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Master : Economie et management internationaux

Module : Gestion des risques internationaux

Enseignant : A. EL HIRI

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Les dix principaux risques mondiaux en 2022
Bond de l’inflation, pénurie d’énergie et conflit en Ukraine : des défis pour les entreprises,
selon les Services économiques d’EDC.

1. Récession économique sur les marchés développés


Dans le but de freiner l’inflation et, plus important encore, calmer les attentes inflationnistes,
les banques centrales aux États-Unis, au Canada et en Europe privilégient une approche
vigoureuse en relevant à plusieurs reprises les taux d’intérêt – de nouvelles hausses sont
d’ailleurs attendues au cours des prochains mois. L’augmentation des coûts d’emprunt
entravera la capacité des consommateurs à financer l’achat d’une nouvelle voiture ou maison,
ou encore l’achat d’autres biens. La morosité des consommateurs gagnera les entreprises, ce
qui se traduira à terme par une détente de l’activité de l’économie réelle. Le scénario de
référence des Services économiques d’EDC n’évoque pas ce risque, vu le dynamisme de la
consommation et la pénurie de main-d’œuvre, le tout sur fond de très faible chômage. Le
rythme et l’ampleur des relèvements de taux d’intérêt pourraient bien faire plonger dans la
récession l’économie américaine et d’autres économies avancées, comme le Canada.

2. Inflation, effritement de la demande et révision des


risques
Dans leurs efforts pour surmonter les écueils posés par une conjoncture difficile, les banques
centrales risquent de mal juger l’incidence du resserrement de la politique monétaire en
donnant la préséance à la lutte contre l’inflation malgré les contrecoups sur le secteur
financier. La progression des taux d’intérêt bien au-delà des niveaux considérés comme
neutres rend très probable une révision des risques, ce qui serait lourd de conséquences pour
le secteur financier. Les entreprises financièrement fragilisées par la pandémie sont exposées
à d’importants risques de défaut en raison de la raréfaction rapide des liquidités.

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3. Chaînes d’approvisionnement et pénurie de main-
d’œuvre
Des décennies d’efforts ont permis d’établir des chaînes d’approvisionnement complexes
capables d’adaptation et d’agilité. Or, celles-ci ont été bouleversées par les différends
commerciaux entre les États-Unis et la Chine et les répercussions de la crise sanitaire. Avant
que les chaînes d’approvisionnement ne puissent regagner le terrain perdu, l’économie
mondiale a subi les effets des confinements en Chine, puissance incontestable du secteur de la
fabrication, et de la guerre en Ukraine, dont les contrecoups sont ressentis dans une myriade
de secteurs, des céréales à celui du pétrole et du gaz naturel. Le marché de l’emploi serré –
résultat d’une main-d’œuvre disponible moins abondante et de la diminution de l’immigration
– a accentué les tensions à l’ensemble des secteurs.

De plus, des événements météo extrêmes et l’apparition d’un nouveau virus pourraient
aisément perturber les chaînes d’approvisionnement au cours de l’année à venir. En réponse,
les fabricants ont augmenté leurs stocks et se sont mis en mode recrutement pour prévenir tout
choc futur du côté de la main-d’œuvre. De nouvelles tendances se dessineraient à l’avenir,
comme le rapatriement des activités à proximité ou près d’un marché ami (les activités des
chaînes d’approvisionnement seraient alors uniquement menées par des pays partenaires), ce
qui permettrait d’assurer le déroulement des activités jusqu’à ce que les fabricants, les
détaillants et les autres acteurs de l’écosystème trouvent des solutions de rechange et
s’adaptent à la nouvelle réalité – où la résilience l’emporte sur l’efficacité.

4. Conflit entre la Russie et l’Ukraine


L’invasion de la Russie par l’Ukraine a pris au dépourvu la plupart des dirigeants du monde.
L’impact du conflit et les sanctions imposées à l’initiative de l’Occident ont bouleversé les
chaînes d’approvisionnement de produits de base essentiels, notamment celles des céréales et
de l’énergie. La hausse des prix des aliments et de l’énergie a fait monter en flèche l’inflation
partout sur le globe. Même si le scénario de référence des Services économiques d’EDC
prévoit que la guerre restera limitée à l’Ukraine, une escalade et une expansion du conflit dans
d’autres pays posent toujours un risque de dégradation des perspectives. En fait, cette guerre a
des répercussions directes sur les exportations canadiennes. Le plus récent sondage de l’indice
de confiance commerciale d’EDC révèle que plus du tiers des répondants ont de la difficulté à
se procurer des intrants ou doivent composer avec des retards découlant du conflit qui fait
rage en Ukraine.

5. Crise de la dette souveraine


Ces dernières décennies, les marchés émergents ont conduit d’importantes réformes
structurelles, dont l’adoption de taux de change flottants, ce qui les rend plus résistants aux
chocs externes du genre de ceux observés dans les années 1980 et 1990. Les faibles taux
d’intérêt et une inflation peu élevée ont permis aux entités souveraines et aux entreprises en
difficulté de rester à flot et d’emprunter à des taux abordables. Or, dans un contexte de
relèvement des taux d’intérêt et de croissance décevante, on s’inquiète de plus en plus de la
possibilité d’une nouvelle crise de la dette souveraine.

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À l’heure où près de 50 pays se trouvent en situation de surendettement ou risquent
sérieusement de l’être – parce qu’ils ont été trop lents à restructurer leur dette –, le récent
défaut de paiement du Sri Lanka ne serait pas un événement isolé. Une crise systémique de la
dette souveraine reste peu probable, selon le scénario de référence des Services économiques
d’EDC, mais si une pareille crise éclate, ces répercussions s'étendraient à l’ensemble des
économies émergentes. Les marchés développés, comme les États européens en périphérie,
pourraient subir des tensions financières qu’elles pourraient cependant gérer grâce à leur plus
grande habileté à absorber les chocs.

6. Marché de l’énergie sous tension


La guerre en Ukraine et les sanctions prises à l’endroit des exportations énergétiques russes
ont exacerbé un marché mondial de l’énergie déjà sous tension. Les cours énergétiques élevés
et leur incidence sur l’inflation ont accentué l’incertitude économique et l’agitation sociale
partout sur le globe. La pénurie d’énergie a aussi modifié le paysage géopolitique, alors que
les pays se mettent en quête d’autres sources d’approvisionnement. À moyen et à long termes,
le maintien des cours énergétiques élevés aura comme effet de modérer la demande en
produits pétroliers, d’accélérer la transition vers les énergies renouvelables et de faire basculer
le centre mondial du commerce de l’énergie des pays riches en pétrole aux pays générant le
plus d’électricité. En tant que grand producteur de pétrole et exportateur net d’énergie, à court
terme, le Canada devrait profiter de l’ascension des cours énergétiques, ce qui attirera plus
d’investissements vers le secteur pétrogazier.

7. Sécurité alimentaire mondiale


Compte tenu de l’effet combiné de l’inflation, des perturbations persistantes des chaînes
d’approvisionnement – en plus d’une guerre qui fait rage en Ukraine, l’un des principaux
greniers de la planète –, l’offre alimentaire mondiale a rarement été soumise à autant
d’incertitude. Les denrées alimentaires et les engrais coûtent de plus en plus cher et se font de
plus en plus rares. Les consommateurs et les producteurs en faisant les frais, et les
gouvernements sont pressés d’intervenir. Sur bon nombre de marchés émergents, les
répercussions de ce sursaut de l’inflation pourraient être dévastatrices vu la capacité limitée de
beaucoup de consommateurs et de gouvernements de s’adapter à des prix plus élevés et de
nouvelles perturbations des chaînes d’approvisionnement.

Cette situation étant appelée à persister, le problème de l’insécurité alimentaire pourrait bien
effacer plusieurs des gains réalisés cette dernière décennie sur les fronts économique et du
développement, et contribuer aux troubles politiques dans la plupart des pays de l’hémisphère
Sud. Les restrictions visant les exportations alimentaires risquent de devenir un sujet
incontournable de la politique intérieure de plusieurs marchés émergents, les gouvernements
accordant la priorité aux besoins de leur propre pays au détriment du commerce mondial. Un
scénario de ce genre offre l’occasion aux exportateurs canadiens du secteur agroalimentaire
ayant les ressources nécessaires d’aider à atténuer les tensions sur l’offre.

8. Réglementation face à la menace climatique


Face à la reconnaissance internationale de l’urgence d’agir pour relever les défis
environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), les gouvernements et les acteurs
industriels sont de plus en plus pressés d’accroître leurs engagements dans ces domaines. La
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déclaration ESG transparente et proactive est en voie de devenir la norme, et elle est de plus
en liée aux primes versées aux hauts dirigeants. Souvent, ces engagements ne s’inscrivent pas
dans des initiatives volontaires, mais deviennent plutôt des exigences réglementaires mettant
l’accent sur la convergence des normes et des cibles ESG. Même si ce virage augmente le
coût de faire des affaires pour les secteurs, il annonce aussi de meilleurs rendements et un
accès au crédit à moindres frais. Le bilan ESG procurera un avantage concurrentiel et exclura
certains acteurs du marché. Il subsiste le risque que beaucoup d’entreprises ne soient pas
prêtes à effectuer ces changements ou n’aient pas correctement pris en compte le coût de la
transition.

9. Une mondialisation marquant le pas


La guerre en Ukraine et les sanctions imposées à l’encontre de la Russie mettent à rude
épreuve les chaînes d’approvisionnement et réorientent les flux commerciaux (les
exportations d’énergie prennent la route de Chine et de l’Inde plutôt que celle de l’Europe).
Cette guerre n’est que le plus récent écueil pour le commerce international, après la crise
sanitaire et le différend commercial entre les États-Unis et la Chine. Réunis, ces chocs
poussent les entreprises à passer à l’action et à accorder la priorité à la sécurité du commerce
plutôt qu’à son efficience. Pour ce faire, elles revoient leurs chaînes d’approvisionnement en
augmentant le nombre de leurs fournisseurs, en accumulant des stocks et en investissant dans
l’intégration verticale. Par ailleurs, les gouvernements adoptent de plus en plus des politiques
industrielles à l’intention des secteurs « stratégiques » afin de réduire leur dépendance
économique. Si, au final, de telles mesures rendent les entreprises plus résilientes, elles
entraînent des coûts supplémentaires importants, qui seront sans doute répercutés aux
consommateurs et aux contribuables. La fin de la mondialisation ne s’impose pas comme un
scénario allant de soi. Chose certaine, une transformation est en train de s’opérer. Pour une
nation commerçante comme le Canada, il est vital de comprendre comment elle évoluera.

10. Vague de défauts chez les entreprises


Outre les marchés des capitaux et les entités souveraines, les entreprises représentent une
autre catégorie d’actifs à surveiller de près. L’économie mondiale a repris du poil de la bête
au deuxième trimestre de 2020 et de 2021, mais ces gains ont été réalisés aux prix d’une
hausse sensible de l’endettement des entreprises. Cet endettement a été favorisé par les
généreuses garanties sur les prêts consenties par les gouvernements et un coût d’emprunt à un
plancher inédit, les banques centrales déployant des programmes de relance monétaire en
abaissant les taux d’intérêt. Or, le repli économique – causé par les tensions inflationnistes et
les problèmes de la chaîne d’approvisionnement – et des conditions financières plus serrées
posent des risques pour les entreprises puisque les investisseurs se détournent des entreprises
endettées et exigent des rendements plus élevés.

L’accès facile aux marchés du crédit a permis aux entreprises « zombie » – à savoir celles qui
ne sont pas viables sur le plan financier – de survivre sans remplir des exigences en matière de
profitabilité et de productivité, et ce, en tirant parti des ressources des banques et des marchés
financiers. Selon certaines estimations, un cinquième des 3 000 plus grandes sociétés cotées
en Bourse seraient considéré comme des « zombie ». L’accès sans réserve aux marchés du
crédit étant révolu, alors que les gouvernements retirent leur soutien financier et que
l’économie ralentit la cadence, le risque à court terme d’une vague de défaut chez les
entreprises est une éventualité à laquelle les exportateurs canadiens doivent se préparer.

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