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Charles Melman (entretiens avec Jean-Pierre Lebrun).

L'Homme sans gravité


Sidi Askofaré
Dans L'en-je lacanien 2003/1 (no 1), pages 175 à 179
Éditions Érès
ISSN 1761-2861
DOI 10.3917/enje.001.0175
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Charles Melman
(entretiens avec Jean-Pierre Lebrun)
L’Homme sans gravité *

Sidi ASKOFARÉ
L es psychanalystes écrivent beaucoup, voire trop. Lacan par-
lait naguère, avec son ironie coutumière, de « poubellication ». Non seu-
lement il se développe une littérature psychanalytique, mais celle-ci couvre
tous les champs, mobilise toutes les références, utilise comme vecteurs tous
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les genres : de la monographie clinique au roman, en passant par toutes
les formes d’autofictions analytiques.
Si l’on peut se réjouir de ce que les analystes écrivent, il convient
aussi d’ajouter que cela n’implique pas nécessairement qu’ils se lisent les
uns les autres, ce qui affecte bien évidemment le débat épistémique, la
possibilité de faire avancer les problèmes cruciaux de la psychanalyse,
enfermés que sont les échanges dans les espaces confinés des institutions,
associations et écoles, le plus souvent régis par la psychologie de groupe.
Il arrive cependant quelques fois – en raison de la figure historique
de son auteur, du caractère novateur des thèses proposées ou de son
importance clinique – qu’un ouvrage s’impose comme important, bien au-
delà de son aire de réception « institutionnelle ». C’est le cas du livre

* Charles Melman (entretiens avec Jean-Pierre Lebrun), L’Homme sans gravité. Jouir à
tout prix, Paris, Denoël, 2002, 264 pages.
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d’entretiens que Charles Melman et Jean-Pierre Lebrun – son intervie-


wer – ont fait paraître aux éditions Denoël sous le titre : L’Homme sans
gravité. Jouir à tout prix.
L’Homme sans gravité se prête à plusieurs lectures possibles. Il
peut être abordé comme un petit livre d’entretiens entre deux analystes
sur le lien social contemporain. Il peut être considéré comme une reprise,
une amplification et une radicalisation par Melman des thèses dévelop-
pées par Lebrun dans ses ouvrages (Un monde sans limite et Les
Nouveaux Désarrois du sujet). Il peut enfin être envisagé comme un dia-
gnostic porté sur l’état de la civilisation contemporaine, les conséquences
sur la subjectivité de notre temps et les hypothèses qui peuvent en être infé-
rées quant à l’avenir de la psychanalyse. Rien moins que l’esquisse d’un
nouveau « malaise dans la civilisation » donc.
J.-P. Lebrun, l’interviewer et initiateur du projet, ne s’y trompe pas :
« Sans doute, d’aucuns seront étonnés, d’autres irrités, d’autres encore
stupéfaits de certains propos sur le malaise actuel qu’il convient de quali-
fier de prospectifs. »
L’ouvrage de Melman s’organise autour d’une thèse qu’il a formu-
lée précédemment et qui s’énonce : « Nous passons d’une culture fondée
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sur le refoulement des désirs, et donc la névrose, à une autre qui recom-
mande leur libre expression et promeut la perversion. La “santé mentale”
relève ainsi aujourd’hui d’une harmonie non plus avec l’idéal mais avec
un objet de satisfaction. La tâche psychique s’en trouve grandement sou-
lagée et la responsabilité du sujet effacée par une régulation purement
organique. »
L’ouvrage est, pour ainsi dire, la défense et l’illustration de cette
thèse. C’est toute la psychanalyse qui est revisitée à l’occasion de ce dia-
gnostic et des analyses auxquelles elle invite : du plus communément reçu
– le déclin de l’imago paternelle – aux thèses les plus audacieuses sur le
langage, le transfert, la division subjective, l’irresponsabilité des « nou-
veaux sujets », la dépression et la perversion généralisées, la disjonction
possible de l’inconscient et du sexuel, l’émergence d’une économie psy-
chique fondée sur l’exhibition de la jouissance.
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L’ouvrage peut choquer par la radicalité des thèses, le côté pros-


pectif, voire prophétique, de certains énoncés ou le caractère insuffisam-
ment convaincant des cas cliniques mobilisés à des fins d’illustration ou de
démonstration.
Mais cet ouvrage peut être aussi stimulant si l’on prend la mesure
de son sérieux et de sa rigueur, de sa fidélité aussi aux moindres accents
de l’enseignement de Lacan. De ce point de vue, on peut dire qu’aucun
auteur n’est allé aussi loin que Melman dans la prise en compte et la mise
en œuvre de ce que Lacan a introduit avec sa catégorie de discours et
tout particulièrement du « discours capitaliste ».
Pour finir, disons que L’Homme sans gravité a les défauts de ses
qualités. Facile, accessible et agréable – en raison de la forme de l’en-
tretien et de la clarté du propos –, il est aussi un peu trop assertif. La com-
plexité des problèmes, la richesse des analyses, la diversité des réfé-
rences, la nouveauté de certaines thèses mériteraient un traitement plus
circonstancié, une exposition moins désinvolte.
Reste qu’il s’agit d’un ouvrage important qui exige une lecture vigi-
lante mais sérieuse et honnête si l’on veut œuvrer à ce que s’instaure,
entre les psychanalystes, un débat épistémique digne de la psychanalyse,
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c’est-à-dire un débat nettoyé de l’obscénité des groupes et à l’abri de la
guerre pour le monopole des transferts.

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