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Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Article in Management & Avenir · March 2020


DOI: 10.3917/mav.115.0063

CITATION READS

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4 authors, including:

Simona Grama-Vigouroux Sana Saidi


SCBS (Groupe ESC Troyes) South Champagne Business School Troyes
12 PUBLICATIONS 92 CITATIONS 14 PUBLICATIONS 97 CITATIONS

SEE PROFILE SEE PROFILE

Mohamed Sellami
Ecole des Dirigeants et Createurs d'entreprise
20 PUBLICATIONS 153 CITATIONS

SEE PROFILE

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Microcrédit en France : femmes et hommes face
à la solvabilité1,2
© Management Prospective Editions - Ne pas diffuser

Gérard CAZABAT3
Simona GRAMA-VIGOUROUX4
Sana SAIDI5
Mohamed SELLAMI6

Résumé
La présente étude examine les facteurs quantitatifs et qualitatifs
qui influencent la solvabilité des bénéficiaires de microcrédit
notamment chez les hommes et femmes en France. Nous nous
intéressons à trois catégories de facteurs liés au bénéficiaire
de microcrédit, à son projet et à l’institution de microfinance.
Nous étudions l’impact de ces facteurs sur la solvabilité auprès
de 222 femmes et 468 hommes bénéficiaires de microcrédit.
Il en ressort que la situation familiale constitue un facteur
de solvabilité distinctif chez les femmes bénéficiaires de
microcrédit tandis que la motivation entrepreneuriale l’est
davantage chez leurs homologues masculins. Nos résultats
montrent que les projets lancés dans le domaine commercial
influencent la solvabilité chez les femmes, alors que les projets

e1t. artCicle a fait l ’objet d’une communication au 11 e Congrès AEI, Montepellier, 2019.
2. La version en anglais de cet article portant le nom de « Factors inf luencing the solvency
of men and women in French Microfinance Institutions. The case of Initiative France » a fait l
’objet d’une communication lors de la conférence 2018 TSFS Conference, 14-15 Décembre,
2018, Sousse, Tunisia (http ://www.tsfs.tn/tsfs-2018/index.php).
3. Gérard CAZABAT : Enseignant-chercheur, EDC Paris Business School –
gerard.cazabat@edcparis.edu
4. Simona GR AMA-VIGOUROUX : Enseignant-chercheur, SCBS Troyes –
simona.grama@yschools.fr
5. Sana SAIDI : Enseignant-chercheur, SCBS Troyes – sana.saidi@yschools.fr
6. Mohamed SELLAMI : Enseignant-chercheur, EDC Paris Business School –
mohamed.sellami@edcparis.edu

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N°115 - Février 2020

initiés dans le secteur industriel impactent la solvabilité chez


les hommes. En outre, les projets innovants constituent un
critère déterminant de la solvabilité des femmes bénéficiaires
de microcrédit.

Abstract
This study examines the quantitative and qualitative factors
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that inf luence the solvency of microcredit beneficiaries,


particularly that of male and female beneficiaries in France.
We are interested in three categories of factors related to
microcredit beneficiaries, their entrepreneurial venture
and the microfinance institution. We study the impact of
these factors on solvency among 222 female and 468 male
microcredit beneficiaries. The results suggest that family
status is a distinct solvency-related factor for women benefiting
from microcredit, while entrepreneurial motivation is more
significant for their male counterparts. Our f indings also
show that ventures launched in the commercial sector have a
marked inf luence on women’s solvency, while those initiated
in the industrial sector impact that of men. In addition,
innovative projects tend to inf luence solvency, especially
among the women benefiting from microcredit.

Introduction

Le microcrédit est un outil de l’économie solidaire et responsable à l’endroit


des plus démunis, des individus fragilisés afin qu’ils recouvrent une « capa-
bilité » (Sen, 1984). La microfinance est définie par l’OCDE comme « un accès
au financement de petits projets, portés par des personnes marginalisées qui
aspirent à créer leur propre emploi, souvent par défaut d’autres perspectives
professionnelles et parce que l’accès aux sources traditionnelles leur est refusé »
(Reifner et al., 2002, p. 26). Le but des institutions de microfinance (IMF) est
d’accompagner le bénéficiaire de microcrédit dans le lancement de son projet,
mais aussi d’assurer la solvabilité à long terme dudit projet. La solvabilité est
la capacité du bénéficiaire de microcrédit à rembourser le prêt accordé par
l’institution (Guérin et al., 2009). Elle est considérée comme l’un des facteurs
clés de survie des IMF (Lara-Rubio et al., 2017). Pour gérer la solvabilité de
leurs emprunteurs, les IMF recourent à des mécanismes variés. Dans les pays
en développement, il s’agit entre autres des prêts accordés au sein d’un groupe
dont les membres sont cautions solidaires entre eux (Lanha, 2004) ou de contrat
de dette standard et individuel (Lanha, 2004). En occident, et notamment en
France, les IMF utilisent souvent la méthode dite du Credit-Scoring, toujours
basée sur des méthodes algorithmiques (Lara-Rubio et al., 2017), comme outil
d’aide à la décision d’octroi des microcrédits aux futurs emprunteurs.

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Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Plusieurs études ont été concentrées sur des facteurs quantitatifs (e.g., le mon-
tant du prêt, le nombre de mensualités, le nombre des prêts reçus dans un
temps donné, etc.) pour expliquer l’insolvabilité des bénéficiaires de microcrédit
(Trabelsi et Chichti, 2011). Cependant, ces données quantitatives ne peuvent
être considérées comme les seuls critères permettant d’expliquer le défaut de
remboursement. D’autres facteurs de nature plutôt qualitative sont impliqués
comme déterminants de la solvabilité des bénéficiaires de microcrédit (Berger
et Udell, 2002). Actuellement, il existe relativement peu de connaissances sur les
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facteurs qui déterminent les différences concernant la solvabilité des hommes


et des femmes bénéficiaires de microcrédit (Montalieu, 2002 ; Guérin, 2002 ;
Guérin et al., 2009 ; D’espallier et al., 2011). Nous disposons également de
peu de preuves empiriques sur ces différences en France, étant donné que
la majorité des études se sont concentrées sur des pays en développement
(Guérin, 2002 ; Guérin et al., 2009 ; Cozarenco et Szafarz, 2013). Bien que les
statistiques liées aux microcrédits en France soient communiquées par les IMF,
il est encore rare de trouver des études combinant les facteurs quantitatifs et
qualitatifs liés aux profils des bénéficiaires. Les particularités de la microfi-
nance telle qu’elle est pratiquée dans les pays en voie de développement ne
sont pas toujours adaptables au contexte occidental et notament français de
la microfinance. D’où l’intérêt de notre travail.

Pour pallier les limites des recherches précédentes, l’objectif de cet article est
d’identifier les différences selon les genres, entre les facteurs qualitatifs et quan-
titatifs qui impactent la solvabilité des bénéficiaires de microcrédit en France.
Notre travail se fonde sur une enquête nationale menée par Initiative France
auprès des bénéficiaires de microcrédit. Une première partie mettra en avant
la théorie de l’asymétrie de l’information comme cadre théorique central de
notre travail. La deuxième partie explorera les facteurs qui peuvent influencer
la solvabilité des femmes et des hommes bénéficiaires de microcrédit, ainsi que
les hypothèses de recherche qui en découlent. Une troisième partie décrira la
méthodologie de notre étude. La quatrième partie présentera les résultats avec
une comparaison entre les facteurs impliquant la solvabilité chez les hommes
et les femmes bénéficiaires de microcrédit. Enfin, nous discuterons les résultats
et leurs implications tant d’un point de vue théorique que pratique.

1. Asymétrie d’information et microfinance

Parmi les principaux facteurs impactant la solvabilité des bénéficiaires du


microcrédit, l’asymétrie de l’information joue un rôle central (Abdelhamid
et Omar, 2007 ; Trequattrini et al., 2014). L’asymétrie de l’information est
caractérisée quand l’IMF a des difficultés à obtenir des informations sur le
comportement du bénéficiaire. La théorie de l’information asymétrique est
liée à la discipline de « l’économie d’information ». Cette théorie stipule que
lorsque deux personnes doivent démarrer un contrat, l’information entre les
deux parties peut être asymétriquement distribuée.

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N°115 - Février 2020

Sur le marché du microcrédit, le contrat entre les bénéficiaires et l’IMF n’est


pas un contrat donnant lieu à un règlement immédiat entre les deux parties,
mais au contraire, ce contrat se déroule dans la durée jusqu’à l’échéance de
celui-ci (Abdelhamid et Omar, 2007). De plus, le marché du microcrédit n’est
pas un marché au comptant, mais au contraire, sur le marché du microcrédit, il
y a un temps entre l’acceptation d’un prêt et son remboursement. La solvabilité
est influencée par le comportement du bénéficiaire au cours du temps. Deux
problèmes peuvent apparaître dans cette situation : la sélection adverse et les
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problèmes d’aléa moral (Abdelhamid et Omar, 2007 ; Trequattrini et al., 2014).

La sélection adverse est générée quand une caractéristique du bénéficiaire


n’est pas connue clairement par l’IMF. Celle-ci implique que l’attribution de
prêts peut se faire à des emprunteurs très risqués. Les problèmes d’aléa mo-
ral concernent le cas où le bénéficiaire agit d’une manière non adéquate, en
faisant peu d’effort pour valoriser son prêt ou qu’il l’utilise de manière non
appropriée. Les problèmes de sélection adverse et d’aléa moral augumentent
le pourcentage de bénéficiaires insolvables.

Pour diminuer les problèmes de sélection adverse et aléa moral, les IMF re-
courent souvent à de multiples mécanismes. Il s’agit entre autre des prêts
de groupe basés sur la caution solidaire (Lanha, 2004), du contrat de dette
standard et individuel (Lanha, 2004), des facteurs culturels (Lanha, 2004) et
de la méthode de Credit-Scoring permettant de signaler la pré-défaillance des
bénéficiaires de microcrédit. Pour nombre d’auteurs (Kwitko, 1999, cité par
Montreuil Carmona et Araújo, 2011 ; Bruett et al., 2005 ; Trabelsi et Chichti,
2011), la méthode de Credit-Scoring appliquée aux IMF pallie les problèmes
d’asymétrie d’information.

La méthode du Credit-Scoring se base sur un ensemble de déterminants de la


solvabilité qui, mesurés, représentent une aide à la décision d’octroi des mi-
crocrédits aux futurs emprunteurs. Par exemple, pour Kwitko (1999) – cité par
Montreuil Carmona et Araújo, 2011 – les microcrédits sont évalués en tenant
compte, comme il est d’usage, des fonds propres, des garanties, du modèle
économique, des capacités de l’emprunteur et de son profil. Dans l’étude ef-
fectuée par Montreuil Carmona et Araújo (2011), les auteurs proposent une
méthode de Credit-Scoring comportemental. Elle situe le profil et l’histoire
du bénéficiaire avec l’IMF (aménagement des échéances, renégociation de la
dette, etc.) au centre de la prise de décision des prêteurs de fonds. Trabelsi et
Chichti (2011) examinent les déterminants du retard des remboursements des
bénéficiaires de microcrédits auprès d’un organisme tunisien de microfinance,
l’ENDA. Cet organisme se base sur la méthode de Credit-Scoring afin de prendre
la décision d’octroi d’un crédit et la fiabilité des remboursements. Les auteurs
montrent que le type de prêt, le montant accordé au financement des projets,
le nombre de mensualités, le nombre de prêts reçus, le secteur d’activité com-
merciale, le profil du bénéficiaire de microcrédit, l’âge de l’emprunteur et le
genre déterminent la probabilité du retard de remboursement.

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Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Comme évoqué dans les études précédentes, les IMF recourent à deux types
de facteurs pour gérer l’asymétrie des informations : des facteurs quantitatifs
(scoring, grilles de notation) reposant sur des données chiffrées de nature
financière et des facteurs qualitatifs, fondés sur des données humaines et sur
la qualité intrinsèque d’un projet. Des études démontrent que les facteurs
qualitatifs ont un poids de plus en plus important sur la solvabilité des béné-
ficiaires de microcrédit (Berger et Udell, 2002). Ces facteurs quantitatifs et
qualitatifs correspondent à trois catégories liées d’une part au bénéficiaire de
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microcrédit, d’autre part à son projet et, enfin, à l’institution de microcrédit elle-
même (Rahman, 1999 ; Montalieu, 2002 ; Guérin et al., 2009). Ils apparaissent
comme essentiels pour diminuer l’asymétrie d’information et impacter sur la
solvabilité des bénéficiaires de microcrédit. Dans les études précédentes, ces
facteurs étaient souvent associés à la décision d’octroi de microcrédit (Trabelsi
et Chichti, 2011), aux risques pour les IMF (Bruett et al., 2005) et peu à la
solvabilité. De plus, nous avons aussi peu d’information sur le lien entre le
genre des bénéficiaires de microcrédit et leur solvabilité. Nous étudierons
donc successivement la manière dont ces facteurs impactent la solvabilité des
femmes et des hommes bénéficiaires de microcrédit.

2. Les facteurs qui inf luencent la solvabilité des femmes et


des hommes bénéficiaires de microcrédit

2.1. Les qualités personnelles des femmes et hommes


bénéficiaires de microcrédit et leur impact sur la solvabilité
Les études qui montrent des liens entre les qualités personnelles des femmes
et des hommes bénéficiaires de microcrédit et leur solvabilité sont rares et
décrivent plutôt de façon théorique ce lien (Montalieu, 2002 ; Rahman, 1999 ;
Guérin et al., 2009). La majorité des recherches sont axées principalement sur
les facteurs personnels qui incitent les bénéficiaires de microcrédit à démarrer
une activité entrepreneuriale et peuvent impacter leur réussite.

Les qualités personnelles des bénéficiaires de microcrédit sont considérées


comme des facteurs importants pour l’activité entrepreneuriale (Ekpe et al.,
2011 ; Kuzilwa, 2005). Celles-ci incluent les facteurs démographiques tels que
l’âge, l’éducation, le type d’emploi occupé auparavant (Bourlès et Cozarenco,
2017), mais aussi l’expérience financière acquise par le passé (Constantinidis
et al., 2006 ; Robb et Wolken, 2002).

Le niveau scolaire constitue l’une des caractéristiques pouvant influer sur la


solvabilité des bénéficiaires de microcrédit (Trabelsi et Chichti, 2011). Selon
De Wit et Van Winden (1989), les personnes ayant un niveau d’éducation élevé
sont davantage susceptibles de s’engager dans l’entrepreneuriat. La recherche
montre que les personnes hautement scolarisées ont tendance à s’impliquer
dans des projets entrepreneuriaux par passion, les personnes moins instruites

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N°115 - Février 2020

pratiquant, elles, plutôt un entrepreneuriat de nécessité (Bhola et al., 2006). En


outre, certaines études précédentes indiquent que la plupart des femmes béné-
ficiaires de microcrédit ont un niveau d’étude moindre que celui des hommes
(Constantinidis et al., 2006 ; Robb et Wolken, 2002) et cela influe sur leur
solvabilité. En effet, dans la même lignée, d’autres chercheurs ont suggéré que
les femmes qui lancent leurs entreprises ont moins de connaissances managé-
riales et un niveau d’étude inférieur à celui des hommes (DeMartino et Barbato,
2001). Par contre, d’autres recherches tendent à démontrer le contraire, en
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indiquant que les femmes qui se lancent en entrepreneuriat ont un niveau


supérieur d’étude que leurs homologues masculins (Cowling et Taylor, 2001).

Outre le niveau scolaire, l’expérience professionnelle peut faire naître une moti-
vation supplémentaire pour lancer une activité entrepreneuriale. La motivation
constitue en effet un élément central pour le succès de la nouvelle entreprise
(Bourlès et Cozarenco, 2017). Deux types de facteurs motivationnels ont ainsi
pu être identifiés : ceux de type push et ceux de type pull (Ismail et al., 2012). La
motivation de type push est souvent déclenchée quand une personne ne se sent
plus valorisée au travail ou quand elle se retrouve au chômage dans la période
précédant la création de l’entreprise (McMullen et al., 2008). La motivation de
type pull est plutôt liée à un besoin d’accomplissement qui se trouve satisfait à
travers l’activité entrepreneuriale (Gilad et Levine, 1986 ; Schjoedt et Shaver,
2007). Certaines études montrent que les raisons des femmes à entreprendre
seraient plutôt liées à une motivation de type pull par rapport à leurs homo-
logues masculins qui sont plutôt stimulés par une motivation de type push
(Carrier et al., 2006). D’autres travaux montrent que les femmes ont besoin
d’une motivation plus forte que les hommes pour initier un projet (Birley et
al., 1989). En France, les femmes ont recours à la microfinance quand elle se
trouvent notamment en situation de chômage (Guérin, 2002).

La situation familiale constitue également un facteur déterminant dans les ac-


tivités entrepreneuriales. En général, les recherches précédentes montrent que
les femmes créent leurs entreprises avec l’espoir de trouver un équilibre entre
le travail et la famille, tandis que les hommes cherchent à entreprendre pour
accroître leurs niveaux de vie et évoluer dans leurs carrières professionnelles
(DeMartino et Barbato, 2001). Contrairement à ce qui se passe chez leurs homo-
logues féminines, le mariage et les enfants n’ont pas beaucoup d’influence sur
les hommes bénéficiaires de microcrédit (DeMartino et Barbato, 2001). En effet,
certaines études indiquent que les femmes sont attirées vers l’entrepreneuriat
seulement quand leurs enfants ont atteint l’âge d’aller à l’école (Carrier et al.,
2006). Les constats empiriques sur la situation familiale des femmes bénéfi-
ciaires de microcrédit en France sont assez limités et elles viennent souvent
des pays en développement. Dans ces pays, les mères de famille de plus de cinq
enfants sont davantage poussées vers l’entrepreneuriat (Lawal et al., 2009).
Cependant, cette situation familiale peut aussi et paradoxalement constituer
un facteur inhibiteur, la femme ayant tendance à se focaliser essentiellement
sur les besoins des enfants (Constantinidis et al., 2006). Par ailleurs, il n’est pas
rare d’assister, toujours dans ces pays, au détournement du microcrédit par les

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Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

maris (Guérin et al., 2009). Par exemple, au Bangladesh, les femmes peuvent
travailler à l’extérieur de la maison, à condition que leurs maris contrôlent leurs
revenus. Certains constats montrent qu’une part parfois importante (jusqu’à
63 %) des femmes bénéficiaires de microcrédit ne gèrent pas effectivement
leur microcrédit à cause de ces éléments intrafamiliaux (Guérin et al., 2009).
L’âge moyen des femmes démarrant une activité entrepreneuriale oscille le
plus souvent entre 25 et 34 ans (Constantinidis et al., 2006). D’autres études
ont montré que les hommes qui se lancent dans l’entrepreneuriat sont plus
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âgés que les femmes (Robb et Wolken, 2002). Les recherches évoquées pré-
cédemment attestent qu’il existe un lien étroit entre les qualités personnelles
des bénéficiaires de microcrédit et le démarrage, mais aussi l’échec et le suc-
cès d’une activité entrepreneuriale (Robb et Wolken, 2002). D’autres auteurs
montrent aussi qu’il y a un lien entre le succès de l’entreprise et la solvabilité
(Shepherd, 2003 ; Mellahi et Wilkinson, 2004, Smida et Khelil, 2010 ; Khelil et
al., 2012). Nous supposons ainsi que :

H1 : Les qualités personnelles (niveau d’étude, âge, motivation d’entreprendre


et situation familiale) impactent différemment la solvabilité des hommes et des
femmes bénéficiaires de microcrédit.

2.2. Les caractéristiques du projet entrepreneurial et leur


impact sur la solvabilité des femmes et hommes bénéficiaires
de microcrédit
La littérature entrepreneuriale identifie quatre caractéristiques principales
du projet entrepreneurial : le secteur d’activité, la taille, l’âge de l’entreprise
ainsi que sa structure (Constantinidis et al., 2006).

Les femmes bénéficiaires de microcrédit commencent leurs projets entre-


preneuriaux majoritairement dans le secteur des services liés à la santé, à
l’éducation, à la vente, mais le secteur agricole est également fréquemment
choisi. La plupart du temps, elles optent pour ces domaines parce qu’elles y ont
travaillé précédemment ou parce qu’elles savent qu’elles ont la capacité de s’y
adapter rapidement. Ces entreprises créées par les femmes sont majoritaire-
ment concentrées dans les espaces urbains, exception faite, s’entend, de celles
liées au secteur agricole (Ekpe et al., 2011). Cependant, d’autres recherches
montrent qu’il n’y a pas de différences entre hommes et femmes concernant
le secteur d’activité de l’entreprise lancée (Birley et al., 1989). Par rapport aux
hommes, qui ont tendance à commencer leurs projets en équipe, les femmes
tendent à démarrer leur projet de manière plus individuelle (Orhan, 2001).
Leurs entreprises possèdent néanmoins le plus souvent de faibles possibilités
de croissance (Robb et Wolken, 2002) et cela tend à accroître les doutes des
organismes financeurs quant à la solvabilité des bénéficiaires de microcrédit.
Les études montrent aussi que les femmes conduisent des projets entrepre-
neuriaux avec un niveau de risque important (Robb et Wolken, 2002), ce qui
pourrait impacter leur solvabilité. Elles ont aussi tendance à lancer des projets

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N°115 - Février 2020

plus innovants que les hommes (St-Cyr, 2002). Donc, si, le projet s’avère trop
innovant et n’arrive pas à développer une clientèle suffisante (Asli, 2013), les
femmes bénéficiaires de microcrédit rencontrent des difficultés à le solvabiliser.

La taille des entreprises gérées par les femmes est, en général, moins importante
que celles dirigées par des hommes (Constantinidis et al., 2006). En termes d’âge
de l’entreprise, les travaux de recherche montrent que les femmes conduisent
des projets d’une longévité inférieure à ceux portés par leurs homologues
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masculins (Robb et Wolken, 2002).

Les études existantes soulignent le fait que les caractéristiques des entre-
prises peuvent varier en fonction du genre du bénéficiaire de microcrédit
(Constantinidis et al., 2006). Ces caractéristiques n’étaient cependant pas liées
précédemment de façon directe à la solvabilité, mais nous considérons qu’elles
pourraient exercer une influence réelle sur celle-ci. Nous supposons ainsi que :

H2 : Les caractéristiques du projet entrepreneurial (secteur d’activité, taille, pro-


jet innovant) impactent différemment la solvabilité des hommes et des femmes
bénéficiaires de microcrédit.

2.3. Les caractéristiques des IMF et leur impact sur la


solvabilité des femmes et des hommes bénéficiaires de
microcrédit
Au-delà des services financiers qu’elles proposent, les IMF développent une
offre de services d’accompagnement toujours plus étoffée. Le but de l’accom-
pagnement est triple : [1] aider à la création d’entreprises, [2] favoriser la
satisfaction du client et [3] assurer la pérennité de son entreprise (Guérin et
al., 2009). L’accompagnement proposé par les IMF est en lien direct avec la
solvabilité de l’entreprise (Dardour et Ouvrad, 2012). Cependant, certaines
études démontrent que les programmes d’accompagnement n’y sont pas en-
core bien systématisés. En ce sens, il existe des IMF qui proposent de façon
régulière ce type de service et d’autres qui le font de façon plus optionnelle
(Bangoura et Hounwanou, 2015). En outre, la littérature témoigne de l’exis-
tence des formations accompagnant le projet d’investissement (Bangoura et
Hounwanou, 2015), ces formations ayant pour objet, outre leur intérêt scolaire
initial, l’amélioration de la solvabilité des bénéficiaires de microcrédit.

En France, d’après le rapport de l’Adie, ces programmes d’accompagnement im-


posent des rencontres régulières, souvent trimestrielles (Barry, 2013). Pendant
ces rencontres, la discussion porte sur l’ensemble des problématiques passées
et futures de l’entreprise. Ensemble, avec les représentants des IMF, les béné-
ficiaires de microcrédit essayent de trouver des solutions. L’accompagnateur
entre dans les détails comptables et financiers de l’entreprise et essaye de
conseiller le bénéficiaire de microcrédit afin d’améliorer sa solvabilité. Dardour
et Ouvrard (2012) confirment que la solvabilité des bénéficiaires d’une IMF est
en lien direct avec le niveau d’accompagnement assuré par l’IMF.

70
Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Concernant les différences en termes d’accompagnement par les IMF des


hommes et femmes bénéficiaires de microcrédit, les évidences empiriques
viennent notamment des pays en développement. En France, nous savons que
les programmes d’accompagnement pour les femmes ont pour but de discuter
les aléas du remboursement du microcrédit, des difficultés d’ordre personnel et
professionnel qui peuvent surgir durant le projet, mais aussi de l’avancement
du business plan et des contacts potentiels liés aux clients et aux fournisseurs
(Guérin, 2002). Dans les pays en développement, certains chercheurs indiquent
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que l’accompagnement par l’IMF se fait différemment en fonction des hommes


et des femmes bénéficiaires de microcrédit. En effet, les femmes sont préférées
aux hommes parce qu’elles sont plus disciplinées dans le suivi de leur projet
(Montalieu, 2002). En outre, les femmes sont plus assidues que les hommes
dans le suivi de ces programmes d’accompagnement (Montalieu, 2002). De
façon similaire, d’autres études dans les pays en développement montrent que
les femmes sont plus obéissantes durant le programme d’accompagnement
que leurs homologues masculins (D’espallier et al., 2011). Rahman (1999)
indique aussi que les femmes sont plus aisément influencées par la pression
des pairs dans les groupes de bénéficiaires de microcrédit et plus sensibles
à l’intervention des accompagnateurs. En conséquence, la plupart des IMF
semblent accorder leurs crédits à une clientèle féminine parce que les études
précédentes montrent que les femmes ont des taux de remboursement meil-
leurs que les hommes (Montalieu, 2002 ; Guérin et al., 2009 ; D’espallier et
al., 2011). Quelques recherches remarquent même que prioriser les femmes
pour le microcrédit doit constituer une réelle stratégie pour les IMF dans les
pays en voie de développement afin de minimiser le défaut du remboursement
(D’espallier et al., 2011).

Comme nous avons peu de preuves sur les différences hommes et femmes béné-
ficiaires de microcrédit en France en termes d’accompagnement par les IMF et
comme les études précédentes sur les pays en développement démontrent que
les IMF accordent davantage leur confiance à une clientèle féminine (Guérin et
al., 2009 ; Montalieu, 2002 ; Rahman, 1999), nous pouvons donc supposer que :

H3 : Les caractéristiques de l’IMF (accompagnement et moyens alloués) impactent


différemment la solvabilité des hommes et femmes bénéficiaires de microcrédit.

3. Méthodologie

Notre étude empirique est réalisée en France. Avant de décrire la méthodologie


de notre étude, nous dressons un panorama correspondant à la microfinance
dans le contexte français.

3.1. Microfinance dans le contexte français


Plusieurs dispositions légales ont contribué à la croissance du secteur du mi-
crocrédit à partir des années 2000 en France (la loi sur les nouvelles régula-

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N°115 - Février 2020

tions économiques, la loi de programmation pour la cohésion sociale, la loi de


modernisation de l’Économie). Ainsi, le panel des institutions qui offrent des
microcrédits est diversifié : les réseaux accompagnants, les banques agréées,
les IMF et, enfin, les plateformes de financement comme par exemple Babyloan.
Néanmoins la place des IMF, comparé aux banques agrées, reste centrale et
s’est développée au cours des dernières années.

En France, l’implication des banques dans le secteur du microcrédit peut être


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envisageable, mais celles-ci doivent mettre en place « une gestion totalement


distincte du reste de leurs activités, ou du moins une division séparée disposant
de sa propre équipe » (Yunus, 2007, p. 130, cité par Delaite et Poirot, 2013). Le
microcrédit et le crédit accordé par le passé par les banques mutualistes ou
coopératives (e.g., Crédit mutuel, Caisse d’épargne, Banque Populaire, Crédit
Agricole) partagent certes des similarités surtout par rapport à leurs buts,
à savoir l’accès au crédit aux personnes qui avaient des difficultés à obtenir
des prêts. D’après Delaite et Poirot (2013), les banques françaises jouent un
rôle important dans le secteur du microcrédit afin d’affronter le chômage et
l’exclusion sociale, soit en déléguant cette tâche à un département spécialisé,
soit en créant une association ou une fondation dédiée à la microfinance. Par
exemple, les banques commerciales, comme BNP, ont conçu un département
axé sur la microfinance. Les banques mutualistes ou coopératives sont plutôt
focalisées sur la création des associations ou fondations spécifiques à la mi-
crofinance. Le Crédit Agricole a créé sa fondation, « Fondation Grameen Crédit
Agricole », exclusivement dédiée à la microfinance.

Néanmoins, les IMF non bancaires ont une place centrale dans l’accompagne-
ment des microemprunteurs. Elles se caractérisent par certaines spécificités
prescrites par Yunus en 2007 : souplesse administrative, services de proximité
et vocation sociale (Delaite et Poirot, 2013). Il s’agit d’entités indépendantes
sous forme d’une association ou fondation. Ces institutions mènent des activités
financières autres que les opérations bancaires traditionnelles. Elles visent
des clients particulièrement démunis dont les dossiers ont été généralement
refusés par les banques.

Ces IMF proposent deux types de microcrédits : le microcrédit personnel et


celui professionnel. Le premier, différent du crédit à la consommation, a un
lien avec la réinsertion professionnelle. Il s’est propagé en France depuis 2005,
date à laquelle a lieu la création du Fonds de Cohésion Sociale (FCS). Selon
l’Observatoire de l’inclusion bancaire, 17 000 microcrédits personnels ont été
accordés en 2017. Quant au microcrédit professionnel, il permet de financer
la création (dans 60 % des cas), le rachat ou le renforcement d’une entreprise
dans différents secteurs d’activité. En 2017, il y avait 197 457 prêts dans le
domaine du microcrédit professionnel correspondant à un montant total de
ill2io4n1sm
1 d’euros. Le montant maximal du microcrédit professionnel atteint
les 25 000 euros, mais certaines associations ont des limites plus spécifiques.

72
Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Selon le genre, nous nous intéressons, dans le cadre de ce travail, aux déter-
minants qualitatifs et quantitatifs de la solvabilité des microcrédits profes-
sionnels accordés par les IMF non bancaires en nous nous basons sur le cas
d’Initiative France.

3.2. Le processus d’échantillonnage


Pour tester nos hypothèses de recherche, nous nous sommes basés sur une
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enquête effectuée par la plateforme nationale Initiative France (IF), ancienne-


ment appelée France Initiative Réseau jusqu’en 2012. Il s’agit d’une association
nationale destinée au financement des créateurs et repreneurs d’entreprises.
Son objectif est d’évaluer le projet des entrepreneurs, le financer par un prêt
d’honneur sans intérêts et sans garanties et l’accompagner dans les années
cruciales du démarrage. L’association fonctionne comme un réseau formé par :
d’une part, des bénévoles et leurs partenaires et d’autre part, des entrepre-
neurs qui s’entraident et partagent leurs expériences. L’association regroupe
aujourd’hui 217 plateformes, 17 325 entreprises financées en 2018, avec près
de 960 salariés et 16 600 bénévoles mobilisés.

Notre enquête s’est effectuée au sein de IF auprès de 3 000 bénéficiaires de


microcrédits entre 2009 et 2014. À son issue, un échantillon aléatoire de 970
observations (i.e., 33 % de la population initiale) nous a été fourni par la Direction
Générale après avoir mené une série d’entretiens exploratoires pour nous expli-
quer le fonctionnement de cette institution ainsi que les différentes difficultés
auxquelles elle peut se trouver confrontée, et notamment le problème de la
solvabilité. Dans le but de construire un échantillon homogène, nous avons
éliminé les observations manquantes ainsi que douze observations extrêmes,
ce qui a réduit la taille de l’échantillon à 690 observations.

3.3. La présentation du modèle et les mesures des variables


À partir des informations collectées pour chaque emprunteur, nous avons
défini 13 variables. Parmi ces variables, douze sont indépendantes et une seule
d’entre elles constitue la variable dépendante représentée par la solvabilité
des bénéficiaires de microcrédit. Les variables indépendantes concernant les
caractéristiques individuelles des bénéficiaires de microcrédit sont définies
par le diplôme, la motivation entrepreneuriale, la situation familiale, l’âge et le
genre. Les variables indépendantes liées au projet concernent le secteur, l’ef-
fectif, le projet innovant. Enfin, celles concernant les IMF sont liées aux moyens
alloués et au nombre de mois d’accompagnement. Les détails concernant la
construction de nos variables sont présentés dans le Tableau 1.

Ces variables nous permettent de proposer le modèle suivant :

SOLV = C + β1DIPL + β2MOTIV + β3SITFAM + β4AGE + β5GENR + β6CONSECT


+ β7COMSECT + β8SERSECT + β9EFFE + β10PROIN + β11MOAL + β12MACC + εi

73
N°115 - Février 2020

Tableau 1 – Définitions des variables et de leurs mesures

Variables Définitions Mesure Codage


C’est le remboursement ou non du prêt
par le débiteur. Cette variable prend la
valeur de 1 si le bénéficiaire rembourse la
Solvabilité Nominale SOLV
totalité du prêt ; 0, sinon. Les bénéficiaires
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dont l’insolvabilité est temporaire sont


écartés de notre étude.
Prend la valeur de 1 si le bénéficiaire a
Diplôme obtenu un diplôme inférieur au baccalau- Nominale DIPL
réat ; 0 sinon.
Représente la catégorie socioprofession-
nelle à laquelle appartient le bénéficiaire
Motivation
avant la création du projet. Elle prend la Nominale MOTIV
entrepreneuriale
valeur de 1 si le bénéficiaire est au chô-
mage ; 0 sinon.
Représente la situation familiale des béné-
ficiaires de microcrédit. La variable prend
Situation
la valeur de 1 si le bénéficiaire de micro- Nominale SITFAM
familiale
crédit est célibataire ; 2 en couple (marié
ou pacsé), 3 divorcé ou séparé.
Mesure l’âge des bénéficiaires de
Âge Métrique AGE
microcrédits.
Prend la valeur de 1 si le bénéficiaire de
Genre Nominale GENR
microcrédit est un homme ; 0 sinon.
Représente le secteur d’activité dans le-
Construction quel le bénéficiaire a décidé de créer son
industrie, trans- projet. La variable prend la valeur de 1 si Nominale CONSECT
port et autres le secteur d’activité est la construction,
l’industrie ou le transport ; 0 sinon.
Représente le secteur d’activité dans le-
quel le bénéficiaire a décidé de créer son
Commerce projet. La variable prend la valeur de 1 si Nominale COMSECT
le secteur d’activité est le commerce ; 0
sinon.
Représente le secteur d’activité dans le-
quel le bénéficiaire a décidé de créer son
Services aux
projet. La variable prend la valeur de 1 si
entreprises et Nominale SERSECT
le secteur d’activité est celui des services
ménages
proposés aux ménages et aux entreprises ;
0 sinon.
Mesure le nombre de salariés recrutés par
Effectifs le bénéficiaire de microcrédit après trois Métrique EFFE
ans d’activité.

74
Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Variables Définitions Mesure Codage


La variable prend la valeur de 1 si le projet
Projet innovant est innovant selon le manuel d’Oslo, Nominale PROIN
0 sinon.
Représente les moyens alloués par les
plateformes de IF pour le bénéficiaire de
microcrédit lors de la création du projet.
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Elle prend la valeur de 1 si les moyens


Moyens alloués Ordinale MOAL
alloués sont inférieurs à 20 000 € ; 2 si
les moyens alloués sont compris entre
20 000 € et 40 000 € et 3 si les moyens
alloués sont supérieurs à 40 000 €.
Mesure la durée d’accompagnement par IF. Il
s’agit du temps passé par emprunteur pour
Mois d’accompa-
créer le Business Model du projet. Elle est Métrique MACC
gnement
mesurée par le nombre de mois d’incubation
d’un projet.

4. Résultats

4.1. L’analyse descriptive des résultats

Le but de notre étude est d’identifier les différences selon les genres, entre les
facteurs qui influencent la solvabilité des bénéficiaires de microcrédit. De façon
générale, nous avons détecté, au sein de notre échantillon, l’existence de diffé-
rences entre les hommes et les femmes bénéficiaires de microcrédit en termes
de solvabilité. Le test de Khi-deux, significatif au seuil de 5 %, montre qu’il est
important de scinder notre échantillon en fonction du genre des bénéficiaires
de microcrédit pour définir les différents déterminants de la solvabilité.

Tableau 2 – Les différences entre les hommes et les femmes


en termes de solvabilité

Genre
Femme Homme
Non solvable 104 46,8 % 206 44 %
Solvabilité
Solvable 118 53,2 % 262 56 %
Valeur du test de Khi-deux = 8,205 **
***, **, * : respectivement significatif aux seuils de 1 %, 5 % et 10 %, ns : non
significatif

75
N°115 - Février 2020

Nos résultats descriptifs nous permettent de présenter plusieurs singularités


relatives aux trois catégories de facteurs liés à l’individu, le projet et l’accom-
pagnement offert par IF (voir Tableaux 3 et 4).

4.1.1. Les qualités personnelles des bénéficiaires de microcrédit


féminins et masculins en France
L’analyse descriptive des facteurs liés aux bénéficiaires de microcrédit montre
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du
q ese d2e8m
,7a%
ndeurs de microcrédit sont titulaires de diplômes de l’en -
seignement supérieur. Le nombre de femmes (72,5 %) qui ne disposent pas de
diplômes universitaires est supérieur à celui des bénéficiaires de microcrédit
masculins (70,7 %). Les résultats indiquent que seulement 45,9 % des béné-
ficiaires de microcrédit sont des salariés alors que 54,1 % sont au chômage.
Ce résultat reflète le fait que les bénéficiaires de microcrédit décident majori-
tairement d’entreprendre en raison de facteurs motivationnels de type push.
Cet aspect est caractéristique chez 56 % des hommes et chez seulement 50 %
des femmes bénéficiaires de microcrédit. Notre échantillon présente 41,4 %
de femmes mariées et pacsées et 36,9 % de femmes séparées et divorcées. Ces
chiffres sont plus faibles pour les hommes pour qui le nombre de célibataires
(34,4 %) dépasse celui des femmes (21,6 %).

L’âge moyen des créateurs d’entreprises est de 37 ans (voir Tableau 3). L’analyse
descriptive révèle que l’âge des emprunteurs est supérieur ou égal à 21 ans,
mais qu’il ne dépasse pas 65 ans. Ce résultat est confirmé par l’écart-type
qui s’élève à 8,397. Par ailleurs, il ressort de l’analyse que les femmes bénéfi-
ciaires de microcrédit sont âgées de 21 à 65 ans tandis que les bénéficiaires
de microcrédit masculins sont situés dans une tranche d’âge légèrement plus
réduite (entre 20 et 59 ans). Le Tableau 4 indique que 67,8 % des porteurs de
projets sont masculins. Il n’existe donc pas de parité entre femmes et hommes
en matière d’emprunt de microcrédit au niveau du réseau associatif examiné.

4.1.2. Les caractéristiques des entreprises créées par les bénéficiaires


de microcrédit en France
La plupart des emprunteurs exercent dans le secteur du commerce (37,8 %),
un secteur qui attire davantage les femmes (54,5 %) que les hommes (34,2 %).
Ces derniers sont plus présents dans les secteurs de l’industrie, des transports
et du bâtiment (47,9 %). Par ailleurs, l’entrepreneuriat féminin s’avère ma-
joritaire dans les secteurs liés aux services à la personne (24,9 %). La taille
des entreprises créées (Tableau 3) ne dépasse jamais 13 employés après trois
années d’activité. Les entreprises créées par les femmes (entre 1 et 9 employés)
ont moins d’effectifs que celles des hommes (entre 1 et 13 employés). Tandis
que quelques hommes créent des PME, les femmes se limitent donc au cadre
des TPE. Les résultats descriptifs (Tableau 4) indiquent que les projets sont
dans leur globalité peu innovants (62,2 %), les hommes (61,3 %) faisant dans
ce domaine légèrement mieux que leurs consœurs (64 %).

76
Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Tableau 3 – Analyse descriptive des variables


indépendantes métriques
Variables Moyenne Ecart-type Min Max
Echantillon global ( n = 690)
Mois d’accompagnement 7,01 1,015 1 12
Âge 37,42 8,397 21 65
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Effectif 3,52 3,684 1 13


Echantillon de femmes (n = 222)
Mois d’accompagnement 7,42 3,23 1 12
Âge 36,58 8,81 21 65
Effectif 2,11 1,66 1 9
Echantillon d’hommes (n = 468)
Mois d’accompagnement 6,75 3,16 1 12
Âge 37,82 8,12 20 59
Effectif 3,62 1,55 1 13

4.1.3. Les caractéristiques d’Initiative France


Concernant les facteurs liés à l’institution de microcrédit, il ressort de l’ana-
lyse que les emprunteurs construisent leur Business Model en sept mois. Le
nombre de mois d’accompagnement par IF minimal et maximal montre par
ailleurs qu’existe une faible distinction de genre entre les différents porteurs
de projets. La préparation ex-ante du Business Plan varie d’un mois à un an
tant chez les femmes que chez les hommes. Les montants alloués montrent que
31
d es%
microcrédits sont de faibles montants, ne dépassant pas les 20 000 €.
Certains prêts accordés par IF (31,4 %) sont compris dans l’intervalle [20 000 €
et 40 000 €]. Par ailleurs, seulement 37,5 % des microcrédits sont supérieurs
à 40 000 €. Il est en outre intéressant de noter que l’institution alloue des
montants différents en fonction des caractéristiques du projet, en accordant
des montants plus importants aux femmes (40,1 %) qu’aux hommes (36,3 %).

77
N°115 - Février 2020

Tableau 4 – Analyse descriptive des variables indépendantes


non métriques

Total Femme Homme


Variables (n = 690) (n = 222) (n = 468)
Nombre (Fréquence)
Construction, industrie
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237 (34,3 %) 13 (5,9 %) 224 (47,9 %)


Secteurs et transport
d’activité Commerce 281(37,8 %) 121(54,5 %) 160 (34,2 %)
Services à la personne 172 (24,9 %) 88 (39,6 %) 84 (17,9 %)
Moins de 20 000 € 214 (31 %) 62 (27,9 %) 152 (32,5 %)
Moyens De 20 000 € à moins de
217 (31,4 %) 71 (32 %) 146 (31,2 %)
alloués 40 000 €
Plus de 40 000 € 259 (37,5 %) 89 (40,1 %) 170 (36,3 %)
En activité 317 (45,9 %) 111 (50 %) 206 (44 %)
Motivation
Au chômage 373 (54,1 %) 111 (50 %) 262 (56 %)
Diplôme inférieur au
Diplômes 492 (71,3 %) 161 (72,5) 331(70,7 %)
baccalauréat
Diplôme supérieur au
Diplômes 198 (28,7 %) 61 (27,5) 137 (29,3 %)
baccalauréat
Célibataire 209 (30,3 %) 48 (21,6 %) 161 (34,4 %)
Situation
Marié, pacsé 274 (39,7 %) 92 (41,4 %) 182 (38,9 %)
familiale
Divorcé, séparé 207 (30 %) 82 (36,9 %) 125 (26,7 %)
Projet Projet innovant 261(37,8 %) 80 (36 %) 181 (38,7 %)
innovant Projet non innovant 429 (62,2 %) 142 (64 %) (61,3 %)

4.2. Le test du modèle de régression

Pour tester notre modèle de régression, nous appliquons la méthode de régres-


sion logistique, utilisée également dans les recherches précédentes (Trabelsi
et Chichti, 2011). Cette méthode permet de prédire les valeurs prises par une
variable discrète, le plus souvent qualitative, à partir d’une série de variables
indépendantes qualitatives ou quantitatives. Les coefficients estimés par le
modèle logistique représentent la force de l’association entre la solvabilité
des emprunteurs et les trois catégories de facteurs.

Avant de tester le modèle de régression, une analyse de corrélation s’impose


pour vérifier l’absence de corrélation entre les variables indépendantes (Tableau
5). En examinant la matrice de corrélation de Spearman et en palliant les pro-
blèmes de multicolinéarité qui pourraient survenir entre certaines variables
indépendantes, qui concernent surtout dans notre cas les variables liées aux
secteurs d’activité, nous proposons trois modèles de régression distincts par
secteur d’activité.

78
Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Tableau 5 – Matrice de corrélation de Spearman


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79
N°115 - Février 2020

Nous avons ainsi trois modèles de régression : un modèle qui concerne la solva-
bilité de la totalité de l’échantillon (n = 690), le deuxième qui ne concerne que
la solvabilité des femmes bénéficiaires de microcrédit (n = 222) et un troisième
modèle qui, lui, est lié à la solvabilité des hommes bénéficiaires de microcrédit
(n = 468). À chaque fois, ces modèles sont scindés en trois sous-modèles cor-
respondant aux trois secteurs d’activité considérés, à savoir la construction,
l’industrie et le transport d’une part, le commerce d’autre part et enfin les
services. Les résultats de nos régressions sont résumés dans le Tableau 6.
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Les tests de spécification des modèles, Khi-deux, compris entre 15,006 (p≤0.10)
et 22,932 (p≤0.01), montrent que la relation entre la solvabilité des emprunteurs
de microcrédits et ses déterminants est interprétable. La valeur du pseudo R²
montre une variance expliquée réduite des caractéristiques de la solvabilité. Elle
est comprise entre 32,7 % et 33,4 % pour la totalité de l’échantillon (n = 690).
Néanmoins, le pouvoir explicatif de la solvabilité est plus élevé chez les femmes
(entre 25,1 % et 27,1 %) que chez les hommes (entre 22 % et 24,7 %).

Les résultats indiquent que notre première hypothèse (H1) est en partie validée.
Nous pouvons observer à quel point le diplôme est déterminant, tant pour les
hommes que pour les femmes, pour assurer leur solvabilité. La motivation, à
l’origine du démarrage d’un projet entrepreneurial, joue un rôle important
pour pallier le défaut de solvabilité plus spécialement chez les hommes. Côté
féminin, c’est la situation familiale qui exerce un impact significatif sur la sol-
vabilité des emprunteuses. En revanche, l’âge n’a pas un impact significatif
sur la solvabilité.

Tableau 6 – Résultats des régressions


Solvabilité globale Solvabilité chez les femmes Solvabilité chez les hommes
(n = 690) (n = 222) (n = 468)
Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle
1 2 3 1 2 3 1 2 3
Constante 0,684ns 0,463ns 0,241ns 0,542ns 0,345ns -0,880ns 1,310ns 1,52ns 1,34ns
DIPL 0,588** 0,616** 0,523** 0,342*** 0,435*** 0,463*** 0,650 *** 0,749*** 0,608***
MOTIV 0,134* 0,259** 0,187* 0,068ns 0,054ns 0,036ns 0,016** 0,087** 0,076ns
SITFAM -0,350ns -0,411ns 0,407ns 0,634** 0, 556** 0, 632** 0,334ns 0,345ns 0,312ns
AGE -0,002 ns
-0,038 ns
-0,001 ns
-0,018 ns
-0,015 ns
-0,020 ns
-0,015 ns
-0,011 ns
-0,009ns
GENR 0,110*** 0,142*** 0,134* ---- ---- ---- ---- ---- ----
CONSECT 0,618** ---- ---- -0,383ns ---- ---- 0,293*** ---- ----
COMSECT ---- 0,071ns ---- ---- 0,361* ---- ---- 0,231ns ----
SERSECT ---- ---- 0,282ns ---- ---- -0,420ns ---- ---- -0,341ns
EFFE -0,042ns -0,018ns -0,197ns -0,034ns -0,015ns -0,056ns 0,062ns 0,055ns 0,065ns
PROIN 0,868*** 0,878*** 0,875*** 0,251*** 0,209*** 0,310*** -0,109ns 0,120ns 0,101***
MOAL 0,760** 0,925*** 0,795*** 0,578* 0,432* 0,657* 0,367*** 0,271*** 0,322***
MACC 0,024*** 0,014* 0,036** 0,131** 0,267* 0,223** 0,318** 0,114 ns 0,331*
Test spé-
cification 22,932*** 20,452*** 20,932*** 18,142*** 17,834*** 18,032*** 15,006* 16,397 ** 19,199***
Khi-deux

80
Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Solvabilité globale Solvabilité chez les femmes Solvabilité chez les hommes
(n = 690) (n = 222) (n = 468)
Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle Modèle
1 2 3 1 2 3 1 2 3
Pseudo-R²
0,336 0,344 0,327 0,271 0,267 0,251 0,237 0,22 0,247
R2
Classement 64,40 % 65,10 % 56,30 % 61,40 % 60,70 % 60,30 % 54,80 % 55,70 % 56,30 %

***, **, * : respectivement significatif aux seuils de 1 %, 5 % et 10 %, ns : non significatif.


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DIPL désigne le diplôme ; MOTIV désigne la motivation entrepreneuriale ; SITFAM désigne la situation
familiale ; AGE désigne l’âge ; GENR désigne le genre du bénéficiaire de microcrédit ; CONSECT désigne
le secteur de construction, transports, industriel et autres ; COMSECT désigne le secteur commercial ;
SERSECT désigne le secteur de services à la personne ; EFFE désigne l’effectif ; PROINN désigne le projet
innovant ; MOAL désigne les moyens alloués et MACC désigne la durée d’accompagnement.

En ce qui concerne notre deuxième hypothèse (H2), nos résultats démontrent


que la solvabilité est impactée par le secteur et par le degré d’innovation du
projet entrepreneurial. Nos résultats montrent que les projets lancés dans le
domaine commercial influencent la solvabilité chez les femmes, alors que les
projets initiés dans le secteur de la construction, de l’industrie et du transport
affectent la solvabilité chez les hommes. En outre, en comparaison avec les
projets lancés par les hommes, nous observons que les projets innovants lancés
par les femmes dans les secteurs de la construction, de l’industrie, du transport
et du commerce influencent de façon significative la solvabilité.

Notre troisième hypothèse (H3) n’est pas validée du fait d’absence de diffé-
rences entre les hommes et les femmes en termes de solvabilité déterminée par
les caractéristiques de l’IMF. En revanche, les moyens alloués par l’institution
de microcrédit ainsi que le nombre de mois d’accompagnement déterminent
de façon significative ladite solvabilité. Nos résultats sont résumés dans le
Tableau 6 et discutés dans la section suivante.

5. Discussion et conclusion

L’objectif de cet article est d’analyser les différences selon les genres, entre
les facteurs qui impactent la solvabilité des bénéficiaires de microcrédit. Nous
nous sommes focalisés sur trois catégories de facteurs qui peuvent affecter la
solvabilité et qui sont liées au bénéficiaire de microcrédit, à son projet et à l’IMF.

Nos résultats montrent de façon générale qu’existe un certain nombre de dif-


férences entre les bénéficiaires de microcrédit hommes et femmes sur le plan
de leur solvabilité (voir Tableau 6).

Du côté de la population féminine en France, c’est au niveau de la situation


familiale des bénéficiaires de microcrédit qu’il faut rechercher en premier les
facteurs de leur solvabilité. Nos résultats montrent que la situation familiale
influence positivement leur solvabilité. En effet, la situation familiale en France
constitue une motivation importante lors du démarrage de l’activité, mais se

81
N°115 - Février 2020

révèle aussi capitale pour la bonne gestion de celle-ci (Constantinidis et al.,


2006). Si nous analysons de plus près nos résultats, nous distinguons que les
femmes divorcées sont plus solvables. Bien souvent, les femmes divorcées ont la
garde des enfants et donc cette responsabilité essentielle encourage les femmes
à être d’autant plus fiables, donc solvables, sur les projets de microcrédit. Ce
point est à rapprocher de l’ensemble des facteurs relatifs à la solvabilité des
bénéficiaires de microcrédit dans le monde car il est bien connu que dans les
pays en voie de développement et pour les mêmes raisons, les femmes sont
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plus solvables que les hommes (Montalieu, 2002). Ces résultats sont confortés
par la littérature (Lynch, 2003) qui montre que les femmes divorcées, du fait
d’une plus grande autonomie, peuvent mener à bien leur projet. De plus, le
divorce pousse la femme à entreprendre.

Toujours du côté de la gente féminine, les projets portés par les femmes en
France se révèlent souvent plus solvables dans le domaine du commerce. Ces
résultats confirment les conclusions des études précédentes dans les pays en
développement qui remarquent que les femmes bénéficiaires de microcrédit
se lancent plutôt dans des domaines comme la santé, le commerce et l’ensei-
gnement (Ekpe et al., 2011). Dans ces secteurs, les femmes semblent pouvoir
s’adapter plus facilement, en développant les compétences nécessaires à la
réussite de leur activité (Ekpe et al., 2011). Le degré d’innovation du projet
influence aussi de façon significative la solvabilité notamment chez les femmes
bénéficiaires de microcrédit en France. Ce résultat est en accord avec ce qui a
été mis en avant par les études précédentes, en montrant que les femmes sont
plus innovantes que les hommes et qu’elles ont un goût du risque plus prononcé
(St Cyr, 2002 ; Robb and Wolken, 2002). Ce résultat s’ajoute à une série d’études
attestant d’un lien entre l’innovation et la réussite entrepreneuriale (Haddad,
2013). La contrepartie, relevée au travers de plusieurs études, réside en cela
que les projets innovants sont source de risques accrus, comme par exemple
le risque technologique, lié à l’acceptation de l’innovation sur le marché en
raison de son degré de nouveauté ou encore le risque commercial, lié, lui, au
lancement d’un produit/service innovant sur le marché et qui peut se heurter
à une adoption limitée des clients ou à une forte concurrence (Asli, 2013).
En outre, un projet innovant demande souvent davantage de ressources, une
meilleure connaissance vis-à-vis des nouvelles technologies et des difficultés
pour développer et commercialiser le produit (Haddad, 2013). Cependant,
Guérin et al. (2007) remarquent entre autres que les projets innovants au sein
du domaine de la microfinance restent assez limités.

Concernant les hommes, nos résultats montrent qu’en France les facteurs
motivationnels de type push déterminent assez fortement leur solvabilité. Ce
facteur n’est, en revanche, pas significatif chez leurs homologues féminines.
Ces données confirment les conclusions des recherches précédentes, attestant
des différences entre hommes et femmes, les premiers étant motivés princi-
palement par des facteurs de type push tandis que les secondes sont plutôt
animées par des facteurs motivationnels de type pull (Giacomin et al., 2011 ;
Hughes, 2003 ; Buttner et Moore, 1997). Les facteurs motivationnels de type

82
Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

push sont responsables d’une activité entrepreneuriale dite « de nécessité »


(Giacomin et al., 2011). Le fait d’être au chômage, comme c’est le cas pour la
majorité des hommes de notre échantillon, semble les pousser davantage que
les femmes à démarrer une activité entrepreneuriale. Ces données corroborent
les résultats d’études antérieures qui lient clairement précarité de l’emploi et
entrepreneuriat de nécessité (Giacomin et al., 2011).

A contrario des femmes, les hommes se révèlent en France plus solvables dans
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les domaines de la construction, de l’industrie et du transport. En effet, les


statistiques communiquées par le Baromètre des Femmes Entrepreneures,
élaboré par la Caisse d’Epargne (2012), font ressortir que les hommes initient
majoritairement leurs projets dans les domaines liés à l’industrie. La même
enquête montre que les femmes et les hommes initient des activités entrepre-
neuriales qui sont en accord avec leurs représentations du genre. En effet, les
hommes cherchent à s’identifier encore à des métiers plutôt spécifiques au
domaine industriel, de la construction et du transport, métiers encore marqués
par une forte présence masculine (Gollac et Volkoff, 2002). Par exemple, dans
le rapport de l’INSEE « Les entreprises en France » (2011) (Bacheré, 2011)
sur les chiffres-clés des secteurs, nous pouvons constater que la construction
demeure un domaine d’activité très promoteur, en termes de valeur ajoutée,
offrant ainsi des opportunités qui facilitent la solvabilité des bénéficiaires de
microcrédit.
Plusieurs facteurs influencent de façon similaire la solvabilité des hommes et
des femmes bénéficiaires de microcrédit. Nous avons observé en France que
le diplôme joue un rôle fondamental dans la solvabilité, tant pour les hommes
que pour les femmes. En effet, les études précédentes ont déjà attesté de l’im-
portance du niveau scolaire pour le démarrage de l’activité entrepreneuriale
(Constantinidis et al., 2006). Les travaux antérieurs démontrent également que
ce même niveau scolaire est déterminant en ce qui concerne la connaissance
et la compréhension des entrepreneurs concernant l’accès et le rembourse-
ment du microcrédit (Nkamnebe, 2008 ; Anyanwu, 2004). De façon similaire,
Bhola et al. (2006) indiquent dans leur étude que les personnes ayant un faible
niveau de diplôme rencontrent davantage de difficultés à trouver un travail
ou sont moins enclines à se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Ismail
et al. (2012), de leurs côtés, précisent que l’éducation est essentielle dans le
développement du projet entrepreneurial.

Le montant alloué et l’accompagnement offert par les IMF, notamment par IF,
affectent, eux, de façon positive la solvabilité du bénéficiaire de microcrédit.
Ces résultats confirment les constats des études précédentes qui montrent qu’il
existe un lien entre l’accompagnement dispensé par les IMF et la réussite du
projet. Par contre, nous remarquons dans notre échantillon, que les femmes
ont eu accès à des montants plus élevés de microcrédits ; elles ont aussi béné-
ficié de plus de temps d’accompagnement (voir Tableaux 1 et 2). Ces résultats
confirment ainsi les recherches précédentes dans les pays en développement
qui indiquent que les IMF préfèrent la clientèle féminine et tendent à créer

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N°115 - Février 2020

des programmes plus spécifiques pour les besoins des femmes bénéficiaires
de microcrédit (Montalieu, 2002 ; Guérin et al., 2009 ; D’espallier et al., 2011).

Nous avons observé que l’âge et la taille du projet n’affectent pas la solvabilité
des bénéficiaires de microcrédit.

Notre article apporte des contributions tant sur le plan théorique que managé-
rial. Sur le plan théorique, nous apportons des compléments dans le cadre de
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la littérature liée au microcrédit et les différences liées au genre concernant la


solvabilité de l’emprunteur, notamment en France. En effet, plusieurs études
précédentes ont mis en avant les facteurs qui bloquent l’accès au financement et
les différences entre les hommes et les femmes face aux organismes financeurs
(Constantindis et al., 2006 ; Robb et Wolken, 2002). D’autres recherches, qui
ont traité la problématique de la solvabilité, se sont focalisées sur des facteurs
explicatifs de nature quantitative (Berger et Udell, 2002 ; Trabelsi et Chichti,
2011). Certains travaux avaient aussi examiné la solvabilité des femmes bé-
néficiaires de microcrédit, soit de façon théorique, soit de manière empirique,
mais sans prendre en compte l’ensemble des facteurs considérés dans notre
étude et les différences avec leurs homologues masculins (Montalieu, 2002 ;
Guérin et al., 2009 ; D’espallier et al., 2011). En comparaison, notre recherche
englobe tant les facteurs quantitatifs que qualitatifs pour expliquer la solvabilité
des femmes bénéficiaires de microcrédit et les différences avec les hommes
bénéficiaires de microcrédit.

Nos résultats complètent aussi la littérature sur l’échec entrepreneurial qui


se traduit, selon l’approche fondée sur les ressources, par une carence des
ressources qui empêche la mise en œuvre par les entreprises de leur straté-
gie (Smida et Khelil, 2010 ). Cela génère une défaillance économique de l’en-
treprise reflétée surtout par des situations d’insolvabilité (Shepherd, 2003 ;
Mellahi et Wilkinson, 2004 ; Smida et Khelil, 2010 ; Khelil et al., 2012). En
détaillant un certain nombre de facteurs expliquant la solvabilité des béné-
ficiaires de microcrédit, nous ajoutons des éléments de compréhension de
l’échec des remboursements du microcrédit (Guérin et al., 2009 ; D’espallier
et al., 2011). En outre, nous apportons une approche liée au genre plus spé-
cifique, en mettant en avant les facteurs qui peuvent être à la base de l’échec
féminin et masculin en matière de solvabilité. Notre recherche apporte aussi
une contribution empirique en montrant les particularités du microcrédit en
France alors que la majorité des études précédentes se sont focalisées sur les
pays en voie de développement (Guérin et al., 2009 ; D’espallier et al., 2011).

Notre étude a des implications managériales tant pour les responsables des
institutions de microcrédit que pour les bénéficiaires de ce type de financement.
Nos résultats peuvent encourager les femmes bénéficiaires à se lancer dans
l’aventure entrepreneuriale, les IMF ayant déjà tendance, comme nous l’avons
évoqué, à privilégier la clientèle féminine (Guérin et al., 2009 ; D’espallier et al.,
2011). Pour les responsables des IMF, plusieurs actions sont à mettre en place
pour pallier les problèmes liés au défaut de remboursement de leurs clients.

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Microcrédit en France : femmes et hommes face à la solvabilité

Nous avons identifié et détaillé plusieurs facteurs responsables de la solvabilité


liés aux bénéficiaires de microcrédit, au projet lui-même et à la nature de l’IMF.
Il pourrait ainsi se révéler intéressant pour les IMF de systématiser la mise en
place des programmes de sélection des futures bénéficiaires de microcrédit
basés non seulement sur des méthodes quantitatives, mais aussi sur l’analyse
des facteurs plus qualitatifs liés à l’individu et son projet (Berger et Udell,
2002). Par exemple, les représentants des IMF doivent davantage s’entretenir
avec le bénéficiaire sur son niveau scolaire, sa motivation pour démarrer une
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activité entrepreneuriale, sa situation familiale, mais également sur la nature


de son projet, en demandant des détails sur le secteur d’activité et le degré
d’innovation de celui-ci. En exploitant ces détails, les IMF pourraient bâtir des
programmes d’accompagnement plus adaptés aux besoins des bénéficiaires.

Notre recherche est toutefois limitée en cela notamment que nous nous sommes
focalisés sur le cas de IF. D’autres études qui porteraient sur plusieurs IMF en
France sont en effet nécessaires, afin de détailler les facteurs restreignant la
solvabilité des bénéficiaires masculins et féminins de microcrédit. De même,
la base de données qui a servi à nos analyses ayant été collectée par le biais
de IF, nous nous sommes limités aux traitements statistiques de ces seules va-
riables. D’autres variables pourraient être étudiées dans le cadre de recherches
futures, comme par exemple, l’aversion face aux risques des bénéficiaires de
microcrédit ou la structure organisationnelle propre au projet entrepreneurial
(Constantinidis et al., 2006). Ces limites établies, notre recherche affine l’image
du phénomène du microcrédit en France et met en avant surtout les facteurs qui
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