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Panorama de l’histoire littéraire maghrébine
A/ Le contexte d’émergence
À partir de 1830, nombreux sont ces écrivains qui prennent l’Algérie pour un
« nouvel orient ». Leurs écrits reflètent un exotisme construit autour de clichés
hérités du romantisme « parisien » et de visions propres à chaque écrivain. Vision
idyllique d’une terre sans homme, idées déjà toutes faites sur les Arabes, exaltation
du paysage ou libération des sens sont quelques-unes des multiples facettes d’une
littérature « sur » l’Algérie qui a produit, plus tard, une contre-littérature.
Les plus importants sont :
-Eugène Fromentin, Un été dans le Sahara, (1857).
Un été dans le Sahel, (1859).
Fromentin précise qu’il a été frappe par le “pittoresque des choses, hommes et
lieux” et ce qui était important pour lui c’était de « décrire au lieu de raconter,
peindre au lieu d’indiquer ».
-Alphonse Daudet, Tartarin de Tarascon, 1872).
Par la caricature, il démystifie l’exotisme de Fromentin, mais crée un autre
exotisme « réaliste).
-André Gide, Les nourritures terrestres, (1887).
L’immoraliste, (1902).
Si le grain de meurt, (1927).
-Montherlant, La Rose des sables, (1932).
Le début du XXème siècle est marqué par la naissance du roman colonial dans un
contexte purement idéologique de justification de la colonisation.
Face aux écrivains de passage, venus de la métropole, une génération d’écrivains
français, implantés en Algérie, réclament une « autonomie esthétique », car « seule
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la littérature produite par la colonie exprime la colonie ». Ils revendiquent le droit
sans partage « d’analyser l’Algérie » et créent un mouvement littéraire qu’ils
baptisent « Algérianisme »1.
Les Algérianistes dénoncent « le faux Orientalisme », « le clinquant romantisme »
et l’exotisme béat des écrits des «voyageurs ». Ils prennent appui, tout en se
démarquant, de la thèse de la latinité développée par Louis Bertrand qui, sans être
le fondateur du mouvement littéraire, a exercé une grande influence sur les
Algérianistes.
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Le Pr Martin, petit bourgeois d’Alger (1935).
Ces quatre écrits forment « les romans de la patrie algérienne ». Randau, dans
ses écrits fictionnels comme dans ses préfaces à des recueils (De treize Poètes
algériens, 1920), défend l’existence d’une littérature autonome : « Il doit y avoir une
littérature nord-africaine parce qu’un peuple qui possède sa vie propre doit posséder
aussi une langue et une littérature à lui ».
Pour Randau, le roman colonial « dégage des valeurs d’humanité » face
auxquelles l’Européen et l’indigène sont égaux :
« Le rôle de la colonisation, écrit-il, est de convertir à notre mentalité avec tact,
mesure et intelligence, des peuples encore à l’état barbare ».
« Qu’à nouveau, l’imperium des races latines gouverne le monde ! Et que la lex
implacable et élégante domine à jamais les peuples barbares ».
Randau intègre les Algériens autochtones dans sa vision de la race nouvelle, mais
en les inhibant. Il les juge décadents. Ils sont « un crépuscule » alors que lui se
proclame « la perpétuelle aurore de l’esprit ».
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Durant la même période, les partis nationalistes algériens se développent et
s’organisent autour de revendications qui vont du rattachement avec la France
(avec des droits pour les Algériens) à l’indépendance totale de l’Algérie.
Contre les Français d’Algérie qui demandaient à Paris de les aider à défendre
leurs intérêts et à étouffer les revendications des nationalistes,, un groupe de
Français, essentiellement des intellectuels de gauche, alliés au Front Populaire
Français, et nés en Algérie, se regroupent en se proclamant Algériens. Est Algérien
celui qui est né sur le sol d’Algérie, sans différence de races ni de religions. Ils se
proclament hommes nouveaux appartenant à « une race née du soleil et de la
mer » (Camus).
Ces intellectuels fondent à partir de 1935 l’École d’Alger. Gabriel Audisio est le
premier à employer cette expression, reprise par Albert Camus sous le nom d’École
Nord-Africaine des lettres.
Ce courant va à l’encontre de la thèse de Louis Bertrand. La Méditerranée qui
inspire leurs œuvres, n’est plus celle des Algérianistes. Elle est grecque plutôt que
latine. Loin d’y voir une revendication juridique, « Mare Nostrum », « notre mer » est
le réceptacle d’une sensualité qui, avec le soleil, devient le lieu de la vie, de la joie
et du bonheur.
Edmond Charlot : son entreprise éditoriale fut d’un grand apport à ce courant. Il
lance une collection « Méditerranée » et une revue Rivages.