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Médecine et maladies infectieuses 35 (2005) 218–222

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Article original

Incidence des infections du site opératoire étude prospective


à l’hôpital militaire d’instruction Mohamed-V de Rabat, Maroc
Incidence of surgical wound infections a prospective study
in the Rabat Mohamed-V military hospital, Morocco
M. Chadli a,*, N. Rtabi a, S. Alkandry b, J.L. Koek c, A. Achour b, Y. Buisson c, A. Baaj a
a
Département de biologie clinique, hôpital militaire d’instruction Mohamed-V, Rabat, Maroc
b
Service de chirurgie viscérale, hôpital militaire d’instruction Mohamed-V, Rabat, Maroc
c
Département de biologie clinique, hôpital d’instruction des armées du Val-de-Grâce, Paris, France

Reçu le 5 janvier 2004 ; accepté le 17 mars 2005

Disponible sur internet le 27 avril 2005

Résumé

Objectif. – Déterminer, par une étude prospective, l’incidence des infections du site opératoire (ISO) dans un service de chirurgie viscérale
de l’hôpital militaire d’instruction Mohamed-V de Rabat et identifier les facteurs de risques.
Patients et méthodes. – Tous les sujets ayant subi une intervention chirurgicale entre le 1er avril et le 30 septembre 2002 et hospitalisés
dans le service de chirurgie viscérale ont été inclus dans l’étude. Tous les patients étaient suivis si possible 30 jours après l’intervention. Les
facteurs de risque périoperatoire, le type d’intervention et la survenue d’une ISO ont été notés sur une fiche standardisée pour chaque patient.
Résultats. – Durant la période d’étude, 310 patients ont été opérés. Le nombre d’ISO est de 16, soit un taux d’incidence de 5,2 %.
L’analyse par site a montré dix infections superficielles, cinq infections profondes et une infection d’espace. L’urgence, l’âge, l’ASA, la
classe de contamination d’Altemeier, le type d’intervention et la durée opératoire étaient associés au risque infectieux pour la chirurgie
viscérale. Le taux d’ISO stratifié sur l’index de NNIS variait de 2,7 % (NNIS = 0) à 10,2 % (NNIS = 3).
Conclusion. – La fréquence des ISO rend indispensable la mise en place d’une surveillance en chirurgie, pour obtenir des taux d’incidence
standardisés nécessaires à la mise en œuvre de mesures de contrôle adaptées.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

Objectives. – The authors had for aim to determine prospectively the incidence of surgical site infections (SSI) in a visceral surgery
department, in the Mohamed V military hospital (Rabat), and to identify risk factors.
Patients and methods. – All patients who had undergone surgery between April 1 and September 30, 2002 and were then admitted in the
visceral surgery unit were included in this study. Patients were assessed within the following month. For each patient, data including perio-
perative factors, type of procedure, and SSI occurrence were collected on a standardized form.
Results. – During the study, 310 patients were operated. The number of surgical wound infections was 16 (5.2%). This analysis pointed
out: 11 superficial wounds, 5 deep wounds, and 1 organ/site wound. Emergency, age, ASA score, Altemeier classification, and procedure
duration were found to be risk factors for SSI in visceral surgery. According to the NNIS index, SSI rates increase from 2.7% for patients with
a risk index of 0 to 10.2% for patients with a risk index of 3.
Conclusion. – The high incidence of SSI emphasizes the importance of implementing SSI surveillance in surgery to obtain standardized
incidence ratios necessary for adapted control measures.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

* Auteur correspondant. Département de biologie clinique, hôpital d’instruction des armées A.-Laveran, 13998 Marseille Armées, France.
Adresse e-mail : chadlimariama@hotmail.com (M. Chadli).

0399-077X/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.medmal.2005.03.007
M. Chadli et al. / Médecine et maladies infectieuses 35 (2005) 218–222 219

Mots clés : Infection nosocomiale ; Hygiène hospitalière ; Infection postopératoire

Keywords: Nosocomial infection; Hospital hygiene; Postoperative infection

1. Introduction • s’étendaient au niveau des fascia et des muscles : infec-


tions profondes de l’incision ;
Les infections du site opératoire (ISO) représentent 11 % • concernaient les organes ou les cavités : infections d’es-
de l’ensemble des infections nosocomiales (C. Clin Paris pace.
Nord). Elles touchent 3 à 7 % des opérés, leur délai médian
de survenue est de dix jours après l’intervention chirurgicale 2.2. Recueil de l’information
[1].
Leurs conséquences ne concernent pas seulement le malade Pour chaque patient opéré, les données cliniques étaient
opéré, mais aussi l’institution et par leur poids économique, recueillies quotidiennement par un médecin du service de bio-
l’ensemble de la collectivité. En cas d’ISO, près d’un opéré logie. Les données microbiologiques étaient colligées quoti-
sur trois est réhospitalisé, un sur cinq est réopéré, la durée diennement au laboratoire de bactériologie de l’hôpital. Tou-
d’hospitalisation est augmentée de cinq à dix jours [1]. La tes ces informations étaient rassemblées sur une même fiche.
prévention de ces infections est donc essentielle dans les hôpi- Les variables suivantes étaient analysées : âge, sexe, date
taux par le biais d’une surveillance épidémiologique. d’entrée, date et type d’intervention, durée de l’intervention,
Peu de pays disposent de statistiques nationales et des dis- score de gravité ASA (American Society of Anesthesiologie)
cordances importantes peuvent s’observer en fonction de l’éta- et classe de contamination d’Altemeier.
blissement étudié. Ces informations ont permis de calculer des taux d’ISO
C’est le cas du Maroc où peu d’études ont été menées pour stratifiés sur l’index de risque du NNIS « National Nosoco-
déterminer l’importance et les conséquences des infections mial Infections Survey ». Il s’agit du risque prédictif crois-
nosocomiales. sant d’être infecté qui varie de zéro à trois. La date de surve-
L’objectif de ce travail est d’étudier l’incidence des ISO nue des ISO, leur localisation et les réhospitalisations ou
dans un service de chirurgie viscérale de l’hôpital militaire reprises chirurgicales consécutives étaient notées.
d’instruction Mohamed-V de Rabat afin de définir une stra- Afin d’identifier les ISO survenant après la sortie du ser-
tégie de prévention. vice, tous les patients inclus dans l’étude devaient si possible
être suivis jusqu’au 30e jour postopératoire (J30). Si la sortie
était prévue avant J30, la fiche de renseignements était com-
2. Patients et méthodes plétée lorsque le patient était revu en consultation ou lors des
réhospitalisations. Les réinterventions au niveau d’une même
Il s’agit d’une étude prospective, réalisée dans l’un des localisation opératoire étaient incluses si réalisées plus de
services de chirurgie viscérale (30 lits d’hospitalisation) de 30 jours après la première intervention.
l’hôpital militaire d’instruction Mohamed-V (778 lits) durant La présence d’une infection et la localisation du site de
une période de six mois, du 1er avril au 30 septembre 2002. l’infection étaient validées par le chirurgien du service.
Tous les sujets ayant subi une intervention chirurgicale pen-
dant cette période et hospitalisés dans le service de chirurgie 2.3. Exploitation statistique
viscérale ont été inclus dans l’étude.
Les patients ayant subi des actes invasifs à visée diagnos- Les analyses statistiques étaient effectuées avec le logiciel
tique ou des actes de radiologie interventionnelle ont été Épi Info 2002 (CDC, États-Unis). La valeur de « p » a été
exclus de l’étude. La surveillance a été poursuivie pendant calculée par le test de Mann-Whitney–Wilcoxon pour les
un mois après la date d’intervention. L’enquête s’est termi- variables quantitatives, et par le test exact de Fisher pour les
née le 31 octobre 2002. variables qualitatives.

2.1. Définition
3. Résultats
Une ISO était définie par une infection survenant dans les
30 jours suivant l’intervention, ou dans l’année en cas de mise Durant la période d’étude (1er avril au 30 septembre),
en place d’une prothèse ou d’un implant [2,3]. Les infections 310 patients étaient opérés dans le service de chirurgie vis-
survenant à distance du site opératoire (infections urinaires, cérale. L’âge des patients variait de 26 à 72 ans avec une
respiratoires, bactériémies et infections de cathéters) étaient moyenne de 38,6 ans. Les âges des sujets infectés (moyenne :
exclues. 48,1 ans, médiane : 47,5 ans) étaient significativement plus
Les ISO étaient classées en trois types selon qu’elles : élevés que ceux des sujets non infectés (moyenne : 38,1 ans,
• touchaient uniquement la peau et le tissu cellulaire sous- médiane : 36 ans) (p < 10–3). Le sex-ratio hommes/femmes
cutané : infections superficielles de l’incision ; était de 1,6.
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3.1. Suivi des patients pendant la période d’étude germes dans cinq cas et cinq prélèvements étaient revenus
stériles. Selon le site de l’infection, sept germes étaient isolés
Sur les 310 patients opérés, 55 % étaient revus 30 jours dans le site superficiel, sept dans le site profond et deux dans
après l’intervention et 74 % au moins 15 jours après. Au total le site organe/espace. Les bactéries identifiées par ordre de
80 % des patients étaient revus après leur sortie du service. fréquence étaient : Staphylococcus aureus (n = 4), Escheri-
chia coli (n = 4), Pseudomonas aeruginosa (n = 3), Acineto-
3.2. Infections des sites opératoires bacter baumannii (n = 2), Morganella morgannii (n = 2) et
Enterobacter cloacae (n = 1).
Le nombre d’ISO était de 16. Le taux d’incidence a été L’antibiogramme n’a révélé aucune résistance acquise
calculé en rapportant le nombre de patients opérés pour les- parmi ces isolats.
quels une ISO a été diagnostiquée au nombre total de patients
opérés pendant la période de l’étude. Ce taux était de 5,2 %. 3.4. Étude des facteurs de risque d’infection nosocomiale
La distribution par site d’infection montrait dix infections
superficielles, cinq infections profondes et une infection Ils sont représentés par le terrain (classe ASA), le type de
d’espace. chirurgie (classification d’Altemeier), la durée de l’interven-
Le délai d’apparition de l’infection après l’intervention tion et l’index de risque du NNIS.
variait de 2 à 30 jours, la médiane étant de neuf jours. Enfin Les taux d’incidence d’ISO étaient plus élevés après les
80 % des patients étaient infectés avant la fin de la 3e semaine actes de chirurgie contaminée (9,5 %) et sale (6,6 %). Ils
postopératoire. L’infection s’est déclarée après la sortie du étaient de 7,1 % lorsque le score ASA était de 3 et de 7,6 %
service pour six patients (37 %). lorsque la durée de l’intervention était > 75e percentile.
Les interventions les plus fréquemment à l’origine d’ISO Le taux d’ISO stratifié sur l’index de NNIS variait de 2,7 %
concernaient l’appendice, l’intestin grêle, le côlon et la vési- (NNIS = 0) à 10,2 % (NNIS = 3) (Tableau 2).
cule (Tableau 1).
Il s’agissait dans 70 % des cas d’interventions réalisées en 3.5. Durée de séjour et infections du site opératoire
urgence et dans 28 % des cas de chirurgie endoscopique.
Aucun cas d’ISO n’a été observé après chirurgie ambula- La durée moyenne de séjour préopératoire des patients
toire. infectés (4 jours) n’était pas significativement plus élevée que
celle des non infectés (1,44 jours) (p = 0,29). En revanche,
3.3. Écologie bactérienne dans le groupe des patients non opérés en urgence (n = 293),
la durée moyenne de séjour préopératoire était significative-
Tous les patients ayant présenté une ISO avaient eu un pré- ment plus élevée pour les patients infectés (5,8 jours) que
lèvement bactériologique. Le prélèvement par écouvillon- pour les non infectés (1,83 jours) (p = 0,0036).
nage était fait en cas d’infections superficielles et profondes La durée totale de séjour des patients infectés (13,12 jours)
et recueil du liquide de drainage pour l’infection d’espace. était significativement plus élevée que celle des non infectés
Un germe était identifié dans six cas, une association de deux (6,75 jours) (p < 10–5).
Tableau 1
Taux d’incidence des ISO selon le type d’intervention
Incidence rate of SSI according to the type of surgery
Nombre d’interventions Taux d’ISO (%) ISO profonde ou de l’espace (%)
Hernie inguinale, crurale 85 1,2 100
Appareil gastroduodénal avec ouverture 26 3,8 100
Cholécystectomie 104 4,8 20
Pathologie hépatique (kyste hydatique, abcès...) 18 5,5 100
Appendicectomie 35 8,5 –
Chirurgie du côlon et rectum 28 14,2 50
Hernie hiatale 4 – –
Intestin grêle 10 10 100
Total 310 5,2 37

Tableau 2
Taux d’incidence des ISO selon le score NNIS
Table 2. Incidence rate of SSI according to NNIS score
Nombre d’interventions Nombre d’ISO Taux d’incidence pour 100 opérés
Index NNIS 0 180 5 2,7
1 91 7 7,7
2 et 3 39 4 10,2
Total 310 16 5,2
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L’incidence des ISO chez les patients opérés en urgence durent plus de deux heures [4], ce que corrobore cette étude
était de 7,46 et de 4,5 % chez les patients ayant subi une inter- avec 7,6 % d’ISO pour une durée de l’acte opératoire supé-
vention différée ; (risque relatif = 1,6 ; IC 95 = 0,49–4,50). rieur au 75e percentile.
Un séjour préopératoire prolongé augmente le risque
d’infection. Il est recommandé que, pour la chirurgie réglée,
4. Discussion le délai d’hospitalisation préopératoire soit réduit au mini-
mum. Idéalement les patients devraient être admis la veille
4.1. Étude de l’incidence ou le matin même de l’intervention [4].
La durée de séjour préopératoire n’apparaît pas ici comme
Cette étude prospective a permis de calculer l’incidence un facteur de risque significatif parmi les patients qui n’ont
de l’infection du site opératoire dans un service de chirurgie pas été opérés en urgence. Cependant, l’opération en urgence
viscérale marocain. Le taux d’incidence est le meilleur indi- peut constituer un facteur de confusion. L’augmentation signi-
cateur du risque d’acquérir une infection nosocomiale dans ficative de la durée totale de séjour des sujets infectés par
un service donné. L’inconvénient des études d’incidence en rapport aux non infectés résulte à la fois de l’augmentation
continu est d’ordre économique. En effet, l’enquête d’inci- de la durée de séjour préopératoire, facteur favorisant l’infec-
dence nécessite pour être bien menée l’emploi d’un person- tion, et de l’allongement de la durée de séjour postopératoire,
nel permanent spécialisé. conséquence de l’infection.
Le taux d’incidence globale des ISO en chirurgie viscé- Concernant la discipline chirurgicale, les études de réseau
rale est de 5,2 %. L’interprétation des résultats doit tenir [5] ont montré que les taux d’ISO les plus élevés s’obser-
compte de la spécialité du service (dans 95 % des cas il s’agis- vaient en chirurgie digestive et qu’ils variaient en fonction du
sait d’une chirurgie digestive) et du type d’hôpital. En effet, type d’intervention. Le taux d’incidence n’était pas le même
les études NNIS ont permis de chiffrer l’incidence des ISO à pour les opérations du côlon ou de la vésicule que pour les
4,6 % dans les hôpitaux non universitaires, à 6,4 % dans les cures de hernies, c’est le cas de notre série.
hôpitaux universitaires de moins de 500 lits et à 8,2 % dans Les situations d’urgence peuvent favoriser la survenue
les hôpitaux universitaires de plus de 500 lits [4]. d’ISO comme cela a été décrit dans plusieurs études [9] qui
Pour ce qui est de la spécialité des services, selon le réseau montraient qu’en cas d’urgence biliaire, le risque était mul-
INCISO (CCLIN Paris Nord), le taux d’incidence des ISO tiplié par 11,3 et qu’il était significativement élevé en cas
variait de 5,2 % pour la chirurgie digestive à 0,9 % pour la d’appendicectomie.
chirurgie du système endocrinien [5]. Dans cette étude, l’urgence n’apparaît pas comme un fac-
Par ailleurs, compte tenu de la durée de suivi d’un patient teur de risque car la valeur du risque relatif d’ISO chez les
opéré jusqu’à un mois après l’intervention et de la brièveté patients opérés en urgence par rapport à ceux ayant une chi-
des séjours hospitaliers, le taux d’incidence des ISO peut rurgie réglée n’est pas significative ; ceci peut résulter d’un
varier selon la fréquence des consultations postopératoires. manque de puissance dû aux faibles effectifs.
En effet, une grande proportion des ISO ne sont détectées Les bactéries en cause sont surtout des bacilles à Gram
que plusieurs jours ou semaines après que le patient ait quitté négatif. En effet, dans le cadre d’une chirurgie digestive où
l’hôpital. Dans cette étude, 34 % des ISO ont été diagnosti- les tractus sont ouverts, ce sont les bactéries des flores endo-
quées après la sortie comme cela a été montré dans d’autres gènes qui infectent plus facilement le site opératoire [10].
études [5]. Le taux d’ISO augmente avec le score NNIS. Pour le réseau
Cependant, 74 % des ISO ont été diagnostiquées dans les INCISO [5], en chirurgie digestive, le risque infectieux aug-
15 jours postopératoires, montrant qu’un service revoyant sys- mentait de 2,2 % pour un score NNIS = 0 à 26,7 % pour un
tématiquement les patients à J15 plutôt qu’à J30 sous-estime score NNIS = 3. Nos résultats se situent dans cette fourchette
le nombre d’ISO de 26 %. avec un taux d’ISO respectivement égal à 2,7 % et 10,2 %. Ils
sont liés à la forte représentation des cholécystectomies ou
4.2. Étude des facteurs de risque des interventions sur le côlon. En utilisant les indices de ris-
que, les taux observés peuvent être ajustés en prenant en
L’analyse de nos résultats montre que l’âge élevé est un compte les facteurs augmentant le risque infectieux pour les-
facteur de risque d’ISO comme cela a été démontré par plu- quels des mesures préventives peuvent être appliquées.
sieurs auteurs [4,6].
La prédominance masculine reflète la répartition des mala- 4.3. Mesures de prévention des ISO
des hospitalisés. Elle est liée au recrutement dans notre hôpi-
tal d’une population militaire. Elle se confirme parmi les Deux mesures préventives sont reconnues efficaces grâce
retraités. à des études randomisées bien conduites démontrant leur
L’impact de la durée de l’intervention a été étudié par de impact sur la réduction des ISO : ce sont les modalités de
nombreuses équipes [7,8]. Il a été souvent identifié comme préparation cutanée et l’antibioprophylaxie. Celle-ci a fait
un facteur de risque significatif de survenue d’une ISO. Le l’objet de recommandations dont il faut rappeler les princi-
risque semble particulièrement accru pour les opérations qui pes [11]. Elle est indiquée dans les deux premières classes
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d’Altemeier. Les antibiotiques utilisés doivent avoir un effet Références


aussi faible que possible sur les résistances bactériennes, être
différents de ceux utilisés pour l’antibiothérapie curative et [1] Perniceni T, Vons C. Intérêts d’un programme de surveillance de
être administrés dans les deux heures avant l’incision. La l’incidence des infections du site opératoire en chirurgie digestive.
rédaction d’un protocole consensuel écrit, affiché au bloc opé- Ann Chir 2002;127:786–90.
ratoire, conditionne son respect. [2] Horan TC, Gagnes RP, Martone WJ, Jarvis WR, Emori TG. CDC
definitions of nosocomial surgical wound infections. Am J Infect
Deux autres séries de mesures sont aussi importantes que Control 1992;20(5):271–4.
les précédentes mais leur impact est d’évaluation plus diffi- [3] Altemeier WA, Burke JF, Pruit BA. In: Manual on control of infection
cile : ce sont les mesures de prévention peropératoire et la in surgical patients. Philadelphia: J.B. Lipincott; 1984. p. 28–30 2nd
surveillance des ISO [13]. Le projet SENIC (Study on the edition.
effıcacy of Nosocomial Infection Control) a démontré qu’un [4] Francioli P, Nahimana I, Lausanne, Widmer A, Bâle. Infections du site
programme bien conduit, incluant une surveillance avec com- chirurgical : revue. SN 1996;3:1.
munication des résultats aux chirurgiens, diminuait l’inci- [5] Golliot F, Astagneau P, Brucker G. Surveillance des infections du site
dence des ISO de 35 %. Cette efficacité, confirmée par opératoire : résultats du réseau INCISO en 1998. Ann Chir 1999;53:
890–7.
d’autres études, est associée à un rapport coût–bénéfice favo-
[6] Lucet JC. Infections du site opératoire. Lettre Infect 1998;6:262–8.
rable [4,12,14]. Un tel impact de la surveillance peut être attri-
[7] Desjeux G, Pascal B, Faucompret S, Brissiaud JC, Perrier C, Thi-
bué à une meilleure détection des problèmes d’ISO par la erry H, et al. Incidence des infections du site opératoire dans un
comparaison des taux observés par d’autres services de même service de chirurgie viscérale. Med Arm 2000;28(1):25–9.
spécialité ou dans le même service à différentes périodes ce [8] Ruef C, Pittet D. Épidémiologie et prévention des infections du site
qui aboutit à l’application de mesures préventives mieux chirurgical : progrès et problèmes. Med Hyg (Geneve) 1998;56:1846–
ciblées. 52.
[9] Karim H, Chafik K, Karim K, Moez H. Facteurs de risque de
l’infection des plaies opératoires en chirurgie digestive. Étude rétro-
spective sur 3000 plaies opératoires. Tunis Med 2000;78:634–40.
5. Conclusion
[10] Dhidah L, Dhidah M, Miladi M, Kacem N, Troudi M. Place de la plaie
opératoire dans les infections nosocomiales. Étude de prévalence au
Les infections nosocomiales qui se développent sur le site CHU Sahloul. Tunis Med 1998;11:401–7.
opératoire pèsent lourdement sur la morbidité, la mortalité et [11] Lallemend S, Albin C, Huc B, Picard A, Roux C, Thomas A, et al.
les coûts de la santé. Elles représentent une complication inac- L’antibioprophylaxie en chirurgie. Conformité des prescriptions en
ceptable, car le plus souvent évitable, de la chirurgie. Franche-Comté par rapport au référentiel national. Ann Chir 2001;
En chirurgie viscérale, la chirurgie digestive est la spécia- 126:463–71.
lité la plus affectée par le risque d’ISO, favorisée par le ris- [12] Pittet D. Prévention des infections chirurgicales : un domaine prior-
itaire. Med Hyg (Geneve) 1998;56:1843–52.
que de contamination bactérienne peropératoire, le terrain du
[13] Troillet N, Petignat C, Matter M, Eisenring MC, Mosimann F, Fran-
patient et la qualité de l’acte opératoire. C’est dire l’impor- cioli P. La surveillance des infections du site opératoire : un moyen de
tance de la prévention qui ne peut se concevoir sans un sys- prévention efficace. Rev Med Suisse Romande 2001;121:125–8.
tème de surveillance épidémiologique à mettre en place dans [14] Korinek AM. Conséquences écologiques des prescriptions antibi-
tous les hôpitaux. otiques préventives. Ann Fr Anesth Reanim 2000;19:418–23.

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