Vous êtes sur la page 1sur 56

COURS DE DROIT ADMINISTRATIF 2023

Licence I.U.B.

Par : Alphonse MALONGA

Docteur en droit

1
INTRODUCTION

On peut définir le droit administratif comme le droit qui s’applique à l’administration. Elle
montre immédiatement ses limites quand on fait valoir que le terme administration a une
double signification. Il désigne une activité mais aussi un organe ou des organes. Il a un sens
matériel ou fonctionnel et un sens organique. On prend alors en considération les organes
mêmes de prise en charge de l’administration. Le droit administratif est finalement l’ensemble
des règles juridiques applicables à l’activité administrative.

 De quelle administration s’agit-il ?

C’est de l’administration publique et non celle privée dont il est question en droit
administratif, laquelle administration publique fonctionnement selon le mode centralisé ou
décentralisé. L’administration est l’ensemble des autorités, agents et organismes qui sont
compétents pour décider ou exécuter des actions d’intérêt général qui incombe aux différentes
personnes morales de droit public que sont l’état, les collectivités territoriales locales (régions,
départements, communes), les établissements publics (territoriaux ou spécialisés) et les
groupements d’intérêt public.

En ce qui concerne l’état, le Parlement et les juridictions judiciaires ne sont pas considérés
comme des organes administratifs et par conséquent ils échappent en principe à l’application
du droit administratif. A l’opposé les autorités exécutives, président de la république, premier
ministre, ministre sont considérés comme à la tête de l’organisation administrative et donc
comme des entités purement administratives

L’administration au sens organique englobe aussi des personnes privées qui agissent par
délégation de l’état ou des collectivités territoriales ou des établissements publics et qui pour
ce faire disposent de prérogatives de puissances publiques. Exemple : les fédérations sportives
agissent par délégation. Ce sont des associations. Ces fédérations disposent de prérogatives de
puissance publique. L’administration au sens organique recouvre le président, le
gouvernement, les services centraux mais aussi les collectivités territoriales, les
établissements publics mais aussi les organismes privés chargés de la gestion des missions
d’intérêt général.

 Les activités administratives

Les activités administratives ou activités publiques ont pour objet :

2
 L’établissement ou le rétablissement de l’ordre social ;
 La satisfaction des besoins d’’intérêt général dont le domaine couvre l’ensemble des
besoins sociaux que l’initiative privée ne peut assumer ;
 L’application de la loi par la prise des mesures spéciales qui la prolongent. Ce sont les
textes d’application (décrets, arrêtés) ;
 L’exécution des lois qui sont prises par le parlement, en employant, si besoin est, la
contrainte en cas d’opposition à cette application. Elle utilisera soit le concours la
force publique à l’appui d’une décision de justice ; soit l’exécution forcée sans recours
préalable au juge.

Les activités administratives sont du ressort de l’Etat et sont assumées par les administrations
centrales et territoriales au sommet desquelles sont placés les ministres. D’autres tâches
administratives sont confiées à des personnes publiques distinctes de l’Etat : les collectivités
locales et les établissements publics.

 Le droit administratif : ses caractères

Ce droit se fonde sur de grands principes originaux que sont :

 Le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires

Ce principe consacre l’autonomie de la juridiction administrative et énonce que le juge


judiciaire ne doit pas juger l’administration qui a son propre juge : celui de l’administration.
Par conséquent, le juge judiciaire ne doit pas troubler l’administration, ni connaître de ses
actes.

 La dérogation au droit commun.

L’intérêt général exige que l’on reconnaisse des privilèges exorbitants à l’administration que
sont notamment : Les prérogatives de puissance publique et les sujétions de puissance de
puissance publique qui s’imposent à l’administration au titre des devoirs vis-à-vis des
citoyens. C’est parce que l’administration ou les administrateurs agissent dans l’intérêt public
qu’il faut leur reconnaître des droits exorbitants ces prérogatives découlent du principe
fondamental selon lequel l’administration a un pouvoir d’action d’office.

Si un particulier prend une décision qui porte atteinte aux intérêts d’un autre particulier, il ne
peut pas l’exécuter d’autorité, c'est-à-dire se faire justice à lui-même. Ainsi, un créancier ne
peut pas saisir d’office un bien de son débiteur pour se faire payer. Pour obtenir satisfaction, il

3
devra suivre tout une procédure : demander au juge de condamner le débiteur récalcitrant. Ce
n’est qu’après avoir obtenu une décision de justice qu’il pourra demander le concours de la
force publique pour obtenir satisfaction. L’administration quant à elle a la possibilité de passer
à l’action d’office sans recourir au juge par ce qu’elle dispose du privilège de la décision
exécutoire.

En cela, le droit administratif est un droit particulier qui déroge du droit privé ou droit
commun.

 Le principe de légalité

Celui - ci veut que l’administration soit soumise au droit établit sous forme de normes
législatives nationales et supranationales et réglementaires. En conséquence l’administration
est liée par la règle de droit.

 Le contrôle de l’administration

Il est de type administratif : l’administration se fait violence en exerçant un contrôle sur ses
agents. C’est le cas du contrôle financier effectué par les inspecteurs. Il est juridictionnel :
celui-ci est exercé par le juge administratif, mais aussi par le juge judiciaire. Il est non
juridictionnel car exercé par des organes neutres tels que le médiateur de la République.

CHAPITRE 1: NOTIONS FONDAMENTALES DE L’ORGANISATION


ADMINISTRATIVE

Pour comprendre ces notions, il convient d’abord d’étudier la structure organique de


l’administration. Quelques considérations seront ensuite faites sur les deux modalités selon
lesquelles se réalise cette organisation.

SOUS- CHAPITRE 1 : L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE

L’administration telle quelle vient d’être caractérisée se structure autour d’une administration
centrale, d’une administration territoriale et d’une administration locale.

Section 1 L’administration centrale

L’administration centrale est constituée au Congo d’un certain nombre de structures publiques
que sont :

4
Paragraphe 1 : L’administration étatique

Elle se structure en :

A- La Présidence de la République

La Présidence de la république constitue le sommet de l’administration étatique dont le


président de la République est l’animateur. Celui-ci est assisté dans ses fonctions
administratives par un cabinet dirigé par un directeur qui a rang de ministre parfois qualifié
d’Etat, lui même entouré par de nombreux collaborateurs qui l’assistent dans l’exercice de ses
attributions qui sont essentiellement de coordination de l’action du Président de la République.

La primature

C’est l’organe de l’administration d’Etat qui se trouve placé sous la direction du premier
ministre lorsque le pays en est doté. Dans le régime parlementaire, le premier ministre est le
chef du gouvernement, tandis que celui-ci est le Président de la République lui-même en
régime présidentiel tel que celui qui existe actuellement au Congo. L’animation de la
primature est assurée par une énorme administration chapeautée par le secrétariat général de la
primature, autour de laquelle s’articulent de nombreux services.

B- Les ministères

Ce sont des services publics placés sous la responsabilité d’un ministre qui dispose d’une
direction de cabinet, de conseillers, d’attachés, de directeurs généraux et centraux pour assurer
la satisfaction des besoins généraux des populations d’un pays ; chaque ministère a en charge
un aspect bien précis de besoin d’intérêt général à satisfaire, par exemple la santé, la sécurité
publique, l’éducation, le transport etc.

Paragraphe2 : L’administration déconcentrée

A- La préfecture et la sous-préfecture

C’est une structure de l’administration centrale dont le responsable est le préfet qui représente
chacun des ministères dans un département. Pour assumer ses missions pour le compte de
l’Etat, le préfet est assisté d’un cabinet placé sous la responsabilité d’un directeur entouré de
quelques conseillers et attachés. Le relais de la responsabilité du préfet est assuré par le sous-
préfet qui le représente dans les districts du département. Le district est une circonscription

5
administrative intermédiaire qui assure le relais de l’action gouvernementale dans le
département.

Le district constitue un groupement de villages résultant d’une même entité administrative,


géographique et culturelle. Il est subdivisé en communautés urbaines et en communautés
rurales et est placé sous l’autorité d’un sous-préfet, nommé par décret du Président de la
République.

B- L’arrondissement

Aux termes de l’Article 15 de la loi n° n°3 -2003 du 17 janvier 2003 fixant l’organisation
administrative territoriale, l’arrondissement est une subdivision de la commune qui assure le
relais de l’action gouvernementale dans la commune. Il doit remplir un minimum de
conditions administratives, économiques et d’équipements socioculturels. L’arrondissement
est subdivisé en quartiers et est placé sous l’autorité d’un administrateur maire, nommé par
décret du Président de la République. On ne trouve l’arrondissement que dans une commune.

C- La communauté urbaine

Selon l’article 22 de la loi n° loi précitée,: la communauté urbaine est une circonscription
administrative constituée par une agglomération urbaine d’habitants, comprenant un certain
nombre de quartiers voisins appartenant à une même entité administrative et géographique,
connaissant un minimum de développement économique, social et culturel ; elle est appelée à
disposer de ressources susceptibles de garantir, à terme, les conditions d’une libre
administration. La communauté urbaine est placée sous l’autorité d’un administrateur maire,
nommé par décret du Président de la République.

C’est une circonscription administrative récemment crée au sein des districts.


Hiérarchiquement, elle est placée sous l’autorité du chef de district qui, dans la commune,
équivaut à l’administrateur-maire d’arrondissement.

D- La communauté rurale

Crée par la loi ci-dessus citée, la communauté rurale est une circonscription administrative
constituée par un groupement d’habitants d’une même agglomération rurale ayant un niveau
de développement caractérisé par la présence d’un minimum d’infrastructures de base et de
service publics tels que : établissements scolaires, établissements sanitaires, centres
secondaires d’état civil et marchés.

6
La communauté rurale regroupe un certain nombre de villages contigus sur un périmètre
déterminé.

D- Le quartier

D’après l’article 27 de cette même loi, le quartier est l’entité administrative de base d’une
commune, d’une communauté urbaine ou d’un arrondissement. Le quartier est composé
d’habitants réunis par une communauté d’intérêts résultant du voisinage. Il est créé par arrêté
du préfet du département sur rapport motivé du maire de la commune ou de l’administrateur
délégué de la communauté rurale. L’arrêté en définit les limites et la dénomination.Le quartier
est placé sous l’autorité d’un chef de quartier nommé par arrêté du préfet.

E- Le village

Le village est l’entité administrative de base de la communauté rurale. Le village est composé
d’habitants unis par une communauté d’intérêts économiques, sociologiques, culturels et
historiques. Il est créé par arrêté du préfet du département sur rapport motivé du sous-préfet
du district. Le village est placé sous l’autorité d’un chef de village nommé par arrêté du
préfet.

L’architecture administrative constituée de toutes ces entités évoquées au travers des initiales
A à E consacre la centralisation qui fera l’objet du second paragraphe.

Paragraphe 2 : La centralisation

Mode ou système d’administration dans lequel l’Etat, seule personne publique pour tout le
territoire, assume seul, sur son budget et par ses agents, la satisfaction de tous les besoins
d’intérêt général (sécurité, santé, environnement sain, éducation etc.). Aucune vie juridique
n’est reconnue aux collectivités locales qui, lorsqu’elles existent, ne le soit que théoriquement.

-Avec elle, l’administration d’Etat est rigoureusement hiérarchisée. Le pouvoir de décision


est concentré est sommet de la hiérarchie incarné par le pouvoir central ou le
gouvernement. C’est de ce centre que par une volonté unique qui se transmet jusqu’aux
extrémités du pays.

Paragraphe 3 : La déconcentration

7
Elle découle de la centralisation ; celle – ci ne peut fonctionner que si on recourt à la
déconcentration. En effet, la centralisation peut être source de blocage pour l’administration
qui attendrait que toute décision parte du centre. Certains pouvoirs de décision sont
reconnus à des autorités locales qui ne sont que des représentants du pouvoir central,
c'est-à-dire le gouvernement.

Dans le cadre de la déconcentration, le pouvoir central exerce un contrôle sur les collectivités
locales, contrôle appelé tutelle (contrôle de légalité, d’opportunité et technique).

Section 2 : L’administration locale ou décentralisée

Paragraphe 1 : Consistance

L’administration locale ou administration décentralisée est une composante de l’administration


publique, différente de l’administration centrale en ce que l’administration locale prend en
charge la satisfaction de l’intérêt général au plan local. L’administration locale ou
décentralisée est constituée du département et de la commune.

A- Le département

D’après l’article 9 de la loi portant organisation administrative territoriale susmentionnée, le


département est un ensemble de districts et, dans certains cas, de communes résultant d’une
même entité administrative et géographique. Le département est constitué de quatre districts
au moins. Il est placé sous l’autorité d’un préfet, nommé en conseil des ministres. C’est dans
cette circonscription qui est décentralisée que le préfet exerce son autorité.

B- La commune

La commune est une agglomération urbaine d’habitants résultant d’une même entité
administrative et géographique ayant un minimum de développement économique, social et
culturel. La commune peut être subdivisée en arrondissements et en quartiers, et est placée
sous l’autorité d’un maire élu.

Pour comprendre la raison d’être la raison de ces circonscriptions, il est nécessaire de bien
cerner la notion de décentralisation. .

Paragraphe 2 : La décentralisation

-La décentralisation qui est soit territoriale soit technique est un système administratif dans
lequel l’Etat reconnait en son sein l’existence des collectivités locales qui sont des entités
8
autonomes et qui ont une vie juridique. Elle implique la distinction des affaires nationales et
des affaires locales et ces dernières relèvent de la décentralisation.

-Les collectivités locales reçoivent des compétences que l’Etat leur transfert au regard de
l’échelon central. Les collectivités locales deviennent ainsi autonomes, une autonomie
renforcée par l’élection des organes locaux et la mise à leur disposition des moyens
nécessaires à la gestion de leurs affaires.

Section 3 : Les personnes morales et les organes de l’administration

Paragraphe 1 : La personnalité morale

La personnalité morale consacre l’existence de sujets de droit, différents des personnes


physiques. Tout comme ces dernières, les personnes morales sont aptes à la vie juridique.
Aussi, peuvent-elles par exemple ester en justice et acquérir des biens.

La personne morale n’a pas de durée limitée par le phénomène de la mort. Elle est
permanente. Contrairement à la personne physique, la personne morale ne peut poursuivre
n’importe quel but, elle est spécialisée dans l’action en fonction des intérêts pour lesquelles
elle est créée.

Paragraphe 2 : Les personnes morales de droit public

On distingue parmi elles l’Etat, les collectivités locales (départements et communes au Congo)

et les établissements publics (hôpitaux, université). A l’exception de l’Etat qui a une


compétence générale, les autres personnes morales de droit public ont des compétences
limitées aux affaires qui font leur existence. Elles disposent de prérogatives de puissance
publique.

La personne morale publique ne peut être créée que par une autorité publique.

Paragraphe 3 : Les personnes morales de droit privé

-Elles sont créés sur initiative privée. Nul n’a l’obligation d’y adhérer. Elles ne disposent pas
de prérogatives de puissance publique. -Certaines sont à but lucratif (les sociétés civiles et
commerciales), d’autres sont à but non lucratif (syndicats, associations, fondations).

Paragraphe 4 : L’établissement public

9
L’établissement public est un procédé administratif de décentralisation technique

A- La notion d’établissement public

L’établissement public est une personne morale de droit public crée par l’Etat ou la collectivité
locale distincte de ceux-ci, chargée de la gestion d’une activité de service public. Il est régi par
le principe de spécialité et comme tel, il a une compétence spécifique. Ce procédé est utilisé
lorsqu’il apparaît que la gestion d’un secteur de l’administration sera mieux assurée s’il
individualisé et doté d’une certaine autonomie juridique, financière et administrative.

Ainsi, on lui permet de bénéficier de la générosité privée que suscite son ut charitable ou
culturel, en recueillant dons et legs, et de la part de la hiérarchie dont il dépend, il a une
certaine autonomie, garante de la liberté intellectuelle qu’exige sa mission.

B- Les catégories d’établissements publics

On distingue :

C- L’établissement public chargé d’un service public administratif qui, lui, même diffère
de de celui à caractère industriel et commercial ;
D- Les établissements publics nationaux rattachés à l’Etat ;
E- Les établissements publics locaux qui eux, dépendent des collectivités locales ;
F- Les établissements d’utilité publique qui est une personne morale de droit privé avec
pour vocation de satisfaire une mission d’intérêt général.

Section 4 : Les organes consultatifs de l’administration

Les organes consultatifs ont pour mission de conseiller et d’éclairer le gouvernement et son
administration. Dans le cas du Congo, il y a :

Paragraphe 1 : La cour suprême qui est l’instance judiciaire la plus élevée. Il est le
conseiller du Gouvernement pour la préparation des projets de loi pour lesquels il est
obligatoirement saisi avant leur adoption et de certains décrets ;

Paragraphe 2 : Le Conseil économique, social et environnemental qui est, auprès des


pouvoirs publics, une assemblée consultative. Il donne son avis sur certains projets de lois et
de décrets;

10
Paragraphe 3 : Les organes de contrôle (les corps d’inspection et la Cour des comptes et de
discipline budgétaire).

Section 5 : La justice administrative


Elle a été instituée pour faire respecter le droit par les administrations.

Paragraphe 1 : Les trois niveaux de juridiction


Seront examinés ici les tribunaux administratifs, les cours administratives d’appel et la Cour
suprême. Ils sont institués à l’article 166 au titre du pouvoir judiciaire.

A- Les tribunaux administratifs


Ils ont une compétence territoriale et sont les juridictions de première instance (qui jugent
pour la première fois les litiges) qui statuent sur tous types de litiges dans toutes matières, sauf
lorsqu’une compétence est expressément attribuée à une autre juridiction.

B- Les cours administratives d’appel


Elles peuvent être appelées à donner leurs avis sur les questions qui leur sont transmises par
les préfets de leur ressort. Elles sont les juges d’appel de droit commun (sur tous types de
litiges dans toutes matières) des jugements rendus en première instance (par les tribunaux
administratifs), notamment en matière électorale et en appréciation de légalité.

C- La Cour suprême
Elle statue souverainement sur les recours en cassation dirigés contre les décisions rendus en
dernier ressort par les diverses juridictions administratives, ainsi que sur ceux dont elle est
saisie en qualité de juge de premier ressort ou de juge d’appel. Elle participe également à la
confection des lois et est saisie par le Premier ministre des projets de lois établis par le
Gouvernement. Elle donne son avis sur les projets de décrets et sur tout autre projet de texte
pour lesquels son intervention est prévue par la Constitution.

CHAPITRE 2 : LES PRINCIPES DE L’ACTION ADMINISTRATIVE


L’administration est soumise à la fois au principe de légalité et au principe de responsabilité

SOUS-CHAPITRE 1 : LE PRINCIPE DE LEGALITE


Il signifie que l’administration doit respecter l’ensemble des règles de droit.

11
Paragraphe 1 : Le contenu du principe de légalité
Seront examinées ici les différentes sources de la légalité. La légalité dont il s’agit prend sa
source d’un certain nombre de règles.

Les différentes sources de la légalité dont le respect s’impose à l’administration sont


nombreuses et même hiérarchisées. Elles varient selon qu’elles sont établies à l’extérieure de
l’administration, par elle-même par le juge. Ainsi, on distingue la constitution, les lois, les
traités internationaux, les règlements, la jurisprudence et les principes généraux du droit.

Sous-Section 1 : Les règles écrites extérieures à l’administration

Au sommet de la pyramide de ces règles, il y a la constitution. Viennent ensuite les traités


internationaux et les lois. L’administration est tenue de les respecter dans un Etat de droit.

Paragraphe 1 : La constitution

Norme suprême au sommet de l’ordre juridique, la constitution s’impose de façon immédiate


aux autorités administratives comme au législateur lui-même. Lorsque l’administration prend
une disposition, contraire à la constitution, le juge administratif prononcera son annulation. Ce
dernier censure les actes administratifs pris en méconnaissance d’une règle constitutionnelle.

Paragraphe 2 : Les traités internationaux

Selon les dispositions du droit congolais, « les traités ou les accords, régulièrement ratifiés ou
approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois » (article 223 de la
constitution actuelle). Ils sont donc incorporés dans les sources de la légalité. Un acte
administratif peut être annulé pour non-conformité aux traités internationaux auxquels l’Etat
congolais a souscrits.

Paragraphe 3 : Le droit communautaire

Il comprend pour le Congo, de très nombreuses règles édictées par les organes règlements
communautaires et des directives communautaires de la CEMAC. Les règlements
communautaires sont directement applicables dans tous les états membres à condition que
leurs dispositions aient un effet direct.

12
Paragraphe 4 : La loi

Au sens large, la loi englobe tous les textes formulés par le pouvoir législatif et par le pouvoir
réglementaire (lois organiques, lois ordinaires, décrets, arrêtés). Il existe entre les différents
textes pris par les autorités étatiques une hiérarchie fondée sur la nature et le rang de l’autorité
qui les formule. Cette hiérarchie est la suivante :

- Au sommet se trouve la constitution qui organise les différents pouvoirs de l’Etat ;


- Viennent ensuite les traités internationaux signés par les autorités nationales à
l’extérieur ;
- Suivent les décrets d’application des lois, les arrêtés ministériels, les arrêtés
préfectoraux et les arrêtés municipaux.

En principe, un texte de la catégorie inférieure ne peut déroger aux textes des catégories
supérieures auxquels il est subordonné. Ainsi, un décret ne peut modifier une loi et une loi ne
peut modifier une constitution.

Sous-Section 2 : Les règles posées par le juge

La jurisprudence et les principes du droit ont été ces principales règles.

Paragraphe 1 : La jurisprudence

A Généralités

La jurisprudence qui est l’ensemble des décisions rendues par le juge sur une même question
et qui réaffirment avec constance la même règle est une source déterminante de la légalité en
droit administratif. Le juge administratif enrichi le droit dans la mesure où quand aucune
source formelle ne peut être invoquée, le vide juridique existant sera comblé du fait qu’il
devra se prononcer librement. Il supplée alors au silence des textes.

B Les décisions de justice

Elles sont exécutoires. L’administration doit exécuter les décisions de la justice administrative
et judiciaire et celles de la cour constitutionnelle. Lorsqu’elles sont définitives, après
épuisement des voies de recours ou expiration des délais de recours, les décisions de justice
que sont les arrêts des cours et les jugements des tribunaux acquièrent l’autorité de la chose
jugée.

13
Paragraphe 2 : Les principes généraux du droit

Les Principes généraux du droit français (PGD) sont des règles non-écrites de portée générale qui ne
sont formulées dans aucun texte mais que le juge considère comme s'imposant à l'administration et à
l'Etat et dont la violation est considérée comme une violation de la règle de droit. Ces principes sont
par exemple l’égalité devant l’impôt, les charges publiques, légalité des usagers du domaine
public, l’égalité des citoyens devant les services publics (arrêts « société des concerts du
conservatoire » et « Dénoyez et Chorques », le principe de non rétroactivité des actes, le
principe d’impartialité et celui de l’interdiction de licencier une salariée en état de grossesse
etc.

Sous-Section 3 : Les règles édictées par l’administration elle-même

Il s’agit de :

Paragraphe 1 : Les règlements

Le règlement est l’acte de portée générale et impersonnelle, c’est-à-dire qui s’impose à tout
individu, pris par une autorité exécutive compétente. L’autorité administrative est tenue de
faire usage de son pouvoir de prendre les règlements d’application de la loi. C’est ce qu’on
appelle exercer le pouvoir règlementaire. L’autorité ne dispose du pouvoir réglementaire au
sens du droit administratif que si un texte le prévoit expressément.

Paragraphe 2 : Les décisions individuelles

Elles sont aussi des sources de légalité qui s’imposent à l’administration. Les règlements ont
sur elles autorité selon le principe de supériorité des actes normatifs sur les actes individuels
et toute autorité administrative doit, lorsqu’elle prend des décisions individuelles en
application d’un règlement, respecter scrupuleusement celui-ci. Ainsi, lorsque les conditions
de recrutement d’une catégorie de fonctionnaire ont été fixées par décret, chaque décision
individuelle de nomination doit respecter ce texte.

Paragraphe 3 : Les contrats

Les contrats conclus par l’administration avec une autre partie l’engagent. Ce contrat
débouche sur la signature d’un cahier de charge qui consigne les responsabilités et les
obligations de chaque partie.

14
SOUS-CHAPITRE 2 : SECTION 2 : LA PORTEE DE L’OBLIGATION DE LEGALITE

L’obligation de légalité requiert de l’administration qu’elle prenne des décisions en respectant


les normes ci-dessus évoquées, qui constituent le contenu de la légalité. L’obligation porte sur
la procédure d’édiction et sur le contenu des actes administratifs.

Sous-section 1 : L’obligation de respect de la procédure d’élaboration des décisions

L’élaboration de l’acte administratif unilatéral est juridiquement encadrée. L’autorité


administrative respecte les règles relatives respectivement à la compétence, la forme, la
procédure, le but et le contenu de l’acte. L’obligation de légalité exige de l’administration que
les décisions que celle-ci prend au nom de l’intérêt général ne soit pas contestable du point de
vue de la procédure qui a été adoptée. Autrement, sera commise ce qu’on appelle une
illégalité externe, c’est-à-dire du point de vue de la procédure.

Paragraphe 1 : Les illégalités externes

Il s'agit d'une illégalité portant non sur le contenu de la décision, mais sur la manière dont elle
a été prise. La légalité d’une décision administrative peut être contestée. Celle-ci peut par
exemple porter non sur ce qui a été décidé, mais sur la façon dont on a décidé. La décision
prise n’est pas contestable, mais la façon de la prendre pose problème. C’est l’illégalité
externe qui est ainsi invoquée. Trois moyens permettent de le faire

A- L’incompétence

L'incompétence est le vice qui affecte un acte administratif lorsque celui-ci a été pris par une
autorité administrative qui n'a pas été habilitée à cet effet. Il s'agit donc de
l'incompétence de l'auteur de l'acte, ou incompétence administrative (par opposition à
l'incompétence juridictionnelle qui concerne le régime d'introduction des recours
contentieux). Il y a incompétence lorsqu'une autorité administrative prend une décision sans
avoir qualité pour le faire. ... C'est le cas quand l'autorité prend une décision relevant du
législateur ou du juge (usurpation de pouvoir), ou quand elle empiète sur le champ de
compétences d'une autre autorité administrative.

C’est l’illégalité relative à l’auteur qui a pris l’acte (une autorité administrative prend une
décision ou signe un contrat sans avoir qualité pour le faire). Il peut s’agir d’une

15
incompétence matérielle (incompétence rationae materiae) c’est ce qui se produit quand une
autorité administrative décide dans une matière relevant de la compétence du législateur ou du
juge. Il en est ainsi quand un maire prend une décision en lieu et place du conseil municipal.
L’incompétence matérielle est également consommée ou réalisée quand une autorité
administrative empiète sur les attributions d’une autre (par exemple réglementation
ministérielle dans une matière relevant d’un autre Ministre).

La seconde variété d’incompétence est l’incompétence territoriale ou (rationae loci), c’est le


fait pour une autorité administrative d’exercer ses fonctions en se trouvant dans un lieu autre
que celui où elle devrait agir ou de décider relativement à des affaires extérieures à sa
circonscription.

La troisième variété d’incompétence est l’incompétence temporelle ou (rationae temporis)


(une autorité n’était pas compétente au moment où elle décide : elle agit par exemple au
moment où elle est nommée mais pas encore installée dans ses fonctions).

C- Le vice de procédure

Le vice de procédure est le vice qui affecte un acte administratif lorsque celui-ci a été pris
en violation des règles relatives aux étapes de sa production. Il peut s'agir de l'omission
d'une procédure obligatoire ou de la dénaturation d'une procédure correcte par une
irrégularité substantielle. De plus, selon le principe du parallélisme des procédures, la
modification, ou la suppression, de l'acte sont illégales si elles ne respectent pas elles-

mêmes les règles de production de l'acte qu'elles tendent à modifier ou supprimer.

Il s'agit d'illégalités entachant un acte administratif unilatéral lorsque l'Administration a omis


des formalités ou les a accomplies de façon irrégulière. Il est constitué de la méconnaissance
d’une règle organisant la procédure d’élaboration des décisions ou de la conclusion des
contrats :

- obligation de procéder à l’obtention d’un ou de plusieurs avis ;

- obligation de ne décider que sur proposition ;

- obligation de décider après avoir mis les destinataires des décisions en mesure de présenter
utilement leurs observations ;

16
- organisation d’enquêtes publiques propres à recueillir tous les éléments d’information.

Lorsque de telles règles de procédure ne sont pas respectées, les décisions prises sont en
principe illégales en raison du vice de procédure qui les entache. En pratique administrative,
on parle de vice de forme lorsque la signature de l'acte fait défaut, ou lorsque la motivation
de l'acte n'a pas été suffisamment explicitée, ou enfin lorsqu'il y a absence de contreseing
(seconde signature servant à authentifier la signature principale). Quand une autorité
administrative décide volontairement de se soumettre à une procédure particulière, elle est
ensuite tenue de respecter cette procédure. Exemple : un ministre de saisir volontairement un
organisme consultatif. La jurisprudence refuse un formalisme excessif.

D- Le vice de forme

Le vice de forme doit être distingué du vice de procédure, car il ne concerne, comme son
nom l'indique, que la forme, la présentation extérieure de l'acte (instrumentum), alors que le
vice de procédure porte sur le processus de production, l'enchaînement des opérations
matérielles et réelles de cette production. La forme ne fait que témoigner du fait que la
procédure a été respectée.

Un vice de forme résulte de l'inobservation d'une formalité requise pour la conclusion ou la


rédaction d'un acte juridique. C'est à celui qui invoque le vice de forme de prouver le grief
qu'il en résulte pour lui. Le vice de forme implique l'absence ou l'erreur quant aux mentions
et éléments devant obligatoirement figurer dans un acte de procédure. Les seules formes
absolument imposées sont : la signature de l'acte par son auteur, ainsi que la mention de ses
prénoms, son nom et la qualité administrative, le contreseing dans le cas où il est prévu par la
Constitution.

Le vice de forme concerne la présentation externe de l’acte par lequel la norme est édictée (le
contenant et non le contenu) :

-la signature d’un acte par son auteur, ce qui peut permettre de vérifier le respect des règles de
compétence ;

-le contreseing des actes du président de la République qui permet de donner du respect des
prescriptions constitutionnelles ;

-la motivation de l’acte qui est l’expression des raisons de fait et de droit dont procède la
norme édictée et permet d’apprécier si ses motifs sont de nature à la justifier.

17
Les règles de forme doivent être respectées.

Paragraphe 2 : Les illégalités internes

C'est ce qu'on appelle « la violation directe de la loi. » Exemple : un décret d'application d'une
loi contenant des dispositions incompatibles avec celles de la loi. Un acte administratif peut
être entaché d’illégalité interne en raison de l’illégalité soit de son contenu, soit de ses motifs,
soit de son but. L'illégalité interne est la cause juridique qui affecte le contenu de l'acte
administratif. Elle le vicie de l'intérieur et l'attaque dans son être. C'est la nature même de
l'acte, le fond même de l'intervention de son auteur, qui sont contestables quand apparaissent
des moyens d'illégalité interne.

A – L’illégalité en raison des motifs de l’acte : le vice des motifs


L'illégalité interne, hormis les cas où elle provient de cas flagrants, comme l'erreur de but
du détournement de pouvoir ou l'erreur de contenu comme la contradiction directe d'une
norme supérieure, peut résulter plus finement d'un vice propre aux motifs de l'acte. La
jurisprudence ici se fait très subtile.

Le vice des motifs n'est pas fondamentalement différent de l'erreur de but, car il s'agit de
déterminer pour quelles raisons l'acte a été pris, ce qui peut englober le but, ni
fondamentalement différent de l'erreur de contenu car déterminer que l'acte n'a pas été
pris pour de bonnes raisons c'est aussi dire qu'il est contraire à l'ordonnancement juridique
c'est-à-dire à une ou plusieurs normes supérieures, peut-être à des normes plus générales ou à
une combinaison de normes.

Il s'agit en fait de vérifier que l'acte administratif s'inscrit dans l'ordre juridique dans un
rapport qui n'impose pas une conformité, mais qui nécessite la compatibilité. Il ne faut pas s'y
tromper, il s'agit là du cœur du contrôle de la légalité interne par le juge. La question est de
savoir si l'acte est en tout point irréprochable, s'il est conforme à la fois à la réalité, à la
rationalité, aux principes de fonctionnement du système de droit lui-même.

Se pose alors le problème de savoir quelle est la cause qui a justifié l’édiction de l’acte. Il y
aura illégalité en raison soit d’une erreur de droit, soit d’une erreur dans la qualification
juridique des faits, soit d’une erreur de fait.

1e) L’erreur de droit

18
Il s'agit d'une erreur quant à la base légale de la décision (mise en œuvre d'une norme
inexistante ou inapplicable), du rattachement des dispositions édictées à une norme illégale,
ou du rattachement des dispositions à une norme applicable ou régulière mais mal interprétée.
Exemple : annulation pour excès de pouvoir d'un refus de l'administration d'admettre au
concours de l'ENA des étudiants communistes, sur le fondement de leurs opinions politiques..

Les causes suivantes peuvent l’engendrer :

-elle peut provenir de la mise en œuvre d’une norme inexistante ou inapplicable : il y’a défaut
de base légale. Il en est ainsi par exemple quand un préfet décide la reconduite à la frontière
qui ne se rapporte pas à cela.

-elle peut aussi tenir au fait qu’une autorité a cru pouvoir se fonder sur une réglementation
légale alors que celle-ci est illégale. Par exemple, l’autorité administrative a mis fin aux
fonctions d’un agent public, en se fondant sur une décision illégale à raison de l’incompétence
du Ministre pour prendre les dispositions réglementaires en cause (arrêt du C –E – du 25 avril
1979, Ciaudo, P159, RDP 1980, p 1595).

2e) L’erreur de qualification juridique des faits

Par l’arrêt Gomel rendu le 4 avril 1914, le Conseil d’Etat Français à inauguré la censure de
cette erreur. Il peut par exemple s’agir d’apprécier si un site doit être qualifié de pittoresque
(arrêt Dame EBRI, C-E- 2 MAI 1975) ;

Il peut aussi s’agir d’apprécier si par exemple la tenue d’une réunion était de nature à troubler
gravement l’ordre public (arrêt du C – E – 19 mai Benjamin, p541, Dalloz 1933 – 3 – 54).
Une demande de permis de construire en bordure de la place Beauvau à Paris est refusée par
le préfet de la Seine au motif que la construction en projet porterait atteinte à une perspective
monumentale. Le Conseil d'État détermine que la place Beauvau n'est pas une perspective
monumentale, et annule donc la décision du préfet.

Un acte administratif se doit de respecter en tout point le principe de réalité. Une autorité
administrative ne saurait se fonder sur des faits matériellement inexacts pour produire un
acte, car cela signifierait qu'elle ne prend pas sa décision en connaissance de cause. L'autorité
administrative déclare un marin inapte à servir au motif qu'il est épileptique, une expertise
dément l'affirmation),

19
B – L’illégalité en raison du but de l’acte.

Il s'agit de ce qu'on appelle le détournement de pouvoir. La forme la plus simple consiste en


l'accomplissement d'un acte en raison de préoccupations d'ordre privé. Mais il peut y avoir
aussi détournement de pouvoir même en cas de prise en considération d'un intérêt public.
Exemple : le maire de Biarritz prend un arrêté interdisant aux baigneurs de se déshabiller et
de s'habiller ailleurs que dans les établissements de bains situés sur la plage. Or, il ne
s'agissait pas de préserver la moralité publique mais d'augmenter les revenus de ces
établissements, source de revenus pour la ville.

Le détournement de pouvoir est, de tous les moyens d'illégalité interne, celui qui vicie le
plus profondément l'acte administratif. En effet le détournement de pouvoir porte
directement sur les buts de l'acte, sur les intentions de son auteur, sur les présupposés de
l'intervention administrative. Si l'autorité administrative a produit un acte dans un but autre
que celui pour lequel elle dispose de sa compétence d'action, il y aura détournement de
pouvoir et l'acte sera annulé. Il en est ainsi par exemple lorsqu’un acte est accompli en raison
de préoccupations d’ordre privé :

* licenciement d’un agent pour des motifs politiques

*fermeture d’un établissement par un maire pour éviter la concurrence que celui – ci
faisait au sien.

C – L’illégalité relative à l’objet de l'acte

Elle se rencontre lorsque le dispositif de l'acte attaqué porte atteinte à la hiérarchie des
normes. Tout acte administratif dont le contenu est incompatible avec une norme qui lui est
supérieure en donne une illustration. Ici c’est la volonté de la loi qui est concernée.
L’administration doit ou agir ou a l’obligation d’agir pour éviter l’illégalité ; son abstention
ou sa carence peut être constitutive d’illégalité (arrêt du C-E-28 juillet 2000, France nature
environnement). –

L'acte administratif doit, par son contenu objectif, produire des droits ou obligations, à l'égard
d'administrés/citoyens ou de personnes extérieures à l'autorité administrative qui l'édicte.

Cas pratique

20
Vous venez d’être nommée ministre de la jeunesse et vous voulez faire partir des agents à la
retraite. Votre conseiller juridique vous le déconseille.

1. Allez-vous tout de même le faire ? justifiez votre réponse.


2. Au cas où vous ne le pouvez pas, qu’est-ce qui pourrait vous empêcher de le faire ?
3. Et si vous le faites tout de même en dépit de son conseil, qu’adviendrait-il ?

Sous-section 2 : L’application du principe de légalité

Paragraphe 1 : Le pouvoir discrétionnaire

Il y’a pouvoir discrétionnaire lorsque l’administration a une certaine liberté d’agir, de ne


pas agir et de décider. La conduite à tenir ne lui est pas dictée par une règle juridique. Il
arrive simplement que dans ce cas, les textes sont soit muets, soit laconiques, laissant une
marge d’appréciation à l’administration dans une situation où il est dangereux d’enfermer
sa décision dans des règles trop rigides. Toutefois, il n’y’a pas lieu pour elle d’agir
arbitrairement. Elle doit se conformer à la légalité. C’est le cas quand l’administration
décide par exemple d’accorder ou de refuser un permis de conduire.

Toutes ces occurrences font que, si la légalité n’est pas abandonnée, elle est néanmoins
assouplie en raison du caractère exceptionnel des circonstances.

Paragraphe 2 : La compétence liée

Il y’a compétence liée quand l’administration est, d’une part tenue d’agir, d’autre part tenue
d’agir dans un sens déterminé sans possibilité pour elle de choisir ou d’apprécier. On dirait
qu’elle n’est pas libre, d’autant plus que l’attitude lui est dictée par les textes. Elle ne
peut ni opérer le choix des moyens d’action, ni celui de la décision, ni celui du moment où la
décision doit être prise. Quand par exemple un fonctionnaire atteint l’âge de 60 ans, la loi
prévoit de le faire partir à la retraite. La compétence de l’administration est liée.

Section 3 : Les limites à l’obligation de légalité : les circonstances exceptionnelles

Sous-Section 1 : Conditions d’application

Paragraphe 1 : Origine de la théorie des circonstances exceptionnelles


21
Deux arrêts sont à l’origine de la théorie de circonstances exceptionnelles, ces arrêts sont
intervenus à l’occasion de la première guerre mondiale. L’arrêt « HEYRIES » rendu par le
conseil d’Etat Français le 28 juin 1918 (révocation d’un fonctionnaire sans que son dossier lui
soit communiqué) et l’arrêt « Dames DOL et LAURENT » du même conseil pris en date du
28 février 1919 (atteinte aux libertés d’aller et venir des « filles galantes » du port de
Toulon. Ces arrêts intéressent respectivement le fonctionnement des services publics et la
police administrative.

Paragraphe 2 : Justification

Trois exigences justifient la prise de mesures assouplissant la légalité au regard des


circonstances exceptionnelles.

A- L’exigence de situations exceptionnelles


Il faut d’abord que les mesures aient été prises pour répondre à une situation
réellement exceptionnelle tels que la guerre, l’insurrection armée, le cataclysme
naturel (séisme) ou une grève des services publics gravement perturbatrice par son
ampleur et sa durée (arrêt du C – E – 18 mai 1983, « M-Rhodes »

B- L’impossibilité d’agir conformément à la légalité


Il faut ensuite que l’administration soit placée dans un tel cas.

C- L’importance de l’intérêt justifiant la non observation de la légalité

L’intérêt de la défense nationale ou du rétablissement de l’ordre public par exemple peut


justifier l’assouplissement du principe de l’égalité.

Ces trois exigences satisfaites, l’administration peut empiéter sur la compétence du législateur
(suspension de l’application d’une loi par décret et non par voie légale par exemple). Les
autorités administratives peuvent porter atteinte aux libertés alors qu’en temps normal cela
serait illégal.

Paragraphe 3 : Le contenu de la théorie des circonstances exceptionnelles

En élaborant cette théorie, le Conseil d’Etat français est parti de l’idée que toute l’organisation
sociale est destinée à assurer la vie du pays et le fonctionnement des services publics. Le droit
n’est qu’une technique qui a pour objet d’organiser les pouvoirs publics à cette fin supérieure.
L’administration doit dans certains cas pouvoir s’affranchir du respect de règles qui sont

22
conçues pour des périodes normales. Ce qui prime c’est le fonctionnement des services
publics.

Il y a là un danger évident pour les libertés publiques et individuelles. Le juge en a conscience


et considère qu’il n’y a circonstances exceptionnelles que dans les cas où la légalité normale
est totalement inadaptée et dans des cas où il faut alors substituer à cette légalité normale une
légalité d’exception. Le Conseil d’Etat n’admet considère qu’il faut la réunion de 2 conditions
pour que la théorie s’applique :

- Il faut une situation profondément anormale. Par exemple la guerre, ou encore


un cataclysme naturel, par exemple une éruption volcanique ou la menace
d’une éruption volcanique. C’est ce que le Conseil d’Etat a jugé dans l’arrêt
Rhodes du 18 mai 1983.

- Pour que la situation soit qualifiée de circonstance exceptionnelle, il ne suffit


pas qu’elle soit profondément anormale. Il faut en plus qu’elle place
l’administration dans l’impossibilité de respecter la légalité.

Paragraphe 4 : L’application de la théorie des circonstances exceptionnelles et ses effets

La théorie des circonstances exceptionnelles trouve son fondement dans les obligations
générales qui pèsent sur les autorités administratives. Celles-ci ont pour obligation première
d’assurer l’ordre public. C’est lorsque cette obligation première se trouve entravée par
l’application de la légalité ordinaire que l’autorité administrative peut s’en affranchir. La
théorie des circonstances exceptionnelles se traduit par un assouplissement des règles de
compétences. Cela se comprend car il faut agir vite et c’est l’autorité qui est en situation
d’agir qui doit le faire.

La manifestation la plus remarquable à cet égard est celle qui résulte de l’application de la
jurisprudence dite du fonctionnaire de fait. Le Conseil d’Etat a admis que de simples
particuliers qui n’appartenaient pas à la hiérarchie administrative pouvait s’ériger en
fonctionnaire de fait en se substituant à l’administration défaillante. Donc on va considérer
qu’un conseiller municipal peut se substituer au maire.

Sous-Section 2 : Le contrôle des circonstances exceptionnelles par le juge

23
Paragraphe 1 : Le principe du contrôle

Les mesures prises en raison de circonstances exceptionnelles le sont sous le contrôle du juge
administratif qui vérifie ces trois éléments ci- dessus évoqués. Le juge contrôle également le
pouvoir discrétionnaire de l’administration par des techniques traditionnelles de contrôle que
sont le contrôle de la légalité interne le contrôle de la légalité externe et la qualification
juridique des faits, ainsi que par le contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation.

La technique du bilan coût avantage est également utilisée par le juge pour se rendre compte
par exemple du degré d’utilité publique d’une opération d’expropriation. Dans ce dernier cas,
celui-ci fait respecter un rapport de proportionnalité.

Paragraphe 2 : Les recours administratifs

Trois grands types de recours permettent de contrôler la légalité des actes pris par l’autorité
administrative :

- le recours gracieux ou réclamation portée devant l’autorité de l’acte


incriminé. Il est ouvert de plein droit, même en l’absence d’un texte ;
- le recours hiérarchique qui est porté devant une autorité supérieure à celle
ayant pris l’acte querellé ; le supérieur hiérarchique disposant des mêmes
pouvoirs que son subordonné peut fonder sa décision sur des motifs de droit
ou d’équité, et se substituer aux motifs non appropriés des motifs nouveaux et
pertinents.

Paragraphe 3 : Le recours à des procédures non juridictionnelles

Ces recours sont la médiation, le règlement à l’amiable et l’arbitrage.

SOUS-CHAPITRE 2 : LE PRINCIPE DE RESPONSABILITE


Ce principe va obliger l’administration à réparer les dommages causés par son fait.

Section 1 L’irresponsabilité initiale de l’administration

Paragraphe 1 L’état de la question

Est – il possible d’appliquer à l’administration le principe de l’article 2 du Code Civil ? Dans


un premier temps correspondant à la première moitié du 19 ème siècle, l’irresponsabilité de la

24
puissance publique était la réponse à cette question. Le principe était l’irresponsabilité de
l’Etat et cette règle s’exprimait dans un adage ancien : « le Roi ne peut mal faire » et agissent
comme un corollaire de la souveraineté. Ce principe fût maintenu après la révolution
Française, mais a subi quelques atténuations. Ainsi, la loi du 28 pluviôse an VIII permettait la
réparation des dommages causés par les travaux publics. De plus l’irresponsabilité de principe
de l’Etat ne s’étendait ni aux dommages causés imputables à la gestion du domaine privé, ni à
ceux causés par les collectivités locales.

Au cours du 19ème siècle, au principe de l’irresponsabilité de l’Etat va se substituer un système


de responsabilité partielle et atténuée avec la décision du tribunal des conflits du 8 février
1873, Blanco, qui, tout en affirmant la responsabilité de l’Etat, précise qu’elle n’est « ni
générale, ni » absolue et qu’elle a « ses règles spéciales ». Après cette décision, l’évolution va
continuer dans le sens de la responsabilité de l’Etat.

Paragraphe 2 : L’abandon de l’irresponsabilité

L’ampleur des dommages dus à l’administration et le développement de son action faisaient


de leur réparation une nécessité. Le maintien de l’irresponsabilité s’exerçant dans l’intérêt de
tous, si les dommages qui en résultent pour quelques-uns n’étaient pas réparés, ce serait une
discrimination.

La responsabilité, fût alors admise avec l’arrêt Blanco précité, même en l’absence de tout
texte qui la consacre. La responsabilité ainsi admise est différents de celle de l’article 1382 du
Code Civil Français.

Section 2 : Les conditions de la responsabilité des personnes publiques

En droit public comme en droit privé, la responsabilité suppose réunies trois conditions : le
dommage, l’imputabilité du dommage et le fait qui le génère.

Paragraphe 1 : Le dommage

Le dommage ne donne droit à réparation que s’il est certain, direct et spécial. Direct doit être
le dommage actuel ou inévitable et non éventuel. C’est le cas d’un enfant victime d’une
infirmité qui réduira ultérieurement son activité professionnelle. Il doit être spécial en ce sens
qu’il doit être particulier à la ou les victimes et nom commun à l’ensemble des membres

25
d’une collectivité. Le dommage doit être direct, c'est-à-dire avoir une relation directe avec
l’action administrative.

Le dommage peut être moral et non seulement matériel. Ainsi, un préjudice esthétique
provoqué par une blessure au visage, qui peut générer la vie professionnelle de la victime est
un dommage considéré (Arrêt Dame Durand, CE-15 juin 1949). Même la perte d’un être cher
aux parents de la victime est un dommage pris en considération, ainsi d’ailleurs que la douleur
morale résultant pour un père de la mort prématurée de son fils (arrêt du C-E- du 24 novembre
1961, LETISSERAND, GAJA n° 82). Enfin, un enfant né avec un handicap dû à une erreur
médicale peut être indemnisé, pourvu que ce soit une faute caractérisée de l’administration.

Une fois le dommage consommé, il peut être réparé sous différentes formes : en nature en
rétablissant les choses dans leur état ou elles seraient si le dommage n’était pas intervenu et en
capital versé à la victime.

Paragraphe 2 : L’imputabilité

A/- Le dommage doit se rattacher à une personne publique et non être indirect

B/- Détermination de la personne publique responsable

Il peut être difficile de déterminer la personne à laquelle le dommage est imputable. Un maire
agit par exemple tantôt en qualité d’agent de l’Etat, tantôt en qualité d’agent de la collectivité
locale. De même, plusieurs agents relevant de personnes différentes peuvent avoir concouru à
l’acte dommageable. C’est le cas d’un accident causé par un feu d’artifice organisé par une
commune, mais tiré par des militaires. Le responsable est alors difficilement décelable. Le
juge détermine, au cas par cas et d’après les faits, soit la personne responsable, soit le partage
de responsabilité à établir entre les collectivités intéressées. Il peut également le faire par le
truchement de l’action récursoire.

C/- Les faits exonérant l’administration de sa responsabilité

Quatre faits exonèrent l’administration de sa responsabilité :

- la force majeure et le cas fortuit ;

- la faute de la victime ;

- le fait d’un tiers ;

26
- l’exception de risque accepté telle que l’exposition de la victime elle-même sciemment au
dommage qui est survenu.

Section 3 : Les deux systèmes de responsabilité


Il faut distinguer la responsabilité pour faute de la responsabilité sans faute.

Paragraphe 1 : La responsabilité pour faute


La responsabilité de l’administration peut être engagée en raison d’une faute. La faute simple
qui s’applique aux activités médicales, aux activités fiscales et aux activités pénitentiaires se
trouve désormais en cause.
On distingue également la faute de service de la faute personnelle. La faute personnelle est la
faute qui se détache de l’exercice des fonctions administratives à l’instar d’un agent de police
qui commet un meurtre avec son pistolet par jalousie, alors qu’il prend son pot dans un bar
après son service. La faute de service révèle « un administrateur plus ou moins sujet à
erreur ». Toutefois, les deux fautes peuvent être cumulées. On parle alors de cumul de fautes.

Paragraphe 2 : La responsabilité sans faute


Pour que la responsabilité sans faute soit engagée, il suffit que la victime du dommage prouve
qu’il est en lien avec une activité de l’administration, même si celle-ci n’a pas commis de
faute pour autant. Il convient de distinguer la responsabilité pour risque de celle pour rupture
d’égalité devant les charges publiques. Dans la première, le préjudice apparaît comme le
résultat de la réalisation d’un risque particulier dommage lié à l’utilisation de matériels
dangereux comme mes explosifs et dommages causés aux agents publics et collaborateurs
occasionnels).
Dans la seconde, le dommage qui trouve sa source dans une activité de l’administration est
subi en violation du principe de légalité devant les charges publiques. C’est notamment le cas
de la responsabilité du fait des lois ou conventions litigieuses.

Paragraphe 3 : La responsabilité sans faute en droit congolais

En droit congolais de la responsabilité administrative, le cadre dans lequel elle peut être
établie. Le juge l’interprète de la même manière que son homologue français. Ainsi, dans
l’affaire NKODIA, il distingue la faute de service et la faute personnelle. Le sieur NKODIA
avait assigné la ville de Nkayi et son chauffeur le 12 janvier 1980 devant le Tribunal de

27
Grande Instance du fait de dommage subi par son véhicule percuté par celui de la Mairie. La
faute de l’agent n’ayant pas été retenue, l’administration municipale fût condamnée.

Dans l’affaire NGOMA, le juge congolais a retenu la responsabilité sans faute du fait des
choses dangereuses. La jeune NGOMA a fait une chute mortelle dans un égout de la rue câble
n° 1. En plaçant le terminus de l’égout en ce lieu, la municipalité de Brazzaville a créé ainsi
un risque exceptionnel qui engage sa responsabilité, même sans faute pour laquelle elle est
condamnable.

Dans l’affaire MAVOUNGOU BAYONNE, c’est la responsabilité sans faute du fait des
attroupements et rassemblements qui fût retenue en ces termes : « Attendu que sieur
MAVOUNGOU a été victime du pillage par des personnes non identifiées ; qu’il y a eu de la
part de l’Etat et de la Mairie de Brazzaville défaillance pour protéger les biens meubles… Par
ces motifs, … condamne… ».

Le juge congolais a retenu la distinction entre faute simple et faute lourde dans l’affaire
ELINGA BATO. Ce dernier a demandé des dommages et intérêts, estimant que « la police
avait commis une faute pour l’avoir illégalement gardé à vue pendant sept mois…. ». Dans le
cas d’espèce, le juge a estimé que la faute lourde doit être exigée en matière de police. Il a
rejeté la requête au motif que le service de police n’avait commis aucune faute (Trib. pop.de
Potopoto, 26 février 1987, ELINGABATO).

CHAPITRE 2 : LES ACTIVITES ADMINISTRATIVES

L’administration accomplit sa mission dont le but est de satisfaire l’intérêt général à travers
un certain nombre d’activités qui consistent en des activités de police administrative et de
service public.

SOUS - CHAPITRE 1 : LA POLICE ADMINISTRATIVE

Dans une société organisée, la libre activité des particuliers a nécessairement des limites qu’il
appartient à l’autorité publique de tracer. Mais il appartient au pouvoir exécutif de prévenir
les désordres de toute nature par des activités de police administrative. Pour Jean RIVERO et
Jean WALLINE, « la police administrative est l’ensemble des interventions de
l’administration qui tendent à imposer à la libre action des particuliers la discipline exigée par
la vie en société ».

28
Section 1 : Les finalités de la police administrative

Le but de la police administrative est de prévenir les atteintes à l’ordre public, d’où son
caractère préventif et son contenu singulier.

Paragraphe 1 : Le caractère préventif de la police administrative

La police administrative doit être distinguée de la police judiciaire. La première incombe au


pouvoir exécutif et relève du contentieux administratif. La seconde dépend du pouvoir
judiciaire. Préventive, la police administrative a pour but d’éviter qu’un trouble se produise ou
s’aggrave et se prolonge. La police judiciaire a un caractère répressif. Elle intervient
lorsqu’une infraction a été commise. Elle a pour rôle de la constater, d’en identifier leurs
auteurs et de commencer à réunir les preuves afin de permettre l’action de la juridiction
pénale.

Cependant, une autorité de police administrative peut jouer en même temps le rôle de la
police judiciaire ou y participer. C’est le cas d’un policier qui régule la circulation et dresse
une contravention en cas d’accident à un feu rouge par exemple.

Une opération de police administrative peut ainsi devenir une opération de police judiciaire.
Par exemple dans l'affaire Demoiselle Motsch (TC, 5 décembre 1977, Demoiselle Motsch,
Rec.671, AJDA 1978.444, chr.). Un automobiliste qui avait pris en charge une auto stoppeuse
force un barrage établi en vue de réaliser un contrôle d'identité. Il brûle alors plusieurs feux et
prend une voie à sens interdit. Un policier tire sur la voiture et blesse la
passagère. L'action en dommages et intérêts de celle-ci dirigée contre une personne publique,
l'Etat, relève de la compétence judiciaire, parce que les opérations qui suivent le
franchissement du barrage sont des opérations de police judiciaire (utilisation d'une arme dans
l'intention d'arrêter l'auteur de plusieurs infractions).

Paragraphe 2 : Le contenu de la notion d’ordre public

L’ordre public que la police tend à assurer se définit :


1) Par son caractère matériel : Il s’agit d’éviter les désordres visibles tels que les
publications susceptibles de développer la criminalité, le port de tenue manifestant
ostensiblement une appartenance religieuse dans les écoles (affaire du foulard
islamique) ;

29
2) Par son caractère public, dans le sens où elle respecte le for intérieur et le domicile
privé : réglementation du bruit dû aux appareils trop sonores.

3) Par son caractère limité : les éléments de l’ordre public se ramènent à trois chefs que
sont chefs que sont la sécurité ou sûreté (secours en cas d’incendie), la salubrité
(sauvegarde de l’hygiène publique) et la tranquillité (maintien de l’ordre dans la rue
contre le bruit).

Section 2 : Les procédés de police, ses autorités et ses limites

Paragraphe 1 : Les procédés de police

La police générale et les polices spéciales sont les procédés de la police administrative. Quand
une autorité est responsable du maintien de l’ordre tel que défini ci-dessus sur une portion du
territoire, elle dispose ainsi d’un ensemble de compétences et de moyens d’action. C’est la
police générale. Mais il existe des textes qui prévoient, en vue de prévenir des désordres dans
un domaine bien défini. Des moyens précis et plus techniquement adaptés à ce domaine sont
alors mis en œuvre. Ce sont les polices spéciales. Ainsi parle t- on de la police de la chasse, de
la police des étrangers et des nomades etc.

La police générale s’exerce par trois procédés :

- La réglementation que sont les dispositions générales restrictives des libertés ;


- Les décisions particulières (autorisations, interdictions, injonctions) ;
- La coercition (force matérielle pour prévenir ou faire cesser un désordre).

Paragraphe 2 : Les autorités de police

En pratique, les diverses autorités qu’exercent la police administrative sont :

- Le premier ministre lorsqu’il en existe un constitutionnellement


- Le ministre de l’intérieur qui a sous son autorité les personnels de police d’Etat par le
biais de la direction de la sûreté nationale.
- Les préfets qui sont responsables de l’ordre dans le département et des services de la
police d’Etat dans leur circonscription. Ils ont la possibilité de se substituer au maire
défaillant.
- Le maire chargé de la police municipale qui est responsable de la police d’Etat dans
les villes où la police municipale n’existe pas. Il a l’obligation, en cas de péril grave
résultant d’une situation particulièrement dangereuse pour l’ordre public, de prendre

30
les mesures de police (arrêt Doublet, C-E- 23 octobre 1959). S’il ne le fait pas, il
commet une faute engageant la responsabilité de la commune (arrêt compagnie
d’assurance Zurich International, C-E- 20 décembre 2000).

Paragraphe 2 : Les limites du pouvoir de police

Comme toute action de l’administration, l’exercice du pouvoir de police est soumis au


principe de légalité et au contrôle juridictionnel. Une mesure de police n’est légale qu’autant
qu’elle est nécessaire en maintien de l’ordre. Le juge examine de près les circonstances de fait
qui justifient la mesure et en vérifie l’adéquation aux circonstances.

Au nom du principe de légalité, la limitation de l’exercice de la liberté est sanctionnée par le


juge. Ainsi, le refus de louer une salle communale à un groupement politique est
manifestement illégal, si le refus n’est justifié par aucun besoin d’intérêt général (C-E- 19
Août 2002, Arrêt Front national Institut de formation des élus locaux, AJDA 2002, 1017).Le
juge exerce un contrôle administratif sous la forme d’un recours pour excès de pouvoir contre
les décisions illégales des autorités administratives.

Sous - Chapitre 2 : Le service public, finalité de l’action administrative

Il peut se présenter comme une activité qui, en raison de son caractère d’intérêt général est
soumise par les personnes publiques à un régime particulier d’obligation et de prérogatives
qui le distinguent des activités privées régies par les lois du marché. Variées. Il couvre tout le
domaine de l'activité humaine (enseignement, transports, santé, communication, etc. Dans la
plupart des cas il est susceptible d'être produit aussi bien par des personnes privées que par
des personnes publiques. Pour être qualifiée de service public, l'activité doit avoir un but
d'intérêt général.

Le service public comme activité administrative sera examiné au travers de ses principes ou
lois par les quels il se gère et de ses modes de gestion.

Section I : L’identification du service public

La question est ici de savoir quels sont, en droit positif, quels sont les éléments d'identification

du service public ? Pour qu'une activité soit un service public, il est nécessaire 1°)
qu'il existe un lien spécial entre cette activité et une personne publique; 2°) que cette

31
activité ait un but d'intérêt général. Ces deux éléments sont des conditions cumulatives.
L'absence de l'un d'entre eux interdit la qualification de service public.

Paragraphe 1 : Le lien spécial avec une personne publique.

L'activité de service public est prise en charge ou contrôlée par une personne publique. Aussi,
pour qualifier l'existence d'un service public faut-il prouver ce lien spécial. Ce lien est
évident quant aux services assurés par la personne publique elle-même. Il l'est moins
lorsque les services sont confiés à une personne distincte.

Paragraphe 2 : Le but d'intérêt général.

L'absence d'intérêt général empêche toute qualification de service public. Ainsi, la


commercialisation de fleurs en France et à l'étranger par une SEML a été identifiée comme
n’ayant pas la qualité de service public, CE 10 novembre1994, Préfet de la région Lorraine,
CJEG 1995, p. 202, note TRUCHET.

Paragraphe 3 : La qualification jurisprudentielle

En l'absence de qualification textuelle expresse, le mode de distinction entre service public


à caractère administratif et service public à caractère industriel et commercial est posé par la
jurisprudence administrative, en conséquence d'un arrêt de 1956 (CE Ass., 16 novembre
1956, Union syndicale des industries aéronautiques, Rec.434, D 1956.759, concl. Laurent.

Le juge considère un service comme en principe industriel et commercial en raison de son


objet (c’est le cas de la distribution d’eau. Cette présomption ne tombe que lorsque trois
indices à la fois sont réunis à savoir l'objet du service, son mode de financement, ses
modalités de fonctionnement. Ces trois indices ont pour but de certifier que l'activité de
service public à qualifier ressemble vraiment à celle d'une entreprise privée. Dans ce cas, le
service public est reconnu être à caractère industriel et commercial. Mais si un seul des
indices manque, alors la présomption ne tombe pas.

Paragraphe 4 : Les autorités compétentes pour créer un service public

Seules des personnes publiques peuvent, en principe, fonder et supprimer des services publics.
Toutefois, il y a possibilité pour des personnes privées de créer un service public, dans la
mesure où certaines activités privées pourraient être considérées en elles-mêmes, en l'absence

32
d'intervention d'une personne publique, comme des services publics potentiels en raison de
leur caractère d'intérêt général.

Section 3 : Les lois ou principes cardinaux du service public

Il s’agit des principes fondamentaux dégagés par Louis Rolland qui s’appliquent
rigoureusement aux services administratifs, de façon plus nuancées aux services et donnent
une certaine unité à la notion de service public, par opposition aux activités privées qui
obéissent aux lois du marché économique. Les activités qui sont qualifiées de services
publics, qu'elles soient exercées par des personnes publiques ou par des personnes privées,
quel que soit leur caractère, administratif ou industriel et commercial, sont soumises à un
ensemble de règles de droit, à un régime juridique. Les trois grands principes auxquels sont
soumises les missions de services publics sont la mutabilité (capacité d'adaptation aux
conditions et aux besoins), l'égalité (dans l'accès au service et dans les tarifs) et la continuité.

Paragraphe 1 : Le principe d’égalité

Il se réfère au principe général du droit de l’égalité des citoyens. Le statut du service public
est le même pour tous et tous les usagers, quel que soit leur origine et leur catégorie, en
jouissent de la même manière. Il n’y a en principe pas de discrimination dans les prestations
du service public, même si, dans certains cas, des discriminations dites positives tenant
compte de la classification des citoyens selon le rang qu’ils occupent peuvent être faites.

Paragraphe 2 : Le principe de gratuité

Du principe de l’égalité découle de celui de gratuité. Ce principe n’impose pas de


rémunération égale aux prix de revient. Seule une disposition législative peut prescrire la
gratuité absolue. La rémunération peut être tarifée lors que les prestations excèdent les
besoins normaux. Lorsque son taux est disproportionné, cette rémunération prend le caractère
de taxe fiscale et doit être autorisé par la loi (C.E. 20 octobre 1950, fédération Parisienne du
bâtiment). Pour certains services administratifs comme l’enseignement et l’entretien du réseau
routier, la gratuité est en recul suite à la soumission des activités de service public à
l’économie de marché, notamment pour ce qui concerne les services publics industriels et
commerciaux.

Le principe de neutralité découle également de l’égalité. Il interdit aux gouvernants du


moment d’utiliser le service à des fins partisanes et aux agents du service de se départir d’une

33
certaine réserve dans l’expression de leurs opinions politiques. Il en est ainsi de l’armée et de
la police.

Paragraphe 3 : Le principe de continuité

Ce principe répond à une nécessité sociale et commande que le service doit fonctionner sans
interruption. L’obligation d’agir impose l’administration d’assurer le fonctionnement
régulier des services publics ; sauf cas de force majeure, elle ne peut l’interrompre par l’effet
de lock out par exemple, sous peine de commettre une faute engageant sa responsabilité,
laquelle est également engagée lorsque le service à fonctionné tardivement (CE, 15 juin 1955,
Courtial, rec 327). Cependant, les usagers n’ont pas droit au maintien du service (CE, 27
janvier 1961, Vannier, rec 60).

La grève ne peut non plus compromettre le fonctionnement du service public. La


jurisprudence autorise le gouvernement, responsable de ce fonctionnement du service public,
à fixer, sous le contrôle du juge, la nature et l’étendue des limitations au droit de grève des
agents publics. Le législateur quant à lui prévoit les modalités d’exercice du droit de grève
dans les services.

Paragraphe 4 : Le principe de mutabilité

La puissance publique peut toujours, dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par la
loi, prendre les mesures d’autorité, réglementaires ou fiscales, qu’elle estime nécessaires en
vue des besoins de la vie collective auxquelles elle est chargée de pourvoir (CE, 29 décembre
1905, Baudry). Ce principe s’applique aux agents et aux contractants du service ainsi qu’aux
usagers (hausse des tarifs, modification unilatérale de statut et de licenciement en cas de
suppression d’emploi).

Section 2 : Le régime juridique du service public

Paragraphe 1 : Le régime juridique des services publics administratifs

Sous réserve de la possibilité qu’ils ont d’user, pour des actes isolés ou à raison de la nature
du service, de procédés de droit privé (gestion privée), ces services sont totalement soumis au
droit administratif et utilisent des procédés de puissance publique (agents, deniers, domaine,
expropriation). Leurs usagers et candidats usagers sont dans une situation légale et
réglementaire. Leur contentieux est administratif.

34
Paragraphe 2 : Le régime juridique des services publics industriels et commerciaux

Le caractère industriel et commercial de ces sociétés résulte parfois de la loi et du règlement.


C’est le cas des offices. La doctrine quant à elle a tenté de dégager un critère simple :
réalisation de bénéfices et d’actes de commerce, intention des autorités publiques. Dans le
silence des textes, le juge joue un rôle déterminant dans la qualification de ces services. Même
si un texte donne expressément cette qualité à un service, le juge apprécie au fond à qu’elle
partie du service s’applique la qualification d’industriel (CE 17 avril 1959, Abadie).

On peut dire que les critères jurisprudentiels partent de la ressemblance plus ou moins grande
avec l’entreprise privée. « En effectuant, moyennant rémunération, les opérations de passage
de piétons et de voitures d’une rive à une autre de la lagune, la colonie de la Côte d’Ivoire
exploite un service de transports dans les mêmes conditions qu’un industriel ordinaire » (TC-
Société commerciale de l’Ouest Africain .Tels sont les critères de qualification des services
publics industriels et commerciaux auxquels s’ajoutent d’autres notamment :

- L’objet du service : les opérations auxquelles se livre le service doivent être de


même de nature que celles auxquelles une entreprise privée pourrait se livrer.
Opposant les activités naturelles de l’Etat à celles accidentelles (CE 23 décembre
1921, Société générale d’armement), ce critère distingue les activités administratives
qui, par nature, relèvent du domaine normal d’action de la puissance publique et les
activités ayant un caractère industriel et commercial qui relèvent normalement de
l’activité privée (Société commerciale de l’ouest africain, 1 juillet 1933, Melinette.
Les services monopolisés ou excluant tout but lucratif sont par leur objet,
administratifs ;
- Le financement : le service doit être essentiellement alimenté par des redevances des
usagers en contre partie des prestations qu’ils reçoivent et non par des subventions
publiques (Abadie) ;
- La condition de fonctionnement : le service doit fonctionner dans les mêmes
conditions qu’un industriel ordinaire (Arrêt Bac d’ELOKA) ; gestion selon des
usages commerciaux, réalisation de bénéfices, modalités d’organisation semblables
à celles de l’entreprise privée.

Quant au régime proprement dit, il est mixte, comportant des éléments de droit privé
(prédominants) tenant au caractère commercial du service. Ces premiers prévalent notamment

35
dans l’organisation du service (constitution et suppression, décisions réglementaires, contrôle,
application des lois ; le service ne peut compromettre, ni recourir à l’arbitrage ; la déchéance
quadriennale s’applique ; le service ne peut être mis en faillite et ses biens sont
insaisissables. Les éléments de droit privé prévalent dans son fonctionnement et ses activités,
notamment dans ses rapports avec les usagers, les tiers, les fournisseurs et le personnel, et
non plus ou moins importants le degré de commercialité atteint par le service.

Section 3 : Les modes de gestion du service public

Paragraphe 1 : L’évolution de la gestion du service public

Une tradition propre à l’Etat libéral était que la gestion des services publics relevait des seules
personnes publiques (Etat et collectivités locales) en régie. Dans la seconde moitié du 19 ème
siècle les établissements publics, personnes morales de droit public chargées de la gestion
d’un service public donné ont été responsabilisés pour assurer cette gestion. Par ailleurs, la
concession de service public est apparue comme une seconde modalité contractuelle de
gestion de ce dernier par un particulier.

Enfin, des organes distincts des établissements publics tels que les sociétés d’Etat et les
entreprises publiques se sont multipliés dont certains assurent des tâches d’intérêt général qui
ne présentent pas le caractère d’un service public. En fait, la gestion des services publics peut
être assurée par des organes privés. Le régime juridique du service public n’influence pas le
mode de gestion. Un service public industriel et commercial peut être géré en régie ou être
concédé et un service public administratif peut l’être par un organisme public ou privé.

Paragraphe 2 : La gestion des services publics par des organes publics

Il peut s’agir de la gestion directe en régie ou du procédé de l’établissement public.

A – La régie

Le service en régie relève directement d’une personne publique et ne constitue pas une
personne morale distincte de cette personne. Il n’a pas d’individualité financière, ses dépenses
et ses recettes figurent au budget général de la collectivité. C’est la personne publique qui est
titulaire des droits et obligations nés de leur activité. La personne d’attache du service en régie
assure le contrôle dudit service.

36
C’est ainsi que les services déconcentrés des divers départements ministériels sont sous la
dépendance directe de l’Etat et les services communaux sous celle de la collectivité locale.
Toutefois, le terme régie désigne, dans le cas des collectivités locales, tantôt des services non
personnalisés, tantôt des services avec autonomie financière et sans personnalité morale,
tantôt des services personnalisés. Les services en régie sont des services administratifs.
Normalement, toutes les règles et procédures du droit administratif s’appliquent à eux. Leurs
agents sont des fonctionnaires. Ils accomplissent des actes unilatéraux ou des contrats
administratifs. Leurs travaux sont des travaux publics et leur responsabilité encourue du fait
de leurs actes est administrative.

Exceptionnellement, les spics peuvent être gérés en régie. Dans ce cas, les règles
précédemment énoncées subissent une altération ; à défaut d’autonomie financière, le service
possède une individualité comptable qui permet de savoir s’il est déficitaire ou bénéficiaire, et
le droit privé s’applique à ses relations avec les fournisseurs et ses usagers.

B - L’établissement public

L’établissement public est une personne morale de droit public assumant la gestion d’un
service public et dont le champ d’action se limite à l’exécution de celui qui lui est assigné. Ne
pouvant sortir de son domaine d’activité propre, il lui est interdit d’entreprendre des tâches
autres que les missions administratives à lui dévolues par ; le texte l’instituant (C.E. 23
octobre 1985, Commune de Blaye - les mines, AJDA 1986).

L’établissement public dispose d’organes propres ayant un pouvoir de décision. Il possède un


patrimoine propre et se trouve doté d’un budget spécial, distinct de celui de la collectivité lui
ayant donné naissance. L’établissement public peut cumulativement gérer une activité
purement administrative et une activité industrielle et commerciale. L’établissement public
dispose d’une certaine autonomie. Parmi les établissements publics on distingue ceux
administratifs et ceux industriels et commerciaux. Dans le cas du Congo on retient le cas du
C.H.U .et celui de L’université Marien NGOUABI comme exemples d’établissement public.

Paragraphe 2 : La gestion des services publics par des organismes privés : la concession

A- Caractères généraux

Par ce mode de gestion une personne publique appelée le concédant charge au moyen d’un
contrat, une personne privée, le concessionnaire, de faire fonctionner le service pendant un

37
certain temps, en assurant les charges, moyennant le droit de se rémunérer sur les usagers.
Ce genre est différent d’une concession funéraire qui n’implique pas une concession d’un
service. La concession de travail quant à lui implique la concession d’un service public et le
concessionnaire s’engage à le faire fonctionner. Mais au préalable, il s’engage à construire à
ses frais, et lui-même, les ouvrages publics nécessaires à son fonctionnement.

La concession de travaux public est accordée pour une longue durée afin de permettre au
concessionnaire d’en supporter les charges et d’amortir les dépenses de premier établissement
des ouvrages qui, en fin de concession, font gratuitement retour au concessionnaire. C’est un
procédé fréquemment utilisé pour la construction et l’exploitation des autoroutes à péage et
des parcs de stationnement souterrains.

De manière classique, la gestion de la concession est confiée à une personne privée (physique
ou société).

B- L’acte de concession

La concession a pour base un contrat conclu entre l’autorité concédante et le particulier


qu’elle choisit en toute liberté. Le contrat se compose de deux documents distincts que sont
une convention qui consacre l’accord des parties et un cahier des charges dans lequel sont
consignés les droits et obligations des parties, notamment l’organisation et le fonctionnement
du service. A côté de ces clauses figurent des dispositions financières qui garantissent au
concessionnaire une rémunération. L’équilibre financier du contrat est fondamental pour le
concessionnaire.

C – Les droits et obligations du concessionnaire

1e) Les obligations

-Le concessionnaire doit assurer la continuité du service. La faute de l’administration ou des


difficultés financières ne peuvent être évoquées par lui. Seule la force majeure peut également
respecter cette exigence.

-Le concessionnaire doit respecter l’égalité des usagers devant le service. Il est tenu de fournir
à tous ceux qui remplissent les conditions requises les prestations demandées et de leur
appliquer les tarifs fixés par le concédant. Toutefois, selon la situation de ceux – ci, ces tarifs
sont différenciés, conformément aux exigences de la gestion commerciale ou de la politique

38
sociale. Cependant, tous ceux se trouvant dans ces situations peuvent se prévaloir des
conditions tarifaires qui y sont attachés.

-Le pouvoir de l’administration de modifier le régime du service pour l’adapter aux nouveaux
aspects de l’intérêt général s’applique au concessionnaire (C-E 20 janvier 1902, Gaz de
Deville - Les-Rouen et CE 5 décembre 1905, compagnie générale Française des tramways).

-Le concessionnaire est tenu de se plier au contrôle exercé par l’administration.

-Ayant été choisi intuitu personae, il ne peut ni céder, ni sous-traiter la concession, sauf à y
être autorisé.

NB : Le concessionnaire défaillant peut-être remplacé par un autre. Il est passible d’amendes


et risque la mise sous séquestre ainsi que la déchéance qui le prive de droits qu’il tenait du
contrat.

2e) Les droits du concessionnaire

Le concessionnaire a des droits afférents à la gestion du service. Le concédant met à la


disposition du concessionnaire un ensemble de moyens matériels ou juridique, qui lui sont
nécessaires pour faire fonctionner le service. Ce sont des biens du domaine privé ou public
qui lui sont affectés soit des prérogatives de droit commun :

- il bénéficie souvent d’un monopole de droit, l’administration s’engageant à ne pas traiter


avec un autre concurrent, et même à ne pas faciliter indirectement la concurrence. Le
concessionnaire peut même bénéficier de l’expropriation par exemple.

- Il bénéficie aussi du droit pécuniaire. Il se rémunère sur les produits des taxes perçues sur les
usagers en contrepartie du service rendu. Il à la garantie d’un intérêt minimum accordée à ses
emprunts.

- Il a droit à l’équilibre financier du contrat car les lois du service public en dépendent et à
l’indemnisation intégrale des charges complémentaires résultant pour lui de l’exercice par le
concédant de son pouvoir de modification du service.

- le concessionnaire a droit à l’indemnisation partielle qui aboutit à un partage des charges


avec le concédant dans les proportions fixées par le juge, lorsque l’économie du contrat se
trouve bouleversée.

Paragraphe 3 : Le contentieux de la concession.

39
Les litiges entre le concessionnaire et les usagers relèvent du juge judiciaire puisqu’ils mettent
en présence des personnes privés, de même d’ailleurs que ceux entre le concessionnaire et les
fournisseurs ou les tiers. Le concessionnaire et ses agents sont des personnes privées, la
compétence judiciaire s’applique tant aux litiges relatifs tant au statut interne de l’entreprise
concessionnaire (relations de la société avec les actionnaires) qu’a les rapports avec ses
salariés.

La compétence administrative s’applique aux litiges qui peuvent opposer les usagers à
l’autorité concédante et à ceux des actes de portée générale pris par le concessionnaire qui
concerne le régime du service.

Paragraphe 4 : La fin de la concession

La concession prend normalement fin lorsque la durée pour laquelle elle a été instituée vient à
expiration. Elle peut cependant être renouvelée. Elle peut prendre fin avant cette date par la
déchéance du concessionnaire prononcé par le juge en cas de faute lourde à la demande du
concédant qui peut mettre qui à la concession, soit pour supprimer le service, doit pour le
gérer selon une autre procédure.

CHAPITRE 3 : LES ACTES DE L’ADMINISTRATION

Section 1 : Les actes unilatéraux

L'acte administratif est un instrument juridique qui permet à l’administration d’imposer sa


volonté. C’est un acte juridique ce qui signifie qu’il produit des effets juridiques. Le présent
chapitre a pour objectif d’identifier les actes administratifs et d’étudier leur régime juridique.

Sous- section 1 : L’identification des actes administratifs unilatéraux

Paragraphe 1 : La notion d’acte administratif unilatéral

L’acte administratif unilatéral peut se définir comme l’acte juridique adopté unilatéralement
par une autorité administrative, portant sur l’ordonnancement juridique et affectant les droits
ou les obligations juridiques des tiers sans leur consentement.

40
A- L’acte administratif émane d’une personne publique

L’acte est administratif parce qu’il émane d’une autorité administrative, c’est-à-dire d’une
personne publique. On parlera de décret du Président de la République ou du premier
ministre, de délibération du conseil municipal ou d’arrêté du maire et du préfet. L’autorité
administrative est une personne publique qui est compétente pour édicter certaines
réglementations. Il ne s’agit pas nécessairement d’un fonctionnaire. L’acte administratif est
toujours l’acte de l’administration.

Toutefois, il arrive que le juge administratif reconnaisse la qualité d’acte administratif


unilatéral à des actes édictés par des personnes privées gérant un service public et disposant
de prérogatives de puissance publique (CE 13 janvier 1961 Magnier). Ce sera, par exemple, le
cas des fédérations sportives ou des ordres professionnels (ordre des avocats, des
médecins ...). Dans un arrêt Époux Barbier du 15 janvier 1968 le Tribunal des conflits a
reconnu à certaines dispositions du règlement intérieur d’Air France un caractère
administratif. Le règlement d’Air-France faisait alors interdiction aux hôtesses de se marier.
Le juge des conflits a estimé qu’une telle disposition apparaissait comme touchant à
l’organisation du service et conféré à l’acte litigieux, dans son intégralité un caractère
administratif.

B- L’acte administratif traduit une seule manifestation de volonté

L’acte administratif traduit une seule manifestation de volonté, celle de l’autorité


administrative qui a édicté l’acte (et qui est compétente pour le faire). Le caractère unilatéral
de l’acte ne signifie pas obligatoirement que l’acte doit être édicté par une seule personne.
Plusieurs personnes ont pu concourir à son édiction. C’est par exemple le cas des décrets pris
en conseil des ministres et qui doivent être contresignés par plusieurs ministres, ou de la
délibération d’un conseil municipal qui est le résultat du vote d’une assemblée constituée de
plusieurs personnes. Dans un cas comme dans l’autre, l’acte final traduit une seule volonté
(celle du conseil municipal dans sa globalité) et non la volonté individuelle de chacun de ses
auteurs.

Dans certains cas, l’autorité administrative, avant d’édicter l’acte, doit consulter une autre
autorité. Le caractère obligatoire de la consultation ne prive pas l’acte qui fait suite à la

41
consultation de son caractère unilatéral, dès lors que l’autorité décisionnaire reste le plus
souvent libre du sens et de la portée de sa décision.

C- L’acte administratif affecte l’ordonnancement juridique

L’acte administratif unilatéral entraîne des conséquences juridiques par la seule volonté
de son auteur. Il crée des droits et des obligations à la charge des destinataires de l’acte. La
notion d’acte administratif recoupe l’ensemble des règles de droit qui détermine la situation
des sujets de droit en créant des droits et obligations nouvelles. Ce sera par exemple le cas de
l’octroi ou du refus d’une autorisation (permis de construire ou titre de séjour pour un
ressortissant étranger). Ce sera également le cas d’une réglementation modifiant les
conditions d’octroi de ces autorisations individuelles (Plan Local d’Urbanisme). Dès que ces
actes modifient la situation de leurs destinataires, ces derniers peuvent former un recours pour
excès de pouvoir devant le juge administratif pour en demander l’annulation.

Au contraire, certains actes émanant de l’administration ne sont pas considérés comme des
actes administratifs, car ils ne modifient pas l’ordonnancement juridique et par conséquent ne
peuvent pas faire l’objet d’un recours. A partir de la définition des actes administratifs
unilatéraux, il est possible de délimiter la catégorie de ces actes par rapport aux autres actes de
l’administration et d’élaborer une classification des différentes catégories d’actes
administratifs unilatéraux.

- Les actes préparatoires, c’est à dire les actes qui concourent à l’édiction d’un acte
administratif mais ne constituent pas en eux même la décision (rapports, notes, réponses faites
aux parlementaires, avis obligatoires ou facultatifs)

- Les circulaires (et les directives), qui sont des documents formulés à l’intention des agents et
constituent des instructions que les ministres adressent à leur administration en vue d’une
application uniforme du droit. Si une circulaire contient des dispositions à caractère général et
faisant grief aux administrés, elle doit être qualifié de circulaire impérative (CE 18 décembre
2002 Duvignères). Dès lors, elles peuvent faire l’objet d’un recours. Est considérée comme
une circulaire impérative : la circulaire fixant, au-delà des textes, des « règles nouvelles »
relatives à la constitution des dossiers de demandes de subventions formulées par les
établissements privés d'enseignement secondaire, la circulaire prévoyant les modalités de
détention à titre provisoire des Étrangers sous le coup d'un arrêté d'expulsion, la circulaire

42
subordonnant l'adoption d'enfants Étrangers à une attestation de la direction de l'action
sanitaire et sociale.

- Les mesures d’ordre intérieur, qui sont de simples mesures d’organisation du service et
qui ne peuvent donc faire l’objet d’un recours (affectation d’un élève dans une classe,
affectation d’un agent à certaines fonctions). Toutefois, la jurisprudence a tendance à réduire
le champ des mesures intérieures en particulier en matière pénitentiaire en particulier quand
les mesures sont privatives de liberté ou qu’elles portent atteinte à la vie privée et familiale.
Par exemple, la décision par laquelle un chef d'établissement pénitentiaire fixe les modalités
essentielles de l'organisation des visites aux détenus, l'avertissement infligé à un détenu dès
lors qu’il peut avoir des effets sur ses autorisations de sortie …

Sous-Section 2 : La classification des actes administratifs unilatéraux


Paragraphe 1. Les actes réglementaires et les décisions individuelles

Il est d’usage de classer les actes administratifs en deux catégories : les actes réglementaires,
qui ont une portée générale et impersonnelle et les décisions individuelles. Les actes
réglementaires sont ceux qui ont une portée générale et impersonnelle comme la loi. Ils
entrent en vigueur dès leur publication et transmission, pour les actes des collectivités
territoriales.

Les décisions individuelles sont les actes par lesquels une autorité administrative décide
d’octroyer ou de refuser un avantage à une seule personne nommément désignée (octroi ou
refus d’un permis de construire). Le régime de ces actes est sensiblement différent de celui
des actes réglementaires. Comme ces derniers ils doivent faire l’objet d’une mesure de
publicité (on parle de notification à la personne intéressée) et éventuellement d’une
transmission en préfecture. Mais la distinction entre les deux catégories d’actes résulte de leur
mode d’édiction. Alors que les actes réglementaires sont toujours écrits, les décisions
individuelles peuvent naître du silence de l’administration.

Paragraphe 2. Les décisions explicites et les décisions implicites : la règle du silence

Le plus souvent les décisions administratives prennent la forme d’un arrêté mais le silence
gardé par l’administration peut également faire naitre une décision administrative. Par
principe le silence gardé par l’administration pendant deux mois vaut décision d’acceptation
(cf supra). Les décisions implicites ont l’inconvénient de ne pas être motivées.
43
Sous-Section 3. Le régime des actes administratifs

Le régime des actes administratifs unilatéraux peut être examiné au travers des conditions
d’élaboration de l’acte, des conditions et des modalités de son exécution et enfin de sa
disparition.

Paragraphe 1 : L’élaboration de l’acte administratif

L’élaboration des actes administratifs répond à des règles de formes et de procédure mais
également à une obligation de motivation.

A- Les formes et les procédures d’édiction de l’acte

L’acte administratif se présente le plus souvent sous la forme d’un écrit pour lequel le respect
de certaines formes est obligatoire. A défaut de comporter certaines mentions substantielles
l’acte serait annulable. Au titre de ces mentions obligatoires se trouve le nom de l’autorité qui
édicte l’acte, le visa des textes servant de base à l’acte, l’énoncé des motifs de la décision, la
signature de l’auteur de l’acte. Ces obligations sont principalement d’ordre formel.

D’autres obligations pèsent sur l’administration dans l’édiction des actes administratifs et
tiennent à l’obligation de consulter certaines autorités avant de décider. La loi ou le
règlement impose parfois à l’autorité compétente de consulter un organe particulier sous peine
d’illégalité (cas des avis obligatoires). Par exemple, avant de prendre une sanction
administrative du deuxième groupe, l’autorité administrative doit obligatoirement convoquer
un conseil de discipline. D’autres obligations processuelles peuvent tenir à l’obligation de
communiquer son dossier à l’agent qui fait l’objet d’une mesure prise en considération de la
personne. L’administration peut encore être astreinte à respecter les principes du
contradictoire lorsqu’elle édicte une mesure qui présente le caractère d’une sanction.

Dans certains cas la légalité de l’acte administratif peut dépendre directement des conditions
dans lesquelles l’autorité compétente a été amenée à se prononcer. Par exemple pour que la
délibération d’un conseil municipal soit régulière il faut que l’assemblée ait été convoquée
dans un certain délai et que la convocation fasse une mention exacte de l’ordre du jour.

44
Enfin, une dernière remarque tient à l’édiction des décisions individuelles. Celles-ci peuvent
naître soit d’une décision expresse de l’administration soit du silence gardé par
l’administration (décision implicite).

La loi française n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 (réformant celle du 12 avril 2000)


prévoit désormais que le silence gardé pendant deux mois par l'Administration sur une
demande vaut décision d'acceptation. Cette nouvelle règle ne sera pas absolue au sens où la
loi établit cinq cas de dérogation pour lesquels le silence gardé par l'Administration pendant
deux mois continuera de valoir décision de rejet :

B- Le contenu et les motifs de l’acte

L’acte administratif pour être légal doit satisfaire un but d’intérêt général. Lorsque l’autorité
administrative édicte un acte administratif dans un but autre que celui dicté par l’intérêt
général elle commet un détournement de pouvoir (cf. les cas d’ouverture du recours pour
excès de pouvoir). Pour que le juge administratif soit en mesure de s’assurer que
l’administration agit bien dans le souci de satisfaire l’intérêt général et ne commet pas
d’erreur de droit ou de fait la loi impose à l’administration de communiquer les motifs de sa
décision.

La loi du 11 juillet 1979 impose la motivation des actes administratifs individuels contenant
une mesure défavorable pour les administrés ou dérogeant aux règles générales fixées par les
lois et règlements. A ce titre, doivent notamment être motivées : les mesures individuelles de
police, les sanctions disciplinaires, le retrait d'une autorisation individuelle. Enfin, la loi du
12 avril 2000 est venue clarifier et renforcer les obligations de l’administration, notamment en
élargissant et en facilitant le droit d’accès aux documents administratifs. La loi élargie
également les compétences de la CADA (Commission d’accès aux documents administratifs),
l’organe chargé de d’agir auprès de l’administration en vue de faciliter l’accès aux documents
administratifs.

Sous-section 4 : L’exécution de l’acte administratif

Les dispositions contenues dans un acte administratif unilatéral deviennent obligatoires à


compter du moment où l’acte est entré en vigueur dans l’ordonnancement juridique. Or, l’acte
administratif ne commence à produire ses effets qu’à compter de sa publication ou de sa
notification.
45
A- L’entrée en vigueur de l’acte

C’est à partir de son entrée en vigueur que l’acte administratif produira ses effets. C’est
également à compter de son entrée en vigueur que les délais de recours commencent à
courir. Pour qu’un acte administratif entre dans l’ordonnancement juridique il doit faire
l’objet d’une mesure de publicité (la loi est publiée au Journal officiel). Les actes
réglementaires font normalement l’objet d’une publication, alors que les actes non-
règlementaires font normalement l’objet d’une notification.

1. La publication des actes réglementaires

Les actes réglementaires édictés par les autorités de l’État produisent leurs effets à l’égard
des administrés à compter de leur publication au journal officiel ou dans les bulletins officiels
des ministères. Les actes des collectivités territoriales produisent leurs effets à compter de
leur publication par voie d’affichage ou d’insertion dans la presse, et de leur transmission au
représentant de l’État. Pour les communes de plus de 3 500 habitants les actes ayant un
caractère réglementaire doivent faire l’objet d’une publication dans un recueil des actes
administratifs publiés de façon trimestrielle et tenu, en mairie, à la disposition du public.

2. La notification des décisions individuelles

Les décisions administratives individuelles prises par les autorités de l’État entrent en
vigueur dès leur notification à leur destinataire. Les décisions individuelles prises par les
autorités des collectivités territoriales doivent en outre être transmises en préfecture. On
rajoutera qu’une fois entré en vigueur l’acte administratif (acte réglementaire et décision
individuelle) ne produit ses effets que pour l’avenir. En principe les actes administratifs ne
peuvent avoir d’effet rétroactif (CE 25 juin 1948 Sté du journal l’Aurore).

B - L’exécution matérielle de l’acte

Une fois entré en vigueur l’acte administratif déploie ses effets. Il peut donc être exécuté
puisqu’il bénéficie d’une présomption de légalité. Cela signifie que même si un administré
conteste la légalité d’un acte administratif son recours devant le juge administratif n’est pas
suspensif. Il existe toutefois une procédure de référé-suspension qui permet au juge de
suspendre l’exécution de l’acte dans l’attente que le juge de l’excès de pouvoir se prononce
sur sa légalité (cf. contentieux administratif).

46
Le plus souvent l’exécution des actes administratifs ne pose aucun problème. L’administré
exécute l’acte de sa propre volonté alors même que son contenu lui serait défavorable
(certains actes administratifs ne supposent aucune exécution. C’est par exemple le cas des
décisions de refus tel que le refus d’accorder un permis de construire). Toutefois, si
l’administré refuse d’exécuter l’acte de sa propre volonté, l’administration dispose de
plusieurs moyens pour le contraindre à exécuter ses obligations :

- L’administration peut recourir à l’exécution forcée. Le recours à l’exécution forcée n’est


toutefois possible que si l’administration ne dispose d’aucune autre solution et elle doit être
strictement nécessaire à l’exécution de l’acte (TC 2 décembre 1902 Sté immobilière de Saint
Just).

- En cas d’urgence, il est admis que l’administration peut recourir sans condition à l’exécution
forcée ;

- En situation extrême, l’administration peut recourir à des sanctions pénales pour violation
d’un règlement administratif. Des sanctions administratives peuvent également être prises
contre un administré qui refuse de se plier aux obligations découlant d’un acte administratif
(fermeture d’un débit de boissons).

C- Les procédés d’exécution


Ces procédés d’exécution varient selon qu’on soit en face d’un acte permissif ou d’acte
impératif.
a) Cas des actes permissifs
Les actes permissifs sont des actes qui accordent des droits, des facultés ou des permissions
aux administrés. En effet, l’exécution de cette catégorie d’actes peut aussi bien incomber à
l’administration qu’aux destinataires des actes eux-mêmes.
Ainsi, un acte accordant un permis de construire à une personne ne nécessite guère
l’intervention de l’administration pour son exécution. Le destinataire du permis de construire
est libre d’exécuter l’acte ou de ne pas l’exécuter car rien ne l’y oblige dans les deux cas.
C’est un privilège qui lui est accordé et donc la non-exécution, peut être compris comme un
renoncement à un droit, par exemple.
Notons par ailleurs que cette intervention de l’administration ne change en rien le caractère
permissif de l’acte car le destinataire peut renoncer au privilège s’il le désire, mais il se trouve
que c’est l’administration qui a l’obligation d’exécuter un tel acte administratif unilatéral.

47
b) Cas des actes impératifs
Ces actes contrairement aux précédents ont un caractère obligatoire. Ce qui fait que leur
exécution ne peut être effectuée que par l’intervention de l’administration, autrement dit,
l’administré ne peut pas les exécuter pour une raison simple : sachant que c’est des actes
administratifs qui doivent s’appliquer obligatoirement, indépendamment de la volonté des
administrés, l’utilisation de la force peut dans certains cas être indispensable (lorsqu’un
administré refuse de s’y soumettre). Or ce privilège n’appartient qu’à l’administration.

d- Les privilèges de l’administration


Pour exécuter ses décisions, l’administration dispose de deux procédés exorbitants : le
privilège du préalable et le privilège de l’exécution forcée.
 Le privilège du préalable
« Le privilège du préalable » ou tout simplement privilège de la décision unilatérale,
signifie le droit accordé à l’administration d’user de la prérogative de puissance publique
pour l’exécution de l’acte sans pour autant s’adresser préalablement au juge. C'est-à-dire
qu’en principe rien ne peut empêcher l’exécution d’une décision administrative après sa
publication. On parle aussi de privilège de l’exécution d’office. La question qui se pose, c’est
de savoir en cas de contentieux est ce que la décision administrative sera-t-elle suspendue
jusqu'à ce que soit prouvée sa légalité ou son illégalité ? La réponse est négative, le
contentieux ne peut en principe suspendre l’acte administratif unilatéral car « le caractère
exécutoire (de la décision administrative) est la règle fondamentale du droit public ». (C.E.
Ass. 2 Juill.1982, Huglo).

Par ailleurs, en raison de la présomption de régularité de la décision administrative, en cas de


contentieux, c’est au particulier que reviendra la charge de prouver l’irrégularité de l’acte
administratif. Il sera ainsi en situation de demandeur alors que l’administration, elle sera
plutôt en situation de défendeur, ce qui est plus confortable. Il est toutefois important de
préciser que ce privilège est limité par le sursis à exécution et le jugement en référé.

 Le privilège de l’exécution forcée


La mise en œuvre de l’exécution forcée peut avoir lieu dans le cas où le destinataire de l’acte
s’oppose à son exécution. L’administration peut alors recourir à l’usage de la force publique
pour réaliser l’exécution de son acte. Ainsi, le Président du conseil communal peut user de

48
l’exécution d’office afin « d’assurer la sûreté ou la commodité des passages, la tranquillité, la
salubrité et l’hygiène publiques.
Cependant, l’utilisation du procédé de l’exécution forcée par l’Administration, sans
autorisation préalable du juge, loin d’être un principe, ne constitue en effet qu’une exception.
Car en principe l’application de ce procédé ne doit se faire que suite à une autorisation du
juge. Autrement dit, le recours au procédé de l’exécution forcée ne peut se faire que dans des
cas plus ou moins extrêmes et dans les conditions d’utilisation de ce procédé. Ces conditions
et ces cas n’étant pas respectés, la responsabilité de l’administration peut être engagée et elle
peut même être poursuivie pour voie de fait.

 Les cas de recours à l’exécution forcée


Premièrement, il faut un texte législatif autorisant l’administration à agir de la sorte.

Deuxièmement, l’absence d’autres voies de droit (sanctions pénales, administratives ou


civiles) pouvant amener le récalcitrant à se soumettre à la décision de l’administration, peut
autoriser celle-ci à recourir à l’exécution forcée comme alternative.

Troisièmement, lorsqu’il y a urgence, l’Administration peut procéder à l’exécution forcée. Ce


cas est justifié par le souci de l’intérêt public selon la formule de ROMIEU « quand la maison
brûle, on ne va pas demander au juge l’autorisation d’y envoyer les pompiers ». Il faut
rappeler aussi que ces cas ne sont pas cumulatifs, il suffit que l’Administration soit en face de
l’un d’entre eux pour que l’utilisation du procédé de l’exécution forcée soit possible.

Les conditions d’utilisation de l’exécution forcée


Premièrement, l’exécution forcée n’est possible que s’il y a une résistance à l’exécution de la
décision administrative.
Deuxièmement, l’exécution forcée doit se limiter au minimum, c’est-à-dire sans dépasser le
but recherché.

Troisièmement, l’Administration procède à l’exécution forcée à ses risques et périls. En cas


d’illégalité et d’annulation par le juge, elle endosse la responsabilité des conséquences

49
E- La fin de l’acte administratif

Les actes administratifs ne sont en principe pas édictes pour une durée limitée. Il incombe
donc à l’autorité administrative de mettre fin à un acte réglementaire ou à une décision
individuelle lorsqu’elle le juge nécessaire. Avec la disparition de l’acte cessent les effets
juridiques qui étaient attachés à l’acte. Mais il faut distinguer deux hypothèses en fonction
des effets provoqués par la disparition de l’acte. La première hypothèse consiste à abroger
l’acte, la seconde à le retirer de l’ordonnancement juridique.

1. L’abrogation de l’acte

L’abrogation de l’acte est l’hypothèse la plus simple puisque l’acte abrogé disparaît et cesse
de produire ses effets pour l’avenir. L’abrogation d’un acte réglementaire est toujours
possible car nul n’a un droit acquis au maintien d’une réglementation. L’administration peut à
tout moment mettre fin à une réglementation ou la modifier à condition de respecter le
parallélisme des compétences. Seule l’autorité qui a édicté la réglementation peut y mettre un
terme. Dans certains cas l’abrogation est obligatoire. C’est le cas si l’acte est illégal dès
l’origine ou s’il le devient suite à une modification des circonstances de droit ou de fait par
rapport aux circonstances existantes lors de son édiction. L’administration est par exemple
dans l’obligation d’abroger les règlements contraires aux dispositions issues du droit
communautaire (CE 3 février 1989 Alitalia).

L’abrogation ou la modification d’un acte individuel ne pose pas davantage de problème et


obéit aux mêmes règles que celles de l’abrogation de l’acte réglementaire. Toutefois, si l’acte
a fait naître des droits au profit d’un particulier (nomination d’un fonctionnaire, permis de
construire), il ne peut être abrogé que dans le respect des procédures prévues par les textes
(pour un fonctionnaire l’abrogation du statut ne peut intervenir que dans l’hypothèse d’une
démission, d’un licenciement ou d’une sanction disciplinaire).

2. Le retrait de l’acte

Le retrait des actes administratifs est plus complexe que l’abrogation le retrait entraîne la
disparition rétroactivité de l’acte. L’acte est donc censé ne jamais avoir existé car. La théorie
du retrait est bien évidemment une fiction car l’on ne peut jamais revenir dans le temps. Elle
consiste seulement à revenir sur les conséquences juridiques d’un acte administratif. Se pose
alors un problème de sécurité juridique. Dans quelles conditions l’administration peut-elle
50
revenir sur une décision sans porter atteinte à des situations définitivement constituées ? Il
faut donc distinguer deux hypothèses, le retrait des actes non créateurs de droits et celui des
actes créateurs de droits.

.Le retrait des actes non créateurs de droits

Si l’acte n’a pas créé de droits au profit des administrés (ce sera le cas des actes
réglementaires et de certains actes individuels, décision qui constate une situation de fait), son
retrait est possible à toute époque.

.Le retrait des actes créateurs de droits

Si l’acte est créateur de droits, il faut distinguer deux hypothèses. Soit l’acte est légal soit
l’acte est illégal.

 L’acte est légal : Dans ce cas le retrait n’est pas possible car son retrait aboutirait à
rendre les actes administratifs rétroactifs. Le retrait reste possible si le bénéficiaire des
droits donne son accord au retrait.
 L’acte est illégal : Dans ce cas le retrait est possible mais sous des conditions très
strictes. En effet, il est souhaitable que l’administration puisse elle-même revenir sur
ses actes illégaux, tout en respectant la sécurité des situations juridiques. Le Conseil
d’État, dans un arrêt Dame Cachet du 3 novembre 1922 avait posé deux conditions au
retrait des actes créateurs de droits irréguliers. Le retrait était possible soit dans les
deux mois qui suivaient la notification, soit, si un recours avait été intenté, dans les
deux mois tant que le juge n’avait pas statué. L’administration peut ainsi retirer un
acte pour éviter une annulation.

Dans un arrêt Ville de Bagneux du 6 mai 1966, le Conseil d’État est venu apporter une
précision importante à la jurisprudence Dame Cachet. En effet, dans le but de protéger les
droits des tiers à la décision, le juge a admis que « même si la décision avait fait l’objet d’une
notification à la personne visée par la décision, l’absence de publication ne pouvait faire
courir le délai de recours à l’égard des tiers ». Dans ce cas, l’administration peut, même si
aucun recours n’était formé par un tiers intéressé, rapporter à tout moment la décision illégale.

Section 3 : Le principe de la supériorité des actes règlementaires sur les actes individuels

51
Paragraphe 1 : Le contenu du principe
Les actes règlementaires fixent des règles générales et impersonnelles. Dès lors qu’ils ont été
régulièrement édictés, l’administration doit les respecter et toutes les mesures individuelles
d’implication doivent s’y conformer selon la règle qui veut que toute décision individuelle
doit être conforme à la règle pré établie. Ainsi l’administration est tenue de respecter les
règlements en vigueur lorsqu’elle prend une décision individuelle. Il s’agit d’un principe
fondamental qui s’exprime sous une triple forme :
 La décision individuelle doit être conforme aux règlements lorsque ce dernier
règlement a été dicté par une autorité hiérarchiquement supérieure. Exemple : Le
préfet du département prend une décision relative à un agent de l’état, la mesure
individuelle qu’il prend ne peut être que conforme au règlement édicté par le ministre.
 La décision individuelle doit être conforme au règlement même quand la mesure
individuelle est prise par une autorité hiérarchiquement supérieure à celle qui a édictée
les règlements.
Exemple : en matière d’urbanisme, on a un plan local d’urbanisme qui est un règlement. Les
permis de construire sont délivrés par le maire. Mais par exemple pour la construction d’un
collège c’est le préfet qui délivre le permis de construire et celui-ci doit respecter la
règlementation locale.

Paragraphe 2 : Les limites au principe (les dérogations)


La dérogation est un procédé par lequel l’administration fait bénéficier une personne
d’un régime plus favorable que celui résultant d’une stricte application de la réglementation.
Les dérogations apparaissent incompatibles avec le principe précédemment énoncé.

Section 4 : Le principe de la hiérarchie formelle des actes administratifs


Entre les sources internes de la légalité, il y a une hiérarchie qui procèdent d’une
subordination des actes administratifs les uns par rapport aux autres .il existe aussi une
hiérarchie qui tient à la procédure d’élaboration de l’acte.

Paragraphe 1 : La hiérarchie en fonction de l’organe administratif

52
Il y a une hiérarchie entre les organes administratifs. « Il y a des autorités supérieures
et subordonnées » CE. Les autorités supérieures ayant en principe le champ d’application le
plus large. Ainsi les règlements forment entre eux une cascade. Le règlement de l’autorité
supérieure s’impose à celui qui est pris par l’autorité subordonnée.
Au sommet de cette cascade on trouve
→ les décrets présidentiels
→ les décrets du 1er ministre
→ les arrêtés ministériels
→ les arrêtés préfectoraux
→ les arrêtés municipaux.
Chaque autorité ne peut que compléter, adapter sans les contredire, les règlements de
l’autorité supérieure.

Paragraphe 2 : La hiérarchie en fonction de la procédure d’élaboration


Il y a une hiérarchie qui existe en fonction de la procédure d’élaboration de l’acte. Ainsi un
décret pris en conseil d’état prévaut sur un décret présidentiel ou ministériel. Il y a
contradiction entre un décret pris par le Président de la République et un décret pris après avis
du conseil d’état, le second prévaut sur le 1er.
Selon la procédure d’élaboration, plus elle est solennelle, plus la place de l’acte est
importante.

Section 2 : Les actes contractuels

A côté de la décision unilatérale, l’administration utilise fréquemment, pour atteindre ses


objectifs, le procédé du contrat. Elle en passe de très nombreux dont on citera les principaux.

Paragraphe 1 : Diversité

- le marché de travaux publics qui est un contrat par lequel une personne
publique confie à une personne privée ou publique l’exécution d’un travail ;
- la concession : l’administration (qui est le concédant) peut concéder un
service public à une personne publique ou privée (le concessionnaire) qui lui
assurera la rémunération par les prestations rendues aux usagers ; C’est le cas
de la distribution du courant par la SNE ; elle peut également concéder un
travail public en chargeant le concessionnaire d’exécuter un travail public. La
rémunération de ce dernier se fera par la possibilité d’exploitation de

53
l’ouvrage pendant une certaine durée. Exemple : concession trentenaire, par
une ville à une société, du domaine public communal pour exploiter un parc
de stationnement ;
- l’offre de concours grâce à laquelle une personne publique ou privée propose
à une collectivité locale, qui accepte, des prestations en nature ou en argent
pour réaliser un travail public ou un ouvrage public. Par exemple : cession
gratuite d’un immeuble pour y édifier une école ;
- les marchés de fournitures ou de services par lesquels l’administration
acquiert des meubles (denrées, marchandises, fournitures) ou se procure des
services (nettoyage de locaux, transport de biens)
- l’emprunt public de l’Etat par lequel un particulier prête de l’argent à ce
dernier.

Paragraphe 2 : Les critères de détermination des contrats

Ces critères relèvent de la loi, de la jurisprudence et des personnes contractantes.

A- Les contrats par détermination de la loi

Tel est le cas lorsque le législateur ou l’autorité règlementaire ont pris parti sur la nature du
contrat, notamment en confiant le règlement des litiges nés de celui-ci à la jurisprudence
administrative. Ainsi, sont administratifs en vertu de la loi :

- les ventes domaniales des immeubles rattachés au domaine public ;


- les contrats par lesquels on occupe le domaine public ;
- les marchés de fournitures ;
- les contrats relatifs aux travaux publics etc.

B- Les critères jurisprudentiels

En vertus de ces critères, le contrat est administratif

- lorsqu’il a pour objet de confier au contractant l’exécution même d’un


service public (hébergement des personnes sinistrés par une personne privée
pour le compte de l’administration) ou encore ;
- lorsqu’il contient une ou plusieurs clauses exorbitantes du droit commun. Tel
est le cas de la clause prévoyant la résiliation unilatérale au profit de
l’administration. Chacun de ces critères suffit à lui seul pour conférer cette

54
qualité au contrat ; on dit qu’ils présentent alors un caractère alternatif et non
cumulatif.

C- Les critères organiques

Conformément à ces critères, un contrat est administratif lors qu’un des contractants est
l’administration, même si certains contrats passés par des personnes privées sont
administratifs (c’est le cas de celui conclu entre une personne privée et un organisme de
droit privé chargé d’un service public).

Paragraphe 3 : La formation des contrats administratifs

A- Les autorités compétentes

Les ministres ou les préfets concluent les marchés de l’Etat et un organe (l’autorité de
régulation) en suit l’exécution. Les présidents de conseil en concluent pour le compte des
collectivités locales. Une délibération charge le maire de le faire.

B- Les modes de passation

Trois modes de passation sont utilisés en la matière :

- 1e) l’adjudication (ouverte ou restreinte) qui permet de choisir le moins


disant ;
- 2e) le marché sur appel d’offres lui aussi ouvert ou restreint par lequel on
retient le candidat le mieux disant ou le plus intéressant ;
- 3e) les marchés négociés dits par entente libre qui permet à l’administration
d’engager, après mise en compétition, des discussions et retient son
cocontractant, même en dehors de ceux qui se sont portés candidats au
marché

Paragraphe 4 : L’exécution des contrats administratifs

En droit privé, le contrat est obligatoire, les droits et obligations ne peuvent être modifiés sans
l’accord de l’autre, les parties étant au même pied d’égalité. En droit administratif, il en est
autrement

55
A- Les prérogatives de l’administration

Ce sont :

- le droit de direction et de contrôle qui permet à l’administration d’exiger des


renseignements de son cocontractant et de lui donner des instructions.
- le pouvoir de modification unilatérale qui habilite l’administration à apporter
des modifications au contrat sans demander l’avis de l’autre partie ;
- le pouvoir de sanction qui lui permet d’infliger au contractant des sanctions
pécuniaires, des sanctions coercitives et des sanctions résolutoires, c'est-à-dire
de résiliation au tort du cocontractant ;
- le pouvoir de résiliation qui a pour objet de mettre fin, pour l’avenir, à
l’exécution du contrat, à titre de sanction et dans l’intérêt du service.

B- Les droits du cocontractant

le cocontractant n’a pas que des devoirs a à assumer, il a aussi des droits dont il bénéficie.

- la rupture imputable à l’administration par le fait du prince donne le droit à


ce dernier de bénéficier d’une indemnité intégrale ;
- le déséquilibre dû à des circonstances extérieures : ces circonstances peuvent
être dues par le fait de l’imprévision dont la théorie s’applique en cas d’une
modification imputable à des circonstances économiques telles la variation
des prix sur le marché, ou à un cas de force majeur comme le tremblement de
terre.

56

Vous aimerez peut-être aussi