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PRIMATURE REPUBLIQUE DU MALI

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UN PEUPLE UN BUT UNE FOI

MODULE: Comptabilité publique Chargé du cours : Dr Mohamed TRAORE

EXPOSANTS : GROUPE IV

Amadou SANGA, Inspecteur des Douanes Modibo SAMAKE, Inspecteur des Finances
Siaka DEMBELE, Administrateur Civil Ibrahim BOCOUM, Inspecteur des Finances
Oumar KOUMA, Administrateur Civil Arouna COULIBALY, Inspecteur des Finances
Ousmane COULIBALY, Administrateur Civil
Moadji TRAORE, Inspecteur du Trésor
Mohamed Cherif HAIDARA, Planificateur
Mohamed El Moctar AG HAMOUTAPHA, Inspecteur des services Economiques
Balla KEITA, Inspecteur des Impôts
Mariam Namoh DIABATE, Planificateur
Ibrahima TRAORE, Conseiller des Affaires Etrangères
SOMMAIRE

Introduction…………………………………………………………………………………………….1
I. Les mécanismes de contrôle parlementaire de la loi de finances .............................................. 4
A. Le contrôle a priori et concomitant de l’exécution du budget ................................................... 5
B. Le contrôle a posteriori ................................................................................................................. 7
II. Les limites du contrôle parlementaire à améliorer................................................................. 9
A. Les limites du contrôle parlementaire ......................................................................................... 9
B. Les propositions d’amélioration du contrôle parlementaire ................................................... 13
Conclusion : ......................................................................................................................................... 15
Introduction

Le code de transparence dans la gestion des finances publiques au sein de l’UEMOA fait de la
légalité, de la transparence, du contrôle et de la responsabilité, des principes essentiels et des
exigences financières d’un Etat de droit1. Le code dispose que les « activités et les finances
des administrations publiques sont soumises à un contrôle interne » et que les « finances
publiques et les politiques qu’elles soutiennent sont soumises au contrôle externe de la Cour
des Comptes.

La fonction du contrôle des finances publiques est devenue un des standards du droit et de la
gestion des finances publiques dans le monde. Dans sa déclaration dite de Lima,
l’organisation Internationale des Institutions de Contrôle des Finances Publiques (INTOSAI)
pose comme « indispensable (…) que chaque Etat possède une institution supérieure de
contrôle des finances publiques ». L’Assemblée Générale des Nations Unies, à travers sa
résolution n°66/209 adoptée le 22 décembre 2011, va dans le même sens et préconise
l’indépendance des Institutions Supérieures de Contrôle des Finances Publiques dans les
Etats2.

En effet, le contrôle parlementaire de la loi de finances, faisant l’objet de notre étude, peut
être défini comme étant l’ensemble des procédures et moyens dont disposent les
parlementaires pour analyser, surveiller, discuter et vérifier l’exécution du budget ou la loi de
finances.

Le parlement est l’institution privilégiée du contrôle politique des finances. Ce contrôle se


définit au sen strict comme la vérification de l’adéquation de la réalité à la théorie et surtout
son caractère externe vis- à- vis de l’institution contrôlée. Il n’y a point de régime
démocratique sans séparation des pouvoirs et dans la répartition des compétences financières,
le contrôle est fait par le législatif dans le cadre de l’exécution de la loi des finances par
l’exécutif3.

1
Nicaise Médé, Finances publiques espace UEMOA/UMOA, édition Harmattan-Sénégal, 2016, page 323

2
Ibi.
3
Sébastien Kott, Etudes générales, le contrôle des dépenses engagées, Evolution d’une fonction
La fonction contrôle occupe une place très importante dans les textes portant nouveau code
harmonisé des finances publiques. La directive relative aux lois de finances et celle portant
règlement général sur la comptabilité publique expliquent les différents contrôles qui
s’exercent sur l’exécution de la loi de finances et qui respectent, dans son esprit, le principe de
la séparation des pouvoirs. Ces contrôles sont d’ordre administratif, juridictionnel et
parlementaire.

Dans le schéma des contrôles de l’exécution des lois de finances, le contrôle politique opéré
par le Parlement tient en principe la première place. Ayant initialement autorisé la mise en
œuvre des opérations de recettes et de dépenses, ce dernier doit en suivre le déroulement puis
se prononcer sur l’exécution définitive du budget

Dans la pratique et pendant longtemps, le contrôle parlementaire de l’exécution du budget a


été loin d’occuper une place prééminente, ayant essentiellement un caractère formel.

Ce sujet présente un double intérêt. Il permet non seulement de savoir les moments de
contrôle de la loi de finances, mais aussi de savoir que l’agent public affecté à la gestion des
deniers publics se trouve dans une situation objective de préposé au service de la communauté
publique. Il se doit de rendre compte à celle-ci de sa gestion, en guise de respect d’un idéal
démocratique.

Ce sont les représentants du peuple qui exercent le contrôle de l’action gouvernementale dans
le cadre de l’exécution de la loi finance. A cet effet, le sujet soulève la problématique de la
pertinence et de l’efficacité des mécanismes de contrôle parlementaire.

Ce qui nous amène à se poser la question suivante : quels sont les mécanismes de contrôle
parlementaire de la loi de finances et les limites susceptibles d’être améliorées ?

Pour répondre à cette question, nous examinerons dans un premier temps les mécanismes de
contrôle parlementaire de la loi de finances (I) et dans un second temps les limites dudit
contrôle susceptibles d’être améliorées (II).

I. Les mécanismes de contrôle parlementaire de la loi de finances

Le parlement est l’organe politique de contrôle par excellence de l’exécution de la loi de


finances. Le contrôle parlementaire est, d’une part, un contrôle a priori et concomitant (A) et
d’autre part un contrôle a posteriori (B).
A. Le contrôle a priori et concomitant de l’exécution du budget :

Le contrôle a priori se fait au moment d’avant la mise en exécution de la loi de finances (a


priori absolu). Ce peut être aussi le moment d’avant l’exécution d’une opération dans la
chaîne des opérations de mise en œuvre de la loi de finances (a priori relatif))4.

La directive de l’UEMOA portant code de transparence dans la gestion des finances publiques
pose, dans son préambule, les grandes lignes de ce que doit être un contrôle à priori des lois
de finances : « le choix des dépenses et des recettes par les pouvoirs publics est clair et
intervient au terme d’un débat large et ouvert ».

En effet, le projet de loi de finances n’est plus élaboré de façon solitaire par le gouvernement.
Le principe est d’associer le parlement à la détermination des grandes orientations de la loi de
finances à venir. À cette fin, il est organisé au parlement un débat d’orientation budgétaire au
plus tard à la fin du deuxième trimestre de l’année (art. 57, DLF).

Le contrôle concomitant ou intercurrent présente l’originalité d’avoir un contenu et des


modalités qui le distinguent des autres types de contrôle qu’on range dans la catégorie des
contrôles selon le moment5.

C’est un contrôle qui couvre toute la chaîne de l’exécution de la loi de finances. Il ne s’attache
pas à une séquence particulière de l’exécution de la loi de finances mais englobe toutes les
opérations d’exécution de celle-ci, de la première à la dernière et du 1er janvier au 31
décembre. C’est un contrôle en cours d’exécution qui peut intervenir à tout moment, quel que
soit le niveau de cette exécution.

Le parlement est investi d’une compétence générale de contrôle de l’action du gouvernement


à travers l’interpellation, les questions écrites ou orales, les commissions parlementaires
d’enquête. Ces moyens de contrôle peuvent porter sur des thèmes de finances publiques,
notamment sur l’exécution de la loi de finances de l’année (article 127 de la constitution du
22 juillet 2023).

La gestion des deniers publics est en effet un domaine de prédilection du contrôle des
parlementaires.

4
Nicaise Médé, Finances publiques espace UEMOA/UMOA, édition Harmattan-Sénégal, 2016, page 323

5
Ibi
Les pouvoirs de contrôle du Parlement sont confiés, pour l’essentiel, aux membres
des commissions des Finances des assemblées, qui peuvent :

 procéder à des investigations sur pièces et sur place, ou à des auditions auxquelles les
personnes convoquées sont tenues de se présenter ;
 demander la communication de renseignements ou de documents d’ordre financier et
administratif, sous réserve des sujets à caractère secret ;
 adresser, à la suite d’une mission de contrôle et d’évaluation, des observations
notifiées au Gouvernement, qui y répond par écrit ;
 bénéficier de l’assistance de la Cour des comptes.

Les questions des parlementaires au Gouvernement, les missions d’information et


les commissions d’enquête constituent également des outils de contrôle. Les missions
d’information et les commissions d’enquête peuvent désormais être créées à l’initiative d’un
groupe parlementaire, ce qui renforce les droits de l’opposition en matière de contrôle.

Sur le plan juridique, les commissions des finances des parlements "veillent, au cours de la
gestion annuelle, à la bonne exécution des lois de finance" (art. 74, al.1, DLF). Pour ce faire,
le gouvernement a l’obligation de transmettre trimestriellement au parlement, pour
information, "des rapports sur l’exécution du budget et l’application du texte de la loi de
finances" (art. 74, al.2, DLF). Les parlementaires sont autorisés à faire des investigations "sur
place" dans les administrations publiques, (art. 74, al.3, DLF). Ils peuvent demander à
auditionner des ministres (art. 74, in fine, DLF).

Par ailleurs, la Cour des comptes est investie du pouvoir d’assister "le Parlement dans le
contrôle de l’exécution des lois de finances" (art. 75, al.2, DLF). À ce titre, "le Parlement peut
demander à la Cour des Comptes la réalisation de toutes enquêtes nécessaires à son
information" (art. 75, in fine, DLF).

Le contrôle parlementaire peut être important pour la promotion qualitative de la gestion


budgétaire publique et contribuer à la correction des mauvais choix, des politiques et actions
coûteuses et vaines pour les finances publiques. En plus de ces types de contrôle, le parlement
dispose d’un pouvoir de contrôle a posteriori sur l’exécution de la loi de finances.
B. Le contrôle a posteriori :
Le contrôle a posteriori peut prendre toutes les formes de l’action parlementaire de contrôle
de la politique du gouvernement : question orale, question écrite, commission d’enquête
parlementaire, interpellation. Ces différents moyens de contrôle parlementaire, dès lors qu’ils
portent sur une loi de finances d’un exercice déjà clôturé, rentrent dans la catégorie des
techniques de contrôle à posteriori.

Cependant, c’est l’examen et le vote de la loi de règlement, la loi qui "rend compte de
l’exécution du budget ainsi que de l’utilisation des crédits" (art. 5, in fine, DLF) qui
constituent le moyen par excellence de contrôle a posteriori de l’exécution de la loi de
finances.

Stéphanie DAMAREY rappelle la nécessité d’un vote effectif de la loi de règlement tout en
notant, au regard de la pratique constatée, l’inutilité de cette loi due aussi bien au désintérêt
des parlementaires qu’à ses modalités d’adoption antérieures à la LOLF. Elle affirme : « La
loi de règlement n’emporte donc son plein effet que si elle est votée effectivement par les
parlementaires, au terme d’un débat mettant en évidence les éventuelles irrégularités
d’exécution. En ce sens, la loi de règlement est un acte essentiel dans l’activité parlementaire.
Pourtant, la pratique d’adoption de ce texte montre le peu d’engouement des parlementaires à
l’égard de ces lois de finances. […] Le constat est récurrent : exception faite de la
Restauration et de la Monarchie de juillet, les parlementaires ont, globalement, porté peu
d’intérêt au vote de la loi de règlement. […] Palpable, le désintérêt parlementaire était des
plus évidents à l’occasion des débats préalables à l’adoption des lois de règlements avec des
visions d’hémicycles vides »6.
Selon Michel BOUVIER et autres, l’adoption des lois de règlement a un objet « fondamental
au regard des prérogatives du Parlement puisqu’elle lui permet d’examiner chaque année les
résultats effectifs de l’exécution des lois de finances qu’il a initialement votées ainsi que d’en
tirer des informations essentielles pour les futures décisions budgétaires.
La loi n° 2013-028 du 11 juillet 2013 relative aux lois de finances place la loi de règlement
dans le contexte des outils de gestion, d’information et de reddition de comptes de la LOLF
qui, en France, contribue à revaloriser la loi de règlement. L’adoption et l’exécution du budget
d’Etat en mode programme n’ayant démarré au Mali que pendant l’exercice 2018, il est
6
Moumouni Guindo. L’évolution du système de contrôle des finances publiques au Mali. Droit. Université de Strasbourg, 2020 page
140
prématuré d’émettre un jugement sur la valeur de la pratique des lois de finances dans ce
mode de gestion7.
La loi de règlement a un intérêt financier certain et une portée politique relative.

S’agissant de l’intérêt financier, la loi de finances de l’année est un acte de prévision. La loi
de règlement constate le niveau d’exécution réelle des prévisions de recettes et de dépenses.

D’un point de vue financier et économique, ce sont les données fournies par la loi de
règlement qui sont intéressantes et entrent en ligne de compte pour l’appréciation des
indicateurs de performance de la surveillance multilatérale : ratio solde budgétaire de
base/PIB, ratio masse salariale/recettes fiscales, ratio endettement/PIB, ratio investissements
financés sur ressources intérieures/recettes fiscales, ratio recettes fiscales/PIB, ratio arriérés
de paiement intérieurs ou extérieurs, ratio solde des paiements courants hors dons/PIB.

En effet, le projet de loi de règlement "constate le montant définitif des encaissements de


recettes et des ordonnancements de dépenses", en validant les ouvertures de crédits
supplémentaires par décret d’avances, les dépassements de crédits résultant de force majeure
et l’annulation des crédits non consommés. Ensuite, il "rend compte de la gestion de la
trésorerie de l’Etat et de la gestion et des résultats des programmes." Enfin, il "arrête les
comptes et les états financiers de l’État et affecte les résultats de l’année" (art. 49, DLF).

Le projet loi de règlement est accompagné de documents annexés d’une grande importance
pour la connaissance de l’état des finances publiques, notamment les finances de l’État : les
comptes et les états financiers issus de la comptabilité budgétaire et surtout de la comptabilité
générale de l’État (comptes de résultat, données d’inventaire du patrimoine, valeur du
patrimoine, etc.), les rapports de performance des programmes budgétaires.

Par-dessus tout, le projet de loi de règlement est accompagné du rapport de la Cour des
comptes sur l’exécution de la loi de finances ainsi que de la déclaration générale de
conformité entre les comptes des ordonnateurs et ceux des comptables publics. La Cour des
comptes joue en l’occurrence un rôle d’institution supérieure de contrôle en apportant une
expertise indépendante qui facilitera l’examen et le vote de la représentation nationale.

La certification des comptes n’est pas prévue par la directive relative aux lois de finances
mais certaines législations nationales ont instauré une certification des comptes publics par la
Cour des comptes.

7
Ibi
En guise de définition, la certification est " une opinion écrite et motivée que formule, sous
sa propre responsabilité, un auditeur externe sur les comptes d’une entité. Elle consiste à
collecter les éléments nécessaires à l’obtention d’une assurance raisonnable sur la conformité
des états financiers, dans tous leurs aspects significatifs, à un ensemble de règles et de
principes.

En ce qui concerne la portée politique de la loi de finances, le jour qui passe est passé, l’heure
qui sonne est sonnée, demain seul reste et les après-demain." Les parlementaires, de par le
monde, semblent s’inscrire dans cette logique et n’accordent que peu d’importance à
l’examen et au vote de la loi de règlement, une loi qui concerne le passé.

Autant l’adoption de la loi de finances de l’année est un temps fort de la vie politique et
médiatique, autant le vote de la loi de règlement attire très peu l’intérêt de la classe politique
et l’attention des médias. Selon une certaine vision italienne des choses, la loi de règlement
serait une "loi posthume" qui mérite bien le peu d’attention qu’on lui accorde.

De fait, la présentation et le vote des lois de règlement n’ont véritablement pris naissance en
Afrique de l’Ouest francophone qu’au début des années 2000, avec l’émergence des
juridictions financières de nouvelle génération.

Pour l’avenir, la loi de règlement connaîtra une renaissance en raison de ce que l’examen du
projet de loi de finances de l’année par les parlementaires ne peut se faire si les élus de la
nation ne disposent pas du projet de loi de règlement "au plus tard le jour de l’ouverture de la
session budgétaire de l’année suivant celle de l’exécution du budget auquel il se rapporte"
(art. 63, al.1, DLF). Au regard de tout ce qui précède, il faut reconnaitre que le contrôle
parlementaire est limité et qu’il mérite d’être amélioré.

II. Les limites du contrôle parlementaire à améliorer

Le parlement exerce un contrôle sur l’exécution des lois de finances. Cependant plusieurs
facteurs font que ce contrôle reste limité (A) et qu’il faille l’améliorer (B).

A. Les limites du contrôle parlementaire

Serge B. BATONON constate que « le contrôle parlementaire des fonds publics, qui est un
élément essentiel des systèmes financiers publics, fait très largement défaut dans l’ensemble
des pays de l’UEMOA».8 Ce constat est, naturellement, valable pour le Mali. L’une des
principales limites du contrôle parlementaire est la limitation extraordinaire du droit
d’amendement parlementaire lors de l’examen du budget sauf si celui-ci tend à supprimer ou
à réduire effectivement une dépense, à créer ou à accroitre une recette. De même, le
parlement ne peut proposer ni la création, ni la suppression d’un programme, d’un budget
annexe, d’un compte spécial du trésor (article 58 de la loi N°2013-028). Ce qui signifie en
pratique qu’un amendement parlementaire non motivé a très peu de chance d’être retenu.
Moumouni Guindo citant Bakary CAMARA estime que « l’AN [l’Assemblée nationale] du
Mali a toujours été dominée par des Députés analphabètes ou semi intellectuels qui jouent
difficilement leur rôle ». Mais, ce n’est pas une prise de position unique ajoute-t-il. D’autres
analyses font ressortir l’impact négatif des faiblesses des ressources humaines du Parlement
malien sur sa performance. En 1999, une étude menée par le Programme des Nations Unies
pour le Développement (PNUD), à la demande de l’Assemblée nationale, a, entre autres,
désigné l’insuffisante qualité des personnels techniques et administratifs comme l’un des
facteurs de la contre-performance du Parlement malien. Sur cette base, le PNUD et le
Royaume du Danemark ont mis en place le projet de Renforcement des capacités de
l’Assemblée nationale (RECAN).
Doté d’une enveloppe budgétaire de 3 millions d’euros, ce projet a mené, de 2009 à 2014,
diverses actions tendant à améliorer le cadre juridique et institutionnel du Parlement ainsi que
les capacités d’intervention des députés et des personnels techniques et administratifs.
L’évaluation du projet ne montre pas clairement que ces actions aient permis à l’Assemblée
nationale d’atteindre le but visé à savoir : « assurer au mieux sa fonction de législation et de
contrôle de l’action du gouvernement ». Pour ce qui concerne la fonction de contrôle de
l’action gouvernementale en général et de la gestion et du contrôle des finances publiques en
particulier, le diagnostic met en exergue la faible capacité de contrôle des députés, la
méconnaissance des outils de contrôle, le manque d’assistants qualifiés, l’expertise
insuffisante et le manque de contrôle sur la mise en œuvre des lois votées. C’est donc dire que
l’Assemblée nationale du Mali fait face à de nombreux défis pour accomplir sa mission de
contrôle sur la gestion des finances publiques.
Les déficiences notées par l’Assemblée nationale du Mali tranchent nettement avec
l’importance du rôle des Parlements dans le contrôle des finances publiques dans les Etats de
droit mettant en œuvre la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Certes, la

8
Moumouni Guindo. L’évolution du système de contrôle des finances publiques au Mali. Droit. Université de Strasbourg
situation n’est pas identique d’un pays à un autre ni d’une période à une autre mais dans les
pays démocratiques, les Parlements jouent un rôle important dans le contrôle des finances
publiques, en tout cas dans les textes. Jean-Luc ALBERT observe que « ce schéma
constitutionnel faisant du Parlement l’acteur prépondérant en matière financière sera
progressivement intégré par nombre d’Etats » dont la Suède en 1809, le Portugal en 1822, le
Brésil en 1824, la Belgique en 1831, les Pays-Bas en 1848, la Russie en 1850 et le Japon en
1889 : « la consécration parlementaire s’est largement répandue ». Pour la France, il
constate que dans le contrôle des finances publiques le Parlement qui jouait un rôle
prépondérant au XIXème siècle a vu son importance décliner après la Première Guerre
mondiale. De même, Raymond MUZELLEC estime que dans la même période le Parlement
français a évolué de la prééminence à l’affaiblissement et au rééquilibrage avec le
Gouvernement, le rééquilibrage consécutif à la LOLF s’étant traduit « par un encadrement du
monopole gouvernemental et le renforcement de la responsabilité parlementaire ».9
Au Mali, le contrôle parlementaire est demeuré élémentaire de 1960 à nos jours par l’effet
combiné de facteurs politiques et de facteurs juridiques, les premiers étant plus prégnants que
les seconds.
Au plan politique, l’Assemblée nationale n’a guère bénéficié de conditions favorables à une
intense activité parlementaire aussi bien législative que de contrôle. De graves crises
politiques ont souvent perturbé la vie du Parlement malien généralement monocolore.
De 1960 à nos jours, l’Assemblée nationale a été dissoute quatre fois, en 1968, en 1991, en
1997 et en 2020 chaque fois dans un contexte national en ébullition.
La stagnation de l’activité parlementaire est aggravée par le phénomène récurrent du fort taux
de renouvellement des députés à chaque scrutin. Le niveau de renouvellement, de plus de
80%, provoque une instabilité qui ne favorise ni la continuité des initiatives ni même la
maîtrise de leurs missions et rôles par les députés10. L’Assemblée nationale elle-même le
déplore en ces termes : « En 2014, l’Assemblée nationale a été renouvelée à près de 85%
avec donc une majorité de députés qui entament leur premier mandat. Le taux élevé de
renouvellement, s’il témoigne de la vitalité de la démocratie au Mali, n’en constitue pas
moins un défi pour l’Assemblée Nationale». En tout cas, l’activité parlementaire reste
rudimentaire avec une focalisation sur la fonction législative au détriment de la fonction de
contrôle, déséquilibre accentué par certains facteurs juridiques.

9
Moumouni Guindo. L’évolution du système de contrôle des finances publiques au Mali. Droit. Université de Strasbourg
10
Moumouni Guindo. L’évolution du système de contrôle des finances publiques au Mali. Droit. Université de Strasbourg
Les facteurs juridiques du sous-développement du contrôle parlementaire sur la gestion des
finances publiques relèvent tant de l’insuffisante affirmation du principe de la responsabilité
du Gouvernement devant le Parlement que des déficiences dans la mise en œuvre des moyens
d’exercice de ce principe.
La Constitution du 25 Février 1992 ainsi que les lois fondamentales qui l’ont précédée
manquent de fermeté en matière de contrôle des finances publiques car elles ne comportent
pas de dispositions claires comme celle que formule l’article 24 de la Constitution française
en ces termes : «Le Parlement vote la loi. Il contrôle l'action du Gouvernement». Cette
insuffisance fondamentale empêche la formation et le renforcement de l’intérêt et de la
conscience des députés dans la nécessité de développer des mécanismes et des pratiques
susceptibles de consolider leurs rôles et implications dans le contrôle des finances publiques.
De toute façon, l’analyse montre que les mécanismes de contrôle existants ne sont que
faiblement mis en œuvre.
Bakary CAMARA le signale et le déplore : « L’une des particularités de l’AN du Mali est que
les questions orales et écrites pratiquées par les Députés depuis 1992 dans leur fonction de
contrôle n’ont pas de fondement constitutionnel.»11
Comblant cette lacune, le règlement intérieur de l’Assemblée nationale prévoit depuis 1992 la
création de commissions parlementaires. Outre les commissions générales, il peut y avoir des
commissions spéciales ou d’enquête. Les commissions générales sont permanentes. Elles ont
des compétences qui recouvrent les attributions spécifiques d’un ou de plusieurs ministre.
Par ailleurs, l’Assemblée nationale et le Gouvernement n’ont jamais fait preuve
d’empressement dans l’adoption des lois de règlement. Cette situation n’est pas spécifique au
Mali comme en témoignent la plupart des auteurs français s’étant penchés sur le sujet. La loi
de règlement est un acte essentiel dans l’activité parlementaire. Pourtant, la pratique
d’adoption de ce texte montre le peu d’engouement des parlementaires à l’égard de ces lois de
finances.
De 1960 à 1986, il n’y a pas eu de loi de règlement au Mali. La première loi de règlement fut
votée en 1986 pour le budget de l’exercice de 1982, soit quatre ans après le vote de ce budget
et vingt-six ans après l’institution des lois de règlement par l’ordonnance n° 46-bis du 14
novembre 1960. Pour la période de 1986 à 2019, l’analyse met en évidence des retards
considérables. Si la loi de règlement du budget de 1989 est intervenue en 1990 dans le délai
légal, des retards de plusieurs années sont fréquents. Le retard le plus long a été de onze ans

11
Moumouni Guindo. L’évolution du système de contrôle des finances publiques au Mali. Droit. Université de Strasbourg
en 2007 pour le budget de 1996. Le délai moyen observé est de cinq ans environ. En général,
plusieurs lois de règlement ont été adoptées ensemble le même jour plusieurs années après
l’exécution des budgets concernés. Les lois de règlement votées ensemble sont au nombre de
deux en 1986 et 2009, trois en 1990 et 2000 et neuf en 2007. Manifestement, ce sont des
vagues de régularisation par pure forme. Les limites étant détaillées, il nous paraît necéssaire
de faire des propositions d’amélioration.

B. Les propositions d’amélioration du contrôle parlementaire

Au regard des faiblesses constatées dans le contrôle parlementaire, nous faisons un certain
nombre de propositions qui pourraient contribuer à l’améliorer. Il s’agit de :

 Dynamiser les contrôles traditionnels du Parlement sur le budget de l’Etat :


Les analyses faites ci-dessus ont montré que l’Assemblée nationale accomplit ses fonctions
traditionnelles avec peu d’entrain. Pour le succès de la politique budgétaire, elle doit effectuer
avec plus d’intérêt les contrôles qui lui incombent tant dans les processus d’adoption des lois
de finances qu’en dehors de ces processus.

 Accorder de l’intérêt aux travaux relatifs à l’adoption des lois de finances :

Il est essentiel que l’Assemblée nationale accorde un intérêt réel aux contrôles qu’elle doit
effectuer dans les processus d’adoption des lois de finances. L’Assemblée nationale peut aussi
effectuer des contrôles indirects sur la gestion des finances publiques à travers certains de ses
pouvoirs qui ne sont pas liés aux processus législatifs.
 Réaliser les contrôles extérieurs à l’adoption des lois de finances :
L’Assemblée nationale peut contrôler indirectement les finances publiques en exerçant ses
pouvoirs généraux comme l’adoption d’une déclaration de politique générale, le vote d’une
motion de censure, l’interpellation du Gouvernement, les questions écrites ou orales aux
membres du Gouvernement ainsi que les missions d’enquête ou d’information. Cette
panoplie, qui est d’usage modéré présentement, devrait retrouver de la vigueur. L’Assemblée
nationale devrait en effet effectuer plus de missions d’information et d’enquête tout en
s’assurant de la prise en compte effective de ses recommandations.
 Intensifier l’utilisation des nouveaux outils de contrôle :
La directive de l’UEMOA relative aux lois de finances, transposée au Mali dans la loi du 11
juillet 2013, consacre les « pouvoirs nouveaux des Assemblées nationales ». Ces pouvoirs
nouveaux contribuent à « revaloriser le rôle du Parlement dans une démarche
d’amélioration de la démocratie financière ». A travers le débat d’orientation budgétaire, les
parlementaires obtiennent des prérogatives dans la préparation du budget d’Etat alors
qu’auparavant ils n’avaient aucun rôle à cette étape. Ils disposent, en outre, de nouveaux
outils de contrôle pendant l’adoption des lois de finances et leur exécution. Ils devraient
exercer effectivement leurs nouvelles prérogatives.
 Développer une fonction publique parlementaire apolitique :
La prise de conscience par le Parlement de sa capacité à restreindre ses propres propensions à
dépenser le poussera à tenter de poursuivre cet effort d’assainissement au niveau des
administrations. Il s’agit de :

 Créer une commission de vérification des comptes des ministres qu’incombera la


tâche de vérifier la conformité de l’exécution des dépenses publiques. Cette
commission exerce son contrôle après coup, il s’agit donc d’un contrôle a posteriori
dont on connait les limites. Le but de cette commission est essentiellement de
rapprocher dans le temps l’acte de vérification (la comptabilité des ministères) de la
vérification ;
 Faciliter l’accès aux informations économiques, financières et budgétaires devrait être
développé dans toutes ses formes.
 Faire recours à des experts de haut niveau (universitaires, juristes, économistes… .)

La technicité de l’analyse des lois de finances et la complexité des documents économiques et


financiers imposent le développement d’une capacité d’expertise. Cette fonction publique
devrait être régie par un statut garantissant la stabilité de fonction.
 Organiser des sessions de formations à l’endroit des parlementaires et les
assistants parlementaires :
Revoir les critères d’éligibilité des candidats aux élections législatives tout en insérant le
critère de niveau académique. Ce qui facilitera la compréhension des élus lors des sessions de
formation. Elle devrait porter en priorité sur la maitrise des processus budgétaire.
 Exiger du gouvernement le respect du délai de dépôt de la loi de règlement :
Le parlement devrait interpeller systématiquement le gouvernement au cas où celui-ci ne
respecte pas le délai de dépôt de la loi de règlement.
Conclusion :

En somme, nous déduisons que la fonction du contrôle de l’action gouvernementale dans le


cadre de l’exécution de la loi des finances occupe une place très importante dans les textes
portant nouveau code harmonisé des finances publiques.

Les moments de contrôle de la loi de finances qui sont a priori, concomitant et à postériori
permettent aux parlementaires de savoir que l’agent public affecté à la gestion des deniers
publics se trouve dans une situation objective de préposé au service de la communauté
publique.

Les pouvoirs de contrôle du Parlement sont confiés, pour l’essentiel, aux membres
des commissions des Finances. « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l'action du
Gouvernement. »

Cependant, nous relevons certaines insuffisances fondamentales empêchant la formation et le


renforcement de l’intérêt et de la conscience des députés dans la nécessité de développer des
mécanismes et des pratiques susceptibles de consolider leurs rôles et implications dans le
contrôle des finances publiques. De toute façon, l’analyse montre que les mécanismes de
contrôle existants ne sont que faiblement mis en œuvre. C’est pourquoi, il y a lieu de
renforcer les mécanismes de contrôle de manière efficace, efficiente et pertinente pour une
meilleure utilisation des deniers publics et au bonheur du peuple.
BIBLIOGRAPHIE :

 La constitution du 22 Juillet 2023 ;


 La loi n°2013-028 du 11 juillet 2013 ;
 Nicaise Médé, Finances publiques espace UEMOA/UMOA, édition Harmattan-
Sénégal, 2016, page 323 ;
 Moumouni Guindo. L’évolution du système de contrôle des finances publiques au
Mali. Droit. Université de Strasbourg, 2020 page 140 ;
 Sébastien Kott, Etudes générales, le contrôle des dépenses engagées, Evolution d’une
fonction.

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