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Eugène Berg
Lu
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LU
La nouvelle géopolitique
des conflits
Eugène Berg
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Dans la nouvelle édition de L’Atlas des crises et des conflits1
de Pascal Boniface et Hubert Védrine tous les points chauds de la
planète, les arcs de crise, sont passés en revue.
À la lumière de la situation actuelle, les cartes et commentaires
consacrés à la Russie et l’Ukraine, les Pays Baltes, le Caucase, la
Tchétchénie, la Moldavie avec sa carte détaillée de la Transnistrie,
seront les bienvenus. La carte de l’Europe mentionnait parmi les
territoires aspirant à une indépendance régionale et/ou un lien avec
la «mer patrie », l’est et le sud de l’Ukraine, la Crimée, Chypre Nord,
les cantons serbes du Kosovo, les territoires croates et serbes inclus
dans la Bosnie-Herzégovine. Dans leurs scénarios d’avenir les auteurs
pressentaient bien une politique plus offensive de Vladimir Poutine
sur les confins de la Russie. Tous les points chauds de la planète,
les arcs de crise, sont passés en revue, même si quelques absents
sont à mentionner - comme la République centrafricaine pourtant
comprise dans la douzaine des États faillis établis par le « Fund for
218 peace ». Il n’y a que le Pacifique qui ne figure pas dans cette analyse des
crises et conflits, ni le Timor, les Salomon ou la Papouasie Nouvelle-
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du globe, scrutées selon les particularités de ses guerres et conflits :
mouvements séparatistes pour l’Union européenne, conflits dans
l’étranger proche pour la Russie, revendications maritimes pour
la Chine, conflits communautaristes pour la péninsule indienne,
mouvements insurrectionnels, guérillas et trafics d’opium pour la
péninsule indochino-malaise, arc de crise courant de la Bande de
Gaza à la Mer Rouge et au golfe Persique. L’Afrique retient l’attention
car elle apparaît comme le condensé des guerres et conflits et comme
le théâtre du plus grand nombre de conflits actuels.
La dernière partie, traite des nouvelles formes de la guerre. Parmi
elles, il convient de distinguer les enjeux stratégiques pour le contrôle
des grands détroits et de l’Arctique. L’augmentation continue du
nombre d’États dans le monde entraîne des risques de balkanisation
et de sécessionnisme. Les conséquences du changement climatique
et de la prolifération nucléaire sont lourdes de conflits potentiels. Les
guerres médiatiques forment le dernier acteur sur le théâtre de la
220 guerre. En effet, Internet et les réseaux sociaux contournent les États
qui ont beaucoup de difficultés à les contrôler. Les révolutions du
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parfaitement rationnel et comprend très bien les notions de rapports
de force et de dissuasion, leçon que n’ont pas manqué de garder les
négociateurs occidentaux sur la question nucléaire. Quant à l’Irak, il
est loin d’avoir trouvé sa stabilité et son unité après le retrait américain
de 2011. Un Irak fort fait peur, mais un Irak failli et démembré est
encore plus alarmant pour ses voisins. C’est bien pour éviter une
tragédie pareille que le pouvoir iranien cherche à se doter de l’arme
nucléaire, malgré ses multiples dénégations. Il s’agit là peut-être de la
conséquence la plus importante du conflit de 1980 à 1988.
Ramsès fournit une analyse fouillée de la crise malienne marquée
par l’éternel retour de la rébellion et qui s’inscrit dans la fragilité de
l’espace sahélo-saharien, marqué par des clivages ethniques, tribaux
et sociaux. Les Touaregs du Nord Mali, majoritaires dans certaines
zones sont en minorité dans d’autres, car les Arabes, et les Songhaïs
et très secondairement les Peuls et les Bozos sont également présents.
Puisqu’une participation française en logistique et une opération de
222 lutte contre les rebellions paraissent imminentes, il est légitime de
s’interroger sur le destin des interventions militaires françaises en
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Justifier la guerre ?
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sécuritaire, promotion de la démocratie, State-building, où
s’arrêteront les figures de l’intervention ? On risque d’assister à
une course entre le désir légitime des vieilles démocraties, ou de
certaines d’entre elles, de réduire le désordre international et
les dures nécessités financières qui rognent chaque année les
budgets de défense. Mais il est une autre limite qui s’oppose à ces
interventions, c’est celle que lui oppose la résistance des faits et des
hommes, leur coût politique et financier. En analysant le cas de
l’Irak et de l’Afghanistan, le général Vincent Desportes montre bien
qu’avec la fin de l’intervention occidentale on assiste à la fin d’une
ère. Ces deux conflits ont montré les limites de la puissance militaire
occidentale, laquelle, malgré son écrasante supériorité, n’est pas
parvenue aux résultats qu’elle s’était assignée. La force militaire s’est
trouvée dévalorisée dans sa capacité de destruction. Les rapports au
temps, à la distance et la loi du nombre ont fait que le faible s’est
trouvé en position de force. Comment contrer un insurgé capable de
224 mobiliser 2 à 3 % de la population locale, sinon en faisant intervenir
un contingent extérieur atteignant 3 à 5 % de cette population soit
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d’oubliée. Cela montre l’ignorance que l’on impute au lecteur, car ce
fut l’un des conflits les plus meurtriers de l’après guerre (deux
millions de morts), et que la politique de non alignement est née
de ce conflit. Tout choix est difficile. Les guerres africaines (Biafra,
également deux millions de victimes, le conflit en RDC, cinq
millions … pour ne rien dire du Soudan, de l’Ethiopie/Erythrée)
sont délaissées alors que la guerre des Malouines (1982) a droit à
onze pages. Ces observations étant faites, cela ne retire rien au mérite
de cet ouvrage qui offre un panorama synthétique, je le répète des
principaux conflits de notre siècle de sang. La guerre civile russe
(1918-21) est fort bien couverte en seize pages, plus que la guerre
civile espagnole. Les auteurs, on doit leur en tenir gré, débordent
parfois du strict cadre chronologique des guerres dont ils parlent,
pour examiner leurs conséquences ou les réactions ultérieures que
celles-ci ont provoqué chez les belligérants comme l’Afghanistan
pour la Russie actuelle.
226 Le journaliste d’investigation de The Nation, Jeremy Scahill,
cofondateur du site The Intercept, avait déjà réalisé une enquête
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D’ici 2020, 85% des armes nucléaires russes auront été renouvelées.
La Chine n’est pas en reste ayant développé un planeur hypersonique,
pouvant atteindre la vitesse prodigieuse de Mach 10, soit plus de
12 000 km/h, et dispose de capacités réelles de défense antimissile.
Dans ces conditions d’incertitudes et de multiplication des conflits,
la force de dissuasion française continue à jouer pleinement son rôle,
celui d’assurer une liberté d’action au président de la République,
que sans elle il n’aurait pas développe Philippe Wodka-Gallien. Les
décisions imposées pour son renouvellement seront prises à la fin
de la présente décennie, elles fixeront les choix pour une nouvelle
généra ration de vecteurs dont l’entrée en service est attendue pour
l’horizon 2030. Ces futurs armements porteront notre stratégie au
delà de 2080.
Géopolitique du terrorisme
228 S’agissant du terrorisme dans le monde, Jean-Michel Dasque
fait le point de manière claire, globale, pédagogique même dans
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Certes il constate avec raison, que l’Occident avait fait le calcul
d’une chute rapide de Bachar Al Assad, est-ce vrai, pour autant, que
l’on a tout simplement sous traité le conflit à certains pays du Golfe,
le Qatar et l’Arabie saoudite en particulier. Il est vrai que la France
disposait de maints atouts diplomatiques dans l’affaire syrienne : une
bonne connaissance du dossier, régional, une tradition ancienne de
résolution des conflits, une réputation de mesure et une capacité de
dialoguer avec tous. Peut-on le suivre lorsqu’il affirme que Paris s’en
est tenu à une diplomatie au cow boy et qu’il s’est mis à la remorque
des néoconservateurs américains ?
Poussant plus loin l’analyse, Frédéric Pichon, constate, que le
cas syrien démontre l’échec de l’occidentalisme. C’est une formule
un peu forte. Il aurait plus conformes à la réalité de constater que
l’Occident n’a plus le monopole du pouvoir et que celui est
désormais plus partagé avec d’autres pôles de puissance. À ce
jour le rôle des Occidentaux reste irremplaçable car aucun autre
230 cendre de puissance n’a ni pris la relèvent ni n’est disposé et capable
de le faire.
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