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Hand Surgery and Rehabilitation xxx (2016) xxx–xxx

Mise au point

Fractures de l’extrémité distale du radius : quelle classification choisir ?


Distal radius fractures: Which classification is the right one?
L. Obert *, D. Lepage, R. Saadnia, F. Mille, P.-B. Rey, F. Loisel
Service d’orthopédie, de traumatologie, de chirurgie plastique, reconstructrice et assistance main, EA 4268 « I4S » IFR 133 Inserm, CHRU de Besançon,
boulevard Fleming, 25000 Besançon, France
Reçu le 23 août 2015 ; reçu sous la forme révisée le 1er octobre 2015 ; accepté le 2 février 2016

Résumé
La classification idéale n’existe pas. Cependant un système d’analyse des fractures de l’extrémité inférieure du radius est disponible et validé.
Cette analyse, basée sur la classification « MEU » et sur le système « PAF », permet de comprendre les lésions et de choisir le meilleur traitement.
# 2016 Publié par Elsevier Masson SAS au nom de SFCM.

Mots clés : Anatomie ; Radius distal ; Fracture radius distal ; Classification ; MEU ; PAF ; AO

Abstract
None of the classification systems for distal radius fractures is ideal. However a validated system to analyze these fractures is available that is
based on the ‘‘metaphysis, epiphysis, ulna’’ (MEU) classification and the ‘‘patient, accident, fracture’’ (PAF) system. It makes it possible to
understand the injury and select the best treatment.
# 2016 Published by Elsevier Masson SAS on behalf of SFCM.

Keywords: Anatomy; Distal radius; Distal radius fracture; Classification; MEU; PAF; AO

1. L’énergie et la fracture plus fréquente était la forme articulaire et métaphysaire avec


déplacement dorsal [1]. Dans deux tiers des cas, il existait des
Il n’y a pas de fracture de l’extrémité distale du radius (EDR) lésions associées au niveau du complexe fibrocartilagineux
« typique », mais un spectre lésionnel, conséquence d’une triangulaire (avec ou sans avulsion du processus styloïde
hyperextension. Pechlaner et al. [1] ont rapporté les résultats ulnaire) ou des ligaments interosseux. Ce travail permet de
d’une étude cadavérique dans laquelle 63 avant-bras avaient été légitimer les travaux de Laulan et al. et la classification
sollicités en hyperextension sur machine. Selon la position de la métaphyse, épiphyse, ulna (MEU) (Fig. 1) [2]. Certaines
rangée proximale du carpe lors de l’impact, les pressions lésions particulières ont été identifiées et sont souvent décrites
appliquées sur la surface articulaire du radius généraient des comme des entités précises : la fracture avec « die-punch
fractures plutôt dorsales, centrales ou palmaires. Dans chacune fragment » (fragment postéro-médial) décrite par Scheck en
des trois localisations, les lésions avaient une gravité croissante 1962 [3], la fracture cunéenne externe [2].
avec des lésions métaphysaire pures, puis métaphyso-épiphy-
saires (refend articulaire) et enfin avec luxation. La forme la 2. La meilleure classification

Le grand nombre de classifications publié au fil du temps n’a


* Auteur correspondant. pas permis à l’une d’entre elle de s’imposer comme un outil
Adresse e-mail : lobert@chu-besancon.fr (L. Obert). pertinent de prise en charge. Les classifications sont intimement
http://dx.doi.org/10.1016/j.hansur.2016.02.012
2468-1229/# 2016 Publié par Elsevier Masson SAS au nom de SFCM.

Pour citer cet article : Obert L, et al. Fractures de l’extrémité distale du radius : quelle classification choisir ?. Hand Surg Rehab (2016), http://
dx.doi.org/10.1016/j.hansur.2016.02.012
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liées à une époque et un type de traitement. La classification aucun intérêt pronostique aux classifications de Castaing,
idéale doit répondre à trois objectifs : décrire la lésion, pour Frykman, Gartland, Older, Lindström et Jenkins [10]. La
choisir un traitement, et prévoir le devenir fonctionnel [4]. classification dite universelle proposée par Cooney [11] essaie
Malheureusement aucune des classifications ne remplit les de proposer une conduite thérapeutique, mais sa validité testée
trois conditions définies ci-dessus, la plupart ne prennent en récemment demeure mitigée [12]. Ainsi les classifications
compte que les lésions du radius, et sur le radius qu’un ou deux étudiées ne sont ni reproductibles ni pronostiques. Leur
critères qui varient d’un système à l’autre. Par ailleurs, les utilisation devient critiquable. Et plus qu’une classification,
reproductibilités intra-observateur et inter-observateur souvent un système de description des lésions doit s’imposer pour
médiocres expliquent les limites de ces classifications où comparer les fractures [2].
l’opérateur a toutes les peines du monde à faire rentrer la Celui de Laulan et al. est validé et permet de « ranger » dans
fracture dans une case. En utilisant des clichés de face et de tous les cas la fracture du radius. Cette classification décrit la
profil, la classification de l’AO était modérément reproductible fracture avec une reproductibilité intra-observateur et inter-
en inter-observateur et faiblement en intra-observateur [5], et observateur suffisante pour devenir un outil utile pour le
seule l’analyse des types A (extra-articulaire), B (intra- traitement et le pronostic fonctionnel. Elle consiste en la
articulaire partielle) et C (intra-articulaire complète) de l’AO description de trois paramètres permettant de savoir si la
était reproductible [6]. En utilisant un scanner pour compléter
l’analyse, la classification de l’AO perdait toute reproductibilité
inter-observateur [7]. De la même manière, les classifications
de Frykman, de Melone et de la Mayo Clinic se sont révélées
peu fiables, aussi bien en intra-observateur qu’en inter-
observateur [5,8,9]. Par ailleurs, plusieurs travaux ont montré
l’absence d’intérêt pronostique de ces classifications, prouvant
sans doute que les critères étudiés n’étaient pas les bons pour
décrire la fracture. À 5 ans de recul, les classifications de l’AO
et de Frykman ne permettaient pas de prédire l’évolution
clinique de 652 patients [7]. La classification d’Older, testée sur
633 patients, s’est également révélée insuffisante en termes de
pronostic [9]. L’étude de Lenoble n’avait également trouvé

Fig. 2. Classification MEU de Laulan et al. [2]. En haut : analyse de la de la


composante métaphysaire (présence d’une comminution et/ou l’impaction
cortico-spongieuse au niveau de la métaphyse) : M0 : trait métaphysaire
absent ; M1 : trait métaphysaire simple, sans comminution ; M2 : trait
métaphysaire déplacé avec comminution localisée. La comminution est
inférieure à hémi-circonférence (écaille postéro-externe) ; M3 : trait métaphy-
saire avec comminution d’au moins une hémi-circonférence (toute la corticale
postérieure avec respect de l’hémi-circonférence opposée [console antéro-
médiale autorisant une réduction]) ; M4 : trait métaphysaire avec comminution
circonférentielle. L’instabilité après réduction est multidirectionnelle. On
affecte au paramètre M l’indice « prime » si le trait métaphysaire aboutit,
de façon certaine, dans l’articulation radio-ulnaire distale. Au milieu : analyse
de la composante épiphysaire de la fracture (présence de traits articulaires avec
ou sans déplacement) : E0 : trait articulaire absent ; E1 : trait(s) articulaire(s),
non déplacé(s) ; E2 : fragment(s) articulaire(s) déplacé(s) par cisaillement. Il
n’existe pas de composante d’enfoncement sous-chondral. Le déplacement
n’intéresse qu’une partie de la surface articulaire avec un ou deux fragments
épiphysaires (fracture cunéenne externe, marginale antérieure simples, etc.) ;
E3 : fragment(s) articulaire(s) déplacé(s) par compression localisée. Il existe un
enfoncement sous-chondral localisé à une partie de la surface articulaire qui
peut concerner jusqu’à trois fragments ; E4 : fragments articulaires déplacés par
compression étendue. L’enfoncement sous-chondral concerne la quasi-totalité
de la surface articulaire avec un aspect d’éclatement. La petite taille des
fragments empêche leur réduction et ou leur fixation. En bas : analyse du trait
ulnaire (U ou C), en fonction de sa localisation et de son déplacement : C0 :
absence de trait de fracture ulnaire ; C1 : fracture non déplacée du processus
Fig. 1. Classification MEU de Laulan et al. [2]. Chaque fracture est caractérisée
styloïde ulnaire (distale ou proximale) ; C2 : fracture déplacée du processus
par trois composantes lésionnelles associées : une atteinte métaphysaire, une
styloïde ulnaire (distale ou proximale) ; C3 : fracture ulnaire métaphyso-
atteinte articulaire épiphysaire, une atteinte au niveau de l’articulation radio-
diaphysaire ( processus styloïde) ; C4 : fracture ulnaire métaphyso-épiphy-
ulnaire distale.
saire ( processus styloïde).

Pour citer cet article : Obert L, et al. Fractures de l’extrémité distale du radius : quelle classification choisir ?. Hand Surg Rehab (2016), http://
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Fig. 3. Système d’analyse proposé par Herzberg et al. [13] qui permet de stratifier les patients et de proposer le meilleur traitement en fonction des différents
paramètres fracturaires et des besoins estimés du patient.

Pour citer cet article : Obert L, et al. Fractures de l’extrémité distale du radius : quelle classification choisir ?. Hand Surg Rehab (2016), http://
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fracture est « grave » ou non, chaque paramètre ayant été validé lésions intra-articulaires ne signifient pas pouvoir ou devoir
comme lié au pronostic. L’atteinte de la métaphyse (comminu- les réparer toujours.
tion), de l’épiphyse (fracture articulaire) et de l’ulna est
différente dans chaque fracture, mais chaque cas de fracture est Déclaration de liens d’intérêts
une association de ces trois paramètres (Fig. 1 et 2) [2].
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
3. L’analyse de la fracture : le système patient, accident,
fracture (PAF) Références

La « méthode d’analyse » présentée pour la première fois à [1] Pechlaner S, Kathrein A, Gabl M, Lutz M, Angermann P, Zimmermann R,
et al. Distal radius fractures and concomitant lesions: experimental studies
la SoFCOT par Herzberg et Dumontier [3], puis modifiée et
concerning pathomechanism. Handchir Mikrochir Plast Chir 2002;34:
améliorée par Herzberg et al. [13], est un moyen simple de 150–7.
compréhension de la fracture de l’EDR, afin de recenser et donc [2] Laulan J, Bismuth JP, Clément P, Garaud P. Classification analytique des
de traiter l’ensemble des lésions sans en oublier (Fig. 3). Il fractures de l’extrémité distale du radius: la classification ‘‘MEU’’. Chir
s’agit d’une liste d’éléments essentiels dont l’anatomie doit être Main 2007;26:293–9.
restituée, car liée au pronostic fonctionnel. Il y a quatre [3] Scheck M. Long-term follow-up of treatment of comminuted fractures of
the distal end of the radius by transfixation with Kirschner wires and cast. J
paramètres spécifiques de l’EDR (l’inclinaison de la pente Bone Joint Surg Am 1962;44:337–51.
radiale de profil, l’inclinaison de la pente radiale de face, [4] Dumontier C, Herzberg G. Classifications du radius distal. Rev Chir
l’impaction articulaire et le raccourcissement du radius par Orthop Reparatrice Appar Mot 2001;87:S78–85.
tassement métaphysaire), ainsi que les lésions intra-carpiennes [5] Illarramendi A, González Della Valle A, Segal E, De Carli P, Maignon G,
et de la l’articulation radio-ulnaire distale (RUD) contempo- Gallucci G. Evaluation of simplified Frykman and AO classifications of
fractures of the distal radius. Assessment of interobserver and intraob-
raines du traumatisme. Les trois paramètres de la classification server agreement. Int Orthop 1998;22:111–5.
MEU en font finalement partie (Fig. 2). [6] Kreder HJ, Hanel DP, McKee M, Jupiter J, McGillivary G, Swiontkowski
Cette « check list » est renseignée grâce à un bilan MF. Consistency of AO fracture classification for the distal radius. J Bone
radiographique en urgence : il s’agit de radiographies de face, Joint Surg Br 1996;78:726–31.
[7] Flikkilä T, Nikkola-Sihto A, Kaarela O, Pääkkö E, Raatikainen T. Poor
de profil et de trois-quarts ; ces derniers permettent d’analyser
interobserver reliability of AO classification of fractures of the distal
la présence et l’importance d’un fragment postéro-médial. En radius. Additional computed tomography is of minor value. J Bone Joint
cas de fracture à haute énergie, un scanner permettra d’analyser Surg Br 1998;80:670–2.
l’ensemble des lésions articulaires radio-carpiennes et RUD. En [8] Andersen DJ, Blair WF, Steyers Jr CM, Adams BD, El-Khouri GY,
cours d’opérations, sous anesthésie, des clichés en traction Brandser EA. Classification of distal radius fractures: an analysis of
permettent une meilleure analyse (surtout de la comminution) interobserver reliability and intraobserver reproducibility. J Hand Surg
Am 1996;21:574–82.
et relativisent souvent le grand déplacement. Dans deux tiers [9] Dóczi J, Fröhlich P. Classification of distal radius fractures and its
des cas, ils apportent une information à l’opérateur qui diagnostic value. Unfallchirurg 1996;99:323–6.
modifiera son attitude [3]. [10] Lenoble E, Dumontier C, Goutallier D, Apoil A. Fractures du radius distal
Dans cette analyse, l’arthroscopie est un outil supplémen- avec déplacement postérieur : étude comparative de la valeur prédictive de
6 classifications. Rev Chir Orthop Reparatrice Appar Mot 1996;82:
taire permettant de compléter le bilan, de façon contemporaine
396–402.
à la fixation. Les lésions ligamentaires et les lésions ostéo- [11] Cooney WP. Fractures of the distal radius. A modern treatment-based
cartilagineuses seront parfaitement visualisées [14]. classification. Orthop Clin North Am 1993;24:211–6.
Concernant les lésions ligamentaires, leur grande fréquence [12] Jin WJ, Jiang LS, Shen L, Lu H, Cui YM, Zhou Q, et al. The interobserver
contraste avec le petit nombre de patients qui nécessitent and intraobserver reliability of the cooney classification of distal radius
secondairement une réparation ligamentaire [1,15]. Comme fractures between experienced orthopaedic surgeons. J Hand Surg Eur
2007;32:509–11.
l’ont montré Laulan et Bismuth au niveau des ligaments [13] Herzberg G, Izem Y, Al Saati M, Plotard F. ‘‘PAF’’ analysis of acute
interosseux (scapho-lunaire), lésion ligamentaire n’est pas distal radius fractures in adults. Preliminary results. Chir Main 2010;29:
synonyme d’incompétence de la structure et donc synonyme de 231–5.
réparation [16]. Dans une étude prospective radiographique [14] Cognet JM, Martinache X, Mathoulin C. Traitement des fractures arti-
sur un an, 43 % de lésions ligamentaires intra-carpiennes culaires du radius distal sous contrôle arthroscopique : technique opéra-
toire et choix thérapeutiques. Chir Main 2008;27:171–9.
dissociatives avaient été diagnostiquées, mais aucun retentis- [15] Fontès D. Traitement arthroscopique des lésions traumatiques récentes et
sement de ces lésions ligamentaires n’était mesuré sur le chroniques du complexe triangulaire du poignet. Chir Main
résultat fonctionnel à un an [16]. 2006;25(Suppl. 1)S78–86.
Concernant les lésions ostéo-cartilagineuses, dans les [16] Laulan J, Bismuth JP. Intracarpal ligamentous lesions associated with
fractures of the distal radius: outcome at one year. A prospective study of
fractures articulaires chez le patient à haute demande
95 cases. Acta Orthop Belg 1999;65:418–23.
fonctionnelle, l’arthroscopie demeure un outil moderne de [17] Barbary S, Pozetto M, Segret J, Delétang F, Dederichs A, Dap F, et al.
visualisation et de fixation optimale de fragments inaccessibles Fracture du radius distal. In: Fontaine C, Liverneaux P, Masmejean E,
sans cet outil [14,17]. Mais voir et mieux comprendre les editors. Cours européen de pathologie chirurgicale du membre supérieur.
Montpellier: Sauramps Médical; 2010. p. 435–53.

Pour citer cet article : Obert L, et al. Fractures de l’extrémité distale du radius : quelle classification choisir ?. Hand Surg Rehab (2016), http://
dx.doi.org/10.1016/j.hansur.2016.02.012

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