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RAPPORT DE RECHERCHE
Sous le thème de :
1
Introduction
Le rôle des lois de finances en matière de fonctionnement de l’État est d’une importance
extrême quoi qu’elles n’en demeurent des lois ordinaires. A ce titre, elles peuvent faire l’objet
d’un contrôle de constitutionnalité́ mis en œuvre par le conseil constitutionnel .
C’est un élément indispensable dans un État de droit Bien que certains pays dont
l’orientation démocratique ne fait aucun doute, tels que la Grande Bretagne, la Suisse, Pays
Bas, le Luxembourg, ne disposent pas d’une justice constitutionnelle, mais possèdent
cependant des moyens de régulation juridique qui leur sont propres ( G. Vedel, Démocratie
et justice constitutionnelle, C.E.R.P., Tunis, 1995, p. 24 ), on doit reconnaître qu’il est
difficile d’admettre l’existence d’une constitution et en même temps l’absence d’un organe
chargé de contrôler la conformité des lois à son contenu. De nos jours, l’institution est
devenue si universelle et si indissociable de l’Etat de droit qu’elle s’impose, selon
l’observation de D. Rousseau, La justice constitutionnelle en Europe, édit. Clefs,
Montchrestien, 1996, p. 9, comme « élément obligé de toutes les constitutions modernes au
même titre que l’institution des assemblées parlementaires, d’un gouvernement ou d’un chef
de l’État ».1
La constitutionnalité des lois de finances est examinée au regard du texte suprême qui est la
Constitution.
1
1 Le contrôle de la constitutionnalité des lois Regards sur dix années d’évolution (*.) Mohammed Amine BENABDALLAH Professeur à
l’Université Mohammed V Rabat-Souissi
2
L'histoire de la justice constitutionnelle au Maroc remonte aux premières années de
l'indépendance. C'est la Constitution de 1962 qui a instauré une Chambre constitutionnelle au
sein de la Cour suprême comme organe coiffant l'organisation judiciaire. Cette justice
connaitra une grande autonomie suite à la révision constitutionnelle de 1992 qui a amorcé la
création d'un Conseil constitutionnel en tant qu'institution indépendante avec des compétences
plus étendues qui s'inscrivent dans le cadre du plan de réforme initié par le Royaume du
Maroc au début des années quatre-vingt-dix. 3
Ce plan vise la consolidation de l'Etat de droit et la consécration des droits de l'Homme tels
qu'universellement reconnus. Durant vingt ans de son existence (1994-2017), le Conseil
constitutionnel a rendu 1043 décisions témoignant de la continuité de son fonctionnement et
de la confiance dont il jouit de la part des institutions, des instances politiques et des individus
en sa justice. En effet, dans le cadre de la révision constitutionnelle étendue et profonde
instituée par le Royaume en vertu de la Constitution promulguée le 29 juillet 2011 et qui
consiste particulièrement en l'élargissement des droits et libertés publiques, la consécration
des institutions et des mécanismes à même de parfaire l'édification d'un État démocratique
moderne ; une Cour constitutionnelle a été instaurée en remplacement du Conseil
constitutionnel avec de plus larges compétences et ouverte aux justiciables pour défendre
leurs droits et libertés qui leurs sont constitutionnellement garantis. 4
Compétences :
1- Contrôle de constitutionnalité
C'est la plus importante des prérogatives de la Cour constitutionnelle. Il s'agit d'un contrôle de
conformité à la Constitution des textes législatifs, des règlements intérieurs des deux
Chambres du Parlement et que de celle de certaines institutions constitutionnelles et des
engagements internationaux. Ce contrôle peut s'exercer à priori ou à postériori.
2
« Fallait pas faire du droit Le contrôle de constitutionnalité des lois de finances » (fiche thématique) Date de rédaction : 12/09/2021 date de
consultation décembre 2023
3
https://cdn.accf-francophonie.org/2019/03/maroc-presentation-generale.pdf
3
- Les lois organiques qui sont déférées devant la Cour Constitutionnelle après leur
approbation par le Parlement et avant qu'elles ne soient promulguées.
- Les lois: Elles peuvent être déférées avant leur entrée en vigueur par Sa Majesté le Roi, le
Chef du Gouvernement, le Président de la Chambre des Représentants, le Président de la
Chambre des Conseillers, ou par le cinquième des membres de la première Chambre ou
quarante membres de la deuxième. 4
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4
Comment alors le contrôle de la constitutionnalité des lois de finance peut-il être examiné à
travers ce corpus normatif ? et en quoi consiste le contrôles des principes budgétaires ?
Pour répondre à cette problématique, nous répartirons notre travail sur 5 axes, dans chacun
des axes développés nous essayerons de mettre en relief le degré du respect des principes
budgétaires.
PLAN
Introduction
Conclusion
5
Premier axe : La consécration du principe de l’annualité par la jurisprudence
constitutionnelle
Article 1 de la LOF : La loi de finances détermine, pour chaque année budgétaire, ... ».
-Il signifie tout d’abord que l’autorisation budgétaire donnée par la loi de finances n’est
valable que pour une année (annualité du vote). A l’expiration du délai d’autorisation, en
principe, il n’est plus possible de procéder à aucune dépense, même si tous les crédits n’ont
pas été consommés ;
-Il signifie ensuite que le gouvernement doit utiliser dans l’année les autorisations accordées.
Les autorisations budgétaires ne sont donc valables que pendant un an (annualité de
l’exécution).
6
D’après l’article 63 de la LOF « les crédits ouverts au budget général au titre d’une année
budgétaire donnée, ne peuvent être reportés sur l’année suivante... ». 5
Ce même article précise toutefois, que les crédits de paiement ouverts au titre des dépenses
d’investissement du budget général et les reliquats d’engagement, visés et non ordonnancés,
sont reportés, sauf dispositions contraires prévues par la loi de finances, dans la limite d’un
plafond de 30% des crédits de paiement ouverts au titre du budget d’investissement pour
chaque département ministériel ou institution au titre de l’année budgétaire.
Il est possible de voter, en cours d’année, des lois de finances rectificatives qui modifient la
loi de finances de l’année. De même, un engagement pluriannuel des dépenses
d’investissement est également possible.
Les lois de finances rectificatives sont définies par l’article 4 de la LOF qui prévoit que,
seules de telles lois peuvent, en cours d’année, modifier les dispositions de la loi de finances
de l’année. L’utilité des lois de finances rectificatives est alors d’intervenir
occasionnellement, pendant l’année budgétaire, pour corriger les évaluations de la loi de
finances de l’année et les adapter aux nécessités de la conjoncture.
Il faut toutefois remarquer que le recours à une loi de finances rectificative est très rare au
Maroc, elle reste une pratique exceptionnelle. Seules quelques lois de finances rectificatives
ont vu le jour, notamment celles anciennes de 1979, de 1983 et 1991.
L’année 2020 a connu le recours à une loi de finances rectificative, justifiée par la persistance
de la crise sanitaire liée à la Covid-19 et l’accentuation de son impact sur la conjoncture
économique et sociale. Cette situation s’est traduite par une révision des priorités qui ont
prévalu lors de l’adoption de la Loi de Finances pour l’année 2020.
5
REMSES http://revues.imist.ma/?journal=REMSES&page=index 195 ISSN : 2489-2068 Vol 4 – Numéro 3 (2019)
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- Dérogations pour une période > un an
L’article 18 de la LOF permet de déterminer le montant maximum des crédits qui peuvent être
engagés sur plusieurs années au titre d’opérations d’investissement.
Article 18 : « Les crédits relatifs aux dépenses d’investissement comprennent les crédits de
paiement et les crédits d’engagement qui constituent la limite supérieure des dépenses que les
ordonnateurs sont autorisés à engager pour l’exécution des investissements prévus. 6
• Les crédits de paiement augmentés, le cas échéant, des versements des SEGMA prévus à
l’article 22 de la LOF et des versements des CAS prévus à l’article 27 de la LOF, des fonds de
concours prévus à l’article 34 de la LOF et des crédits reportés prévus à l’article 63 de la
LOF, constituent la limite supérieure des dépenses susceptibles d’être ordonnancées dans le
cadre de l’année budgétaire.
• Les crédits d’engagement sont fixés notamment, sur la base de prévisions des plans et des
programmes prévus à l’article 17 de la LOF ; il s’agit des plans de développement
stratégiques et des programmes pluriannuels en vue de la préservation, la reconstitution ou
l’accroissement du patrimoine national.
L’article 63 de la LOF précise que « les crédits ouverts au budget général au titre d’une année
budgétaire donnée ne peuvent être reportés sur l’année suivante...». Cela signifie qu’en
principe, le report d’un crédit d’une année sur l’autre est interdit.
Cependant, ce même article prévoit que les « crédits de paiement ouverts au titre des dépenses
d’investissement du budget général et les reliquats d’engagement, visés et non ordonnancés,
sont reportés, (...) dans la limite d’un plafond de 30% des crédits de paiement ouverts... ».
- L’annulation de crédits
6
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L’annulation de crédit est une technique ancienne : la loi organique de 1998, art. 45
envisageait le recours à cette technique lorsque le crédit était devenu sans objet et également
lorsque la conjoncture économique et financière l’exige. L’article 62 de la LOF reprend les
dispositions de l’ancien article 45 : « Lorsque la conjoncture économique et financière
l’exige, le gouvernement peut, en cours d’année budgétaire, surseoir à l’exécution de certaines
dépenses d’investissement, les commissions parlementaires chargées des finances en sont
préalablement informées ».
« Les décrets portant ouverture de crédits supplémentaires prévus à l’article 60 de la LOF sont
pris sur proposition du ministre chargé des finances » (Art. 18 du décret du 15 juillet 2015 ). 7
La question du contrôle des lois de finances est également garantie par la Constitution. En plus
du parlement qui exerce son contrôle en vertu de l’article 76 qui dispose que « Le
gouvernement soumet annuellement au Parlement une loi de règlement de la loi de finances
», l’article 96 de la Constitution de 1996 dispose que « La Cour des comptes est chargée
d'assurer le contrôle supérieur de l'exécution des lois de finances ». La Constitution de 2011 a étendu
le champ d’application du contrôle à l’ensemble des finances publiques comme le prévoit l’article
147 : « La Cour des Comptes est l'institution supérieure de contrôle des finances publiques du
Royaume ». Cette évolution vient aussi d’être renforcée par les dispositions de l’article 148 qui
apporte davantage de précision : « La Cour des Comptes assiste le Parlement dans les
domaines de contrôle des finances publiques. Elle répond aux questions et consultations en
rapport avec les fonctions de législation, de contrôle et d'évaluation, exercées par le Parlement
et relatives aux finances publiques ».
L’on a consacré aussi le principe d’annualité qui figure dans l’article 68 « Le Parlement
7
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tient des réunions communes de ses deux Chambres, en particulier dans les cas suivants : - la
présentation du projet de loi de finances de 1'année » et l’article 76 « Le gouvernement
soumet annuellement au Parlement une loi de règlement de la loi de finances au cours du
deuxième exercice qui suit celui de l'exécution de ladite loi de finances. Cette loi inclut le
bilan des budgets d'investissement dont la durée est arrivée à échéance ».
Pourquoi un tel délai, alors qu’en France à titre de comparaison, cette loi intervient dans les six
mois suivant l’année d’exécution de la loi de finances ?
L’annualité comme principe des finances publiques est très ancien si on se réfère aux bases
juridiques de la Zakat. Dans le droit moderne, ce principe, prenant appui sur le rythme de la
vie sociale et économique de la société est déterminant pour une loi de finances. Depuis
l’indépendance, celle-ci doit porter sur une année qui court du 1er janvier au 31 décembre
jusqu’à la Constitution 1992. Avec la Constitution de 1996, l’année budgétaire court du 1er
juillet au 31 juin. Cette modification est intervenue à la suite du discours du Roi Hassan II du
20 août 1995 qui a demandé de remplacer la date du 31 décembre par la date du 30 juin. 8
Depuis le référendum du 15 septembre 1995, la date du vote d’une loi de finances est
déconstitutionnalisée ; et la détermination de l’année budgétaire énoncée par l’article 50 de la
Constitution de 1996 (l’article 75 de la Constitution de 2011) est laissée à une loi organique.
Mais, en vertu de l’article 6 de cette loi organique telle que modifiée et complétée le 18 avril
2000, l’année budgétaire correspond à l’année civile (1er janvier – 31 décembre). C’est dans ces
conditions que le parlement vote une autorisation budgétaire pour une année portant tant sur
8
La constitutionnalisation des finances publiques au Maroc Revista Eletrônica do Mestrado em Direito da UFAL. V. 6, N. 2
(2015). Constitucionalização dos direitos humanos fundamentais. ISSN 2237-2261 (versão eletrônica) 1809-1873 (versão impressa).
Submetido em 18/03/2015. Abdelouafi el Harchaoui
10
l’imposition que sur les dépenses.9
exonération à compter du 1er janvier 1996. La saisine avait été présentée le 27 décembre
2001 et le Conseil, prenant en considération le fait que la loi de finances devait entrer en
application le 1er janvier 2002, et sans qu’il n’y ait eu la moindre demande du Premier
ministre invoquant l’urgence et la réduction du délai à huit jours, rendit sa décision en un
temps record, quatre jours plus tard, soit le 31 décembre. Car, s’il avait pris, ne serait-ce
qu’un jour de plus, il aurait fallu un Conseil des ministres pour ouvrir, par décret, les crédits
nécessaires à la marche des services publics. 11
Le Conseil Constitutionnel est récemment venu illustrer cette notion d’annualité budgétaire.
En effet, la loi de finances pour 2019 dans son article 210 prévoyait une imposition pour 2019
9
La constitutionnalisation des finances publiques au Maroc Revista Eletrônica do Mestrado em Direito da UFAL. V. 6, N. 2
(2015). Constitucionalização dos direitos humanos fundamentais. ISSN 2237-2261 (versão eletrônica) 1809-1873 (versão impressa).
Submetido em 18/03/2015. Abdelouafi el Harchaoui
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Colloque sur : constitution de 2011 : Dix ans après approches croisées REVIREMENT DE LA JUSTICE
CONSTITUTIONNELLE, à l’épreuve des mutations des principes budgétaires Hassane EL ARAFI Professeur à l’université
Mohammed V- Rabat FSJES Agdal 17 Décembre 2021
11
C.C., 31 décembre 2001, loi de finances 2002, REMALD n° 43, 2002, p. 99, note Benabdallah ; A. El Kesri,
Le principe de non-rétroactivité des lois revisitée par le Conseil constitutionnel, REMALD n° 44- 45, p. 57.
11
mais également pour 2020. Le juge constitutionnel est donc venu déclarer non conforme à la
constitution cette disposition car elle ne respectait pas le principe de l’annualité budgétaire 12
La loi de finances pour 1980 a été censurée dans son intégralité pour un motif de procédure
tenant à l’exigence du vote de la première partie du texte avant la mise en discussion de la
seconde (art. 40 de l’ordonnance de 1959).
Le Conseil constitutionnel, saisi le 29 juillet 1960 par le Premier Ministre, conformément aux
dispositions de l'article 61 de la Constitution, du texte de la loi de finances rectificative pour
1960
1. Considérant que, d'une part, aux termes de l'article 34 de la Constitution, « les lois de
finances déterminent les ressources et les charges de l'État dans les conditions et sous les
réserves prévues par une loi organique » ; que, d'autre part, aux termes de l'article 4 de
l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, laquelle
constitue la loi organique visée par la disposition précitée de la Constitution, « les taxes
parafiscales perçues dans un intérêt économique ou social, au profit d'une personne morale de
droit public ou privé autre que l'État, les collectivités territoriales et leurs établissements
publics administratifs, sont établies par décret en Conseil d'État, pris sur le rapport du ministre
des Finances et du ministre intéressé. La perception de ces taxes au-delà du 31 décembre de
l'année de leur établissement doit être autorisée chaque année par une loi de finances » ; Qu'il
résulte de ces dispositions que la perception des taxes dont il s'agit ne fait l'objet que d'une
autorisation annuelle du Parlement, à l'occasion de laquelle celui-ci exerce son contrôle sur la
gestion financière antérieure de la personne morale considérée ; que cette autorisation ne
saurait être renouvelée en cours d'exercice sans qu'il soit porté atteinte au principe ainsi posé
de l'annualité du contrôle parlementaire et aux prérogatives que le gouvernement dent des
dispositions précitées pour l'établissement desdites taxes, ce, même au cas où le pouvoir
réglementaire établit ces taxes à un nouveau taux ;13
13
https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2001/2001448DC.htm
12
commercial, doté d'un budget autonome » ; qu'en application des articles 3 et 9 de la même
ordonnance elle reçoit une « redevance pour droit d'usage » dont le produit constitue
l'essentiel des ressources lui permettant de faire face à l'ensemble de ses charges d'exploitation
et d'équipement ; Que cette redevance qui, en raison tant de l'affectation qui lui est donnée
que du statut même de l'établissement en cause, ne saurait être assimilée à un impôt, et qui, eu
égard aux conditions selon lesquelles elle est établie et aux modalités prévues pour son
contrôle et son recouvrement, ne peut davantage être définie comme une rémunération pour
services rendus, a le caractère d'une taxe parafiscale de la nature de celles visées à l'article 4
de l'ordonnance organique précitée du 2 janvier 1959 ;
13
5. Considérant qu'en l'espèce, il n'y a lieu pour le Conseil constitutionnel de soulever aucune
question de conformité à la Constitution en ce qui concerne les autres dispositions de la loi
dont il est saisi par le Premier ministre aux fins d'examen de ses articles 17 et 18 ;
Décide : Les articles 17 et 18 de la loi de finances rectificative pour 1960 sont déclarés non
conformes à la Constitution. 14
Premièrement, ce principe impose que toutes les recettes et dépenses de l’Etat soient inscrites
dans un seul document appelé budget, qui est la loi de finances de l’année.. Deuxièmement,
donner lieu à une bonne discussion et vote en connaissance de l’ensemble du budget par la
conseil régional et permettre un bon contrôle aux élus du budget.
14
https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2001/2001448DC.htm
14
Selon l’article 1 de la loi organique de la loi de finances: «La loi de finances détermine,
pour chaque année budgétaire, la nature, le montant et l’affectation de l’ensemble des
ressources et des charges de l’Etat….»15.
L’art 8 de la LOLF 130-13 de l’année 2015, le deuxième alinéa : «Toutes les recettes et
toutes les dépenses sont imputées au budget général…»16.
Le principe d’unité budgétaire doit valider deux conditions complémentaires qui sont la
justification politique et celle technique.
Sur le plan formel, cela explique que toutes les opérations budgétaires sont regroupées dans
un seul document. Cette approche présente deux avantages : elle prévient la fragmentation des
documents budgétaires et renforce l'efficacité du contrôle parlementaire et d’un point de vue
matériel, la règle de l'unité stipule que l'intégralité des opérations financières de l'État est
consignée dans le projet de loi de finances présenté au Parlement, prévenant ainsi la
dissimulation d'un déficit17.
Le principe d’unité budgétaire a porté des aménagements et des dérogations dans certaines
opérations exceptionnelles exécutées par l’Etat, que nous allons discutés dans la partie
suivante.
En pratique, la règle de l'unité connaît des exceptions prévues par la LOLF 130-13. Toutes les
recettes et dépenses ne sont pas automatiquement incluses dans le budget général. Bien que
l'ensemble des recettes et des dépenses de l'État soit intégré dans la loi de finances, elles ne
sont pas regroupées dans un compte unique, mais sont plutôt réparties en trois catégories de
comptes : le budget général de l’Etat, les comptes spéciaux du trésor et les services de l’Etat
gérés de manière autonomes.
15
L’article 1 de la LOLF 130-13 du 02 juin 2015
16
L’article 8 de la LOLF 130-13 du 02 juin 2015.
17
Ouafaa khallouk la modernisation des principes budgétaires 2019.
15
D’où la naissance du phénomène de la débudgétisation que nous pouvons définir comme une
pratique qui consiste à établir de nouvelles entités juridiques dotées de la personnalité morale
qui ont 'un budget autonome distinct de celui discuté précédemment, est fréquemment
critiquée car elle offre la possibilité d'éviter les contraintes du droit budgétaire. La LOLF 130-
13, cherche à contrecarrer cette pratique en permettant au Parlement d'être informé de tous les
domaines échappant à son contrôle.
Dans ce cas, nous pouvons citer le cas de la décision portée sur la loi de finance de l’année
200218.
En projet de loi de finances de l’année 2002, 97 membres de la chambre des représentants ont
demandé le contrôle de la constitutionnalité de certaines décisions dont le principe de l’unité.
L’article 15 de la loi de finance de l’année 2002 qui permet de distribuer des recettes de
privatisation hors le budget de l’Etat ainsi que ce qui touche le principe de l’unité cité en
article 1 et 8 de la LOF 07-98. Cette disposition qui a été une loi qui complète un décret
institué par le gouvernement sans qu’il le dépose au parlement pour vote. Cela a entraîné une
mauvaise interprétation des membres de la chambre des représentants pour le juger
inconstitutionnel et doit être contrôlé par la cour constitutionnelle.
Ensuite, explorons la situation de la France pour analyser la décision prise par le juge
constitutionnel face à un exemple concret de la débudgétisation, en se basant sur un cas réel
traité de la loi de finance de l’année 2015.
18
Décision 2001/467 de la Cour Constitutionnelle (loi de finances 2002).
16
2-Le contrôle de la constitutionnalité de la loi de finance par le conseil constitutionnel
Français:
Le principe d’unité budgétaire respecte les mêmes règles qu’au Maroc, il impose d’une part,
que toutes les dépenses et toutes les recettes soient inscrites dans le budget et d’autre part, que
ce budget figure dans un seul document sauf exception des budgets annexes créés par les
locales qui ont le pouvoir de le faire en cas besoin et qui est un cas proche de celui de Maroc
cité précédemment:
-Les comptes spéciaux qui sont aussi institués par une loi de finances sont au nombre de
quatres: Le compte d’affectation spéciale, le compte de commerce, le compte d’opération
monétaire et le compte de concours financiers19.
Ces derniers n’ont qu’une portée limitée car ils ne sont produits qu’en quelques secteurs, à
titre d’exemple: celui du contrôle aérien et les services administratives..’’ Comme cité
précédemment, ce principe d’unité budgétaire a pour but une bonne supervision et contrôle de
la loi de finances car si un seul budget englobe toutes les recettes et dépenses de l’Etat il sera
difficile de frauder ou de polluer la loi de finances.
-L’article 18 de la LOLF explique que : “ Des budgets annexes peuvent retracer, dans les
conditions prévues par une loi de finances, les seules opérations des services de l'Etat non
dotés de la personnalité morale résultant de leur activité de production de biens ou de
prestation de services donnant lieu au paiement de redevances,lorsqu'elles sont effectuées à
titre principal par lesdits services. La création d'un budget annexe et l'affectation d'une recette
à un budget annexe ne peuvent résulter que d'une disposition de loi de finances.”
C’est le fait de donner une partie de budget à un autre organisme pour équilibrer son budget.
Ce dernier donne un budget qui n’est pas vrai au parlement ce qui engendre des problèmes de
19
Article 19 de la LOLF.
17
gestion et de contrôle. C’est pour cela que le juge constitutionnel a jugé inconstitutionnel de
faire sortir des dépenses de l’Etat à d’autres dépenses.
En 1994, le juge constitutionnel est venu freiner le phénomène de débudgétisation que nous
allons voir dans une deuxième partie d’inconstitutionnalité20.
La requête du sénat concernant les dispositions de l’article 136, indique, entre autres, que «
Cet article a pour objet d'instituer une taxe d'aéroport se substituant à des redevances
aéroportuaires, dont les arrêtés fixant les taux ont été annulés par le Conseil d'Etat puis validés
par le législateur. Toutefois, les observations présentées par le Sénat (rapports n° 44 du 29
octobre 1998, Avis sur le projet de loi relatif à l'organisation de certains services au transport
aérien, et n° 66 du 19 novembre 1998, loi de finances, Transports aériens et météorologie et
aviation civile) n'ont pas été prises en compte.
Concluant ainsi que ledit article est donc inconstitutionnel pour les motifs ci-après :
Le produit de cette taxe ne sera pas évalué en loi de finances, non plus que les charges qu'elle
financera, alors que la jurisprudence du Conseil d'Etat précitée établit qu'elles correspondent «
à des missions d'intérêt général qui incombent par nature à l'Etat ». Il s'agit donc d'une forme
de débudgétisation déjà censurée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 29
décembre 1994, s'agissant de dépenses présentant pour l'Etat « par nature un caractère
permanent ».
Ainsi, cela n’est pas conforme aux dispositions de l’article 34 de la constitution qui dispose
que « les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'Etat ».
D’autre part, cette taxe qui revêt un caractère d’imposition de toute nature et pas à caractère
parafiscal, ne peut être perçue au profit de personnes privées et est contraire aux principes de
la république.
D’un autre angle cet article contrevient à la déclaration des droits de l’homme (article XIV) en
mettant à la charge des seuls clients des sociétés de transport aérien, des charges incombant à
20
Le contrôle constitutionnel de la loi de finances, article HAL OPEN SCIENCE.
18
l’état et profitant à toute la population, comme cela le principe de l’égalité devant l’impôt se
trouve bafoué.
Enfin, l’article 34 de la Constitution qui dispose que « les lois de finances déterminent les
ressources et les charges de l'Etat » n’est pas respecté par les dispositions de l’article 136.
Article 51
Cet article, créant une taxe de l'aviation civile, doit être censuré pour les mêmes motifs que
l'article 136 précédemment exposé.
Ces griefs n’ont pas été retenus par le conseil puisque ces recettes et dépenses seront, entre
autres, consignées dans un compte spécial.
Dans ce cas, le juge constitutionnel a jugé par une inconstitutionnalité partielle de ces articles.
Considérant que cet article prévoit, d'une part, que sont considérées comme services de l'État
gérés de manière autonome ne jouissant pas de la personnalité juridique qui couvrent à l’aide
des ressources privées certaines de leurs dépenses qui ne sont pas déduites des crédits affectés
au budget général de l’Etat et il stipule, en revanche, que ces établissements disposent de
budgets indépendants.
19
Alors que l'article 10 a prévu des budgets indépendants pour les services de l’Etat gérés de
manière autonome susmentionnées en dehors de la loi de finances, il a soustrait l'un des
éléments de cette loi à la compétence du Parlement et, par conséquent, a violé ce qui était
stipulé au premier alinéa du chapitre 50 de la Constitution.
-Que les articles 5 et 10 de loi organique de finance 07-98 et la phrase « le Gouvernement est
autorisé à le faire en application de la loi de finances pour l'année » contenues dans l’article
43 de la loi de finance de l’année ne sont pas conformes à la Constitution et par la suite
approuvé que cette loi de finance est constitutionnel après l’annulation de la phrase citée
précédemment dans l’article 43 de ladite loi.
SUR L'ARTICLE 22 :
« 27. Considérant que cet article a notamment pour objet de créer à l'article 302 bis Z-B du
code général des impôts, une taxe due par les concessionnaires d'autoroutes ; qu'il prévoit que
« les conséquences de cette taxe sur l'équilibre financier des sociétés concessionnaires sont
prises en compte par un décret en Conseil d'État qui fixe la durée des concessions
autoroutières » ; que cette dernière disposition n'a par elle-même aucune portée relative aux
charges ou aux ressources de l'État ou à l'assiette, au taux et aux modalités de recouvrement
des « impositions de toutes natures » ; qu'ainsi, elle est étrangère à l'objet des lois de
finances ; »
Le conseil constitutionnel a décidé dans son article 1er qu’ils sont contraires à la constitution :
20
L'article 22 de la loi déférée, dans l'article 302 bis Z-B du code général des impôts, la
phrase : « Les conséquences de cette taxe sur l'équilibre financier des sociétés
concessionnaires sont prises en compte par un décret en Conseil d'Etat qui fixe la durée
des concessions autoroutières ».
-Par la suite nous constatons que le juge constitutionnel marocain juge que la loi de
finance est constitutionnelle plusieurs fois que le juge constitutionnel français en cas du
respect du principe d’unité.
21
القول بذهبية هذه القاعدة مرده لعراقتها ولتكريسها كقاعدة ملزمة عبر القاعدة الوضعيةtraduit en francais
21
I. Le contenu du principe d’équilibre ou “la règle d’or”22 :
La règle d’équilibre ou “règle d’or” est un principe ancien de la finance publique
traditionnelle, qui avait des fonctions limitées dans les domaines tels que l’armée, la police, la
justice, la diplomatie et la monnaie. Au fil du temps, ce principe a évolué pour s’adapter au
rôle croissant de l’État, passant d’une approche initiale axée sur l’intervention économique à
une phase ultérieure axée sur le bien-être social et la protection. Cependant, l’équilibre
financier a retrouvé sa place au sommet de la hiérarchie juridique, notamment dans la
Constitution, malgré les nouveaux défis qu’il peut parfois être difficile de surmonter.
Le défi fondamental à relever est la valeur accordée aux règles de finances publiques.
L’inclusion de ces règles et principes dans la Constitution ne suffit pas en soi à leur conférer
une existence réelle et effective. D’autres conditions doivent être remplies.
Il ne fait aucun doute que l’une des principales difficultés liées à l’équilibre est la
question de la définition du déficit budgétaire, qui prend différentes appellations. Ces
appellations ont évolué au fil du temps pour désigner le fardeau des ressources, comme le
concept de “La situation d'attente” (“impasse”) apparu en 1952 pour mettre en évidence
l'importance des charges financées par le Trésor. La situation d'attente reposait sur
l’hypothèse que l’État acceptait les charges temporaires en pariant sur sa capacité à
22
La règle d'or : un concept à construire, par Michel Bouvier ‘LES COMMISSIONS DES FINANCES’ (lien
hypertexte)
22
rembourser les dettes à long terme grâce au doublement du revenu national. Cette idée est
plus politique que technique.
Le déficit réel ne peut être estimé et évalué qu’après l’exécution du budget, c’est-à-
dire après la collecte des recettes fiscales réelles et la comptabilisation de celles-ci, ainsi
qu’après la réalisation effective des dépenses. Sans oublier la nécessité de prendre en compte
les prévisions initiales.
C’est pourquoi l’introduction de la règle d’or dans la Constitution est un signal fort et
une mesure légale motivée par des raisons économiques et sociales, répondant à des besoins
structurels symboliquement forts car elle repose sur une gestion politique.
23
Jurisprudence constitutionnelle de la République fédérale d'Allemagne (2007) (lien hypertexte)
24
Article 20 de la LOF
23
Voici les principales observations à retenir lors de la lecture de ces dispositions :
Enfin, il convient de noter que même si le remboursement ne doit pas dépasser les
dépenses d’investissement, cela ne théoriquement pas empêcher ces emprunts de couvrir les
besoins de financement des dépenses d’investissement. Si le budget réalise un solde ordinaire
positif, ce qui est souhaitable et constitue l’un des principaux indicateurs de santé financière,
l’équilibre doit se tenir en compte dans la fixation des hypothèses.
Ce rejet a été motivé par le fait que l’intérêt général se doit de préserver l’équilibre
financier, et la meilleure façon de le réaliser est que le gouvernement se doit à tout prix, d’une
part d’éviter de proposer des lois ou des amendements pouvant affecter le principe
27
Article 36 de la LOF
28
Décision de Conseil constitutionnel n° 250-98
25
d’équilibre, et d’autre part se conformer à l’article 51 de la Constitution 29. De plus, au lieu de
tenter de préserver l’équilibre financier, l’article 5 de la LOF 7-98 va à l’encontre d’un texte
juridique proposé par le parlement, entré en vigueur par ordre Royal et publié dans le
bulletin officiel. Cet article est donc considéré contraire aux prescriptions de l’article 4 de la
constitution qui manifeste la volonté de la nation et que tous sont tenus de s’y soumettre.
Cependant, le conseil constitutionnel n’a pas émis que des rejets aux décisions pouvant
affecter l’équilibre budgétaire, il est arrivé qu’il approuve des exceptions à la règle de non
dépassement des crédits ouverts au titre de la loi de finances, en l’occurrence celles instituées
par l’article 41 de la LOF 7-98 qui stipule « … peuvent s’imputer au-delà de la dotation
inscrite aux rubriques qui les concernent : -les dépenses se rapportant à la dette publique ; -
les dépenses se rapportant à la rémunération des personnels dont les effectifs sont fixés dans
la loi de finances. »
En effet, bien que cette disposition puisse affecter l’équilibre budgétaire, elle a
néanmoins fait l’objet d’une approbation du Conseil constitutionnel, dans la mesure où ce
types de dépenses revêtent un aspect organisationnel, et concernent les engagements de l’Etat
en terme de dette, ainsi que l’obligation de la continuité du service public, et revêtent par
conséquent une valeur constitutionnelle33.
29
Constitution de 1996 en vigueur au moment de la proposition, l’adoption et l’entrée en vigueur de la loi
organique des finances 7-98.
30
Suite à la décision du conseil constitutionnel, cette loi n’a pas été publiée dans le bulletin officiel.
31
Dans la mesure cette loi n’a pas fait objet de vote institué par l’article 50 de la constitution de 1996 (décision
480 du CCM du 15/08/2002).
32
Décisions du CCM : N° 386 du 30/03/2000, N° 467 du 31/12/2001 et N° 950 du 23/12/2014.
33
Décision du CCM N° 250 du 24/10/1998.
26
En somme, et d’après ce qui précède, il est évident que le Conseil Constitutionnel
Marocain est très soucieux de l’équilibre budgétaire et financier de l’Etat, et l’a affirmé à
l’occasion de plusieurs décision émises généralement pour annuler des lois pouvant affecter
ce principe, mais aussi dans quelques cas pour approuver des exceptions pour la dette
viagère ainsi que la continuité de service public 34. Ce principe fût élevé au rang de principe
constitutionnel à l’occasion de la réforme de la constitution en 2011.
Ce principe n’est pas défendu que par les institutions constitutionnelles de Royaume
du Maroc, il a aussi été abordé au sein de plusieurs de décision émanant du Conseil
Constitutionnel de la république Française.
34
Les dépenses se rapportant à la rémunération des personnels dont les effectifs sont fixés dans la loi de finances
35
Ordonnance n°59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances
36
Décision n°79-110 DC du 24 décembre 1979
27
En addition, il apparaît également que les principes d’équilibre et de sincérité
budgétaire vont de pair et répondent à la même logique de bonne gestion. Il apparaît
généralement que la volonté de modifier le budget de manière non objective et sans
évaluation sincère des dépenses et recettes de l'État est motivée par le fait de vouloir
respecter artificiellement l’équilibre budgétaire. D’autre part, le Conseil Constitutionnel
fait aussi ce constat. En effet, il a rédigé une décision du 25 juillet 200137, qui considère
que “la sincérité se caractérise par l'absence d'intention de fausser les grandes lignes de
l'équilibre déterminé par la loi de finances”. Il en ressort que ces deux principes sont très
complémentaires et se révèlent essentiels dans les procédures d’une gestion optimale et
efficiente du contribuable.
Nonobstant, la doctrine n’a que trop peu critiqué cette rédaction. En effet, dans la
Constitution39 de Guy Carcassonne par exemple, il apparait un constat plus que mitigé.
Selon lui cette volonté de constitutionnaliser cette notion d’équilibre n’est pas
suffisante. Dans cet ouvrage, il défend la thèse selon laquelle cet équilibre financier ne
serait véritablement efficace que si l’on inscrivait dans la Constitution comme une
“règle d’or budgétaire”. Cette idée de donner une valeur constitutionnelle à une telle règle
d’or n’est pas isolée. On retrouve cette règle d’or budgétaire outre-Atlantique avec le
« Balanced Budget Amendement ». Le Président américain Ronald Reagan fait le même
37
Décision n°2001-448 DC du 25 juillet 2001
38
Loi constitutionnelle du 23 juillet 2008
39
19 Guy Carcassonne et Marc Guillaume, La Constitution, éditions Points, 2014,
28
constat que Guy Carcassonne. Ainsi, dans une intervention télévisée40 le Président
Américain tient le discours suivant : “ seul un amendement à la Constitution fera le
boulot. On a essayé la carotte, mais ça n’a pas marché. Avec le bâton du Balanced
Budget Amendment on pourra empêcher l’administration de gaspiller notre argent et
nous surtaxer et sauver notre économie”.
Enfin, force est de constater que le Conseil Constitutionnel joue un rôle essentiel et
prépondérant en matière budgétaire. Il est vrai que la jurisprudence constitutionnelle est
gardienne des principes budgétaires qui sont des fois le produit du conseil constitutionnel
lui-même, en l’occurrence l’équilibre budgétaire et financier, mais ce principe ainsi que
celui de l’annualité ne sont pas les seuls à être consacrés par le conseil constitutionnel. Il en
est de même pour le principe de l’universalité.
Le principe d'universalité fonde la notion de budget : il faut que le budget soit suffisamment
analytique pour que la présentation soit claire. L'universalité vise à séparer de façon rigide les
dépenses et les recettes. En effet. La séparation des pouvoirs décidée par les révolutionnaires
avait pour conséquence d'attribuer au Parlement le pouvoir de fixer les recettes alors que le
gouvernement se contentait de répartir les dépenses, d'où une différence de statut juridique
entre les recettes et les dépenses. Pour saisir la portée de l'universalité budgétaire, il faut
présenter successivement la règle de non-affectation des recettes aux dépenses, puis la règle
de non-contraction des recettes et des dépenses.41
40
Intervention télévisée du Président Reagan du 29 août 1982
41
https://www.carrieres-publiques.com/actualite-fonction-publique-les-principes-budgetaires-iii-l-universalite
29
Le principe d’universalité signifie que l’ensemble des recettes du budget couvre l’ensemble
des dépenses. En d’autres termes, les recettes du budget représentent une masse commune qui
sert à financer indistinctement toutes les dépenses.42
Le principe de l’universalité budgétaire vise à l’information complète du Parlement. Il a
deux significations : interdire la contraction de certaines recettes ou de certaines dépenses, ou
bien leur compensation, pour permettre au Parlement de connaître en détail toutes les
opérations financières prévues par le budget, interdire l’affectation de certaines recettes à la
couverture de certaines dépenses.43
Alors le principe d’universalité implique tant la non-affectation que la non-contraction des
recettes aux dépenses telles que prévues par l’article 8 de la LOLF : « Il est fait recette du
montant intégral des produits, sans contraction entre les recettes et les dépenses,…telles que
prévues à l'article 34 (de ladite LOLF) ». 44 Il est fait ici exception de certaines catégories :
budgets de services de l’Etat gérés de manière autonome ; les comptes spéciaux du Trésor ou
de procédure comptables particulières énoncées à l’article 34 de la LOLF, tout en s’inscrivant
dans le cadre du budget.
Selon le Règlement financier n° 1605/2002, le principe d’universalité implique deux règles
budgétaires importantes (article 17 du règlement financier n° 1605/2002). La première veut
que les recettes budgétaires ne doivent pas être affectées à des dépenses précises, c’est la règle
de non-affectation. La seconde prévoit qu’il ne peut y avoir de contraction entre recettes et
dépenses : les ressources et les dépenses doivent être inscrites pour leur montant brut, intégral,
sans qu'il y ait compensation entre dépenses et recettes. C’est la règle de non-contraction. 45
La règle de non-affectation, déjà consacrée par la décision du 21 avril 1970 (article 5)
créant les ressources propres, tolère toutefois des exceptions comme c’est le cas des
contributions financières des États membres destinées à financer certains programmes de
recherche ou des participations de pays candidats à l’adhésion affectées à certains
programmes communautaires (cf. article 18 du règlement financier n° 1605/2002). En
outre, le budget opérationnel CECA (La Communauté européenne du charbon et de l'acier
était une organisation internationale fondée sur le traité de Paris (1951) — disparu depuis
42
Les principes budgétaires Source : CVCE. European NAvigator. Laurence Maufort.
URL:http://www.cvce.eu/obj/les_principes_budgetaires-fr-3f6aa90a-486a-40c7- 9a50-76ea3decdabb.html
43
Le droit public André Legrand Céline Wiener Édition 2017 p .164
44
Dahir n° 1-15-62- du 14 chaabane 1436(2 juin 2015) portant promulgation de la loi organique n° 130-13 relative à la loi de finance.
Article 8
45
Règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil du 25 juin 2002 portant règlement financier applicable au budget général
Communautés européennes
30
l’expiration du traité CECA) -était dès l’origine caractérisé par l’existence d’une affectation
des prélèvements aux dépenses.
La règle de non-contraction admet aussi quelques exceptions mais elles sont principalement
d’ordre technique et visent à alléger les procédures (article 20 du règlement financier n°
1605/2002).46
La règle de la non-compensation
Nomme également règle du produit brut ou règle de la non-contraction, selon cette règle les
dépenses et les recettes doivent être inscrites dans la loi de finances pour leur montant
intégral. Il est impossible de ne faire apparaître qu’un solde résultant d’une soustraction entre
ressources et dépenses. Cette règle engendre deux conséquences :
Elle impose d’une part, un certain mode de présentation du budget. C’est la
méthode du produit brut qui fait obstacle à l’inscription d’un produit net, c’est-
à-dire d’un solde après contraction des dépenses et recettes ;
Elle impose d’autre part, des exigences quant à l’exécution du budget. Les
services administratifs ne peuvent se procurer par eux-mêmes des ressources en
dehors de crédits qui leur sont alloués.47
Les ressources et les dépenses doivent être inscrites pour leur montant brut, intégral,
sans qu'il y ait compensation entre dépenses et recettes.
La règle de non-contraction interdit la compensation des dépenses et des recettes. Il n’est pas
possible de soustraire certaines dépenses de certaines recettes, et de soustraire des recettes de
certaines. Il existe des dérogations applicables, par exemple, à certains comptes spéciaux. La
compensation des ressources et des dépenses permettrait en effet de dissimuler certaines
charges, ce qui nuirait à la lisibilité et à la sincérité du budget48.
La règle de la non-affectation
Cette règle signifie qu’une recette ne peut être affectée au financement d’une dépense
particulière. Toutes les recettes sont indistinctement affectées à la couverture des dépenses.
Ce qu’énonce l’article 8 de la LOF : « … l’ensemble des recettes assurant l’exécution de
l’ensemble des dépenses. Toutes les recettes et toutes les dépenses sont imputées au budget
général… ». Autrement dit, cette règle exige qu’à l’intérieur du budget, recettes et dépenses
46
Les principes budgétaires Source : CVCE. European NAvigator. Laurence Maufort.
URL:http://www.cvce.eu/obj/les_principes_budgetaires-fr-3f6aa90a-486a-40c7- 9a50-76ea3decdabb.html
47
LA MODERNISATION DES PRINCIPES BUDGETAIRES Professeur chercheur Ouafaa khallouk Revue des Etudes Multidisciplinaires
en Sciences Economiques et Sociales
48
Thèse université de Reims champagne-ardenne école doctorale sciences de l’homme et de la société (555) présentée et soutenue
publiquement par Cyril Laurent le 20 janvier 2017p .307
31
forment deux grandes masses financières autonomes, sans qu’il soit permis d’affecter une
ressource spécifique à une dépense spécifique.49
L’ensemble des recettes doit couvrir l’ensemble des dépenses Interdiction des
affectations Les recettes budgétaires ne doivent pas être affectées à des
dépenses précises.
Importance significative de la règle de non-affectation
Le principe d’universalité répond au double souci d’assurer la clarté des comptes de l’état
et de permettre un contrôle efficace de parlement, ce principe prend la forme de deux règles :
la règle de non-contraction et la réglé de non-affectation.
Or, en dépit des avantages que peut apporter le principe à la gestion des finances de l’État, sur
les plans technique et politique, son inflexibilité n’est que relative au regard de la pratique
budgétaire, qui admet l’existence de contraction et d’affectation.
49
LA MODERNISATION DES PRINCIPES BUDGETAIRES Professeur chercheur Ouafaa khallouk Revue des Etudes Multidisciplinaires
en Sciences Economiques et Sociales
50
(90-283 DC, 08 janvier 1991, cons. 45, Journal officiel du 10 janvier 1991, page 524) Décision n° 90-283 DC du 8 janvier 1991 | Conseil
constitutionnel (conseil-constitutionnel.fr)
32
A. La portée du principe d’universalité
Le principe de l’universalité est porteur de certains avantages aussi bien sur le plan
technique que sur le plan politique.
L’ensemble des opérations financières de l’État doit faire l’objet d’une inscription
budgétaire. Il est défendu de faire des contractions, compensations, entre dépenses et recettes
de façon à ne faire ressortir que le solde net de l’opération. Elle se traduit comptablement par
la règle de « produit brut », en ce sens que les opérations et les informations doivent être
inscrites dans les comptes sous la bonne rubrique, avec la bonne dénomination et sans
compensation entre elles. Alors toute recette et toute dépense auxquelles la loi de finances
donne lieu doivent paraître pour leur montant entier et non plus leur montant net.51
De ce fait, doivent s’inscrire dans la loi de finances toutes les recettes, même si elles
viennent en déduction d’une dépense. Egalement, toutes les dépenses, mêmes si elles sont
occasionnées par la perception d’une recette. Ce qui prévu à l’article 8 de loi organique des
finances : « Il est fait recette du montant intégral des produits,…l’ensemble des dépenses ».52
L’intérêt de la non-affectation est de mettre toutes les dépenses au même niveau, c’est tout à
fait incontestable, dans la mesure où toutes les dépenses de l’Etat poursuivent en soi des
missions d’intérêt général.53
51
Hassane EL ARAFI. GESTION DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ETAT Budget-Comptabilité-Trésor – 1ere Edition -1er trimestre
2006 P.105
52
Dahir n° 1-15-62- du 14 chaabane 1436(2 juin 2015) portant promulgation de la loi organique n° 130-13 relative à la loi de finance. Article
8
53
Hassane EL ARAFI. GESTION DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ETAT Budget-Comptabilité-Trésor – 1ere Edition -1er trimestre
2006 P.105
33
Un budget devra être « universel et facilite la mesure des conséquences économiques de
l’action du Gouvernement, la maîtrise des ressources financières de l’État, le contrôle de
l’action des décideurs et des gestionnaires du secteur public et une utilisation efficace des
deniers publics. Aussi, la vénération du principe traduit-elle une volonté de connaître avec
exactitude le montant des dépenses. Autrement dit, la non- contraction, aux yeux des
représentants de la nation, présente l’avantage de permettre une appréciation exacte du
volume général du budget, de donner son vrai sens à l’autorisation budgétaire du Parlement et
d’empêcher la constitution de « caisses noires » sous formes de fonds spéciaux, opérations
extrabudgétaires, etc...
Dans le même ordre d’idées, la consécration de ce principe sous-tend une volonté politique
de connaître avec certitude le montant des dépenses. Si l’affectation des recettes était possible,
la réalisation de chaque dépense dépendrait de la réalisation de chaque recette on rendrait
pratiquement hypothétique l’exécution du budget. Il en ressort ainsi que le principe
d’universalité budgétaire s’accorde étroitement sur le plan politique à celui d’unité et
d’exhaustivité.54
54
Hassane EL ARAFI. GESTION DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ETAT Budget-Comptabilité-Trésor – 1ere Edition -1er trimestre
2006 P. 107
34
On a reproché (en 1876) au ministre français de la Marine d’avoir remis le bronze de
vieux canons comme souscription pour l’érection de la statue de son prédécesseur, M.
de Chasseloup-Laubat. Plutôt que de fondre ces Canons pour ériger la statue, il eût été
plus ferme, au regard du principe de la non contraction, de vendre les canons,
d’inscrire le produit de cette vente au budget, et de financer la souscription de la
statue par des crédits ouverts au budget.55
Au Maroc :
La réalité confirme pour autant que les cas de dépassement de la règle la non-contraction sont
si nombreux, en vue de passer-outre une règle jugée parfois inutilement compliquée.
A titre d’illustration :
Le Service autonome de publicité, dépendant du budget annexe de la Radio-Télévision
marocaine (RTM), a eu pour habitude de financer, en totalité ou en partie, certains de
ses programmes par les participations des entreprises en contre partie de la diffusion
d’une page publicitaire à leur profit
Des troupes militaires marocaines ont utilisé des légumes qu’ils avaient cultivés dans
les dépendances de la caserne pour améliorer leur ordinaire.
Tout effort d’économie réalisé par un département dépensier donné ne permet pas d’en
bénéficier pour récompenser sa performance ; et les autorités budgétaires pourraient être
tentées de supposer que les dépenses avaient été trop largement évaluées et de conseiller au
ministre gestionnaire de réduire le volume des dotations budgétaires pour l’année suivante.
Toutefois, il y a lieu de nuancer cet engouement vers le dépassement de la règle de non-
contraction, dans la mesure où il serait pourtant périlleux d’anéantir catégoriquement la règle
de non-contraction, car ce serait donner un intérêt particulier aux services administratifs
comme
Mobile de leur créativité, en contradiction avec la mission d’intérêt général qu’ils doivent
assumer.
Par exemple, si le ministre chargé des finances autorisait la Direction générale de sûreté
nationale à conserver la totalité des recettes procurées par les amendes infligées à l’occasion
d’infraction au Code de circulation, les policiers verbalisateurs seraient peut-être plus
55
Hassane EL ARAFI. GESTION DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ETAT Budget-Comptabilité-Trésor – 1ere Edition -1er trimestre
2006 P. 108
35
motivés, mais ils deviendraient éventuellement de véritables expectants vis-à-vis des
conducteurs !
En tout cas, un compromis entre l’efficacité et les inconvénients, sociaux ou politiques serait
possible, par exemple, décider qu’une partie des recettes devrait alimenter un CST et une
autre partie à verser au BGT.56
Avec l'universalité budgétaire, le contribuable n'a pas une représentation aussi détaillée de
l'affectation qui serait faite des contributions qu'il paie à l'État, puisque les prélèvements à
caractère fiscal ne sont qu'une partie de l'ensemble des ressources de l'État.
En essayant de profiter de cette impéritie d'ordre technique, mais à caractère politique
marqué, le Gouvernement peut déroger de facto à la règle de non-affectation dans l'espoir de
gagner l'adhésion des représentants de la nation à l'institution de certains nouveaux
prélèvements obligatoires mal vus ou alourdir autres s’ils sont déjà autorisés.
60
Hassane EL ARAFI. GESTION DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ETAT Budget-Comptabilité-Trésor – 1ere Edition -1er trimestre
2006 P. 112-113
38
au sens propre du terme, hiérarchique, politique, les conséquences sont toujours les mêmes les
départements dépensiers subissent des pressions. 61
Dans la loi de finances, le seul support budgétaire qui obéit à la règle de non-affectation est
le BGE ; les CST et les SEGMA dérogent à la règle et constituent des mécanismes
d’affectation des recettes à certaines dépenses.
61
Hassane EL ARAFI. GESTION DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ETAT Budget-Comptabilité-Trésor – 1ere Edition -1er trimestre
2006 P. 114
62
LA MODERNISATION DES PRINCIPES BUDGETAIRES Professeur chercheur Ouafaa khallouk Revue des Etudes Multidisciplinaires
en Sciences Economiques et Sociales
39
Les SEGMA. Dont l’activité doit tendre essentiellement à produire des biens ou à rendre
des services donnant lieu à rémunération, en vertu de l’article 21 de la LOLF « …dont
certaines dépenses, non imputées sur les crédits du budget général, sont couvertes par des
ressources propres. L’activité de ces services doit tendre essentiellement à produire des biens
ou à rendre de services donnant lieu à rémunération ».63
Il convient de préciser qu’aux termes d’accords de prêt avec des organismes financiers
internationaux, certains projets doivent être engagés et payés selon des procédures qui
dérogent au principe de non- affectation.
Ces procédures sont définies dans des documents types propre à chacun des dits
organismes, Banque mondiale, l’Union européenne. L’exemple le plus édifiant est celui de la
« procédure d’utilisation des fonds de roulement concernant les projets publics financés au
moyen d’emprunt extérieur ». D’après cette procédure les services du budget doivent, d’un
côté produire une attestation d’éligibilité de la dépense au financement extérieur précisant le
taux de financement et la catégorie d’imputation de la dépense. D’un autre côté, ils doivent
communiquer au bailleur de fonds le détail de l’affectation du concours financier, notamment
à l’occasion de chaque demande de réalimentation du compte fonds de roulement.
Les taxes parafiscales
La parafiscalité est apparemment une notion moins claire que celle de l’impôt ou celle de
la taxe administrative, même si la doctrine revendique certaines conditionnalités pour son
institution. D’autant plus que le droit fiscal marocain n’en donne pas une définition précise
par rapport aux impôts et par rapport surtout aux taxes administratives.
Mais, la particularité des taxes parafiscales est qu’elles représentent des redevances perçues
au profit d’un service particulier et versées par les usagers en échange des avantages qu’ils
retirent du service. De même, conformément à la réglementation en vigueur, les taxes
63
Dahir n° 1-15-62- du 14 chaabane 1436(2 juin 2015) portant promulgation de la loi organique n° 130-13 relative à la loi de finance. Article
21
40
parafiscales, perçues dans un intérêt économique ou social au profit d’une personne morale de
droit public autre que l’état et les collectivités locales, sont établies par décret, pris sur
proposition du ministre chargé des finances et du ministre intéressé. Cela veut dire qu’on peut
qualifier de « parafiscal » les taxes opérées sur leurs usagers par certains organismes publics,
afin d’assurer leur financement autonome. D’une part, celles-ci bénéficient exclusivement aux
organes auxquelles sont attribuées (exp. Les cotisations prélevées au titre de la sécurité
sociale : mutuelle, caisse marocaine de retraite, etc… D’autre part, le produit de ces taxes ne
constitue pas des recettes budgétaires et les dépenses des organismes bénéficiaires ne figurent
pas dans la loi de finances.64
64
Hassane EL ARAFI. GESTION DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ETAT Budget-Comptabilité-Trésor – 1ere Edition -1er trimestre
2006 P. 116
65
Le droit public André Legrand Céline Wiener Édition 2017 P. 167
66
Hassane EL ARAFI. GESTION DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ETAT Budget-Comptabilité-Trésor – 1ere Edition -1er trimestre
2006 P. 117
67
Dahir n° 1-15-62- du 14 chaabane 1436(2 juin 2015) portant promulgation de la loi organique n° 130-13 relative à la loi de finance.
Article 34
41
pas de rattacher une recette mais d’annuler des dépenses déjà effectuées en rétablissant les
autorisations consommées.
Le rétablissement de crédits vise à effectuer de simples régularisations d’ordre comptable
et permet de réaliser, d’une manière indirecte, une affectation de recette par rectification des
prévisions initiales, en annulant une dépense effectuée sur crédits budgétaires et en
rétablissant la dotation originaire de la rubrique concernée.
A la suite d’un versement au trésor d’une somme représentant la restitution d’un trop payé
ou le prix d’une cession de biens ou de services, l’ordonnateur peut faire une nouvelle
dépense, non prévue à l’origine.
La non-affectation et la non-contraction sont donc deux règles indissociables. Sinon,
les inscriptions budgétaires n'auraient plus aucun sens, ce qui réduirait la signification des
prévisions et la portée des autorisations, notamment au niveau de la spécialité des opérations
budgétaires.68
En réalité, bien que le terme n'ait pas été couramment employé dans le passé, le
principe de sincérité a des racines anciennes, c’est un principe naturellement lié aux règles
financières, Derrière l'appellation moderne de sincérité se profile un concept similaire, bien
que non synonyme, celui de transparence. Ces deux notions forment un ensemble
indissociable, la sincérité pouvant être considérée comme l'expression sublimée de l'exigence
70
Jurisprudence du Conseil constitutionnel 1er octobre-31 décembre 2001 Véronique Bertile, Éric Oliva, Loïc Philip, Didier Ribes Dans
Revue française de droit constitutionnel 2002/1 (n° 49), pages 151 à 198 Éditions Presses Universitaires de France
43
de transparence. L'histoire politique et financière témoigne de la persistance de ces idéaux,
visant à établir une société plus démocratique et à promouvoir une vie publique exemplaire.
Officiellement, le principe de sincérité n'aurait été intégré au droit financier public qu'à la fin
du XXe siècle71. Cependant, dès 1814, le baron Louis critiquait l'absence de budgets sincères
et complets devant le Corps législatif, déplorant le manque de transparence. En 1818, il
insistait sur la nécessité d'une administration financière si transparente que chaque
contribuable puisse la juger comme ses propres affaires. Même chez des auteurs majeurs, la
sincérité était implicitement présente. René Stourm, par exemple, l'incluait déjà dans la liste
des qualités indispensables d'un budget. Les racines du terme remontent cependant au Traité
de commerce de Luca Pacioli en 1494, où la description des biens des entreprises était guidée
par la "vérité".
Cependant Le principe de sincérité est souvent présenté et enseigné comme le plus récent
parmi les principes financiers, un principe nouveau-né , Étant donné que le Maroc n'a
explicitement établi le principe de sincérité que dans la loi organique n° 130-13 du 2 juin
2015, adoptée dès cette date, contrairement au Conseil constitutionnel français qui a
explicitement établi le principe de sincérité la décision n° 93-320 DC du 21 juin 1993 et qui
est devenu opérationnel à partir de 2001 en raison de son caractère strictement
jurisprudentiel.
La loi organique n° 130-13 du 2 juin 2015 s'aligne sur la tendance mondiale actuelle qui vise
à positionner la sincérité comme un principe majeur du droit budgétaire et comptable, à
travers diverses dispositions.72
Néanmoins, la sincérité est une idée aux multiples facettes73, ce n'est pas un principe universel
qui s'applique de manière uniforme. Sa portée juridique varie en fonction qu'il s'agisse des
comptes (I)ou des prévisions budgétaires(II)
71
Archives parlementaires, t. XII, 1814, p. 171
72
www.of.finances.gov.ma, Principes des finances publiques
73
François BONNEVILLE ,Edward Mordrake ou les deux visages du principe de sincérité dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel
44
En plus des défis juridiques liés à la consécration du principe de sincérité budgétaire dans le
droit positif marocain dans la mesure où il peut être sujette à différentes interprétations et
aussi l’émergence des questions de responsabilité en cas de non-respect du principe peuvent
se poser puisque il implique la collaboration de divers acteurs au sein de l'administration d’où
la nécessité de déterminer les sanctions appropriées.
Ensuite, la sincérité doit être interprétée comme une sincérité budgétaire, conformément à ce
qui est stipulé à l'article 10 de la LOLF « Les lois de finances présentent de façon sincère
l'ensemble des ressources et des charges de l'État. La sincérité des ressources et des charges
s'apprécie compte tenu des informations disponibles au moment de leur établissement et des
prévisions qui peuvent en découler. »75
Bien que la comptabilité de caisse (ou budgétaire) permette une gestion efficace des
flux de trésorerie, elle présente néanmoins des limites, notamment parce qu'elle ne permet pas
de suivre les mouvements non liés à des paiements.
74
L’article 31 de la LOLF marocaine
75
l'article 10 de la LOLF
45
Dans un contexte international marqué par la crise financière mondiale et la
reconnaissance croissante au sein des milieux financiers internationaux de l'incohérence et de
l'insuffisance des rapports des États, de nombreux pays ont entrepris d'importants
changements dans leurs systèmes de comptabilité. Ces réformes font partie d'un vaste
processus de modernisation de la gestion financière publique.76
Au Maroc, la loi organique n°130-13 relative à la loi de finances, promulguée par le dahir n°
1-15-62 du 14 chaabane 1436 (2 juin 2015), accorde une place significative à la comptabilité
générale de l'État. Ainsi, la réforme comptable devient une dimension complémentaire et
indissociable de la dimension budgétaire.
Les réformes ont été motivées par l'objectif global d'améliorer l'efficacité et
l'efficience de la gestion financière publique, ainsi que d'améliorer la qualité des services
publics. Pour répondre à ces impératifs, l'information financière publique a été ajustée et
développée conformément aux nouveaux principes, afin de satisfaire aux exigences de
comparabilité de l'information financière. Désormais, l'attractivité d'un pays est souvent
mesurée par la disponibilité d'une information transparente et fiable sur les comptes,
répondant aux besoins des investisseurs, des bailleurs de fonds et de tous les utilisateurs,
plutôt que par les avantages économiques qu'elle offre .
À présent, l'information est centrée sur la prise de décision, avec une attribution
claire des responsabilités dans un souci de responsabilisation. Les réformes ont été étendues et
variées, réalisées de manière non uniforme, ce qui a parfois impacté les objectifs de
l'information comptable ou les principes de comptabilité adoptés. En résultat, on peut affirmer
que chaque pays a ajusté son système comptable du secteur public selon ses besoins, sans
nécessairement encourager une harmonisation entre eux.
76
Pr. KABBAJ SMAIL ,IPSAS Standards and the transition from cash accounting to accrual
accounting in Morocco
46
collectivités locales, et de plus en plus de gouvernements. En tant qu'exemples, citons des
organisations intergouvernementales telles que l'Agence Spatiale Européenne, les
Communautés Européennes, le Conseil de l'Europe, l'Organisation Internationale de Police
Criminelle, l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, les Nations Unies, etc. Pour ce qui
est des pays, la Chine (avec un projet en cours pour adopter les IPSAS), l'Allemagne (où la
ville de Hambourg applique ces normes internationales), l'Inde (où le Conseil des normes de
comptabilité publique soutient l'application de ce référentiel pour les opérations au comptant),
le Japon, la Norvège, l'Espagne, ainsi que de nombreux autres pays, mettent en œuvre les
IPSAS et leur nombre continue de croître.77
Cette constitution a été renforcée par la mise en place d'une nouvelle loi organique
des finances, visant à donner une nouvelle impulsion à la modernisation de l'État en
renforçant la transparence des finances publiques et en réorientant la gestion financière vers
une logique axée sur les résultats et la performance.
Les raisons de la réforme budgétaire, telles que présentées dans la note explicative du
projet de la LOF, incluent la nécessité de maîtriser les dépenses publiques dans un contexte
77
Pr. KABBAJ SMAIL , IPSAS Standards and the transition from cash accounting to accrual
accounting in Morocco
78
Pr. KABBAJ SMAIL , IPSAS Standards and the transition from cash accounting to accrual
accounting in Morocco
47
économique caractérisé par la rareté des ressources et l'augmentation constante des besoins et,
par conséquent, des dépenses associées. Les réformes budgétaires cherchent généralement à
réduire les dépenses ou à augmenter les recettes, mais ce qui est novateur dans la présente
réforme, ce sont les mécanismes et les outils opérationnels mis en place pour atteindre les
objectifs fixés.
La nouvelle loi organique, dont la mise en œuvre, a introduit plusieurs mesures visant
à instaurer la philosophie de la réforme. Celle-ci se caractérise par l'octroi d'une plus grande
liberté de gestion budgétaire aux services gestionnaires, en échange d'un renforcement du
contrôle a posteriori visant à améliorer la performance. Cette approche se manifeste
notamment par une plus grande souplesse dans la gestion des crédits, une caractéristique qui
distingue le modèle marocain et qui contraste avec la LOLF française.
Ainsi, L'enjeu central de la réforme budgétaire réside dans l'exécution efficiente des
dépenses publiques et les défis associés à sa maîtrise. Toutefois, la réalisation de ces défis
majeurs nécessite inévitablement la mise en place d'un système comptable performant et
moderne. Celui-ci doit permettre simultanément une meilleure gestion des crédits, un contrôle
efficace de la situation financière de l'État, et la fourniture d'une information pertinente aux
pouvoirs publics pour faciliter la prise de décisions appropriées.
79
Pr. KABBAJ SMAIL , IPSAS Standards and the transition from cash accounting to accrual
accounting in Morocco
48
ainsi qu'une comptabilité des paiements (caisse). offrant ainsi une vue complète et
détaillée de l'utilisation des fonds budgétaires.
La comptabilité d'analyse des coûts des actions : est conçue pour enrichir l'information
fournie au Parlement. offrant ainsi une transparence accrue sur l'utilisation des ressources
publiques dans le cadre des programmes et sous-programmes gouvernementaux.
Ces trois comptabilités ne sont cependant pas indépendantes les unes des autres, des
passerelles sont prévues, et des articulations pratiques sont conçues dans le cadre du
nouveau cadre comptable.
Cet alinéa reproduit fidèlement le troisième alinéa de l'article 27 de la LOLF française, qui, à
son tour, s'inspire de l'article du code de commerce introduit en 1983 pour la première fois
dans le droit commercial français par la loi n° 83-353 du 30 avril 1983. Cette loi a établi des
normes comptables pour assurer la régularité et la transparence des comptes.
Selon le professeur L. SAIDJ, la sincérité comptable est essentielle à tout compte rétrospectif,
et elle est la moins sujette à controverse. De plus, elle est un principe commun tant pour le
secteur public que pour le secteur privé. Ainsi, la LOLF reconnaît l'importance de garantir la
précision et la fiabilité des informations comptables, conformément aux normes
internationales, afin de renforcer la transparence et la crédibilité des comptes publics.
La sincérité des comptes publics implique une application correcte et de bonne foi des
règles comptables, excluant toute intention coupable de fausser l'information et privilégiant
une représentation fidèle de la réalité économique. Cette notion est assimilée à un principe
aussi révolutionnaire et important que l'exigence de régularité dans la gestion financière
publique.
81
PR .Nabil CHEUFA,La portée du principe organique de sincérité dans le droit budgétaire
50
juridiques de la sincérité financière publique et privée soient distinctes, les bases
intellectuelles sont largement communes. Comme le souligne le professeur ESCLASSAN,
bien que les règles comptables applicables à l'État diffèrent de celles des entreprises (plan
comptable général des entreprises), elles partagent de nombreuses similarités, à l'exception
des spécificités liées à l'action de l'État. Ainsi, la sincérité demeure un principe fondamental
tant dans le secteur public que dans le secteur privé, contribuant à assurer la fiabilité et la
transparence des informations financières.82
La sincérité des comptes publics soulève plusieurs problématiques, selon le professeur
ESCLASSAN. Tout d'abord, il évoque la question de la pertinence des normes comptables
qui déterminent la manière dont la sincérité est évaluée. Ces normes jouent un rôle crucial
dans la définition des critères et des procédures permettant d'apprécier la sincérité des
informations financières.
Ensuite, le professeur met en avant la nécessité d'une séparation claire entre la fonction de
production des normes comptables et celle de production de l'information comptable. Cette
distinction est essentielle pour garantir l'objectivité et l'indépendance du processus
d'établissement des normes, évitant ainsi toute influence indue sur la présentation des
comptes.
82
ESCLASSAN (M-C), « Réflexions sur la promotion du principe de sincérité dans les systèmes
financiers contemporains et ses conséquences »
83
CHAMARD-HEIM, « La sincérité et les organisations internationales »
51
doit couvrir l'ensemble des opérations financières et ne doit pas omettre certains éléments
importants.
Ainsi La sincérité budgétaire, pour être respectée, impose deux conditions fondamentales :
A) Les évaluations des ressources et des charges doivent être réalistes, c'est-à-dire basées
sur des projections objectives. Cela signifie que les estimations budgétaires doivent refléter de
manière précise les attentes en termes de recettes et de dépenses, en se basant sur des données
fiables et des prévisions crédibles.
La sincérité budgétaire exige que les prévisions budgétaires, tant pour les recettes que
pour les dépenses, soient sincères et réalistes. Le non-respect de cette exigence peut conduire
à la censure du Conseil constitutionnel, soulignant ainsi que le principe de sincérité budgétaire
a une véritable signification et force juridique lorsqu'une autorité juridictionnelle a le pouvoir
d'annuler un budget non sincère.
84
LUC SAID, finances publiques
52
d'un principe ne le protège pas totalement des implications du droit. Il est essentiel de
reconnaître que les prévisions des recettes et des dépenses impliquent de projeter le "futur
probable"85, comme indiqué par le professeur BOUVIER. Ce processus, bien qu'incluant une
part d'incertitude irréductible, est également affecté par les contingences humaines, car toute
fausse prévision a des répercussions sur l'ensemble du raisonnement budgétaire. De plus,
comme le souligne la citation, à mesure que le budget total augmente, les petites différences
d'estimation prennent davantage d'importance.86
Au-delà des prévisions faites en n-1 ou n-2, qui peuvent objectivement s’avérer incorrectes en
raison de l’évolution inattendue de la conjoncture, se pose la question de la transparence.
Contrairement à certaines tendances gouvernementales consistant à dissimuler les déficits
prévisibles en adoptant, par exemple, des hypothèses de croissance exagérément optimistes,
cette situation souligne l'importance de la sincérité budgétaire. Elle met en lumière la
nécessité d'une évaluation réaliste des perspectives économiques et financières pour assurer la
crédibilité et la transparence des informations budgétaires.
85
Alexender guigue, Les origines et l’évolution du vote du budget de l’État en France et en
Angleterre
86
Michel Bouvier, Finances publiques
53
compromettant ainsi la confiance dans le processus budgétaire et la transparence de
l'administration publique.
Ainsi Ces institutions offrent aux organes législatifs des moyens supplémentaires de
contrôle en examinant les projections budgétaires, les prévisions économiques, et en évaluant
la crédibilité des chiffres présentés par l'exécutif. Elles permettent ainsi au Parlement d'avoir
une compréhension plus approfondie des choix budgétaires et de détecter d'éventuelles
incohérences ou insincérités.En étant indépendantes de l'exécutif, ces institutions apportent
une expertise technique neutre et impartiale. Elles sont en mesure d'évaluer de manière
objective la sincérité des prévisions budgétaires, renforçant ainsi la fiabilité de l'information
transmise au Parlement ce qui la transparence du processus budgétaire. En rendant publics
leurs avis et analyses, elles contribuent à informer le public sur la qualité des prévisions et à
accroître la confiance dans la gestion des finances publiques.
Les institutions budgétaires indépendantes (IBI) jouent un rôle crucial dans l'établissement et
l'évaluation des prévisions budgétaires. Leur rôle peut varier en fonction des pays, mais elles
sont généralement chargées de garantir l'objectivité, la transparence et la sincérité des
prévisions, Dans certains pays, les IBI sont directement responsables de l'établissement des
prévisions budgétaires officielles. Cette approche, observée au Royaume-Uni et aux Pays-Bas,
confère à ces institutions un rôle central dans la formulation des chiffres qui serviront de base
aux politiques budgétaires, Dans d'autres pays tels que les États-Unis et le Canada, les IBI
peuvent formuler des prévisions alternatives à celles du gouvernement. Cette pratique permet
87
Diane FROMAGE, « Le Haut Conseil des finances publiques : quelles conséquences deux ans après
sa création ? »
54
d'introduire une diversité d'analyses et d'opinions dans le débat public, offrant ainsi une
perspective alternative sur l'évolution économique et budgétaire.
Certaines IBI, comme celles de la France et de la Suède, ne formulent pas nécessairement des
prévisions alternatives, mais émettent des opinions sur les prévisions existantes du
gouvernement. Elles contribuent ainsi à évaluer la crédibilité et la cohérence des chiffres
présentés par l'exécutif.
M-P PRAT souligne que la sincérité budgétaire est évaluée, en premier lieu, par le biais de la
certification, selon le point de vue des juridictions financières. Cette certification revêt une
importance particulière dans le processus d'évaluation, mettant en avant une différence
d'approche entre le Conseil constitutionnel et la Cour des compte, dans la mesure ou le
Conseil constitutionnel : évalue la sincérité en se basant sur le caractère prévisionnel du
budget. Il se prononce sur la cohérence et la crédibilité des prévisions budgétaires avant leur
mise en œuvre, et Cour des comptes Son rôle est plutôt a posteriori, intervenant après
l'exécution du budget. Elle dispose de davantage de temps pour un contrôle approfondi et
critique des comptes, évaluant ainsi la sincérité sur le fond à partir des résultats concrets. 88
.
Cette distinction d'approche reflète la complémentarité des rôles entre ces deux institutions.
Tandis que le Conseil constitutionnel se penche sur la sincérité en amont, évaluant la
crédibilité des prévisions, la Cour des comptes intervient en aval, analysant la conformité des
comptes à la réalité des exécutions budgétaires. En combinant ces approches, les juridictions
financières contribuent à garantir l'intégrité et la fiabilité de l'information budgétaire.
Le juge financier, bien qu'il n'occupe pas une position prédominante dans le contrôle de la
sincérité budgétaire, joue un rôle significatif, et sa décision en matière de certification a une
influence sur la position ultérieure du Conseil constitutionnel. Avant même d'être
institutionnalisé dans la LOLF française, le principe de sincérité a fait l'objet d'une
jurisprudence conséquente du Conseil constitutionnel, montrant que la LOLF n'est que la
formalisation d'un processus contentieux antérieur.
88
PRAT (M.P), « La sincérité et sa mise en œuvre par les collectivités locales»
55
Le rôle du juge financier est donc la Certification des comptes dans la mesure où il
intervient dans le processus de certification des comptes, évaluant la conformité des
informations comptables aux normes établies. Sa décision de certification a des répercussions
sur la sincérité des comptes présentés.
Ainsi, la LOLF française a formalisé et institutionnalisé des principes de sincérité qui étaient
déjà en cours de consolidation grâce à une jurisprudence antérieure du Conseil
constitutionnel, démontrant l'importance du rôle du juge financier dans la construction et
l'affinement de ces principes au fil du temps.
Dans un premier lieu le domaine exclusif et obligatoire s'agit d'un domaine dans lequel la loi
de finances doit impérativement traiter certaines matières. Ces matières sont exclusivement
réservées à la loi de finances et doivent obligatoirement y figurer
Quant au Domaine exclusif et non obligatoire la loi de finances peut traiter certaines
matières, mais elle n'y est pas obligée. Elle a la possibilité d'inclure des dispositions relevant
de ce domaine, mais cela demeure à sa discrétion offrant au législateur la liberté de choisir
d'inclure ou non certaines matières dans la loi de finances.
Cependant, au Maroc, contrairement à la pratique française, le constituant n'a pas établi une
définition précise du contenu et de la forme de la loi de finances. Cette absence de détails
explicites pourrait laisser au législateur une plus grande latitude dans la détermination du
56
contenu des lois de finances, sans les contraintes spécifiques imposées par la LOLF en
France.
En particulier, la loi portant règlement budgétaire exige une exactitude accrue des comptes.
Cela signifie que le contrôle de la sincérité dans le cadre de cette loi va au-delà de la simple
vérification de la légalité des opérations budgétaires. Il implique également une évaluation
plus approfondie de la conformité des comptes aux principes comptables et aux normes
établis, contribuant ainsi à renforcer la fiabilité des informations financières et à assurer une
transparence accrue dans la gestion des finances publiques.
La mise en place d'un tel principe de sincérité en droit laisse entrevoir un renforcement du
contrôle a priori juridictionnel exercé par la cour constitutionnelle. Étant donné le caractère
organique de la loi relative aux lois de finances et l'extension récente des modalités de saisine,
il est prévu que les questions de constitutionnalité dans le domaine budgétaire se multiplient.
Le grief d'insincérité pourrait devenir un point de litige fréquent, notamment de la part de
l'opposition parlementaire, contribuant ainsi à un examen plus approfondi et régulier de la
conformité constitutionnelle des lois budgétaires.
En résumé, la loi portant règlement budgétaire au Maroc, comme son équivalent français,
place une importance particulière sur l'exactitude des comptes, élevant le niveau d'exigence en
matière de sincérité et de fiabilité des informations financières lors du processus de règlement
budgétaire. Cette approche différenciée reflète la volonté de garantir une gestion financière
rigoureuse et transparente, en particulier lors de la clôture de l'exercice budgétaire.
57
L'évaluation de la constitutionnalité des actions financières au Maroc revêt une importance
capitale, car elle influence directement la stabilité et la démocratie du pays. La conformité aux
principes budgétaires et aux droits constitutionnels est un impératif majeur afin d'assurer une
gestion des finances publiques qui soit à la fois transparente et responsable.
BIBLIOGRAPHIE :
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- LA LOI ORGANIQUE (150-15 ) (2 JUIN 2015)
- François BONNEVILLE ,Edward Mordrake ou les deux visages du principe de
sincérité dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel
- Pr. KABBAJ SMAIL ,IPSAS Standards and the transition from cash accounting to
accrual accounting in Morocco
- PR .Nabil CHEUFA,La portée du principe organique de sincérité dans le droit
budgétaire
- Règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil du 25 juin 2002 portant règlement
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- André Legrand Céline Wiener Le droit public, Édition 2017
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URL:http://www.cvce.eu/obj/les_principes_budgetaires-fr-3f6aa90a-486a
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59