. On parle alors d’unité de juridiction à dualité de
conflit. Au Sénégal plusieurs réformes se sont succédées pour fixer l’organisation judiciaire
du pays. Récemment la loi de 2014 a créé le tribunal de grande instance et lui a conféré une
compétence en toute matière (S1) alors que quelques années plutôt la loi organique de 2008
sur la cours suprêmela cour suprême a mis fin à la dualité de juridiction au sommet et
reconnait des compétences d’attribution à la cour suprême (S2).

Section ec1 : La compétence de droit commun du tribunal de grande instance

Depuis la réforme de l’organisation judicaire fixée par la loi du 2 février 1984 qui vient
d’être abrogée et remplacée par la loi N°2014–26 du 3 Nov. 2014, le tribunal régional,
aujourd’hui dénommé tribunal de grande instance, dispose d’une compétence de droit
commun en matière administrative (P1) et de la plénitude de compétence (P2).

Paragraphe 1 : La compétence de droit commun en matière administrative du TGI

Au terme de l’article 7 de la loi du 3 novembre 2014 modifiant la loi du 2 février 1984


(qui fixe l’organisation juridictionnelle du Sénégal) : « sous réserve des compétences
d’attribution en premier et dernier ressort de la cours suprêmede la cour suprême, des cours
d’appel et en premier ressort des tribunaux du travail, des tribunaux d’instance, et des
organismes administratifs à caractère juridictionnel, les tribunaux de grande instance sont

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juges de droit commun en première instance en toute matière ». Il résulte de cette formulation
que la matière administrative relève de la compétence du tribunal de grande instance.

A. Signification de la matière administrative

Il existe une double approche de la matière administrative : une approche organique et


une approche matérielle.

Au sens organique, un litige appartient à la matière administrative si une personne


publique est partie à ce litige.

Au sens matériel, un litige relève de la matière administrative s’il requiert l’application


du droit administratif.

B. Typologie des litiges relevant de la matière administrative

La compétence de droit commun du tribunal de grande instance en matière


administrative concerne le contentieux contractuel, le contentieux de la responsabilité, le
contentieux fiscal, le contentieux électoral et le contentieux de la fonction publique.
Rappelons que l’article du COA précise que le tribunal de grande instance est compétent pour
connaitre des contrats administratifs. Ensuite il résulte de l’ancienne loi du 2 février que le
tribunal régional connait de toute instance tendant à faire déclarer dimi les collectivités
publiques ; soit en raison des travaux qu’elles ont ordonné, soit en raison de marchés conclus
par elles, soit en raison de tout acte de leur part ayant occasionné un préjudice à autrui. Dans
la même lancée la loi de 1984 reconnait au tribunal régional la compétence de connaitre « des
litiges relatifs à l’assiette, au taux et au recouvrement des impositions de toute nature et
particulièrement des demandedes demandes en décharge ou réduction formulées par les
contribuables ainsi que les actes de saisi ou de poursuites administratives ». Le contentieux
contractuel, le contentieux de la responsabilité et le contentieux de la fonction publique relève
aussi de la compétence du tribunal de grande instance. En plus de ces matières, le tribunal de
grande instance dispose aussi de la plénitude de compétence.

Paragraphe 2 : La reconnaissance de la plénitude de compétence au TGI

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L’article 8 de la loi du 3 novembre 2014 modifiant la loi du 2 février 1984 dispose :


« les juridictions ont, au cours des instances dont elles sont saisies, compétence pour
interpréter et apprécier la légalité des décisions des diverses autorités administratives ».
Apprécier un texte c’est se prononcer sur la régularité de ce texte. Il s’agit ici de la question
accessoire qu’il faudra définir (A) avant de voir les solutions apportées par les différents
systèmes juridictionnels (B).

A. Définition de la question accessoire

Il peut arriver que le déroulement du procès oblige le juge à apprécier la légalité ou à


procéder à l’interprétation d’un acte administratif unilatéral parce que l’issue du litige qui lui
est soumis dépend de la signification ou de la légalité d’une décision administrative.
Interpréter un texte c’est dégager son sens tandis que l’apprécier consiste à se prononcer sur
sa régularité. L’exception d’illégalité peut être invoquée à l’appui d’un recours dirigé contre
une décision qui en constitue l’application et dont la régularité est subordonnée à celle de la
disposition règlementaire contestée. Pendant longtemps le juge a développé la jurisprudence
de la loi Reca. Il faut distinguer la solution donnée par les systèmes juridictionnels.

B. Les solutions apportées par les systèmes juridictionnels

Deux solutions sont possibles pour trancher la question accessoire. Elles dépendent
largement du système juridictionnel. Dans le schéma Sénégalais marqué par une unité de
juridiction, le législateur considère que le juge de l’action est le juge de l’exception. Dès lors
il reconnait la plénitude de compétence au tribunal de grande instance. Cette solution à des
avantages ; elle permet en effet de préserver l’unité de l’instance en considérant la question
accessoire comme étant une simple question préalable ce qui favorise un fonctionnement
harmonieux de la justice. Dans le schéma français marqué par la dualité de juridiction, la
question accessoire devient délicate parce qu’elle emmène à concilier à priori deux principes
contradictoires : le principe de la séparation des autorités juridictionnelles et le principe de
plénitude de juridiction. En privilégiant le premier principe, la question accessoire qui se pose
devant le juge judiciaire devient une question préjudicielle. Elle aurait pour effet de retarder le
déroulement du procès parce que le juge judiciaire doit se dessaisir et attendre la solution du
juge administration pour poursuivre le procès. En revanche privilégier le principe de la
plénitude de compétence revient à sacrifier les règles de la séparation entre l’ordre judiciaire

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et l’ordre administratif. Une solution médiane a été trouvée par le tribunal des conflits à
travers une série d’arrêts. S’il s’agit du juge judicaire il résulte de la jurisprudence Septfonds
TC 16 juin 1923 que les tribunaux judicaires statuant en matière civile sont compétents pour
interpréter les règlements. En revanche, il ne leur est pas reconnu ni la compétence
d’interpréter les actes administratifs individuels ou particuliers ni la compétence d’apprécier
la légalité des actes administratifs ; qu’ils soient individuels ou réglementaires. La seule
exception concerne la voie de fait définie comme étant un acte de l’administration qui porte
une atteinte grave à la liberté individuelle ou autre voie de propriété ; voire TC 30 octobre
1947 Barinstein. En ce qui concerne les tribunaux judiciaires statuant au pénal, l’arrêt TC 5
juin 1951 Avranches et Desmarets reconnaissait la plénitude de compétence au juge répressif.
Mais limité aux actes réglementaires et les actes individuels soulevant une question
préjudicielle. Le législateur français est finalement intervenu pour affirmer que les juridictions
pénales sont compétentes pour interpréter les actes administratifs réglementaires ou
individuels, et pour en apprécier la légalité lorsque, de cet examen, dépend la solution du
procès pénal qui lui est soumis. Cette solution se rapproche de celle donnée par le législateur
sénégalais qui reconnait, toutefois, certaines exceptions à la compétence de droit commun du
tribunal de grande instance en attribuant une partie du conflit concernant l’administration à la
cour suprême.

Sectionec 2 : Les compétences d’attribution de la cour suprême

C’est la loi du 7 aout 2008 portant création de la cour suprême qui restaure l’unité de
juridiction au sommet après 16 ans d’expérimentation d’une dualité introduit par l’importante
réforme de 1992. La cour suprême dispose de deux attributions importantes les attributions
juridictionnelles (P1) et des attributions consultatives (P2).

Paragraphe 1 : Les attributions juridictionnelles de la Cour Suprême

Selon l’article 19 de la loi organique de 2008, la chambre administrative connait des


pourvois en cassation en matière administrative et est juge en premier et dernier ressort pour
excès de pouvoir des autorités exécutives ainsi que de la légalité des actes des collectivités
locales. Il en résulte que la cour suprême est juge de cassation en matière administrative (A) et
juge de droit du contentieux de la légalité (B).

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A. La Cour Suprême juge de cassation en matière administrative

La Cour Suprême est juge de cassation, d’une part, des arrêts rendus etrendus et,
d’autre part, des jugements rendus en dernier ressort par les tribunaux de grande instance. Elle
connait aussi, par la voie du recours en cassation, dess décisions de la coursde la cour des
comptes et des décisions rendues en dernier ressort par les organismes administratifs à
caractère juridictionnel. Quand elle exerce ses attributions, la cours suprêmela cour suprême
ne connait pas du fond de l’affaire sauf quand le législateur le prévoit expressément. Il en est
autrement en matière de contentieux de la légalité.

B. La Cour Suprême : juge de droit commun en matière de contentieux de légalité

C’est la chambre administrative de la CS qui joue le rôle dévolu à l’ancien et défunt


conseil d’état (CE). L’article 19 de la loi organique de 2008 attribue deux branches du
contentieux de la légalité à la chambre administrative de la CS. Il s’agit du recours pour excès
de pouvoir et des recours contre les actes locaux (les actes pris par les collectivités locales).
Le contentieux de la légalité désigne un contentieux objectif. La seule question posée au juge
est celle de savoir si l’acte administratif contesté est conforme ou compatible aux normes qui
lui sont supérieures dans le cadre de l’architecture juridique. Il s’agit donc d’un procès fait à
un acte. Au sens étroit, le contentieux de la légalité correspond au contentieux de l’annulation
par lequel le requérant saisit le juge en vue d’obtenir l’annulation d’un acte administratif
entaché d’irrégularité. L’annulation fait disparaitre, de manière rétroactive, l’acte dans
l’ordonnancement juridique. Le recours pour excès de pouvoir occupe une place importante
dans ce contentieux. En plus de l’attribution juridictionnelle la cour s suprême peut être saisie
pour avis.

Paragraphe 2 : Les attributions consultatives de la Cour Suprême

La loi reconnait à la cour suprême une compétence consultative. Le président de la


république, le président de l’assemblée nationale et le premier ministre peuvent ainsi
directement saisir la cour suprême pour recueillir son avis sur les projets de loi, les
propositions de loi et les projets de décrets. Plus spécifiquement, le président de la république
peut consulter la cour suprême lorsqu’il se pose des difficultés en matière administrative. Pour
exécuter ses attributions, la cour suprême se réunie en assemblée consultative ; sauf lorsque le

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président de la juridiction décide de renvoyer l’affaire devant une commission spéciale de


l’assemblée présidée par l’un des magistrats de la cour. L’assemblée générale consultative est
composée de la totalité des membres de la cour. Elle peut être élargie à des personnalités
qualifiées dans différentes activités nationale appelée conseillers en service extraordinaire.
Elles sont désignées par décret sur proposition du président de la cour suprême. Le président
de la république peut aussi désigner en qualité de commissaires du gouvernement des
personnes qualifiées ; chargées de représenter le pouvoir exécutif et de fournir à l’assemblée
consultative de lade la cour suprême toute indication utile. Elles ne disposent pas de voix
délibérative. La cour suprême ainsi saisie donne un avis motivé sur la légalité des
commissions qui lui sont soumises et le cas échéant (s’il y’a lieu) sur la pertinence des
moyens juridiques retenus pour atteindre les objectifs poursuivis ; mais en tenant compte des
contradictions inhérentes à l’action administrative.

CHAPITREhapitre 2 : LES RECOURS CONTENTIEUX les recours contentieux

Il existe plusieurs types de recours contentieux. Et depuis la fin du 19ème e siècle la


doctrine ne cherche des critères permettant une classification des recours. Plusieurs critères
sont dégagés. Certains auteurs considèrent que les recours contentieux peuvent être classés en
se fondant sur l’étendue des pouvoirs reconnus au juge. Ainsi il est possible de distinguer
entre le contentieux de pleine juridiction où le juge dispose de larges pouvoir permettant de
condamner l’administration ou de réformer la décision contestée devant lui, et le contentieux
de l’annulation où son office se limite à se prononcer sur la légalité de l’acte. D’autres auteurs
se fondent sur des critères matériels pour procéder à la classification. Il s’agit selon eux de
considérer la situation juridique concrète qui se pose au juge. Ainsi il sera possible de
distinguer entre le contentieux objectif où le requérant se trouve dans une situation objective
interpellant le juge sur la méconnaissance d’un droit objectif par l’administration et le
contentieux subjectif où le requérant revendique des droits individuels. D’autres critères de
distinction existent mais ils aboutissent tous à une distinction fondamentale entre le recours
pour excès de pouvoir (S1) tet le recours de plein contentieux (S2).

Section 1 : Le recours pour excès de pouvoir ou recours en annulation

C’est le recours contentieux par excellence ; il est qualifié par certains de Florent
(crème) de l’œuvre jurisprudentielle du CE. Il est né en France et ses origines remontent à la
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fin du 18e siècle. Le recours pour excès de pouvoir peut être simplement défini comme étant
un recours tendant à l’annulation d’une décision administrative. Il est un recours objectif
dirigé non pas contre une personne mais contre un acte. L l’analyse du recours pour excès de
pouvoir soulève quatre questions importantes :

Quels sont les caractères généraux du recours pour excès de pouvoir ? (P1)

Quelles sont les conditions de recevabilité du recours pour excès de pouvoir ? (P2)

Quels sont les cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir ? (P3) ;

Quels sont les effets du recours pour excès de pouvoir ? (P4).

Paragraphe1 : Les caractères généraux du REP

Le recours pour excès de pouvoir présente un certain nombre de traits fondamentaux qui
le distingue des autres recours notamment le recours de plein contentieux. On dit qu’il a des
traits spécifiques (A) ; mais le droit public positif tend à rapprocher le contentieux objectif du
contentieux subjectif ce qui fait évoluer le recours pour excès de pouvoir (B).

A.) Les traits spécifiques du recours pour excès de pouvoir (REP)

Le recours pour excès de pouvoir présente trois (3) traits fondamentaux : d’abord il
constitue un recours objectif, ensuite il est d’ordre public et enfin, il est d’utilité publique.

Le caractère objectif résulte du fait que le REP est un recours intenté en vue de faire
prévaloir le droit ; il est considéré comme étant un instrument mis à la portée de tous pour la
défense de la légalité méconnue. La seule question posée au juge sest celles de savoir si la
décision administrative contestée viole ou pas la légalité. En conséquence, toute prétention
tendant à obtenir du juge une prétentionprestation pécuniaire est en principe irrecevable. Le
recours pour excès de pouvoir est en effet le symbole de la lutte contre l’arbitraire de
l’autorité administrative.

Le caractère d’ordre public : dans l’arrêt CE assemblée 17 février 1950 Dame Lamote,
le juge administratif admet, en vertu d’un principe général de droit, que le REP est un recours
de droit commun contre les décisions adles décisions administratives ; il est ouvert même sans
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textes. Dans cette affaire le juge considère que quand une loi exclut tout recours contre un
acte, le REP n’est pas concerné. Le caractère d’ordre public entraine certaines conséquences :
il est loisible à tout administré qui y a intérêt de contester une décision administrative sans
que l’administration puisse lui opposerlui opposer son acceptation personnelle de la mesure.
Moyen tiré de l’annulation d’une décision pourra être soulevée par les parties ou invoquées
d’office par le juge. Le requérant qui a désisté au départ à tout recours peut toujours revenir
sur sa décision.

Le REP est un recours d’utilité public en ce sens que le requérant joue le rôle de
ministère public de l’Etat de droit (au-delà de l’acte qui le concerne de demander au juge
qu’on retire les dispositions qui ne sont pas conformes). Il s’agit ds’un recours pratique qui
droit s’exercer dans un délai rigoureux. La solution que donne le juge est aussi objective. Elle
se réduit à un rejet de la requête si l’acte contesté est légal ou à l’annulation de l’acte quand il
viole la légalité. C’est pourquoi la doctrine critique sévèrement leas effets limités du REP à
qui elle reproche de ne pas protéger suffisamment les garanties individuelles. Dans la dernière
décennie, le REP a beaucoup évolué.

B.) L’évolution du recours pour excès de pouvoir (REP)

Par une série de décisions importantes le juge administratif français, sous l’influence du
droit communautaire, a rendu des solutions tendant à atténuer les effets brutaux d’une
annulation par la voie du REP. Dans la décision rendue par le CE assemblée 11 mai 2004
AC, le juge administratif considère que même si l’annulation d’un acte administratif implique
qu’il soit réputé n’être jamais intervenu, certaines dérogations ou aménagements peuvent être
conçus s’il apparait que l’effet rétroactif de l’annulation est de nature à entrainer des
conséquences manifestement excessives en raison « tant des effets que cet acte a produit et
des situations qui ont pu se constituer lorsqu’il était en vigueur ; que de l’intérêt général
pouvant s’attacher à un maintien temporaire de ces effets, il revient au juge de prendre en
considération, d’une part, les conséquences de la rétroactivité de l’annulation pour les divers
intérêts publics et privés en présence et d’autre part les inconvénients que présenterai, au
regard du principe de la légalité, une limitation dans le tceamps des effets de l’annulation ».
Le juge opte pour la défense des intérêts respectifs des parties en présence. Le REP se

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rapproche alors du recours de plein contentieux. C’est tout l’intérêt d’analyser ses conditions
de recevabilité.

Paragraphe 2 : Les conditions de recevabilité du REP

Deux éléments essentielles caractérisent les conditions requises pour le REP. Elles sont
cumulatives et elles sont d’ordre public. Elles permettent au juge de ’statuer au fond. Quatre
conditions doivent être réunies pour qu’une requête puisse être admise en excès de pouvoir. Il
existe des conditions tenant à l’ acte attaqué (A), des conditions tenant au délai (B), des
conditions relatives au requérant (C) et des conditions tenant à la requête (D).

A. Les conditions tenant à l’acte

Le REP n’est recevable que contre un acte pris par une autorité administrative. L’article
73 de la loi organique sur de la cour suprême précise : la décision doit être explicite ou
implicite ». Il en résulte plusieurs conséquences.

- L’acte doit exister matériellement ;

- L’acte doitil doit avoir un caractère normateur ce qui exclusplique les recours dirigés
contre les actes préparatoires, les mesures d’ordre intérieur, les circulaires interprétatives, les
veux, les avis, les propositions …,bref seuls les actes qui font grief sont admises en
contestation.

- Lla deuxième conséquence est que l’acte doit avoir un caractère unilatéral ce qui
écarte le contrat administratif. Rappelons qu’avec la technique de la détachabilité le
législateur sénégalais aé considéré que l’autorisation de contracter, la décision de contracter
ou de ne pas contracter, l’opération d’attribution et l’approbation du contrat constituent des
actes détachables qui pourront donc être contestés par la voie du REP. Quant à la
jurisprudence française depuis l’arrêt CE 4 Août 1905 Martin, il est admis que le
cocontractant et les tiers puissent soumettre au contrôle du juge de l’excès de pouvoir certains
actes détachables du contrat.

- L-troisième conséquence l’acte doit avoir un caractère administratif. Ce qui veut


dire qu’il existe des catégories d’actes non admis en recours pour excès de pouvoir ; il s’agit

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des actes législatifs, des actes parlementaires, des actes juridictionnels, des actes des
particuliers ou organismes privés.

- L’acte doit en effet émaner d’une autorité administrative. Cependant les actes de
gouvernements, bien qu’ayant ce caractère, sont exclu du REP. Ensuite la jurisprudence
admet que les actes des personnes privées, investies d’une mission de service public et
habilitées à exercer des prérogatives de puissance public, peuvent être admis en REP ; CE
1961 Mmagnier, TC 15 janvier 1968 Aire France c/Epoux Barbier SPIC, CE 27 Août 1994
ASC Dial Diop Municipalité Club.

B. Les conditions tenant au délai

L’exercice du REP est enfermé dans un délai que l’article 73-1 de la loi organique surde
la cour suprême fixe à deux (2) mois. L’étude du délai soulève trois questions essentielles.
D’abord son point de départ (1) ensuite sa computation (2) et enfin sa prorogation (3).

1. Le point de départ du délai

Le délai courte à partir de la date de la publication de la décision attaquée à moins


qu’elle ne soitdoit être notifiée ou signifiée auquel cas il commence à courir à partir de la date
de la notification ou de la signification. Le silence gardé plus de quatre mois, sur une
réclamation, par l’autorité compétente vaut décision de rejet. En clair s’il s’agit d’une décision
implicite, le délai courte à compter du jour où expire la période de quatre mois. Lorsqu‘une
décision de rejet intervient dans le délai de quatre mois elle fait à nouveaux courir le délai de
e REP.

2. La computation (calcul) du délai

Il s’agit tout simplement du calcul du délai qui se compte de mois en mois. Le nombre
de jour contenu dans le mois importe peu. Le délai est franc. Le jour de la mesure de publicité
qui déclenche le délai appelé dies aquo n’est pas comptabilisé, de même que le jour
d’échéance appelé dies adquem. La méthode est identique pour les décisions implicites.
Concrètement, le délai court à partir coure du lendemain de lma mesure de publicité et expire
le lendemain du dernier jour. Un acte publié par exemple le 20 juillet démarre le 21 juillet à
00h et les deux mois s‘achèvent le 20 septembre. Le recours peut être introduit dans la journée
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du 21 septembre jusqu’à minuit. Quand le jour de l’expiration tombe un dimanche ou un jour


férié le recours est recevable le premier jour ouvrable suivant. Le délai peut être prorogé.

3. La prorogation du délai

Il existe des situations dans lesquelles qui entrainent une interruption du délai de u
recours lequel sera prolongé dans le temps. L’article 73 de la loi organique surde la Cour
Suprême affirme qu’avant « qu’avant de se pourvoir contre une décision administrative, les
intéressés peuvent présenter dans le délai de REP un recours administratif hiérarchique ou
gracieux tendant à faire rapporter ladite décision. Le silence gardé& plus de 4mois par
l’autorité compétente pour le recours administratif vaut décision de rejet. Dans ce cas le délai
de deux mois prévue ne commence à courir qu’à compter du jour de la notification ou de la
signification de la décision de rejet due recours adadministratif ouet au plus tard de
l’expiration de la période de 4 mois prévus. En clair il s’agit d’une dune situation où le
recours administratif interrompt le délai qui reprendra son cour pour deux nouveaux mois à
compter de la décision expresse ou tacite donnée par l’autorité administrative saisie ; voire CE
27 avril 1994 Ousmane Kane Camara et autres contre l’Etat du Sénégal. Lorsque l’autorité
administrative saisie d’un recours administratif émet une décision explicite après l’expiration
du délai de 4 mois, le requérant dispose d’un nouveau délai de 2 mois pour contester la
décision en excès de pouvoir.

La deuxième situation concerne la saisine par le requérant d’une juridiction


incompétente. La jurisprudence considère que dans ce cas le délai ne commence à courir qu’à
partir de la notification au requérant de la déclaration d’incompétence de la juridiction. Si le
REP est soumis à une condition de délai, certaines exigences sont aussi requises du requérant.

C. Les conditions tenant au requérant

Le droit de recourir au juge est garanti par la constitution sénégalaise qui proclame dans
son préambule l’égale accès de tous les citoyens au Services Publics et son attachement à la
charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 27 juin 1981 dont l’article 7 affirme
que « toute personne a droit à de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte
violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus et garanti par les conventions, les lois,
les règlement et coutume en vigueur ». En FranceFrance, d’un droit auu recours effectif

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reconnueffectif est reconnu par le CC et par l’article 13 de la convention européenne des


droits de l’homme. En matière d’excès de pouvoir le requérant doit réunir deux conditions
essentielles : il doit avoir la capacité à agir (1) et doitt justifier d’un intérêt lui donnant qualité
à agir (2).

1. La capacqualité à agir

Elle est déterminée selon les règles du droit commun. Comme en droit civil, la capacité
d’ester en justice est liée à la capacité juridique. Toute personne physique ou morale ayant
une existence légale peut saisir le juge de l’excès de pouvoir. Pour les personnes physiques
aucune distinction n’est faite entre les nationaux et les étrangers. Ces derniers peuvent
contester tous les actes administratifs qui les visent personnellement (décision d’expulsion,
refus d’entrer…) mais aussi les décisions à caractère règlementaire qui affectent leur situation.
Pour les personnes morales la jurisprudence interprète de manière souple la capacité à agir.
D’abord les personnes morales de droit public sont recevables à introduire un REP ; qu’il
s’agisse des collectivités locales, des établissements publics administratifs contre l’Etat mais
aussi de l’Etat qui peut contester les actes des collectivités locales. Ensuite les personnes
morales de droit privé sont admises en contestation pour contester les décisions
administratives. La jurisprudence reconnait même la recevabilité d’un recours introduit par
une association qui n’a plus la personnalité juridique quand l’enjeu le justifie. Il faut signaler
que le REP permet de sauvegarder les droits fondamentaux reconnus aux particuliers. C’est
ainsi qu’une association dissoute qui n’a plus d’existence légale peut contester le décret de
dissolution.

2. L’intérêt à agir

Tout plaideur doit justifier d’un intérêt à agir. L’adage dit : « Pas d’intérêt pas
d’action ». L’intérêt concerne ici l’avantage d’ordre pécuniaire ou moral que le requérant
entend défendre devant le juge parce que le REP est un recours objectif. Iil était possible
d’envisager la reconnaissance à chaque individu d’un intérêt à agir pour mettre fin à une
illégalité éventuelle ; c’est ce que la doctrine appelle actrio popularis (action populaire). Une
telle solution engorgerait le prétoire ; c’est pourquoi, tout en développant une conception
littérale de l’intérêt à agir, le juge administratif exige que la décision attaquée ait un effet pour
la situation du requérant. Il faut qu’il soit froissé ou qu’il subisse les conséquences fâcheuses

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de la décision. L’intérêt à agir peut-être individuel ou collectif et il est reconnu aux personnes
physiques comme lauxes personnes morales. L’intérêt individuel ne signifie pas qu’il doit être
propre à un individu. Certes un administré lésé matériellement ou moralement par une
décision administrative a intérêt à agir mais le fait qu’il appartienne à un ensemble de
personnes qui peuvent être affectée par le même acte lui adonne aussi l’intérêt à agir. C’est
ainsi que la jurisprudence reconnait l’intérêt à agir aux usagers d’un service public « CE 21
décembre 1906 syndicat des propriétaires et contribuables du quartier Croix-de-Seguey-
Tivoli » ; aux contribuables locaux : « CE 29 mars 1901 Casanova » et aux groupements « CE
28 décembre1906 syndicats des patrons coiffeurs de Limoge ».

Pour les personnes publiques, l’intérêt à agir par la voie du REP est aussi reconnu. Une
collectivité locale est admise à contester les décisions édictées par l’autorité étatique CE 18
avril 1902 commune de Néris-L les- Bains. En revanche le représentant de l’Etat peut déférer
à la Cour SSuprême les actes des collectivités locales.

REMARQUE : A l’intérieur d’une personne publique, le REP est en principe


irrecevable. Le recours pour excès de pouvoir se rapporte aussi à la requête.

D. B :lesLes conditions tenant à la requête

Rappelons que le REP est un recours objectif. En conséquence les conclusions du


requérant doivent tendre uniquement à obtenir l’annulation de l’acte querellé (contesté). Toute
autre action tendant à la reconnaissance de droit ou de créance est irrecevable. Pendant
longtemps l’absence de recours parallèle était une condition de recevabilité du REP. En clair
ce dernier était conçu comme étant un recours subsidiaire qui n’ qu’il est recevable que contre
des actes dont les administrés ne disposent d’aucune autre voie de recours. Aujourd’hui le
législateur organique sénégalais ne reprend plus cette condition même si la lecture de
certaines décisions semble confirmer que la Cour Suprême continue de l’appliquer. Quant à la
doctrine, elle n’évoque l’absence de recours parallèle que pour mettre en évidence son
anachronisme. Concernant la requête, elle doit indiquer les noms et domiciles des parties
contenirparties, contenir un exposé sommaire des faits et moyens ainsi que les conclusions.
Elle doit être accompagnée de la copie de la décision attaquée ou d’une pièce justifiant du
dépôt deà la réclamation. L’article 35 de la loi organique surde la CS ajoute qu’il doit être
joint à la requête autant de copies de qu’il y’a de parties en cause. Pour les requêtes

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collectives, il faut distinguer entre deux catégories : il peut exister des requêtes émanant du
même requérant et dirigé cote plusieurs contre plusieurs décisions ; elles sont appelées
requêtes collectives réelles. Ils peuvent aussi exister des requêtes qui sont issues de ^plusieurs
requérants mais dirigées contre la même décision ; elles sont dénommées requêtes collectives
personnelles. Toutes les deux catégories de requêtes sont recevables. Mais pour les requêtes
collectives personnelles les requérants doivent désigner un mandataire unique ; à défaut, le
greffe désignera le premier nommé pour accomplir les actes de procédures.

Paragraphe 3 : Les cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir (REP)

Ces cas concernent les moyens juridiques dont un requérant peut soulever pour obtenir
l’annulation de l’acte devant le juge de l’excès de pouvoir, ces moyens sont nombreux et
variés. C’est Laferrière qui a distingué entre deux catégories de moyens : les moyens de
légalité externes (A) et les moyens de légalité internes (B).

A. A : Les moyens de légalité externes

Ils se rapportent aux modalités d’élaboration de l’acte. Rappelons qu’un acte


administratif unilatéral n’est régulier qu’à la condition de respecter le principe de légalité qui
pose des règles qui s’imposent à l’auteur de l’acte, à la compétence, à la forme ou encore à la
procédure. En cas de méconnaissance de ses règles, tout requérant qui y a intérêt pourra saisir
le juge de l’excès de pouvoir de moyens tiré de l’incompétence, du vice de forme et du vice
de procédure appelé moyen d’illégalité externe.

- l’incompétence : c’est un moyen d’ordre public. Elle peut être soulevée d’office par le
juge et ne peut être couverte par une intervention ultérieure de l’autorité compétente.
L’incompétence peut être temporelle (l’autorité n’est pas encore ou n’est plus compétente),
elle peut être territorial (l’autorité n’a pas compétence de prendre un acte dans l’espace
géographique d’où il l’a pris) ou matérielle (lorsqu’elle est incompétente dans le domaine
dans lequel intervient l’acte). Chacun de ses cas constitue un vice susceptible de provoquer
l’annulation de l’acte.

- le vice de forme : les formes concernent l’instrumentum ; c’est-à-dire la présentation


extérieure de l’acte le cas échéant contresigné ; il doit être aussi motivé. Tout manquement à

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ces règles constitue des vices de formes que le requérant peut soulever pour obtenir
l’annulation de l’acte.

- les vices de procédures : ils concernent le neégotium ; c’est-à-dire l’opération


normatrice elle-même. Les vices de procédures résultent de la méconnaissance du processus
d’élaboration de l’acte. Certains actes adadministratifs sont soumis à des consultations
préalables, d’autres ne peuvent être pris par l’autorité administrative qu’après avoir respecté
les droits de la défense ou le principe du contradictoire. L’inobservation de ces règles entraine
un vice de procédure susceptible d’annuler l’acte.

Toutefois le juge administratif ne fait pas montre d’une rigueur excessive. Il distingue
entre les formalités substantielles et les formalités non substantielles. Seules les premières
donnent lieu à l’annulation de l’acte. Parce qu’elles ont soit une influence sur la décision soit
elles constituent une garantie dont bénéficient les destinataires de la décision.

B. :L les moyens de légalité interne

Il s’agit essentiellement de deux types de moyens. Il existe d’une part le détournement


de pouvoir (1) et d’autre part la violation de la loi (2).

1. Le détournement de pouvoir

Il a été consacré par l’arrêt du CE 26 novembre 1875 Pariset. L’autorité administrative


est investie du pouvoir de prendre des décisions affectant les droits et les obligations des tiers
sans leur consentement en vue de servir l’intérêt général. En conséquence elles ne doitvent
pas utiliser ces pouvoirs pour poursuivre un intérêt personnel ou privé extérieure à l’intérêt
public. L’autorité administrative doit aussi respecter le but précis qui est assigné à ses
pouvoirs. Le détournement de pouvoir désigne l’utilisation par l’autorité administrative de ses
pouvoirs dans un intérêt particulier ou dans un but différent de celui qu’elle doit poursuivre.
La police administrative a pour objet la trilogie classique ; toute mesure ne relevant pas de
ses composantes constitue un détournement de pouvoir. On peut aussi donner l’exemple d’un
détournement de procédure qui constitue aussi un détournement de pouvoir ; ex quand
l’autorité administrative supprime un emploie alors qu’elle doit engager une procédure
disciplinaire de licenciement. Mais le motif tiré du détournement de pouvoir a une

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connotation subjective. Elle pousse à rechercher l’intention de l’auteur de l’acte, c’est


pourquoi il est difficile à établir et le juge de l’excès de pouvoir, habitué à une démarche
objective, préfère souvent se placer sur le terrain de la violation de la loi par l’acte
administratif.

2. La violation de la loi

Le principe de légalité postule la soumission de l’administration au droit. On parle même


aujourd’hui d’un principe de juridicité qui comprend toutes les normes supérieures à l’acte
contesté (constitution, conventions et traités, loi, principe généraux du droit, règlement). Le
juge de l’excès de pouvoir compare le contenu de l’acte administratif contesté avec le contenu
de toutes les normes qui s’imposent à l’acte. C’est ainsi qu’il contrôle les motifs de l’acte qui
désigne, rappelons-le, les éléments de fait ou de droit qui sont à la base de l’acte. Il faut
distinguer entre deux moyens d’illégalité concernant les motifs. Le requérant peut en effet
soulever d’une part l’illégalité des motifs de droit et d’autre part l’illégalité des motifs de fait.

- l’illégalité des motifs de droit : elle concerne deux hypothèses, le défaut de bases
légales et l’erreur de droit. Le défaut de base légale c’est quand lme texte qui fonde la
décision ne peut être légalement invoquée par l’autorité administrative ; soit parce qu’il est
inexistant, soit parce qu’il n’est pas encore applicable, soit parce qu’il n’était plus applicable.
L’erreur de droit concerne l’interprétation de la règle de droit. C’est quand l’autorité
administrative se fonde sur un ordre qui est inexactement comprise ou interprété. Elle
méconnait son sens ou sa portée.

- l’inégalité des motifs de fait : dès le 20ème siècle, par une série d’arrêt, le juge
administratif acceptéadministratif a accepté de contrôler la régularité des motifs de fait d’une
décision administrative CE 14 avril 1914 Gomel ; CE 14 janvier 1926 Camino. D’abord le
juge a commencé par examiner si les faits tels qu’ils existent présentent les caractéristiques
permettant à l’administration de prendre la décision. Ensuite il a étendu son contrôle à
l’exactitude matérielle des faits qui sont invoqués à la base de la décision. En effet l’autorité
administrative peut se retrouver dans une situation où l’acte qu’il veut prendre est déterminé
par les éléments de fait et dans ce cas elle ne dispose d’aucune marge, elle a donc la
compétence liée et le juge administratif exerce un contrôle plein et entier. L’autorité
administrative peut aussi se placer dans une situation où l’acte à prendre est subordonné aux

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éléments de fait. Dans ce cas l’acte ne peut intervenir que si les faits sont de nature à le
justifier. Elle détient alors un pouvoir d’appréciation qu’elle exerce sur le contrôle du juge de
l’excès de pouvoir qui la contrôle la qualification juridique des faits. Enfin l’autorité
administrative peut être dans une situation où l’acte qu’elle prend est indépendant des
éléments de fait. En ce sens l’acte n’est pas soumis à une condition de fait. L’autorité
administrative dispose d’un pouvoir discrétionnaire. La jurisprudence administrative a forgé
une solution par laquelle le juge administratif considère que si l’autorité administrative est
libre d’agir cela ne signifie pas qu’elle puisse agir n’importe comment ou qu’elle soit libre de
faire n’importe quoi. En cas d’abus de pouvoir discrétionnaire, le juge de l’excès de pouvoir
contrôle l’erreur manifeste d’appréciation. Il faut remarquer que la jurisprudence récente tend
à une souplesse dans le contrôle des motifs. Dans une importante décision du CE en date du 6
février 2004 Hallal, le juge administratif accepte la substitution de motifs en considérant que
l’administration peut : « en première instance comme en appel faire valoir devant le juge de
l’excès de pouvoir que la décision dont l’annulation est demandée est légalement justifiée par
un motif de droit ou de fait autre que celui initialement indiqué ». C’est tout, l’intérêt
d’analyser les effets du recours pour excès de pouvoir (REP).

Paragraphe 4 : Les effets du recours pour excès de pouvoir (REP)

Rappelons que le REP est un recours objectif. Il s’agit ds’un recours fait à un acte qui
est pris par l’administration ayant en charge l’intérêt général et disposant du privilège du
préalable. Il en résulte deux effets essentiels : d’abord le recours introduit devant le juge de
l’excès de pouvoir n’est pas suspensif (A) ensuite il convient de cerner les pouvoir du juge de
l’excès de pouvoir qui sont relativement étendus (B).

A. L’A) l’effet non suspensif du REP

C’est parce que l’administration a en charge l’intérêt général, qui doit prendre le dessus
sur l’intérêt particulier, que le droit public érige en règle fondamentale le caractère exécutoire
des décisions administratives CE 2 juillet 1994 Huglot. Il en résulte que lorsqu’une décision
est suspectée d’être illégale et qu’un recours est intenté devant le juge, elle continue à
produire tous ses effets à l’égard des administrés. Si la règle peut paraitre absurde en raison de
ses conséquences, elle préserve cependant le fonctionnement de l’administration notamment
la continuité du service public qui serait paralysé en permettant à tout administré non content
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d’une décision d’introduire un recours qui serait suspensif. Mais pour limiter la rigueur de
l’effet non suspensif qui peut entrainer des conséquences parfois irréparables, il été aménagé
le sursis à exécution de certaines décisions. L’article 73-2 de la loi, organique sur la CS
affirme que « sur demande expresse de la partie requérante, la cour suprême peut, à titre
exceptionnel, ordonner le sursis à exécution des décisions des autorités administratives contre
lesquels aé été introduit le recours en annulation ». Pour obtenir le sursis à exécution d’un
recours en annulation, le requérant dsoit réunir deux conditions ; d’abord le moyen invoqué
doit être sérieux à l’état de l’instruction ; ensuite le préjudice encouru doit être irréparable ;
voir un arrêt classique de la CS Wwardini 5 avril 1978 et plus récemment 29 octobre 1997
Séserigne Tako FfALLall. Il y a sursis à exécution en cas de déclaration d’utilité publique,
d’expulsion d’étrangers et d’extradition (action de livrer à un gouvernement étranger, qui le
réclame, un refugié accusé d’un crime). En matière de déféré des actes locaux, le représentant
de l’Etat peut assortir son recours d’une demande de suris prévue par l’article 80 de la loi
organique. En France le code de la justice administrative a remplacé le sursis à exécution par
un référé suspension qui coexiste avec dl’autre type de référé tel que le référé liberté appelé
aussi référé sauvegarde par lequel le juge peut faire cesser des atteintes à une liberté ou
trouver des voies de fait ou encore le référé conservatoire permettant au jauge d’ordonner
toute mesure utile en vue de sauvegarder les droits des parties.

Référé = recours à un juge qui, dans les cas urgents, statue provisoirement.

B. BL) l’étendu du pouvoir du juge de l’excès de pouvoir

La question posée au juge étant objective, le juge ne peut, au mieux, que prononcer
l’annulation de la décision. Il ne peut ni la réformer ni se substituer à l’administration pour
prendre une décision et une fois l’annulation prononcée, le juge épuise ses pouvoirs. Iil lui est
interdit d’adresser des injonctions à l’administration contre laquelle il n’existe aucune
décision d’exécution forcée. Une décision de no lieunon-lieu commune à tous les recours peut
être prononcée par le juge. Généralement on distingue entre la décision de rejet et la décision
d’annulation.

- la décision de rejet : il faut dire que l’argumentation du requérant est, au fond,


déterminante sur l’issu du REP. L l’irrégularité qu’il invoque est soit reconnu à l’acte : c’est
l’annulation, soit elle n’est pas admise et le juge rejette la requête. Le rejet peut avoir un

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double fondement ; d’abord le juge peut rejeter la requête en raison de l’inexistence de


l’irrégularité invoqué. Mais cela ne signifie pas que l’acte est régulier en tout point. Le juge
ne statue que sur les moyens invoqués par le requérant. Exception faite des moyens d’ordre
public. Lorsque les moyens articulées contre la décision ne résistent pas à l’analyse, le juge
les rejette mais la décision de rejet ne fait pas obstacle à ce que d’autres requérants arguant
d’autres moyens d’annulation plus pertinents n’obtiennent satisfaction. L’irrégularité de l’acte
pourra aussi être reconnue par voie d’exception d’illégalité. Le deuxième fondement réside
dans les incidences de l’ultra petita. Il s‘agit d’une règle qui interdit au juge de statuer au-delà
de ce qui est demandé ; c’est-à-dire d’examiner des moyens qui ne sont pas soulevés par les
requérants et qui ne sont pas des moyens d’ordre public. En application de cette règle le juge
ne peut dépasser les conclusions formulées par le requérant. Ainsi, même si une irrégularité
est prouvée, le juge sera conduit à rejeter une requête tendant à une annulation partielle d’une
décision indivisible alors qu’une demande d’annulation totale serait acceptable.

- la décision d’annulation : l’annulation revêt un double effet : d’abord elle vaut à


l’égard de tous : on parle d’effet erga omnes. Ensuite la décision a un effet rétroactif. L’acte
annulé est réputé n’avoir jamais existé.

NOTE : le plein contentieux concerne le contentieux contractuel, électoral, fiscal, de, la


responsabilité. I ici le juge détient des pouvoirs étendus ; il dispose de plein pouvoir.

Quand il s’agit du recours de plein contentieux, pour saisir le juge il faut suivre une
procédure de l’article u code 729 du code de procédure civile qui dit que préalablement à la
saisine du juge, le requérant doit adresser une demande préalable à l’administration et attendre
la réponse de celle-ci. Devant le juge de plein contentieux, il devra prouver qu’il est lésé par
ses droits devant l’administration ; le cas contraire le juge ne va pas recevoir sa demande. La
procédure administrative contentieuse c‘est le procès, il faut retenir ses caractéristiques qui
sont au nombre de quatre : Le caractère écrit (la requête qui doit être adressée au juge doit être
écrite) ; le caractère contradictoire (ce que produit une partie doit être communiqué à l’autre
partie ce qui lui permet de préparer un mémoire de contrepartie) ; le caractère inquisitoire (le
caractère inquisitoire s’oppose au caractère accusatoire. Le caractère inquisitoire signifie que
le juge joue un rôle actif deet directeur dans le procès ; c’est lui qui fixe les délais), le

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caractère secret (le secret s’applique aussi bien au juge qu’aux parties ; le secret du délibérant
signifie qu’ile n’a pas le droit de divulguer une décision sur laquelle il n’est pas d’accord.

Section 2 : Le recours de plein contentieux ou contentieux de pleine juridiction

Il est aussi dénommé recours de pleine juridiction ou contentieux subjectif. La


qualification doit beaucoup au pouvoir étendu reconnu au juge contrairement au REP. Deux
questions méritent d’être posées ici : Quel est le domaine du recours de plein contentieux
(P1) ? Ensuite quelles sont ses conditions de recevabilité (P2) ?

Paragraphe 1 : Le domaine du recours de plein contentieux

Ce domaine a été étudié dans la présentation des litiges relevant de la matière


administrative. Il s’agit d’un domaine relativement vaste, hétéroclite. Il concerne le
contentieux contractuel, le contentieux de la responsabilité, le contentieux fiscal et le
contentieux électoral.

Le placement d’un recours contentieux ou de pleine juridiction peut résulter


implicitement ou expressément d’une disposition légale ou règlementaire. Ce qui caractérise
le contentieux de pleine juridiction c’est que le juge dispose de large pouvoir comparable à
ceux du juge judiciaire quand il se prononce sur les litiges entre particulier. Contrairement au
REP où le requérant ne peut soulever que des moyens de légalité, ; en matière de plein
contentieux, il peut faire valoir tout argument destiné à défendre des droits subjectifs. Une
procédure spécifique est cependant aménagée.

Paragraphe 2 : Les conditions de recevabilité du recours de plein contentieux

Il existe essentiellement deux conditions : la 1ère concerne la demande administrative


préalable et la 2nd le respect du délai.

A)A. La règle de la demande administrative préalable

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L’article 729 du Code de Procédure Civile sénégalais dispose : « Toute action en justice
introduite en matière administrative doit être précédé d’une demande adressée à l’autorité
administrative désignée pour recevoir l’assignation ». L’article 39 du Code de Procédure
Civile apporte des précisions sur la qualité des assignés. Pour l’Etat il s’agit de l’agent
judiciaire de l’Etat ou l’un de ces bureaux ; pour les établissements publics il s’agit de leur
représentant légal ; pour les collectivités locales c’est le maire.

Le silence gardé plus de quatre mois par l’autorité administrative saisi vaut décision
implicite de rejet. En France le législateur vient d’abandonner ce principe avec la loi du 12
Nov. 2014 ; le silence gardé par l’autorité administrative française pendant plus de deux mois
vaut accord. Il s’agit d’une loi qui entre dans le cadre de la simplification des relations entre
l’administration et les administrés. Pour lutter contre l’inertie de l’administration et facilité les
démarches administratives des particuliers et des entreprises, le principe s’applique aà de
nombreuses procédures. Il existe toutefois des exceptions.

L’objet de la règle de la demande administrative préalable est de provoquer une


décision de l’administration. Avant la réponse de l’administration, il n’existe pas de conflit.
C’est seulement quand elle répond défavorablement ou quand elle garde un silence prolongé
sur quatre mois que le droit administratif va considérer qu’il existe un rejet et donc, il sera
possible d’ouvrir le recours de plein contentieux.

La deuxième condition est l’introduction de la demande dans un délai légal.

B)B. La condition relative au délai

Il faut souligner que la demande administrative préalable doit être introduite dans le
délai de prescription applicable aux personnes publiques ; ce délai est de quatre ans.

Aux termes de l’article 729 alinéa 2 du Code de Procédure Civile, « l’assignation doit, à
peine d’irrecevabilité, être servi dans le délai de deux mois qui suit soit l’avis donné de la
décision de la disparition soit l’expiration du délai de quatre mois valant décision implicite de
rejet.

La requête doit viser la décision implicite ou explicite donnée par l’autorité


administrative àa la demande préalable. Si c’est l’administration qui est demanderesse,
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l’assignation est délivrée à la requête du ministre compètent ou à celle des autorités


représentant légalement les personnes publiques. Le non-respect du délai de recours entraine
une forclusion (perte du droit d’agir en justice par suite de l’expiration d’un délai) et le non-
respect de la demande administrative préalable entraine l’irrecevabilité de la requête. Le juge
sénégalais considéré qu’il s’agit d’un moyen d’ordre publique ; voir tribunal départemental,
23 mai 1970, Abdourahmane NDOYE ; C.A de Dakar, 18 Fév. 1983 Héritier Abdou LO.

CHAPITRE 3 : LA PROCEDURE ADMINISTRATIVE CONTENTIEUSE

La procédure administrative contentieuse désigne l’ensemble des règles qui encadre la


direction du procès administratif. Ces règles ont été dégagés pour la plupart par le juge
administratif ce qui justifie qu’elles soient autonomes par rapport à la procédure civile.
Aujourd’hui on assiste à une codification, aussi bien en France qu’au Sénégal, des règles
régissant la procédure administrative contentieuse. L’accent sera mis sur ces traits généraux.

La procédure administrative contentieuse est contradictoire (S1), elle est écrite (S2) et
elle est inquisitoriale (S3).

Section 1 : Le caractère contradictoire

Le principe du contradictoire constitue une exigence de la procédure administrative


contentieuse. Il peut être défini par son objet qui est double ; il s’agit en effet d’une part de
permettre aux parties à un conflit d’être informé de l’argumentation développé par chacun des
adversaires. Il s’agit d’autre part de permettre à chaque partie informée de présenter ses
arguments ou observations. Ainsi, le principe garanti la communication des documents aux
parties et préserve leur voie de réponse. Le principe du contradictoire a été érigé en principe
général de droit par le juge administratif ; voir C.E Assemblée, 12 Octobre 1979,
Rassemblement des nouveaux avocats de France. L’importance du principe du contradictoire
est-elle que certains auteurs considèrent qu’il détermine les autres règles applicables à la
procédure administrative contentieuse tel que l’écrit.

Section 2 : Le caractère écrit

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La procédure administrative contentieuse est essentiellement écrite. Le caractère écrit


signifie que les parties à un litige soumis au juge doivent présenter leur conclusion et leurs
moyens sous forme de mémoire écrit. Le juge se chargera d’assurer la communication de ces
mémoires aux parties adverses. En France, en l’absence de tout texte, le juge administratif a
dégagé une jurisprudence constante selon laquelle : devant la juridiction administrative, la
procédure revêt un caractère essentiellement écrit. Au Sénégal, pays marqué par la
codification du droit administratif, c’est le législateur organique qui a reconnu explicitement
le caractère écrit de la procédure administrative contentieuse. Il découle des articles 34 et 35
de la loi organique sur la cour suprême que « les recours en annulation sont formés par une
requête écrite et signé. Elles doivent indiqués les noms et domiciles des parties, contenir un
exposé sommaire des faits et moyens, ainsi que les conclusions, de même que la décision
administrative attaquée ou une pièce justifiant le dépôt de la réclamation, de l’expédition de la
décision juridictionnelle attaquée ou de la décision infirmée ou confirmée ».

En plein contentieux, la procédure est aussi écrite. Rappelons qu’il faut, au terme de
l’article 729 du CPC, une demande administrative préalable et elle est écrite. L’écrit permet
de rationnaliser la procédure administrative et il participe à une cohérence dans
l’administration de la justice. Il emporte de nombreuses conséquences : l’écrit rend en effet
les observations orales inopérantes ; elles se réduisent à un prolongement des moyens écrits.
Ensuite, contrairement à la procédure pénale où l’on évoque la poursuite de l’instruction à
l’audience, en matière administrative l’instruction est close avant le début de l’audience ; il
constitue une simple formalité. Au caractère écrit s’ajoute le caractère inquisitorial.

Section 3 : Le caractère inquisitorial

En matière de procédure il existe deux modèles : un model accusatoire et un model


inquisitorial. Dans le premier model le juge joue un rôle d’arbitre ; il laisse agir les parties qui
sont chargées de chercher elles-mêmes la vérité par la production notamment de moyens de
preuve. Dans le second model le juge joue un rôle actif pour mener l’enquête, pour conduire
la procédure. On évoque alors un rôle de direction du procès et de recherche de la preuve.

Le model inquisitorial caractérise la procédure administrative contentieuse où le juge


assure la mise en cause des parties, prescrit les communications et les mesures d’instruction
utile, fixe les délais de réponse et clos l’instruction. Il joue aussi un rôle actif dans le
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déroulement de l’instruction et la recherche des preuves. C’est ainsi qu’il peut procéder à un
renversement de la charge de la preuve en demandant à l’administration la production de tout
document ou toute information susceptible d’éclairer les motifs de la décision contestée. En
cas de refus de l’administration, le juge confirme les allégations du requérant qui ne
supportera alors plus seul la charge de la preuve ; CE 28 Mai 1954, Barel ou Cour d’appel de
Dakar 9 Janvier 1970, Mor DIAW.

REMARQUE : il a déjà été analysé dans le cadre des recours contentieux que
l’introduction d’une requête n’a pas d’effet suspensif ; qu’il s’agisse du recours pour excès de
pouvoir ou du recours de plein contentieux. C’est pourquoi la procédure administrative
contentieuse a aussi un caractère non suspensif. Les exceptions concernent les sursis à
exécution qui répondent à un régime spécifique déjà étudié.

Ensuite il faut ajouter que la procédure administrative contentieuse est secrète ; cela
veut dire que les documents sont réservés aux seuls acteurs du procès et si les audiences sont
publiques, le délibéré est secret, la pratique des opinions dicidentes est interdite.

TITRE 2 : LA SOUMISSION DE L’ADMINISTRATION AU DROIT

L’activité de l’administration qui a été déjà étudié n’est pas laissé au bon vouloir de
l’autorité administrative ; elle est limitée par le droit. La soumission de l’administration au
droit implique que les personnes publiques doivent se plier à un ensemble hiérarchisé de n
ormes juridiques organisant soit les modalités de la réparation d’un préjudice subi par un
particulier : c’est le principe de responsabilité (Chap1), soit l’activité normatrice de
l’administration à savoir le principe de légalité (Chap2).

CHAPITRE I : LA RESPONSABILITE ADMINISTRATIVE

Dans le cadre de l’exercice de son action, l’administration peut commettre des


dommages. Dans un Etat de droit, ces dommages doivent être réparés. Mais pendant
longtemps l’irresponsabilité a caractérisé l’intervention de la puissance publique. C’est
progressivement que s’est affirmé le principe de responsabilité. On distingue généralement :

La responsabilité contractuelle et la responsabilité extracontractuelle.

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La 1ère a été abordée dans le cadre du contrat administratif. Elle met en évidence soit les
manquements des parties à leurs obligations contractuelles soit la responsabilité de
l’administration lorsqu’elle cause à un cocontractant un dommage suite à l’exercice de ses
prérogatives. Donc l’accent sera mis sur la 2ème qui est la responsabilité extracontractuelle.

Après avoir analysé les conditions d’engagement de la responsabilité (S1), il sera


envisagé les modalités d’engagement de la responsabilité (S2).

Section 1 : Les conditions d’engagement de la responsabilité

La condition principale d’engagement de la responsabilité de l’administration est


l’existence d’un préjudice ; mais tous les préjudices ne sont pas réparables car le législateur
peut exclure la réparation de certains d’entre eux. Deux questions seront étudiées dans ce
cadre : Quelles sont les caractères du préjudice (Par1) ? Comment est-il réparé (Par2) ?

Paragraphe 1 : Les caractère du préjudice

Le préjudice désigne le dommage considéré à travers la personne de la victime. Pour


être indemnisable, le préjudice doit être certain (A) et il doit résulter directement d’un fait
imputable à l’administration ; c’est le caractère causal (B).

A. Le caractère certain du préjudice

La certitude du préjudice est une exigence. Lorsque l’administration commet une faute.
Les particuliers ne peuvent faire valoir un droit à réparation que si le préjudice est certain. Il
ne doit pas être éventuelle ou hypothétique.

Cependant, le préjudice peut être future ; c’est ainsi que la perte d’une chance est
assimilée par la jurisprudence à un préjudice certain. Pendant longtemps le juge administratif
s’est refusé à réparer le préjudice moral au motif que « les larmes ne monnaient point » avant
de revenir sur sa décision, CE 24 Novembre 1961, Le Tisserand.

En plus de sa certitude, le préjudice doit aussi revêtir un caractère causal.

B. Le caractère causal du préjudice

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On évoque la théorie de la causalité adéquate. L’idée est qu’il doit exister une relation
de cause à effet entre le préjudice subi et le fait dommageable imputable à l’administration.
Pour qu’un fait puisse être considère comme étant la cause d’un dommage, il ne suffit pas de
considérer qu’en son absence ce dernier ne serait pas obtenu. Au contraire, le juge apprécie si
le fait a une vocation particulière, d’après la cour normale des choses, à provoquer le
dommage. Le dommage doit être la conséquence immédiate et nécessaire du fait générateur.
La théorie de la causalité directe permet au juge de rechercher la relation adéquate entre un
fait et un dommage ; ce qui permet de ne pas rendre générale la responsabilité administrative.
Le préjudice certain et imputable à l’administration doit être réparable.

Paragraphe 2 : La réparation du préjudice

Au terme de l’article 141 du COA « le dommage causé par le fonctionnement d’un


service public ou l’exécution d’un travail public, soit aux tiers, soit aux usagers, soit aux
personnes participant à l’activité du service, n’est réparé que sous la forme de dommage
intérêt ». La réparation du préjudice se traduit par l’évaluation de l’indemnité. Plusieurs
éléments sont pris en compte : d’abord il existe des causes d’exonération (A), ensuite il faudra
analyser les règles de calcul de l’indemnité (B).

A. Les causes d’exonération

Elles désignent les moyens de défense que l’administration peut utilement soulever
devant le juge pour se décharger totalement ou partiellement de sa responsabilité. Elles sont
nombreuses ; il est possible de distinguer entre deux types de cause : d’une part le fait de la
victime (1) et d’autre part les causes étrangères (2).

1. Le fait de la victime

Rappelons que le préjudice a un caractère causal ; c’est-à-dire qu’il doit exister un


rapport de cause à effet entre le dommage subi par la victime et le fait imputable à
l’administration. Il existe des circonstances où la causalité directe n’est pas établie du fait du
comportement de la victime qui a soit commis une faute qui est la cause du dommage, soit
parce qu’elle s’est placée dans une situation illégitime (ex : un occupant irrégulier du domaine
public qui subit un dommage lors de l’évacuation), soit parce qu’elle a acceptée en toute

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connaissance de cause un risque dont elle a été finalement victime (ex : un individu qui
s’engage sur un chemin dangereux et signalé).

Le fait de la victime est une cause d’exonération partielle ou totale de l’administration ;


c’est l’application de l’adage « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ». Voir CA de
Dakar 9 Avril 1971, Société Bérnabé.

2. Les causes étrangères

Elles concernent : Le fait d’un tiers, la force majeure et le cas fortuit.

Le fait d’un tiers : le tiers peut être soit une personne publique soit une personne privée.
Lorsqu’il intervient dans la réalisation du dommage le juge administratif adopte une solution
simple ; c’est ainsi que l’administration sera totalement exonérée si le dommage est le résultat
exclusif de la faute d’un tiers. Elle le sera partiellement si son fait à seulement contribué avec
celui du tiers à la réalisation du dommage. La responsabilité in solidium qui caractérise la
responsabilité civile n’est pas reprise par la jurisprudence administrative. Elle permet, quand
un défendeur et un tiers sont coauteur d’un dommage, à la victime d’obtenir du défendeur la
réparation de l’intégralité du dommage et d’intenter après une action récursoire contre le tiers
afin qu’il supporte sa part de responsabilité. En droit administratif le défenseur et le tiers ne
sont pas en principe tenu de réparer la totalité du dommage. Ils ne supportent que la part qui
leurs incombe personnellement. Cependant le juge admet quelques exceptions à ce principe en
matière de responsabilité pour dommage de travaux publics (CE 26 AVRIL 1968, VILLE DE
CANNE), en matière de responsabilité sans faute (CE 19 JANVIER 1962, BARCON). Il en
est aussi en matière de responsabilité pour faute, lorsque le défendeur et le tiers sont deux
personnes publiques collaborant à l’exécution d’un même service public (CE 24 MARS 1978,
LA PORTA).

La force majeure : elle est traditionnellement définie à partir de trois (3) éléments ; il
s’agit d’un évènement extérieur, imprévisible et irrésistible. La force majeure peut exonérer le
responsable de toute responsabilité. Mais si le fait du défendeur a aggravé les conséquences
dommageables d’un évènement de force majeure, elle n’aurait qu’un effet exonératoire
partiel.

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Le cas fortuit : il se distingue de la force majeure en ce sens qu’il réunisse ses deux
éléments (imprévisibilité et irrésistibilité mais pas l’extériorité). Le cas fortuit n’est pas
extérieur au défendeur, c’est ce qui explique sa faible portée exonératoire. Il ne joue en effet
que dans le régime de responsabilité pour faute à l’exclusion de la responsabilité sans faute où
il ne permet pas de supprimer l’imputabilité du dommage au défendeur.

C’est en considérant toutes ces différentes causes d’exonération que l’indemnité sera calculé.

B. Les règles de calcul de l’indemnité

La première règle concerne la date de l’évaluation du dommage qui présente un grand


intérêt pour la victime en raison des fluctuations monétaires. Le temps de la justice qui est
diffèrent de celui du justiciable fait qu’il peut s’écouler une longue période entre la date du
dommage et celle de l’examen de la demande de réparation par l’administration ou par le
juge. La jurisprudence administrative à dégager la règle selon laquelle la décision allouant des
dommages et intérêts est simplement déclarative et non constitutive. Elle reconnait un droit
préexistant qu’elle ne crée pas. En application de cette règle, une distinction est établie entre
les dommages subis par les biens et les dommages causés aux personnes. Pour les premiers,
l’évaluation est établie à la date de réalisation des dommages. Tandis que pour les seconds, la
date de référence est fixée à la date à laquelle l’autorité administrative ou juridictionnelle rend
sa décision ; voir les arrêts dits ARRETS DES VEUVES (CE 21 MARS 1947, VEUVE
AUBRY, VEUVE LEFEVRE ET VEUVE PASCAL) ; (CE 21 MARS 1947, Cie Générale
des Eaux).

La deuxième règle concerne la fixation de l’indemnité. Il faut rappeler que le droit


administratif est un droit d’équilibre. Il convient donc d’éviter de léser les particuliers mais de
ne pas obérer les finances publiques. La victime ne doit être ni appauvri par l’indemnisation
ni enrichi. Si l’article 141 du COA affirme que la réparation ne peut se faire qu’en dommage
et intérêt, le préjudice subi doit faire l’objet d’une réparation intégrale. Pour ce faire, une
indemnité principale et des indemnités accessoires sont déterminées.

L’indemnité principale est constituée du capital alloué à la victime pour réparer le


préjudice qu’elle a subi. Pour éviter que les dommages et intérêts alloués excèdent le
préjudice à réparer, des déductions sont établies. Ainsi, le juge soustrait les somme déjà versés

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à la victime et liés à la réalisation du dommage ; Exemple des sommes provenant des


assurances pour la sécurité sociale.

Quant aux indemnités accessoires, elles vont couvrir soit les préjudices résultant du
retard accusé dans le versement des indemnités ; on parlera alors d’indemnités moratoires,
soit à compenser équitablement les frais de justice. Les conditions d’engagement de la
responsabilité posées ; reste à voir quelles sont ses modalités d’engagement.

Section 2 : Les modalités d’engagement de la responsabilité

Deux grands régimes de responsabilité existent : la responsabilité pour faute (P1) et la


responsabilité sans faute (P2).

Paragraphe 1 : La responsabilité pour faute

Il s’agit d’un régime dans lequel la responsabilité se fonde sur la faute. Traditionnellement, la
faute est définie comme étant tout manquement à une obligation préexistante. Elle résulte
donc d’un comportement qui n’est pas conforme à celui que l’on était normalement en droit
d’attendre d’un agent ou d’un service. Dès lors, il faut distinguer entre la faute personnelle et
la faute de service (A) et entre la faute simple et la faute lourde (B).

A. Distinction entre faute personnelle et faute de service

La faute qui a causé le dommage peut être une faute de l’agent en tant que personne
physique indépendant de son appartenance à un service administratif ; c’est la faute
personnelle (1) mais elle peut être aussi une faute de service qui va engager la responsabilité
de la personne publique dont relève ce service (2). Mais très souvent, il existe un cumul de
faute et de responsabilité (3).

1. La faute personnelle

Elle a été défini par Laferrière comme étant la faute qui révèle « L’homme, avec ses
faiblesses, ses passions et ses imprudences ».

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Objectivement, la faute personnelle est celle qui ne peut être rattaché au service ; ex des
fautes commises par des agents pour des faits purement privés en dehors du service (un
gendarme ou un policier qui utilise son arme de service pour se venger ou encore un agent qui
utilise un véhicule de service en dehors des heures de service, à titre privé). C’est aussi
l’exemple des fautes commises dans le service mais qui, en raison de leur gravité ou en raison
de l’intention de nuire de leurs auteurs, ne peuvent être considérées comme étant conditionnée
par un service ; voir TC 2 Juin 1908, Girodet contre Marizot. Il s’agit dans cette affaire d’un
instituteur qui tient devant ses élèves des propos diffamatoires, blasphématoires et obscènes.

La faute personnelle n’engage que la responsabilité de son auteur et non l’administration.

2. La faute de service

La faute de service a été défini par Laferrière comme étant la faute qui révèle « un
administrateur plus ou moins sujet à erreur ».

Il s’agit de la faute commise dans le service et qui n’était ni intentionnelle ni d’une


gravité inadmissible et qui n’est pas détachable du service. Au contraire, elle lui est
imputable ; c’est pourquoi elle engage la responsabilité de l’administration et non celle de
l’agent qui a commis la faute.

Cependant dans le régime de la responsabilité, la faute personnelle n’exclut pas la faute


de service. C’est ainsi qu’il existe dans certaines circonstances un cumul de faute et un cumul
de responsabilité.

3. Le cumul de faute et de responsabilité

La jurisprudence administrative considère que lorsqu’une faute personnelle a été


commise dans le service ou à l’occasion du service, si les moyens et les instruments de la
faute ont été mis à la disposition du coupable par le service, si la victime n’a été mis, en
présence du coupable, que par l’effet du jeu du service ; si en un mot, le service a conditionné
l’accomplissement de la faute ou la production de ses conséquences dommageables vis-à-vis
d’un individu déterminé, le juge administrative pourra et devra dire « la faute se détache peut
être du service ; c’est l’affaire aux tribunaux judiciaires d’en décider, mais le service ne se
détache pas de la faute » ; conclusion du commissaire de gouvernement arrêt CE 26 Juillet
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1918, Epoux Lemonnier. Dans cette décision, c’est en empruntant une voie que la victime est
blessée par une balle issue d’un tir installée sur la rive opposée. L’autorité municipale chargé
de veiller à la sécurité des voies publiques a commis une faute lourde en autorisant
l’établissement de ce tir sans s’être assuré au préalable que les conditions de l’installation et
l’emplacement offrait des garanties aux citoyens. On peut aussi cité l’arrêt du CE 3 Février
1911, Anguet. Un bureau de poste dont la porte a été fermé avant l’heure règlementaire, un
administré refuse de sortir, expulsé de force, il subit une double fracture. Le juge considère
qu’il y a certes faute des agents mais aussi faute de service. En systématisant, on peut dire
qu’il existe un cumul de faute et donc de responsabilité, soit parce que la faute a été commise
pendant le temps de service et qu’il se trouve qu’elle est non détachable de celui-ci parce
qu’elle est permise ou déterminée par le service, soit parce que le service a été le moyen,
l’instrument d’accomplissement de la faute par l’agent. C’est ainsi que le juge admet que le
dommage causé par un agent utilisant un véhicule en dehors du service n’est pas dépourvu de
tout lien avec le service. En revanche, la faute commise dans le cadre du service mais qui est
intentionnelle ou d’une gravité inadmissible sera considéré comme étant détachable du
service ; voir CE 11 Novembre 1953, Oumar Samba.

En cas de cumul de responsabilité, la victime dispose d’un droit d’option. Elle peut soit
attaquer l’agent, soit attaquer l’administration, mais il lui est défendu de les attaquer tous dans
une seule action afin d’éviter une double indemnisation. Le cumul de responsabilité a pour
conséquence les actions récursoires. Elles désignent les actions qui suivent une action
principale. Il faut distinguer deux situations : l’action récursoire de l’administration contre son
agent et l’action récursoire de l’agent contre son administration. Le régime des actions
récursoires a été déterminés par le juge administratif français à travers deux arrêts rendus le
même jour ; CE Ass. 28 Juillet 1951, Laruelle et, Delville. Le juge abandonne la règle selon
laquelle l’administration ne pourrait se retourner contre son agent pour obtenir le
remboursement des dommages et intérêts qu’elle a versés en raison de sa faute personnelle.
Cette jurisprudence a été repris par le législateur sénégalais dans le COA à l’article 145. C’est
ainsi que lorsqu’un agent a été condamné à indemniser une victime de la totalité du préjudice
qu’elle a subi, il peut se retourner contre l’administration pour récupérer tout ou partie de
l’indemnité. De la même façon, la personne publique condamné a indemnisé une victime de la
totalité du préjudice qu’elle a subi, dispose de la faculté de demander à ses agents la
réparation des dommages qui lui sont directement opposés par leurs faits.

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B. Distinction entre faute simple et faute lourde

Selon l’article 143 du COA, les usagers ont droit à la réparation du dommage causé par
une faute relative au travaux publics ou par le fonctionnement défectueux d’un tel ouvrage.
En matière administrative, une faute simple suffit pour engager la responsabilité de
l’administration ; mais dans certains cas, le juge exige une faute lourde. La différence entre
faute grave et faute simple réside essentiellement dans l’objectif visé par le juge. Alors que la
faute simple peut être apprécier par rapport au fonctionnement normal du service ou au
comportement de l’agent, la faute lourde se base sur l’idée que l’administration qui a en
charge l’intérêt général peut agir dans des circonstances difficiles, ce qui excuse la faute
légère. La faute lourde est communément appelé « faute manifeste d’une particulière
gravité ». Elle est exigée par exemple en matière de responsabilité du fait des services de
police. Il faut remarquer qu’en matière d’engagement de la responsabilité de l’administration
pour faute, la preuve incombe au demandeur mais le caractère inquisitorial de la procédure
administrative contentieuse, déjà étudier, pousse parfois le juge à renverser la charge de la
preuve en instituant une présomption de faute. Si la responsabilité de l’administration peut
être engager pour faute, elle peut l’être aussi sans faute.

Paragraphe 2 : La responsabilité sans faute

Un système permettant d’engager la responsabilité de l’administration sans que le demandeur


ait à prouver l’existence d’une faute. En revanche, le défendeur ne pourra pas s’exonérer en
démontrant qu’il n’a pas commis de faute. Il s’agit alors d’une responsabilité qui place la
victime dans une situation favorable. Pour obtenir une réparation, il suffit qu’elle prouve
qu’elle a subi un préjudice anormal et spécial imputable à l’administration. La responsabilité
sans faute peut être consacrée par le législateur à travers le vote de loi réparant des dommages
d’origine divers. Mais elle a surtout été consacrée par la jurisprudence administrative qui se
fonde sur l’équité et la solidarité. Le législateur sénégalais a repris en partie la solution
française à l’article 142 du COA. La responsabilité sans faute est admise dans un série de cas,
c’est ainsi que l’on distingue entre la responsabilité sans faute pour risque (A) et la
responsabilité sans faute pour rupture de l’égalité devant les charges publiques (B).

A. La responsabilité sans faute pour risque

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Dans le cadre de l’exercice de certaines activités, l’administration peut faire courir un


risque aux citoyens. La responsabilité sans faute est la contrepartie de ce risque. Le juge
administratif applique la théorie du risque dans plusieurs cas :

_ Lorsque l’administration utilise des objets et engins dangereux tel que les explosifs ou
les armes, le juge admet la responsabilité sans faute de l’administration ; CE 28 Mars 1919,
Regnault-Des Roziers ou encore CE 24 Juin 1949, Lecomte.

_ Lorsqu’il existe des situations dangereuses ; par exemple l’Etat oblige ses agents
(diplomates ou coopérants) à rester en poste dans un pays en crise où ils peuvent être exposé à
des maladies ou à des violences dans l’exercice de leur fonction ; CE, 06 Novembre 1968,
Dame SAULZE.

_ La responsabilité sans faute de l’administration peut être engagée lorsque l’Etat utilise
des méthodes dangereuses. Il s’agit des méthodes appliquées à des fins de réinsertion sociale
ou thérapeutique, Ex : des dommages causés par des jeunes délinquants placés dans
différentes établissements d’éducation surveillés, CE Sec.3 Février 1956 Thouzellier.

_ La théorie du risque est également invoquée pour justifier la responsabilité sans faute
de l’administration en raison des dommages résultants d’un ouvrage ou d’un travail public
subi par les tiers à l’exclusion des usagers, voir CA de DAKAR 9 Janvier Mor DIAW.

B. La responsabilité Ss faute pour rupture d’égalité devant les charges publiques

C’est l’hypothèse où l’administration impose une sujétion à des administrés dans


l’intérêt général. Depuis l’arrêt rendu par le CE 14 Janvier 1938, Société des produits laitiers
« La Fleurette », le juge administratif admet que le préjudice causé par des disposions
législatifs et règlementaires peut donner droit à réparation sous certaines conditions. C’est ce
que le législateur sénégalais a repris à l’article 142 du COA qui affirme que « les tiers peuvent
obtenir réparation d’une partie du dommage anormal et spécial qui leur est causé par
l’intervention d’une loi ou d’un règlement régulier lorsque le législateur n’a pas exclu
explicitement toute réparation et que la mesure, bien que prise dans l’intérêt général, a pour
effet d’avantager anormalement un groupe de particulier et de désavantager gravement le
demandeur ».

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Deux conditions sont posées par le législateur :

Le préjudice doit avoir un caractère spécial et anormal ;


Le législateur ne doit pas exclure l’indemnisation.

La responsabilité sans faute peut être aussi engagée lorsque l’autorité administrative
refuse de prêter main forte à l’exécution d’une décision de justice ; voir CE 30 Novembre
1923, COUÏTEAS. Il en est aussi en matière de collaboration occasionnelle apporté par des
personnes extérieures au service publics et qui subissent un dommage ; CE 21 Juin 1895,
CAMES.

Paragraphe 3 : Les régimes particuliers de responsabilité

Au Sénégal ils concernent notamment les membres de l’enseignement public et les


dommages causé par les véhicules administratifs.

Au terme de l’article 146 du COA, la responsabilité de l’Etat est substituée à celle des
membres de l’enseignement public en raison des dommages subis ou causés par les élevés
placés sous leur surveillance. La réparation ne peut être demander qu’a l’Etat.

L’article 147 du COA considère que le droit à réparation des dommages causés par les
véhicules ou moyens de transports qu’utilise l’administration est régi par le droit commun de
la responsabilité et par les règles concernant le fait des choses et des animaux.

L’action est dirigée contre l’auteur du dommage ; mais la responsabilité de


l’administration est substituée à l’égard des tiers, à celle de l’agent agissant à l’occasion de
l’exercice de ses fonctions sauf l’action récursoire contre ce dernier.

CHAPITRE II : LE PRINCIPE DE LEGALITE DU DROIT ADMINISTRATIF

Le principe de légalité en droit administratif signifie que l’administration est soumise au


droit et que son action doit être conforme à la loi. Il existe une structuration hiérarchisée du
droit (le pyramide de KELSEN : constitution, traités et conventions internationales, lois,
principes généraux du droit, règlement).

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Mais l’administration, pars qu’elle a en charge l’intérêt général, doit disposer d’une
marge de liberté dans son action et, dans certains domaines et dans certaines circonstances, la
légalité ne peut s’appliquer de manière stricte sans entraver l’action efficace de
l’administration ; elle fait alors l’objet d’un infléchissement. Dès lors, deux questions méritent
d’être posées :

Quelles sont les sources de la légalité ? on parlera ici du contenu du principe de légalité.
Ensuite comment s’applique le principe de légalité ? il s’agira de parler des modalités
d’application du principe de légalité.

Section 1 : Les sources de la légalité

Elles sont nombreuses ; et la doctrine propose plusieurs critères pour les classifier.
Certains distinguent entre les sources écrites et les sources non écrites. D’autre distinguent
entre les sources internes à l’administration et les sources externes à l’administration. Mais
quel que soit le critère privilégier, la distinction pousse à énumérer les différentes règles qui
s’imposent à l’administration quand elle agit.

Si on prend en compte la pyramide de Kelsen, on distinguera entre les normes


constitutionnelles, les conventions et traités internationaux, les lois, les principes généraux du
droit, les règlements et actes individuels les contrats administratifs, les décisions de justice.

La constitution : elle comprend le préambule qui renvoi a d’autre textes plus le corpus
de la constitution et les règles que dégage le juge constitutionnel ; l’ensemble est appelé bloc
de constitutionnalité.

Ce bloc s’impose au législateur quand il vote la loi ; il s’impose aussi à l’administration


parce que les textes constitutionnels sont les sources de la légalité administrative. Le juge
administratif considère que les actes administratifs peuvent être attaqués en raison de leur
contrariété avec les dispositions de la constitution ou du préambule (CE 30 Octobre 2008,
Commune d’Allecy).

Si un traités ou une convention viole la constitution, avant de la ratifier il faut procéder


à la révision de la constitution. Mais quand un acte administratif qui est conforme à une loi
qui, elle-même est contraire à la constitution, le juge administratif considère que la loi fait
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écran (théorie de la loi écran) ; il se limite donc au contrôle de la conformité de l’acte par
rapport à la loi. Il ne peut pas contrôler la loi par rapport à la constitution parce que ce sera un
contrôle de constitutionnalité auquel le juge administratif n’est pas compétant. En l’espèce, si
les arguments du requérant sont fondés, le juge saisi va, à son tour, saisir le conseil
constitutionnel.

Traités et conventions : voir la constitution dans ses dispositions relatives aux traités et
conventions.

Il est admis que les actes administratifs qui violent les traités et conventions puissent
être contestés mais pendant longtemps le juge administratif n’a pas voulu contrôler la
conformité des actes aux traités et conventions pour deux raisons : d’abord il considère que
l’interprétation des traités et conventions relève de l’activité diplomatique du gouvernement…
la deuxième raison est que le juge applique ici aussi la théorie de la loi écran. Quand un acte
administratif est conforme à une loi qui, elle-même, viole un traité ou une convention, le juge
se limite à vérifier si l’acte est conforme à la loi ou non. C’est suite à la jurisprudence du
conseil constitutionnel que le juge administratif a changé d’attitude. Dans sa décision en date
du 18 Janvier 1975 IVG (interruption volontaire de grossesse), le juge constitutionnel a refusé
de se reconnaitre compètent pour contrôler la conformité des lois aux traités et conventions
internationales.

C’est dans l’arrêt CE Ass. 20 Octobre 1989, Nicolo, le juge décide d’écarter, en
l’espèce, l’application d’une loi qui serai incompatible avec un traité alors même cette loi
serait postérieur.

La loi : la loi est un acte voté par le pouvoir législatif selon les procédures édictées par
la constitution. Il y a plusieurs types de loi : les lois organiques, les lois ordinaires, les lois
référendaires, …

Les principes généraux du droit : ce sont des principes non écrits.

Le juge en déduit qu’il s’imposent à l’administration, a toutes autorités règlementaires


même en l’absence de disposition législative, CE 26 Juin 1959, Syndicat Général des

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Ingénieurs-français. Comme principes généraux du droit il y a : le principe de continuité, le


principe d’égalité, la non rétroactivité, les droits de la défense etc.

Les décisions de justice : elles revêtent l’autorité de la chose jugée et s’impose à


l’administration.

Les actes administratifs : ce sont les règlements, les actes non réglementaires,
individuels mais aussi les contrats administratifs et les contrats de droit privé que
l’administration passe. Tous ces actes s’imposent à l’administration.

Section 2 : L’application du principe de légalité

Le principe de légalité fait l’objet d’aménagement (P1) mais son application connait des
limites (P2).

Paragraphe 1 : Les aménagements du principe de légalité

Cela veut dire que l’autorité de la règle de droit est d’une intensité différente ; dans
certains cas, la compétence de l’administration est liée (la compétence liée signifie que les
actes de l’autorité administratives sont dictés par la loi) ; dans d’autre cas, l’administration
dispose d’une marge de manœuvre ou d’un pouvoir discrétionnaire.

Il y a compétence liée lorsque la loi confère une compétence à une autorité


administrative et indique de façon impérative les modalités selon lesquelles cette compétence
doit être exercée.

Il y a pouvoir discrétionnaire lorsque la loi reconnait une compétence à l’autorité


administrative mais lui laisse la liberté de choisir les modalités dans lesquelles elle exerce la
compétence et lui laisse juger de l’opportunité et du moment de la mesure à prendre. Le
pouvoir discrétionnaire correspond à une indétermination juridique qui laisse une liberté
d’action à l’autorité administrative.

Paragraphe 2 : Les limites du principe de légalité

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Le droit administratif pose des limites à l’application du principe de légalité. Il en est


dans certains domaines : ce sont les actes de gouvernement ; et dans certaines circonstances
exceptionnelles.

Les actes de gouvernement : ils se caractérisent par une immunité juridictionnelle.


Aucun recours n’est admis contre eux.

Les circonstances exceptionnelles : en temps de guerre le juge administratif considère


que l’administration peut prendre des mesures en dehors des formes et conditions légales si
elles sont justifiées par l’intérêt général.

Dans l’arrêt Couitéas déjà évoqué, le juge administratif considère que le refus, par
l’administration, de prêter le contrôle de la force n’est pas illégale si les circonstances sont-
elles que cette exercice risquerait de provoquer des conséquences politiques et sociaux graves.

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