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Les innovations des cabinets d’expertise comptable face

aux changements réglementaires, sociologiques et


technologiques
Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h
Dans Innovations 2023/2 (n° 71), pages 185 à 215
Éditions De Boeck Supérieur
ISSN 1267-4982
ISBN 9782807399280
DOI 10.3917/inno.pr2.0143
© De Boeck Supérieur | Téléchargé le 15/08/2023 sur www.cairn.info par Shayane Goulamhoussen (IP: 87.88.38.39)

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Les innovations des


cabinets d’expertise
comptable face
aux changements
réglementaires,
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sociologiques et
technologiques
Nadine DE LA PALLIERE
Laboratoire d’économie et de gestion de l’Ouest (LEGO) EA 2652
Faculté de Droit, des Sciences Économiques et de Gestion (DSEG)
Université Bretagne Sud
Campus Tohannic – Rue André Lwoff – BP 573 – 56017 Vannes Cedex
nadine.de​-la​-palliere@​univ​-ubs​.fr

Catherine GOULLET
Laboratoire d’économie et de gestion de l’Ouest (LEGO) EA 2652
Faculté de Droit, des Sciences Économiques et de Gestion (DSEG
Université Bretagne Sud
Campus Tohannic – Rue André Lwoff – BP 573 – 56017 Vannes Cedex
catherine.goullet@​univ​-ubs​.fr

Annaïck GUYVARC’H
Laboratoire d’économie et de gestion de l’Ouest (LEGO) EA 2652
IUT de Vannes – Université Bretagne Sud
8, rue Michel Montaigne – BP 561 – 56017 Vannes cedex
annaick.guyvarch@​univ​-ubs​.fr

n° 71 – innovations 2023/2 DOI: 10.3917/inno.071.0185 185


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

RÉSUMÉ
L’objet de cette étude est d’identifier, de caractériser les innovations liées
aux changements réglementaires, sociologiques et technologiques et de
montrer leurs incidences sur le positionnement stratégique, le périmètre
d’activités, le modèle organisationnel, le modèle économique et les outils
de pilotage des cabinets d’expertise comptable. Pour ce faire, nous avons
réalisé une étude qualitative inductive à partir de 21 entretiens semi-
directifs menés auprès d’experts-comptables dirigeants bretons exerçant
dans des cabinets de taille différente. Il en ressort trois principales contri-
butions. La première affine la compréhension de l’innovation dans les
cabinets. La seconde met en exergue l’importance du rôle des clients,
des collaborateurs et des experts-comptables dirigeants dans la démarche
d’innovation. La troisième souligne l’importance de la taille des cabinets
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dans la mise en place des innovations.
MOTS CLÉS : Cabinet d’expertise comptable, Évolutions réglementaires, Évolutions
sociologiques, Évolutions technologiques, Innovations
CODES JEL : L89, M49, M54

ABSTRACT
Innovations in Accounting Firms in the Face of
Regulatory, Sociological and Technological Changes
The purpose of this study is to identify, characterise the innovations
linked to regulatory, sociological and technological changes and to show
their impact on the strategic positioning, scope of activities, organisa-
tional model, economic model and management tools of public account-
ing firms. To this end, we conducted an inductive qualitative study based
on 21 semi-structured interviews with Breton senior accountants working
in firms of different sizes. Three main contributions emerged. The first
one refines the understanding of innovation in the firms. The second
highlights the importance of the role of clients, staff and senior accoun-
tants in the innovation process. The third highlights the importance of
firm size in the implementation of innovations.
KEYWORDS: Accounting Firm, Regulatory Changes, Sociological Changes,
Technological Changes, Innovations
JEL codes: L89, M49, M54

Depuis sa création, en août 1969, la filière de l’expertise comptable


s’est adaptée aux évolutions réglementaires, sociologiques et technolo-
giques. Cependant, comme le précisait Barré en 2017, les évolutions ne

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Les innovations des cabinets d’expertise comptable

nécessitaient que quelques adaptations de la part des acteurs du secteur.


Aujourd’hui, les changements semblent plus profonds, s’accélérer et modi-
fier l’environnement des cabinets d’expertise comptable. Trois facteurs
principaux impactent cet environnement. Premièrement, sociologique-
ment, le comportement et les attentes des clients ont évolué. Tomasini-
Bartoli (2019) souligne que les clients réclament de plus en plus d’outils
pour obtenir immédiatement des réponses à leurs demandes et satisfaire
leurs désirs. Ils sont plus volatils et plus exigeants sur la rapidité d’accès
à l’information et les honoraires (Ouaknine, 2017 ; Chollet et al., 2022).
Deuxièmement, technologiquement, le développement de l’automatisa-
tion des activités traditionnelles de production et de clôture des comptes
permet d’exploiter très rapidement l’information produite et aide les
experts-comptables à accompagner les chefs d’entreprise dans leur gestion
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quotidienne (Chapellier, 2003 ; Barlette, Jaouen, 2014 ; Friscour, 2017 ;
Ahyee et al., 2018). Troisièmement, la réglementation (ordonnance du
30 avril 2014, décret du 30 mars 2012 modifié par le décret du 18 août
2014, loi du 6 août 2015 et loi PACTE d’avril 2019) a étendu le périmètre
des activités des cabinets et le développement de leurs pratiques commer-
ciales. Tous ces changements sont à l’origine d’innovations, qui sont de
nature à faire évoluer le périmètre d’activités, le positionnement straté-
gique, l’organisation, le modèle économique et les outils de pilotage des
cabinets. Notre étude s’attache à répondre à la question suivante. Dans ces
circonstances, quelles sont les innovations mises en place par les cabinets
et quelles sont leurs incidences sur leurs activités et leur organisation ?
Alors que de nombreux travaux de recherche académiques et profes-
sionnels traitent des évolutions récentes au sein des cabinets, peu d’entre
eux, à notre connaissance, font un état des lieux des avancées à date et
s’interrogent sur leur capacité à innover. Selon Peters et Waterman (2012),
l’innovation traduit la propension des organisations à réagir au moindre
changement de leur environnement. L’innovation dans les cabinets, de
même que celle relative à l’ensemble des entreprises de services, a long-
temps été minimisée. Jusqu’à la fin des années quatre-vingt, ainsi que le
soulignent Tether et Howells (2007), les services étaient le plus souvent
réputés comme peu innovants. Depuis, plusieurs chercheurs, tels que
Barras (1986), Sundbo (1997), Gallouj (1998), Den Hertog (2000), de Vries
(2006), Gallouj et Djellal (2010) ou encore Carlborg et al. (2014), se sont
attachés à montrer qu’il existe une véritable démarche d’innovation dans
les services. Les recherches distinguent principalement trois approches
de l’innovation dans les services, qualifiées de technologiste, servicielle
et intégratrice. L’approche technologiste accorde une place centrale à

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Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

la technologie et à l’analyse de son introduction dans les organisations


de services. L’approche servicielle prend en compte les caractéristiques
intrinsèques des services (immatérialité, immédiateté et interactivité) et
analysent les innovations sous le prisme des spécificités des services et de
leur mode d’organisation. Enfin, l’approche intégratrice cherche à intégrer
toutes les dimensions du service (produit-service, vecteur et utilisateur de
connaissances du client et du prestataire, ensemble de caractéristiques),
permettant ainsi une analyse plus exhaustive des formes d’innovation que
l’on peut rencontrer dans les services. De l’approche intégratrice, rete-
nue pour notre étude, et des définitions de l’innovation proposées dans la
littérature, notamment celles de Blum (2015) et Allam-Firley (2021), nous
considérons que l’innovation au sein des cabinets consiste en la propo-
sition de services et processus nouveaux ou sensiblement améliorés, de
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changements organisationnels, en la création ou le développement des
marchés qui contribuent à leur performance globale.
Dans le cadre d’un contrat de recherche nous liant à la région Bretagne
et pour répondre à notre questionnement, nous avons réalisé une étude
qualitative à partir d’entretiens semi-directifs menés auprès de 21 experts-
comptables dirigeants bretons exerçant dans des petits, moyens et grands
cabinets, conformément à la typologie proposée par l’Observatoire des
Métiers de l’Expertise Comptable et de l’Audit (OMECA) (2016). Ces 21
entretiens n’ont pas d’objectif de représentativité statistique. Néanmoins,
notre étude respecte les principes de saturation sémantique et de diver-
sification de la recherche qualitative. La Bretagne, compte 833 experts-
comptables, 183 experts-comptables stagiaires et 7580 collaborateurs pour
550 sociétés d’expertise comptable1. Nous y retrouvons les mêmes secteurs
d’activité que dans les autres régions françaises, avec une surreprésenta-
tion du secteur agricole (16,2 % en Bretagne contre 10,8 % pour l’en-
semble de la France) et une sous-représentation des secteurs des services
(42,1 % contre 45,3 %) et de la construction (13,4 % contre 15,9 %)2.
Après un entretien avec l’un des membres de la gouvernance du Conseil
Régional de l’Ordre des Experts-Comptables de Bretagne, nous considé-
rons que la clientèle des cabinets bretons est sensiblement la même que
celle des autres régions françaises, hors île-de-France, avec un peu plus
de clients du secteur agricole et un peu moins des secteurs des services
et de la construction. Les entretiens ont été retranscrits et analysés pour
présenter les innovations observées au sein des cabinets.

1.  Conseil Régional de l’Ordre des Experts-Comptables – Bretagne (31/12/2020).


2.  Chiffres clefs Bretagne – CCI Bretagne – Édition 2020.

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Les innovations des cabinets d’expertise comptable

Après une revue de la littérature nous permettant de préciser notre


cadre d’analyse, nous détaillons notre méthodologie, puis présentons les
résultats avant de les discuter et de conclure.

Le cadre conceptuel
Bien que l’étude de l’innovation au sein des cabinets ait fait l’objet
de quelques travaux, comme ceux de Vezina (1995), Lafontaine (2003),
Trigui (2008), Trigui et Chapellier (2009) et Blum (2015), l’accélération
des changements modifiant leur environnement nous a conduits à cette
recherche. Après avoir présenté les évolutions récentes de la profession,
nous précisons certains éléments de l’innovation dans les services mobili-
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sés pour définir notre cadre d’analyse.

Les évolutions récentes de la profession


Les évolutions réglementaires, sociologiques et technologiques
conduisent à des changements, dont la littérature fait état au niveau du
périmètre d’activités, du positionnement stratégique, des changements
organisationnels, du modèle économique et des outils de pilotage des
cabinets.

Le périmètre d’activités et l’évolution


du positionnement stratégique
L’activité des cabinets a longtemps été centrée sur les missions régle-
mentaires comptables, fiscales, sociales et juridiques. Ces dernières
années, les textes encadrant la profession ont été remaniés en profondeur
et ont étendu de manière significative le périmètre d’exercice de la profes-
sion, mais ont aussi accru la concurrence en redéfinissant les territoires
et frontières. Ces remaniements font suite notamment à l’ordonnance du
30 avril 2014 (suppression de la condition de détention de capital, possi-
bilité de créer des succursales), au décret du 30 mars 2012, instituant les
sociétés de participations financières d’expertise comptable, modifié par le
décret du 18 août 2014, portant sur le démarchage et instaurant le mandat
fiscal unique. La loi du 6 août 2015, dite loi Macron, a également élargi
le cadre d’exercice des experts-comptables en l’ouvrant, sous certaines
conditions, aux missions non comptables, y compris auprès de clients pour
lesquels ils n’effectuent aucune mission comptable. Cette loi Macron auto-
rise l’interprofessionnalité. L’évolution des textes permet donc d’élargir le

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Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

champ des prestations, de proposer une offre pluridisciplinaire, de capter


une nouvelle clientèle et de développer des pratiques commerciales.
En dehors de la tenue comptable et des obligations fiscales et sociales,
les clients attendent de leur expert-comptable qu’il les accompagne dans
le pilotage, l’amélioration de la performance et la pérennisation de leur
entreprise (Chapellier, 2003 ; Barlette, Jaouen, 2014). Friscour (2017)
précise que les nouvelles technologies permettent aux cabinets de collec-
ter des informations en temps réel et, ainsi, proposer très rapidement un
contenu informationnel à grande valeur ajoutée à leurs clients. Arraou
(2016) insiste sur le fait que les cabinets sont pionniers en matière d’in-
formatisation, de dématérialisation et de numérisation, ce qui les aide à
proposer des activités d’accompagnement, prolongement logique et natu-
rel des missions comptables. Ces évolutions font basculer la profession
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comptable libérale et réglementée dans une logique plus entrepreneuriale
(Dietrich, Moysan-Louazel, 2012 ; Blum, 2015).
Si le cabinet demeure un producteur d’informations légales, il devient
également un partenaire incontournable dans la gestion et le dévelop-
pement des entreprises. L’objectif est de développer l’accompagnement
du client au quotidien dans le pilotage de son entreprise. Ceci est d’au-
tant plus important que comme le souligne Pluchart (2019, p. 49), « plus
un cabinet est dépendant de sa mission traditionnelle, plus il est menacé ».
Arraou (2016) note que bon nombre d’experts-comptables éprouvent des
difficultés à transformer ces prestations en chiffre d’affaires et à devenir de
véritables partenaires stratégiques de l’entreprise.
Pour Blum (2015, p. 182), les cabinets ont besoin d’évoluer vers un
modèle d’« entreprise cabinet comptable, orientée client ». Stratégiquement,
il leur revient de définir des missions reposant sur une bonne connaissance
des besoins des clients. Par ailleurs, avec la concurrence des nouveaux
entrants 100% en ligne et la concentration des acteurs traditionnels,
les cabinets sont concernés par la question de la productivité qui affecte
leur rentabilité (Tahar, Monnier-Senicourt, 2015 ; Bargain, Djerbi, 2018).
Ainsi, nombreux sont ceux qui éprouvent le besoin de redéfinir leurs acti-
vités et prennent des directions différentes pour maintenir ou améliorer
leurs résultats. Une solution consiste à proposer des services à forte valeur
ajoutée, difficiles à reproduire par des robots ou des programmes infor-
matiques (Friscour, 2017). Ces services peuvent constituer un avantage
indéniable pour les cabinets, prestataires de services intellectuels. Des
pratiques commerciales plus directes et offensives, s’appuyant sur l’image
de marque des cabinets et les fondamentaux de la profession, peuvent être

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Les innovations des cabinets d’expertise comptable

mobilisées (Ouaknine, 2017). Les opérations de communication et de


promotion, autorisées par les ordonnances du 25 mars 2004 et du 18 août
2014, laissent la possibilité aux cabinets de mettre en place des straté-
gies pour promouvoir leurs activités et faire face aux offres « ubérisées »
et low cost des nouveaux entrants. L’objectif de ces stratégies est de faire
coïncider les signaux de valeur créée avec ceux de l’offre de services, pour
empêcher toute discordance entre les deux et ainsi créer un rempart face
à la concurrence.
Comme le soulignent Ferguson (2012) et Blum (2015), les cabinets
disposent de plusieurs atouts sur lesquels ils peuvent communiquer pour
se différencier des autres acteurs, notamment ceux présents sur le marché
du conseil. Ils sont considérés comme des partenaires de confiance par les
dirigeants d’entreprise et les Pouvoirs publics, qui les considèrent comme
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des relais indispensables et fiables. En effet, ils entretiennent des relations
privilégiées avec les entreprises pour lesquelles ils manient des données
financières et stratégiques (Mazars-Chapelon et al., 2018, Mignon et al.,
2018). La profession est réglementée et s’appuie sur des règles déontolo-
giques, sources de contraintes mais aussi de sécurité. Enfin, la formation
des experts-comptables est reconnue comme étant une formation de haut-
niveau. Tous ces atouts sont autant de moyens pour définir une marque
« expert-comptable » et être un argument de différenciation important et
stratégique (Ouaknine, 2017).

Les changements du modèle organisationnel


L’évolution des technologies permet d’industrialiser et d’automatiser
les tâches comptables basiques et d’améliorer les processus organisation-
nels. Le gain de temps et les outils collaboratifs et prédictifs offerts par les
nouvelles technologies offrent aux cabinets la possibilité d’être adaptables
et proactifs face aux demandes des clients.
Les technologies, modifiant la façon de travailler, et le fait que les
cabinets peuvent désormais détenir des participations dans des filiales
non inscrites à l’Ordre des experts-comptables permettent de propo-
ser de nouveaux modèles organisationnels. L’apparition des plateformes
numériques fait évoluer le marché de l’expertise comptable et introduit
un risque de désintermédiation de la profession. C’est ainsi que sont appa-
rus des cabinets 100 % en ligne, proposant une offre épurée à très bas
prix et où le contact client est quasi-inexistant ou limité à un chatbot. Le
modèle économique de ces cabinets repose sur une logique de domina-
tion par les coûts, fondée sur l’automatisation et la standardisation des

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Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

prestations (Ahyee et al., 2018), qui conduit à une certaine « ubérisation »


de la profession (Ouaknine, 2017).
Ouvrard et Valant-Gandja (2012) et Bargain et Djerbi (2018) recom-
mandent aux cabinets de proposer une offre multiservices afin de mieux
répondre aux besoins des clients. Certains cabinets se spécialisent par
département ou par secteur d’activité. La recherche d’interdisciplinarités,
qui est une réalité dans la profession comptable sur des champs notam-
ment juridiques, est facilitée par la loi Macron de 2015 et les ordonnances
et décrets de 2016 et 2017. Ces textes autorisent le regroupement au sein
d’une même structure, la société pluri-professionnelle d’exercice (SPE), de
professionnels du droit et du chiffre, qui peut constituer un véritable pôle
de compétences pour répondre à l’éventail des besoins des clients. Aussi,
des compétences multiples, qu’elles soient internes ou externes au cabinet,
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sont recherchées pour satisfaire directement ou indirectement les attentes
des clients. Cela contraint également les cabinets à réfléchir à leur straté-
gie de gestion des compétences dans un contexte où la profession est de
moins en moins attractive et les recrutements difficiles, comme le montre
l’étude réalisée par l’OMECA en 2020. Rocher (2019) souligne que les
cabinets organisent fréquemment des campagnes de communication à
destination des étudiants pour renforcer leur attractivité. De plus, selon
l’étude réalisée par Fed Finance (2019), cette tendance n’est pas près de
s’inverser car, aujourd’hui, le marché est porteur et les candidats à l’em-
bauche le savent. Ils sont de plus en plus volatils et exigeants sur leurs
conditions d’embauche, de rémunération et de travail.
Les cabinets sont des entreprises de services professionnels, où le
capital humain est central (Guillot-Soulez, Chastenet, 2021). Aussi, les
questions d’attractivité, de motivation et de fidélisation des ressources
humaines sont cruciales, d’autant plus que les cabinets, étant position-
nés sur les mêmes métiers avec un fort caractère interchangeable, sont en
concurrence. Ainsi, la fidélisation des collaborateurs représente un véri-
table avantage concurrentiel.

L’évolution du modèle économique


et des outils de pilotage
L’automatisation des missions comptables traditionnelles combinée à
la concurrence accrue au sein et en dehors de la profession, la concen-
tration des cabinets, la stagnation, voire la baisse des tarifs, la hausse des
coûts fixes, notamment ceux liés à la masse salariale, et la hausse des
consommations intermédiaires diminuent de plus en plus les marges des

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Les innovations des cabinets d’expertise comptable

cabinets. En effet, selon l’Insee, l’évolution des tarifs n’a pas suivi celle de
l’inflation puisque, sur la période 2006-2018, les prix des services comp-
tables n’ont augmenté que de 6,6 %, alors que l’inflation a été de 15 %.
La croissance annuelle du chiffre d’affaires des cabinets s’affaiblit d’année
en année. Alors que celle-ci était de 8,2 % sur la période 1999-2001, elle
a chuté à 5,2 % pour 2001-2008 et à 2,9 % pour 2008-2018 (INSEE). Dans
le même temps, la masse salariale augmente et représente près de 58 % du
chiffre d’affaires des cabinets (Xerfi Precepta, 2018).
Les clients n’hésitent plus à faire jouer la concurrence et à négocier
les honoraires (Ouaknine, 2017 ; Chollet et al., 2022). Baker (2009) et
Blum (2015) précisent que les prestations des cabinets sont fréquemment
sous-valorisées et non facturées en fonction de la valeur ajoutée apportée.
Dans une étude de 2017, le Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-
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Comptables3 montre que la facturation au forfait est prépondérante pour
les missions comptables, fiscales et juridiques. En revanche, la facturation
des missions d’accompagnement et de conseil se fait principalement au
temps passé. Blum (2015) note que les facturations au temps passé ou au
forfait ne sont pas adaptées à l’accompagnement ou au conseil, car elles
ne sont pas fondées sur la valeur ajoutée de la prestation et ne permettent
pas au client de l’apprécier. Elle ajoute que le forfait conduit à fournir
des conseils sans les facturer. Quant à la facturation au temps passé, elle
souligne qu’elle ne traduit pas la valeur réelle de la prestation, notamment
lorsque le cabinet délivre une prestation innovante par rapport aux autres
acteurs du marché. Il semble que la facturation de type success fees (hono-
raires de succès), rendue possible par la loi PACTE, soit la plus adaptée aux
missions d’accompagnement et de conseil. Dans ce cas, la rémunération
du cabinet est fonction des résultats obtenus par l’entreprise au regard des
conseils apportés. Le champ d’application de cette facturation est néan-
moins limité et ne peut pas inclure la facturation des missions comptables
exercées à titre principal, ainsi que celles contribuant à la détermination
de l’assiette fiscale ou sociale du client.
Selon Belin-Munier et Luangsay-Catelin (2014), bien que la produc-
tion d’informations, leur stockage et leur traçabilité soient au cœur du
métier d’expert-comptable, la création de valeur passe par une bonne
exploitation de ces informations. Les changements, notamment techno-
logiques, conduisent les cabinets à revoir leur politique de prix sur leurs
missions de base et à pratiquer une différenciation tarifaire selon la qualité

3.  Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts Comptables (CSOEC) (2017), Marchés de la profession
comptable, Collection des études, CSOEC.

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de leurs services. Ils sont donc amenés à réfléchir à une facturation plus en
adéquation avec les coûts supportés.
Les charges d’un cabinet sont en grande partie fixes, dont une part
importante de charges de personnel. La plupart du temps, les cabinets
mesurent leur profitabilité en fonction des temps passés par dossier. Ils
mettent en place un système de pilotage par les coûts horaires avec une
analyse budgétaire. De ce fait, la masse salariale, qui devrait être perçue
comme génératrice de valeur ajoutée, est trop souvent considérée comme
un coût à maitriser et à minimiser. Ce pilotage par les coûts présente deux
limites majeures. D’une part, les ressources et les compétences ne sont
pas considérées comme génératrices de valeur ajoutée, mais comme des
postes de coûts. D’autre part, la connaissance des coûts a posteriori n’est
pas un indicateur de pilotage, mais seulement un indicateur de contrôle
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ne permettant pas une gestion proactive. Pendaries et Pendaries (2012)
proposent une autre méthode de pilotage, basée non plus sur le coût de
l’heure vendue mais sur ce qu’elle rapporte au cabinet.
Afin de rationaliser leurs processus et maintenir leur rentabilité,
certains cabinets mettent en place des outils de contrôle de gestion
(Pendaries, Pendaries, 2012 ; Ndao, Cargnello-Charles, 2015) ou des
méthodes reposant sur le lean management (Capelletti, Levieux, 2010 ;
Masson, 2016). Ndao et Cargnello-Charles (2015) montrent que les
cabinets utilisent des outils de contrôle de gestion peu élaborés, avec un
contrôle informel au niveau du recrutement, de la formation et de la socia-
bilisation. Cependant, les grands cabinets disposent d’outils de contrôle
de gestion plus avancés, avec entre autres des outils de contrôle budgétaire,
de reporting et de suivi de la performance commerciale. Les petits, quant à
eux, se contentent bien souvent du suivi de l’atteinte de leurs objectifs et
d’un contrôle des heures facturées et des temps passés par dossier.
Pour améliorer leur rentabilité et faire face aux nouveaux entrants,
Tahar et Monnier-Senicourt (2015) préconisent aux cabinets de dupli-
quer deux méthodes issues de la grande distribution. La première consiste
à industrialiser la coproduction de services intellectuels et la seconde à
rationaliser les processus en mettant le client au travail et en le contrô-
lant. Comme dans la grande distribution, il est également possible de
proposer des produits d’appel, facturés en dessous du prix du marché, pour
attirer les clients. En associant le développement de la consommation de
masse (prix bas et forfaitaire) à la rationalisation des processus (division
du travail et spécialisation), les cabinets peuvent donc industrialiser la
coproduction de services.

194 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

L’innovation dans les services


Devant la richesse des recherches menées sur l’innovation dans les
services, nous ne faisons référence qu’à certains éléments permettant de
préciser notre cadre d’analyse développé dans une perspective intégratrice
de l’innovation. À cette fin, nous présentons les catégories d’innovation,
leur degré d’intensité et leur forme pour aboutir à notre cadre d’analyse.

Les catégories d’innovation


Schumpeter (1934) définit cinq catégories d’innovation : les nouveaux
biens, les nouvelles méthodes de production, les nouveaux marchés, les
nouvelles sources de matières premières et les nouvelles organisations de
la production. Allam-Firley (2021) souligne que cette définition est trans-
posable aux services et permet également de proposer cinq catégories d’in-
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novation : les nouveaux services, les nouvelles méthodes de réalisation
des services, les nouveaux marchés, les nouvelles sources de services et
les nouvelles organisations pour réaliser les services. D’autre part, selon
Bessant et Davies (2007), l’innovation dans les services se matérialise dans
un environnement constitué de quatre dimensions, à savoir le produit-
service, le processus, la position et le paradigme. L’innovation du produit-
service consiste à transformer le service commercialisé. L’innovation
de processus change la manière dont le service est réalisé et/ou exercé.
L’innovation de position est une modification du contexte dans lequel le
service est délivré. Enfin, l’innovation du paradigme traduit la transfor-
mation des « modèles mentaux sous-jacents qui encadrent ce que fait l’orga-
nisation » (Bessant, Davies, 2007, p. 67).
Bien souvent, il est difficile de séparer le service de son processus de
réalisation. Certains auteurs (Gallouj, Weinstein, 1997 ; Gallouj, 1998 ;
Uchupalanan, 2000) soulignent que ces deux éléments sont étroitement
liés, peuvent être concomitants et parfois impossibles à distinguer. Ils
précisent que les innovations dans les services requièrent souvent des
changements dans le processus et que parfois le processus est le service.
Dans notre cadre d’analyse, nous retenons quatre catégories d’innova-
tion, celles relatives aux produits-services, aux marchés, aux processus et
à l’organisation.

Le degré d’intensité des innovations


La littérature distingue les innovations radicales et les innovations
incrémentales. Lorsqu’elles sont radicales, elles génèrent des changements

n° 71 – innovations 2023/2 195


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

notables. En revanche, lorsqu’elles sont incrémentales, elles représentent


des améliorations du produit-service, du processus ou des transferts de
technologie. Bien souvent, elles résultent d’une démarche d’amélioration
continue. Selon Barreyre (1980), les impacts de ces dernières sont moindres
que ceux des innovations radicales, car elles génèrent peu de changements
fondamentaux dans les organisations et sur le marché. Sundbo et Gallouj
(1998) signalent que les innovations dans les services sont souvent incré-
mentales et correspondent à des ajustements de procédures. Ils précisent
également que leur développement est relativement rapide du fait qu’elles
ne nécessitent pas de recherches ou de connaissances scientifiques appro-
fondies. Djellal et Gallouj (2001) expliquent que la rapidité de la mise
en œuvre du processus d’innovation dans les services peut être liée à la
nature incrémentale des innovations, résultant bien souvent d’imitations
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intra ou extra sectorielles. L’innovation radicale traduit la nouveauté et,
comme Den Hertog (2000) le souligne, ce qui est nouveau pour l’entre-
prise est une nouveauté dans l’absolu, même si le processus ou le service
existe déjà par ailleurs. Avlonitis et al. (2001) ajoutent que pour l’analyse
de l’innovation dans les services, le degré de nouveauté pour l’organisa-
tion mais aussi pour le marché est à prendre en considération. Enfin, selon
Christensen (2013), le caractère radical d’une innovation relève plus de
l’importance des changements qu’elle engendre dans l’entreprise que du
degré de nouveauté du service en lui-même.
Nous considérons que les innovations dans les services peuvent être
incrémentales ou radicales et toucher le produit-service, le processus, l’or-
ganisation et le marché.

Les formes d’innovation


Dans une perspective intégratrice et à partir des travaux de Gallouj et
Weinstein (1997), nous identifions et retenons quatre formes principales
d’innovation, à savoir les innovations ad hoc, d’anticipation, d’objectiva-
tion et de recombinaison. Elles prennent en compte les spécificités des
services et sont toujours observables aujourd’hui (Allam-Firley, 2021).
L’innovation ad hoc consiste à créer de nouvelles connaissances et/ou
compétences à partir de celles accumulées. Elle peut être radicale ou incré-
mentale et se définir comme la construction interactive d’une solution à
un problème spécifique soumis par un client. C’est le cas, par exemple,
lorsque l’expert-comptable utilise ses compétences et son expertise pour
proposer une solution répondant à une demande particulière d’un client
(Den Hertog, 2000 ; de Vries, 2006). Bien que la reproductibilité et

196 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

l’appropriation des innovations ad hoc ne soient pas évidentes, lorsque


leur pertinence et leur adaptabilité sont avérées, elles peuvent aboutir à la
création de nouveaux produits-services standardisés.
L’innovation d’anticipation répond aux nouvelles opportunités
du marché, aux évolutions réglementaires ou aux nouveaux besoins.
L’innovation s’inscrit dans une démarche prospective, est connexe à la
vision stratégique de l’organisation (Sundbo, 1997) et a un caractère radi-
cal. Par exemple, dans le cadre de la loi Macron, les experts-comptables
peuvent désormais élargir leur cadre d’exercice et proposer des missions
non comptables à titre principal (études ou travaux statistiques, écono-
miques ou administratifs dans le domaine social et fiscal et accompagne-
ment déclaratif et administratif).
L’innovation d’objectivation permet de matérialiser des innovations
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de processus. Il s’agit de préciser les méthodes, les processus ou l’organisa-
tion, conférant aux innovations un caractère incrémental. Elle permet de
garantir une certaine stabilité et matérialité aux produits-services offerts,
par la mise en place de caractéristiques techniques, qui peuvent être maté-
rielles (équipements, logiciels, etc.) ou immatérielles (méthodes, organi-
sation, etc.). Cette forme d’innovation est souvent sous-estimée dans les
entreprises, bien qu’elle permette de substituer aux anciennes méthodes
de nouvelles méthodes plus efficaces. Au sein d’un cabinet, il peut s’agir
par exemple de réorganiser la révision des comptes via les nouvelles solu-
tions informatiques.
L’innovation de recombinaison repose sur un principe d’association-
dissociation. À partir du produit-service d’origine, elle consiste à créer
de nouveaux produits-services en le fractionnant. Il peut aussi s’agir de
supprimer ou d’ajouter des caractéristiques au produit-service. Elles sont
incrémentales. Par exemple, certains cabinets proposent aujourd’hui des
packs différenciés, allant du simple pack de base, avec la tenue comptable,
aux packs avec options de prestations.

Le cadre d’analyse
À partir de la revue de la littérature, nous définissons l’innovation
comme étant la proposition de services et processus nouveaux ou sensi-
blement améliorés, de changements organisationnels, de création ou
développement de marchés, qui contribuent à la performance globale de
l’organisation. Aussi, notre cadre d’analyse permet d’étudier les innova-
tions induites par les changements récents au sein des cabinets. Celui-ci

n° 71 – innovations 2023/2 197


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

repose sur la prise en compte de quatre catégories d’innovation (produits-


services, marchés, processus et organisations), chacune se déclinant selon
des formes différentes (ad hoc, anticipation, recombinaison et objectiva-
tion) et leur degré d’intensité (incrémental et radical) (tableau 1). Cette
grille de lecture est mobilisée pour identifier les innovations que les cabi-
nets adoptent ou mettent en place en réponse aux évolutions réglemen-
taires, sociologiques et technologiques, et leurs incidences sur le périmètre
d’activités, le positionnement stratégique, le modèle organisationnel, le
modèle économique et les outils de pilotage (Schéma 1).

Tableau 1 – Les innovations au sein des cabinets d’expertise comptable

Catégorie Forme Intensité Description


Nouveaux produits-services
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créés à partir des connais-
Radicale sances et/ou compé-
Ad hoc
Incrémentale tences accumulées au sein
des cabinets d’expertise
comptable
Produits- Nouveaux produits-services
services liés aux évolutions technolo-
Anticipation Radicale
giques, réglementaires
et sociologiques
Produits-services exis-
tants fractionnées ou
Recombinaison Incrémentale
recombinées pour créer de
nouveaux produits-services
Radicale Nouveaux marchés répon-
Ad hoc Incrémentale dant aux nouvelles attentes
et demandes des clients
Marchés Nouvelles opportunités de
marché liées aux évolutions
Anticipation Radicale
technologiques, réglemen-
taires et sociologiques
Nouveaux processus liés aux
Anticipation Radicale évolutions technologiques
Processus et sociologiques
Amélioration et formalisa-
Objectivation Incrémentale
tion des processus existants
Nouvelles organisations du
travail liées aux évolutions
Anticipation Radicale
réglementaires, sociolo-
Organisation giques et technologiques
Changements
Objectivation Incrémentale
organisationnels

198 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

Schéma 1 – Cadre d’analyse


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La méthodologie de recherche
L’étude, fondée sur des entretiens semi-directifs, s’inscrit dans une
démarche qualitative inductive. L’objectif est d’identifier et de caractéri-
ser les innovations liées aux changements réglementaires, sociologiques
et technologiques, conformément à notre cadre d’analyse, et de montrer
leurs incidences sur le positionnement stratégique, le périmètre d’activités,
le modèle organisationnel, le modèle économique et les outils de pilotage
des cabinets interrogés. À cette fin, nous avons sélectionné des cabinets
ayant des bureaux en Bretagne. Pour les classer, nous avons retenu la typo-
logie proposée par l’OMECA (2016), qui retient trois catégories de cabi-
net : petit, moyen et grand. Ces catégories reposent sur l’effectif global du
ou des cabinets d’un même groupe. Leurs principales caractéristiques sont
présentées dans le tableau 2.
21 entretiens semi-directifs ont été menés, en face-à-face, auprès d’ex-
perts-comptables dirigeants exerçant en Bretagne pour répondre à un
questionnement sur le pourquoi et le comment (Blais, Martineau, 2006 ;
Yin, 2014). Notre échantillon comprend 6 petits (A à F), 11 moyens (G
à Q) et 4 grands cabinets (R à U). Le guide d’entretien était structuré
autour des thèmes suivants : la caractérisation du cabinet, les nouvelles
technologies et réglementations et leurs impacts sur le management des
personnes, l’activité, les processus, le modèle économique et les outils
de pilotage. Les entretiens, d’une durée moyenne de 55 minutes, se sont
déroulés entre novembre 2020 et février 2021. Ils ont été enregistrés et
entièrement retranscrits. Pour chaque catégorie de cabinet, nous avons
considéré que nous avions atteint le seuil de saturation lorsqu’un nouvel

n° 71 – innovations 2023/2 199


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

entretien n’apportait plus d’élément nouveau à la compréhension de notre


étude (Guest et al., 2006).

Tableau 2 – Principales caractéristiques des cabinets selon leur taille

Petit Moyen Grand

Effectif global Moins de 10 De 10 à 1000 Plus de 1000


% des 83 % 17 % Moins de 1 %
structures
% des effectifs 65 % 15 % 20 %
de la profession
% du CA de la 33 % 36 % 31 %
profession
Nombre de Généralement Plusieurs Plusieurs
bureaux mono bureau bureaux, inté- bureaux intégrés
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grés ou non dans dans des réseaux
des réseaux ou nationaux et
groupements internationaux
nationaux
Prestations Activité tradi- Activité centrée Expertise
principales tionnelle centrée sur l’expertise comptable
sur l’expertise comptable Conseil
comptable Audit
Clientèle TPE Grands comptes Grands comptes
principale PME ETI ETI
Petites associations PME PME
Professions Associations Associations
libérales Professions Professions
Artisans libérales libérales
Territoire local Artisans Artisans
Territoire national Territoire
national et
international

Source : adapté de l’OMECA (2016)

Nous avons retenu une méthodologie fondée sur les trois étapes clas-
siques de l’analyse qualitative, décrites par Miles et Huberman (1994). La
première conduit à condenser les données (réduction, codage), la seconde
à les présenter et la troisième à formuler et vérifier les conclusions. Cette
production de connaissances repose sur un processus de codage rigou-
reux, qui consiste en un double codage des entretiens pour renforcer la
qualité de l’analyse. Pour commencer, les idées significatives ont été repé-
rées (thèmes généraux, codage axial), puis classées par catégories d’idées
récurrentes (codage sélectif) avant leur analyse. Nous avons illustré nos

200 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

résultats par des verbatims, qui reflètent les idées issues de l’analyse mais
aussi leur formulation (Gavard-Perret et al., 2012).

La présentation des résultats


À partir de nos entretiens, nous identifions et caractérisons les inno-
vations, conformément à notre cadre d’analyse, et décrivons les évolutions
du positionnement stratégique, le périmètre d’activités, le modèle orga-
nisationnel, le modèle économique et les outils de pilotage des cabinets
interrogés.

Le périmètre d’activités et le
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positionnement stratégique
Les experts-comptables soulignent que le comportement et les attentes
des clients, surtout des plus jeunes, ont changé. Ils sont plus exigeants
en termes de rapidité d’accès à l’information, d’obtention d’informations
et de conseils. Ces changements sociologiques, couplés aux évolutions
technologiques et réglementaires, font émerger de nouveaux besoins et
de nouvelles prestations à plus forte valeur ajoutée et sont donc sources
d’innovations. Mais force est de constater que selon la taille des cabinets,
les avancées ne sont pas les mêmes.
Les petits, par manque de ressources et de temps, n’imaginent pas,
actuellement, de nouvelles missions au-delà de celles qu’ils réalisent déjà
en termes d’accompagnement des clients. Pour autant, pour faire face aux
évolutions, surtout technologiques, certains d’entre eux réfléchissent à
une mutualisation de leurs moyens, afin de rendre supportables les coûts
technologiques.
« Il y a plein de choses auxquelles je ne peux pas répondre. Enfin,
plein, j’exagère, mais je sens qu’il y a un vrai potentiel auquel je
ne peux pas forcément répondre par manque de temps. C’est
dommage. » Expert-comptable F
En dehors de l’accompagnement qu’ils pratiquent déjà, les cabinets de
taille moyenne ne proposent pas vraiment de nouvelles missions, mais
leur niveau de réflexion sur la stratégie est un peu plus avancé que celui
des petits. Certains ont spécialisé leurs collaborateurs par métier, par type
de clientèle et sont plus efficaces grâce à l’évolution technologique des

n° 71 – innovations 2023/2 201


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

outils dans l’accompagnement des clients. Par exemple, au sein du cabi-


net Q, les collaborateurs sont spécialisés par domaines d’activité (création
d’entreprise, fiscalité, ressources humaines, etc.), ce qui leur permet d’être
plus efficaces et force de proposition face aux demandes des clients. Une
grande majorité de ces cabinets font actuellement plus de volume pour
compenser la baisse des marges, mais conviennent, pour bon nombre, que
ce n’est pas une solution d’avenir.
«  C’est le volume qui fait gagner un petit peu d’argent, et donc
évidemment la tentation c’est de faire du volume. Mais ce n’est
pas là-dessus qu’on gagnera de l’argent à terme. On vendra forcé-
ment moins cher le traitement comptable qui sera automatisé. Il
faut trouver de la valeur ajoutée ailleurs, sur du conseil. » Expert-
comptable Q
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La plupart des grands cabinets proposent une offre multi-services, élar-
gissant ainsi le champ de leurs prestations facturables. Leur organisation
multi-bureaux, leur spécialisation par bureau, par collaborateur et les solu-
tions numériques en place leur permettent d’y répondre en grande partie.
Par ailleurs, certains pensent à l’interprofessionnalité permise par la loi
Macron. Ils ont réfléchi à l’évolution de leur métier et des marchés, avec
notamment le développement de missions à plus forte valeur ajoutée. Ils
identifient de nouveaux besoins et prestations facturables aux clients, qui
peuvent empiéter sur les domaines d’activité d’autres professions comme le
consulting, la gestion de patrimoine ou encore la gestion des ressources
humaines. Par exemple, le cabinet R s’est positionné sur un nouveau
marché en créant un pôle consulting. La stratégie des grands cabinets est
d’accroître leur volume d’affaires en étant davantage proactifs. Pour cela,
ils ont d’ores et déjà commencé à exploiter les données collectées afin de
proposer des solutions en temps réel et par domaine d’activité. Par ailleurs,
bien que l’accès à distance soit facilité, ils développent l’accompagnement
au quotidien en déplaçant les collaborateurs des cabinets vers la clien-
tèle pour être, plus systématiquement, force de proposition et se rendre
indispensables pour les clients. Pour vendre leurs nouvelles prestations,
ils mettent en place des stratégies de développement commercial, notam-
ment en ayant recours à des chargés de clientèle, autorisées depuis 2014,
comme le souhaite le cabinet T.
« Aujourd’hui le métier de la comptabilité n’est pas un métier à forte
valeur ajoutée pour nous. Ce que veulent les clients, c’est l’analyse
des chiffres et ce qu’on leur apporte derrière. Nous développons une

202 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

offre plus à la carte, mais le conseil est difficile à vendre. … Notre


objectif c’est de mettre en place des chargés de clientèle. » Expert-
comptable T
Les grands et les moyens cabinets travaillent leur image de marque
pour gagner des parts de marché, recruter et fidéliser des collaborateurs
plus polyvalents, plus généralistes avec des qualités d’écoute et de commu-
nication importantes. Ainsi, faire évoluer le périmètre d’activités et le
positionnement stratégique nécessite de disposer de moyens humains et
financiers adéquats.
Comme le synthétise le tableau 3, les innovations modifiant le péri-
mètre d’activités et le positionnement stratégique des cabinets se matéria-
lisent par la mise en place, dans certains cabinets, surtout les plus grands,
de nouveaux produits-services ou marchés.
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Tableau 3 – Les innovations modifiant le périmètre
d’activités et le positionnement stratégique

Taille des
Description Catégorie Forme Intensité
cabinets
Nouvelles offres
souvent coproduites
avec le client : propo-
sition de services
dans des domaines
Produits- Moyens
particuliers (suivi de
services Ad hoc Incrémentale et
trésorerie, conseil en
Marchés grands
fiscalité, formation
comptable dispensée
au client, gestion et
analyse des données,
…)
Nouvelles offres en
repensant et recombi- Moyens
Produits-
nant l’existant (offres Recombinaison Incrémentale et
services
multi-services, packs grands
multi-options)
Nouvelles offres non
existantes auparavant
au sein du cabinet
(conseils en audit Produits-
organisationnel, services Anticipation Radicale Grands
management, marke- Marchés
ting, développement
durable, sécurisation
des données, etc.)

n° 71 – innovations 2023/2 203


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

Le modèle organisationnel
Les experts-comptables soulignent que les progrès techniques et l’évo-
lution de la culture sociétale génèrent des changements organisationnels
au sein des cabinets. Ils conduisent à des innovations concernant les
processus de réalisation des produits-services et la gestion des ressources
humaines. Pour les processus, il s’agit de l’automatisation croissante de
la production de l’information comptable et de sa formalisation par de
nouvelles procédures. Pour les ressources humaines, cela se traduit par
une politique de recrutement différente, une montée en compétences des
collaborateurs et une nouvelle organisation du travail. Ces innovations
mettent en exergue l’importance des connaissances et des compétences
de l’expert-comptable et des collaborateurs dans l’adoption des nouvelles
technologies et la compréhension des attentes des clients. Cependant,
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selon la taille des cabinets, il y a une distinction à opérer.
En matière d’utilisation de solutions numériques, les petits sont peu
équipés ou ont insuffisamment déployé leurs solutions pour générer des
gains de productivité par manque de ressources financières et humaines.
La mise en place de ces outils est onéreuse et chronophage en paramé-
trages et contrôles divers.
« J’ai installé RCA. Je l’ai très peu développé par manque de temps…
C’est vraiment tout un travail d’installation qui est fastidieux parce
qu’il faudrait se dégager un mois ou deux mois pour ne faire que
ça. Et moi, sincèrement, je ne l’ai pas. Et puis, on est pris par le
quotidien qui est quand même assez lourd. » Expert-comptable F
Pour les moyens et grands cabinets, la mise en place des outils est plus
avancée, car leurs moyens sont plus importants. Toutefois, actuellement,
l’automatisation de la tenue comptable ne génère pas suffisamment de
gains nets, à cause des nombreux contrôles nécessaires pour fiabiliser les
données et parce que les solutions des éditeurs de logiciels ne sont pas
totalement abouties. Sur la révision, le gain de temps est plus manifeste.
Cependant, actuellement, il est quasiment systématiquement réemployé à
faire du volume pour compenser les coûts des nouveaux outils et répondre
aux exigences déclaratives des administrations fiscales et sociales.
« On a bien perçu qu’il y aurait un intérêt économique à la numé-
risation. Mais, actuellement, on n’a pas encore mesuré les fruits de
ces gains de productivité. Ce n’est pas encore sensible, parce qu’il y a

204 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

plusieurs traitements à faire, plusieurs contrôles qui nous prennent


quasiment autant de temps qu’avant. » Expert-comptable Q
Ainsi, la dématérialisation ne génère pas encore suffisamment de gains
de productivité pour que les cabinets puissent se consacrer pleinement au
développement de nouvelles activités.
Tous les cabinets ont conscience que les collaborateurs doivent évoluer
en compétences pour faire face aux changements auxquels la profession
est confrontée, conduisant également à une réorganisation des bureaux.
Aujourd’hui, la plupart des collaborateurs des moyens cabinets font certes
moins de saisies mais plus de contrôle. L’objectif est de les rapprocher
des clients, de redonner du sens à leur travail et d’avoir une orientation
client plus marquée. Les grands cabinets souhaitent que leurs collabora-
teurs mettent davantage en avant leurs savoir-faire et savoir être. Il est
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demandé aux collaborateurs d’accompagner les clients dans leur gestion
quotidienne, d’être plus polyvalents et d’avoir davantage de compétences
en informatique.
«  Le collaborateur comptable doit être plus proche de ses clients,
moins technicien et beaucoup plus dans le conseil. Il doit être bon en
relations humaines et avoir des qualités d’écoute et rester technique.
Pour bien conseiller, il faut savoir de quoi on parle. Le savoir-être
est aussi très important. Il y a aussi un petit volet commercial parce
qu’à un moment il faut vendre du conseil. » Expert-comptable R
Certains grands et moyens cabinets se réorganisent en se spéciali-
sant par bureau, par département et/ou par collaborateur. En revanche,
les petits ont conscience du besoin de se regrouper pour mutualiser leurs
moyens et atteindre une taille critique, mais ne l’ont pas encore réalisé.
« À moyen terme, sur sept ou huit ans, si on n’a pas les outils, on
sera menacé. Il va y avoir un problème de taille et c’est pour ça que
les cabinets veulent se réunir sous forme de GIE, notamment pour
mutualiser les coûts des outils. ... Il faut mutualiser les coûts et
avoir une taille critique. » Expert-comptable A
Dans l’immédiat, ils demandent à ce que les collaborateurs montent
en compétences, surtout en informatique.
Ces changements ont un impact sur la politique de recrutement. Les
petits cabinets recherchent des collaborateurs avec des compétences en
informatique. Les moyens et les grands recrutent des collaborateurs avec
un niveau de qualification élevé, capables d’effectuer des missions à forte

n° 71 – innovations 2023/2 205


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

valeur ajoutée. Pour ces derniers, le profil idéal est un collaborateur qui,
en dehors de ses connaissances comptables, est un bon communicant, à
l’écoute des clients, autonome et force de proposition dans la gestion des
dossiers. Ils cherchent des profils techniques, mais également plus généra-
listes. Certains cabinets recrutent des collaborateurs qui leur permettent
de se structurer en informatique, marketing et ressources humaines. Par
cette diversification des compétences et du personnel, l’expert-comptable
dirigeant, en dehors de son cœur de métier, devient un manager et un
coach capable d’initier les changements nécessaires.
«  Notre métier aujourd’hui, c’est aussi un métier de coach, de
consultant et pas de gribouilleur. » Expert-comptable N
Les experts-comptables soulignent une certaine résistance au chan-
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gement pour certains collaborateurs. De par leur âge ou leur niveau de
compétences, ils n’ont pas envie de s’investir dans une formation ou
pensent ne pas être à la hauteur, en ne disposant pas des qualités humaines
nécessaires pour être au plus près des clients, et préfèrent rester au cabinet
pour gérer les dossiers. Dans les grands cabinets, la direction est acteur
et moteur de la conduite du changement. Tous les cabinets soulignent la
difficulté à recruter et fidéliser les collaborateurs. Pour contourner cette
difficulté, certains cabinets développent la marque employeur.
«  On a une vraie problématique RH. Moi, je suis persuadé que
cette problématique RH, pour la résoudre, il faut redonner du sens
à l’entreprise. Il faut aussi recréer des marques, enfin une marque
employeur, une image de la société. » Expert-comptable E
Le tableau 4 caractérise les innovations observées au sein des cabinets
interrogés modifiant leur modèle organisationnel.

206 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

Tableau 4 – Les innovations modifiant le modèle organisationnel

Taille des
Description Catégorie Forme Intensité
cabinets
Modification
des modalités
de production
de l’information Moyens
Processus Ad hoc Incrémentale
(numérisation, et grands
révision automa-
tisée, nouveaux
logiciels, etc.)
Nouvelles organi-
sations du travail
(formalisation
des procédures,
Processus Moyens
spécialisation Objectivation Incrémentale
Organisation et grands
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par bureau, par
collaborateur,
organisation en
département)
Création de
nouvelles fonc-
tions (chargé de Moyens
Organisation Anticipation Radicale
clientèle, juriste, et grands
spécialiste en
marketing, etc.)

Le modèle économique et les outils de pilotage


Les systèmes de facturation les plus répandus sont le forfait et la factu-
ration à l’acte. Nous n’avons observé aucune pratique de facturation de
type success fees. Bien que des réajustements de forfait soient possibles
lorsqu’il y a des dépassements, les experts-comptables s’accordent à dire
qu’il est difficile de facturer des prestations supplémentaires, puisque le
client considère que celles-ci sont déjà comprises dans le forfait, et recon-
naissent ne pas savoir les vendre.
« En réalité, on fait déjà du conseil, mais on ne le valorise pas forcé-
ment, parce qu’on ne sait pas bien le valoriser, parce que ce n’est pas
forcément notre culture d’être des commerçants, des commerciaux.
On sait faire plein de choses, mais on sait mal le vendre. » Expert-
comptable Q
Les petits n’envisagent pas de modifier leur système de facturation pour
l’instant, dans la mesure où tout reste à faire pour eux. Pour les moyens,

n° 71 – innovations 2023/2 207


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

malgré l’augmentation des charges fixes liées aux investissements dans


les nouvelles technologies, nous observons une certaine impuissance à
facturer davantage et différemment. Pour les grands, deux d’entre eux
proposent des packs plus ou moins complets de prestations, instaurant
ainsi un niveau de différenciation dans les prestations incluses ou non
dans ces packs. Cela permet de faire prendre conscience au client que
toute prestation supplémentaire, en dehors des missions traditionnelles,
entraine la facturation d’un surplus, mais également que l’expert-comp-
table est un partenaire de l’entreprise dans ce qu’il peut lui apporter au
niveau de la gestion et de la performance.
«  Nous proposons différentes offres de services qu’on appelle les
profils. Nous avons des missions récurrentes que l’on met sous une
appellation ‘profil essentiel’ car c’est l’essentiel de notre métier, la
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comptabilité, les déclarations fiscales. … Ensuite, il y a ce qu’on
appelle le ‘profil développement’ qui est plus lié à nos conseils et qui
est ponctuel. … Enfin, on a aussi un ‘profil numérique’ qui permet
aux chefs d’entreprises de suivre, gérer, piloter son entreprise 24h/24
depuis n’importe quel écran. » Expert-comptable T
Sur les outils de pilotage de la performance, certains experts-comp-
tables admettent que jusqu’à présent ils n’éprouvaient pas le besoin de
mettre en place un suivi très poussé de la performance parce que les
marges étaient confortables. Pour les petits et moyens cabinets, le suivi de
la performance se résume à des comparatifs de temps et à un simple suivi
du chiffre d’affaires. Ils sont plus dans une logique de constat que dans une
logique de maîtrise des coûts de revient. Certains grands cabinets (R, S,
T) se dotent d’outils de pilotage plus performants afin de maintenir leur
niveau de rentabilité.
« Aujourd’hui, le coût technologique n’est pas intégré dans la factu-
ration. C’est un investissement par recherche d’un gain de producti-
vité. Mais, il ne faut pas qu’on perde de chiffre d’affaires. C’est pour
ça qu’il faut qu’on bascule la partie conseil et accompagnement sur
un modèle économique différent. Pour ça, on a un nouveau logiciel
de gestion de la performance. C’est un outil de pilotage. » Expert-
comptable T
Les innovations observées, modifiant le modèle économique et les
outils de pilotage au sein des cabinets étudiés, sont rappelées dans le
tableau 5.

208 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

Tableau 5 – Les innovations modifiant le modèle


économique et les outils de pilotage

Taille des
Description Catégorie Forme Intensité
cabinets
Nouvelles formes
de tarification Produits-
Recombinaison Incrémentale Grands
des prestations services
(packs)
Nouveaux outils
de pilotage (logi-
Organisation Objectivation Incrémentale Grands
ciel de pilotage de
la performance)

Discussion et conclusion
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L’objet de notre étude était d’identifier et de caractériser les innova-
tions liées aux changements réglementaires, sociologiques et technolo-
giques et de montrer leurs incidences sur le positionnement stratégique,
le périmètre d’activités, le modèle organisationnel, le modèle économique
et les outils de pilotage des cabinets. Pour cela, nous avons réalisé une
étude qualitative inductive à partir de 21 entretiens semi-directifs menés
auprès d’experts-comptables dirigeants bretons exerçant dans des cabi-
nets de taille différente. Il en ressort trois principales contributions. La
première affine la compréhension de l’innovation dans les cabinets et
poursuit les travaux de Vezina (1995), Lafontaine (2003), Trigui (2008),
Trigui et Chapellier (2009) et Blum (2015). La seconde met en exergue le
rôle des clients, des collaborateurs et de l’expert-comptable dirigeant dans
la démarche d’innovation. La troisième souligne l’importance de la taille
des cabinets dans la mise en place des innovations.
Notre première contribution est une grille de lecture à plusieurs
dimensions identifiant les innovations que les cabinets peuvent mettre
en place suite aux récentes évolutions. Elle s’inscrit dans une approche
intégratrice de l’innovation dans les services en référence, entre autres,
aux travaux de Gallouj et Weinstein (1997). La première dimension porte
sur l’objet de l’innovation (produits-services, marchés, organisation et
processus), la seconde concerne les formes d’innovations (ad hoc, d’antici-
pation, d’objectivation et de recombinaison) et la troisième fait référence à
leur degré d’intensité (incrémental et radical). Les innovations observées
ont été répertoriées suivants ces trois dimensions, comme les présentent
les tableaux 3, 4 et 5. Nous constatons que certaines innovations sont à

n° 71 – innovations 2023/2 209


Nadine de la Pallière, Catherine Goullet, Annaïck Guyvarc’h

l’origine d’autres innovations, comme l’automatisation de la tenue comp-


table (innovation technologique) à l’origine d’innovations organisation-
nelles, ces dernières pouvant conduire à des innovations de produits-
services. Face aux changements, les cabinets prennent conscience de la
nécessité d’évoluer et d’être proactifs, ce qui se traduit par la mise en place
d’innovations au niveau stratégique, de l’offre, de l’organisation et de la
façon de travailler. Leur propension à innover reste toutefois fonction des
moyens qu’ils peuvent y consacrer. Ces innovations concourent à résis-
ter à la concurrence des nouveaux entrants, maintenir et développer des
parts de marché et préserver la rentabilité des activités dans une optique
de survie à long terme, comme le souligne Pluchart (2019). La profession,
par le biais de l’Ordre des experts-comptables, a un rôle à jouer dans la
diffusion des « bonnes pratiques » pour permettre, entre autres, aux petits
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cabinets de profiter des avancées de ceux de taille plus importante.
Notre seconde contribution précise le rôle joué par chacune des parties
prenantes (clients, collaborateurs, expert-comptable dirigeant) dans le
processus d’élaboration des innovations. Nous constatons que le client
est au cœur des innovations observées (Rubalcaba et al., 2012). Celles-ci
relèvent de l’évolution de la relation client qui devient plus instantanée.
Nous montrons que trois éléments clefs caractérisent cette relation : la
dématérialisation, par le recours à des solutions numériques, l’instan-
tanéité, par l’exigence croissante des clients à tout vouloir immédia-
tement, et l’atemporalité par une sollicitation de son comptable à tout
moment. L’arrivée du cloud permet à tous les utilisateurs de disposer de
logiciels, de changer les pratiques et de créer plus d’interactivité avec le
client, qui collabore davantage. Les outils technologiques transforment
et orientent l’activité vers plus d’accompagnement dans la gestion quoti-
dienne professionnelle et privée des clients. L’innovation se poursuit par
la collecte et l’exploitation des données, qui font évoluer les prestations
proposées et nécessitent une montée en compétences des collaborateurs
et le recrutement de personnes ayant des profils différents. Comme le
soulignent Gallouj et Weinstein (1997), les connaissances, l’expérience
et les observations des collaborateurs génèrent des innovations, sources
d’améliorations continues, qui ne pourraient pas survenir sans eux. De
plus, le collaborateur, au cœur des processus et des services, peut être à
l’initiative de nouveaux produits-services, notamment co-créés avec le
client (Rubalcaba et al., 2012). Aussi, le rôle de la connaissance, parti-
culièrement celle du collaborateur, est importante dans l’innovation
(Den Hertog et al., 2010). Certains cabinets font appel à des spécialistes
externes pour élargir leurs compétences. La formation continue permet de

210 innovations 2023/2 – n° 71


Les innovations des cabinets d’expertise comptable

répondre aux difficultés des cabinets à recruter (Rocher, 2019) et à retenir


leurs collaborateurs, ce qui peut constituer un réel avantage concurrentiel
(Guillot-Soulez, Chastenet, 2021). Au-delà, notre étude montre qu’afin
que les collaborateurs éprouvent du plaisir et du sens à travailler, quelques
cabinets mettent en place une nouvelle organisation (autonomie dans la
gestion du temps, télétravail, responsabilités accrues, etc.) et renforcent la
qualité de vie au travail (salle de pause, horaires flexibles, etc.). Pour initier
toutes ces transformations, l’expert-comptable dirigeant doit adopter une
vision entrepreneuriale (Dietrich, Moysan-Louazel, 2012 ; Blum, 2015) et
se conduire, comme le montre nos résultats, davantage en leader, mana-
ger et chef d’entreprise. Il doit assurer trois rôles : continuer à assurer ses
missions liées à sa qualité d’expert-comptable, être moteur du changement
et piloter le cabinet. D’un point de vue managérial, les deux derniers rôles
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sont d’autant plus importants que les experts-comptables éprouvent des
difficultés à recruter les profils dont ils ont besoin et à les fidéliser. Ainsi,
certains d’entre eux n’hésitent pas à développer la marque-employeur pour
attirer et fidéliser les collaborateurs, ce vers quoi l’ensemble des cabinets
devront tendre pour rester attractifs.
Notre troisième contribution concerne le facteur taille dans la mise
en place des innovations. Les plus grands cabinets innovent globalement
dans tous les domaines. Nous les qualifions de leaders car ils sont précur-
seurs et accélèrent leurs transformations pour mieux se positionner vis-à-
vis de la concurrence. Pour les moyens, que nous nommons les suiveurs,
la situation est plus subie, mais ils s’investissent et investissent dans ces
changements. Enfin, les petits ont entrepris peu ou pas de changements et
ont une attitude attentiste. Globalement, la mise en place des innovations
dépend en grande partie des moyens humains et financiers dont disposent
les cabinets, comme le soulignait Blum (2015). Pour contourner ce facteur
taille, les petits cabinets doivent mettre en œuvre des stratégies de regrou-
pement pour conforter leurs moyens.
Notre étude comporte des limites qui sont possiblement des voies de
recherches futures. Dans ce contexte, il serait intéressant de poursuivre
ces travaux sur la maîtrise de la qualité et les systèmes de management de
la qualité au sein des cabinets. Par ailleurs, la portée de notre recherche
demeure limitée du fait qu’elle est basée sur une zone géographique délimi-
tée (la Bretagne). De ce fait, et par le caractère qualitatif de notre étude,
les résultats ne sont pas généralisables. Dans une démarche confirmatoire,
une étude quantitative à plus grande échelle permettrait peut-être une
généralisation des résultats par rapport au cadre d’analyse proposé.

n° 71 – innovations 2023/2 211


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publications.

n° 71 – innovations 2023/2 215


© De Boeck Supérieur | Téléchargé le 15/08/2023 sur www.cairn.info par Shayane Goulamhoussen (IP: 87.88.38.39)
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