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Travail : activité par laquelle l’homme transforme la nature, se transforme lui-même et produit une
oeuvre.
- A la fois : l’action (voilà le travail à faire), le résultat (un bon travail !) et le métier (c’est
mon travail, je suis jardinier)
- Souffrance (tripaliare) : sur la nature ? sur la personne (aliénation) ?
==> (I) Il est nécessaire pour l’homme de transformer la nature pour sa survie.
(II) Cette transformation peut s’avérer excessive pour la nature et l’être humain lui-même
(III) Peut-être faut-il transformer nos lois pour protéger la nature
I. Transformer la Nature : entre domination et destruction
L’être humain transforme sans cesse la nature qui l’entoure, comme s’il en avait le droit,
comme si c’était son droit, sa propriété. Ce n’est que récemment qu’on commence à contester à
grande échelle cette manière de voir la nature comme étant au service de l’homme.
*Cette vision est légitimée par l’argument suivant : c’est une nécessité pour la survie de
l’espèce humaine.
- Repère : nécessaire / contingent
- Nécessaire (la nécessité) : qui ne peut pas ne pas être (ne cesse sum = je ne cède pas)
- Contingent (la contingence) : qui arrive par hasard
En effet, On parle souvent de catastrophe naturelle, la nature apparaît comme une puissance
menaçante et dangereuse à laquelle nous serions soumis. Il est nécessaire que l’homme crée,
transforme, invente pour survivre.
C’est en ce sens que John Stuart Mill, dans son œuvre intitulée, La Nature (1874), nous
invite à « reconnaitre que les puissances de la nature sont souvent en position d’ennemi face
à l’homme, qui doit user de force et d’ingéniosité afin de lui arracher pour son propre usage
le peu dont il est capable », et « que l’homme mérite d’être applaudi quand ce peu qu’il
obtient dépasse ce qu’on pouvait espérer de sa faiblesse physique comparée à ces forces
gigantesques. »
=> Réutilisation en philosophie, notamment au 17ème siècle par les rationalistes comme René
Descartes, DDM, « nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature. »
(attention, car l’être humain aurait ici presque tendance à oublier qu’il fait partie de la nature !!)
B. Destruction de la nature
*= Visions non occidentales, nous invitent à prendre du recul par rapport au rôle qu’a pris l’être
humain en transformant la nature. La nature, dans la philosophie taoïste, et dans des visions
animistes du monde, un tout sacré. Il y a un ordre des choses qu’il ne faut pas toucher. Toute
transformation humain est donc non pas construction positive, mais destruction négative.
Rousseau, dans Essai sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, nous
dit, par exemple, qu’en cherchant à se faciliter la vie grâce à de multiples transformations de la
nature, c’est l’homme lui-même qui s’est dénaturé. Il distingue deux temps : un temps passé où
l’homme était dans « l’état de nature » et le temps présent, celui de la société civilisée :
« Dans ce nouvel état, avec une vie simple et solitaire, des besoins très bornés, et les instruments qu’ils
avaient inventés pour y pourvoir, les hommes jouissant d’un fort grand loisir l’employèrent à se procurer
plusieurs sortes de commodités inconnues à leurs pères ; et ce fut là le premier joug qu’ils s’imposèrent
sans y songer, et la première source de maux qu’ils préparèrent à leurs descendants ; car outre qu’ils
continuèrent ainsi à s’amollir le corps et l’esprit, ces commodités ayant par l’habitude perdu presque tout
leur agrément, et étant en même temps dégénérées en de vrais besoins, la privation en devint beaucoup
plus cruelle que la possession n’en était douce, et l’on était malheureux de les perdre, sans être heureux de
les posséder. (...) Mais dès l’instant qu’un homme eut besoin du secours d’un autre ; dès qu’on s’aperçut
qu’il était utile à un seul d’avoir des provisions pour deux, l’égalité disparut, la propriété s’introduisit, le
travail devint nécessaire et les vastes forêts se changèrent en des campagnes riantes qu’il fallut arroser de la
sueur des hommes, et dans lesquelles on vit bientôt l’esclavage et la misère germer et croître avec les
moissons. La métallurgie et l’agriculture furent les deux arts dont l’invention produisit cette grande
révolution. »
Activité - Entrainement à l’explication de texte — corrigé :
Explication de texte
INTRODUCTION
Introduire le texte (auteur, Rousseau Essai sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les
oeuvre, date + contexte hommes
historique si pertinent) Contexte : début Rév° Industrielle (UK) ; mvt des Lumières (à développer)
Thèse défendue par L’homme, en opérant des transformations sur son environnement naturel, a
Rousseau cru améliorer ses conditions de vie mais crée en réalité son propre malheur.
Montrer que le texte n’est > Thèse à contre courant de la pensée qui valorise le progrès
pas simple (originalité, > Thèse qui s’appuie sur un paradoxe : ce qui semble bon est en fait mal
paradoxe, etc.) > Texte court et dense qui nécessite d’être décortiqué : qu’est-ce que ce
« nouvel état » dont parle J.-J. R. ? En quoi s’oppose-t-il à ce qui aurait
existé avant ? Comment est-on passé de l’un à l’autre ?
Problématique En quoi les améliorations que l’être humain a mis en place sont-elles
susceptibles de lui nuire ?
A. Une thèse fondée sur l’opposition entre deux « états » et une phase
transitoire
(i) Antithèse « père » / « descendant » —> une génération de transition qui est à
l’origine d’un changement
(ii) Antithèse « nouvel » / « inconnues » —> changement structurel de la société qui
est en train de se faire
(iii) Caractéristiques de ce changement :
(i) « jouissant d’un fort grand loisir » => état où il y a du « loisir » donc pas
de travail [analyser / déduire des idées pour tomber sur les notions au
programme].
(ii) « sans y songer » => non réfléchi : les être humains ne réalisent pas les
conséquences de ce qu’ils entreprennent (phénomène inconscient)
B. Un état idyllique des premiers temps
(i) Rythme ternaire « avec une vie simple et solitaire, des besoins très bornés, et les
instruments qu’ils avaient inventés pour y pourvoir » qui reprend l’essentiel de la
période passée => état de nature idéalisé par Rousseau.
(i) L’être humain est « solitaire » —> pas de communauté, pas de culture
(ii) « des besoins très bornés » —> que les besoins primaires, rien de superficiel
(iii) « les instruments qu’ils avaient inventés pour y pourvoir » —> pas d’outils ni de
machine, seulement des instruments qui montre le faible développement
technique de l’être humain dans cet état de nature. [utiliser les oppositions
vues en cours comme ici instrument/outils pour aller au fond de l’analyse]
(iii) Dimension extrêmement méliorative : « les hommes jouissant d’un fort grand loisir
» —> jouissance = bonheur
(iv) Attention : cet état de nature est une fiction, un mythe, une construction de
l’esprit /!\ [essayer de montrer votre sens critique en fin d’analyse]
(ii) Des « commodités » vues comme un « joug » et la « source des maux » =>
paradoxe :
(ii) « joug » au sens propre, la pièce de bois que l’on met sur la tête des bœufs
pour les atteler, au sens figuré c’est une contrainte. [donner des définitions
des termes du texte, surtout quand vous connaissez une étymologie] +
« source de maux » => deux expressions péjoratives qui condamnent ces
« commodités » sans nuance.
(iii) Structure argumentative avec un argument présenté comme évident et qui est à
peine expliqué (« outre qu’ils continuèrent ainsi à s’amollir le corps et l’esprit »), un
second argument plus long
(i) Reprise de la vision dualiste corps / âme, ici « esprit » => idéal d’un corps et d’un
esprit vif, tant en ce qui concerne la condition physique que l’agilité de l’esprit
(facultés intellectuelles) [ici, il faut expliquer les termes « corps » et « esprit »
pour expliquer ce à quoi pense Rousseau et montrer que vous comprenez
concrètement de quoi il parle]
(ii) « s’amollir » : passage du dur au mou => Rousseau considère que le nouvel état ne
permet plus d’entraîner les capacités physiques et intellectuelles de l’être humain.
Pourquoi ? On peut penser que si l’être humain a une vie plus « commode », il a
moins besoin de faire d’effort [argument valable aujourd’hui : avec ubereat,
« commodité » par excellence du XXIè siècle (!) je peux me nourrir sans faire le
moindre effort et m’affaler - m’amollir - sur mon canapé pour prendre un repas…
CQFD !]
(i) « L’égalité » : alors que les hommes vivaient seuls et tous égaux, le développement
des « commodités » créent des rapports de force entre les hommes : certains sont
« utiles » au d’autres. Conséquences : certains ont plus de valeurs que d’autres. Ce que
décrit Rousseau ici de façon mythifiée, c’est le début de la société humaine, avec des
échanges (troc puis monétisation des échanges) et de l’inégalité (cf. Titre de l’œuvre !)
[ici, je conceptualise ce dont parle Rousseau pour montrer que je comprends
l’enjeu de sa thèse].
(i) « les vastes forêts se changèrent en des campagnes riantes » => Entreprise de
cultivation de la terre (nature) a priori positive qui ici est perçu comme négative
(iii) Conséquences :
Travail : activité par laquelle l’homme transforme la nature, se transforme lui-même et produit une
oeuvre.
- A la fois : l’action (voilà le travail à faire), le résultat (un bon travail !) et le métier (c’est mon
travail, je suis jardinier)
- Activité simple (secteur primaire) : labourer, moissonner, défricher —> activités industrielles et
tertiaires, de plus en plus déconnectées de la nature
- Objectif —> vie ? Utilité (argent, mais pas toujours)
* Lien avec Rousseau, qui nous dit que dans l’état de nature, il n’y a pas de travail (« oisiveté »,
qui rime pour lui avec bonheur). Dans l’état de société, l’homme doit travailler : ce travail est vu
péjorativement, il est source de difficulté (« sueur des hommes ») et d’effort permanent. En
effet, le travail nous marque physiquement (dos courbé du paysan).
* Dans les récits mythiques ou religieux, le travail est souvent vu comment une peine
* Textes bibliques (la chute d’Adam et Eve, qui dans un temps premier, ne devaient pas
travailler, puis, à cause de leur « pêché » - fruit de la connaissance - , se retrouvent sur terre
à devoir travailler)
* Théogonie d’Hésiode : l’âge d’or puis l’âge de fer, passage d’un âge heureux où la nature
est riche et donne ses fruits sans que l’homme ait besoin de travailler, puis, après le passage
de Prométhée, qui donne le feu et la connaissance aux hommes, Zeus condamne ces
derniers au travail et la la discorde (le fer est le métal des armes, pour la guerre, et des
outils, pour le travail/technique)
* C’est cependant ce même travail qui permet de rendre compte de l’ingéniosité de l’homme :
c’est parce qu’il est contraint de travailler que l’homme peut se réaliser dans ce qu’il fait. S’il
l’on n’est obligé de rien, on ne fait rien, mais c’est la contrainte qui nous fait agir, qui nous fait
réellement devenir ce que nous sommes.
* Soit je crois que je suis né pour quelque chose de précis — C’est l’idée de Platon quand
il imagine une cité idéale où les hommes vivraient en harmonie (La République manuel p.
374) (même conception antique que Aristote « la nature ne fait rien en vain) => chaque
être humain aurait des capacités naturelles, il serait fait pour travailler et doué dans un
domaine précis. Exemple : avoir des mains de pianiste. C’est ce postulat qu’on a quand on
se pose la question « Pour quel métier suis-je fait ? »
* Soit je ne crois pas que je suis fais pour quelque chose en particulier, mais c’est en
travaillant que je construis qui je suis. Je fais des choix : celui de faire tel travail, de
devenir médecin parce que je veux devenir quelqu’un qui sauve des vies par exemple. Ici,
on est dans une vision du monde qu’a défendu JP Sartre : « l’existence précède
l’essence », c’est-à-dire j’existe, et ensuite je définis qui je suis (= mon essence).
Il ne faut pas en rester au concept générique, « le » travail, mais bien distinguer les différents
types de « travail ».
- Le travail comme réalisation (transformation) ou le travail comme emploi salarié => deux buts
différents s’opposent, d’un côté le travail pour produire, de l’autre pour de l’argent
- travail technique de l’artisan : est-ce une simple répétition technique ou un maniement
admirable
- Travail artistique de l’artiste
- Travail aliénant de l’ouvrier
* Marx : le travail est aliénation, c’est-à-dire qu’il déshumanise l’homme (alien- = autre en latin,
donc aliénation, c’est devenir autre) en le plaçant derrière la machine. Il s’agit particulièrement du
travail de l’ouvrier, en usine, post société industrielle.
Non seulement déshumanisé (aliéné) mais aussi exploité puisque son travail ne lui profite pas : sa
valeur ajoutée (celle de son travail) lui est usurpée par le Capital (la bourgeoisie), ce qui abouti à
la création d’une société de classe
- Retour sur la législation croissante autour de l’environnement (parcs naturels, zones protégées,
etc.)
Il existe deux positions générales conditionnement la volonté ou non de donner des « droits » à la
nature :
- Posture n°1 : non, la nature n’a pas de droit en soi, s’il faut la protéger, c’est uniquement pour
le bien de l’être humain. On crée alors des droits de l’environnement. Ethique
anthropocentriste
- Posture n°2 : la nature est vivante, il faut la respecter, à l’instar des peuples autochtones et de
leur vision animiste du monde. On reconnaît alors des droits à la nature. Ethique écocentriste.
Il faut alors se demander pourquoi, sous quel motif, on donne des droits à la nature :
- Intelligence ?
- Individualité ?
En effet, notre manière de vivre est ainsi faite que nous nous demandons rarement si l’on
offense la nature quand on fait quelque chose. Quand on construit une maison, on ne se
demande pas si on crée un « dommage » à la nature (éventuellement on se demande si ce n’est
pas problématique d’urbaniser à outrance la surface de la Terre).
Ce sont enfin parfois nos pratiques culturelles et traditionnelles qui se heurtent aux
réclamations croissantes des droits de la nature.
Etude de cas - le cas du
bouzkachi. Le bouzkachi est un jeu
national en Afghanistan, reconnu
comme pratique culturelle d’un
peuple, et pourtant pratique d’une
grande violence vis-à-vis des
animaux. Dans ce jeu, des cavaliers
se battent violemment pour
attraper une carcasse de chèvre et
marquer une sorte de « but » avec.
(1) Regardez la vidéo suivante
(2) Faut-il renoncer à cette pratique
culturelle aux vues de la violence
produite sur les animaux ?
Conclusion Plus largement, les nouvelles capacités techniques de l’humanité impliquent une
forme de responsabilité totale vis-à-vis de la nature "nous n’héritons pas la terre de nos ancêtres,
nous l’empruntons à nos enfants." (Antoine de Saint-Exupéry)
PARTIE 2 : Cultiver la beauté - ou comment l’art imite et sublime la
nature
Définitions :
(1) Art et technique — Au départ, le terme art vient du latin ars, artis qui fait référence à la
maîtrise technique de quelque chose. Le terme vient ensuite à désigner les arts mécaniques
d’un côté, et les arts libéraux de l’autre, c’est-à-dire ceux qui font appel à l’esprit. De là, le
terme de technique va progressivement servir à évoquer tout ce qui est du côté des « arts
mécaniques », et celui d’art tout ce qui concerne les « arts libéraux ». Les termes « artisans »,
« arts martiaux », etc. continuent de faire le lien avec la dimension technique, toujours vivante,
dans l’art.
(2) Art, œuvre d’art et Beaux-Arts — Le terme « art » est désormais associé à la création par un
artiste d’une oeuvre d’art, c’est-à-dire un objet réel ayant pour but de susciter des émotions.
On considère ainsi les Beaux-Arts ( l’architecture, l’art décoratif, la gravure, la musique, la
peinture et la sculpture qui sont les 6 arts initiaux, complétés désormais par le cinéma - 7ème
art - puis la télévision et la bande dessinée 8ème et 9ème art)..
(3) Art figuratif, art abstrait — on oppose l’art qui représente la réalité (figuratif) à l’art abstrait
(qui ne représente pas la réalité)
(4) Esthétique — souvent associé à l’interrogation sur l’art, le terme vient du grec et signifie
sensation.
(1) Employé comme adjectif, il fait référence à la recherche de la beauté.
(2) Employé comme nom, c’est la discipline qui étudie les règle de l’art, la théorie de l’art.
Certains auteurs, à l’instar de Platon, regardaient d’un mauvais œil cet art de l’imitation :
parce que l’art reproduit la nature, il crée une illusion et donc, nous éloigne de la vérité (—> lien
avec la vérité). C’est un mensonge et l’art est alors condamnable. Pour Platon, notre monde réel
reflète un autre monde, celui des Idées, qui correspond au monde suprême de la connaissance. la
Dans La République, il montre que l’art est le dernier degré de connaissance. Il prend l’exemple
d’un lit. Pour lui, il y a trois degré de connaissance du lit :
1. L’idée du lit, ou le lit idéal : c’est la connaissance abstraite que j’ai de ce qu’est un lit.
2. Le lit réel, réalisé par l’artisan menuisier à partir de l’idée qu’on se fait d’un lit (c’est donc une
représentation)
3. Le lit peint par l’artiste : c’est la représentation du lit réel, qui est déjà une représentation
d’une idée : l’art est donc la manière la moins « vraie » de connaître quelque chose.
On peut cependant penser que l’art, parce qu’il n’est pas directement utile, nous permet
d’accéder à quelque chose qui nécessite de prendre de la distance, du recul. Il nous montre une
autre vérité, une vérité sur nous-mêmes, sur le monde qui nous entoure. C’est paradoxal : grâce
au recours à la fiction - à un mensonge -, l’art exprime une vérité. On appelle cela le « mentir-
vrai ». Prenons l’exemple des romans réalistes : les personnages de la Comédie Humaine de
Balzac n’ont jamais existé, ce sont des artifices, mais pourtant, le Père Goriot, Vautrin, Lucien de
Rubempré, etc. disent tant de vérités sur l’être humain et sa complexité.
Cette dimension sacrée (—> cours religion) que revêt alors l’œuvre d’art, elle la doit en
grande partie à la figure de l’artiste, qui semble se détacher du commun des mortels. Rappelons
d’ailleurs que dans la tradition égyptienne, on meurt deux fois : une première fois quand le corps
meurt, et une seconde fois quand on n’arrête de prononcer votre nom. L’artiste donc, est bien
placé pour être « immortel » puisque ses œuvres rappellent toujours le souvenir de son nom…
« Il reste à dire en quoi l’artiste diffère de l’artisan. Toutes les fois que l’idée précède et règle
l’exécution, c’est industrie. Et encore est-il vrai que l’œuvre souvent, même dans l’industrie, redresse
l’idée en ce sens que l’artisan trouve mieux qu’il n’avait pensé dès qu’il essaie ; en cela il est artiste,
mais par éclairs. Toujours est-il que la représentation d’une idée dans une chose, je dis même d’une
idée bien définie comme le dessin d’une maison, est une œuvre mécanique seulement, en ce sens
qu’une machine bien réglée d’abord ferait l’œuvre a mille exemplaires. Pensons maintenant au travail
du peintre de portrait ; il est clair qu’il ne peut avoir le projet de toutes les couleurs qu’il emploiera à
l’œuvre qu’il commence ; l’idée lui vient à mesure qu’il fait ; il serait même rigoureux de dire que
l’idée lui vient ensuite, comme au spectateur, et qu’il est spectateur aussi de son œuvre en train de
naitre. Et c’est là le propre de l’artiste. Il faut que le génie ait la grâce de la nature et s’étonne lui-
même. Un beau vers n’est pas d’abord en projet, et ensuite fait ; mais il se montre beau au poète ; et
la belle statue se montre belle au sculpteur à mesure qu’il la fait ; et le portrait nait sous le pinceau.
(...) Ainsi la règle du Beau n’apparait que dans l’œuvre et y reste prise, en sorte qu’elle ne peut servir
jamais, d’aucune manière, à faire une autre œuvre. »
Alain, Système des Beaux-Arts, 1920
B. L’artiste : génie créateur
D’où vient le talent de l’artiste, ce qui fait qu’il ne serait pas tout à fait comme le commun
des mortels ? Ce talent mystérieux a souvent été mis en lien avec l’idée que l’artiste aurait reçu un
don divin et que son art lui est inspiré par les dieux. Pensons aux poètes de l’Antiquité qui
remerciaient Apollon de les avoir inspirés. L’artiste est celui qui est possédé par la Muse.
Une limite apparaît : avec cette notion de génie, le question de l’origine n’est pas résolue,
puisque le divin n’explique pas tout : le talent de l’artiste est-il inné ou acquis ? Est-on né pour
être un artiste ? Comment le devient-on ?
C. L’artiste au travail
Ce qui distingue l’artiste, c’est son travail et surtout la quantité de travail mise en œuvre
pour la création. Pensons à Flaubert qui, lorsqu’il écrivait, prononçait chaque phrase à voix haute
pour s’assurer qu’elles étaient suffisamment belles. Il mettait, avoue-t-il, parfois 6 semaines à
écrire 25 pages.
Le philosophe Nietzsche s’intéresse à cette question du travail de l’artiste, et souligne que
tout est mis en œuvre pour qu’on n’imagine pas le travail derrière l’œuvre. Le projet
philosophique de Nietzsche est de détruire ce qu’il appelle les « idoles », c’est-à-dire les grandes
valeurs de la société dans laquelle il évolue, au 19ème siècle. Pour lui, l’oeuvre d’art est une
« idole » : elle est sacrée et porte le soi-disant « génie » de l’artiste. Nietzsche nous dit que face à
une œuvre d’art, on éprouve du plaisir et de l’admiration. Or, pour ne pas gâcher ce plaisir, l’être
humain se laisse berner en se disant que l’artiste a du génie et qu’il ne peut pas rivaliser avec lui.
Pour Nietzsche, il n’y a pas de génie mais du travail. Ainsi, n’importe qui pourrait en fait réaliser
une œuvre d’art. Pour faire taire une possible rivalité, le concept de génie est bien pratique.
Nietzsche ajoute que l’être humain est toujours plus satisfait devant un produit fini : sous-
entendre qu’il y a du travail dévalorise l’œuvre car cela nous fait l’imaginer en cours de réalisation.
III. Du côté du récepteur : émotion, beauté et action
A. Apprécier une œuvre d’art
Le récepteur de l’œuvre d’art, qu’il soit public dans un musée, acheteur dans une maison
de vente, etc. est d’abord celui qui regarde (ou dans le cadre d’une réalisation musicale, celui qui
écoute, bien sûr). Il y a donc d’abord un passage par les cinq sens que sont la vue, l’ouïe, le
toucher, le goût et l’odorat : pour apprécier une œuvre d’art, il faut être attentif à ce que nos sens
perçoivent. C’est à travers cette attention sensorielle première que l’émotion peut subvenir.
Ce phénomène décrit Stendhal a été étudié par des psychiatres et a donné son nom à un syndrome
psychosomatique (accélération du rythme cardiaque, vertiges, suffocations, voire hallucinations)
chez certains voyageurs exposés à une œuvre d'art personnellement signifiante, ou à une surcharge
d’œuvres d’art. (→ lien inconscient)
> La beauté, jugement universel ? Pour Emmanuel Kant, le beau est « ce qui plaît
universellement sans concept » (Critique de la faculté de juger, 1790). Pour Emmanuel Kant, la
beauté est absolument universelle, c’est-à-dire que ce que je perçois comme beau, tout le monde
le perçoit aussi comme beau. Kant oppose « l’agréable » et « le beau » : ce qui est agréable est
ce qui me provoque un plaisir esthétique qui ne tient qu’à moi. En revanche, si je ressens le
sentiment du beau, ce sentiment - qui est bien lui aussi subjectif - prétend néanmoins à
l’universel. Kant nous dit que nous avons en nous une capacité de ressentir subjectivement
quelque chose qui peut s’étendre à tous, c’est-à-dire à l’universel.
> Dépassement de la beauté : la recherche du sublime A partir du 18ème siècle, les théoriciens
de l’art développent un autre sentiment esthétique, le sentiment du sublime qui dépasse la
beauté. Face au déchaînement de la nature (représentation d’une tempête par exemple, comme
dans le tableau si contre de William Turner), naît un
sentiment de grandeur bouleversant. Ce sentiment du
sublime a été particulièrement repris par le mouvement
romantisme, à commencer par Victor Hugo en France.
> Faut-il exclure le laid de l’art ? Par provocation par rapport aux normes de son temps,
Baudelaire a cherché à inclure le laid dans l’art. C’est le thème de « Une Charogne », poème
extrait de la section « Spleen et Idéal » des Fleurs du Mal. En décrivant une charogne (c’est-à-dire
une bête morte) en pleine décomposition, Baudelaire transforme le laid en objet poétique.
Comme un alchimiste qui transforme la boue en or, Baudelaire sublime le laid grâce à l’art :
« Le soleil rayonnait sur cette pourriture,
Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint »
Rappelons que la sublimation est un processus chimique correspondant à la transformation d’un solide en gaz.
> Quelle réaction avoir devant certaines œuvres contemporaines qui semblent ne plus
chercher l’expression du beau dans la pratique artistique ? Prenons deux exemples de
courants qui se détachent de la recherche du beau :
> Pour certains philosophes, nos goût s’éduquent. C’est ce que pense David Hume,
philosophe empiriste du XVIIIe siècle. Comme pour Kant, selon lui, « les principes du goût sont
universels » et il précise que seuls certains individus sont autorisés à faire de leurs sentiments sur
ce qui est beau la norme du goût. Ils seraient en effet dotés de plusieurs compétences, comme la
finesse de perception et un sensibilité aiguisé. De plus, la fréquentation régulière des œuvres
d’art est indispensable pour pouvoir juger comparativement. Enfin, il faut être impartial, c’est-à-
dire pouvoir se détacher de ses préjugés pour accepter toutes les formes d’art. Pensons ainsi à de
nombreuses œuvres d’art d’abord déconsidérées avant d’être érigées en classique (les toiles de
Van Gogh, etc.)
> Cependant, derrière l’éducation du goût se cache la disparité sociale : ainsi apparaît la
critique sociologique de l’art. La sociologie est l’idée que l’on peut comprendre un
comportement humain en l’inscrivant dans un contexte social. Ainsi, ce que l’on dit et pense de
l’art n’émane pas de notre subjectivité, mais de notre environnement. Plus précisément, selon
Pierre Bourdieu, dans La Distinction, notre jugement sur l’art repose sur l’acquisition d’un
capital, c’est-à-dire de la somme de ce que nous avons reçu de notre environnement (entourage,
famille, etc.) :
- capital culturel : on aime l’art si notre entourage nous a familiarisé à l’art dès notre enfance en
nous emmenant au musée, au théâtre, etc.
- capital économique : les moyens financiers sont nécessaires pour pouvoir être habitué à voir
de l’art.
Pierre Bourdieu souligne que ce sont les classes dirigeantes qui possèdent ces différents types
de « capital » : l’art est donc le terrain de jeu de la classe dominante qui érige sa vision du beau
en une norme universelle. En ce sens, Bourdieu se place dans la lignée de la pensée de Karl Marx.
Vers la conclusion : Ces exemples mettent en évidence la dimension collective de l’art qui n’est
pas seulement une activité en solitaire mais bien culturelle et représentative d’une société à une
époque donnée. Cela semble obliger à s’interroger sur l’appartenance d’une œuvre à un contexte
historique. Mais est-ce vraiment nécessaire ?
1) D’après le critique littéraire du 19ème siècle Sainte-Beuve, l’œuvre doit toujours être prise
dans son contexte et l’on doit pouvoir expliquer l’œuvre à l’aune de la vie de l’auteur.
2) D’après Proust, au contraire, dans Contre Sainte-Beuve, l’œuvre littéraire (et a fortiori l’œuvre
d’art) doit au contraire se détacher du contexte qui l’a vu naître et de son auteur.
Autre
- L’art envahi nos vies ? cf. Télévision : 8ème art
- Règles de l’art
- Faut-il théoriser son art pour bien le maîtriser ? (art brut)
- Unifier grâce à l’art
-
Le philosophe américain Walter Benjamin est connu pour son
texte L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité
technique (1936). Il se fonde en particulier sur l’apparition de
la photographie et du cinéma les décennies qui ont précédé
l’écriture de son texte.
L'artiste travaille-t-il?
Rappel - la problématique est le problème que vous devez faire ressortir du sujet.
Pensez à Socrate qui disait qu’il était maïeuticien des esprits, càd « accoucheur » : faites pareil mais avec
votre sujet ! (On retrouve la métaphore de la poule et du poussin !)
***
Exercice : par petit groupe (entre 2 et 4), choisissez un sujet parmi la liste distribuée et
problématisez-le. Vous présenterez ensuite votre travail.
1) Expliquez sur quoi porte le sujet et pourquoi ce sujet se pose (=enjeu)
2) Mettez en évidence les deux termes qui sont présents dans le sujet, définissez-les en
vous forçant à utiliser « c’est-à-dire » et expliquez la relation à interroger.
3) Formulez la problématique
Exemple d’attendu :
1) Sujet : Est-il raisonnable de perdre son temps ?
> Le sujet porte sur l’utilisation / la gestion de son temps, et pose la question de la bonne/
mauvaise utilisation de son temps.
> Le sujet se pose parce que notre temps sur Terre est limité : notre temps est précieux, il est donc
normal de se demander comment bien l’utiliser.
2) Deux termes : ce qui est « raisonnable » càd ce que ma raison suge bon et « perdre son temps » càd
a priori gâcher son temps en ne faisant rien ou en faisant quelque chose d’inutile, de vain, de futile.
Relation : « est-il » (relation d’égalité)
3) Problématique : Le problème posé par le sujet est donc le suivant : d’un côté, parler de perte de
temps, c’est émettre un jugement négatif et donc a priori s’éloigner du domaine du raisonnable, c’est-
à-dire de ce qui semble bon ; de l’autre côté, il y a bien quelque chose de l’ordre du plaisir et du bien
vivre quand on « perd son temps », et donc, il y a de bonnes raisons de perdre son temps.
Pourquoi ce travail ? Si vous travaillez ainsi le sujet, vous n’avez plus qu’à tout glisser en intro :
1) Accroche
2) Répétition du sujet
3) Explication du sujet (« Le sujet porte sur/se [c] sur …. + mots du sujet + càd)
4) Problématisation
5) Plan
PARTIE 3 : Cultiver le sacré - ou comment les religions se trouvent
au fondement des communautés humaines
Eléments d’introduction
Qu’est-ce que la religion ? Observons plusieurs niveaux de définition :
(1) Religion comme croyance. On serait tenté de définir la religion comme la croyance en un
Dieu ou plusieurs dieux (rappel : majuscule à Dieu au singulier, car renvoie à un créateur
suprême et unique, mais pas de majuscule à dieux au pluriel). Cette croyance religieuse est ce
qu’on appelle la foi. Le mot « foi » vient du latin « fides, fidei » qui renvoie à la fidélité.
(1) Limite n°1 : comment distinguer une religion d’une superstition, qui est elle aussi une
forme de croyance.
(2) Limite n°2 : Il semble qu’il existe certaines religions sans dieux : pensons au bouddhisme
(2) Religion comme pratique. Dans toutes les religions, il existe des pratiques observées par les
croyants, comme des cultes et des fêtes religieuses (exemple : le ramadan musulman, la fête
de Noël chrétienne, Hanouka dans le rite juif,
(1) Limite : peut-on se dire « croyant non pratiquant » dans la mesure où la croyance même
repose sur la pratique ?
Une des étymologies possible du nom « religion » vient du latin religare, qui signifie
relier. En effet, la religion unit les hommes entre eux, en une communauté, comme l’Église, et elle
unit aussi l’homme à Dieu. Il y a donc un lien double : une liaison horizontale, entre les hommes,
et une liaison verticale, entre Dieu et les hommes. Cette étymologie s’illustre dans les pratiques
religieuses comme la prière, qui est à la fois collective (lors des cultes, messes, etc.) et individuelle
(car personnelle).
L’enjeu de ce cours est de mieux cerner en quoi la religion est au coeur des
communautés humaines, c’est-à-dire en quoi il a vocation à rassembler les hommes en
promettant l’accès à une vérité sacrée, qu’il s’agira d’interroger.
I. La religion, ciment de la société
La religion offre donc d’abord une sécurité à l’échelle individuelle, qui permet alors de
fonder une société.
* Le terme église, qui désigne la communauté de croyants dans la religion chrétienne, mais aussi
plus largement toute communauté construite autour de la religion, renvoie au terme latin Eclesia
qui signifie assemblée.
Exercice 13 page 289
Hindouisme Contenues dans les - Pratiques Vache, animal sacré Les Brahmanes
Vedas, elles religieuses (ne tuer aucun être
comportent la croya quotidiennes vivant dans
nce en la chez soi ou dans l’hindouisme)
réincarnation et en u des temples
- Offrandes et
n rythme
du monde fait de cré
ation, de
conservation et de d
estruction
(polythéisme unifié
par le Brahma)
Judaïsme Dans la Torah, un Halakha (la loi juive) Jour mis à part (sacré Le Qahal,
Dieu unique définit précisément la ) pour « communauté » en
vie juive : se sanctifier : le shab hébreu, mais rare
- Temps de l’année bat, du
ritualisé (fêtes de vendredi soir au sam La synagogue (du
Roch Hachana, edi soir grec Sunagôgê, «
Yom Kippour, etc.) assemblée » adapté
- Régime casher de l'hébreu בית כנסת
- Bar Mitsva et (Beit Knesset), «
circoncision chez le maison de
jeune garçon l'assemblée »)
Exemple : dans la religion juive, Moïse a reçu les Tables de la Loi de Dieu sur le Mont
Sinaï et fonde la base de la loi et de la moralité juive. Parmi les Dix Commandement
retranscrits dans le Livre de l’Exode, figure le 6ème commandement « Tu ne tueras
point » et le 7è « Tu ne commettras point d’adultère ».
Ces règles permettent de garantir la sécurité et la stabilité au sein d’une communauté. On voit
bien ici en quoi elles sont nécessaires (repère nécessaire/contingent) pour la vie collective.
Se pose ainsi la question du type de régime à mettre en place. Nombreux sont les régimes
qui se réclament d’un droit divin, associant ainsi le pouvoir du monarque à celui de Dieu. C’est le
cas de la monarchie française jusqu’à la Révolution française de 1789. Les philosophes des
Lumières, comme Emmanuel Kant, Voltaire, Rousseau, etc. ont critiqué ce modèle en réclamant
l’indépendance entre pouvoir politique et pouvoir religieux. Certains régimes ont alors choisi de
mettre en place un pouvoir laïque, où le religieux est conscrit à la sphère privée.
Cette réflexion sur la séparation entre la religion et l’Etat n’est pas un refus de la religion.
Certains philosophes se revendiquaient d’ailleurs théistes ou déistes, c’est-à-dire qu’ils croyaient
en Dieu mais refusaient la religion. C’est le cas de Voltaire : « Je ne puis songer que cette horloge
existe et n’ait point d’horloger. » Ce refus de la religion s’inscrivaient dans une lutte contre
l’obscurantisme religieux.
Conclusion : rôle de la religion qui permet globalement d’assurer l’ordre, que l’on croit en un
Dieu immanent (polythéisme) ou transcendant (monothéisme). Mais attention, dès qu’on donne
un rôle, cela sous-entend la dimension instrumentale de la religion - utilisée, ou crée
artificiellement pas l’homme pour…
ORAL
- Quels arguments pourriez-vous donner pour dire qu’il existe un Dieu ? (que vous y croyiez ou
non vous-mêmes)
- Peut-on convaincre quelqu’un de croire en Dieu selon vous ?
- Sinon, pourquoi certaines personnes arrêtent-elles de croire ?
« C’est par la foi qu’Abraham quitta le pays de ses pères et fut étranger en terre promise. Il laissa
une chose, sa raison terrestre, et en prit une autre, la foi ; sinon, songeant à l’absurdité du voyage,
il ne serait pas parti. C’est par la foi qu’il fut un étranger en terre promise où rien ne lui rappelait ce
qu’il aimait ».
La force du croyant, c’est d’avoir laissé sa « raison terrestre » pour suivre sa foi. Est-ce à
dire que le croyant agit comme un fou ? Pour les non-croyants, peut-être, mais dans la logique
religieuse, il s’agit là de faire confiance au lieu de se poser des questions. De fait, celui qui se
pose des questions, qui doute, qui remet en cause la demande divine se place à la même hauteur
que le divin. Au contraire, en restant à sa place d’être humain soumis à la demande d’un Dieu,
entité supérieure, Abraham fait confiance, nous dit Kierkegaard et c’est cette confiance qui fait
que Dieu épargne son fils Isaac, choisissant le sacrifice d’un bouc à la place - ce qui donne lieu
aux fêtes de la Pâques juive et d’autres fêtes dans les autres religions monothéistes.
Cette question sera à nouveau travaillée en fin d’année lorsque nous parlerons de science et de
vérité (→ cours Sciences et Vérité(s)) mais on peut déjà voir que si la religion vise la quête de La
vérité, la science établit, quant à elle, des vérités. D’un côté, un absolu - La Vérité - ; de l’autre, du
relatif - une vérité.
Prenons l’exemple d’Averroès, philosophe musulman du XIIème siècle. Selon lui, l’usage de la
raison est primordial lorsque nous lisons les textes sacrés.
Puisque donc cette Révélation est la vérité, et qu’elle appelle à pratiquer l’examen rationnel qui
assure la connaissance de la vérité, alors nous, Musulmans, savons de science certaine que
l’examen des choses par la raison n’entraînera nulle contradiction avec les enseignements
apportés par le Texte révélé : car la vérité ne peut être contraire à la vérité, mais s’accorde avec
elle et témoignes-en sa faveur. S’il en est ainsi, et que l’examen rationnel aboutit à une
connaissance quelconque à propos d’une chose quelle qu'elle soit, alors de deux choses l’une :
soit sur cette chose le Texte révélé se tait, soit il énonce une connaissance à son sujet. Dans le
premier cas, il n’y a même pas lieu à contradiction […]. Dans le second, de deux choses l’une :
soit le sens littéral de l’énoncé est en accord avec le résultat de la démonstration, soit il le
contredit. S’il y a accord, il n’y a rien à en dire ; s’il y a contradiction, alors il faut interpréter le
sens littéral.
Nombreux philosophes croyants ont cherché à donner des preuves de l’existence de Dieu.
Kant en identifie trois sortes dans la Critique de la Raison pure :
- l’argument ontologique : repris par Descartes de Saint Anselme, il peut se résumer ainsi : Dieu
désigne le concept d’un être parfait. Or ce qui existe est plus parfait que ce qui n’existe pas.
Donc Dieu existe. Son existence se déduit de sa perfection même.