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Oraux blancs – Classe de 1re 3 – Mme Pernet et Mme Loustaunau

Sommaire
Aperçu global……………………………………………………………………………………………………………………………. Page 1

Textes……………………………………………………………………………………………………………..……………….. Pages 2 à 10

Liste des œuvres choisies par les candidats pour la deuxième partie………………………………………. Page 11

Aperçu global

Chapitre 1 : Baudelaire, Les Fleurs du mal,


Parcours : « Alchimie poétique, la boue et l’or »
Œuvre au programme Lecture cursive
Baudelaire, Les Fleurs du mal Senghor, Poésie
1- « L’Albatros », Charles Baudelaire, in Les Fleurs du mal
2- « Une Charogne », Charles Baudelaire, in Les Fleurs du mal
3- « Spleen LXXVIII », Charles Baudelaire, in Les Fleurs du mal
4- « Le Crapaud », Tristan Corbière, in Les Amours jaunes
5- « Escargots », Francis Ponge, in Le Parti pris des choses

Chapitre 2 : Qui est manipulé au théâtre ?


Parcours : « Théâtre et stratagème »
Œuvre au programme Lecture cursive
Marivaux, Les Fausses confidences Jules Romains, Knock
1- Acte I, scène 14, Marivaux, in Les Fausses confidences
2- Acte II, scène 15, Marivaux, in Les Fausses confidences
3- Acte II, scène 1, Jules Romains, in Knock

Chapitre 3 : La Bruyère, Les Caractères


Parcours : « La comédie sociale »
Œuvre au programme Lecture cursive
La Bruyère : Les Caractères, livres V à X Voltaire, De l’horrible danger de la lecture
1- Livre V : « le portrait d’Arrias », La Bruyère, in Les Caractères
2- Livre VIII : « une certaine espèce de courtisans », La Bruyère, in Les Caractères

Chapitre 4 : l’abbé Prévost, Manon Lescaut


Parcours : « personnages en marge, plaisirs du romanesque »
Œuvre au programme Lecture cursive
Abbé Prévost, Manon Lescaut Claudine Galea, Rouge Métro

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Oraux blancs – Classe de 1re 3 – Mme Pernet et Mme Loustaunau

Chapitre 1 : Baudelaire, Les Fleurs du mal,


Parcours : « Alchimie poétique, la boue et l’or »

1- L’Albatros

Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage


Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

À peine les ont-ils déposés sur les planches,


Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d’eux.
Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid !
L’un agace son bec avec un brûle-gueule,
L’autre mime, en boitant, l’infirme qui volait !
Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l’archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.

2- Une charogne
1 Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,
Ce beau matin d'été si doux :
Au détour d'un sentier une charogne infâme
Sur un lit semé de cailloux,

5 Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,


Brûlante et suant les poisons,
Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d'exhalaisons.

9 Le soleil rayonnait sur cette pourriture,


Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;

13 Et le ciel regardait la carcasse superbe


Comme une fleur s'épanouir.
La puanteur était si forte, que sur l'herbe
Vous crûtes vous évanouir.

17 Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,


D'où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons.

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Oraux blancs – Classe de 1re 3 – Mme Pernet et Mme Loustaunau

21 Tout cela descendait, montait comme une vague,


Ou s'élançait en pétillant ;
On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,
Vivait en se multipliant.

24 Et ce monde rendait une étrange musique,


Comme l'eau courante et le vent,
Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique
Agite et tourne dans son van.

28 Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,


Une ébauche lente à venir,
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.

32 Derrière les rochers une chienne inquiète


Nous regardait d'un œil fâché,
Épiant le moment de reprendre au squelette
Le morceau qu'elle avait lâché.

36 - Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,


À cette horrible infection,
Étoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous, mon ange et ma passion !

40 Oui ! telle vous serez, ô la reine des grâces,


Après les derniers sacrements,
Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,
Moisir parmi les ossements.

44 Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine


Qui vous mangera de baisers,
Que j'ai gardé la forme et l'essence divine
De mes amours décomposés .

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Oraux blancs – Classe de 1re 3 – Mme Pernet et Mme Loustaunau

3- LXXVIII – Spleen
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
4 II nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

Quand la terre est changée en un cachot humide,


Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
S'en va battant les murs de son aile timide
8 Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

Quand la pluie étalant ses immenses traînées


D'une vaste prison imite les barreaux,
Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées
12 Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout à coup sautent avec furie


Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
16 Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

- Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,


Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir,
Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.

4- « Le Crapaud », Tristan Corbière, in Les Amours jaunes, 1873

1 Un chant dans une nuit sans air…


– La lune plaque en métal clair
Les découpures du vert sombre.

4 … Un chant ; comme un écho, tout vif


Enterré, là, sous le massif…
– Ça se tait : Viens, c’est là, dans l’ombre…

7 – Un crapaud ! – Pourquoi cette peur,


Près de moi, ton soldat fidèle !
Vois-le, poète tondu, sans aile,
Rossignol de la boue… – Horreur ! –

11 … Il chante. – Horreur !! – Horreur pourquoi ?


Vois-tu pas son œil de lumière…
Non : il s’en va, froid, sous sa pierre.
.....................
Bonsoir – ce crapaud-là c’est moi.
Ce soir, 20 Juillet.

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5- « Escargots », Francis Ponge, in Le Partis pris des choses, 1942

Au contraire des escarbilles1 qui sont les hôtes des cendres chaudes, les escargots aiment la

terre humide. Go on, ils avancent collés à elle de tout leur corps. Ils en emportent, ils en mangent, ils

en excrémentent. Elle les traverse, ils la traversent. C’est une interpénétration du meilleur goût parce

que pour ainsi dire ton sur ton – avec un élément passif, un élément actif, le passif baignant à la fois et

nourrissant l’actif – qui se déplace en même temps qu’il mange.

(Il y a autre chose à dire des escargots. D’abord leur propre humidité. Leur sang froid. Leur

extensibilité.)

À remarquer d’ailleurs que l’on ne conçoit pas un escargot sorti de sa coquille et ne se mouvant

pas. Dès qu’il repose, il rentre aussitôt au fond de lui-même. Au contraire sa pudeur l’oblige à se

mouvoir dès qu’il montre sa nudité, qu’il livre sa forme vulnérable. Dès qu’il s’expose, il marche. […]

L’expression de leur colère, comme de leur orgueil, devient brillante en séchant. Mais aussi elle

constitue leur trace et les désigne au ravisseur (au prédateur). De plus elle est éphémère et ne dure

que jusqu’à la prochaine pluie.

Ainsi en est-il de tous ceux qui s’expriment d’une façon entièrement subjective sans repentir,

et par traces seulement, sans souci de construire et de former leur expression comme une demeure

solide, à plusieurs dimensions. Plus durable qu’eux-mêmes. […]

Mais c’est ici que je touche à l’un des points principaux de leur leçon, qui d’ailleurs ne leur est

pas particulière mais qu’ils possèdent en commun avec tous les êtres à coquilles : cette coquille, partie

de leur être, est en même temps œuvre d’art, monument. Elle, demeure plus longtemps qu’eux.

1
Escarbille : petit morceau de charbon, incomplètement brûlé, qui se mêle aux cendres, ou s’échappe d’un foyer.

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Chapitre 2 : Qui est manipulé au théâtre ?


Parcours : « Théâtre et stratagème »

1- Acte I, scène 14, Marivaux, Les Fausses confidences

Scène XIV
ARAMINTE, DUBOIS.
ARAMINTE.
Qu’est-ce que c’est donc que cet air étonné que tu as marqué, ce me semble, en voyant Dorante ?
D’où vient cette attention à le regarder ?
DUBOIS.
Ce n’est rien, sinon que je ne saurais plus avoir l’honneur de servir madame, et qu’il faut que je
lui demande mon congé.
ARAMINTE, surprise.
Quoi ! seulement pour avoir vu Dorante ici ?
DUBOIS.
Savez-vous à qui vous avez affaire ?
ARAMINTE.
Au neveu de M. Remy, mon procureur.
DUBOIS.
Eh ! par quel tour d’adresse est-il connu de madame ? comment a-t-il fait pour arriver jusqu’ici ?
ARAMINTE.
C’est M. Remy qui me l’a envoyé pour intendant.
DUBOIS.
Lui, votre intendant ! Et c’est M. Remy qui vous l’envoie ? Hélas ! le bon homme, il ne sait pas qui
il vous donne ; c’est un démon que ce garçon-là.
ARAMINTE.
Mais, que signifient tes exclamations ? Explique-toi ; est-ce que tu le connais ?
DUBOIS.
Si je le connais, madame ! si je le connais ! Ah ! vraiment oui ; et il me connaît bien aussi. N’avez-
vous pas vu comme il se détournait, de peur que je ne le visse ?
ARAMINTE.
Il est vrai, et tu me surprends à mon tour. Serait-il capable de quelque mauvaise action, que tu
saches ? Est-ce que ce n’est pas un honnête homme ?
DUBOIS.
Lui ! Il n’y a point de plus brave homme dans toute la terre, il a peut-être plus d’honneur à lui tout
seul que cinquante honnêtes gens ensemble. Oh ! c’est une probité merveilleuse ; il n’a peut-être pas
son pareil.
ARAMINTE.
Eh ! de quoi peut-il donc être question ? D’où vient que tu m’alarmes ? En vérité, j’en suis toute
émue.
DUBOIS.
Son défaut, c’est là. (Il se touche le front.) C’est à la tête que le mal le tient.
ARAMINTE.
À la tête ?
DUBOIS.
Oui ; il est timbré, mais timbré comme cent.

ARAMINTE.
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Dorante ! il m’a paru de très bon sens. Quelle preuve as-tu de sa folie ?
DUBOIS.
Quelle preuve ? Il y a six mois qu’il est tombé fou ; il y a six mois qu’il extravague d’amour, qu’il
en a la cervelle brûlée, qu’il en est comme un perdu. Je dois bien le savoir, car j’étais à lui, je le servais ;
et c’est ce qui m’a obligé de le quitter ; et c’est ce qui me force de m’en aller encore : ôtez cela, c’est un
homme incomparable.
ARAMINTE, un peu boudant.
Oh bien ! il fera ce qu’il voudra ; mais je ne le garderai pas. On a bien affaire d’un esprit renversé ;
et peut-être encore, je gage, pour quelque objet qui n’en vaut pas la peine ; car les hommes ont des
fantaisies !…
DUBOIS.
Ah ! vous m’excuserez. Pour ce qui est de l’objet, il n’y a rien à dire. Malepeste ! sa folie est de
bon goût.
ARAMINTE.
N’importe ; je veux le congédier. Est-ce que tu la connais, cette personne ?
DUBOIS.
J’ai l’honneur de la voir tous les jours ; c’est vous, madame.

2- Acte II, Scène 15, Marivaux, Les Fausses Confidences

ARAMINTE.
Je ne vous interroge que par étonnement. Elle ignore que vous l’aimez, dites-vous, et vous lui
sacrifiez votre fortune ! Voilà de l’incroyable. Comment, avec tant d’amour, avez-vous pu vous taire ?
On essaie de se faire aimer, ce me semble ; cela est naturel et pardonnable.
DORANTE.
Me préserve le ciel d’oser concevoir la plus légère espérance ! Être aimé, moi ! non, madame, son
état est bien au-dessus du mien. Mon respect me condamne au silence, et je mourrai du moins sans
avoir eu le malheur de lui déplaire.
ARAMINTE.
Je n’imagine point de femme qui mérite d’inspirer une passion si étonnante, je n’en imagine point.
Elle est donc au-dessus de toute comparaison ?
DORANTE.
Dispensez-moi de la louer, madame ; je m’égarerais en la peignant. On ne connaît rien de si beau
ni de si aimable qu’elle, et jamais elle ne me parle ou ne me regarde que mon amour n’en augmente.
ARAMINTE, baissant les yeux.
Mais votre conduite blesse la raison. Que prétendez-vous, avec cet amour pour une personne qui
ne saura jamais que vous l’aimez ? Cela est bien bizarre. Que prétendez-vous ?
DORANTE.
Le plaisir de la voir, et quelquefois d’être avec elle, est tout ce que je me propose.
ARAMINTE.
Avec elle ! Oubliez-vous que vous êtes ici ?
DORANTE.
Je veux dire avec son portrait, quand je ne la vois point.

ARAMINTE.

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Son portrait ? Est-ce que vous l’avez fait faire ?


DORANTE.
Non, madame ; mais j’ai, par amusement, appris à peindre, et je l’ai peinte moi-même. Je me
serais privé de son portrait si je n’avais pu l’avoir que par le secours d’un autre.
ARAMINTE, à part.
Il faut le pousser à bout. (Haut.) Montrez-moi ce portrait.
DORANTE.
Daignez m’en dispenser, madame ; quoique mon amour soit sans espérance, je n’en dois pas
moins un secret inviolable à l’objet aimé.
ARAMINTE.
Il m’en est tombé un par hasard entre les mains ; on l’a trouvé ici. (Montrant la boîte.) Voyez si ce
ne serait point celui dont il s’agit.
DORANTE.
Cela ne se peut pas.
ARAMINTE, ouvrant la boîte.
Il est vrai que la chose serait assez extraordinaire ; examinez.
DORANTE.
Ah ! madame, songez que j’aurais perdu mille fois la vie avant d’avouer ce que le hasard vous
découvre. Comment pourrai-je expier ? …
(Il se jette à ses genoux.)
ARAMINTE.
Dorante, je ne me fâcherai point. Votre égarement me fait pitié. Revenez-en ; je vous le pardonne.
MARTON, paraît et s’enfuit.
Ah ! (Dorante se lève vite)

ARAMINTE.
Ah ciel ! C’est Marton ! Elle vous a vu.

DORANTE, feignant d’être déconcerté.


Non, Madame, non ; je ne crois pas ; elle n’est point entrée.

3- Acte II, scène 1, Jules Romains, Knock

LE TAMBOUR, après plusieurs hésitations.


Je ne pourrai pas venir tout à l’heure, ou j’arriverai trop tard. Est-ce que ça serait un effet de votre
bonté de me donner ma consultation maintenant ?
KNOCK
Heu... Oui. Mais dépêchons-nous. J’ai rendez-vous avec M. Bernard, l’instituteur, et avec M le
pharmacien Mousquet. Il faut que je les reçoive avant que les gens n’arrivent. De quoi souffrez-vous ?
LE TAMBOUR
Attendez que je réfléchisse ! (Il rit.) Voilà. Quand j’ai diné, il y a des fois que je me sens une espèce de
démangeaison ici. (Il montre le haut de son épigastre.) Ça me chatouille, ou plutôt, ça me gratouille.
KNOCK, d’un air de profonde concentration.
Attention. Ne confondons pas. Est-ce que ça vous chatouille, ou est-ce que ça vous gratouille ?
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LE TAMBOUR
Ça me gratouille. (Il médite.) Mais ça me chatouille bien un peu aussi.
KNOCK
Désignez-moi exactement l’endroit.
LE TAMBOUR
Par ici.
KNOCK
Par ici... où cela, par ici ?
LE TAMBOUR
Là. Ou peut-être là... Entre les deux.
KNOCK
Juste entre les deux ?... Est-ce que ça ne serait pas plutôt un rien à gauche, là, où je mets mon doigt ?
LE TAMBOUR
Il me semble bien.
KNOCK
Ça vous fait mal quand j’enfonce mon doigt ?
LE TAMBOUR
Oui, on dirait que ça me fait mal.
KNOCK
Ah ! ah ! (Il médite d’un air sombre.) Est-ce que ça ne vous gratouille pas davantage quand vous avez
mangé de la tête de veau à la vinaigrette ?
LE TAMBOUR
Je n’en mange jamais. Mais il me semble que si j’en mangeais, effectivement, ça me gratouillerait plus.
KNOCK
Ah ! Ah ! très important. Ah ! ah ! Quel âge avez-vous ?
LE TAMBOUR
Cinquante et un, dans mes cinquante-deux.
KNOCK
Plus près de cinquante-deux ou de cinquante et un ?
LE TAMBOUR, il se trouble peu à peu.
Plus près de cinquante-deux. Je les aurai fin novembre.

KNOCK, lui mettant la main sur l’épaule.

Mon ami, faites votre travail aujourd’hui comme d’habitude. Ce soir, couchez-vous de bonne heure.
Demain matin, gardez le lit. Je passerai vous voir. Pour vous, mes visites seront gratuites. Mais ne le
dites pas. C’est une faveur.

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Chapitre 3 : La Bruyère, Les Caractères


Parcours : « La comédie sociale »

1- « Arrias », La Bruyère, Les Caractères, Livre V


Arrias a tout lu, tout vu, il veut le persuader1 ainsi ; c’est un homme universel, et il se donne pour tel :
il aime mieux mentir que de se taire ou de paraître ignorer quelque chose. On parle à la table d’un grand2
d’une cour du Nord : il prend la parole, et l’ôte à ceux qui allaient dire ce qu’ils en savent ; il s’oriente dans
cette région lointaine comme s’il en était originaire ; il discourt des mœurs de cette cour, des femmes du pays,
de ses lois et de ses coutumes ; il récite des historiettes qui y sont arrivées ; il les trouve plaisantes, et il en rit
le premier jusqu’à éclater. Quelqu’un se hasarde de le contredire, et lui prouve nettement qu’il dit des choses
qui ne sont pas vraies. Arrias ne se trouble point, prend feu au contraire contre l’interrupteur : « Je n’avance,
lui dit-il, je ne raconte rien que je ne sache d’original : je l’ai appris de Sethon, ambassadeur de France dans
cette cour, revenu à Paris depuis quelques jours, que je connais familièrement, que j’ai fort interrogé, et qui
ne m’a caché aucune circonstance. » Il reprenait le fil de sa narration avec plus de confiance qu’il ne l’avait
jamais commencée, lorsque l’un des convives lui dit : « C’est Sethon à qui vous parlez, lui-même, et qui arrive
de son ambassade. »

2- « Une certaine espèce de courtisans », La Bruyère, Les Caractères, Livre VIII

Les cours ne sauraient se passer3 d’une certaine espèce de courtisans, hommes flatteurs,
complaisants4, insinuants5, dévoués aux femmes, dont ils ménagent6 les plaisirs, étudient les faibles7 et
flattent toutes les passions : ils leur soufflent à l’oreille des grossièretés, leur parlent de leurs maris et de leurs
amants dans les termes convenables, devinent leurs chagrins, leurs maladies, et fixent leurs couches8 ; ils font
les modes, raffinent sur le luxe et sur la dépense, et apprennent à ce sexe de prompts9 moyens de consumer10
de grandes sommes en habits, en meubles et en équipages ; ils ont eux-mêmes des habits où brillent
l’invention et la richesse, et ils n’habitent d’anciens palais qu’après les avoir renouvelés et embellis ; ils
mangent délicatement et avec réflexion ; il n’y a sorte de volupté11 qu’ils n’essayent, et dont ils ne puissent
rendre compte. Ils doivent à eux-mêmes leur fortune, et ils la soutiennent avec la même adresse qu’ils l’ont
élevée. Dédaigneux et fiers, ils n’abordent plus leurs pareils, ils ne les saluent plus ; ils parlent où tous les
autres se taisent, entrent, pénètrent en des endroits et à des heures où les grands n’osent se faire voir : ceux-
ci, avec de longs services, bien des plaies sur le corps, de beaux emplois ou de grandes dignités, ne montrent
pas un visage si assuré, ni une contenance12 si libre. Ces gens ont l’oreille des plus grands princes, sont de
tous leurs plaisirs et de toutes leurs fêtes, ne sortent pas du Louvre ou du Château13, où ils marchent et
agissent comme chez eux et dans leur domestique14, semblent se multiplier en mille endroits, et sont toujours
les premiers visages qui frappent les nouveaux venus à une cour ; ils embrassent, ils sont embrassés ; ils rient,
ils éclatent, ils sont plaisants, ils font des contes : personnes commodes, agréables, riches, qui prêtent, et qui
sont sans conséquence.

1 Le persuader : persuader tout le monde


2 Grand : noble, prince de sang ou membre de la haute noblesse
3
Ne sauraient se passer : ne pourraient pas se passer de
4
Complaisants : qui fait preuve de gentillesse et d’amabilité
5
Insinuants : qui s’introduisent doucement et adroitement quelque part
6
Ménagent : dont ils satisfont les plaisirs
7
Les faibles : les faiblesses
8
Fixent leurs couches : en deviennent eux-mêmes les amants + évoquer les détails de leurs accouchements
9
De prompts moyens : des moyens efficaces
10
Consumer : dépenser
11
Volupté : plaisir
12
Contenance : manière d’être
13
Du château : de Versailles
14
Dans leur domestique : dans leur maison, dans leur intimité
10
Dossier oraux blancs – Catherine Pernet (et Sophie Loustaunau) – année 2022-23

Liste des œuvres choisies par les élèves pour la deuxième partie de l’épreuve

Ouvre choisie
ABDENOURI Amélia
AYRAL Alexandre Knock
BAÏCHOU Shaïna Les fausses confidences
BAROUDI Tarik
BEN SALAH Mehdi
BENMESSAOUD Smaïn
BERKACHE Dounia
BERNAUD Lilian
BOBICHON Louise
BONILLA Evan
BOYER Lily Knock
BRUNO Jade
BRUYAS Thibault Knock
CHARDON Leelou
CHOUCHOU Besma Les fleurs du mal
COURREGE Cyane Knock
DELINTADAKIS Flavie
DUDONNÉ Looréo
ENNOUH Adnan Knock
FAYOLLE Nina Knock
GORMEZ Mevlut
HARIZI Célia Les fausses confidences
IMADOUCHENE Djibril
KHESSIBA Ilhem Knock
LENGUE TE Evan Knock
LEVEQUES Nina
LIOGIER Noah
MERZKANI Liana Knock
POINAS--MATTINA Camille Knock
REMILI Amina
ROMERO Nolan
ROUARD Léonie Voltaire, De l'horrible danger de la lecture
SAAD Yasmine
SCAFIDI Camille Knock
VERNAY Jules Les fausses confidences

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