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Notre siècle n’est certes pas facile à vivre, envahi qu’il est par le matérialisme.
Mais en était-il différemment à d’autres époques ? Ce n’est pas si sûr. La pensée
moderne est fortement marquée par Descartes qui a pu écrire : « Souvent il n’y a pas
tant de perfection dans les ouvrages composés de plusieurs pièces, et faits de la main de
divers maîtres, qu’en ceux auxquels un seul a travaillé ». Il rejette le concept de
communauté et cela explique bien des choses dans notre monde actuel.
De plus, l’économie règne sur le monde ; et l’activité économique n’a pas d’autre
objectif que la satisfaction des individus. Les seuls véritables acteurs de la vie
économique sont les individus, et s’ils sont amenés à se regrouper (familles, entreprises,
régions ...), c’est certes pour atteindre une meilleure efficacité globale, mais seuls les
individus assument les fonctions économiques de base : travail, consommation et
épargne.
L’individu, seul, peut-il se tourner vers le Divin ? Les philosophes, des mystiques,
des ermites ont essayé, atteignant une certaine sagesse. Mais il n’y a pas de correction
possible en cas d’erreur et la transmission est pratiquement impossible.
Pour rejoindre l’unité, l’homme doit cesser de se penser lui-même et avoir une
vision multiple et éclatée ; il doit penser le tout. Sa parcelle de lumière, qui n’appartient
pas au monde visible, ne peut se développer dans le petit de l’humain, par nature étroit,
faible, désordonné, en changement perpétuel. Seul, il ne peut rien.
Plus évolué, plus conscient, l’homme altruiste se tourne donc vers une perception
communautaire et met en place des formes communautaires.
Une communauté est la réunion d’êtres unis par une même nécessité de vie et
unissant leurs efforts pour rendre cette vie harmonieuse, et satisfaire les besoins vitaux
de chacun de ses membres. Le lien spécifique et indispensable en est l’adéquation
individuelle à la sauvegarde de l’intérêt général.
Vivre signifie alors chercher à être agissant, chercher les causes de la vie,
comprendre ce qu’est l’homme et en assumer la fonction. La communauté regroupe des
êtres autour de cette recherche et décuple le désir de recherche et d’action. De plus, cela
exige le don, ce qui exclut de vouloir prendre ou même recevoir. Il s’agit de participer
en donnant pour faire vivre la raison d’être de la communauté. Chacun ne reçoit que par
surplus ; il n’y a pas d’aboutissement et la remise en cause est permanente. La
communauté est une réalité vivante dans la pensée, dans la chair comme dans l’esprit de
chacun de ceux qui la composent. C’est une forme naturelle de vivre et elle peut revêtir
de nombreuses formes : familiale, de village, de travail, religieuse, de pensée. Leur
caractère commun est la primauté de l’intérêt général sous-tendu par une règle de vie,
écrite ou orale.
Mais cela n’exclut pas les déviations. L’exemple des sectes, des mafias, des
mouvements religieux à base de fanatisme sont là pour le démontrer.
Qu’est-ce qu’une telle communauté ? C’est ce que l’on connait de mieux pour
échapper à ce qui est petit dans l’humain et pour s’élever. Dans une communauté
tournée vers le divin, les parcelles de lumière individuelles se rassemblent et l’homme
peut vivre une approche globale du tout, du Divin.
La vie est ce qui relie les choses entre elles, soit provisoirement comme pour le
corps, soit éternellement. Une communauté manifestée ici-bas relie l’individu à la
communauté de l’univers, ce qui le rend vivant dans l’éternité (et non pour l’éternité).
L’individu est normalement totalement impliqué dans le temps ; or la Tradition
(fondement d'une communauté) est immuable dans son principe, et elle est totalement
hors du temps. Quel est alors le passage ? La communauté est le moyen d’incarner la
Tradition dans le temps, sans lui appartenir ; l’individu accepte ou non d’y entrer ; c’est
son choix, sa liberté, mais il n’y a pas d’autres moyens pour vivre la Tradition.
Une telle communauté doit avoir des fondements en harmonie avec les lois du
vivant, du créé, donc avec les lois du Démiurge et du Principe de Création. Elle doit
donc chercher les causes et assurer son rôle comme ses responsabilités dans cette
harmonie ; elle a à commencer par maintenir intacts les concepts fondateurs de la
création. La vie n’est que communauté ; l’être isolé ne peut ni survivre ni assurer sa
lignée, que ce soit sur le plan matériel ou spirituel. La nature, véritable archétype de la
communauté, nous révèle que tout en elle est interdépendant. Chaque fonction naturelle
n’existe que par rapport à toutes les autres et aucune ne peut prétendre avoir une
existence purement individuelle. Notre corps en est l’illustration parfaite.
La Tradition met à notre disposition tous les éléments, même si les formes peuvent
paraitre incomplètes ou déformées. Il est d’ailleurs normal qu’à une époque de
changement d’ère zodiacale telle que nous la vivons entre Poissons et Verseau, toutes
les structures de l’ère qui s’achève soient remises en question. Cela fait partie du cycle
évolutif de la création et nous ne savons pas comment se présenteront les formes de
demain. Mais elles seront de toute façon à la gloire du Créateur, et en soumission à la
Règle.
Mais ceci n’est pas suffisant. Vivre et transmettre des rituels mécaniquement
conduit inévitablement à un déphasage entre la lettre et l’esprit ainsi qu’avec
1’évolution cosmique. Si les lois causales, les archétypes, sont immuables dans leur
essence, leurs manifestations et la perception qu’en ont les hommes évoluent
inexorablement. Ces formes du devenir sont d’ailleurs alimentées en permanence par les
pensées et les actes des hommes, et par la connaissance des moyens propres à nourrir et
à faire rayonner ces lois causales dans leur cœur-conscience. Tel est l’acte juste au
moment juste. Tel est aussi le domaine des Grands Mystères et l’évocation du devoir du
Maitre authentique qui a su vivre la transmutation et qui, de ce fait, peut transformer en
or tout ce qu’il touche ou entreprend.
Peu importe que nous, individuellement, arrivions à cette concrétisation, bien que
nous devions y tendre. Notre raison de vivre est de participer à une telle communauté
pour transmettre.
Contrairement aux religions révélées actuelles, nous ne pensons pas que l’individu
peut communiquer directement avec le Grand Architecte. Il faut un intermédiaire de la
même nature que Lui : c’est la communauté initiatique ; elle est « comme une » ; elle est
de l’ordre du Principe de Vie. Communauté et Grand Architecte sont la même chose par
essence. La communauté est ainsi le seul support de création concret, manifesté, mis à la
disposition des hommes ; nous n’en connaissons pas d’autres, et il fonctionne.
C’est seulement ainsi que l’on peut faire rayonner ici-bas la pensée du Grand
Architecte de l’Univers. Elle irradie et transmet son énergie vers la base de la pyramide
qu’elle surmonte.
Quel que soit le monde manifesté à l’avenir, il nous appartient de faire en sorte que
notre certitude et notre foi en un Principe de Création perdure et permette à nos suivants
de retrouver les voies de la Connaissance.