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Introduction
Le droit administratif est une discipline du Droit public général créé dans un contexte
historique et politique caractérisé par la prédominance de la bourgeoisie et par la
centralisation des affaires contentieuses entre les mains du juge judiciaire, c’est-à-dire celui
qui tranche les conflits interindividuels (divorces, garde des enfants) conformément au droit
privé, au droit commun. C’est pourquoi le juge judiciaire est appelé juge du droit commun.
Ce juge judiciaire, lorsqu’il tranchait les conflits opposant l’administration aux administrés,
mettait ces parties aux mêmes pieds car le droit privé dont il est censé appliquer l’application
repose sur un postulat égalitaire.
De ce fait le juge judicaire ne prenait pas en compte les spécificités des missions de
l’administration à savoir la satisfaction permanente de l’intérêt général. C’est ce qui a amené à
penser à créer une juridiction administrative pour que celle-ci soit le juge de l’administration,
le juge qui prend en compte les missions d’intérêt général dévolues à l’administration et à
l’élaboration progressive du droit administratif.
Du coup, le juge administratif était amené à créer, à inventer un corps de règles devant
permettre de gouverner, de structurer, d’encadrer les relations entre l’administration et les
administrés.
Par ailleurs, le droit administratif a des fondements philosophiques et politiques qui découlent
de l’idéologie libérale continue dans la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen (26
Août 1789). Ainsi, en reconnaissant la prévalence de l’intérêt général que poursuit
l’administration sur celui des particuliers et en sanctionnant l’administration pour des fautes
commises et causées aux particuliers, le juge administratif montre que le droit administratif
qu’il a lui-même créé est à la fois un droit inégalitaire et libéral. Le droit administratif a aussi
des fondements institutionnels en ce sens qu’il est un droit étatique applicable à
l’administration.
Mais il faut souligner que les normes du 16-24 Août 1790 et le décret du 16 Fructidor an III
avaient prévu le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires et
interdisant du coup au juge judiciaire la connaissance des conflits dans lesquels
l’administration est impliquée. Désormais il appartiendra au juge administratif, juge de
l’administration, de juger celle-ci. C’est dans ce cadre qu’est née la première juridiction
administrative qui est le Conseil d’Etat en France qui, à son premier arrêt rendu en 1855 dans
l’affaire Rotschild, interdit le recours au code civil pour juger de la responsabilité extra-
contractuelle de l’Etat et s’attribue ainsi la connaissance des litiges en invoquant le principe
d’un droit spécial pour les activités de services publics, définis à l’époque comme une activité
d’une personne publique visant la satisfaction de l’intérêt général.
Pour éviter les conflits de compétence entre les deux juridictions, judiciaire et administrative,
il a été créé en France une autre juridiction pour les départager appelée Tribunal des conflits
(conflit positif de compétences).
En effet, les dirigeants de l’époque, parce que pétris de la culture juridique et politique
française qu’ils connaissent le mieux pour avoir séjourné en France pendant un certain temps,
ont essayé de transposer, de plaquer des règles de droit chargées d’histoires et de saleurs dans
une situation de contexte socio-culturels où les réalités n’étaient pas identiques à celles que
véhiculent lesdites règles.
C’est le lieu de préciser qu’en créant le COA, le Sénégal a opté pour la codification du droit
administratif qui comporte des revers parce qu’elle fige un droit appelé à évoluer et cantonne
le juge dans une fonction d’application du COA et non de créativité et d’inventivité.
En effet, le droit est un produit, un patrimoine collectif et culturel qui évolue au gré des
préoccupations et aspirations sociales d’un environnement déterminé, c’est pourquoi le juge
américain Holmes pouvait affirmer « Le droit est né des entrailles de la société ».
I/ L’administration
A/ Critère organique
B/ Critère fonctionnel
S’agissant des fonctions juridiques : Il faut signaler que l’administration a une fonction
d’exécution des lois. Administrer, c’est alors prendre des lois, des mesures générales et
individuelles pour les appliquer à leurs destinations.
S’agissant de la fonction sociale et politique : Il faut remarquer trois grandes catégories
d’activités de police (ensemble de mesures prises en vue d’asseoir la sauvegarde de
l’ordre public).
- Par le procédé de la police : L’administration publique intervient pour empêcher les
excès des activités privées.
- Les activités de services publics : Elles consistent dans la fourniture de prestations
aux administrés ; l’Etat et les autres collectivités prennent en main la tâche de
satisfaire un besoin public.
- L’aide à l’initiative privée : C’est une activité par laquelle l’administration encourage
les entreprises qui ont des activités d’intérêt général en leur octroyant certains
avantages (exonérations fiscales, subventions etc.).
Notons tout de même que le but que poursuit toute administration est en principe l’intérêt
général. En effet, il existe certaines nécessités auxquelles l’initiative privée ne peut répondre
et qui sont vitales pour la communauté nationale toute entière et pour chacun de ses membres.
Exemple : Le besoin de sécurité nationale et individuelle.
Toutefois, il faut souligner que l’administration n’est pas sur le même pied que les particuliers
du fait de la mission qui lui est assignée à savoir la satisfaction permanente de l’intérêt
général.
La puissance publique (pouvoir de contrainte, de commandement) dont elle dispose est une
portion de la souveraineté de l’Etat. Elle dispose d’un certain nombre de privilège appelé
prérogative de puissance publique. Ces prérogatives sont dites exorbitantes de droit commun
en ce qu’elle dépasse des prérogatives qui sont reconnues aux simples particuliers. Il y a
plusieurs sortes de privilèges :
L’administration ne peut agir que pour des motifs d’intérêt général, elle ne peut recruter
comme elle veut ses agents, elle ne peut signer un contrat avec n’importe qui.
L’administration est soumise au droit administratif et cela veut dire que si l’administration
viole la légalité, les administrés (citoyens) peuvent saisir le juge administratif pour contester
la violation de leur droit.
En tant que discipline juridique, le droit administratif a un domaine très étendu. Il recouvre
de nombreuses rubriques :
Toutefois il importe de voir les caractères du droit administratif, ses fondements et ses sources
pour comprendre davantage la matière.
Le droit administratif est un droit essentiellement jurisprudentiel, un droit prétorien (parce que
né du prétoire du juge administratif précisément). Cette nature jurisprudentielle du droit
administratif s’explique par l’absence de textes ou de code administratif, par la séparation des
autorités administratives et judiciaires qui interdisent au juge judiciaire de trancher des
conflits dans lesquels l’administration est impliquée. Et enfin l’obligation qui s’impose au
juge de trancher sous peine de déni de justice.
L’existence d’un régime juridique propre à l’administration a conduit à s’interroger sur les
fondements théoriques du droit administratif. Ainsi les auteurs ont tenté sans succès de
trouver un principe unique, une notion clé permettant de déterminer la juridiction compétente
et le champ d’application du droit administratif.
Deux grandes notions ont donné la recherche : celle de puissance publique et celle de service
publique.
Elle a été retenue par certains auteurs du 19 e siècle et du début du 20e siècle au moment où on
définissait l’administration par la puissance publique. Les notions de souveraineté et de
commandement dominaient le système administratif ; on a donc considéré que le droit
administratif est un droit de puissance publique et il ne s’applique que lorsque
l’administration utilise des prérogatives de commandement et de contrainte. Cette notion de
puissance publique était défendue notamment par le doyen Maurice Hauriou qui a créé l’école
de Toulouse dénommée école de la puissance publique.
Cette doctrine du service public a été développée par l’école du service public par le doyen
Léon Duguit et Gaston Jèze. Cette doctrine a le plus influencé le droit administratif, le service
public était défini comme « une activité d’une personne publique (l’Etat et ses
démembrements) visant à satisfaire un besoin d’intérêt général ». Selon cette doctrine,
l’activité publique est entièrement consacrée à la gestion des services publics. Le droit
administratif trouverait alors son unité dans la notion de service public. Cette querelle
doctrinale a rendu difficile la recherche d’une notion consensuelle devant déterminée la
juridiction compétente et le champ d’application du droit administratif.
La notion de service public qui a joué un rôle important dans le développement du droit
administratif est entrée en crise dans les années 20. En effet, la double en service public et
droit administratif et service public et personne publique est rompue. En effet, le Conseil
d’Etat (CE) a eu à admettre dans l’arrêt Bac d’Eloka rendu en 1921 la possibilité d’une
application du droit privé à une catégorie du service public appelé service public à caractère
industriel et commercial.
Il a par ailleurs admis dans l’arrêt Epoux Bertin rendu par le Conseil d’Etat français en 1956
la possibilité pour des personnes privées d’accomplir une mission qualifiée de service public
par le juge à partir du moment où celle-ci vise la satisfaction d’un intérêt général. Cette
décision apparaît alors comme une négation du service public en vertu de laquelle ne
pouvaient réaliser une mission de service public que l’Etat et ses démembrements. Par
conséquent nous voyons que la notion de service public est devenue difficile à définir. Ainsi
le service public en tant que critère de détermination du droit administratif est devenu
inadéquat et en tant que principe explicatif, il est devenu flou. Aucun principe ne peut à lui
seul expliquer tout le droit administratif. Il y a donc échec de toute tentative d’explication du
droit administratif à partir d’une notion unique. C’est pourquoi la doctrine est davantage
favorable à la combinaison des deux critères : c’est ce qui fait du droit administratif un droit
qui reposerait à la fois sur la puissance publique (les moyens à mettre en œuvre, les
prérogatives de puissance publique, le pouvoir de commandement) et sur le service public (la
finalité d’intérêt général qui caractérise l’action administrative par opposition à celle des
particuliers).
Elle peut être définie comme l’ensemble des décisions d’une justice et elle joue un rôle
important dans la création du droit administratif. C’est pourquoi on dit qu’il est
fondamentalement jurisprudentiel, un droit prétorien né de l’imagination et de l’ingéniosité du
droit administratif français. En effet en l’absence de textes de loi il appartenait au juge
administratif d’élaborer des règles du droit administratif. Ce sont ces règles jurisprudentielles,
leur répétition et leur revirement jurisprudentiel qui ont constitué la base même du droit
administratif.
Ainsi contrairement au droit privé, les règles fondamentales du droit administratif ont été
créées par le juge (responsabilité administrative, domaine public, contrat administratif, acte
administratif unilatéral, pouvoir de police, recours pour excès de pouvoir).
La loi est entendu ici au sens large comme englobant l’acte législatif et l’acte réglementaire
(décret, ordonnance, arrêtés).
Il s’agit de textes écrits qui constituent d’un point de vue quantitatif une source du droit
administratif. En effet il existe de nombreuses lois régissant certains domaines du droit
administratif (organisation administrative avec le code des collectivités locales, expropriation
pour cause d’utilité publique avec la loi sur l’expropriation, motivation des actes
administratifs). Mais ces divers textes dans la plupart des cas ne font que mettre en œuvre des
principes qui ont été dégagées par la jurisprudence. C’est pourquoi on estime que ces textes
ne remettent pas en cause le caractère fondamentalement jurisprudentiel du droit
administratif.
Chapitre I : Le principe de légalité
La légalité est la qualité de ce qui est conforme à la loi, mais ici la loi doit être entendue au
sens de règle de droit et non l’œuvre du parlement (loi, règlement, principes généraux du droit
etc).
Il s’agit non seulement de dégager les règles de droit dont le respect s’impose à
l’administration mais également de rendre compte de l’intensité de l’obligation de respect de
ces règles qui pèsent sur l’administration.
Les règles de droit dont le respect s’impose à l’administration constitue ce qu’on appelle le
bloc de la légalité ou la pyramide de la légalité (Hans Kelsen).
Les sources de la légalité peuvent être classées en deux catégories : les sources extra-
administratives de légalité et les sources administratives de légalité.
Ainsi un acte administratif contraire à une règle internationale est illégal. C’est la solution
dégagée par le juge français en l’occurrence le Conseil d’Etat le 30 Mai 1952 dans l’affaire
Dame Kirkwood.
Ces dispositions de l’article 98 font des traités internationaux une source de la légalité à une
condition : leur ratification (expression du consentement de l’Etat à être lié par les traités),
leur publication et leur application par l’autre partie (voir Cour suprême 29 Janvier 1975,
Séga Seck Fall).
1ère limite : Lorsque les dispositions d’un traité international sont obscures, il revient au
Ministère des Affaires Etrangères d’interpréter les dispositions dudit traité. En ce moment
l’administration pouvait être juge et partie ; c’est pourquoi le juge français se reconnaît de
plus en plus compétent pour interpréter les conventions internationales litigieuses (voir
CE français 29 Juin 1990, GISTI).
Désormais l’interprétation du traité litigieux sera du ressort du juge et non du Ministre.
2ème limite : Lorsque l’application d’un traité international doit conduire le juge à une
ingérence dans les relations internationales, celui-ci fait une déclaration d’incompétence.
Il y a irrecevabilité contre les actes de l’administration touchant les relations
internationales parce qu’ils sont considérés comme actes de Gouvernement (des actes
insusceptibles de contrôle juridictionnel), (voir CE 1962, Dubins de Servens). Toutefois
lorsque le juge administratif est saisi d’un recours en annulation d’un acte administratif
conforme à la loi, mais laquelle loi est contraire à la constitution, dans ce cas de figure le
juge administratif se déclare incompétent au motif que la loi fait écran entre l’acte
administratif et la constitution et son intervention pourrait l’amener à empiéter dans les
compétences du Conseil constitutionnel seul juge de la loi. On voit par là que le juge
administratif veut rester fidèle à sa mission à savoir juge des actes administratifs et non
de la loi.
2) La Constitution
La constitution est la norme suprême de l’Etat, la norme mère de laquelle les autres normes
tirent leur validité juridique. Son respect est garanti par le contrôle constitutionnel du juge
administratif et du juge constitutionnel. Certaines dispositions de la Constitution concernent
l’action administrative, c’est le cas des règles relatives au pouvoir réglementaire du Premier
Ministre (art 57 de la Constitution), celui du Président de la République (art 43) et au
contreseing des actes du Premier Ministre et du Président de la République.
A côté de ces règles, il y a des règles de fond qui s’imposent aux autorités administratives.
C’est le cas du principe de la suprématie des traités internationaux par rapport à la loi (art 98)
et le principe de libre administration des collectivités locales. Ce sont ces considérations qui
ont amené le doyen George Vedel à parler de base constitutionnelle du droit administratif.
L’autorité de la Constitution comme source de la légalité a été admise depuis longtemps par
le juge français, tel a été le cas dans l’affaire Société Eky rendu par le CE le 12 février 1960.
Il en est de même du juge sénégalais (voir Cour suprême 21 Février 1978, PDS ; CS 06
Février 1974, Abdourahmane Cissé ; CS 23 Janvier 1985 Landing Savané ; CE du Sénégal
30 Août 1995, Adama Thiam).
b) Le préambule de la constitution
Mais il faudra attendre le 16 Juillet 1971 dans une décision nommée Liberté d’association
pour que le Conseil constitutionnel français reconnait que le préambule fait partie intégrante
désormais de la constitution et bloc de la constitutionnalité. Ce qui veut dire que le
préambule a la même valeur constitutionnelle que le corpus constitutionnel composé
d’articles.
Dès lors, la violation du préambule par une loi est sanctionnée par le juge constitutionnel
(annulation de la loi). De même la violation du préambule par un acte administratif entraine
une décision d’annulation prise par le juge administratif.
1ère limite : Lorsqu’un acte administratif est conforme à une loi, elle-même contraire à la
constitution, le juge refuse de contrôler la légalité de l’acte administratif par rapport à la
constitution (voir CE Assemblée 06 Novembre 1986, Arrighi). Dans ce cas de figure on
dit que la loi fait écran entre l’acte administratif et la constitution, et apprécier la
conformité de l’acte par rapport à la constitution peut amener le juge à contrôler
implicitement la conformité de la loi à la constitution ; ce qui n’est pas de son ressort
mais plutôt du juge constitutionnel.
2ème limite : Elle découle du contenu, de dispositions de la constitution qui ne sont pas
toujours précises. Dans ce cas de figure, le juge ne prend ces dispositions en
considération que lorsqu’elles sont immédiatement applicables (CE 07 Juin 1950,
Dehaene).
3) La loi
La loi constitue une des sources les plus importantes de la légalité administrative. Le respect
de la loi s’impose dans tous les cas à l’administration (elle a des droits à des droits). Et elle
considérée comme l’acte pris par le parlement élaboré selon les procédures législatives
prévues par la constitution et portant sur des matières déterminées. A cet égard, on distingue
plusieurs catégories de lois parmi lesquelles nous pouvons citer : les lois ordinaires, les
organiques (lois qui modifient ou complètent le sens d’une disposition de la constitution), la
loi référendaire, l’ordonnance (de son appellation classique décret-loi, une ordonnance est
une mesure prise par l’exécutif dans le domaine de la loi, c’est-à-dire du parlement par
habilitation législative. Ces ordonnances constituent tout de même des actes administratifs
donc susceptibles d’être attaquées devant le juge administratif de l’excès de pouvoir. Mais la
ratification de l’ordonnance par le parlement fait que celle-ci acquiert une valeur législative
et donc insusceptible d’être déférée devant le juge administratif parce que l’ordonnance cesse
d’être un acte administratif. Elle aura une forme législative ce qui entraine la compétence du
conseil constitutionnel.
Il faut distinguer deux séries de règle relatives à cette problématique : les principes généraux
du droit (PGD) et les décisions revêtues de l’autorité de la chose jugée.
Ils sont nés à partir du rôle normatif et supplétif du juge administratif. Ce sont des principes
non écrits qui s’imposent à l’autorité réglementaire en l’absence de toutes dispositions
législatives. Appliqués dans les années 40, ils ont été consacrés par les juges (voir CE 26
Octobre 1945, Aramu ; CE 29 Juin 1959, Syndicat des Ingénieurs Conseils).
Les PGD peuvent résulter de plusieurs principes parmi lesquels le principe d’égalité : égalité
devant la loi, devant les services publics, devant l’impôt (voir CS 26 Mars 1966, Samba
Ndoucoumane Guèye ; CE Sénégal 30 Août 1994, Prosper Guena N’Tichen).
On retrouve aussi les PGD qui ont pour objet la sauvegarde des droits et libertés des
citoyens : le principe de la liberté de commerce et de l’industrie, principe des droits de la
défense (voir CS 18 Mars 1981, Ndiogou Sall ; CE 31 Mai 1995, Madame Dorothée De
Souza).
On trouve par ailleurs les principes généraux relatifs à la sécurité des relations juridiques :
principe de non rétroactivité des actes administratifs (voir CE Sénégal 27 Octobre 1993, Sidy
Mouhamed Diop ; CE 24 Avril 1994, Abdoulaye Lat Diouf).
Enfin on retrouve les principes relatifs à l’organisation et au fonctionnement de
l’administration : le principe de la continuité du service public, principe de la spécialité des
établissements publics et existence du pouvoir hiérarchique (voir CE 23 Février 1994,
Antoine Waly Ndong).
Du point de vue de leur valeur juridique, les PGD, selon le professeur René Chapuis, ont une
valeur infra-législative et supra-décrétale (inférieure aux lois et supérieure aux décrets). Ces
principes sont placés entre la loi et les décrets. Mais il s’agit de principes dont la violation est
sanctionnée par le juge administratif ; cela veut dire que lorsqu’un arrêté, un décret viole un
PGD, l’acte réglementaire peut être annulé par le juge par la demande d’un requérant. C’est
ainsi que le CE français avait ordonné, dans le cadre de l’arrêt Canal, rendu en 1962,
l’annulation du décret présidentiel aux motifs que celui-ci n’avait pas, en créant des
tribunaux d’exception, respecté le principe général des droits de la défense.
Il s’agit du dispositif des décisions rendues par les différentes juridictions et qui sont
devenues définitives. Il s’agit là d’une source de la légalité administrative. Les dispositions
contenues dans le dispositif s’imposent à l’autorité administrative. Lorsqu’elles sont revêtues
de l’autorité de la chose jugée. Cependant la jurisprudence s’impose non seulement aux
administrés mais aussi aux autorités administratives. Etant revêtue de l’autorité de la chose
jugée qui lui donne le caractère de vérité légale, la règle jurisprudentielle acquiert une
autorité incontestable.
Certes le juge n’est pas lié par les décisions qu’il a rendu antérieurement. En effet, il peut
toujours modifier sa jurisprudence et n’est pas tenu par la règle du précédent même s’il doit
tenir compte de la sécurité juridique tant pour l’administration que pour les administrés.
C’est pourquoi la règle jurisprudentielle est dotée d’une certaine permanence (voir CE 26
Octobre 1925, Rodière) pour le Sénégal (voir Madame Dorothé De Souza indiqué
précédemment).
Les actes pris par l’administration s’imposent à elle-même, ils constituent une source de la
légalité. Cette situation s’explique par le principe de l’autorité de la chose décidée. Deux
types d’actes pris par l’autorité administrative constituent des sources de la légalité : les actes
administratifs unilatéraux et les actes administratifs bilatéraux.
Les règlements doivent respecter la loi (CE 06 Décembre 1909, Compagnie des chemins de
fer de l’Est), la constitution (CE 12 Février 1960, société Eky) et les principes généraux du
droit (CE 29 Juin 1956, syndicat général des Ingénieurs-conseils). Selon le principe de
l’autorité de la chose décidée, l’administration doit respecter les actes pris par elle-même
jusqu’à leur abrogation, leur modification ou leur retrait.
L’administration passe parfois des contrats avec des personnes privées c’est-à-dire des
personnes qui interviennent en dehors des structures administratives.
Les actes ainsi conclus appartiennent donc à une catégorie intermédiaire entre les sources
administratives et les sources extra-administratives de la légalité. Cependant l’administration
doit respecter ces actes administratifs bilatéraux qui sont considérés comme sources
particulières de la légalité pour deux raisons.
La première : C’est que le contrat sert de loi entre les parties. Mais il faut signaler que du
fait des effets relatifs du contrat, certains l’excluent de la pyramide de la légalité (Hans
Kelsen).
La deuxième raison : C’est qu’il n’est pas possible en principe d’attaquer par la voie de
recours pour excès de pouvoir pour se prévaloir de sa violation à l’appui d’un tel recours.
Cependant on peut attaquer en recours pour excès de pouvoir les actes détachables du
contrat (les actes pris dans le cadre de la conclusion du contrat).
La question posée ici est celle de savoir le décret de liberté dont dispose l’autorité
administrative pour prendre ou ne pas prendre un acte, pour lui donner tel ou tel contenu. Les
règles qui forment la légalité laissent à l’administration une marge plus ou moins grande de
choix pour prendre une décision, pour déterminer son contenu, pour fixer le moment de son
édiction. Cette latitude dépend des textes législatifs et réglementaires mais aussi du contrôle
du juge administratif. C’est ainsi que la distinction pouvoir discrétionnaire et compétence liée
mérite d’être étudiée et classifiée.
1) Définition
Selon la définition classique de Michoud, le pouvoir discrétionnaire est « une certaine liberté
d’actions et de décisions laissée à l’administration. Il y a pouvoir discrétionnaire toutes les
fois qu’une autorité administrative agit librement sans que sa conduite ne lui soit dictée à
l’avance par les règles de droit ».
Toutefois, il faut préciser qu’il n’y a pas d’incompatibilité entre pouvoir discrétionnaire et
principe de légalité. Le pouvoir discrétionnaire se distingue du pouvoir arbitraire du fait que
la liberté d’appréciation et d’action de l’autorité administrative résultent de l’indétermination
de sa compétence. On peut situer cette liberté soit dans l’opportunité même de l’action, soit
dans le contenu de la décision. Comme la compétence liée, le pouvoir discrétionnaire peut
être plus ou moins large selon la marge de liberté laissée à l’autorité administrative
compétente.
Le contrôle du juge permet de préciser les frontières des pouvoirs discrétionnaires. Si le juge
censure toute atteinte à la compétence liée, en revanche il ne peut contrôler l’usage que fait
l’administration de son pouvoir discrétionnaire.
Les éléments de la légalité externe : Par légalité externe on entend l’ensemble des
situations juridiques extérieures à l’acte mais dont le respect s’impose à l’autorité
administrative sous peine de voir ses décisions censurées par le juge du droit administratif.
Au nombre de ces éléments de la légalité externe, nous pouvons citer : le vice de forme et
le vice de procédure, la compétence.
- La compétence ratione materiae : cette compétence ne prévoit, comme son nom l’indique,
que les matières dans lesquelles l’autorité administrative est habilitée à prendre des mesures.
Ce qui fait que lorsque l’autorité sort du domaine matériellement indiqué par la loi, son acte
peut encourir l’annulation du juge administratif pour incompétence ; c’est la solution qui était
dégagée par le juge de la Cour suprême dans l’affaire Longin Coly du 02 Janvier 1970. Dans
cette affaire, la cour suprême a annulé pour incompétence un arrêté préfectoral pris dans les
attributions du Président de la Communauté rurale. A ce titre le juge témoigne de son
attachement à l’encadrement juridique des compétences reconnues aux autorités
administratives.