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Fsjes -Salé-

Pr. EL ANEBRI Hasna

Introduction à l’étude du droit


S3/ Sciences Economiques

Introduction :
Comment faire l’introduction d’une matière qui est en elle-même une introduction ?
L’introduction à l’étude du droit est une matière qui se présente en elle-même une introduction générale à
la compréhension, à l’analyse et à l’étude du droit en tant que discipline unifiée.
Les définitions (les concepts) et l’historique sont deux éléments très importants en droit et ils vont
constituer l’ossature principale de cette introduction. Dans ce sens, cette introduction va se contenter
d’apporter un éclairage succinct sur la définition du droit, son rapport à l’économie et enfin, l’histoire du
droit et son évolution dans le temps.
C’est quoi l’introduction à l’étude du droit ?
Il s’agit d’une matière qui est enseignée au début des études en droit. Elle est destinée à faire acquérir aux
étudiants les grands principes fondamentaux du droit en général. Elle permet aussi aux non juristes de
s’initier aux axes principaux nécessaires pour comprendre la matière juridique.
Il s’agit d’une matière qui comprend l’ensemble des connaissances et des principes de base pour pouvoir
avoir une vision d’ensemble de la chose juridique. Elle permet, en outre, à l’étudiant de se lancer dans les
études juridiques avec une vision généralisée du fondement du droit.
Force est de constater que l’introduction à l’étude du droit est une matière d’ordre général, transversal.
Autrement dit, elle comprend et doit contenir tous les éléments de base pour comprendre le droit,
connaitre son positionnement par rapport aux autres disciplines, sa finalité ainsi que ses origines.
Ainsi, l’objectif de ce cours est de comprendre le droit, d’avoir une base de données des différents
éléments qui constituent cette matière. De ce fait à la fin du cours, l’étudiant est censé connaitre
l’ensemble des outils et des mécanismes nécessaires pour maitriser les notions générales du droit. Il doit
en outre, connaitre toutes les matières et disciplines qui constituent la matière juridique selon les deux
branches respectives qui constituent l’ossature du droit, à savoir le droit public et le droit privé.
Mais, si elle est destinée à initier l’étudiant à la matière juridique, elle permet aussi de donner un aperçu
sur l’histoire et les sources du droit.

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- Définition du droit
« Le droit est l'ensemble des règles et des normes générales qui régissent les rapports entre les individus et
définissent leurs droits et prérogatives ainsi que ce qui est obligatoire, autorisé ou interdit.
Le droit est susceptible de voir son exécution appliquée de manière contraignante par l'intervention de
la puissance publique, c'est-à-dire de l'État. C'est ce qui distingue une règle de droit d'une règle de
déontologie, de morale ou de politesse ».
- Interférence entre le droit et l’économie
Pourquoi enseigner le droit aux économistes ?
L’intérêt des économistes pour l’objet juridique n’est pas fondamentalement récent et s’incarnait déjà
depuis des siècles. Et l’on est en mesure de s’interroger pourquoi enseigner le droit à des économistes et
inversement pourquoi enseigner la science économique à des juristes.
Il semble qu’une interdépendance existe entre le droit de manière générale et la science économique de
manière particulière.

 La relation entre le droit et l’économie n’a cessé de se développer notamment avec l’apparition
d’un droit dit économique. Cette notion de droit économique a pour objectif de faire apparaître
certaines interactions importantes entre les normes juridiques et le domaine économique. En effet,
le droit économique est le droit destiné à régir de façon directe l’économie dans un pays donné. On
entend par là, plusieurs domaines comme la concurrence, la bourse, la création, gestion et
fonctionnement des sociétés, le développement de l’investissement etc…

 L’on peut qualifier cette relation entre le droit et l’économie d’intérêts réciproques. Le droit
constitue l’un des instruments de la politique économique, inversement, le facteur économique
joue un rôle très important dans l’élaboration et l’évolution du droit (droit privé et droit
public /droit interne et droit international).
A titre d’exemple, il y a des décisions qui ne peuvent être prises qu’à travers un texte de loi qui est un texte
juridique. Dans ce sens, pour réglementer un secteur particulier, mettre des mesures spécifiques ou
protéger certains secteurs, la loi élément essentielle du droit, intervient pour régir et réglementer le
domaine économique.
Dans ce sens, la constitution qui est la loi fondamentale du pays dispose dans son article 71 que sont du
domaine de la loi :

 Le régime fiscal et l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impôts ;


 Le régime juridique de l'émission de la monnaie et le statut de la banque centrale ;
 Le régime des douanes ;
 Le régime des obligations commerciales et le droit des sociétés ;
 Les droits réels et les régimes des propriétés immobilières publique, privée et collective ;
 Le régime des transports ;
 Les relations de travail, la sécurité sociale, les accidents de travail et les maladies professionnelles ;
 Le régime des banques et des sociétés d'assurances.

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Exemples :
- Le développement de l’investissement aussi bien public que privé a un impact important sur
l’économie en termes de création de postes d’emploi, en termes de développement des échanges
commerciaux au niveau national mais aussi sur le plan international (exportations et importations).
- Un autre exemple, pour maitriser la politique des prix (libéralisation ou fixation des prix), contrôler
les situations de monopoles, un texte juridique a été mis en place pour réglementer la concurrence,
à savoir, la loi relative à la liberté des prix et de la concurrence1.

En plus du droit économique, le concept d’entreprise constitue un lien entre le droit et l’économie, d’où
l’intérêt de connaitre la notion d’entreprise.
La notion d’entreprise :
L’entreprise est ce que l’on met à exécution, la mise à disposition d’un projet, ce que l’on propose
d’entreprendre.
Elle peut également être considérée comme la combinaison de plusieurs éléments : travail, personnel,
structures organisées, capital financier ; afin de créer de la plus-value de la richesse.
Il y a lieu de présenter la notion juridique de l’entreprise et la conception économique de celle-ci.
La notion juridique de l’entreprise
D’un point de vue juridique, l’entreprise a plusieurs significations. En effet, elle peut désigner :
- Une activité : Le code de commerce accorde la qualité de commerçant sur la base de l’exercice d’un
certain nombre d’activités énumérées par les articles 6 à 8 du code de commerce.
- Une personnalité juridique : L’entreprise dispose d’une identité propre distincte de la personnalité
des personnes qui la composent ou qui l’on créé. D’où le concept de la personnalité morale avec toutes les
conséquences qui en découlent.
- Une organisation : L’entreprise est une organisation qui comporte plusieurs structures et qui
travaille dans le cadre d’une hiérarchie.
La notion économique de l’entreprise
L’entreprise pour les économistes est la cellule de base de l’activité économique. Dans une conception
économique de celle-ci :
- Des moyens : l’entreprise est la mise en harmonie de moyens humains, matériels, intellectuels,
industriels ou autres ;
- Un objectif : l’existence de l’entreprise elle-même est liée à un objectif de créer de la richesse, une
plus-value, la production ou la distribution de biens ou de services, la réalisation de profits.

1
La loi n° 1041-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence promulguée par le dahir n°1-14-116 du 30 juin 2014. Elle a
abrogé la loi n° 06-99 portant le même nom et qui a été elle-même adoptée en 2000.
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L’entreprise est une réalité du monde économique, dans ce sens elle peut prendre plusieurs formes
juridiques : une forme sociétaire (sociétés anonyme, société à responsabilité limitée … etc), groupe à
caractère national ou international ou autres.
Dans les deux conceptions économique et juridique de l’entreprise, celle-ci doit avoir la personnalité
morale et l’autonomie financière.
Ainsi, la personnalité morale renvoie à la personnalité juridique dont elle doit disposer. Elle pourra du fait
de cette personnalité disposer de biens qui lui sont propres, avoir un siège social en son propre nom et
principalement être distinguée de ses actionnaires, fondateurs ou dirigeants en cas de difficultés
financières éventuelles.
L’autonomie financière quant à elle, elle suppose que l’entreprise dispose d’un patrimoine qui lui est
propre et qu’elle peut exploiter pour le fonctionnement de son activité.
- Les catégories d’entreprises
A ce titre, l’entreprise peut prendre plusieurs formes : entreprise publique, entreprise privée, entreprise
nationale, entreprise étrangère.
L’entreprise publique : Est une entreprise qui est détenue en totalité ou en majorité par un organisme
public (Etat, Collectivité Territoriale, Etablissement Publics). Du fait de cette détention au capital de
l’entreprise, lesdits organismes publics peuvent exercer une influence sur le fonctionnement de
l’entreprise et la prise de décision au sein des organes délibérants de celle-ci.
Reste à signaler que la qualification d’entreprise de publique ne renvoie pas à l’application du droit public,
puisque c’est la forme juridique de l’entreprise (société de droit privé) qui va dicter la réglementation
applicable et non la nature des détenteurs de capital.
L’entreprise privée : A contrario de la définition de l’entreprise publique, l’entreprise privée est celle qui
est détenue par des particuliers, par d’autres entreprises privées ou par des sociétés.
Dans ce sens, une entreprise privée se présente comme une entreprise qui appartient en totalité ou en
majorité à des personnes physiques ou morales autres que les organismes publics.
L’entreprise nationale : Chaque entreprise créée doit disposer du fait de sa personnalité morale de la
nationalité du pays dans lequel elle est située. Ainsi les conséquences de cette nationalité ont un lien avec
les obligations comptables, fiscales et financières de l’entreprise mais aussi avec la réglementation qui lui
sera applicable.
L’entreprise étrangère : Elle peut également être qualifiée de multinationale. Il s’agit de toute entreprise
qui produit sur un territoire autre que son territoire d’origine.

Histoire du droit

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Toute compréhension du droit est considérée comme nécessairement historique 2. L’étude historique du
droit conduit à la compréhension de l’évolution du droit dans le temps.
Ainsi, en plus de l’étude du droit au niveau de l’espace, que l’on appelle couramment entre juristes, le droit
comparé, l’étude du droit dans le temps fait relever ses origines ainsi que les mutations qu’il a connues.
Histoire du droit au niveau mondial ou naissance du droit ou encore évolution du droit
Si la création du droit remonte à 2000 avant Jésus-Christ 3, le droit romain peut être considéré comme le
premier système juridique similaire au droit que l’on retrouve actuellement 4.
Histoire du droit au Maroc
Le droit au niveau du Royaume du Maroc est caractérisé par une évolution certaine et marquée par
l’empreinte de la religion islamique et du droit romain.
L’influence du droit français sur le droit marocain remonte à la période du protectorat. En effet, il est
affirmé que plusieurs textes juridiques qui ont été adoptés pendant cette période étaient l’œuvre du
colonisateur français et sont de ce fait calqués sur la législation française. L’exemple le plus parlant est
celui du dahir relatif aux obligations et contrats de 1913 5 qui a été calqué sur le code napoléon (le code
français).
Après l’avènement de l’indépendance, le Royaume en tant que pays de droit civil a opté pour l’adoption de
plusieurs textes juridiques dont la plupart sont restés imprégnés par cette influence du droit occidental,
mais également par les dispositions des conventions internationales qui sont ratifiées par le Royaume.

2
« L’histoire forme la moitié de la partie scientifique du droit ».
3
A travers notamment le code de Hammourabi.
4
Cependant, il reste difficile de pouvoir dater avec précision le début exact de la pensée juridique romaine.
5
Dahir qui est toujours en vigueur bien qu’il ait été modifié à certaines reprises.
5
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Plan du cours

Première partie La distinction entre le


droit public et le droit
privé.

Deuxième partie Les sources du droit.

Troisième partie Les règles du droit.

Quatrième partie Les sujets de droit.

Cinquième partie L’organisation judiciaire.

Première partie : La distinction entre le droit public et le droit privé

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Première section : Le droit public


Deuxième section : Le droit privé

Première section : Le droit public

Le droit public a pour objet l’organisation des organismes publics, à savoir, l’Etat, les collectivités
territoriales et les établissements publics.
Le droit public est l’ensemble des règles de droit qui régissent l’organisation et le fonctionnement de l’Etat
et de tous les autres organismes publics (établissements publics et collectivités territoriales).
Le droit public régit leur fonctionnement, leurs attributions, autrement dit toute leur existence depuis le
début et jusqu’à la fin6.
Le droit public régit, en outre, les relations que les organismes publics peuvent avoir entre eux et les
relations qu’ils peuvent avoir avec les personnes privées (personnes physiques et personnes morales).
Le droit public connait deux grandes subdivisions, le droit public interne et le droit public international.
Le droit public interne comprend les matières suivantes :
- Le droit constitutionnel ;
- Le droit administratif ;
- Les sciences politiques ;
- Les finances publiques.
Le droit public a pour objet l’organisation de l’Etat, des collectivités territoriales et des établissements
publics.
D’autres matières font également partie du droit public, à savoir, le droit de l’urbanisme, le droit rural, le
droit des collectivités territoriales … etc.
Le droit public international a pour objet de régler les rapports existants entre les Etats ou les organisations
internationales.
Le droit public international comprend les matières suivantes :
- Les relations internationales ;
- Le droit des organisations internationales ;
- Les droits de l’Homme.

A- Le droit public interne


6
A titre d’exemple, un établissement public est créé par un texte de loi et dans ce même sens, seul un texte de loi de la même
valeur juridique peut mettre fin à la vie de cet établissement public (c’est le principe de parallélisme de forme).
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Les matières les plus importantes qui constituent le bloc principal du droit public interne sont
principalement le droit constitutionnel et le droit administratif.
1- Le droit constitutionnel
Le droit constitutionnel est une branche du droit public. Il comprend et rassemble toutes les règles
relatives à la forme de l’Etat, et les règles qui déterminent l’organisation politique de l’Etat.
Il met la lumière sur les trois pouvoirs, à savoir :

 Le pouvoir législatif ;
 Le pouvoir exécutif ;
 Et le pouvoir judiciaire.
La source principale du droit constitutionnel est la constitution7 qui est la loi fondamentale du pays.
Définition de la constitution : Est la loi fondamentale du pays, elle est adoptée par référendum, elle fixe le
régime politique applicable ainsi que les principaux droits et libertés des citoyens. Toute modification
pouvant impacter le texte de la constitution est soumise aux mêmes règles que celle de son adoption. La
constitution actuelle au Royaume du Maroc a été adoptée en 2011.
2- Le droit administratif
Le droit administratif est la branche du droit qui traite des droits et des obligations de l’administration,
ainsi que l’organisation et du fonctionnement des organismes qui relèvent de l’administration tels que les
régions, les communes, les provinces… etc.
Le droit administratif a pour objet les rapports qui naissent entre :
- Les personnes morales de droit public entre elles ;
- Les personnes morales de droit public et les autres personnes morales ou physiques de droit privé.

3- Les finances publiques


Les finances publiques sont une discipline de droit public financier. Au niveau de la doctrine classique, les
finances publiques comprennent :

 Le droit fiscal ;
 Le droit de la comptabilité publique ;
 Le droit budgétaire.
Les finances publiques se présentent comme une discipline qui étudie les recettes et les dépenses des
organismes publics (Etat, collectivités territoriales, établissements publics).
Il est également question des ressources et des charges des organismes publics qui sont inscrites dans leur
budget annuel.
L’intérêt accordé à cette matière permet d’évaluer l’équilibre entre les recettes et les dépenses, les
ressources et les charges.

7
La constitution a été adoptée en 2011.
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4- Les sciences politiques


Contrairement au droit constitutionnel et au droit administratif, la science politique est une science
relativement récente. Elle remonte en effet, à la fin du XIX ème siècle et début du XX ème siècle. D’ailleurs, elle
s’est développée dans le sillage et à l’ombre des deux matières susmentionnées.
La science politique, également appelée politologie ou encore sociologie politique, est une science
juridique qui a pour objet d’analyser les phénomènes politiques en utilisant en cela les sciences sociales.
Elle utilise des sondages, des enquêtes afin de pouvoir rendre compte des phénomènes d’opinion, de
l’importance des groupes de pression et des changements et de l’évolution des orientations idéologiques
contemporaines.
Enfin, reste à signaler que la science politique incorpore et se fonde sur d’autres disciplines, comme
l’histoire politique, la psychologie politique et même la philosophie.

B- Le droit international public


Le droit international public s’intéresse à étudier les relations qui naissent entre Etats au fil du temps. De
ce fait, il s'intéresse à l’historique de ces relations, à leur évolution et même lorsque ces relations
présentent un caractère conflictuel.
Le droit international étudie également le droit des organisations internationales et régionales 8. Leur
création, leur fonctionnement, les modalités de leur financement, les Etats qui y sont membres.
Le droit international public comprend les matières suivantes :
- Les relations internationales ;
- Le droit des organisations internationales ;
- Les droits de l’Homme.

Deuxième section : Le droit privé


A l’instar du droit public, le droit privé se subdivise en droit privé interne et droit privé international.

A- Le droit privé interne

8
Il existe plusieurs organisations internationales et régionales à caractère territorial ou à caractère thématique.
- L’organisation des nations unies ;
- L’organisation de l’unité africaine ;
- L’union européenne ;
- La commission des nations unies pour le droit commercial international ;
- L’organisation mondiale de la santé ;
- L’agence internationale de l’énergie.
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Le droit civil, le droit commercial, le droit pénal et le droit de la consommation constituent les matières
principales du droit privé interne. A côté on trouve, le droit de la procédure civile, le droit de la procédure
pénale qui constituent des matières procédurales à caractère technique.

1- Le droit civil
C’est la matière la plus ancienne du droit privé et cette ancienneté lui accorde une importance capitale. En
effet, depuis le droit romain, l’ensemble du droit était rapporté au droit civil. A ce titre, il y a même une
certaine confusion entre le droit civil et le droit privé. Il s’agit d’une problématique de terminologie et de
conceptions au niveau de la doctrine qu’il y a lieu de dépasser.
Ainsi, le droit civil peut être considéré comme le droit commun, à savoir le droit applicable à tous les
citoyens (plus précisément à toutes les personnes se trouvant sur le territoire national). Il permet de régler
les relations qui peuvent naitre entre les citoyens, entre les personnes de manière générale.
Au Maroc, le droit civil est régi par le dahir formant code des obligations et des contrats qui a été adopté et
promulgué en 1913.
Le droit civil est constitué de plusieurs sous-sections :
- Le droit des biens ;
- Le droit des obligations ;
- Le droit des sûretés ;
- Le droit des baux locatifs ;
- Le droit des constructions ;
- Le droit des sociétés civiles ;
- Le droit des professions civiles.

2- Le droit commercial
Le droit commercial est une branche du droit privé (plus précisément du droit des affaires) qui, par
dérogation au droit civil, réglemente de manière spécifique certaines activités de production, de
distribution et de services. Le droit commercial est une discipline autonome, indépendante du droit civil
dont il s’est détaché.
Le droit commercial régit les rapports juridiques qui naissent à l’occasion de l’exercice de l’acte
commercial. Le droit commercial réglemente la profession commerciale exercée à titre individuel par des
personnes physiques ou exercée sous formes de sociétés ayant la personnalité morale. Le droit commercial
est l’ensemble des règles applicables aux actes de commerce et aux commerçants (personnes physiques et
personnes morales).
Au Maroc, jusqu’aux années 90, le droit commercial était régi par une législation qui datait de la période
du protectorat (1913). Mais, en 1996, un nouveau code de commerce a été adopté qui a abrogé et
remplacé l’ancien code de 1913.

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Le droit commercial est régi par la loi n°15-95 formant code de commerce qui a été promulguée par le
Dahir n° 1-96-83 du 3 octobre 1996. Le texte est constitué de 736 articles répartis sur 5 livres se présentant
comme suit :
- Le commerçant ;
- Le fonds de commerce ;
- Les effets de commerce ;
- Les contrats commerciaux ;
- Les mesures de prévention et de traitement des difficultés de l'entreprise.

3- Le droit pénal
Également appelé droit pénal général ; il est la branche du droit qui réunit l'ensemble des règles de
conduite imposées par la société aux citoyens sous peine de sanction. Il détermine les actes,
comportements ou conduites antisociales qui constituent les infractions, et définit la réaction de la société,
appelée sanction pénale ou peine, à ces manquements. La personne qui commet une infraction est
appelée un délinquant.
Le droit pénal a évolué et s’est subdivisé au fil du temps en plusieurs sous branches. Ainsi, on trouve, le
droit pénal spécial, le droit pénal général, la procédure pénale, la criminologie.
- Le droit pénal général comprend les règles applicables à toutes les infractions pénales : répression
de la tentative, application de la loi dans le temps et dans l’espace, la récidive … etc.
- Le droit pénal spécial regroupe les règles spécifiques à chaque infraction, qu’il s’agisse de sa
définition (conditions préalables, éléments constitutifs) ou de sa répression (règles de procédure
applicables, peines encourues…).
- La procédure pénale étudie la manière de poursuivre et de juger l’auteur d’une infraction.
- La criminologie étudie le phénomène criminel à la fois dans ses causes et dans les remèdes que l’on
peut tenter de lui apporter.

4- Le droit de la consommation
Le droit de la consommation comprend les règles applicables aux relations entre les consommateurs et les
professionnels. Ce droit cherche à protéger le consommateur dans une relation contractuelle qui est
généralement qualifiée de déséquilibrée.
Au Maroc, le droit de la consommation est régi par la loi n°31-08 du 18 février 2011 édictant des mesures
de protection du consommateur.

B- Le droit privé international

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La partie la plus importante de cette discipline s’intéresse aux rapports privés, aux rapports entre
particuliers, mais qui comportent un élément international.
Il s’agit principalement du droit de la nationalité auquel est venu s’aligner le droit des réfugiés qui est
considéré comme une discipline nouvelle, parallèle à la montée des mouvements de réfugiés depuis le
début du siècle.

Deuxième partie : Les sources du droit


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Deux visions se présentent en matière de sources du droit marocain. Soit, on adopte la qualification les
sources modernes et les sources traditionnelles d’une part :

Les sources traditionnelles Les sources modernes


- Le droit musulman ; - Les sources du droit national ;
- Le droit coutumier. - Les sources du droit
international.

Soit on adopte la qualification les sources principales et les sources interprétatives d’autre part :

Les sources principales Les sources intérprétatives


- La religion ; - La doctrine ;
- La législation ; - La jurisprudence.
- La coutume ;
- Les conventions internationales.

Par sa nature même, la coutume est une source de droit dont la création échappe à toute autorité
publique. L’on va se contenter d’étudier les sources du droit contemporain, à savoir, la législation,
la doctrine et la jurisprudence.

La législation

En ce qui concerne les spécificités de la législation, il y a lieu d’aborder les techniques juridiques
suivantes : la légistique, la codification, et enfin la légifération.
En effet, la législation au Royaume du Maroc, se distingue par certaines spécificités particulières,
dont le bilinguisme (utilisation de deux langues l’arabe et le français), d’où la nécessité et
l’obligation de la traduction.
Auparavant, il y a lieu d’aborder l’importance de connaitre la différence entre le système civiliste et
le système de Common Law. En effet, il existe deux traditions juridiques majeures dans le monde,
la « Common Law » et le « système de droit civil ».
- L’expression « Common Law » désigne les principaux aspects suivants :

 Le système juridique de l’Angleterre et des pays qui ont reçu le droit anglais (les pays
anglo-saxon) par opposition aux systèmes juridiques civilistes, principalement ceux qui
tirent leur origine du droit romain (pays de droit civil) ;
 L’ensemble des règles d’origine jurisprudentielle à l’intérieur d’un régime de « Common
Law », par opposition aux règles créées par des dispositions législatives (textes écrits).

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- Le système civiliste : Issu du droit Romain, c’est le système qui est adopté par le
Royaume du Maroc. Le système de droit civil est un régime juridique codifié qui tire son
origine du droit romain.
Les caractéristiques du système de la Les caractéristiques du système civiliste
Common law

- Il n'existe pas toujours de constitution écrite ou - Il existe généralement une constitution


de lois codifiées ; écrite ainsi que des codes et lois
particulières (par ex. Code civil, Code pénal
- Les décisions judiciaires ont force exécutoire : et codes qui couvrent le droit des sociétés,
les décisions de la plus haute instance judiciaire le droit administratif et le droit fiscal) qui
peuvent généralement être invalidées par cette inscrivent les droits et devoirs fondamentaux
même instance uniquement, ou par la ;
législation ;
- Seuls les textes législatifs sont considérés
- Liberté contractuelle étendue : quelques comme obligatoires pour tous. La
dispositions sont implicites au contrat en vertu jurisprudence a moins d’importance que la
de la force obligatoire (bien que des dispositions loi bien que, dans la pratique, les juges ont
visant à protéger les consommateurs privés tendance à suivre les décisions judiciaires
puissent être implicites) ; antérieures. La cour constitutionnelle peut
déclarer certains textes inconstitutionnels
- En règle générale, tout ce qui n'est pas interdit (contraires à l’esprit de la constitution) et
par la loi est autorisé partant demander leur abrogation ou leur
modification ;

- Dans certains systèmes de droit civil,


comme en Allemagne, la doctrine influe de
manière significative sur la prise de décision
des tribunaux;

- La liberté contractuelle est moins


importante que dans un système de «
Common law » : de nombreuses
dispositions sont imposées dans le contrat
conformément à la loi et les parties ne
peuvent les écarter.

Ainsi, il ressort de la définition des deux systèmes juridiques dans le monde que la principale
différence entre les traditions juridiques de « Common Law » et de droit civil repose sur la source
principale du droit. Alors que les systèmes basés sur la « Common Law » considèrent les
décisions judiciaires comme la source la plus importante de la loi, les systèmes basés sur le droit
civil mettent particulièrement l'accent sur le droit codifié.
Définition de la législation
La législation peut être considérée comme l’ensemble des lois dans un pays déterminé. Elle
désigne un corps de lois spécifique à un pays déterminé. Ainsi, la législation est un terme qui

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s’utilise uniquement sur le plan national. On dit législation nationale relative au droit de la
concurrence, au droit des sociétés, au statut du personnel … etc.
Contenu de la législation : Au Royaume du Maroc, la législation est principalement constituée
par les textes suivants : Constitution, lois organiques, lois cadres et lois.

Tableau présentant les textes juridiques composant


la législation nationale du Royaume du Maroc

Les textes Définitions et Caractéristiques


juridiques

La Constitution Est la loi fondamentale du pays, elle est adoptée par


référendum, elle fixe le régime politique applicable ainsi que les
principaux droits et libertés des citoyens. Toute modification
pouvant impacter le texte de la constitution est soumise aux
mêmes règles que celle de son adoption. La constitution
actuelle au Royaume du Maroc a été adoptée en 2011.

La loi organique Une loi organique est une loi relative à l’organisation et au
fonctionnement des pouvoirs publics. Elle précise ou complète
les dispositions de la constitution. C’est la constitution elle-
même qui détermine les domaines qui seront régis ou fixés par
une loi organique. Dans la hiérarchie des normes, une loi
organique vient après la constitution, mais avant une loi
ordinaire (article 85 et 86 de la constitution).

La loi-cadre Dite également loi d’orientation est un texte législatif au contenu


très général qui sert de cadre à des textes d’application (des
décrets). Elle décrit un programme avec des objectifs et des
engagements.
La loi-cadre pose les principes généraux d’une réforme ou les
grandes orientations d’une politique à suivre dans un domaine
donné (la charte de l’investissement au Maroc est adoptée par
une loi-cadre).
La loi Il s’agit d’un texte juridique adopté par le parlement et dont le
domaine d’intervention est réglementé par la constitution.
D’après l’article 6 de la constitution, la loi est l'expression
suprême de la volonté de la Nation.

A- La légistique
La légistique ou la technique de rédaction des textes de droit (tous les textes présentés dans le
tableau susvisé).
Selon Boris BARRAUD, la légistique a deux sens, un sens étroit et un sens large :

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 Le sens étroit considère que la légistique désigne l’étude des modes de rédaction et de
formulation des lois ;
 Au sens large, la légistique correspond à la branche de la recherche juridique. La légistique
dans son sens large est l’analyse et la réflexion relatives aux modes de création et
d’application du droit.
Elle est alors triplement plus large : en ce qu’elle ne se borne pas à l’étude mais amène à
faire aussi œuvre propositionnelle et œuvre prospective ; en ce qu’elle inclut dans son objet
non seulement la rédaction des textes mais aussi tous les autres éléments qui participent
de la création du droit ; en ce qu’elle s’intéresse, au-delà de la création de la loi, à toute la
création et à toute l’application du droit.
On ne rédige pas un texte juridique n’importe comment. La légistique déborde donc du cadre de la
loi pour concerner tout le droit et, par exemple, un enjeu important qui la concerne réside dans
l’amélioration de la qualité formelle des décisions de justice. D’aucuns débattent de l’art et de la
manière de rédiger les jugements, du « style judiciaire »
B- La codification
L’idée de codification est à mettre en relation étroite avec la place accordée à la loi. Le XIXème
siècle est le temps de son « siècle d’or ». La codification est devenue un sujet de débat au sein de
la science juridique en particulier allemande au XIXème siècle. A partir de la seconde moitié du
XXème siècle, la méthode évolue avec la codification à droit constant.
La codification qui est dérivé du terme -code- est l’action de codifier, de réunir en un code, des
textes de lois d’un même niveau juridique, dans l’objectif de créer un système cohérent de règles.
En droit, la codification est l'action qui consiste à regrouper, à consolider et à structurer en un seul
recueil, appelé code, des éléments épars de normes juridiques existantes concernant une matière
ou un domaine donné. Elle est motivée par la volonté de rendre plus accessibles et plus
intelligibles les règles de droit en les organisant de manière cohérente et en suivant un plan
logique.
Outre la création d'un document unique dans un domaine du droit, la codification permet :
 L'actualisation du droit par l'abrogation des textes obsolètes, incompatibles avec la
Constitution ou avec des traités internationaux ;
 La mise en évidence des lacunes dans le système juridique et de préparer les réformes
visant à les combler.
On distingue trois catégories de codification : La codification officielle, la codification officieuse et
la codification privée.
 La codification officielle est celle qui est initiée par le pouvoir législatif. Cette forme de
codification est sous-entendue lorsqu’un texte dans sa dénomination officielle telle qu’il est
adopté et tel qu’il est promulgué est expressément utilisé.
 La codification officieuse, réalisée aussi par l'autorité, mais qui ne donne pas
officiellement le nom de "code" à un regroupement de textes réunissant les dispositions
juridiques d'un même domaine.
 La codification privée, réalisée par la doctrine, par des juristes ou des éditeurs afin de
faciliter le travail des professionnels du droit et des justiciables.

16
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Pr. EL ANEBRI Hasna

A- La légifération :

La légifération qui est issue du verbe légiférer, renvoie à l’action de créer des textes juridiques,
des lois en l’occurrence.

- Définition de la légifération :
La légifération est l’action par laquelle sont élaborées, adoptées et édictées les lois d'un pays, des
dispositions législatives intéressant un domaine donné.
- La nature juridique de la légifération :
Quel texte juridique on va créer, une loi organique, une loi cadre, une loi ordinaire ou un décret ou
encore une circulaire.
- La consistance de la légifération :
Par consistance, est entendu le contenu de la législation. Sera-t-il question d’une législation
d’ordre général qui ne s’intéresse qu’aux grands principes laissant le soin à des textes de moindre
importance pour la fixation des détails ; ou encore, il sera créé une législation qui fixe elle-même
les moindres détails ne laissant pas à d’autres textes le soin d’apporter d’autres précisions.
- La finalité de la légifération :

C’est la raison pour laquelle on veut créer un texte juridique dans un domaine déterminé. Pourquoi
créer un texte juridique dans un domaine particulier ?
Pour attirer les investissements, pour libéraliser un secteur, pour encadrer un domaine particulier,
pour protéger des catégories jugées vulnérables… etc.

17
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Pr. EL ANEBRI Hasna

Section II : La doctrine

- Définition de la doctrine :
Le mot doctrine désigne les travaux contenant les opinions exprimées par des juristes comme
étant le résultat d’une réflexion portant sur une disposition légale, sur une situation ou sur une
institution.
A cet égard, si elle ne se limite pas au discours pédagogique, la doctrine reste indissociable de
l’enseignement, de la connaissance et du perfectionnement du droit.
- Les caractéristiques de la doctrine :

 La doctrine doit obligatoirement émaner de juristes. En effet, les articles émanant


de non juristes comme des articles de presse ne peuvent être considérés comme de
la doctrine juridique.
 La doctrine doit porter sur le droit. Ainsi sont exclus de la doctrine les commentaires
sur la situation politique, économique ou sociale si elles n’ont pas pour objet une
analyse juridique.
 La doctrine a pour objet de faire de la critique, à savoir, se prononcer sur une
législation ou une jurisprudence.
 La doctrine doit réaliser une construction juridique, effectuer un travail méticuleux,
produire des études comparatives.
 La doctrine, sur la base du travail accompli, peut participer à la création du droit en
faisant une œuvre propositionnelle.

Enfin, reste à signaler que la doctrine peut se limiter au droit national, comme elle peut s’étendre
au droit international. Dans ce sens et à part le droit, la doctrine ne connait pas de frontières.
- La consistance de la doctrine :
La doctrine est constituée par toutes les œuvres juridiques. Ainsi, font partie de la doctrine :
- Les ouvrages juridiques ;
- Les articles spécialisés en droit ;
- Les revues spécialisées dans le domaine juridique.

La doctrine n’est qu’une opinion découlant des professionnels du droit, elle n’a pas force de loi,
mais permet, cependant, le perfectionnement du droit et son adéquation avec l’évolution de la
société.

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Pr. EL ANEBRI Hasna

Section III : La jurisprudence

La jurisprudence correspond à l’ensemble des décisions de justice lors d’un litige sur lequel le
juge doit se prononcer. Plus encore, on peut définir la jurisprudence comme l'habitude prise par
les Tribunaux de juger un différend.
A ce titre, il y a lieu de souligner que la notion de jurisprudence peut avoir deux sens divergents :
un sens large et un sens étroit.
 Au sens étroit, la jurisprudence désigne l’ensemble des décisions rendues par les
tribunaux dans les litiges qu’ils ont à connaitre ;
 Au sens large, la jurisprudence désigne la façon dont les tribunaux jugent un problème de
droit. Leur tâche est parfois aisée lorsqu’il existe un texte dont la rédaction est explicite et
claire. Il en découle une facilité dans l’interprétation de la volonté du législateur. Cependant,
l’interprétation de la volonté du législateur devient difficile et compliquée lorsque le texte de
loi est : muet (passe sous silence un élément de droit), adopte une rédaction générale ou
évasive et : ou lorsque la jurisprudence est en face de deux ou plusieurs textes qui
présentent une contradiction ou une interférence entre eux d’où un problème et une
difficulté d’interprétation.

En ce qui concerne la notion de jurisprudence, il y a lieu de signaler qu’il existe une jurisprudence
internationale, à savoir celle qui est issue de la justice telle que prononcée par des juridictions
internationales conformément au droit international.
La cour internationale de justice, le tribunal du droit de la mer, la cour pénale internationale sont
des juridictions internationales qui agissent selon le droit international.
La jurisprudence suppose trois réflexions majeures :
- D’abord, l’interprétation de la loi ;
- Ensuite, la jurisprudence, source de droit ;
- Et enfin, la relation entre la doctrine et la jurisprudence.

- L’interprétation de la loi : C’est l’explication qui est donnée à un texte juridique par le juge.
Ainsi, un texte juridique peut, sans avoir été modifié, connaitre des interprétations
différentes de la part de la jurisprudence. Et cela est dû notamment aux différentes raisons
suivantes : l’aspect général de rédaction du texte, l’évolution du cadre socio-économique ou
enfin l’influence de la doctrine.

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Pr. EL ANEBRI Hasna

- La jurisprudence, source de droit : La jurisprudence crée ce qui est communément


appelé un précédent, à savoir un antécédent, ou un avis sur lequel peuvent se baser les
jurisprudences ultérieures.

- La relation entre la doctrine et la jurisprudence :


La doctrine inspire la jurisprudence et la jurisprudence stimule la doctrine9.
De par sa nature et le travail de réflexion et d’analyses qu’elle réalise, la doctrine a pour objet
d’influencer le juge dans sa prise de décision mais elle ne lui est pas imposable. Autrement dit, le
juge n’est pas obligé de suivre les avis de la doctrine, bien que son avis reste primordial pour
l’analyse et la critique du droit.
Il s’agit d’une relation d’intérêts communs, réciproques. En effet, la doctrine suit l’évolution de la
jurisprudence, comme cette dernière est à l’écoute des critiques et des analyses de la doctrine.

9
Boris BARRAUD ; « la jurisprudence et la doctrine » ; Ed. l’Harmattan ; 2017 ; 284 p.
20
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Troisième partie : Les règles de droit

La règle de droit est une règle de conduite qui régit l’ensemble de la vie en société y compris les relations
entre les individus, entre les organismes qu’ils soient publics ou privés et les relations mixtes qui régissent
les personnes physiques et les personnes morales. Elle a également pour objectifs de régir les relations
entre les Etats et entre les organismes et organisations internationales, à travers les traités et les
conventions internationales.
Elle se présente comme une règle de conduite : en effet, elle a pour objet d’imposer, d’interdire ou de
permettre certains actes ou comportements.
En outre, lorsqu’elle passe sous silence certains actes, il en découle qu’ils ne sont pas interdits par la loi et
leur réalisation est permise.

Section première : Les caractères de la règle de droit

Les règles de droit ne présentent pas toutes la même force obligatoire et partant elles n’ont pas le même
caractère.
Ainsi, dans le Royaume l’influence de la religion musulmane se fait beaucoup sentir au niveau des règles de
droit. En effet, elles ressortent principalement dans certaines dispositions relatives au statut du personnel
et aux actes en rapport avec l’héritage et les successions comme les donations et les testaments qui sont
réglementés par la loi conformément aux préceptes de la religion.
Dans ce sens, on distingue dans la règle de droit des règles issues de la religion et des règles créées par
l’homme, inspirées de législations étrangères, introduite par des traités ratifiés ou encore crées selon une
coutume ou un usage local national.
En outre, il y a lieu de distinguer dans les règles de droit, entre celles qui présentent une force obligatoire
et d’autres qui n’en présentent pas du tout ou qui présentent une force obligatoire relative.
On distingue ainsi :

 Les lois supplétives ou les lois interprétatives,


 Et les lois impératives ou les lois d’ordre public.

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A- Les lois supplétives/interprétatives


Il s’agit de textes juridiques qui n’ont pas de force obligatoire, elles ne s’imposent pas de façon impérative.
En effet, la conséquence de ce caractère supplétif, est la possibilité pour les personnes physiques et
morales d’écarter lesdites dispositions du fait de leur caractère non obligatoire.
Les lois supplétives sont souvent présentes en droit des contrats, où la constitution de liens est
subordonnée au principe de l’autonomie de la volonté et où la conclusion de conventions est constitutive
d’un lien entre les contractants.
Leur qualification de lois interprétatives provient du fait que les rédacteurs d’un texte juridique ont voulu
combler une omission de la part des cocontractants. Ainsi, il s’agit de textes qui ont pour finalité
d’interpréter ou de compléter éventuellement la volonté des particuliers qui sont liés par un lien juridique.
Ainsi, en mettant en place des règles interprétatives, le législateur a pour objectif de combler ou de
compléter la volonté éventuelle des cocontractants. En effet, il suppose que les intéressés ont voulu telle
ou telle chose à moins qu’ils n’aient manifesté une volonté contraire.
Il existe certaines disciplines où les lois supplétives sont inexistantes comme le droit pénal, l’organisation
judiciaire et le droit administratif par exemple. Par contre, l’on peut trouver d’autres disciplines, où
peuvent coexister les lois impératives et les lois supplétives. L’exemple le plus frappant est celui de la
procédure civile, en effet, elle prévoit des règles relatives au règlement des différends à l’amiable, à savoir
la procédure de la médiation et de l’arbitrage.
Il s’agit de procédures qui permettent aux parties à un litige d’écarter la compétence des juridictions
étatiques et de confier la solution de leur litige à des entités privées, à savoir, des arbitres.
Cependant, le législateur a pris le soin de préciser les matières où les règles supplétives sont strictement
écartées. Il s’agit notamment des règles d’ordre public.

B- Les lois impératives


Elles sont également qualifiées de règles d’ordre public, autrement dit, il s’agit de textes qui ne peuvent
être écartés par les personnes et les entités auxquelles elles s’appliquent.
Le rôle de la loi ne consiste pas à donner des recommandations, ni à fournir des conseils et encore moins à
poser des règles de politesse : Le rôle du droit n’est pas de faire de la morale.
Les lois impératives ou d’ordre public ont un caractère obligatoire, elles sont présentes notamment dans le
droit public et sont beaucoup moins présentes en droit privé et notamment en droit civil.
L’exemple le plus marquant est celui du droit pénal qui est constitué, en exclusivité, par des règles
impératives. Il comprend, en effet, notamment les règles relatives à la protection de la vie et de l’intégrité
d’autrui, qui le cas échéant sont sanctionnées par des peines lourdes et dont les dispositions juridiques
d’incrimination et de procédure ne peuvent être écartées.

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Section deuxième : Les sanctions liées à la règle de droit

Il relève de la compétence de l’autorité publique, de pouvoir appliquer la sanction appropriée et


proportionnée au non-respect de la règle de droit.
En effet, l’inobservation d’une règle impérative de droit est susceptible d’enclencher un processus de
répression qui ne doit pas toujours être rapporté au caractère de réclusion, à savoir de détention ou
d’incarcération. En effet, le caractère répressif peut comporter un volet pénal et un volet civil.
Il sera respectivement question des sanctions civiles et des sanctions pénales.
A- Les sanctions civiles :
Elles se présentent comme suit : la nullité, les dommages-intérêts, l’expulsion et la saisie des biens.
- La nullité est une sanction civile qui prive tout acte de ses effets juridiques. En effet, lorsqu’un acte
est considéré comme nul, il ne peut plus produire des effets pour le futur, mais également les effets
pour le passé sont également effacés.

- Les dommages-intérêts : les dommages et intérêts constituent la compensation financière à


laquelle peut prétendre une personne physique ou morale qui a été victime ou déclare avoir subi
un préjudice moral ou matériel ou les deux à la fois 10. La fixation du montant de la somme relève de
la libre appréciation du juge.

Les dommages et intérêts sont considérés comme une réparation ou une compensation des pertes
subies, et elles se présentent sous forme d’une compensation financière et matérielle. Ainsi, sont
exclues les compensations morales ou psychologiques ou encore non matérielles.

- L’expulsion : c’est l’action de chasser quelqu’un du lieu où il se trouve, ou plus encore la procédure
qui a pour objectif de libérer les locaux d’un occupant qui a perdu tout droit à se maintenir dans
lesdits lieux où il n’en a jamais eu le droit et son occupation était arbitraire 11.

- La saisie des biens : il s’agit de la confiscation légale d’un bien d’une personne. C’est une sanction
qui s’exerce contre les biens de la personne sanctionnée et non contre sa personne. Elle est
10
Cf. https://www.dictionnaire-juridique.com.
11
Cf. https://www.larousse.fr/dictionnaires.
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Pr. EL ANEBRI Hasna

appliquée lorsqu’un débiteur est dans l’impossibilité de payer ses dettes. Elle est prononcée par un
arrêt de justice qui a été préalablement saisie par le créancier.

B- Les sanctions pénales :


Elles sont applicables aux infractions pénales telles que prévues par le code pénal marocain. En effet, le
code distingue entre trois grandes catégories d’infractions :
 Les crimes ;
 Les délits ;
 Et les contraventions.

- Les crimes : sont les infractions les plus graves, les peines qui les sanctionnent varient de la peine
capitale, la réclusion perpétuelle ou à temps.

- Les délits : sont considérés comme des infractions de gravité moyenne et ils sont de deux sortes, les
délits correctionnels et les délits de police.

Les délits correctionnels, font appel à des peines d’emprisonnement dont la durée est comprise
entre 2 et 5 ans.
Les délits de police sont de moindre importance et sont sanctionnés par des peines allant de 1 mois
à 2 ans.

- Enfin les contraventions : constituent les infractions les moins graves et donnent lieu de ce fait à
des sanctions très légères, comme une amende de faible importance et une détention de courte
durée.

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Pr. EL ANEBRI Hasna

Section troisième : La règle de droit et les autres règles de conduite

Le droit entretient des liens distincts et à des degrés différents avec d’autres concepts qui gèrent la vie en
société. En effet, la religion, la coutume et la morale peuvent être considérées comme trois axes majeurs
avec lesquels le droit est amené à interagir selon les systèmes juridiques et politiques applicables à chaque
pays.
Ainsi, il sera successivement question de la relation du droit avec la religion, avec la coutume et enfin avec
la morale.
Paragraphe premier : Le droit et la religion
La relation entre le droit et la religion se distingue selon les systèmes applicables dans chaque pays. Ainsi, il
est constaté que dans les législations occidentales où les systèmes politiques applicables sont
généralement des systèmes laïcs, il existe une nette distinction entre la religion et la législation.
Par contre, dans les pays où la religion musulmane est la religion prépondérante, il existe un lien très étroit
entre les dispositions légales et les préceptes de la religion.
Le droit marocain est resté influencé par les règles de la religion musulmane, bien que certaines sinon
plusieurs de ses dispositions sont inspirées de législations étrangères.
Dans ce sens, il y a lieu de mettre l’accent sur la Moudawana qui a réaffirmé et consacré les grands
principes fondamentaux du droit musulman, y compris dans leurs moindres détails.
La Moudawaana est le code du statut personnel marocain qui régit principalement le droit de la famille
marocain et ce conformément à la religion musulmane.
La règle de droit est fortement imprégnée de préceptes de la religion. Ainsi, pour l’interprétation de la
législation, le juge pourra éventuellement recourir aux principes de la religion pour compléter certaines
dispositions légales incomplètes ou confuses.
De ce fait, il y a lieu de signaler que les marocains de confession musulmane sont régis notamment en ce
qui concerne les questions du statut du personnel par les dispositions juridiques inspirées principalement
de la religion musulmane, tandis que les marocains de confession juive sont régis en ce qui concerne les

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Pr. EL ANEBRI Hasna

questions de leur statut du personnel par le droit hébraïque qui est également un droit à forte connotation
et inspiration religieuse.
Paragraphe deuxième : Le droit et la coutume
Une coutume est un acte habituel et répété suivi par toutes les personnes dans une société donnée, dans
un pays ou dans une région particulière. Il s’agit d’une pratique collective qui n’est pas écrite et qui se
transmet oralement, de génération en génération. Son caractère répétitif l’ancre dans la société jusqu’à la
faire confondre avec la religion ou la législation.
Quelle relation entretiendrait le droit avec la coutume ?

De par sa nature, la coutume aurait deux actions principales :


 D’abord, elle constitue un élément d’interprétation de la loi ;
 Ensuite elle pourrait être un élément pour compléter le droit.
La coutume constituerait une source interprétative du droit au même titre que la doctrine et la
jurisprudence. Par interprétation est entendue, explication de normes juridiques soit muettes soit
ambiguës. Elle revêt, de ce fait, une importance particulière dans la mesure ou elle joue un rôle
d’application de normes lorsqu’elles sont inexistantes.
Reste à signaler que le domaine du droit coutumier a tendance à se rétrécir au profit de celui des lois
écrites.
Cependant, son rôle essentiel d’aide à la mise en place de solutions pour des problèmes est évidente
lorsque la loi ne prévoit pas de dispositions particulières en la matière.
Compte tenu de ce qui précède, il convient d’affirmer que la coutume a un rôle essentiel en matière de :

 Interprétation de la loi ;
 Gérer des situations lorsqu’elles ne sont pas résolues par la loi.
Paragraphe troisième : Le droit et la morale
Il est généralement admis que le droit et la morale ont des domaines d’intervention différents. En effet, la
morale peut être définie comme l’ensemble des règles de conduite qui sont considérées comme bonnes.
Elle renvoie également à la science du bien et du mal.
Les exemples de cette interdépendance entre le droit et la morale se présentent comme suit :
- Le rôle du droit pénal dans la préservation de la solidarité sociale et la cohésion de la société se
traduit principalement à travers le délit de non-assistance à personne en danger.
Au départ, ces omissions n’étaient pas considérées comme des infractions puisque seuls étaient considérés
comme tels les actes positifs qui portent une atteinte évidente au fonctionnement normale de celle-ci.
Il s’agit ainsi d’une obligation de dévouement qui est inspirée de la morale et qui est appliquée en matière
pénale. Elle a pour objectif de préserver un minimum de solidarité entre êtres humains vivant dans une
société donnée.
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Pr. EL ANEBRI Hasna

Ainsi, il s’agit d’une règle de droit qui tend à élargir le droit à certains concepts d’ordre moral.
- Le deuxième exemple est celui de la bonne foi et des bonnes mœurs qui sont applicables en
matière contractuelle.
En effet, est nulle une convention qui est contraire aux bonnes mœurs ou à l’ordre public 12. Il résulte de la
formulation de l’article que les bonnes mœurs sont ramenées au même titre que l’ordre public. Et pour la
détermination de bonnes mœurs, le juge ne peut se référer qu’au référentiel religieux en la matière.

Quatrième partie : Les sujets de droit

Pour être un sujet de droit, c’est-à-dire être titulaire de droits et d’obligations, il faut avoir la personnalité
juridique. Disposent de la personnalité juridique les personnes physiques et les personnes morales.

Paragraphe premier : Les personnes physiques


Les personnes physiques sont tous les êtres humains, dénommés personnes physiques en ce qu’ils sont
dotés d’un corps. La personnalité juridique s’acquiert par la naissance. Plus précisément, l’enfant doit être
né vivant13.
Trois éléments permettent d’individualiser les personnes physiques au niveau juridique :

 Le nom ;
 Le domicile ;
 Et l’état civil.
Préalablement, il faut noter que le législateur marocain fait remonter la personnalité juridique à la
conception, à condition que l’enfant soit né vivant14.
En outre, la détermination de la personnalité juridique doit tenir compte de deux éléments essentiels :

 La capacité d’exercice ;
 Et la capacité de jouissance.

- La capacité d’exercice : l’aptitude d’une personne à exercer elle-même les droits dont elle est
titulaire et qui ne sont pas contraires à la loi.

12
Cf. article 729 du dahir relatif aux obligations et contrats.
13
Muriel Fabre-Magnan ; Introduction au droit ; Chp. VII ; p. 97 ; Ed. PUF ; 2014 ; Collection Que-Sais-je ? Presses Universitaires
de France.
14
Cf. article 304, 307 et 331 de la Moudawana.
27
Fsjes -Salé-
Pr. EL ANEBRI Hasna

- La capacité de jouissance : c’est la capacité à être titulaire de droits, à savoir disposer du droit de
propriété sur un bien. En sont exclus, les mineurs et les incapables qui ne sont pas en mesure
d’exercer eux même leurs droits.
En outre, si la personnalité juridique débute avec la naissance, elle suppose également une fin qui
correspond au décès de l’intéressé. Dans ce sens, et au regard de la loi, le décès de la personne produit des
effets juridiques, principalement la liquidation de la succession et la répartition de l’héritage.

A- Le nom
Le nom est l’élément d’identification d’une personne physique. Il est régi par l’état civil qui tend de plus en
plus à se généraliser pour s’étendre à toute la population sans exclusion.
Il s’agit d’une procédure qui suppose une grande influence de la part de la religion musulmane. Dans ce
sens, le Dahir du 8 mars 1950 a étendu à l’ensemble du Royaume, l’obligation de mettre un nom de famille
en plus du prénom.
Actuellement, l’état civil est régi par la loi n° 37-99 relative à l’état civil 15.

B- Le domicile
Le domicile est le lieu ordinaire d’habitation, la demeure légale et habituelle. Il est le lieu dans lequel une
personne est supposée demeurer en permanence.
L’article 519 du code de procédure civile définit le domicile comme étant « le lieu où une personne
physique a son habitation habituelle et le centre de ses affaires et de se intérêts ».

Paragraphe deuxième : Les personnes morales


Il est important de souligner que l’apparition de nouvelles entités ayant des formes juridiques différentes
et agissant dans des secteurs différents a été à l’origine de l’élaboration de la théorie de la personnalité
morale.
L’objectif principal de la théorie de la personnalité morale est :

 De distinguer l’entité de ses membres ou de ses créateurs,


 Et de distinguer le patrimoine de cette entité de celui de ses membres.
Ainsi, comme les personnes physiques, les personnes morales peuvent détenir des droits et être tenues
d’un certain nombre d’obligation.
La conséquence de la personne morale peut être représentée par le fait qu’elle suppose d’acquérir soit, la
qualité de propriétaire, soit la qualité de créancier, ou la qualité de débiteur.

15
Promulguée par Dahir n° 1-02-239 du 3 octobre 2002.
28
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Pr. EL ANEBRI Hasna

A l’instar des personnes physiques, les personnes morales connaissent des critères d’individualisation se
présentant comme suit :

 Un nom : une raison sociale ;


 Un domicile : un siège social ;
 Et enfin, une nationalité.
Reste à signaler qu’une entité qui dispose de la personne morale peut valablement, ester en justice comme
elle peut être engagée dans une affaire devant la justice dans laquelle elle se fera défendre par
l’intermédiaire de son avocat.
On distingue dans les personnes morales, entre les personnes morales de droit public et les personnes
morales de droit privé.
Paragraphe premier : Les personnes morales de droit public
A - Définition des personnes morales de droit public
Une personne morale de droit public est une entité abstraite à laquelle on reconnait la personnalité
juridique. Elle dispose d’un patrimoine propre et de droits et d’obligations. La caractéristique principale de
la personne morale de droit public est le fait qu’elle soit soumise à des règles de droit public. Elle exclue,
de ce fait, l’application de règles de droit privé16.
De par sa nature et ses attributions, la personne morale de droit public exerce une mission de service
public. Dans ce cadre, il s’agit d’un critère qui n’est pas exclusif aux personnes morales de droit public,
puisque l’on peut se retrouver avec des personnes morales de droit privé, qui effectuent des missions de
service public.
La personne morale de droit public peut être distinguée par rapport aux personnes physiques, mais aussi
par rapport aux personnes morales de droit privé.
Dans ce sens, cette distinction pourrait éventuellement être basée sur le droit applicable, qui en la matière
diffère selon la personne concernée. En effet, il semble clair que les personnes morales de droit public sont
soumises au droit administratif, auquel ne peuvent éventuellement pas être soumis les personnes
physiques et les personnes morales de droit privé.
B-Typologie des personnes morales de droit public
La typologie des personnes morales de droit public renvoie à se demander sur la catégorie de personnes
morales qui constituent le socle de cette catégorie.
Ainsi, les personnes morales de droit public sont constituées principalement par les organismes suivants :

 L’Etat ;
 Les collectivités territoriales ;
 Et les établissements publics.

1- L’Etat

16
Cf. https://justice.ooreka.fr/.
29
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Pr. EL ANEBRI Hasna

L’Etat est une personne morale de droit public. Il peut être défini comme un ensemble d’institutions
régissant les règles de vie en communauté à travers notamment :
 Le monopole de la création de la règle de droit ;
 Et l’emploi de prérogatives de puissance publique (expropriation, emploi de la force publique, mise
en place d’un ordre public … etc).
L’État possède une triple signification : sociologique ; organisationnelle ; juridique :
Sur le plan sociologique, l'État est un ensemble de personnes vivant sur un territoire déterminé et soumis à
un gouvernement.
Du point de vue organisationnel, c'est une forme d'organisation que la société utilise pour s'orienter. L'État
désigne également un ensemble de personnes qui acceptent de s'imposer un ordre sous certaines
conditions.
Sur le plan juridique, « l'État peut être considéré comme l'ensemble des pouvoirs d'autorité et de
contrainte collective que la nation possède sur les citoyens et les individus en vue de faire prévaloir ce
qu'on appelle l'intérêt général, et avec une nuance éthique le bien public ou le bien commun ».
En droit international, un État souverain est vu comme un territoire délimité par des frontières territoriales
établies, à l'intérieur desquelles des lois s'appliquent à une population, et comme constitué d’institutions
par lesquelles il exerce une autorité et un pouvoir effectif17.
2- Les collectivités territoriales
Les collectivités territoriales du Royaume se présentent comme suit :

 Les régions,
 Les préfectures,
 Les provinces,
 Et les communes.

Elles sont définies par la constitution elle-même qui les qualifie expressément de personnes morales de
droit public, qui gèrent démocratiquement leurs affaires (article 135 de la constitution). Toute autre
collectivité territoriale est créée par la loi.

3- Les établissements publics


Les établissements publics sont des personnes morales de droit public qui disposent de la personnalité
morale et de l’autonomie financière. D’après les dispositions de la constitution, elles relèvent du domaine
législatif, à savoir qu’elles doivent obligatoirement être crées par un texte juridique ayant force de loi.

L’objectif de la création des établissements publics, est le fait de remplir une mission d’intérêt général ou
une mission de service public, selon les attributions qui sont prévues dans leur texte de création. En effet,
chaque texte juridique portant création d’un établissement public fixe les attributions dudit établissement
avec précisions. L’objectif est d’éviter qu’il y ait chevauchement entre les compétences de plusieurs
établissements publics.
17
Cf. https://fr.wikipedia.org.
30
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Pr. EL ANEBRI Hasna

Il existe deux types d'établissements publics, en fonction de la nature de leur activité :

 Les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) : établissement public à


caractère industriel et commercial ;
 Les établissements publics à caractère administratif (les EPA).

Leurs missions sont variées : enseignement (écoles), culture, économie, santé, etc.

Reste à signaler qu’en matière d’établissements publics, ils peuvent éventuellement être transformés en
d’autres formes juridiques et principalement en des sociétés.

La conséquence de la qualification de personne morale de droit public, est l’application de la compétence


des tribunaux administratifs et des cours d’appel administratives pour traiter des litiges les concernant ou
qui les oppose à d’autres personnes physiques ou à des personnes morales de droit privé.

Paragraphe deuxième : Les personnes morales de droit privé

Les personnes morales, à savoir, les sociétés sont identifiées par leur forme. En effet, il existe des sociétés
qui sont commerciales par leur forme et quel que soit leur objet.

Il s’agit respectivement des sociétés anonymes, de la société en nom collectif ; de la société en


commandite simple ; de la société en commandite par actions et de la société à responsabilité limitée
(SARL).

Définition de la société : il y a lieu de signaler que le dahir formant code des obligations et des contrats
définit la société comme un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs
biens ou leur travail, ou tous les deux à la fois en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter.
Cependant, il y a lieu de signaler que la définition susvisée est incomplète, elle ne prend pas en
considération toutes les caractéristiques de la société. A ce titre, il y a lieu de signaler que la société peut
aussi être considérée comme un groupement de personnes doté de la personnalité morale qui lui permet
d’avoir un patrimoine distinct de celui de ses membres.
Il découle de la définition de la société, deux critères importants indispensable pour l’acquisition de la
qualité de société : le critère de la personne morale et le critère du profit.
En effet, la personne morale renvoie à l’idée d’une personnalité juridique distincte de la personnalité des
membres qui composent la société. En outre, la réalisation du profit dans la vie de la société est la finalité
même de sa création.
Il y a lieu de signaler les multiples avantages que procure la formation d’une entreprise sous forme
sociétaire. En effet, la société en tant que forme juridique procure une organisation des moyens et du
travail selon des dispositions qui sont fixées par la loi.

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Fsjes -Salé-
Pr. EL ANEBRI Hasna

En outre, la vie de la société est indépendante de la vie de ses fondateurs, membres, actionnaires et
dirigeants (la personne morale).
- Constitution de la société ;
- Organisation et fonctionnement de la société ;
- Contrôle des sociétés.

A noter que les sociétés sont soumises en ce qui concerne les dispositions juridiques à la loi n° 17-95
relative aux sociétés anonymes et à la loi n° 5-96 sur la société en nom collectif, la société en commandite
simple, la société en commandite par actions, la société à responsabilité limitée et la société en
participation.

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Pr. EL ANEBRI Hasna

Cinquième partie : L’organisation judiciaire

L’organisation judiciaire est la matière qui s’intéresse à étudier le système judiciaire. Ainsi, il est question
de connaitre les notions de base sur la nature des juridictions, leur organisation ainsi que les grands
principes qui régissent la justice.

Section première : Présentation de l’organisation judiciaire du Royaume

L’organisation judiciaire désigne l’ensemble des tribunaux et des cours du Royaume. Les principales
dispositions relatives à l’organisation judicaire sont fixées par le dahir relatif à l’organisation judiciaire du
Royaume. (Dahir n° 1-74-338 du 17juillet 1974 fixant l’organisation judiciaire du Royaume).
En effet, et conformément à l’article premier dudit Dahir tel qu’il a été modifié et complété, l’organisation
judiciaire du Royaume comprend les juridictions suivantes :
- Les tribunaux de première instance ;
- Les tribunaux administratifs ;
- Les tribunaux de commerce ;
- Les cours d’appel ;
- Les cours d’appel administrative ;
- Les cours d’appel de commerce ;
- La cour de cassation.
Définition de la justice :
La justice est la fonction qui consiste à juger, à exprimer et à interpréter le droit à l’occasion d’une
contestation, d’un litige, d’un différend ou d’une infraction.
La justice est une prérogative souveraine qui appartient à l’Etat.
Délimitation du champ d’application de l’organisation judiciaire
Il y a lieu de situer le champ d’application de l’organisation judiciaire. Si l’on se réfère au texte relatif à
l’organisation judiciaire, il n’aborde pas la procédure devant les tribunaux qui relève des codes de
procédure civile et du code de procédure pénal.

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Pr. EL ANEBRI Hasna

Section deuxième : Les principales nouveautés introduites par la Constitution de 2011 sur le système
judicaire marocain

La constitution est la loi fondamentale du pays. Une constitution est un ensemble de règles et de
dispositions fondamentales d’organisation et de fonctionnement d’un Etat et de ses institutions ainsi que
les droits et les libertés de ses citoyens.
Une constitution peut être écrite (comme dans les pays de droit civil Maroc, France, Espagne) ; comme elle
peut ne pas l’être comme dans les pays de la Common Law (Royaume- Uni et pays anglo saxon).
Au Maroc, en 2011 une nouvelle constitution a vu le jour suite à un référendum et a été promulguée par
Dahir.
En ce qui concerne le système judiciaire, la nouvelle constitution a apporté des innovations importantes.
L’on peut ainsi, présenter les principes consacrés par la constitution de 2011 :
- Reconnaissance de la justice en tant que pouvoir ;
- Consécration de la séparation entre le pouvoir judiciaire et les pouvoirs législatifs et exécutifs ;
- Indépendance du pouvoir judiciaire ;
- Inamovibilité des magistrats du siège ;
- Fixation du statut des magistrats par une loi organique ;
- Détermination des attributions du conseil supérieur du pouvoir judiciaire.

Paragraphe premier : La reconnaissance de la justice en tant que pouvoir


La constitution de 2011 a reconnu la justice en tant que pouvoir judiciaire aux côtés des pouvoirs législatifs
et exécutifs.
La reconnaissance du pouvoir judiciaire s’oppose à la conception qui ne voit dans la justice qu’une simple
autorité, un simple service public (il est un service public mais c’est un service public qui est érigé au rang
de pouvoir donc supérieur aux autres services publics existants).
De ce fait, si le principe est consacré, les attributions des juges, l’organisation de la justice et
l’indépendance reconnue aux magistrats contribuent à forger la justice en tant que pouvoir. Ainsi, l’article
109 de la constitution prohibe les injonctions, instructions ou pressions à l’égard des juges.
Paragraphe 2ème : Consécration de la séparation entre le pouvoir judiciaire et les pouvoirs législatif et
exécutif
Il s’agit d’une conséquence directe de la mesure tendant à ériger la justice en tant que pouvoir. Sinon,
quelle finalité aurait ce pouvoir s’il n’est pas indépendant et séparé des autres pouvoirs existants ?
Les fonctions législative, exécutive et judiciaire ont des rôles et des missions différentes et distinctes. Il y a
lieu de sauvegarder un équilibre et assurer une collaboration entre les différents pouvoirs, à savoir, même
une complémentarité.
Dans ce sens, le régime constitutionnel du Royaume est fondé sur la séparation, l’équilibre et la
collaboration des pouvoirs (article premier de la constitution).

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Pr. EL ANEBRI Hasna

Dans ce sens et pour consacrer ce principe dans les faits, le texte de la constitution dispose dans son article
107 que le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif et que le Roi est le
garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire.
Après avoir érigé la justice en pouvoir et consacrer son indépendance par rapport aux autres pouvoirs, la
constitution a mis en place certaines mesures pour concrétiser et renforcer cette indépendance.
Les principales dispositions constitutionnelles en faveur de cette indépendance se présentent comme suit :
- La présidence du conseil supérieur du pouvoir judiciaire est attribuée au Roi
- La présidence déléguée dudit conseil est confiée au 1 er président de la cour de cassation (article 115
de la constitution) ;
- L’inamovibilité des magistrats du siège : l’inamovibilité est la garantie accordée aux magistrats en
vertu de laquelle ils ne peuvent être déplacés, rétrogradés ou suspendus de leurs fonctions sans la
mise en œuvre de procédures protectrices exorbitantes du droit commun disciplinaire. C’est une
règle qui cherche à supprimer toute tentation de pression sur les magistrats contre un éventuel
déplacement. Ainsi, le suivi de la carrière des magistrats est soustrait au pouvoir exécutif et confiée
au conseil supérieur du pouvoir judiciaire (article 108 de la constitution).
- L’interdiction de toute intervention dans les affaires soumises à la justice. Le juge ne pouvant
recevoir d’injonction ou d’instruction ni être soumis à une quelconque pression. En outre, le juge
peut saisir le conseil supérieur du pouvoir judiciaire à chaque fois qu’il estime que son
indépendance est menacée. La loi sanctionne toute personne qui tente d’influencer le juge de
manière illicite.

Paragraphe 3ème : La fixation du statut des magistrats par une loi organique
Par dahir n° 1-16-41, a été promulguée la loi organique n° 106-13 portant statut des magistrats. Elle a été
prévue par l’article 112 de la constitution.
A ce titre, il y a lieu de mettre l’accent sur :

 La définition de la loi organique ;


 Le pourquoi de la fixation du statut des magistrats par une loi organique et non par une loi
ordinaire.
La définition de la loi organique (article 85 et 86 de la constitution) : Une loi organique est une loi relative
à l’organisation et au fonctionnement des pouvoirs publics. Elle précise ou complète les dispositions de la
constitution. C’est la constitution elle-même qui détermine les domaines qui seront régis ou fixés par une
loi organique. Dans la hiérarchie des normes, une loi organique vient après la constitution, mais avant une
loi ordinaire.
Pourquoi fixer le statut des magistrats par une loi organique : la procédure d’adoption des lois organiques
est soumise, de par la constitution, à une procédure particulière. Cette procédure se distingue des
procédures suivies généralement pour l’adoption d’une loi ordinaire.
En effet, les lois organiques sont soumises au contrôle obligatoire de la Cour Constitutionnelle qui doit
s’assurer que l’esprit de la constitution a été respecté.
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Pr. EL ANEBRI Hasna

Dans ce sens, et pour consacrer les principes de transparence et d’indépendance de la justice et assurer
aux magistrats toutes les garanties nécessaires au respect des principes énoncés dans la constitution ; la loi
organique fixe le statut des magistrats qui comprend les dispositions relatives à :

 La composition du corps de la magistrature ;


 Les droits et devoirs des magistrats ;
 Les positions statutaires des magistrats ;
 Les garanties qui leur sont accordées.
Par conséquent, c’est pour donner toutes les garanties nécessaires aux magistrats pour l’exercice de leur
fonction dans des conditions optimum que leur statut a été adopté par une loi organique dont les
modalités de révision également sont particulières.
Paragraphe 4ème : La détermination des attributions et de la composition du conseil supérieur du
pouvoir judiciaire18:
En plus du texte de la constitution, le conseil est régi par la loi organique n° 100-13 relative au conseil
supérieur du pouvoir judiciaire telle que promulguée par le Dahir n° 1-16-40 du 24 mars 2016.
Le CSPJ veille à l’application des garanties accordées aux magistrats, notamment quant à :
 Leur indépendance ;
 Leur nomination ;
 Leur avancement ;
 Leur mise à la retraite ;
 Et leur discipline.
Avec la mise en place des membres du conseil le 6 avril 2017, la justice est devenue un pouvoir
indépendant dans les faits. Le conseil qui est présidé par le Roi jouit de la personnalité morale et de
l’autonomie financière.
A son initiative, il élabore des rapports sur l’état de la justice et du système judiciaire et présente des
recommandations appropriées en la matière.
Composition du conseil (article 115 de la constitution et article 6 de la loi organique) :
- Du premier président de la cour de cassation en qualité de président-délégué ;
- Du procureur général du Roi près la cour de cassation ;
- Du président de la première chambre de la cour de cassation ;
- De 4 représentants, magistrats des cours d’appel, élus parmi eux;
- De 6 représentants, magistrats des juridictions du premier degré, élus parmi eux;
Une représentation des magistrats doit être assurée parmi les 10 membres élus dans la proportion de leur
présence dans le corps de magistrature ;
- Du médiateur ;
- Du président du conseil national des droits de l’Homme ;

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Cf. l’article 113 de la constitution.
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Pr. EL ANEBRI Hasna

- De 5 personnalités nommées par le Roi reconnues pour leur compétence, leur impartialité et leur
probité, ainsi que pour leur apport distingué en faveur de l’indépendance de la justice et de la
primauté du droit, dont un membre est proposé par le secrétaire général du conseil supérieur des
Oulémas.
Enfin, reste à signaler que le conseil tient au moins 2 sessions par an.

Section troisième : Les grands principes fondamentaux de l’organisation judiciaire

Certains principes ont déjà été passés en revue notamment, le principe de l’indépendance du pouvoir
judiciaire et celui de la séparation des pouvoirs. A ce titre, les principes suivants seront passés en revue :
- Le principe de la collégialité.
- Le principe de la spécialisation.
- Le principe du double degré de juridictions.
- La justice un service public spécifique.

Lesdits principes ont pour objectifs communs, la consécration d’une justice de qualité.
Paragraphe 1er : Le principe de la collégialité

Le principe de la collégialité consacre le fait qu’une affaire soit jugée par plusieurs juges, siégeant et
délibérant ensemble. Le principe de collégialité s’oppose au principe du juge unique.

Au Maroc, on a vu dans l’histoire de l’organisation judiciaire du royaume qu’après avoir été écarté pour
une période donnée, la collégialité a été de nouveau consacrée comme principe incontestable du système
judiciaire marocain (cf. historique dans introduction du cours).

Encore, faut-il souligner que l’extension ou la limitation dudit principe relève du seul pouvoir législatif en
vertu de la constitution. En effet, seul un texte juridique ayant force de loi pourrait porter atteinte audit
principe. A ce titre, l’article 71 de la constitution dispose que sont du domaine de la loi, l’organisation
judiciaire et la création de nouvelles catégories de juridictions ainsi que la procédure civile et la procédure
pénale.
Le principe de la collégialité au niveau d’un système judiciaire présente les avantages suivants :
- Une justice qui est rendue à plus d’une personne est une justice plus réfléchie, par conséquent une
justice avec un taux d’erreur réduit ;
- La formation collégiale assure l’impartialité de la justice et se présente comme un rempart vis à vis
de possibilité de corruption.
Sur un plan technique, l’application de la collégialité devant les juridictions nationales se présente de la
manière suivante :

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Pr. EL ANEBRI Hasna

- Au niveau du tribunal de première instance, la collégialité coexiste avec le principe du juge unique.
En effet, la collégialité est subordonnée à la nature et à l’importance du litige. Ainsi, le tribunal de
première instance siège en présence de trois juges dans les matières suivantes (article 4 du dahir
portant loi n° 1-74-338 fixant l’organisation judicaire du Royaume :
*actions de statut personnel et successions à l’exception de la pension alimentaire ;
*actions immobilières de droits réels et mixtes ;
*actions de conflit de travail ;
*délits sanctionnés par une peine d’emprisonnement supérieure à deux ans et dont la compétence
est dévolue par le code de procédure pénale au tribunal de première instance.
En outre, le juge siégeant à titre unique peut se dessaisir de l’ensemble de l’affaire par décision gracieuse
lorsqu’il lui apparaît que l’une des demandes principale, reconventionnelle ou en compensation relève de
la compétence de la formation collégiale (le président du tribunal est chargé de la transmission du dossier
de l’affaire à la formation collégiale).

La demande reconventionnelle est le qualificatif donné à la demande par laquelle le défendeur


dans un procès se porte lui-même demandeur contre le requérant.

La demande en compensation est une opération par laquelle une créance et une dette s’annulent
mutuellement à concurrence de la somme la plus faible, de sorte que si elles ne sont pas d’un
montant égal, seul le solde devient exigible.

- Au niveau de la cour d’appel, l’audience est tenue et les arrêts sont rendus par trois magistrats. A
ce titre, il y a lieu de signaler que la collégialité a toujours marqué les cours d’appel au Maroc

- La cour de cassation est une juridiction collégiale, les audiences sont tenues et les arrêts sont
rendus par 5 magistrats. Dans certains cas, cette collégialité pourrait être renforcée lorsque le
jugement est renvoyé à une formation constituée par deux chambres réunies (article 371 du code
de procédure civile qui dispose que le premier président de la cour, le président de la chambre
saisie et cette dernière peuvent renvoyer à une formation constituée en deux chambres).
Force est de constater la consécration du principe de la collégialité devant les juridictions spécialisées, à
savoir, les tribunaux administratifs et de commerce.
- Devant le tribunal administratif, le principe de la collégialité est consacré par l’article 5 de loi n° 41-
90 instituant des tribunaux administratifs, qui dispose que les audiences des tribunaux
administratifs sont tenues et leurs jugements rendus par trois magistrats assistés d’un greffier (le
même principe est admis au niveau des cours d’appel administrative).

- Devant les tribunaux de commerce, le principe de la collégialité est également consacré par la loi
n°53-95 instituant des tribunaux de commerce qui dispose dans son article deuxième que les
audiences des tribunaux de commerce et des cours d’appel de commerce sont tenues et leurs
jugements rendus par trois magistrats.
Ainsi, il ressort de l’application du principe de collégialité, que plus l’affaire est importante, plus la
collégialité s’impose. Il faut certes noter que l’application dudit principe nécessité des moyens en termes
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Pr. EL ANEBRI Hasna

de temps, d’éléments humains et par conséquent suppose un coût important pour la justice rendue. Sur
cette base, certaines affaires jugées de moindre importance peuvent être soumise à une audience à juge
unique.

Paragraphe 2ème : Le principe de la spécialisation


Le système de l’organisation de la justice diffère d’un pays à un autre. Il n’existe pas un système uniforme
pour tous les pays.
Au Maroc, et depuis l’indépendance, l’organisation judiciaire était fondée sur le principe d’unité de
juridiction avec les mêmes juridictions qui statuaient sur les affaires civiles, pénales et administratives.
Cette unité de juridiction a été remise en cause avec la création dans les années 90 des tribunaux
administratifs et des tribunaux de commerce.
Avec cette création, le système judiciaire marocain consacre la spécialisation des juridictions.
L’ordre judiciaire marocain a consacré le principe de spécialisation avec un seul ordre de juridiction, à
savoir, la cour de cassation au sommet de l’organisation judiciaire.
Il y a lieu de signaler qu’en France, existe deux ordres de juridiction, un ordre judiciaire ayant à son
sommet la cour de cassation et un ordre administratif ayant à son sommet le conseil d’Etat.
A ce titre, il y a lieu de distinguer dans l’organisation judiciaire, entre les tribunaux de droit commun et les
tribunaux spécialisés.
Les premiers ont compétence pour connaitre de tous les litiges. Ils peuvent, de ce fait, être saisis de tous
les litiges qui ne sont pas expressément attribués à d’autres juridictions. Cette compétence de principe
explique leur appellation de tribunaux de droit commun (tribunal de première instance, cour d’appel).
L’on peut parler de principe de spécialisation des juridictions et de spécialisation des magistrats.
A- La spécialisation dans l’ordre judiciaire
Le principe de spécialisation de l’organisation judiciaire renvoie à l’existence de tribunaux ayant une
compétence spéciale spécifique et exclusive à l’exception de la compétence générale qui est attribuée aux
tribunaux de droit commun.
En droit marocain, il existe deux juridictions spécialisées, les tribunaux de commerce et les tribunaux
administratifs.
Les tribunaux administratifs : ils ont été institués par la loi n° 41-90 du 3 novembre 1993 qui renvoie à un
texte d’application pour la fixation de leur siège et de leur ressort territorial.
Les cours d’appel administratives ont été créées par la loi n° 80-03 du 14 février 2006.
Lesdits tribunaux ont compétence pour traiter en premier et en second degré du contentieux administratif.
Ainsi, les tribunaux administratifs sont compétents pour connaitre des litiges portant sur :

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Pr. EL ANEBRI Hasna

- Les recours en annulation pour excès de pouvoir formés contre les décisions des autorités
administratives ;
- Les litiges relatifs aux contrats administratifs ;
- Et les actions en réparation des dommages causés par les actes ou les activités des personnes
publiques.
Les tribunaux de commerce : ils ont été institués par la loi n° 53-95 du 6 janvier qui a créée des tribunaux
de commerce et des cours d’appel de commerce. Il est renvoyé à un décret (texte d’application) pour la
fixation de leurs nombres, leurs sièges dans les régions et leur ressort territorial.
Selon l’article 5 de la loi n° 53-95 susvisée, les tribunaux de commerce sont compétents pour connaitre :
 Des actions relatives aux contrats commerciaux ;
 Des actions entre commerçants à l’occasion de leurs activités commerciales ;
 Des actions relatives aux effets de commerce ;
 Des différends entre associés d’une société commerciale ;
 Des différends à raison de fonds de commerce.

B- La spécialisation des magistrats


Le principe de spécialisation des magistrats diffère de la spécialisation dans l’ordre judicaire. En effet, il
renvoie d’une manière générale à la capacité des magistrats à s’adapter aux différences dans le
contentieux qui se présentent à eux. Ainsi, la spécialisation des magistrats concerne aussi bien les
magistrats statuant dans les juridictions de droit commun que dans les juridictions spécialisées.
La technicité et la complexité du contentieux, mais également l’évolution intervenue dans les matières
soumises à la justice de manière générale ; représentent les principales raisons qui exigent une
spécialisation des magistrats.
De ce fait, et au-delà d’une compétence juridique approfondie, les magistrats sont amenés à connaitre des
domaines en rapport avec les évolutions susmentionnées.
Enfin, resterait à préciser que ce phénomène de spécialisation est amené à se développer davantage avec
la transformation des affaires soumises à la justice aussi bien au niveau pénal (apparition de nouvelles
contraintes en matière de cybercriminalité par exemple) que du monde économique, financier et des
affaires.

Paragraphe 3ème : Le principe du double degré de juridictions/voies de recours

- Le principe
Le principe du double degré de juridiction sous-entend qu’une autre juridiction puisse connaitre de l’affaire
autre que celle qui a statué en premier degré.
- Application du principe

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Pr. EL ANEBRI Hasna

Les justiciables ont la possibilité de soumettre leur procès pour un second examen à une juridiction du
deuxième degré, en l’occurrence à la cour d’appel si la décision initiale a été rendue par le tribunal de
première instance.
- Les objectifs de l’application du double degré :
Il garantit les droits de la défense grâce à un nouvel examen du litige par une juridiction hiérarchiquement
supérieure. De ce fait, l’appel vise essentiellement la réformation ou l’annulation du jugement contesté.
Définition de l’appel : l’appel est la voie de recours ordinaire par laquelle une partie qui succombe devant
le tribunal de première instance, s’adresse à une juridiction supérieure, appelée cour d’appel pour obtenir
la modification des dispositions d’un jugement ; d’où sa qualification de « voie de réformation ».
- Conséquences du principe du double degré de juridiction :
Le principe du double degré de juridiction ou l’appel produit un double effet. Il a un effet dévolutif et un
effet suspensif.
L’effet dévolutif de l’appel signifie que tout ce qui a été examiné par les juges du premier degré sera
examiné à nouveau par le juge d’appel.
L’effet suspensif de l’appel signifie que l’exécution du premier jugement est suspendue.
Le principe du double degré de juridictions est un principe général de procédure qui consacre une garantie
essentielle aux intérêts des justiciables et à l’intérêt d’une justice équitable. Il consacre la protection des
droits de la défense et vise essentiellement la réformation ou l’annulation du jugement contesté.
Le principe est également transposable aux tribunaux spécialisés à savoir les tribunaux de commerce et les
tribunaux administratifs.
Paragraphe 4ème : La justice un service public
La justice est un service public et dans ce sens elle doit fonctionner selon les règles et les principes qui
régissent le fonctionnement des services publics.
Ainsi, il sera question d’examiner les principes du service public tels qu’ils sont applicables à la justice.
 La justice, un service public spécifique ;
 Le principe d’égalité devant la justice ;
 Le principe de la continuité de la justice ;
 Le principe de la gratuité de la justice.
A ce titre, il y a lieu de signaler que les principes du service public de la justice sont consacrés par le texte
même de la constitution (article 117 à 128).

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A- La justice, un service public spécifique


La spécificité de la justice ressort notamment à deux niveaux :

 La caractéristique de la justice en tant que pouvoir ;


 Et le monopole de la justice qui relève exclusivement des prérogatives de l’Etat.
En effet, on est en présence d’un service public spécifique. Il est différent des autres services publics. L’on
est en présence d’un service public qui a la caractéristique d’un pouvoir, il se distingue des autres services
publics. Avec la constitution de 2011, la justice est devenue un pouvoir au même titre que le pouvoir
exécutif et le pouvoir législatif. Et en l’érigeant en tant que pouvoir, la constitution a veillé à l’outiller de
toutes les garanties nécessaires pour l’exécution de sa mission dans les meilleures garanties
d’indépendance (cf. indépendance du pouvoir judiciaire, séparation entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir
exécutif et le pouvoir législatif, inamovibilité des magistrats, loi organique relative au statut des magistrats,
loi organique relative au conseil supérieur du pouvoir judiciaire).
« Nul ne peut se faire justice soi-même », il s’agit du principe qui consacre le monopole de l’Etat en
matière d’octroi de la justice (si on exclut la justice privée qui est constituée par l’arbitrage).
D’ailleurs, l’article 124 de la constitution dispose que les jugements sont rendus et exécutés au nom du Roi
et en vertu de la loi. Il s’agit de ce fait d’une prérogative exclusive qui a notamment pour objectifs de
consacrer l’impartialité de la justice et la neutralité des jugements rendus.
B- Le principe d’égalité devant la justice
Le principe d’égalité devant la justice suppose que tous les citoyens sont égaux pour avoir accès à la justice
afin de faire valoir leurs droits.
La conséquence de l’application du principe d’égalité devant la justice est l’existence d’une seule justice
pour tous nonobstant leur religion, leur appartenance politique, leur nationalité ou autre distinction quelle
que soit sa nature. En effet, c’est le principe de la territorialité qui prime en matière des infractions ou des
litiges qui ont lieu sur le territoire national. Ils relèvent, en principe, de la compétence des juridictions
nationales sous réserve des dispositions du droit international en matière de la compétence judiciaire.
L’égalité devant la justice interpelle également la question d’avoir des juridictions réparties sur le territoire
national de manière à satisfaire à tous les besoins des justiciables.
A ce titre, il y a lieu de soulever que la principale caractéristique de l’égalité devant la justice est la
suppression du privilège de juridiction après l’indépendance du pays. Ledit privilège a été imposé par le
traité des capitulations qui avait pour conséquences de soustraire certaines catégories de citoyens à la
justice nationale en plus des étrangers résidents sur le territoire national.
Le "privilège de juridiction", certains auteurs préfèrent utiliser l'expression "immunité de juridiction", d'autres le mot "délocalisation", est
le droit donné à certaines personnes de comparaître devant une juridiction autre que celle à laquelle les règles du droit
commun procédural attribuent compétence.

C- Le principe de la continuité de la justice


Il s’agit de la continuité de la justice ou de la permanence dans le fonctionnement du système judiciaire.

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Il y a lieu de signaler que dans l’organisation judiciaire préalable à la réforme de 1974, les juridictions
s’arrêtaient pendant les mois d’août et de septembre.
Actuellement, il n’en est rien, toutes les juridictions ont l’obligation de travailler en permanence sans arrêt.
Ainsi, l’année judiciaire commence le 1er janvier et se termine le 31 décembre de chaque année. La seule
exception (Samedi et Dimanche).
Cependant, il est important de signaler qu’en cas d’urgence, le juge des référés peut être saisi même les
jours fériés ou les Week-end. Et il en va de même pour les juges d’instruction qui assurent une
permanence les jours fériés et les jours de fin de semaine non travaillés.
D’ailleurs, cette option est confirmée par le projet de loi relatif à l’organisation judiciaire qui dispose dans
son article 7, que les juridictions tiennent leurs audiences sans interruption et doivent s’organiser de
manière à ce qu’il n’y ait pas d’arrêt ou de retard dans leur fonctionnement.
D- Le principe de la gratuité de la justice
La justice se distingue des services publics à caractère industriel et commercial qui supposent tous le
paiement de la prestation par les usagers. Elle rejoint, cependant, les services publics administratifs qui
sont considérés comme des services publics à caractère gratuit (bien que cette option est en train d’être
remise en question pour certains d’entre eux). Le principe de la gratuité de la justice soulève le
questionnement sur le coût des procès devant la justice ainsi que le rapprochement de la justice des
justiciables.
1- Le coût du procès
Le principe de la gratuité de la justice suppose que le justiciable ne paie pas directement le tribunal, la
juridiction ou les magistrats qui siègent au cours de son procès. Bien que le justiciable contribue en tant
que contribuable au paiement des impôts qui servent à doter le budget général de l’Etat duquel est doté le
budget alloué à la justice.
Cependant, les justiciables sont amenés à s’acquitter d’un certain nombre de frais notamment le paiement
de la taxe judiciaire qui représente 1% des intérêts en jeu.
Il y a lieu de prendre en considération le paiement des frais d’avocats, d’autres auxiliaires de justice tels
que les Adouls, les experts, les huissiers de justice …etc. Bien que ses charges soient d’ordre privé, c’est-à-
dire qu’elles ne sont pas destinées à rentrer dans les fonds de l’Etat, elles n’en constituent pas moins des
frais à la charge du justiciable.
A ce titre, il y a lieu de signaler que l’article 121 de la constitution dispose que dans les cas où la loi le
prévoit, la justice est gratuite pour ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes pour ester en justice.
Ainsi, et pour pouvoir rendre la justice accessible, il faut que son coût soit contrôlé et maitrisé. Dans ce
sens, si l’on se trouve devant une justice avec des frais exorbitants, cela va décourager les plus démunis à
recourir à la justice. Dans ce sens, certaines mesures ont été adoptées dans le sens de rendre la justice
accessible à travers notamment l’assistance judiciaire.
En effet, un système d’assistance judiciaire est mis en œuvre pour éviter que les personnes démunies ou
sans ressources financières et juridiques, ne soient empêchées de faire valoir leurs droits auprès des
juridictions nationales.
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Pr. EL ANEBRI Hasna

L’assistance judiciaire est régie par le décret Royal portant loi n° 514-65 du 1 er novembre 1966. Elle est
applicable à tout litige.
2- Le rapprochement de la justice du justiciable
Pour constituer un service public gratuit, la justice doit être rapprochée des justiciables. En effet, le service
public de la justice pour remplir sa mission principale, doit être réparti de manière équitable sur tout le
territoire du Royaume. A ce titre, il y a lieu de mettre en avant le nombre des juridictions existantes sur le
territoire national (Cf. tableau ci-dessous). Etant entendu que chaque tribunal dispose d’un ressort
territorial qui lui est propre à savoir, le périmètre géographique au-delà duquel sa compétence ne peut
plus être appliquée.

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